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lAlMf 1 TOUI
EN LATIN ET EN FRANCAIS.
TOME XXIII.
IMPniMFRIE DE E. D13VERGEB ,
rue tie Verneuil, n" 4.
SAINTE BIBLE
EN LATIN ET EN FRANCAIS,
DES NOTES LITTERAIRES, CRITIQUES ET HISTORIQOES, DES PREFACES ET
DES DISSERTATIONS, TIREES DU COMMENTAIRE DE DOM CAtMET ,
ABBE DE SENONES , DE l'aBBE DE VENCE , ET DES AUTRES ACTETTRS
LES PLUS CELEBRES, POCR FACII.1TER t'lNTELLIGENCE DE l'eCRITTJRE
saihte;
(Bnrif l)if Ir'un :^tUi6 rt tfi Cartas ^h$tap\)iqnes.
GINQUIEME ilDITION,
SOICKSUSEMBKT BEVCE, ET ACGMENTEE d'cK CRAKD NOMBRE DS HOTES
PAR M. DRACH , RABBIN COKVEBTI ,
ET E>r.lCHIE DE ROUVEtLES DISSEBTATIORS.
TOME VINGT-TROISliME.
PARIS,
MiQUIGNON-HAVARD , LIBRAIRE ,
RUE DES 8AI>"TS-PEBES. >" 10.
BRUXELLES ,
MEMB MAISOK , HCE DE LA CBAXCELLERIE
.1830.
iJUL 2 ^ iS37
SAINTE BIBLE.
PREFACE
SUR LA PREMIERE EPITRE
AUX THESSALONICIENS.
I «EssALONiQUE etoit la capitale de \a Macedoinc. Saint Qu^'s etoicnt
Paul ayant ete appele de Dieu pour pr^cher dans cette pro- 'cs Thessalo-
vince ' , vint d'abord a Philippes , ou il precha d'abord ceue?p",tre"
rEvangilc. Oblige de sortir de cette ville , il passa par est adressee.
Ainphipolis , par Apollouie , et vint a Thessalonique , ou Quelle fut
il y avoit une synagogue de Juifs ^. 11 avoit alors avec lui •^'•^s,'®^"^
Silas , et peut-etre Timothee. 11 entra dans la synagogue , quel en est '
et parla aux Juifs durant trois jours de sabbat. Quelques- lesujet.
unscrurent, et se joignirentalui, comme aussiune grande
multitude de Grecs craignant Dieu , et plusieurs femmes
de qualite. Mais ceux d'cntre les Juifs qui etoient demeu-
res dans I'incrednlite exciterent du turaulte , et vinrent
pour forcer la maison de Jason , chez qui Paul et Silas
s'etoient retires. Ne les ayant point trouves, ils trainerent
Jason et que!ques-uns des freres devant les magistrats , les
accusant de troubler le peuple, et d'etre rebelles a Cesar.
Jason et les autres donnerent caution, et les magistrats
les laisserent aller, Des la nuit suivante, les freres con -
duisirent hors de la ville Paul et Silas pour aller a Beree.
BientAt apres, les Juifs de Thessalonique apprirent que
Paul pr^choit a Beree, el ils y vinrent emouvoir le peuple.
Les freres se haterenl de faire sortir Paul , et le conduisi-
rent par mer jusqu'a Atbenes, ou ils le quittdrent, apres
• Jet. XM. 9. elseqq — ^ Act. ivii. i. el %eq(i.
23. ,
avoir recu ordre tie iui dc dire a Silas et a Timothee, qui
etoient restes a Beree , qu'ils vinssent le troiiver au plus
tot. 11 paroit que Timothee fut le seul qui vint I'y trouver ;
car , par cetle epitre meme , nous apprenons que Paul
ayant su , apparemment par ce disciple , la persecution a
laquelle les fideles de Thessalonique avoient ete exposes ,
resolut de denieurer seul a Athenes , et de leur envoyer
Timothee \ afin qu'il reconnut I'etat de leur E^lise, et
qu'il les exhortat a dcmeurer fermes dans la foi. Pendant
le voyage de cc disciple , Paul sortit d' Athenes, et vint a
Corinthe^. Timothee s'etant acquitte de sa commission ,
partit de Macedoine avec Silas , avec lequel il revint
trouver I'Apotrc a Corinthe^. L'arrivee de Timothee con-
sola beaucoup Paul par le temoignage que ce disciple Iui
rendit de la ferveur des fideles de Thessalonique. Ce fut
alors que I'Apotre leur ecrivit cetle lettre pour les con-
gratuler, et les exhorter a demeurer fermes dans la foi
rnalgre tous les maux qu'on leur faisoit souffrir : il y joi-
gnoit aussi quelques avis conformes a leurs besoins, selon
ce qu'il avoitappris apparemment dela bouche de Timo-
thee.
Analyse de Saint Paul commence cette lettre par le salut ordi-
cciie epitre. naire (chap, i), ou il est remarquable qu'il lie prend
point la qualile d'apotre^, peut-etre pour ne point se
mettre par-la au-dessus de Silas et de Timothee qu'il s'as-
socie , ou pUitot parce que son apostoiat etoit assez re-
connu des Thessaloniciens , et n'etoit point conteste chez
eux ; car il en use de meme en ecrivant aux Phiiippiens ,
sans doule par la meme raison : et au contraire il prend la
quaUte d'apoJre dans I'epitre aux Colossiens et dans la sc-
conde aux Corinthiens, quoique dans Tune et dans I'autre
il s'associe Timothee, parce que son apostoiat etoitconteste
a Corinthe , et qu'il ne I'avoit point exerce a Colosse. II
'temoigne aux Thessaloniciens que sans cesse il rend
graces a Dieu pour eux tous , se souvenant toujours d'eux
clans ses prieres , et se representantles oeuvres de leur foi,
les travaux de leur charite et la fermele de leur cspe-
rancc '. 11 reconnoit que tout cela est Teffet de I'ajuour
que Dieu a pour eux , et du choix qu'il a fait d'eux *". 11
' I. T%ess. III. r. etscqq. -^ ^ jdci. XVIII. I. — " Act. xvtii. 5. — * -j- r.
'?f 2 . — ^ -f 1. et'i. — '' y 4- Scieiiies, fratres dilcciia Deo, electivneni vcs-
imin ; quia E\'angeliiini nosirum, clc.
SLR LA l'"*tplTnE ALX TIltSSALOMClENS. 3
sp rappellcde quelle manierc Dieuafaiteclatersureuxson
choix el son amour, non-sculement en leur faisant an-
noncer la parole de I'Evangile par lui et par ses collcgues,
inais en I'accompaijnant de miracles, de dons spirituels,
enfin d'une pleine et enticre persuasion ; trois circonslances
qui ont caraclerise le ministere que lui et ses coUegues ont
«xe'rce parmi eux *. Autre marque de I'amour et du
choix de Dieu , le zele avec lequel ils sont devenus les
imitaleursde Jesus-Christ etde ses disciples , ayant recula
parole de I'Evangile au milieu meme des grandes tribula-
tions qui ont ele les suites , et ayant conserve au milieu de
ces tribulations memes une joie sainte que I'Esprit de Dieu
repandoit en eux, en sorte qu'ils ont servi de modcle a
tous ceux qui ont embrasse la foi dans la Maccdoine et
dans TAchaie ^. Car encore que I'Evangile eut d'abord
ete preche a Philippes, ses progres neanmoins ne furent
pas si considerables en cette ville que dans Thessaionique,
ou il fut recu avec tant d'eclat , que le bruit s'en re pandit
de tous cotes, de maniere que partout, sans que I'Apotre
fut oblige d'en parler , on lui racontait a lui-memc le succes
de sa predication chez eux^, et les caracteres essentiels
de leur solide conversion , qui sont d'avoir abandonne le
culle desidoles , de s'etre appliques a servir le Dieuvivant
et veritable, et de vivre dans I'altente du glorieux avene-
ment de Jesus-Christ*.
L'Apotre les prend eux-raemes a temoin de la verite de
ce qu'il vieut de dire (chap, ii), et leur fait remarquer
qu'ils savent eux-memes que son entree chez eux n'a pas
ete vaine et sans fruit ^. Les succes de son ministere au
milieu d'eux sont pour eux un motif de perseverer dans la
foi qu'il leur a prechee. Autre motif, la conduite meme
qu'il a tenue en exercant au milieu d'eux son ministere. II
leur rappelle done qu'il avoit deja beaucoup souffert dans
Philippes lorsqu'il vint a eux; que malgre ces tribulations,
mettant sa confiance en Dieu , il leur precha hardiment
I'Evangile parmi beaucoup de nouveaux combats''; qu'il
ne leur a point preche une doctrine d'erreur ou d'impu-
rete, et qu'il n'a point eu dessein de les tromper ' ; que
choisi de Di^u pour precher I'Evangile , il ne cherche
point a plaire aux hommes , mais seulement a Dieu^;
*T3. — - y O.et 7. — 5 y 8. etg. — * y 9. et 10. — *v r. — * ^ 2. — 'i 3.
*f 4.
rRKFACE
qn'aiiisi i! n'a point use de flalleric en Icur prechant line
tiocirine favorable a leurs erreurs oua leurs vices; qu'ilnc
s'esl point servi artificieusenient de son ministcre dans des
vucs d'avarice , et pour leur ravir leur bien ; cjii'il n'a aussi
recherche aucune gloire de la part des hommes , ni d'eu.v
ni des autres ^ Sur quoi il leur fait remarquer qu'en
qnaliie d'apolre de Jesus-Christ il pouvoit les charger de
sa subsistance ^. Mais nc voulant point user de ses droits
a leur cgard , il s'est conduit parmi eux comme une mere
tendre avec ses enfans; et loind'exiger rien d'eux, il au-
roit souhaite de leur donner sa vie meme , tant il les
aimoit ^. 11 leur rappelle les peines qu'il avoit souffertes
en leur prechantrEvangile ,travaillant meme de ses mains
jour et nuit pour nc point leur etre a charge "*. 11 les
prend a temoin de la conduite sainte , juste et irrepro-
chable qu'il a tenue envers eu\ , agissantavec eux comme
un pere avec ses enfans, les exhortant, les consolant, les
conjurant de se conduire d'une manicre digne de Dieu ,
qui les a appeles a son royaume et a sa gloire ^. Ceci lui
donne lieu de leur donner de nouvelles marques de son
affection. Il leur temoigne done qu'il rend a Dieu de con'
tinuelles actions de graces de ce qu'ayant entendu la pa-
role de Dieu qu'il leur a pr^chee , ils Tont recue comme
etant , ainsi qu'elle Test veritablement , la parole de Dieu
qui agit efficacement en eux *". II prouve cette operation
de Dieu par cette foi qui les a soulenus au milieu des
persecutions : il leur fait remarquer qu'ils sont ainsi de^
venus les imitateurs des Eglises de Judee , ayant souffert
de la part de leurs concitoyens ce que ces Eglises ont
souffert de la part des Juifs^ II caracterise ici I'inlidelite
des Juifs incredules qui ont tue meme le Seigneur Jesus ,
et qui apres avoir fait mourir les prophetes , ont encore
persecute les apotres et leurs disciples : ces hommes en-
durcis et pervers ne plaisent point a Dieu , et ils sont en-
nemis des hommes, ayant mis le comble a la mesure de
leurs pcches en voulant empecher les ap6tres d'annoncer
aux gentils la parole qui doit les sauver ^ II ajoute que
la colere de Dieu est deja tombee sur eux^, parce que
I'aveuglement meme auquel ilsavoient ete justenient aban^
»f 5.ci6.— V :._— ')^ t.clZ.- V 9-— '>^ lo.ii.—^ i^.—T4 14.
— '^ i i.5.et i6.. — ' y lO. Pavenii (gr. f^Oa^s, pravenit) ira Dei super
I Los.
SI li LA l" EPURK AL.V 1 llESSALOMCIETJS. 5
doiines ctoit dejaun effet de la colcre de Dieu sur eux'.
Va il dit que cette colere demeurera sur eux jusqu'a la
fin^ , parce que (corame le reconnoit toute la tradiiion ,
ot comme nous I'avons prouve par le temoignage des pro-
phetes, des apotres , et de Jesus-Christ nienie) I'aveugle-
ment qui est tombe sur une partie dlsrafil des le temps des
ap6tres, demeurera sur eux jusqu'a la fin des siecles^ ,
c'est-a-dire jusqu'a ce qu'alors la plenitude des nations
elant entree dans I'Eglise , tout Israel sera sauve *, etant
alors relabli sur sapropre tige. L'Apotre continue de te-
moigner aux Thessaloniciens son affection ; il leur marque
que separe deux de corps , non de ccEur , il avait desire
avec beaucoup d'ardeur de les revoir , et que plus d'une
fois il avoit forme le dessein de retourncr chez eux , mais
que Satan Ten avoit empeche par les obstacles qu'il lui
avoit suscites^. Le motif de ce desir qu'il avoit eu, e'est
qu'il regarde leur affermissement dans la foi corame le
sujet de son esperance, et comme le fondement de sa joie
et de sa gloire devant Jesus-Christ au jour de son avene-
ment*" ; nouveau motif pour eux de perse verer dans cette
foi qui doit etre aussi pour eux, comme pour leur apotre ,
le fondement de leur esperance.
SaintPaul ajoute que voyant toujours ainsi de nouveaux
obstacles qui I'arretoient , et ne pouvant cependant sou-
tenir plus long-temps de n'avoir point de leurs nouvelles
(chap, ill) J il avoit mieux aime demeurer seul a Athenes
en leur envoyant Timothee, afin que les fortifiant et les
exhortant a demeurer fermes dans la foi , il put ainsi con-
tribuer a empecher que personne ne fiit ebranle par les
persecutions qu'ils eprouvoient , et qu'il eprouvoit uussi
iui-meme '. Il leur represente qu'ils savent eux-memes
que c'est a cela que sont destines ceux qui exercent le
rainislere apostolique^. Il leur rappelle que des le temps
ou il etoit parmi eux , il leur avoit predit qu'il auroit des
^ Rom.xi. ",. etseqq. Ceieri exceecad sunt , sicut scn'puim est: Dcdit
litis De us spirhum compuncuonis, oculos ut nonvideant, etc 2 5. Cce-
citas ex pane coniigil in Israel. — * y 17. U^que in finem. — ^ C'est I'ex -
pression du P. Mauduit sur ce texte radme ; c'est la penst'-e de D.Calmet.Vojez
ce qui est ditsur cela dans \^ preface sur Mahchie, torn, xvii, et dans la Dis-
sertalion sur les signes de la mine deJerusalem etdu dernier aven^mentde
Jesus-Clirisi, torn. six. — * Rom. xi. 25. et 26. Ccecitas ex parte contigilin
Israel donee pic niindo gentium inti-aret,et sic omnis Israel salvus Jicret. —
' jr 1 7 . t/ I •'? . — " y 1 9. adjinem.—' j i . 3. — ' y 3.
6 PKEFACK
persecutions a soufTrir , conime cela est arrive *. H repute
que lie pouvant attendre , il leur avoit envoye Timolhee
pour reconnoitre I'ctat de leur foi ^. 11 ajoute que Timo-
thee etant revenu , et lui ayant rendu un si bon te-
moignage de leur foi et de leur charile , du souvenir qu'ils
conservoient delui, et du desir qu'ils avoient de le re-
voir, il a ete console dans tous ses maux, moins cependant
par leur affection que par leur foi qui etoit elie-ineme
Je principe de leur affection^. II leur declare que c'est
lui donner la vie , que de lui apprendre qu'ils demeurenfc
fermes dans le Seigneur. II temoigne qu'il ne sait quelles
assez dignes actions de graces ilpourra rendre aDieu pour
la joie qu'ils ressent devant Dieu a cause d'eux ^. II leur
marque qu'il se sent porte a deraandcr a Dieu avec encore
plus d'ardeur de pouvoir aller les voir , afin d'ajouter ce
qui pent manquer encore a leur foi ^. Et dans le moment
lYieme il exprime son desir , et demande que Dieu notre
Pere et Jesus-Christ notre Seigneur daigne lui ouvrir une
voie favorable pour aller chez eux*. A ec premier sou-
hait il en ajoute un second : il demande que le Seigneur
les fasse (Goitre de plus en plus dans la charite les uns en-
vers les autres et meme envers tous , et qu'il affermisse
leurs coeurs dans la saintete en les rendant irreprochables
devant Dieu, et dignes dc paroitre avec confiance devant
lui au jour oii Jesus-Christ notre Seigueur paroltra avec
tous ses saints '' , c'est-a-dire avec tous ses anges , et tous
les elus parmi les hommes.
L'Apotre emploie le reste de cette epitre a donner aux
Thessaloniciens des instructions proportionnees a leurs
besoins. Et d'abord il les conjure en general (chap, iv) de
se conduire selon les preceptes qu'il leur avoit donnes de
la part de Jesus-Christ^. II leur recommande parlicu-
lierement de se garder de loute irapurete ^, de s'avancer
de plus en plus dans I'exercice de la charite fraternelle '**,
et de s'appliqucr au travail^'. II vient ensuite aux mo-
^-^ 4.-2 V- 5. — '-jJfi. el-]. — * -jJ-S. et 9. — * y 10.— "-jj- 11. — '' i 12. Car
tel est ici le sens f?e5 jamts .• les saints anges, et les fldeles qui composent
I'Eglise triomphanle : p.EToc tmv a-i'Jwv auTou.Comparez u ceci le textede saint
Mallhleu, XVI. 27 ; Fi'lhis cm'm hominis ventur'us est in gloria I'atris sui
cum angelis suis ; ou selon saint Marc, vui. 38 , cum angelis Sanctis. Et
encore dans saint Mallhleu, xxv. 3i : Cum venerit Filiis liominis in maje-
^lale sua, etomnes angelicum eo. Et sainlPaul meme dans la seconde epitre
aux ThessalonicienSj i. 'j : In irvelatione Domini Jesibde ccelo, cum angelis.
virtutis cj us . — " -^ i. eti. — '-jJ^S.-S. — '''g. efro. — "y- rr. eiia.
StR JLA l" EI'ITKE AUX THE6SALOMIC1E3IS. 7
tifs qui doiven t les consoler dans la raort de leurs freres, el
enipecher qii'ils ncs'atiristent alors comme ceux qui n'ont
])oint d'esperance pour Ic siecle a venir *. II leur le-
presente que si nous croyons que Jesus-Christ est mori et
ressuscite, nous devons croire aussi que ceux qui s'endor-
ment avec lui du sommeil de la mort , ressusciteront de
meme au dernier jour , Dieu les amenant alors et les reu-
nissant avec Jesus-Christ ^. II ajoute meme au nom du
Seigneur, que les elus qui se trouveront alors vivans sur
la terre , et en la personne desquels il parle , ne precede-
ront point dans la gloire de la resurrection ceux qui seront
inorts avant eux^. 11 s'explique , et il declare qu'aussitot
que le signal aura ete donne par la voix de I'archange et
par le son de la trompette de Dieu, le Seigneur Jesus des-
cendra lui-meme du ciel, et aussitot ceux qui seront morls
en Jesus-Christ ressusciteront d'abord ; ensuite les elus
qui seront vivans et qui seront demeures sur la terre jus-
que-la , etant dans ce moment meme changes et revetus
de I'incorruptibilite corame ceux qui seront ressuscites ,
seront emportes avec eux dans les nuees , pour aller au-
devant du Seigneur au milieu de I'air ; et reunis ainsi tous
avec le Seisrneur, ils demeureront eternellement avec
lui *. L'Apotre exhorte les Thessaloniciens a se consoler
mutuellement par les verites qu'ilvientde leur annoncer^.
Quant au temps et aux circonstances qui doiventpre-
ceder cet evenement (chap, v), il leur represente qu'ils
n'ont pas besoin d'en etre inslruits par ecrit''; car dans
sa seconde letlre adressee aux memes fideles , I'Apotre dit
lui-meme que lorsqu'il etoit avec eux , il leur avoit parle de
vive voix de ce qui doit arriver dans les temps qui pre-
cederontimmediatementravenementdu Seigneur ; et dans
le meme endroit il montre assez qu'ils ne veut pas s'en
cxpliquer aussi clairement parecrit". II secontente done
' f i3. — '^ 14. — 5 7 i5. — * y 16. « 17. Ipse dominus ifijussu, etin
voce aivhangeli, et in tuba Dei, descendetde ccelo : et mortiii qui in Cltn'sio
sunt resurgent pri/w/(gr. rpoiTiv, primum). Deinde nos tjuivivimus, quire-
linquiniur^ simuL rapiemur cum illis in nubibus obviam Christo in aera.Et
sic semper cum Domino erimus. A quoi il faut comparer le texte de la r'^epi-
treauxCorinthienSjXy. 5a: In momenta, in ictu oculi, in tiovissuna tuba [ca-
neteniin tuba), et mortui resurgent incorrupti , et nos immutabimur. Voyez
AMSs'iXa^Dissenation sur la resurrection, tom.fxxii. — * ^ c8. et tilt. — '-j^ i.
De temporibus autem etmomerUis (gr. Jltzl ^k tuv xfc'vcv y.al rav )Mt'.faiv),
f-nlres, non indigetis utscribamus vobis. — ' a.'TTiess. 11. 5. Non reiin'ntis
ifuodcum adhuc essem apud vos , hcec dicebam vobis ? Etnunc quid deli-
ici cje leur rappelcr ce qa'iU savcnt dejasi bien, que Ic jour
tlu Seigneur viendra comme un voleur donton estsurpris
dans la nuit^ 11 declare expressement que celtc ruine
subite viendra fondre sur Ics mechans loi'squ' ils croiront
pouvoir jouir d'une paix entiere et dune plaine securite^.
Mais en meme temps il represente aux fideles a qui il ecrit,
qu'elanl passes des tenebres a la lumiere, ils ne doiveni
plus etre du nombre de ceux qui seront surpris par ce
jour terrible ^. Il en prend occasion de les exhorter a la
vigilance et a la temperance , soutenues par la I'oi , I'es-
perance et la charile *. 11 fonde leur esperance sur ce
qu'etant devenus enfans de lumiere , ils onl lieu de croirc
que Dieu ne les a pas destines a etre les objets de sa colere
dans I'eternite, mais qu'ils les a destines a acquerir Ic
salut par Jesus-Christ, qui est mort pour eux , afm que
soit qu'ils veillent en demeurant en cetie vie , ou qu'ils
dorment du sommeil de la mort , ils vivent toujours avec
lui^. Sur quoi il les exhorle de nouveau a sc consoler
mutuelleraent , et a continuer de s'edifier les uns les
autres*^. 11 s'adresse aux simples fideles , et les pric d'ho-
Morer et d'ainier leurs pasteurs , et de conserver toujours
la paix avec cux''. 11 s'adresse aux pasteurs , et les exhorle
a s'acquitter fidelement de tous les devoirs de leur rainis-
lere ^. II s'adresse ensuite a tous , pasteurs ou simples
jQdeles , et les exhorte a etre toujours dans une sainte joie,
a prier sans cesse , a rendre graces a Dieu en toutes
choses ^. II les avertit tous de ne point eteindre I'esprit,
e'est-a-dire de ne point empecher que ceux qui ont recu
quelque don surnaturel n'en usent pour redification de
leurs freres ^° ; de ne point mepriser les prophetes , c'est-
a dire I'usage de ce don surnaturel qui consistoit a expli-
quer les obscurites de I'Ecriturc, a predire les choses a
venir, et a decouvrir ce qui pouvoit etre cache a I'esprit
Immain^^ Mais en meme temps, il veut que Ton eprouve
neat sci'tis, ut reveletur in sua tempore. Nam mysler-itim jam operaturini-
(juilatis : tantum ut qui tenet nunc, teneat donee de medio Ji at. \ojez ce qui
sera ditsur celadansla preface sur ccUe secondecpitrc.
* -jf 2 , — 2 y^ 3 . Cum enim dixerint , Pax et securitas , tunc I'epentinus
eis superveniet interiius, etc. — ^ -^ i^. et 5. — * f G.-S. — ' 8.-io. Nos aulr.m
fjuidieisumus, sobrii simus , induii loricamjidei ctchai-itatis , etf^rdcam
spcm salutis : quoniam nonposuit nos Deus in iram , scd in acquL'>ilronaii
salutis, etc. — ^ y »i.— -' -jf^ 12. eti'S, — ^ >!• 14. et i5. — '^ ^ i6.-if>. — '"y ly.
Spivitum nolile exiingueve. — •" ■j 20, rtopkeLias nolile sperneiv.
sua LV l' tinXRE AUX IBESSALONU.IEXS. (]
tout , pour discerner si les esprit sont dc Dieii , c'est-a-
dhc si ceux qui croient etre inspires par I'esprit dc Dieu
le sont veritabloment '. 11 veuL que Ton n'approuvc ct
tjue Ion ne rccoive que ce qui est bon, c'est-a-dire ce qui
est conforme a I'analogie de la foi, et aux regies des
mcBurs ^. 11 veut que I'oa s'abstienne et que Ton se defie
de tout ce qui a quelque apparence de mal , c'est-a-dire
de tout ce qui paroit s'ecarter ou des regies de maurs ,
ou de Tanalogie de la foi'. Voila les sages regies que
I'Esprit de Dieu prescrit par la bouche de I'Apotre, non-
-eulement aux Thessaloniciens , mais aux fideies de tous
les siecles , et par lesquelles dans tous les temps on doit
juger de toules voies extraordinaires, efTets sine^uliers ;,
operations surnaturelles. Apres cela I'Apotre souhaite aux
Thessaloniciens que le Dieu de paix les sanctifie en toutes
manieres , et que tout ce qui est en eux soit conserve pur
pour I'avenenient de Jesus-Christ *; c'est ce qu'il attend
et espere de la fidelite de celui qui les a appeles, ct qui se
devant a lui-menie 1' execution de ses decrets , consora-
mera par sa grace I'oeuvre de leur sanctification^; parce
que , comnie le dit ailleurs le meme apotre ^, ceux que
Dieu a predestines, il les appelie , il les justifie , il les
glorifie. L' Apotre se recommande a leurs prieres , et les
prie de saluer de sa part tous les freres en leur donnant le
saint baiser '. 11 les conjure de faire lire cette lettre devant
tous les fuercs ^. Enfin il leur souhaite a tous la grace de
Jesus-Christ ^.
Les anciennes souscriptions grecques , le syriaque ^
I'arabe , le cophte , Theodoret , I'auteur de la Synopse at-
tribuce a saint Athanase , les inscriptions latines qui se
lisoient a la tete de cette epitre , portent qu'elle a ete
ecrited'Athenes ; et cette opinion estappareuanientfondee
surce que I'Apotre dit au chap, iii. ^ i. etc. : Xe pouvant
soujfrir plus long-temps de n avoir point de vos 7iouvelles ,
j aimai mieux demeurer d Athenes , ct je v o us envoy ai Timo-
th/e. Mais le y 6 prouve que cette lettre ne fut ecrite
qu'apres le retour de Tiraothee ; et le livre des Actes
montre assez que saint Paul n'etoit plus a Athenes, mais
' y 2 1 . Omnia auieni pjvbate. — * 2 1 , Quod bonitm est tenete — •• y ii.
^boninispeoie mala abstinete I'os. — * -^ 23. — ' y 2.',. Ficlelis est qui locn-
vit vos, qui etiamjaciet. — •» Rom. viir. 3o. Quos prcedestiaai'it, hos ctvoca-
vit : etquos focavit, hos ei justijicuvii, illosel gioiijicayfic. — ' y jS. ct 20.
— ' 27. — 'y 28. e: ult.
lO
PR^l'ACE SUR LA l""^ EPITRE, GtC.
a Corinthe, lorsque Timolhee revint de Macedoine*.
C'est ce que nous avons expose au commencement do
cetle preface en conciliant le texte du livre des Actes avec
le texte de cette eptlre. Or, ce fut vers Tan Sa de I'ere
chr. vulg. que saint Paul passa d'Athenes a Corinthe , oii
il demeura dix-huit mois. On peut done placer cctlo
epitre vers Tan 62 ou 53, ct c'est I'opinion commune.
'u^cf. xvm. I. S.
PREMIERE EPITRE
DE SAINT PAUL
AUX THESSALONICIENS.
CHAPITRE PREMIER.
Saint Paulsalueles Thessaloniciens. II rend graces pour eux. Succes dela
predication de saint Paul parrai eus. lis ont servi de modele aux peuples
Toisins, chez qui leur foi estdevenuecelebre.
1 pAFLrs, et Silvanus,
et Timotheus , Ecclesiae
Thessalonicensium , in
Deo Patre , et Domino
Jesu Christo.
2. Gratia vobis, et pax.
Gratias agimiis Deo, sem-
per pro omnibus vobis ,
inemoriam vestris facien-
tes in orationibus nostris
sine intermissione,
3, Memoresoperisfidei
Testrse, et laboris et cha-
riiatis, et sustinentia;spei
Domini nostri Jesu Chris-
ti, ante Deum et Patrem
nostrum :
4- Scientes , fratres di-
lecti a Deo, electionem
vestram :
I. PArt, Silvain,'et Timothee, u
I'Eglise de Thessalonique, qui est
en Dieu le Pere et en noti'e Seigneur
Jesus-Christ.
2. Que la grace et la paix soient
avec vous. ' Nous rendons sans
cesse graces a Dieu pour vous tons,
noussouyenant continuellement da
vous dans nos prieres,
5. Et nous representant , devant
Dieu qui est notre Pere, lesoeuvres
de votre foi, les travaux de votre
charite, ' et la fermete de I'espe-
rance que vous avez en notre Sei-
gneur Jesus-Christ,
4. Car nous savons, 6 freres che-
ris de Dieu, quelle a ete votre elec-
tion;
y I . C'est le m^me que Silasdont il est parle dans les Actes. Voyez la pre-
face.
y 2 . Grec : vous soicnl donnees de Dieu de notre Pere, et de JesusCbpist
notre Seigneur.
y 3 . C'est le sens du grec.
I" ElMTRE DE S.\1\T PALL AUX TlJESSALO>IClRi?fS.
5. Parce que la piedication que
nous vous avons laites de I'Evan-
gile n'a pas ete s^eulement en pa-
roles, mais elle a etc accompagnee
dc miracles, de la vertu du Saint-
Esprit, ct d'une grande ahondance
de graces. Vous Sixvcz aussi de
quelle maniere nous avons agi par-
m'l vous pour voire salut. '
6. Et vous,. vous C'tes devenus
nos imitateurs, et les imilaleurs du
Seigneur, ayantrecu la parole" par-
mi de grandes afllictions , avec la
)oie du Sainl-Esprit :
^.. De sorte que vous avez servi
de modele a tons ceux qui out em-
brasse la foi dans la Macedoine et
dans I'Ach lie/
8. Car non-seulement vous etes
cause que la parole du Seigneur '
s'est repandue avec eclat " dans la
Macedoine et dans I'Achaie , mais
meme la foi que vous avez en Dieu
estdevenue si celebre parlout qu'il
n'est point necessaire que nous en
parlions,
9. Puisqu'eux-memes racontent,
en parlant de nous, quel a ete le
succes de notre arriveeparrai vous;
et comment, ayant quitle les idoles,
vous vous etes couvertis a Dieu
pour servir le Dieu vivant et veri-
table ,
10. Et pour attendre du ciel son
fils Jesus , qu'il a ressuscite d'entre
les morts, et qui nous a delivres de
la colereavcnir.'
5. Quia Evangelium
nostrum non fuit ad vos
in sermone tanlum, sed
el invirtnte, et in Spiritu
Sancto, et in plenitudine
multa, sicut scitis quales,
fuerimus in vobis propter
vos.
6. Et vos imitatores
nostri facti eslis, et Do-
mini, excipientes verbum
in tribulatione multa ,
cum gaudio Spiritus Sanc-
ti :
7. Tta ut facti silis for-
ma omnibus credentibus
in Macedonia et in Achaia.
8. A vobis enim diffa-
matus est scrmo Domini
non solum in Macedonia
et in Achaia : sed et in
omni loco fides vestra ,
quae est ad Deum, profec-
ta est, ita ut non sit nobis
necesse quidquam loqui.
9. Ipsi enim de nobis
annuntiant qualem introi-
tum babuerimus ad vos :
et quomodoconversi estis
ad Deum a simulacris ,
servire Deo vivo et vero,
10. Et expectare filium
ejus de coelis (quern sus-
citavit ex mortuis), Je-
sum , qui eripuit nos ab
ira Ventura.
ir 5. N'ayant ricn omis de tout ce qui pouvoit y conlrlbuer.
•^6. L'Evangile.
■j 7 . Thessaloniquc ctoit Ja capitale dc la Macedoine , et Corinllie , oii t' Joit
alors saint Paul, clolt la capilalede FAchale.
-^ 8. Par voire conversion.
Ibid. C'eslle sens du grcc.
^^ 10. En salisfaisaiit lui-nicmc pour nous a la justice de Dieu, par I'cffu-
siondeson san;:.
CHAPITRK 11.
CH.iprniE n.
:if;l^ , dt'sinlercssement , solHcitude de saint Paul dans la preJicalion de
i'fevangile. FiJolit6 des Tliessaloniciens. Jiigement terrible sur K-s Juifs.
Affeclion de saiiil Paul pour les Thessaloniciens,
1. NiM ipsi scitiji, fra-
-treSjintroilumadvoSjquia
-non inanis fuit :
2. S«d ante passi et
contumeliis affecti (sicut
scitis) in Philippis , fidu-
~'nm habuiinus in Deo
>?tro, loqui ad vos Evan-
gelium Dei in mulla sol-
licitudine.
5. Exhortatio eniin nos-
tra non de errore, neque
de immunditia, neque in
dolo :
4. Sed sicut probatisu-
inu5 a Deo, ut crederetur
nobi!> Evangelium : ita lo-
quimur, non quasi houii-
nibusplaccntes, sed Deo,
qui probat corda nostra.
5. Neque enimaliquan-
do fuiraus in sennone a-
dulationis, sicut scitis :
neque in occasione avari-
tiae : Deus testis est :
6. Kec quaerentes ab
hominibus gloriam, ne-
que a Yobis, neque ab a-
liis.
7. Cum possemus vo-
bis oneri esse ut Christi
1. Car vous-memes, 6 frercs,
vous n'ignorez pas que notre arri-
vee vers vous n'a pas etevaine :'
2. Mais apres avoir beancoup ^c:
soufferl auparavant, comme vous
savez , et avoir ete traites avec ou-
trage dans Philippes, nous ne laissa-
nies pas, en nousconflant en notre
Dieu, de vous precher hardinient '
TEvangile de Dieu parmi beancoup
de combats.
3. Car nous ne vous avons point
precbe une doctrine d'erreur ou
d'impurete, et nous n'avons point
eudessein de vous iromper.
4. Mais comme Dieu nousachoi-
sis pour nous confier son Evangile,
nous parlons ainsi, non pour plaire
aux hommes, mais a Dieu quivoit
le fond de nos cceurs.
5. Car nous n'avons use d'aucune
parole de flatterie , comme vous Je
savez : et notre ministere n'a point
servi de pretexte ' a noire avarice ;
Dieu enest temoin :
6. Et nous n'avons aussi recher-
cbe aucurkj gloire de la part des
hommes, nide vous, ni d'aucun
autre.
7. Nouspouvions, commeapotres
de Jesus-Christ , vous charger de
y I. Sans fruit; ainsi ila'est pas necessairc que j'aie recours au tpmoi-
gnage des autres pour rtlever le merite de voire foi, et le fruit de mcs predi-
cations cliez vous.
W, tl|.
V a. C'eslle sensdu grec.
7 5. C'esl le sens du grv
1 4
1'«EP1TREDE SAINT PAUL AUX THESSALCHVICIEHS.
apostoU : sed facti sumus
parvuli in medio vestrum,
tamquam si nutrix foveat
fjlios suos.
8. Itadcsiderantesvos,
cupide volebamus tradere
vobis, non solum Evan-
gelium Dei , sed etiam a-
iiimas nostras : quoniam
notre subsistance ; ' mais nous
nous sommes rendus petits parmi
vous, ' comme une mere quia soiu
de nourrir ses enfiins.'
8. Ainsi , dans I'affection que
nous ressentions pourvous, ' nous
aurions souhaile de vous donner,
non-seidement la connoissance de
I'Evangile de Dieu, mais aussi notre
proprevie, tant etoitgiandl'amour charissimi nobis facti es-
que nous vous portions. tis.
Jet. XX. 3. Q. Car vous vous souvenez, 6 9. Memoresenimcslis,
i.Cor.iv.12. freres, de la peine et de la fatigue fratres, laboris nostri et
^.Thess. HI. qnenousavonssouffertes, etcomme fatigationis : nocte ac die
nous vous avons preche I'Evangile operanles, ne quem^ ves-
de Dieu, en Iravaillantdc nos mains trum gravaremus, prajdi-
jour et nuit, pour n'etre a charge A cavimus , in vobis Evan-
aucun de vous. gelium Dei.
10. Yons etes temoins vous-mS- 10. Vos testes estis, et
ines, et Dieu Test aussi, combien la Deus, quam sancte, et
maniere dont jeme suis conduit en- juste, et sine querela, vo-
vers vous, qui avez embrasse la foi, bis, qui credidistis , fui-
a ete sainte, juste et irrcprocable.
11. Car vous savez que j'ai agi
envers chacun de vous, comme un
pere envers ses cnfans,
12. Vous exliortant, ' vous con-
solant, et vous conjurant de vous
conduire d'une maniere digne de
Dieu, qui vous a appeles i son
royaume et a sa gloire.
i3. C'estpourquoiaussinousrcn-
dons a Dieu de continuelles actions
mus :
11. Sicut scitis , quali-
ter imum quemque ves-
Irum (sicut pater filios
suos),
12. Deprecantes vosct
consolantes, testificati su-
mus, ut ambularetis dig-
ne Deo, qui vocavit vos
in suum regnum et glo-
riam.
i5. Idco et nos gratias
agimus Deo sine inter-
de graces, de ce qu'ayant entendu missione : quoniam cum
•j- 5.-']. Autr. el noire minislire n'a point servi,etc. , et nous n'avons
point aussi recherche, etc. , quoique nous eussions pu, comme ap6lres de Jd'
sus-Chxht, vous charger de notre subsistance. Mais, etc.
Ibid. Nous nous sommes conduits parmi yous avec une douceur d'enfant.
Jbid. L'apotre veul dire qu'il a ete parmi eux comme une mere qui loin
d'etre a charge a ses enfans, les nourrit de sa propre substance.
•^ 8. Bien loin de vouloir exiger quelque chosCi
^11. C'esl le sens du grec.
CnAPlTHE 11. iS
(ipi^fclis a nobis ver- la parole de Dieu que nous tous
..!iin aiiditu3 Dei, acce- prfichions, vous I'avez recue, non
pistis ilhul , non ut ver- comine la parole des hommes,
i)um hominuui , sed (<icut mais comine etant, alnsi qu'elle Test
est vere) verbum Dei, qui yeritablement, la parole de Dieu,
penitur in Tobi? , qui qui agit en vous qui etes fideles.
: edidistis.
14. Vos enim imitato-
iL'S lacti eslis, fratres, Ec-
desiarum Dei, quae sunt
in Judaea in Christo Jesu :
quia eadein passi estis et
i4. Car, mesfrtres, vous etes de-
venus les imitateurs des Eglises de
Dieu , qui ont embrasse la foi de
Jesus-Christ dans la Judee, ayant
soufl'ert les menies persecutions do
vos a contribulibus ves- la part de vos concitoyens que ces
Iris, sicutetipsiaJudaeis: Eglises ont souiTertes de la part des
Juil's,
i5. Qui onttuememele Seigneur
Jesus , et les prophetes ', qui nous
ont persecutes, qui ne plaisent point
a Dieu, et qui sont enoemis de tous
les homuaes ,
i5 Qui et Dominum
occiderunt Jesum, etpro-
pbetas, et nos persecuti
sunt, et Deononplacent,
ct omnibus houiinibusad-
versantur,
16. Prohibentes nos
gentibus loqui ut salvae
16. Qui nous empechentd'annon-
cer aux gentils la parole qui doit
fiant, ut impleant pecca- les sauver, pour combler ainsi tou-
ti sua semper : pervenit jours la mesure de leurs peches.
Car la colere de Dieu' est tombee
sur eux jusqu'a la fin. '
17. Aussi, 6 frercs, ayant ete
pour un peu de temps separes' de
vous, de corps, non de cceur, nous
corde , abundantius festi- avons desire avec d'autant plus d'ar-
navimus faciem vestram deur et d'empressement de vousre-
videre cum multo deside- voir.
enim ira Dei super illos
usque in finem.
17. Nos autem, fratres,
desolati a vobis ad tem-
pus horae, aspectu , non
18. Quoniam voluimus 18. C'est pourquoi' nous avons
venire ad vos : ego qui- vouln aller vous trouver : et moi
dem Paulus , et semel , et Paul j'en ai eu le dessein plus d'iine
iieruni, sed impedivitnos fois;' mais Satan nous en a emp€-
Satanas. chcs.
y 1 5 . G rec : leurs propres prophetes.
■^ i<). Le mot Dei n'est pas dans le grec.
Jbid. C'est-a-dire : et elle denieurera sur cux jusqu'a la fin des slecles.
Voyez ce qui est dit sur cela dans la pn-face.
'^ 17. C'est lesens du grec.
y 18. C'est le sens du grec.
Idici. Gr. autr. C'est jwurquoi nous avons voulu (/c dis^ moi Paul^ une et
deui fois vous aller trourer J ninis.elc.
1' EPiTUE DE SAINT PAUL AUX THESSALONICIENS.
!(>. Car quelle est notie espe-
rance. notre joie, et la couronne de
noire gloire? N'est-ce pas vous qui
i'fites devant notre Seigneur Jesus-
€hrist, au jour de son avenemenl ?
20. Car vous etes notre gloire ct
ct notre joie.
ig. Quic est enim nos-
tra spes, aut gaudium,
aut corona gloriae ? Non-
ne Yos ante Dominuin
nostrum Jesum Christum
estis in adventu ejus?
20. Vos enim estis glo-
ria nostra et craudium.
CHAPITRE in.
Timotht'e envnvo aux Tliessaloniciens pour les forllfier dans leurs tribula-
lions. Tc'moignage avanlageux qu'il lend de le«r foi ct do leur chariu'.
Saint Paul desire aller les rolr. II leur soubaile I'accroissement dans Ic
bicn.
1. AiNsi, n'y tenant pas plus long-
tf;mps,'nou3 preferames demeurer
seuls ii Athenes,
Jci. XVI. I. a.EtnousavonsenvoyeTimothee
notre frere, et ministre de Dieu"
dans I'Evangile de Jesus-Christ ,
afin qu'ilvousfortifiat, et qu'il vous
exhortat a demeurer fermes dans
votre foi ,
3. EtquepersonnenefOtebranle
pour les persecutions qui nousarri-
vent ; car vous savez que c'est a
quoi nous sommes destines.
4. Et des lors meme que nous
etions parmi vous, nous vous pre-
cisions que nous aurions des afflic-
tions a souffrir, comme nous en
avons eu en efl<it, ainsi que yous le
savez.
5. Ne pouvant done attendre plus
long-temps moi-meme, je vous I'ai
envoye, pour reconnoitre I'etat de
votre foi, ayant apprehende que le
1. Propter quod non
sustinentes amplius, pla-
cuit nobis remanere Athe-
nis , solis :
2. Et misimus Thimo-
theum , fratrem nostrum ,
et ministrum Dei in E-
vangelio Christi, ad con-
firmandos vos, et exhor-
tandos pro fide vestra,
3. Ut nemo moveatur
in Iribulationibus istis :
ipsi enim scitis quod in
hoc positi sumus.
4. Nam et cum apud
vos essemus , praediceba-
mus vobis passuros nos
tribulationes, sicut et fac-
tum est, et scitis.
5. Propterea et ego
amplius non sustinens ,
misi ad cognoscendam fi-
dem vestram : ne forte
I. Ne pouvant souffrir plus long-temps de n'avoir point de vos nou-
velles, etc. que vous fussiez sans consolation.
^'^ 2. Legrec ajoutc : et qui travaille avcc moi.
CHAPITRE III.
n
tcnlaverit vos is qui tcn-
tat, ct iuanis fiat labor
iioster.
6. Nunc autera vcnien-
te Thiinotheo ad no3 a
vobis, et annuntiante no-
bis fidem et charitatem
tcntaleur no vous eQt tentos, et quq
i/otre travail ne devint inutile. '
6. Mais Timolhee elant rcTenu
vers nous aprfes vous avoir tus^ et
nous ayant rendu un si bon teiuoi-
gnage de votre foi et de votre cha-
vestram, ct quia memo- rit^, et du souvenir pleind'afl'ection
riamnoslrihabetisbonam que vous avez sans cesse de nous,
qui vous porte a desirer de nous
voir, comme nous avons aussi le
meme desir pour vous ;
7. C'est ce qui fait, 6 freres,
que, dans toutes les adlictions et
dans tous les maux qui nous arri-
vent, votre foi nous a fait trouver
notrc consolation en vous.
8. Car nous vivonsmaintenaot ,'
si vous demeurez fermes dans le
Seigneur.
9. Et certes quelles assez digncs
actions de graces pouvons-nous
Deo relribuerc pro vobis, rendrc a Dieu , pour' la joie dont
in omni gaudio, quo gau- nous nous sentons combles devant
demus propter vos ante lui ' i cause de vous ?
Deum nostrum,
10. Jiocte ac die abun- 10. Ce qui nous porte a le con-
dantius orantes, ut videa- jurer jour et nuit , avec une ardeiir
mus faciem veslraui,.et extreme, de nous perraettre d'aller
compleamus ea quae de- vous voir, afin d'ajouter ce quipeut
sunt fidei vestrae? manquer encore a votre foi.
11. Ipse autem Deus 1 1. Je prie done Dieu notre Pore,
el Pater noster, et Do- et Jesus-Christ notre Seigneur, qu'il
minus noster Jesus Chris- lui plaise de nous conduiro vers
tus, dirigat viam noslram vou.s.
ad vos.
la. \o5 autem Domi- 12. Que le Seigneur vous fasse
nus muUiplicet, ct abun- croitre de plus en plus dans la cha-
da re facial charita tern ves- rite' que vous avez les uns envers
semper, desiderantes nos
videre, sicut et nos quo-
que vos :
7. Ideo consolati su-
mu5, fratres, in vobis, in
omni necessitate et tribu-
latione nostra , per fidem
vest ram.
8. Quoniam nuncvivi-
mus , ti vos statis in Do-
mino.
9. Quam enim gratia-
ram actionem, possumus
■^ 5. Gr. aulr. que le Icntatcur vous ayant tenles, noire Iravai! nc devint
inutile.
■^ 8. Nous sommes conlcns au milieu de tous nos maux.
y 9, C'est le sensdu grec.
Il,:d. Litl. devant noire Dieu.
V 1 2. C'est le sensdu grec • 'rcXuvxaai xat irsf taoijca; rn i-'XTrr..
a5. .,
I irC EPllRE DE SAINT PAUL AIJX THESSALONICIENS.
les autres, et onvers tons, ct qu'il
la rende telle que la notre Test en-
vers vou*s;
i3. Qu'il affermisse vos coeurs ,
en vous rendant irreprochables par
la saintele devant Dieu notre Pere,
au jour oii Jesus-Christ notre Sei-
gneur paroitra avec tous ses saints.
Amen. '
tram in inviccm, ct in
omnes , quemadmodum
et nos in vobis :
i5. Ad confirmanda
corda vestra sine querela
in sanctitate, ante Deuin
et Patrem nostrum, in
adventu Domini nostri
Jesu Christi cum omni-
bus Sanctis ejus. Amen.
y^ 1 3. Get jimen n'esl pas dans le grec imprime, niais il est dans dc tres
bons manuscrits. Voycz la note qui est dans la preface.
CHA.PITRE IV.
Fuir la fornication ; garder la chastele conjugale ; s'entr'aimer lous ; Iravail-
ler de ses mains : se consoler de la mort de ses frercs par i'esperancc de la
resurrection. Ordre selon lequel se fera la resurrection.
1. Au reste, 6 freres, nous vous
supplions, et nous vous conjurons
par le Seigneur Jesus, qu'ayant ap-
pris de nous comment vous devez
marcher dans la voie de Dieu pour
lui plaire, vous y marchiez aussi
d'une telle sorte, que ' vous vous y
avanciez de plus en plus.
Bom. xri. 2 2. En effet, vous savez quels pre-
Ephea. V. 17. ceptes je vous ai donnes de la part
du Seigneur Jesus'.
3. Car la volonte de Dieu est que
vous soyez Si.ints;' que vous vous
absteniez de la fornication ;
4. Que chacun de vous sachcpos-
1. DEcetero ergo, fra-
tres, rogamus et obsecra-
mus in Domino Jesu , ut
quemadmodum accepistis
a nobis, quomodo opor-
teat vos ambulare, et pla-
cere Deo, sic et ambule-
tis, ut abundetis magls.
2. Scitisenimqiiaeprae-
cepta dederim vobis per
Dominum Jesum.
3. Hsec est enim vo-
luntas Dei, sanctificatio
vestra : ut abstineatis vos
a fornicatione ,
4* Ut sciat unusquis-
4 I. Ces mots, sic et amhuletis, ne sont pas dans Ic grec imprim^; mais
plusicurs anciens manuscrits confirmentcette leijon.
■i a. Grec nous avons donm's, t^oSxaasv. — Combien je vous ai recommande
de vlvre dans la justice etla saintetc que Dieu demande de vous.
y 3. Purs.
\r>lrum vas suuin possi-
dcrc in sanctificatioiic ct
lionorc :
5. Non in passionc de-
siderii , sicut el gentes ,
quaj ignorant Deuoi :
6. Et ne quis supergre-
diatur, neqiic circumve-
niat in negotio fratrem
suum : qiioniam vindex
est Dominiis de his omni-
bus, sicut praediximusvo-
bis, et testiOcati sumus.
7. Non enim vocavit
nos Deus in immundi-
liam, sed in sanclificatio-
nem.
8. Itaque qui hacsper-
nit, non hominem sper-
nit , sed Deum : qui etiam
dedit Spiritum suum
Sanctum in nobis.
9. De charitate autem
fraternitatis, non necesse
habemus seribere vobis :
ipsi enim vos a Deo didi-
cistiSjUtdiligatisinyicem.
10. Etenim illud facitis
in omnes fratres in uni-
vcrsa Macedonia : roga-
mus autem vos, fratres,
ut abundetis magis ,
11. Et operam detis ut
quieti sitis, et utvestrum
iiegotium agatis, et ope-
remini manibus vestris ,
sicut praecepimus vobis ,
12. Et ut honeste am-
buletis ad eos qui l'ori.s
seder le vase do son corps sainte-
mcnt ct honnctement,
5. Et non point en suivant les
mouvemens de la concupiscence ,
comme font ics paiens qui ne con-
noissent point Dieu;
6. Que personne aussin'opprimc
son frere , ni ne lui fasse tort dans
aucune affaire , ' parce que le Sei-
gneur est le vengeur de tons ces
peches, comme nous vous I'avons
dejA dieclare et proteste.
7. Car Dieu nenousapasappeles
pour 6tre impure* , mais pour Ctre
saints.
8. Celui done qui meprise res
regies, meprise, non un homme ,
mais Dieu, qui nous a meme donne
son Saint-Esprit. '
9. Quant a ce qui regarde la cha- Jo(in.\nu3\.
rite fraternelle, ii n'est pas besoin ^v. 12. 17.
que nous vous en ecrivions.puisqne ^JoanM. 10.
Dieu vousaapprislui-mc'mea vous '^" ^'"
aimer les uns les autres.
10. Et vous le failes aussi a I'e-
gard de tons les freres'qui sont
dans toute la Macedoine; mais nous
vous exhortons, u fieres. a vous
avancer de plus en plus dans cet
amour ;
1 1. A vous etudier a vivrc en re-
pos; a vous appliquer chacun a ce
que vous avez a faire; et a travailler
de vos propres mains, ainsi que
nous vous I'avons ordonne;
12. Afin que vous vous condui-
siez honnetement envers ceux qui
y 6. Plusiciirs croient que le i;rcc sv rio ■Trca'Yu.o'.Tt peut se premlrt' en d''^
autre sens : Que pei-sonne n'atlente a I'honneiir de son frere, et ne lui fasse
outrage dans cc qui rcjarde Uijidtliu' conjiigalc.
'j^ 8. Pour que nous pr^hions dignement son EvangiV'.
'<• Les li-li'-les.
20
jrcgpfxRE DE SAINT PAUL AUX TIIESSALONICIENS.
sont hors de I'Eglise, ct que votis
vous metliez en ctal do n'avoir
besoin de personne. '
i5. Or, nous ne voulons pas, 6
freres, que vous ignoriez ce que
vous devez savoir touchant ceux
qui dornient, afin que vous ne vous
en attristrez pas, comme font Ics
autres qui n'ont point d'espcrancc.
14. Car si nous croyons que Je-
sus est mort et ressuscite, nous de-
vons croire aussi que Dieu amenera
avec Jesus ceux qui sc seront cn-
donnis en lui. "
i.Cor.xv.23. '5. Aussi nous vous declarons,
comme I'ayant apprls du Seigneur,
que nous, qui vivons, et qui soni-
mes reserves pour son avenemeiit,'
nous ne previendrons point ceux
qui sont deja dans Ic sommeil. '
16. Car aussitot que le signal
aura etc donne par la voix de I'ar-
change, et par le son de la trompette
de Dieu, le Seigneur meme descen-
dra du ciel, ctceuxqui seront morts
en Jesus-Christ rcssusciteront Ics
premiers : "
17. Puis nous iiutres, qui sommes
vivans , et qui serous demeures "
jusqu'alors, nous serons cmportes
avec eux dans les nues, pour aller
sunt : et nullius aliquld
desiderelis.
1 5. Nolumus autem vos
ignorare, Iratres, de dor-
uiienlibus, ut non con-
Irislemini, sicut etceteri,
(jui spem non liabenl.
i4- Si enini credimus
quod Jesus mortuus est,
et restiirexit : ita et Dcu*
eos qui dormierunt per
Jesuin, julducet cum eo.
i5. Hoc enim vobis
dicinnis in verbo Domini,
quia nos, qui vivimus,
qui resitliii sunnis in ad-
vcntum Domini, non pr;o-
vcniemus eos qui dormie-
runt.
16. Quoniam ipse Do-
minus in jussu, ctin voce
archangel!, et in tuba
Dei descendct de cf»lo :
et mortui qui in Christo
sunt, resurgent primi.
17. Deinde nos , qui
vivimns, qui relincjuimur,
sirnul rapiemur cum illi.s
in nubibus obviam Chris-
■jf 12. C'eslU; sensqu'indiquelegrec : xpsi'av iyr,-rt.
•^. i3. Du sommeil de la mort donl ils seront t'veilles au jour de la resur-
reclion.
Ibt'd. Qui n'alteadent point d'autre vie aprus cellc-ci.
•)^ 1 4 . Par la verlu de Dieu qui (!'toit en lui .
Jl)id. Qu'il les fera cntrer dans sa gloire.
■4- x5. Gr. aulr. nous quiserons vivans et qaiaumns e7e laisses au moudc
jusqu'a son avenement.
lliid. Qui sonl doja morls. — Nous n'cntrcrons point avanl eux en posses-
sion de la f^loire que Dieu nous a pn'-paree.
^ r(i, (Ir. ressusciieronl d'abord: puis nous autres, etc.
V i-^. Gr. autr. puis nous aulres r/r/iscrnrm vivans ct tjiti anrons I'lc'hh-
ses au mondc jnscju'alors.
CIIAPITIIK IV.
to in aera : el sic semper
rum Domino crimus.
1 8. Itiiquc consolamini
invicem in verbis istis.
au-devant dii Seigneur' au milieu
de I'air, Et ainsi nous serons pour
jamais avec le Seigneur.
1 8. Consolez-vous done Ics uus
les autres par ces vcriles.
y 17. C'est I'exjiression dii grec.
y i3. Ne vous afflij;e/: plus de la raorlde vos prodies , qui doil filre suivic
d'une si glorieuse resurrection.
CHAPITRE V.
Jour da Seigneur incertain. Surprise des mechans. Eufans du jour et de I.i
nuit. Anxiesspiriluelles. Honneurdes pasteurs. Support des foibles. Joie el
priere continuelles. Regiesdeconduile a I'egard des operations surnaturel-
les. Salutation.
1. De temporihus au-
temetmoinentis, fratres,
non iiidigetis ut scriba-
inus vobis :
2. Ipsi enim diligenter
scitis, quia dies Domini,
sicut fur in node , ita ve-
niet.
3. Cum enim dixerinl.
Pax, et securitas, tunc
repcntinus eissiiperveniet
interilus, .sicut dolor in
utero habeuti, et non
efifujrient.
4- Vos aufein , fratres,
non eslis in tenebris, jit
vos dies ilia tamquani fur
comprebendat.
5. Omneseniin vos fi-
lii lucis estis, et filii diei :
XVI. 1 5.
1. 0», pour ce qui regarde hes
temps et les momens,' il n'est pas
besoin, 6 freres, que nous vous
en ecrivions ,
a. Parce que vous savez bien -2. Petr.m.
vous-memes que le jour du Sei- 10.
gnem- doit venir comme un voleur -^pocut. 3.
pendant la nuit.'
3. Car lorsqu'il diront, Nous
sommes en paix et en sGrete, ils se
trouveront surpris tout d'un coup
par une mine imprevue , comme
{'est une femme grosse par les dou-
leurs de I'enfantement , sans qu'il
leur reste aucun moyen de se sau-
ver.
4. Mais quant a vous , 6 freres ,
vous n'etes pas dans les tenebres,'
en sorte que ce jour puisse vous
surprendre comme un voleur.
5. Vous etes lous des enfans de
lumiere, el des enfans du jour/
y I. L'.|.<.iii:(; de cct avi'nement de Jrsu.s-Cliri-t.
y a. Sansqu'onlesache, ni qu'onl'at'ende.
y i . Ceilcs dc I'ignoranceet du iieclie.
y 5. Par la foi et !a charitc qm; Dicu vous a donntcs.
hid. Lix. 17
■Z'l 1'" laniltE UU SAINT I'AUL AtX T1IESSAL0;>(IC1ENS.
liOiis nosomiues point' cnrans do la non snmus ijoctis, iioqiic
iiuit ni des lellcbrc^. tciiebrardin.
(j. Ne dormons done pas comme 6. Jgitur non dt)t inia-
lesautres, maisveillons, cl ^Midons- mus sicut et ceteri , scd
nous de renivrement du pcche.' vigHeinus et sol)ru siinas.
7. Car ceux qui dormcut, dor- 7. Qui enimdonniiuil ,
ment durant la nuit; et ceux qui nocte dormiunt : et qui
s'enivrent, s'enivrentdurantlanuit. ebrii sunt, nocte ebrii
sunt.
8. Mais nous qui sommes enfans 8. Nos autem, qui diei
du jour, gardons-nons dc cette sumus, sobrii siinus, in-
ivresse,'et armons-nousenprenant duti loricam fidei et cha-
pour cuirasse la loi ct la charite, et ritatis, et galeani spem
pour casque Tesperance du salut. salutis.
9. Car Dieu ne nous a pas desti- 9. Quoniam non po-
nes pour etre lesobjelsdesacol6rc, suit nos Deus in irani :
mais pour nous laire acquerir le sed in acquisitionem sa-
salut par notre Seigneur Jesus- lutis per Dominum nos-
Christ , trum Jesuin Christum ,
'10. Qui est mort pour nous; afin lo. Qui inorluus est
que, soit que nous veillions,' soit pro nobis : ut sive vigi-
que nous dormtons,' nous vivions lemus, sive dorniiamus,
loujours avec lui. simul cum illo vivamus.
11. C'est pourquoi consolez- 11. Propter quod con-
vous ' mutuellenient , et edifiez- solamini invicem, ct audi-
vous les uns les autres, ainsi que ficate alterutrum, sicut et
vous le faites. facilis.
12. Or, nous vous supplions , 12. Rogamus autem
6 freres, de considerer beaucoup vos, fratres, ut noveritis
ceux qui travaillent parmi vous, eos qui laborant inter vos,
qui vous gouverneiit selon le Sei- et praesunt vobis in Do-
gneur, et qui vous avertissent de niino, et monent vos,
votre devoir;
i5. Et d'avoir pour eux une par-
ticuliere veneration " par un senti-
ment de charite, ;\ cause qu'ils tra-
vaillent pour votre salut. Conser- pacem habete cum eis
vez toujours la paix avec eux.'
1^ 5. Nous qui faisons profession de croire en J&us-Christ, et dc Ic servir.
y 6. Lilt, etsoyonssobres.
y- 8. Lilt, soyons sobres.
y 10, En demeuranl en cetle vie.
Ibid. Du sommeil de la mort.
y II. Gr. autr. exliorlez-vous.
■^ r3. C'esl lesens du grec d'avoir pour eux une v^ndration particullire ,
par un sentinienl, etc.
Ibid. Ne faites ricn qui puissc les indisposcr i votre ogard. — Gr. Conser-
ves la paix entrecux.
i3. Ut habeatis illos
abundantius in charitate
propter opus illorum :
t;iiAj'i iRi: V.
1^. Hogamus auicin
% OS, fratres, corriplte in-
(jiiictos, coiisolauiini pu-
^illaiiinies, su^jcipite in-
liimos , patientes eslote
ml omncs.
i5. Videle lie qiiis ma-
lum pro malo alicui red-
ilat : sed semper quod
bonuiii est, sectamini in
tuvicem et in omncs.
16. Semper gaudete.
17. Sine intermissione
orate.
18. In omnibus gratias
agile:ha'C est enim volun-
tas Dei in Christo Jesu ,
in omnibus vobis.
19. Spiritum nolite ex-
linguere.
lio. Prophetias nolite
spernere. '
31. Omnia autem pro-
bale : quod bonum est te-
uete.
23. Ab omni specie ma-
la abslinete vos.
5>.3. Ipse autem Deus
pacis sanctificet vos per
omnia, ut integer spiritus
vester, ct anima, et cor-
pus sine querela in ad-
14. Jc vous prie encore, o freres,
rcprenez ceux qui sont deregles;'
consolez ceux qui ont I'esprit abat-
lu ; supportez les foibles ; soyez pa-
tiens envers tous.
le a un autre le mui puui lu mui, u. w. a:^.
nais soyez toujours prets ' A.faire ^om xn.17.
lu bien, et a vos frferes, et a tout 't'etr. 1.1. y.
i5. Prenez garde que nulne ren- /Vo.'. x\n.
de i un autre le mal pour je mal; ijJ. xx. 11.
mai
di
le monde.
16. Soyez toujours dans la joie. EccU. xvuu.
17. Priez sans cesse. aa.
Luc. XVII. n.
18. Rendez graces i Dleu en ^'- 1'- 2.
toutes choses , car c'est li ce que
Dieu veut que Yous fassicz tous en
Jesus-Christ.
19. N'eteigoei pas PEspril.'
ao. Ne meprisei pas les prophe-
ties/
21, Mais eprouTCz tout, ct ad-
mettezce qui est bon.'
aa. Abstenez-vous de tout ce qui
a quelque apparence du mal.
23. Que le Dieu de paix vous
sancti6e lui-meme en toute ma-
ni^re, ' afin que tout ce qui est eo
vous, ' I'esprit, I'ame' et le corps,
se conservent sans tache pour I'a-
y i'\- C'esl le sens du grec,
y i5. Aulr. cherchez toujours k I'aire du Lien.
Y ly. L'lisprildeDieu; n'emp&hez pas ceux qu'il a enrichis de qutl-
iju'un de ses dons, de s'en servir pour I'utilite de I'Eglise.
y 20. Par la raison qu'il y en a qui debitent leurs imaginatians pour des
prophelies. L'Apotreentend pary:;ny>A<;'f/'e le don qu'avoient quelques fidelcs
de prcdire I'avenir, ou d'expliquer les mysteres , cu dc detourir les veriles
cacliees dansl'tcrilure.
y . 2 1 . Coaformc a ce que la loi nous enseigne.
> u3. Grec : el \ousrende parfaits en tout.
Ibid. C'est le sens du grec.
llid. /.Vi/)m marque rentendemeut,ra/;ie, la voIolK- : ainsi cts deux
mots nianitienlles deux principa^es facullec de lame.
3,4 iroEpilRE DK SAINT PALL ALX
Tenement de notre Seigneur Jesus-
Christ.
I, Cor. I. 9. 24. Celui qui yousa appeles est
fiddle; et c'est lul qui fera cela en
vous.
a5. O frt;res, priez pour nous.
26. Saluez tous nos fr^res , en
Icur donnant le saint baiser.
27. Je vous conjure par le Sei-
gneur de faire lire cette lettre de-
vant tous les saints freres.
28. Que la grace de notre Sei-
gneur Jesus-Christ soil avec \ous.
Amen.'
TlIBSSALOniClENS, CtC.
ventu Domini nostri Jesu
Chrisli servetur.
a4. Fidelisest, qiii vo-
cavit vos : qui etiam fa-
ciei.
25. Frates, orate pro
nobis.
26. Salutate fratres om-
nes in osculo sancto.
27. Adjiiro vos per Do-
minum, ut legatur epis-
tola hsec omnibus Sanctis
fratribus.
28. Gratia Domini nos-
iri Jesu Christivobiscum.
Amen.
■>^ 28. Les exemplaires grecs portent ici ; Premiere 6pUre aux Thessalonir
cicns,ecrile d'Alheues, euigS versets.
PREFACE
SUR LA DEUXIEME EPITRE
Al'X THESSALOINICIENS.
Tl est evident par le texte de cette seconde epitre qu'elle Quelle fut
est une suite et une dependance de la premiere. Les Thes- loc«^asioade
salonicieDS avoient ete troubles par un endroit ^le cette gj^^^gj'
premiere epitre, ou I'Apotre leur parlant du jour de I'ave- le sujei.
nement du Seigneur, sembloit s'exprimer comme si ce
jour eut ete proche. De plus il avoit appris que les per-
sonnes oisives qui! avoit aver lies dans sa premiere lettre
ne se corrigeoient point. II comprit qu'il etoit necessaire
d'instruire davantage les uns , et de reprendre plus seve-
rement les autres. II avoit temoigne aux Jhessaloniciens
le desir qu'il avoit d'aller les voir; et les circonstances ou
ils se trouvoient sembloient rendre ce voyage encore
plus necessaire ; ne pouvant done le faire , il rcsolut de
leur ecrire cette lettre
L'Apotre la commence de m^me que la precedenie , en Analysede
sassociant Silas et Timothee, et souhaitant aux Thessalo- ^^^^^ epitre,
_• • I .1 • / I •. \t Tl . et rema roues
niciens la grace et la paix (chapitre i)'. II reconnoit g^. j^ ^^^^^^
qu'il doit a Dieu de conlinuelles actions de graces pour du second
eux , puisque leur foi s'augmente , et que leur charite mu- chapitre.
tuelle prend de nouveaux accroissemens , de sorte qu'il
a lieu de se glorifier en eux a cause de la patience el de
la foi avec lesquelles ils soutiennent les persecutions et
les afflictions qu'ils eprouvent*. 11 leur Xait remarquer
que les maux qu'ils soulTrent sont une marquQ et un signe
du jugeraent de Dieu qui , les purifiant ainsi en cette vie
pour les rendre dignes de son royaume , fait connoitre en
meme temps ce que les mechans ont a attendre dans la
vie future ^ II ajouie qu'en ellet il est bien juste devant
Dieu qu'il afflige a leur tour ceux qui les alfligent mainte-
nant , et qu'il leur donnne a eux le repo^ et la consolation
itfi pnL?FACR
lorsquc le Seigneur Jesus viemlra dans sa gloire^ II en
prend occasion de decrire encore ici Ic dernier avencment
de Jesus-Christ. 31 dit done que Jesus-ChrisL se manifes-
tera alors descendant du ciel avec les anges qui sont les
ministres de sa puissance , et au milieu des flammes de
Ibu ; qu'il exercera alors ses justes vengeances sur ceux
quine reconnoissent point Dieu , et qui n'obeissent point
a I'Evangile; et qu'il se glorifiera alors dans ses saints, et
se lera admirer dans tous ceux qui am ont cru , tels qu'c-
toient les Thessaloniciens memes^. II leur lemoigne que ,
dans I'attente de cette recompense qui leur est promise,
il ne cesse de demander a Dieu qu'il les rende dignes d'ar-
river au terme de leur vocation, et que pour cela il ac-
complisse par sa puissance tous les desseins que sa bonte
a sur eux , et qu'il consomme lui-meme I'oeuvre de leur
foi-* ; afin que le nom de Jesus-Christ soit gloi'ifie en eux ,
et eux en lui par la grace de Dievi qui est le prin-
cipe de cette gloire, et de Jesus-Christ qui en est en merac
temps et le principe et le dispensateur*.
Apres cela il vient a ce qui les avoit effrayes touchant
I'avenement de Jesus-Christ, et la reunion des elus avec
lui ( chapitre ii); et sur cela il les supplie^ de ne point
se laisser legerement ebranler dans leur premier senti-
ment fonde sur ce qu'il leur en avoit dit de vive voix lors-
qu'il etoit avec eux ; il leur recomraande de ne point se trou-
bler en croyant sur le temoignage de quelque esprit pre-
lendu prophetique , ou sur quelque discours qui lui seroit
attribue a lui-meme , ou sur quelque lettre que Ton sup-
poseroit envoy ee par lui, que le jour du Seigneur soit prcs
d'arriver*^. II les exhorle a ne se laisser seduire en aucune
maniere sur cela. Et afin de les premunir contre la seduc-
tion , Jl leur marque deux signes eclatans qui doivent
preceder le dernier avencment de Jesus-Christ. 11 declare
pren)ierement que le jour du Seigneur ne viendra point
que Ton n'ait vu eclater d'abord Vaposlasie^ , c'esl I'cx-
pression meme de I'Apotre , OTcaraata; c'est-a-dire une
'yO.t'f 7. — -^ 7. -10. — ^^ 11. Iiiquo['^t. Ei; o, in (juod) eliain ora-
luus semper ptv vobis, ut digneiitr vos vocalione sua Deus iiosier, et itn-
pleat ouineni voluntaiem bonilaLis, eiopusjideiiii virlute. (Gr. £v ^uvaasi),
— * 7^^ I ?.. et ult. — •^ ^ I . Jiogamus auieni vosfraLres , per adventiim^ etc.
(Gr. uiv£pT"fl? irapouaioK, te qui pent signifier, de aduenlu Domini nosiri Jesu
Chrisli, et nosiia coiif^regatione in ipsum.) — ^ir'j2. — '-j^ 'i.Nisi venent dis
cessio primum. (.Gr. Eav y.v! cXO-iir, s,7:coTaata TvpwTCv.)
SIR LA n*tI*ilRE AIX THESSAl.OJdCIEMS. ^ -J
*i( icciion dans la foi. I.es i^randes heresies ont coinmetice
ootie defection : c'est ce (|iii a domic lieu aux saints peres
lie dire quclquefois que Ton ctoit au temps de I'aposlasie
prcdile par saint PauU. Et en etTet ces grandes lieresies
<|ui ont entraine des peuples entiers, ont commence sur
la terre cetle luneste aposlasie : elle s'est etendue dans
presque tout I'Orient par Ic schisme des Grecs ; elle a
enleve presque sous nos yeux les peuples du Nord : elle
])enelre insensibleraent jusqu'au milieu de nous par la
depravation des moeurs , par ia licence des opinions , par
!" vsprit d'irreligion et d'incredulite. Grand Dieu! sauvez-
>us par votre grace , et ne permettez pas que nous me-
mnoissions le danger terrible qui nous menace.
L'Apoire declare secondement qu'a la suite de cette
aposlasie funesle doit paroitre I'Antechrist , qu'il designe
sous le nom d'hommc de peche ^ : voila son caractere ; ce
sera un homme , raais un homme de peche, e'est-a-dire un
impie qui sera comme un compose de rhomrae etdu peche,
ou le peohe incarne , oppose a Jesus-Christ, qui est un
compose de I'homme et de la sainlete meme , ou la sain-
tete incarnee; en sorle que comme I'Apotre ditque toute
la plenitude de ladivinite habite corporellementen Jesus-
rhrist, de meme saint Jerome pense que toute la perver-
e et la maiignite de Satan habitera corporellement dans
cet impie ^. Et en efTet il ne seroit pas designe sous le nom
A' homme de peche , s'il ne devait meriter ce nom par un ca-
ractere de perversile qui le distinguera entre tous ceux
' n qui le peche a regne. L'Apotre le designe aussi sous le
om dejiis de perdition "* ; et voila quelle sera sa fin , la perte
ft la damnation a laquelle il est reserve, et qu'il aura me-
rilee par ses crimes. Bientot lApotre expliquera de quelle
saniere cet impie doitperir, lei il va expliquer comment
I I impie sera un homme de peche. Et d'abord il dit que
re sera un adversaire , un homme oppose, ivTi/.e/fxn/o;^,
<'esl-ii-dire opposse a Dieu, oppose a Jesus-Christ; voila
quel sera son elat et sa vie, uue opposition formelle a
Jesus-Christ; de la vient que des le siecle des ap6tres ,
' C/iill. Hieros. Ca:ech. ii. ^•Jv Si s<jTtv iTTCo-raaia.- aTTiVrr.aav yif ct iv-
npMirc. tt; i;6f^ ^icreca;- — * V i. El revelaliu fuerit homo peccati. — * Uier.
iji Dan. va. cvl. iioi.iVV vuni puteiniis, juxta quoritmdam opinionein ,
I litili iboluin esse, divmonem, s%d itiiiun de lioininibus, in ijiio lotus Sola-
ns htd'ilatuius sit coijjoiuliter. — *y 3. Filius pcrditionis . — ' j 4. Qui ad-
■ isalur. (Gr. 5 ivTUCcW-jvc^)
28 PR^FACK
il a ete designe sous le nom &' Jntechrist , Avxlxp^oroiK
L'Apotre annonce qu'il s'elevera au-dessus de Lout ce qui est
appeU Dial , et de tout, ce qui est adore^ ; voila jusqu'a quel
exces le portex'a son orgueil , jusqu'a so mettre a la place
de Dicu : et saint Jean nous annonce aussi que toutc la
terrc Tadorcra^, c'est-a-dire , comme saint Jean meme
I'explique , qu'il sera adore de tous ceux, d'entre les liabi-
tans de la terre dont les noms ne sont pas eerits dans le
livre de vie de TAgncau^. II s'opposera ouvertement au
vraiDieuet a Jesus-Christ son (ils : mais saint Jean nous
annonce que ceux qui adoreront cet impie adoreront
aussi le dragon, c'est-a-dire le demon , qui lui aura donne
sa puissance^. II ne s'opposera done pas au cuke des faux
dieux; mais il s'elevera au-dessus de tout ce qui est appele
Dieu, se faisant reconnoitre et adorer comme le plus
grand de tous les dieux : il ne s'opposera pas au culte des
idoles ; mais il s'elevera au-dessus de tout ce qui est adore,
et son image , a laquelle le faux prophete fera rendre , se-
lon saint Jean , les hommages divins*^ , sera regardec
comme la premiere et la plus respectable de toutes les
idoles. L'Apotre ajoute que cet impie oserameme s'asseoir
dans le temple de Dieu pour s'v faire adorer comme Dieu'' ;
voila jusqu'ouira son impieie , jusqu'a se faire rendre les
honneurs divins dans le lieu meme le plus particuliere-
ment consacre au culte du vrai Dieu, afin d'insulter da-
vantage a la religion de Jesus-Christo C'est ce qui est deja
arrive en partie chez les Grecs, ou la grande eglise de ,
Constantinople , autrefois consacree a la Sagesse eternellc
sous le nom de Sainte-Sophie , qui signifie la sainte Sagesse,
est dcvenue la principale Uiosquee des Mahometans. Ce
qui est arrive aux Grecs est un exemple pour nous : et en
voyant ce quest devenue la celebre eglise de Sainte-So-
' Hieron. adAlgasiam, rjucest. r i . Qui culversatur Christo, el uleo voca-
iurludnUchristiis. — ^ Hieron. ad:Mgasiain. Et extolleUir supraoinnc quod
dicilur Deus, aut quod colitur. (Gr. xat UTTspa.tpo'|j.Evo; im Travra Xs'^o[/.£vcv
&im 71 diocLu^.a.. — " jtpoc. xni. i. Et adinirata est universa tenu post bes~
uam. — '^ Apoc. xiir. 8. Et adoraverunl eiiin omnes qui inhabitant terram,
quorum non sunt scfipia nomina in libra vitce Agni. — * Apoc. xni. /, . Et
adoraK>erunt draconem quidedit polestalem bestice, el adorm'crunt tjcstiant.
— * Apoc. XIII. II. et ! ^. Etvidi aliain besliam. . .Et datum est ilU ul. . .
facial ul qtiicumquc non adoras'erint imagincm bcsticc, occidanlur. — ' y4.
Ita ut in tempto Dei {gv. addit., utVcus.) sedeat. (Gr, ware aOrev at; tov vabv
Ti5 0;s'j wj 0EOV jiaO^Jjat.)
SLR LA II* EpixRE AUX THESSALOMCIENS. 29
phic , il est aise ile comprcndre quel peut ^tre le temple
aui^ustc oil rcniicmi tic Josus-Christ s'assicra pour s'y faire
renclre les honncurs divins. Enfin I'Apotrc dit que cet ini-
pie sc monlrcra commc un Dicii ' ; voila jusqu'ou ira sa puis-
sance , jusqu'a operer des signes et des prodiges pour
prouver qu'il est Dicu; car I'Apotre va lui-meme aimon-
cer <pic rAnleclirist viendra acconipagnc de la puissance
de Satan avec loutes sorios de miracles, de signes et de
prodiges ironipeurs*; et saint Jean nous annonce aussi
que le fau\ prophete de cet impic seduira ccux qui habi-
lent sur la terre , par les prodiges qu'il aura le pouvoir dc
faire devant cet iinpie^. L'Apotrc ayant asini expose en peu
de mots les principaux caracieres de cet hiipie , c'est-a-
dire son ctat, son orgueil, son impiete et sa puissance, re-
presente aux Thessaloniciens que lorsqu'il etoit encore
avec eux, il leur avoit parle dc toutcs ces choses , c'est-a-
dire de ce qui regarde I'Antcchrist et I'apostasie qui doit
lepreceder^.
Aprcs cela il vient a ce qui regarde le temps ou doit pa-
roitre cet impie ; et comme il ne veut pas on parlor ici clai-
remeiit, il commence par leur rappeler le souvenir de ce
I'il leur a dit sur cela. Il leur represente done qu'ils sa-
> ent bien ce qui rclarde I'avenement de rAnlechrist , et ce
qai empeche qu'il ne paroisse jusqu'a ce que soit venu le
temps ou il doit paroiire^. 11 avoue que dcjd le mystere
(fimquitc s'opcre^' , c'est-a-dirc que des ce lemps-la meme
commencoit a se former cetle apostJisie funeste qui devoit
preparer les voies a cet impie , et dont les premieres here- .
sics, qui se formoient des iors, etoient en effet les pre-
mieres semences, Et il ajoute qu'il ny a plus qn'iine chose ,
c til , di\\.-\\ , que celui qui lienl maintcnanl , soil ate du milieu
dumonde; carc'estce que porte le grec : Movov 6 •/aTs'/wv
ocpTt , Kr); r/. UcVo'j ysyyitat. Tantum qui tenet nunc, donee dc
medio fiaf . « Sous le nom de celui qui tient , I'Apotre desi-
•
' V 4 • Ostendens se tanujiiam sit Deus. (Gr. k-m^fxryira. Ja'JTCv ?T! firrl
■^5?) — ' T 9- Cujus esOadnentits secundum operationcm Satanee in omni
rtute, et signis, etprodigiis mendacibus. — ° jipoc. T.m. ^^.[Et scduxit
ImbilaiUes in terra propter signa qua data sunt illi fjccre in conspectu
besttce. — * -f 5. Non reu'neiis quod cum adhiic cssem apudvos, luec dice-
bam vobis?^ — * y 6. Et nunc quid deiincal scitis, ut reveletur in suo tem-
pore.— '-j^ S. Nam mrsterium jamoperalur inif/uiuitis.' — ' Ibid. La Vul-
pate porte: Tantum ut qui tenet nunc , teneat, donee de medio JiaL C"e«t
bien au fond le meme sons. Mais le mot teneat , qui jctte quelque obscarite
PREFACE
" gnc, clit saint Jerome^ , rempire romain : Enm qui (end,
« romanum imperium ostcndit. En effet, ajoutc-t-il, selon la
" prophetic de Daniel, rAntechrisl ne viendra point que
« cet empire n'ait etc detruit et ote du milieu du mondc :
fi- Nisi cnim hoc dcsfruciam fuerit sublatumque de medio,
v^ jiixta prophcliam Daniciis , Antichristus ante nonvcnict.
« Et si I'Apotre s'exprime sur cela en termesobscurs, c'est
« parce que s'il eut voulu s'expliquer ouvcrtement, il au-
« roit imprudemment risque d'exciter la rage des persecu-
n teurs contre les Chretiens et contre I'Eglise encore nais-
« sante : Quod si aperle dicere voluisscl , sluUe perseculorum
« adversus Chrislianos , et tunc nasccnlcm Ecclcsiam, rahiem.
« concilassct.yi Saint Jean Chrysostome s'exprime de meme
sur I'obscurite des expressions de saint Paul en cet en-
droit. Et en general la plupart; des pcres ont pcnse que
1 Apotre avoit ici en vue la ruine de I'cmpire romain , et
qu'il I'annoncoitcomme un signe de I'avenement de I'An-
techrist. // reste seulement que celui qui tienl , soil die du
milieu da monde : Tantum qui tenet nunc , donec de medio
FIAT*.
L' Apotre ajoute que cet obstacle etant leve, alorsparoi-
tra cet impieque le Seigneur Jesus detruira par le souffle de sa
louche , et qu'ilperdrapar V eclat de sa presence'^. L' Apotre a
deja annonce la fin malheureuse de cet impie, en disant
que ce seroit un fils de perdition : il explique ici de quelle
maniere cet impie perira. Jesus-Christ le detruira j»ar le
souffle de sa louche. }\%&cc^Ae,c^'& I'Apotre ait icienvuecette
parole d'Isaie, qui parlant du Messie, dit : II frappera la
terre par la verge de sa louche, et il tucra I' impie par le souffle
d£ ses levres^. Jesus-Christ frappera la terre par la verge dc
sa bouche, en prononcant Tanatheme terrible dont il doit
lafrapperau dernier jour*: etdememeil tueral' impie par
le souffle de ses levres , il le detruira par le souffle de sa
bouche , en prononcant contre lui I'anatheme dont il doit
dans cetle~phrase ddji assez obscure par elle-m^me , ne se lit que dans Ics
bibles latines :on nele trouve point dans le grec.
' Hieron. in Jerem. c. xxaj, col. 65o. — - Voyez ce qui sera dit sur cela
dans la Dissertation sur l Antechist , placee a la suite de cette preface. —
■^ -j^ 8. Et nunc (gr. tote, "tone) revclnbitur ille iniquus quern Dominus Je-
sus inlerjiciet (gr, avaAtoaei, cxievininahiC) spiritu oris sui, etdeslruei illus-
tratione aihe dus sui cum. — ^ Isai. xi. 4. Petvutiet ten-am vii^'gn oris sui,
ei spiritu labiorum suontm inlerjiciet impium. — * Mai. iv. >' nit. Nc/brtc
veniam, etpetrutiam teiramanathemalc.
SLU LA U" KPITRE AU.V TllESS\U).>!iCIE.\S. 3 I
aiissi le frapper. D'aillcurs cette expression,///.!? dftraira
par Ic souffle dc sa bouche , inontro en ineme leinps , ct
!'c\lrt'me foiblesse de cet impie qui sesera rendu si rcdou-
lablc sur la terre, et la souverainepuissancc de Jesus-Chrisi
contre qui cet impie aura ose s'elever : le seul soulTle dc
Jesus-Christ suffira pour le renverser. Ce n'est pas mcine
encore assez dire : 11 Ic perdra par Ic seul eclaldc sa presence.
Saint Jean nous annonce que cet impie et son faux pro-
phete seront precipites tout vivans dans I'etang; brulant
defeu et de soufre'. Jesus-Christ perdra, detruira, tuera
cet impie, en le precipitant aiusi tout vivant dans cetetang
de feu , qui est la seconde mort, scion I'expression memo
de saint Jean ^.
Mais saint Paul ne nous marque pas seulement de quelle
maniere Jesus-Christ perdra cette impie ; il nous marque
encore en quel temps il le perdia, lorsqu'il dit que le Sei-
^eur Jesus le perdra par I'eclal de sa presence ou de son
avcnemcnt; car le grec r.c^.'.O'jniy., signifie I'un et I'autrc; la
Vulgate I'exprime meme par advenlus ; et tous les peres ont
compris que saint Paul avoit ici en vue le dernier avene-
mentde Jesus-Christ. Cependant saint Jerome qui n'igno-
roit certainement pas celle parole de I'Apotre , croit
apercevoir dans Daniel qu'il y aura un intervalle de qua-
rante-cinq jours entre la ruine de I'Antechrisl et le der-
nier avenementde Jesus-Christ. iSous en avons deja parle
ailleurs, et nous aurons lieu d'y revenir encore dans la
suited Nous remarquerons done seulement ici qu'au fond
cela nest pas contraire a ce que saint Paul nous dit de la
ruine de cet impie. L'Evangile nousavertit que le dernier
avenemenl de Jesus-Christ sera precede de signes extra-
ordinaires et cclatans. 11 pourroit arriver qu'au milieu de
ces signes prodigieux intimement liesavec le dernier ave-
nement de Jesus-Christ , TAutechrist fut extermine d'une
maniere eclatante , et comme par le souffle du Seigneur
prct a paroitre ; en sorte que quoique Jesus-Christ ne dut
peut-etre paroitre que quarante-cinq jours apres, cepen-
dant il seroit vrai de dire que cet impie seroit extermine
^ Jtpoc. XIX. 20. Et apprehensa est bestia , et cum ea pseudopropheta :
... vivi missi stinthiduo in siagnum ignis ardentis sulphure. — -Apoc.
\. 1^. Et infcrnns el mors missi sunt in stagnum ignis : hcec est mors se-
undii. — ■' \o)cz \:ipT-e'face sur te lix-re de Daniel, torn, xvi, et la DisscrUi-
tioti surlAniechrisi, h la suite dc la presente preface.
PREFACE
par Teclat dc ravcncment dc cc Dicu Sauveur, c'est-a-dire
par I'eclat qui precedera de si pres son aveiiemcnt : Ilk
iniquus quern- Dominas Jesus inlerficiet spirilu oris sui ,ct des-
truel illusLralione advcnlus sui.
L'Apotre ajoute que cet impie viendra accompagne de la
puissance de Satan , avec f.oute sorle de miracles^ de signes et de
prodiges Irompeurs^ . Le demon agira dans cet homme eten
f'aveurde cet homme; I'operalion dti demon sc manifcstera
par les effets de sa puissance ; les cilcts de sa puissance
seront les signes etlesprodigesqu'iloperera ; mais ces pro-
digcs et ces signes seront des signes et des prodiges de
mensonge; car c'est a la lettre ^'expression du grec : In
omni virtule , ct signis , et prodigiis mendacii; ce que la Vu!-
gote exprime par, In omni virlnte , ct signis, ct prodigiis
mendacihus , des signes etdes prodiges Irompeurs. L*equi-
voque dc cctte expression dans le grec , et meme dans le
latin , a donne lieu a deux interpretations diffcrentes. Les
uns pensent que I'Apotre a voulu marques des miracles qui
conduiront au mensonge, a i'erreur : les autres pensent
qu'il avoulu marquer des miracles faux qui tromperont par
une fausse apparence; c'est le sentiment deTheodoret ^:
saint Jean Chrysostome propose les deux sens\ De la nais-
sent aussi deux sentimens sur la nature des miracles de
FAntechrist : les uns croient que ce sont de faux miracles;
il semble que ce soit la pcnsee de saint Jer6me , qui , com-
parant les prodiges de I'Antechrist avec ceux des magi-
ciens de Pharaon, dit que, « comme les magicicns de
« Piiaraon resistant par leurs mensonges aux signes qucDieu
« operoit par MoTse , la verge de Moise devora leurs vei'ges,
« de meme la verite de Jesus-Christ devorera le mensonge
« de I'Antechrist : Quomodo cnim signis Dei qua; opcraban-
fl turpcr Moysen , magi svisrestitere me>'daciis , et virga Moysi
« devoravit virgas eorum : ila menuacium Antichristi , Christi
" Veritas dcvorahit^ . » Les autres croient que ce seront de
vrais miracles. Saint Augustin en plusieurs endroits deses
ouvrages soutient que les demons , et les magicicns par
leur moyen , peuvent faire de vrais miracles ; que les me-
chans peuvcnl en faire quelqucfois aussi bien que les bons :
■/.a.'. roLOi craeia oux- chawt. uauu.ara. — " Chrysi. inc. Xspoai ij'sudc.u;" r-ci
^iii^z\jau.hoK, r, et; dcyfS'oc aTfjort. — * Hicron. Algasice. qiicest. ii. adfinem.
soil LA n*^ J^piir.u wx tiikss.vloxicif.xs. 3S
ri cji'.ant aux miracles der.ViUechrist, il dit que « les uus
<« croieiit qu'il sunt appeles prodigcs de vunsongc , parce
<> qu'ilsn'aurontpas la realite , mais seulementl'apparence
>i dcs vrals miracles, et qu'ils trompcront les ycu.v de ceux
-qui en seront temoins; et que d'autres tiennent qu'il.i
» sontainsinomraes, parce qu'encore que cesoient devrais
« prodiges, ils auront pour fin d'enlrainer dans le men-
« songe et dans I'erreur ceux qui croient que ces prodigcs
« nc peuvent etre opercs que par la puissance de Dieu ,
« ne sachaut pas quel est le pouvoir du demon, surtout
« dans ce temps oii il recevra une puissance si grande ,
a que jamais il ne I'aura eue telle : jln quia ilia ipsa etium-
« sicrnnt vera prodigia , ad mciulucimn pcrtrahenl crediluros
a non ca poluis^e nisi divimtus Jieri , virtiitem diaholi nescicn-
a les , maxiine quando tantam quantum nimqiLam hahnit , acci-
<i pict polestalem^ . n On a traite cette question ailleurs^,
et Ton a fait voir qu'il peut etre egaleuient vrai de dire
qu'il n'y a proprement que Dieu qui puisse faire de vrais
miracles, etque le pouvoir du demon dansl'ordre surna-
turel lui vient de Dieu, comme saint Augusiin meme le re-
connoit ici , en disant que cette grande puissance qu'il
exercera alors, il I'aura recue : Maxime quando tantam
quantam nunqnam liahuit accipiet polcstatcm. Saint Jeanne
parle pas expressement des miracles del'.Vntechrist; il dit
seulement que le dragon, c'est-a-drre le demon, lui doii-
nera sa force et sa grande puissance^; mais cela merne
peut renfermcr ce pouvoir extraordinaire dansl'ordre des
signes et des prodiges ; et on peut dire que c'est meme
proprement ce que signifie cette force dont parle saint.
Jean. Mais il annonce bien expressement les miracles du
faux propliele de I'Anteclirist, lorsque parlant de ce faux
Y)vopliete, il dit^ qu'il fera de grands prodiges, jusqu'a
faire desccndrc le feu du cicl sur la terre devant les hom-
mes; et quil seduira ceux qui habitent sur la terre par les
prodiges qu'il aura le ponvoir de faire devant la bete. Et
plus loin, parlant de la ruine de cette bete , qui represenlc
r.Vntechrist, il dit^ qu'elle fut prise, et avec elle le faux
' jiiig.de Cix'.l. XX. c. 19. — - Voyez la Dissertation sur les miracles ,
a la lele de I'Exode , lom. n. — ^ Apoc. xui. 2. El dedh illi dinco viitttteM
suam eipotestatem magnam. — * Jpoc. xisi. i3. 14. Et fecit signa magrui ,
lUeiiam igncm fhccrct de calo descende.iv in terrain in conspectu honii-
num , etc. Et seduxit liabiianies in iciTa propter signa , </K<e dtitti sunt illi
facav in con'tpcctit beslice. — ' Jpoc. xrx. 20. Et apprehensa est Ic.'lia, ct
23. 3
PBEFACK
proph^tcqui avoit fait desprodigcs devantelle, parlesquels
ii avoit seduil cciiv qui avoient recu le caractere de cette
bete , et qui avoient adore son image. Yoila done quels
seront les prodiges qui accompagneront cetimpie; pro-
diges operes peut-etre d'abord par lui-meme, mais en-
suite principalement par le faux prophcte qui paroltra
avec lui.
L'Apotre ajoute que cet impie viendra avec loule la Sf-
duction capable de porler a I'iniquUe ceux qui perissent^, A
la vertu des prodiges trompeurs il joindra I'arlifice des
raisonnemens seduisans et captieux : et de nieme que Je-
sus-Christ a convert! les peuples par la parole et par les
miracles, de meme son ennemi emploira la parole et les
miracles pour seduire les peuples : mais cette seduction
n'entrainera que ceux qui perissent, c'est a dire ceux qui,
par un juste jugcment de Dieu seront abandonnes a eux-
mcmes : aucun des elus ne perira , mais ceux-la seulement
que Dieu a laisses dans la masse de perdition , ou qui apres
en avoir ete tires, auront merite d'y retomber. Etl'Apotre
nous marque aussilot qu'elle sera la cause de I'abandon
de ceux-la. lis \iCY\Yon\., puree qii Us n auront pas recti et
aimelaverile pour tire saiivcs^. Ce malheur menace done
principalement les incredules et les apostats; ceux qui
n'aurontpas recu la verite , et ceux qui I'auront rcjetee et
abandonnee; enun mot tous ceux qui ne I'auront point
aimee. La verite seule nous delivre et nous sauve : la re-
jeter ou lacombattre , c'est renoncer au salut. Ainsi I'a-
postasie meme prepare les voies a I'Antechrist.
C'est ce que rApotreconfirme aussitot, en ajoutantque
parce que les hommes n'aaronl punt recu et aime la verite,
Dieu leur cnvcrra une operation d'erreur , une ejjicacite d'er-
rexir ^ ; car , comme le remarque Cornelius a Lapide ^ ,
« ce que la Yulgate exprime par opcrationcm crroris , c'est-
« a-dire wie operation derreur, le grec I'exprirae par hi[y/dcf.v
o ~'/.dvr,c,, qui signifie propremcrit efjicaciavi seduclionis ,
« c'est.-a-dire une efjicaci te de seduction etdetromperie^ comme
« I'exprime le syriaque. Dieu permettra, selon Meno-
cum ea pscudopropheta , qui fecit signa coram ipsa, quibus seduxit eos qui
acceperunt caraclerem beslice, et qui adoravcrunt imaginem ejus.
' y lo. Et omni seductione iniqii.itatisiis qui percuiit. — - Ibid. Eo quod
cliaritatent veritaiis non receperunt utsali^ijiereiit. — ^Ibid. Idea mitLttil-
lis Deus opcrationcm envris. (Or. ivep'^'siav irXav/)?.) — * Cornel, a Lapide
/lie.
SLIl I.V II* ErilRE AUX TIIESSALOmCIEnS. So
« chius * , qu'ils soient trompes par les faux miracles de
n I'Antcchrist , que I'Apotre appelle hzoyzi7.\) r/av/;^ , une
a efJicaciU de Iromperie^ parce que rAntechrist les attirera
« par-la efficacemcnta lui. » Estius remarque aussi'^ que le
grecporte, vji'j'/iixv 7:).ai/y];,une efficacite d'erreur , d'illu-
sion , d'imposture ; et il ajoute : « C'est-a-dire que Dieu
a leur enverra cet hommequi les trompera etles engagera
a dans I'errcur par I'operation du demon qui agira effica-
M cement en lui : Hoc est , millet homincm , qui , diabolo ef-
^ijicaciter in se operanle , deccpluras eos sit et in errorem duc-
<i turus. II r enverra, continue- t-il, non que Dieu doive
« lui commander de iromper les hommes, ou I'autoriser a
« le faire , mais parce que I'avenement de cet impie , con-
«sidere conime destine a punir les peches des homines,
n est un evenement qui entre dans I'ordre des desseins de
V Dieu : Millet anlem , non quod auctoritalem aut mandalum
nfallendi homines eidaturus sit , sed quia adventus ejus , qaa^
« lenus ad pnniendani peccala hoviinum , ordinalus erit a Deo.
« Car les hommes ne souffrent aucune peine , aucun mal ,
« qui ne leur soit envoye de Dieu : Nullum enim malum
o patiunlur homines , quod non Deus immillat. »
L'Apotre dit que Dieu leur enverra cette efficacite d'er-
reur , dzxoT.ia':i\)aaL autou; to ^liidii ; ce que la Vulgate ex-
prime par , ut credant mendacio. L'unc etl'autre expression
sont equivoques; elles peuvent marquer la fin pour la-
quelle Dieu enverra cette efficacite d'erreur, ou simple-
ment I'effet qui en resultcra : c'est-a-dire que, dansnotre
langue, on pourroit traduire avec le P. VeronetdeMa-
rolles , Dieu leur enverra cjjicacile d'erreur a. cc quils croient
au mcnsonge. Mais de quelque maniere que Ton traduise ,
il faut remarquer avec Estius ^ que « cette parole ne si-
« gnifie point que Dieu se propose pour fin le mensonge ,
« ni la foi au mensonge : Jam nee in eo quod additur , ut
« CREDXNT MENDACIO , vel ut ^imhrosianus gi'ceco Icxlui con-
i^Jormiler legit', in hoc lt credant mendacio; signijicalur
« Deus mcndacium aut mendaciifidem inlendere. IMais , ajoute
o cet intcrprete , ou la particule ut doit etre ici consideree
c< comme consecutive, c'est-a-dire comme marquantseu-
« lement leffet quisuivra , et dcvant ainsi etre prise en
X ce sens : De cetlemanierc il arrivera qu'ils croironl au mcn-
« songe , c'est-a-dire a une doctrine fausse : Sed vel consrcu-
* Menoch. hie. — - Estius hie. — * Estius hie.
36 PREFACK
« tiva panic Ilia est , ut , hoc scnsu, itafiet nt crcdant mcnda-
« cio , id est .ifalsce doctrime ; ou elle marque rinlcnlion de
« Dieu , qui est de piinir , par un chatiment dont I'effel est
« a la verile non-seulcment une peine, inais memo un
« peche : Vel significalur inlentio Dcipunicvtispcr id quod
« non lantum poena est , vcriim eliain pcccalnm. Et certes ,
« continue ce judicieux interprcte , qu'y a-t-il dc plus juste
« en Dieu , que de pcrmettre que ceux (jvii n'ont pas voulu
« recevoir la verite tombcnt dans I'lirreur , et croient a
« la faussete? ^Ji/V/f/zm opiid Denm jnslias , quam ut qui
« verilatcm suscipe.re noliierant , in crrorcm incidant , et falsi-
« laticredant? Ce qui nous donne lieu de dire, ajoute-l-il,
« qu'il y a veritableuicnt certains peches qui sont la peine
« des peches precedens : Undedicimus qiuedamitaesse pec-
« cata , ut ctiamprceccdentiiimpance sint pcccalornm. »
Et c'est ce que I'Apolre nousmarqiie lui-mcme aussitot,
en ajoutant que Dieu agira ainsi, ajin que Lous ceux qui
n'ont point cru a la vcritc , et qui ont au contraire consenti a
I'iniquitc , soient condamnes : Ut junicENxiiu , omnes qui non
crediderunt verilali , sed conscnserunt iniquitali *. La iin que
Dieu se propose , c'est ie jugement ctla condanmation de
ceux qui ont I'ejele sa lumicre , et qui sc sont livres au pe-
che : ce qui donnc lieu a saint Thomas de dire sur cet en-
droit meme de saint Paul: « Voila (|uelcst !e progres dupc-
« che : prcmierement, un homme , enpunition dupremier
« peche, est delaisse de la grace , et tombe dans un autre
« peche , et ensuite est puni elernellemcnt. » Et avant !ui
saint Augustin avoit ainsiexprime lamenie pensee :« Lors-
« qu'ondil qu'ua homme est livre a ccs raauvais desirs , ce
« qui Ic rcntl coupable est , qu'etant abandonne de Dieu ,
u il leur cede etil y consent , ilen estlie, il en est entraiiic,
« il en est pris , il en est possede , scion qu'il est dit , que
« quiconque est vaincu, est esclave de ceiui par qui il
« a etc vaincu ; et ainsi le peche nouveau qu'il commet est
a la peine de son peche precedent : Cum dicitur homo
« tradi desidcriis suis, indcjit reus, quia descrlns a Deo eis
« ceditate^ue consenlit, vincituvy trahilur,capilur, possidetur :
« a ffio enim rpiis delictus est, huic et scrvus addiclns est ; d
« Jit ei pcccatum conscqucns pnccedenlis pa:na pcccali ~, »
Et il est inutile de demander connnent Dieu, sans etrc r.u-
leurdupeche, peutexercer sur lespecheura celtc terrible
^ y II. — - Aiii^- contra Jul. hi. lu. c 3.
SIR I. A n'' EpirRU \\\ thessai.omcik.ns. 87
juslice par laquclle il Ics punit en Ics livrant aux dcsirs do
lours oauirs, d'ou il arrive que les nouveaux peches qu'ils
lommettenl sout line punilion dc leurs peches precedcns:
il sulfit de savoir, comme dit encore saint Augnstin, que
u cela se fait d'une maniere merveilleuse ct ineffable par
" celui qui sait excrcer scs jugemcns, non-seulement sur
« les corps des hommes, mais sur leurs coeurs memes, non
« en produisant en eux lenrs mauvaises volontes, mais s'en
« servant comme il vcut, lui qui ne peut rien vouloir d'in-
" jusle : Facil hac miris cL incfjahilibus modis , qiiinovit jusla
v^ indicia sua^ non solum in corporibus hominum, sedct in ipsis
II cordifjiis operari, qui non facil volimlalcs malas , sed utilur
« cis ut volucriL , cum aliqaid inique vcllc von possit *. » II
suflit de reconnoitre avec Estius qu'il n'y a rien en elfet
enDieu de plus juste que de permetlre que ceux qui n'ont
pas voulu recevoir la verite tombent dans I'erreur et
croient a la faussete : Quidenim opud Dcum juslius , quant ut
qui veritalcm suscipere nolucruTit, ineirorcm incidanl, eljalsi-
lali crcdant? On Irouvera a la suite de cette preface une
Dissertation dans laquelle sera expose et discute plus am-
plement tout ce qui regarde I'Antechrist.
Apres avoir fait connoilre le caractere de ceux qui se
laisseront seduire par 1' Atcchrist, 1' Apotre rassure les Thes-
saloniciens, et se console lui-meme en considerant qu'ils
lie sont pas tels : mais parce que ce discernement vient du
choix dc Dieu, et que le choix de Dieu vient de son amour,
il les considcre comme aimes de Dieu, et reconnok qu'il
lui doit de continuelles actions de graces pour eux, parce
qu'il les a clioisis des le commencement pour les sauver
par la sanctification dc son Esprit, et par la foi de la verite,
a quoi il les a appeles par I'Evangile que lui Paul leur a pre-
che, et afin de leur faire acquerir ainsi la gloire de notre
Seigneur Jcsus-Clirist^. 11 les exhorte a demeurer fermes,
et a conservcr fidelemcntlcs traditions qu'il leur a apprises,
soitde vive voix , soit par ses deux lettres^. « Cela fait voir,
« dit ici le P. Mauduit , que ce n'est que par occasion que
« les apotresontmis par ccrit une partiedece qu'ils avoient
* Aug. contra. Jul. lib. ni. c. 4. — ^-^ 12. et i3. Nos autein debcmus gra-
tias agei-e Deo semper pro vobis,fralres dilecti a Deo, quod elegen't vos Dcus
priinhias (j;r. ir:' apyr.c , ab inuio), etc. . ■ in qua ( gr. si; I, in quod) vocavit
vos, etc. — '-^ 1 4- Ita(iuc,fratixs, stale etlenete Iraditionesquas didicislis,
sit/e per sermonem , si\,e per epistolam nosiram.
38 PIll^FACE
« pr^che ; et qu'en particulier nous n'aurions pas la seconde
« epitre aux Thessaloniciens , si I'oubli ou ils etoient tombes
« de ce que saint Paul leur avoit preclie , et I'alarme qu'ils
« avoient prise dc quelques termcs de la premiere epitre,
n ne lui avoient donne lieu de leur ecrire cetlc seconde. »
Conduite admirable de Dieu a I'egard de ses elus ! Les moin-
dres evenemens entient dansl'ordrede sesdesseins. L'ou-
bli et I'alarme des Thessaloniciens donnent lieu a I'Apotre
d'annonecr par ecrit et de transmettre ainsi a tous les sie-
cles des verites qui ne se trouvent expressement marquees
que dans cette lettre. Mais de plus , « il est evident par ce
n texte , dit saint Jean Chrysostome S q"c les apotres ont
a enseigne de vive voix plusieurs veriles qu'ils n'ont point
a ecrites : les unes et les autres sont egalement dignes de
« notre croyance. » Ce qui est conforme a ce qu'ont en-
seigne les plus anciens pcres , dont la doctrine a ete recon-
liue et confirmee par le concile de Trente, qui declare que
que la verite et la discipline de I'Eglise catholiquc sont com-
prises , tant dans les livres saints que dans les traditions qui
ont ete recues de la bouche de Jesus-Christ meme , ou de
ses apotres , et qui ont ete conservees et transmises jusqu'a
nous par une chatne et une suite non interrompue. Apres
cela I'Apotre souhaite aux Thessaloniciens que Jesus-Christ
et Dieu notre Pere les console lui-meme et les affermisse
dans la bonne doctrine , et dans toutes sortes de bonnes
CEUvres ^.
11 leur demande le secours de leurs prieres ( cliap. Jii) ,
premierement afin que la parole de Dieu se repande de
plus en plus , et qu'elle soit partout en honneur comme
chez eux; secondement , afin qu'il soit delivre de la con-
tradiction de certains esprits medians et intraitables qui
s'opposoient aux progrcs de I'Evangile ^ ; ce qui lui donne
lieu de remarqaer que la foi n'est pas commune a tous '*. 11
espcre de la fidelite merae de Dieu, qu'il les affermira dans
le bien et les preservcra du mal ^. Plein de confiance en
la bonte du Seigneur pour eux, il suppose qu'ils accom-
plissent, et i! espere qu'ils continueront d'accomplir tout
ce qu'il leur ordonne *'. Il souhaite que le Seigneur dirige
lui-meme et conduise leurs coeurs a I'apiour de Dieu et a
* Chiysost. hie. EvrsuOsv SrX^^ on oi 'K(M-va. ^i' eTriaToXr? 7rap6<Ji5'o(Tav,
dXXa leal ai'pacpwi;. Ou.oiw; ^s xdx.Etva, xa.1 Tatj-ra tarw d^towKTra. — --^ i6. —
■' ■jj- r, et a. — * -^ 3. Non eiii/n omnium estjidcs. — * -^ 5. — ^-^ 4.
SUR LA n" I^fItKE AUX inKSSALOJIlClEMS. 3c)
rattente do Jesus-Christ ', double motif qui doit soutenir
leur fidelite. Apres les avoir ainsi disposes a rccevoir le re-
o;lement qiVil va lour prescrire, il leur ordonne au nom de
Jesus-Christ de se separer de tous ceux d'enlre leurs freres
qui sc conduisent d'une nianierc dereglee, et non selon les
principes qu'ils ont recus de lui , taut par ses instructions
que par son exemple m^me ^. II les fait souvenir qu'il n'y
a rien eu de deregle dans sa conduite , et qu'il n'a mange
gratuitement le pain de personne , mais qu'au contraire il
a travaille avec peine et avec fatigue jour etnuit, pour n'e-
tre a charge a aucun d'eux ^. 11 leur represente qu'il avoit
toutefois le pouvoir d'exiger d'eux sa subsistance , mais
qu'il a prefere de leur donner lui-meme I'exemple , afin
qu'ils Timitassent ^. Il leur rappelle qu'a I'exemple il avoit
joint I'instruction , et leur avoit declare que celui qui ne
veut point travailler ne doit point manger ^. Il leur temoi-
gne qu'il a appris qu'il y en a quelques-uns parmi eux qui
sont deregles, qui ne Iravaillent point, et qui se melent de
ce qui ne les regarde pas ^. Il ordonne a ces personnes, et
il les conjure par Jesus-Christ de se tenirrelirees dans leurs
maisons, de travailler de leurs mains , et de gagner ainsi
leur pain par leur travail ". Ensuite il s'adresse a tous, et
lesexhortea ne point se lasser de faire le bien^. II ordonne
que si quelqu'un n'obeit pas a ce qu'il prescrit par sa let-
tre, les pasteurs le notent , et que les fideles n'aient point
de commerce avec lui, afin qu'il en ait de la confusion^.
II leur recommande de ne pas le regarder toutefois comrae
ennemi, mais de le reprendre a I'a^ enir comme un frere ^^.
II souhaite que le Dieu de paix leur donne la paix en tout
temps et en toute maniere ^^ ; en tout temps , en conser-
vant la paix entre eux , et ne permettant pas qu'elle fut
troublee par aucune resistance a ce qu'il vient de prescrire ;
en toute maniere *^, en leur donnant de jouir ainsi de la
paix non-seulement entre eux , mais encore de la part de
ceux qui jusque-la s'etoient opposes a la foi et les avoient
persecutes. II souhaite que le Seigneur soit lui-raeme avec
eux tous^^. Pour donner plus d'autoriteasa lettre, etpour
empecher peut-etre qu'ou n'en produise de fausses sous
son nom , il la signe de sa main apres I'avoir dictee : il y
1 ^ 5._2 ^ 6.— 3-f ,. ct 8.— S'9-— ' i '0-— "^ l'- I''-— V 12.— » T^ r3 .
— ^i a.—'" y i5.— «> -j^ r6.— " Ibid. In omni loco (Gr. vi ttcvtI rpoww,)
omni modo. — " Ibid.
4o PREFACE sun LA n<= EPITRK, CtC.
mer pour paraplic , commc' a toutcs ses autrcs cplfrcs, le -
soiihait tie la grace cUi Scii^^iieur ^ Toutes les civililes dn
grand doetcur de la grace de Jesus-Christ se termiucut a
la souliaiter a ses amis. G'est son caractere et son scing ,
parcc que c'est I'amour et reffusion continuelle de son
cocr.r.
Ucmarqucs Les inscriptions grecques qui sc lisent a la fin de celle
*"[ ' H^^'"o6 '-'P^'"^ portent qu'elle fut ecrile d'Alhenes , comme elles
celle «5piire" ^'' "I'^'^q^'cnt de la premiere. Mais 'nous avons montre que
a i't(5 (?crlie. ctla ne pouvoit etre de la premiere, et que saint Paul etoit
passe d'Atlienes a Corinthe, lorsque Timothee revint de
Hacedoinc; ctpar consequent celle-ci, qui est postericure
h la premiere , ne pent avoir etc ccrite d'Alhenes , ou saint
Paul ne paroit pas etre retourne. L'auteur de la Synopse
allribuce a saint Athanase , OEcumenius , et quclques ma-
nuscrits grecs ^, portent quelle a ete envoyee de Rome :
mais on no Irouve dans ceLte epilre aucun caractere qui I'a-
vorise cctle pretention ; I'Apotren'yparle point doses liens :
tl'ailleurs ccla elolgne trop cette epitre de la premiere, qui
fut certainement ecrite de Corinthe , comme nous 1' avons
montre. Le syriaqueporte que celle-ci fut envoyee de Lao-
dicec de Pisidie par Tychique ; mais ce sentiment n'est
fonde sur aucune preuve. Les inscriptions qui se lisoient
dans les exemplaires latins portent qu'elle fut envoyee par
Tito, diacrc, ctpar Onesimerce qui est certain, c'est qu'elle
n'a pu etre envoyee par Onesime, eselave de Philemon,
pnisque cet Onesime ne fut converti que long-temps apres
I'envoi de cette lettre. L'opinion la plus vraisemblable est
que cette leitrc fut ccrite do Corinthe, pen de temps apros
la premiere , c'ost-a-dire vers I'an 52 ou 53 de I'cre chrel.
vulg. La conformite des matieres qui sont traitees dans I'une
et dans I'au trc ; les explications qui se trouvent dans celle-ci,
et qui sont des suites dc ce qui est marque dans la premiere ;
enfin les noms de Silvain ou de Silas , et de Timothee , qui
se lisent a la tete de Tunc et de I'aulre, toutes ces circon-
stances reunies font juger que ces deux letlres sont ecrites
a pen de distance Tune de Tautre , et toutes deux du memo
lieu. Saint Paul ayant demeurc dix-huitmois a Corinthe^,
a eu le loisir d'y recevoir des nouvelles de I'Eglise de Thes-
salonique , et de satisfaire aux difficultcs des fideles dc cette
Eglise.
' y 17. adfincm. — - ride var. Lccl. Mill, ad calcenihi/^uscifislohc . —
2 jtCt. XVIIJ. II.
DISSERTATION SliU L'ANTECUniST. 4f
DISSERTATION
SUR
L'ANTECHRIST.
Le nom di Antechrist remonte jusqu'au temps cles apotres ; Remamues
jioiis le irouvons dans les livres saints. Saint Jean est le sur le nom
seul qui se serve de ce mot : mais il le repcte plusieurs fois, ll'-^«'ec//m^
ct il iait. meme entendre que ce nom etoit deja commun ^'^'^''f^^ ^P"
dans le langage desfidcles:.'¥<?5/)^ftV^ cnfans , dit-il, c'est ^V^ ce'lrmm °Ceue
la (Ictiiiere hcure : et comine vous avez entcnda dire que l'Ainte- Dissertation a
cuniST vient, ily a dejaaussi maintcnant plusieurs Antcchrists^ . pour oljjei
Ce noin est jrrec : et il est compose de la particule ayr/ . "°'q>^e 1 xin-
° .. , ^ , . . .[. „, . 'Ifcliristqui
qui marque opposition, etdumotXjOfjtocquisigninc t knsl. doitparoitre
Tous les peres et tous les ecrivains orthodoxes couviennent » j^ fin des
que le nom A' Aritechrisl signifie conlraire ou oppose a Jesus- *'*^'^^' -
Christ ~. Ce nom considere en lui-meme convient a tous
ceux qui de quelque maniere que ce soit s'opposent a Jesus-
Clirist. De la vient que les ap6tres et les saints peres par-
lant des heretiques qui par leurs erreurs se sont elevcs con-
ire Jesus-Christ, les ont appeles Antcchrists. Nous venons
d' entendre saint Jean qui des son temps disoit : Ily a d/jd
aussi mainlenanl plusieurs Anlechrisls. Et c'est ce qui donne
lieu a saint Cyprien de dire : « Le bienheureux apotre Jean
« a appele Anlechrisls tous ceux qui sorloieut de TEglise ,
« on qui s'elevoient contre I'Eglise :ce qui montre que tous
« ceux qui se sont evidemment separes de la charite ou de
« I'unite de I'Eglise catholique, sont des ennemis du Sci-
« gneur , des xVnteclirists '. » De meme saint Jerome, apres
* r. Joan. n. i8. Vide et y 29.. etvi . 3. el 2. Joan. 4 7. — ^ Hilar, ad
Cathol. episc. coiHra Arianos. Nominis AnlicJvisti ptvpnelas est CItristo
esse couu-avmm. Hieron. ep. ad Algasiain , quxst. 1 1 . Ipse est enim iini-
fersuriim perdnio , quiad^ei-saturChrislo, et idea vocaVir Antichrislus.
■^ug. Tr. 3. in 2. Joan. ep. latine Antichrislus, conirarius est Cht-isto. El
"^"- — ' O?^'- fp- "S^' ad Magnum. Bcutus Joannes apostolus uni^crsos qui
42 DISSERTATION
avoir rapporte le texte de saint Jean , ajoule : « Car il y a
« autant d'Anlechrits qu'il y a de dogmes faux : Tot enim
« Anlichrisli sunt, quot dogmata falsa '. » Rien n'est plus
coramun que ce langage dans les ouvrages des peres. Mais
\ Anlcchrisl simplement dit est celui qui selon le temoi-
gnage des prophetes , des apotres et de toute la tradition ,
doit s'elever centre Jesus-Christ a la fin des siecles , et qui
par I'exces de son impiete meritera plus que tous les au-
tres le nom ^ Antechrist ; c'est de celui-la que saint Jean
parle , lorsqu'il dit : Vous avezentendu dire que l'Antechrist
vient; et c'est aussi de celui-la seul que nous nous propo-
sons de parler dans cette Dissertation '^.
L'AnteclirUt L'Antechrist sera un horame. Saint Paul menie nous
seraunjiom- Papprgnd^ lorsqu'il dit ^ qu'avant que lejour du Seigneur
pas'une socje- ^"'^^'6 , doit paroitre I'homme de pecke , homo peccati ,
Id d'hommes. 6 avQooiT.oc.Trii a^-afj-Loiq ^ l' en/ant de perdition ,rii.ivs VERnnio-
Nis , 6 vlo; Tfii arrw/cj'a^. Get article grec 6 joint au mot
avBor,-)T.oi , et au mot moc,, marque certainenient que I'Apo-
tre parle d'unepersonne distincte. C'est ce qui resulteaussi
de cette autre parole de I'Apotre : Alors se decouvrira cet
impie, ille iniquus, 6 avo^og, que le Seigneur Jesus detruira
par le souffle de sa bouche *. On peut encore le prouver
par I'expression de saint Jean ^, qui annoncant la ruine
des deux betes monstrueuses , qui , selon toute la tradition ,
represenlent I'Antechrist et son faux prophete , dit que ces
deux monstres furent jetes tout vivans dans I'etang de feu :
Vivi missisunt hi duo in stagnum ignis. Et aussit6t il marque
la ruine de ceux qui marchoient a la suite de ces deux mons-
tres : Et ceteri occisisunt in gladio sedentis super equum. Ces
deux monstres sont done deux personnes distinctes , qui
seront les chefs de la multitude seduite par eux. Saint Cy-
prien etoit persuade que I'Antechrist viendroit en la per-
sonne d'un homme ; et il pretendoit meme le prouver par
de Ecclesia exissent , cjuiquc conira Ecclesiam facerent , Antichristos ap-
pellant. TJnde apparct adt'O-sarios Domini Aiilichristos onines esse quos
constet a charitate atque ah uniiale Ecclesice catholicce recess-isse.
* JJieron. in Nahum. ii. -j^i i . — ^ Nous avons ici fail usage principalement
du grand ouvrage de Thomas Maliienda, dominicain cspagnol, professearde
iheologie. Cet ouvrage intitule , De Antechrisio , parut pour la premiere
fois hJiomeen 1604. L'auteur. en donna une seconde edition revue etaugmen-
tee, qui parut a Faience en 162 1. Sur cclle-la ful faite celle qui parut a
Lyon en 1647. C'est sur celle-ci que nous avons Iravaille. ^ — ^ 2. Thess. 11. 3.
— * Jbid, -^ 8 . — * Apoc. XIX. ao. 21.
SIR L A."STEC:niUST. 43
un texte d'lsale, qu'il rapportc selon I'ancienne Vulgate
faite sur la version ties Scplantc ' : Item , de Antichristo quod
IN HOMiNE venial, apiid Isaiani' : Hie homo qui concilat ter-
ram, et commovet regca , qui ponit orhern Icrrm tolum dcsertum.
Ce que le prophete dit du roi de Babylone , selon la lettre ,
cepere rentendallegoriquement de I'Antechrist. Saint Je-
rome dit aussi : « Ne croyons point que TAntechrist soit ,
« comme quelques-uns le pensent , le diable ou quelque dc-
« mon ; niais croyons que ce sera qlelql'un d'entre les
« hommes en qui Satan hahitera tout entiercorporellenient :
(1 Sed UNUM de homimbus, in quo lotus Salanas hahilalurus
a sit corporalilcr^. » C'est aussi lapensee de saint Jean Chry-
sostome : « Qui sera cet Antechrist? sera-ce Satan? Point
« du tout , dit ce pere : mais ce sera un uomme en qui se trou-
« vera toute I'efficacite de Satan ; car scion I'Apotre meme ,
a ce sera un homme qui s'elevera au-dessus de tout ce qui
« est appele Dieu *. » Ce sera un homme , et non pas une
societe d'hommes ; ce sera un homme , et non pas une mul-
titude d'hommcs : I'expression de I'Apotre est claire ; et il
n'cst pas possible d'en eluder la force : 1" Antechrist sera un
homme qui , distingue entre tous les autres par I'exces de
son impietc , meritera d'etre appele par distinction I' homme
depeche , V et^Jant de perdition : O avS^coTTo; r/^: yjj.y.'j-.ixz, 6 'j:o;
De meme que Jesus-Christ a ete figure avant sa venue , Tyrans oa
de meme se sont deja eleves plusieurs tyrans ou imposteurs imposieurs
qui ont represente I'Antechrist , ou qui ont ete ses precur- ^^]°^^ cieles
seurs.Le plus distingue est I'impie Antiochus; c'est la remar- jg pAnte-
que de saint Jerome ^; et saint Cyprienparlantde ce prince christ.
disoit aussi : « Antiochus ce roi cruel , ou plutotl' Antechrist
« represente dans la personnede ce prince : Rex Antiochus
" m/estiis J ivimo in Antiocho Anlichrislus expressus ^. »
On peut aussi regarder conime precurseurs de I'Anle-
christ Herode , roi de Judee , qui fit massacrer une multi-
tude d'enfans pour perdre dans ce massacre Jesus-Christ
meme , cenouveau roi dent les mages lui apprirent la nais-
sance ' , et Simon lemagicien, qui par ses enchantemens se-
* Cypr. Testim. lib. m. c. ii8. — - Isai xiv. 17.^/17. — ^ Hieron. in
Dan. Til. — * Cfiijsost. horn. 3. ini. epist. ad Thess. — ^ Hieron. in Dan. xi.
Sicut Salvalor halel et Salonionem el ceteros sanctos in lYjjitm adventus sui:
ic et Antichrislus pessimum regem Antiochum qui sanctos persecutus
• St, templumque violavit, recte tjpum sui habuisse credendus est. — " Cypr.
in exhort, ad Mailyrium, c. n. — ' Matt. ii. 16.
44 DISSERTATIOIX
duisoit los pcuplcs ,sc disantelre quclque choso dc grand ;
(juelques pores prctendcnt meme que cet imposleur se di-
soit etre le Christ* . Nous pourrions encore parler do B'ar-
coquebas et de piusieurs autres imposleurs , sur lesqucls
on pent voir cc qui a cte dit dans la Dissertation sur les faux
Messies^. ApoUonius de Tliyanes , Neron, Diocletien et
Julien I'Apostat , peuventetre encore regardes comme des
prccurscurs de I'Antechrist. Ouelqucs-uns ont meme cru
que Neron rcssuscitcroita la fin des sieclcs , ou meme qu'il
n'etoit pas niort, et qu'il reparoilroit sur la terre a la fin
des temps , et seroit 1' Anlechrist qui doit paroitre alors ^ ;
niais cette vainc opinion est si peu fondee, que saint Au-
gustin la refute en deux mots, en disant : « La prcsomption
« et la temcrite de ceux qui pensent ainsi me paroit bien
« etonnante : MiiUivm mihi inira est hmc opinanlium tanta
<i prcesiimptio *. »
Maliomet pa- Entre tons ceux qui peuvcnt etre regardes comme pre-
loii «;irc non- curseurs de r Antechrist , le plus lameux et le plus distingue
sculemeni ggj- pimpie Mahomet , que quelques-uns ont meme cru etre
I ui"eurs dT ^^ veritable An techrist. Jean Anniiis de Vilerhe, religieux de
rAnicclirisi, Tordre de saint Dominique, et maitre du sacre palais, qui
mais meme vivoit au quinzicme siccle , fit un petit traite intitule : Ques-
le fondateur lig^^g gn^ l' ylpocahmse , auA dedia au pnpe Sixte iv et aux
de 1 empire i • i -.• i i i -i . \ \
la ti'ie du- princes Chretiens , dans lequei li entreprencl de montrer
quel paroitra qne Mahomet est lui-memc 1 Anlechrist. Josse Cliclou, doc-
lodernier en- leur qui a flleuri dans le seizicme siecle ,parott avoir en vue
ncinido J.-G. ^.^^ ouvrage d'Annius , lorsque dans son commcnlaire sur le
iv« livre fie saint Jean Damascene , sur la Joi orlhodoxe
chap. xxvJi, il dit: « J'ajouterai ici que quelques hommes
« tres instruits pensent que cet infame Mahomet , auteur
« d'une loi execrable et abominable , est en personne le
« vrai Antechrist annonce dans les saintes Ecritures, parce
« qu'ils voient que presque lout ce que les Ecritures predi-
« sent de rAntechrist se trouve vcrifie en lui ^.;» Et plus
' Acl.viu. 7. — '^Aiig. de han-es. c. 1. Assej'ebatse esse ClwisUim. Da-
masc. Theophjl. Maxim, cp. Taurta. Hippolu. mart. — ^CeUe Dissertation
se trouve placee dans le tome xix. — * Victoria. inApocal. Aug. dc Ci\>.Dei,
I. XX. c. 19. Noniiulli ipsiim ( Nemnem) resurrecturum el futuruiii Anli-
christum su^picantui\ etc. llier. in Dan. xt. Mulli nostrorum pulant ob scc-
vilice et turpitudinis magnitudiiiem,Domiliiim Nei^nem Anlichrisinm foiv .
Sever. Snip. Sacr.Hist. lib. 11. — * Aug. ex loco citato. — ^ Jod. Cliclitoi'.
Id union hie adjecerlm , quodnonnulli viri eruditissimi seniiant Maliomc-
tem ilium spurcissimum , et abominnbilis execrandceque Icgis auclorem ,
esse verum in persona Antichristuin a sacris Utieris prcenunliatum : quia
SIR L A N I 1 ( lilSr.
..... ii iivsiste parliculiercment sur le chap, xiu de I'Apoca-
Ivnse. Jean Hcnlen , rcligieux de Tordre dc sainl Domini-
(|ue , qui est dii m(^me siecle , et qui publia Ic commcnlairc
li Aretas sur I'Apocalypse , mil a la lelc de cet ouvrage um;
preface quil intitula : Jii^cmcnt snrlJpocalypsc ct siirCin-
lechrisl , dans laquelle il entreprend de niontrer que cc qui
estditderAntechrist dans I'Ecriture convienta Mahomet,
et qu'ainsi Mahomet est le vrai Autcchrist. Cepcndant il
ne I'affinne pas absolument ; il sc conlente de proposer mo-
destemenlsa pensee, en disant : « II ne me paroit pas si
« liors de raison de croire avcc Jean Annlus de Viterbe ,
« que la bete qui est decrite aucbapitrexin del' Apocalypse,
« et que Ion interprcte communement de l' Anlechrist, soit
" le faux propbete Mahomet, etc. ^ » Cost ainsi qu'il entre
vn maliere sur ce poiui. Lc docte Gimbrard, qui vivoit a la
fm du meme siecle, parlant dc Mahomet dans sa Cltronolo-
gie sainlc , lime n\ , page i-2 , s'cxprhr.e ainsi : n Je croirois
« facilement que c'estl'Antechrist, ou aumoins le fondateur
« de r empire de I'Antechrist : ^^iii sallum rcgni Anlichrisli
« condilorcm. Car le nom grec Alaouf-rudonne preciscment
n le nombre 666 , qui est le nombre du nom de la bete dont
<i parle I'Apocalypse au chap, xui -. » Et a la page 486, il
ajoute : « Le nombre 666 marque dans I'Apocalypse, est
« le nombre de Mahomet meme , qui est le vrai Antechrist ,
« ou du moins le fondateur dc son empire : Vel eerie rcgni
<i'eju<; fumlaloris ^. » Pierre Bulcngcr , qui vivoit au mcmc
temps , et qui a laisse quatre livrcs sur l\lpoealypse, s'cs-
primc ainsi en expliquant le chap, xni : « Je croirois facile-
« mcnt avec le tres docte theologien Gilbert Genebrard ,
«quc ce scelerat ct cet imposteur (Mahomet) est I'Ante-
« chrisl, ou au moins le fondateur de I'empire dc I'Ante-
" Christ : Ant saltern rcgni Ant ichrisli condilorcm. Et certes le
" nom de Mahomet donne le nombre du nom dc ia bete ,
" qui est 666 '. »
vidt'jufen tannia quoe Scripturce de Anlichristo proBdicunt in eo esse ccm-
pli'ta.
* Joan. Ilenten, Non adinodum videiur absurdwn id quod senu't Joannes
Aniiius f ilerbknsis, qnml besiia qiiam interpretatunr cunununitcr Anli-
chrisUtin. dp qua Apoc. xiii. til spnidopropheta Bfahomries, elc. — -Geneor.
llnncfacilp cicdidevini esse Anlichrislum, aitisallein ixgiii AuUchiisli con-
ditofcm. yam ii»Gu.-ri; reditu numevum nominis bestla' 066 de quo Apoc.
xni. fbnme Haii;. — "' IdNumerus 666 in Apoc. c. \\n. \ i-. noUUns, nu-
ineuis esl Maoinctis t cri Aiitichrisii, velcerte ragn: ejusfundatorjs. — *Pc:r.
4() DI5SERTM10IX
Francois Fca-^rdent , religieux dc rordrc de saint Fran-
cois, et docteur de I'universite de Paris , qui est mort au
commencement du dix-ssptieme siccle , s'exprime ainsi
dans SOS nolcs sur saint Irenee , livre v , chap, xxx : « Le
« sentiment d'Annius, de Henten , de Clictou et de Gene-
« brard, hommes docles et catholiqucs, iRe plait beaucoup.
« lis ont cru que Mahomet, cet homme impur, ce faux
« prophele , avec ceux qui soutiennent sa secte detestable ,
« eloit precisement et veritablcment I'Antechrist meme ,
« ou au moins le principal et le plus zele fondateur de son
« empire : Vel illius regni saltern maximum et studiosissi-
« mum condilorem. Et certes il n'y a personne qui ne voie
« que tous les caracteresde la belede l' Apocalypse, et lout
« ce qui a ete anciennement ecrit de I'Antechrist , ou sont
« deja accomplis en lui pour la plus grande partie , ou
« s'accomplissentde jour en jour : In illo vel majori ex parte
<i jampridem complela , vel in dies compleri , nullus est qui
v-non videat. Voici leurs conjectures et les nolres : i" Le
« nombe du nom de la bete designe par saint Jean , et
« considere en lettres grecques , convient au nom de cet
« impie, puisque les huit lettres de ce nom JMaoue'-t; ou
« MoausTt?, comme I'ecrivent Euthyme, Zonaras et Ce-
« drene, forment le nombre 6G6 '. » 11 ajoute encore onze
conjectures que Ton pent voir. Gabriel de Preau ou Pra-
teole, , docteur de la faculte de Paris, qui mourut a la fin
du seizieme siecle , s'exprime ainsi dans son Traite des Sec-
ies et des hcrctiques , livre ii , au mot Mahomet : « Mahomet,
« cet Arabe digne de toute malediction , est telleraent le
« vrai Antechrist par comparaison avec tous les autrcs ,
Bulenger. Huiic certe nebulonem perditissimuin cum dociissimo tJieologo
Gilberto Genebrardo facile crediderim Anlichristum esse, ant saltern ivgni
Antichristi condilorem. Et sane nomen Maometis reddit numerum nominis
liestioi G66,
' Franc. Feu-Ardent. Mild senlenlia doctorum et catholicorum virorum
Joannis Annii, Jodnnis Hentenii, Jodoci CIiclitOi>ei, ac D. Genebr'ardi
V aide grata est : qui Mahometem impurum pseudojuvphetam, una cum ejus
projligatam ac perditam sectam acritcr tuentibus , vel ipsum definite et
vere Anlichristum , vel illius regni saltern maximum et siudiosissimum
condilorem esse existimarunt : (juando omnes bestice Apocalypseos condi-
tiones , et singula quw apriscis de Anlicliristo scripta sunt, in illo vel ma-
jori ex pane jampridein completa vel in dies compleri , nullus est qui nan
videat. Conjecturas eorum measque subjicio : i" Convenit in primis illius
appcllalioni numerus Gracarum liilerarnm nominis bestia; a Joanne de-
signatusj siquidem oclo litlerce nominis hujus MaoasTt;, sA'c Mcap.c'7'.;, lit
scribiint Euthjmius, Zonaras el Cedrenus. conjiciunt numerum 666.
sun L ANTECllKIST. 47
« quo Ton pourroit presque croire qu'entre tous il estlc
« sciil veritable Antechrist qui doive venir. II n'y a point,
« il n'y a jamais eu d'homme qui approchc plus dc celui
« qu'annoncc la prophetic de saint Paul , que cet homme ,
« qui est le plus scelerat de tous les hommes, en sorte que
a s'il n'en vient point d'autre , il faudra croire que toute la
fl prophetic est acconiplie dans celui-la'. » Et apres avoir
dit que Mahomet est la figure et le precurseur de I'Ante-
christ, il ajoute : « Et par consequent sous I'image et
« I'exemple de Mahomet , Daniel a en meme temps de-
« peint TAntechrist, et a remarque que ce seroit sous un
« tel empire que les Chretiens seroientopprimes, et la pa-
« role de Dieu presque abolie^. »
II est vrai que Jean Viguier etquelques autres ont refute
par occasion I'opinion de ceux qui ont pretendu que Ma-
homet cloit le vrai Antechrist : Benoit Pereira a meme
ecrit sur cela un livre enlier contre Annius ; et au fond il
est certain que si Ton examine soigneusement le temoi-
gnage des divines Ecritures et le sentiment des peres et
des theologicns, on reconnoltra qu'en effet Mahomet ne
peutpas etre le veritable Antechrist. C'est ce qui donne
]'\eu li Thomas Malvenda, dominicain espagnol, qui ecri-
voit au commencement du dix-septieme siecle , de con-
clure en ces termes dans son grand ouvrage sur I' Ante-
christ: « II doit done etre regarde cbmme constant que
« Mahomet n'est pas le veritable Antechrist. Mais, ajoute
« cet auteur, si quelqu'un jette les yeux sur les grands
o maux que cet homme de perdition a causes dans le
« monde, par I'etablissement de sa secte pernicieuse , qui
« a deja perdu une grande partie dc la terre , scion le te-
« moignage m6me de tous les historiens , il aura raison de
« convcnir que Mahomet est un des plus distingues entre
« ceux qui ont represenle I'Antechrist ou qui ont ele ses
« precurseurs : Jure fatebilur Mahomelem magnum fuissc
« Antichristitypum ac prcecursorem^ . »Le pape Innocent ni,
* Gabv. Prateol. Mahometes ille niaiedicU'ssiim/s Aral's , adeo prce omiii-
hus Anticlinsiis, Antichristus vents est, tit pivpemodum uiius ille otnniiim
olimvcnUiriis ipse crcdi qiieat. Nee quisquatn est aiitfuitaliqtiaiulo qui
propius accederetad Paiili prupheliam, alque ille homo, homimini iiequissi-
iniis: adeo iitnisi alius vctierii , omiiisprophetia in hoc Mahoinett, impleta
cxistimari defeat. — ^ Id. proinde sttb imagine et exemplo hujus Mahoinetis,
siniul depinxit Daniel Antichristiun : el significavil regnum hujus modi
fun, ill quo ajjligefcntur Christiani , et fct-e deleretitr vcfbttm Dei. —
' Mah'cnda, de Anticlrr: I. i. c. 25. Sit i-'itur extra omiiem controversiam
'iS DISSERTATIOX
dans la buiic qu'il donna en 1 2 1 3 pour la sixi^me croisadc
conlre les Sarrasins , s'cxprimoit ainsi : « Nous eperoii^
M que la puissance de Mahomet finira bientofc , puisquc e'est
« la bete de V Apocalypse , dont le nombrc est six cent
« six et il y en a deja pres de six cents de passes. » Quoi
qu'il en soit de ce norabre mystcrieux, du moins il de-
meure evident que des lors on pensoit que la bete de I'A-
pocalypse pouvoit reprcsenter rerapiie antichretien de
Mahomet; et on en etoit si persuade , que le pape ne crai-
gnoic pas de le dire alfirmativement dans une buUe gene-
rale adressee a toute la chreliente : La puissance de Maho-
met EST LA BETE LE l'Apocalypse. Sahil Eulogc dc Covdouc ,
qui vivoit dans le neuvieme siecle, au temps de la persecu-
tion des Sarrasins , et qui donna sa vie pour la defense de
la foi , parlant de Mahomet dans son Apologic pour les saints
martyrs, sexprime ainsi : « Get liomme qui, anime d'un
« esprit impur et contribuant a opercr le mystere d'ini-
« quite comnie un vrai precurseur de lAntechrist , ut
« verus Antichristi prcccursor , a donne a un peuple de per-
« ditionje ne sais quelle nouvelle loi, qu'il a ctablie de son
« propre mouvcment, et par I'instinct du demon. » Saint
Pierre deMajume, qui vivoit auhuitieme siecle, etdontsaint
Jean Damascene fit I'eloge, regardoit Mahomet comme Ic.
precurseur dc V Antcchrisl. Saint Jean Damascene , qui vivoit
au meme siecle, dit aussi a la fin de son traite dxs Heresies :
« Dans ce temps regne aussi et se soutient la religion de.s
« Ismaelites^ qui entraine les peuples dans I'errcur; culto
« impie que Ton pent appeler en quclque sortc le precur-
« seur de I'Antechrist : Rcligio quam Antichristi quasi pra-
« cursorem appellarc licet. Et il est constant, ajoute Ma!-
venda, que plusieurs autres ont ainsi appele Mahomet :
Quo etiam modo constat alios Mahomctem nwicupasse'K
Remarqucs Mahomet n'est done que le precurseur de i'AntCchrist :
lion du *^ ^^^^ done paroitre un autre imposteur qui scral'Antc-
tompsauqucl christ veritable ; quand paroitra-t-il ? il est impossible dc
doii paroiire satisfaire pleinement a cette question : on pent dire seule-
Ic vcniablc et uj^j^t qyCA nc paroitra qu'a la fin des sieclcs; c'stt ce qui
MahoineLcm non esse Anlichvisium : scd si (juisantc ociilos sibi proponat
ingenlia malci qucc Iii'c pcixliiissiiniis homo in r.iimdinn intulit, coiuVin
exiliali sccta, tjitcc juaf^iuim oibis purlcin jjcidiclil , ill cinioli Uujuinnur an-
nates, jurcjhicliuiv Malwmc.lcm mci!j;niiV! fu'isse Antichrisli i.jp:ini acjuic-
cifrsorem.
' Mah-cnda, de JiUichi: I. \. ciS.
SLK L AATF.ciiaisr. in
n'sultc dii temoignagc conslajU de I'Ecriturc ct do la irn- dcmicr Anto-
diilun. Mais quand arrivera la fin dcs-siecles? rien de plus christ.
incertain. Combicn Ic monde a-t-il dcja dure? comhien
tloit-il durcr encore? questions insolublcs. En effct ,
oombien Ic monde a-t-il deja dure? on pourroit compter
ur ccla plus de quatre-vingts opinions dilt'crenles ; mais
!i pent les reduire a deux principales : I'une fondee sur Ic
ilcul qui resulle de la version des Septante , ct qui
<,!onne plus de cinq mille ans depuis la creation du monde
iusqu'a la naissance de Jesus-Christ, I'autre fondee sur le
ilcuI qui resulte du texte liebreu lei que nous lavons a
resent , et icl que Tcxprime notre Vulgate meme ; ce cal-
iil ne donne qu' environ quatrc mille ans depuis la crco-
iiondu monde jusqu'a la naissance de Jcsus-Chrisl. Nous
avons fait voir aillcurs' qu'en conciliant ces deux calculs ,
on pourroit compter environ quatre mille cent cinquantc-
six ans depuis la creation du monde jusqu'a la naissance
de Jesus-Clnist : c'est I'opinion qui nous paroit la mieux fon-
dee ; mais nous avouons quelle est encore fortincertaine.
Combien le monde durera-t-il? II y a sur cela cliez los
Hebreux une tradition celebre sous le nom d'Elie, seloa
laquelle le monde doit durer six mille ans; savoir , deux
mille ans avant la loi , deux mille ans sous la loi, et deux
mille ans sous le Messie^. Quelques-uns ont cru que celtc
tradition venoil du prophete Elie ; mais d'autres I'attri-
^'uent a im rabbin qui portoit le nom de ce prophete. (.o
^trincipal fondcment de cettc tradition , scion les rabbins
memes, est qr. ' le repos dans lequel Dieu est eutre apres
les six jours de la creation, represente le repos que Dica
reserve a son peuple apres un intervalle de six mille ans
qui rt'pondront aux six jours de la creation ; selon ce que
tlit le Psalmiste , que milk ans sonl devant Dica comme un
jour^. L'expression du Psalmiste est rappelee par saint
Pierre* ; et saint Paul parlant du repos de I'eternite bien-
heureuse , le designe aussi sous le nom meme de Sabbat ,
Sabbalisinus^. Quelques-uns des peres ont aussi pense
qu'en effet le monde ne dureioit que six mille ans. L'au-
teur du livre des Questions aux orthodoxes sous le nom
' Preface sur la Gcncse. — ^Rabbi Jacob fiUus Salomonis in CoUcctaneii de
rA/7.%/o, e Thdlintid, Tt-act. Sanliedtin, capiteUelec. iiUetprete Genebnn-
ih, hcec scn'bii : Docetdonus Elite : Sex mille annis erit mtindus : duobiis
tnille iiiaiiitas, duobiis mille lex, duobits mille dies Messiie. — ^Ps. lxxxix.
— ' 2. I'eir. HI. 8. — ' Ilebr. iv. y.
^O DISSERTATION
de saint Justin, dit : « Selon plusieurs endroits de I'Ecri-
« ture , on pent conjeclurer que ceux la disent vrai, qui
« pretendent que la duree de I'etat present de ce monde j
c( sera de six mille ans '. » Mais pour le prouver, il suppose '4
que Jesus-Christ n'avoit paru que dans le sixieme mille-
naire. Saint Irenee dit: « Autantil y acu dc jours pour la
« creation du monde, autant il y aura de millenaires pour
« sa duree. Ce que I'Ecriture dit de ce qui est arrive alors
« est en meme temps une proplietie de ce qui doit arriver
« dans la suite. Si done unjour du Seigneur est comme mille
« ans , il est manifeste que toutes choses ayant ete creees
« en six jours , leur duree sera de six mille ans ^. Saint Hip-
polyle martyr le pensoit de meme^; mais il fondoit sur
cela un calcul qui , comme le remarque Photius, prouvoit
plut6t I'imperfection de I'esprit humain que la vertu de
I'inspiration celeste. Lactance dit aussi : « Toutes les oeu-
« vres de Dieu ayant ete achevees en six jours, il est ne-
« cessaire que le monde demeure dans I'etat present pen-
« dant six mille ans ; car le grand jour du Seigneur est de
« mille annees , comme le prophete le remarque en di-
« sant : Devanl vos rjeux , Seigneur, mille ans sont comme un
ujonr^. » Mais Lactance ajoute a ces six mille annees le
repos d'un septieine millenaire, selon I'idee des Juifs et
des Chretiens judaisans. Saint Hilaire, a I'occasion de ces
paroles de saint Mathieu, Et six jours aprcs il fut transfi-
gure, dit : « Et certes cette circonstance, qu'apres un in-
« tervalle de six jours le Seigneur paroit revetu de sa
« gloire , monlre et annonce qu'apres la revolution de six
« mille annees succedera la gloire du royaume celeste :
« Nam quod post dies sex glorice dominicce habitus oslenditur ,
a sex millium scilicet annorum temporibus evolutis , regnicce-
« lestis honor prcejlguratur^, » Saint Jerome expliquant
dans une lettre le psaume lxxxix , ou se trouve cette pa-
role ,mille ans sont devantvos yeux comme lejourd'hier, dit :
« Je crois que c'est de cet endroit et de I'epitre qui portc
« le nom de saint Pierre qu'est venue la coutume de con-
« siderer mille ans comme un jour, en sorte que comme le
« monde a ete fait en six jours, on croie qu'il ne subsistera
« que six mille ans; apres quoi viendia le nombre septe-
* Auctov. Qucest. ad oriliodoxos, (jucest. 71. — * Iren.lib. v. ad\>. hceres.
c. i5. — ^ Jpiid Phot. Bibl. n. 202. — '' Lact. Instit.lib. vm. c. i4- etc. 25.
— ' Hilar, in Matih. xvu.
sua l'antechrist. 5i
a naire et oclonaire , dans lequel sera celebre le vrai sab-
o bat,et sera donnee la parfaitc purete de I'enliere circon-
o cision : » (c'est-a-dire reternite memo , qui est consideree
en meme temps conime le septieme jour relativement aux
six mille ans qui I'ont precedee , et comme Ic huitieme re-
lativement a I'eternile qui a precede les six mille ans ):
« Ego arbilror ex hoc loco et ex epislola quce nomine Petri ins-
« cribitiir, mille anno s pro una die solilos appellari , ut scili-
« cct, quia mundus in sex diehus Jabricatus est , sex millibus
« tantum annorum credalur subsistere , et postea venire septe-
« narium numerum , ft octonarium , in quo verus exercetur
« sabbatismus , et circumcisionis puritasredditur^ .
Saint Augustin expliquant le meme lexte ^ , s'eleve con-
tra ceux qui out prelendu fixer ainsi la duree du monde a
six mille annees ; illeur oppose ce que Jesus-Christ dit a
ses disciples : Ce nest point a vous qu il appartient de savoir
les temps et les momens que Dieu a reserves el sa puissance ^.
Etil est vrai qu'il y auroit une temerite inexcusable a pre-
tendre determiner comme certaine une annee qui dut etre
le terme de la duree du monde. Mais celte determination
fixe ne resulte pas de I'opinion qui ne donne que six mille
ans a la duree du monde , parce qu'il est toul-a-fait incer-
tain combien le monde a deja dure. Aussi saint Augustin
meme convient-il ailleurs "* que cette opinion pourroit etre
en quelque sorte tolerable , Quce opinio esset utcumque to-
Icrabilis , si les millenaires n'en avoient pas abuse. II avoue
qu'il a quelquefois lui-meme suivi cette opinion : Etiam nos
hoc opinali Juimus alicjuando. 11 y revient meme dans eel
endroit, lorsqu'il veut expliquer ce qui est dit, que le dra-
gon est enchaine pour mille ans. Car la premiere interpreta-
tion qu'il en donne , c'est en disant c^ue la puissance du
demon est liee par Jesus-Christ dans cette sixieme et der-
niere periode de mille ans vers la fin de laquelle il croyoit
etre ; parce qu'en effet , selon le calcul dcs Septante et de
I'ancienne Vulgate , qui etoit une traduction du grec des
Septante , la naissance de Jesus-Christ se trouvoit , comme
nous Tavons dit, au-dela de cinq mille ans depuis la crea-
tion : Aul quia muLTiMis annis mille ista res agitur , id est
SEXTO ANNORUM MILHARIO , tamqUUm SEXTO DIE, CUJUS UUnC
spatia posteriora tolvuntur ; sv.c\jj\:viO deinde sabbato , quod
• Hier. pp. ad Cypr. olim iSg. — * -dug. Enarr. inpsal. txr.xiv. — » Act.
-. — * ■^ug' de Ct'vit. Dei, lib. x\. c. 7.
.52 I>ISSERTATIO:\
nonhahet vespcriim, reqiiic scilicet nanclorum , qiut non ha"
het Jinem. Et il y rcvieiH encore lorscjuo voulant cxpli-
quer commcntlc dragonne seduira phis !cs nations jusqu'd
ce que mille ans soient accomplis , il propose d'abord de I'en-
lendre de ce qui restc de ce sixieme jour qui renfermc un
espacc de mille ans : Ant quod remanet de sexto die , qui
constat ex mille annis. Dc la vient que Ics uiodcrncs sont
trcspartagessur cette opinion : Ics unslaregardeni, comme
absolument vaine; d'autres pensent qu'clle n'cst pas ab-
solument meprisable; d'autres enfin la regardenl menie
comme assez probable , pourvu toutefois que Ton ne pre-
lendc point en conclurc une determination fixe. Rellarmin
s'en exprime ainsi : « II y a sur ccla une moderation trcs
« sage dans saint Augustin, qui a regardc cette opinion
« comme probable , etl'ameme suivie comme telle dans
n ses livres de la Cite de Dieu. Mais il ne s'ensuit pas que
« nous sachions le temps du dernier jour ; car nous disoris
« qu'il est probable que le monde ne durera pas plus dc
« six mille ans; mais nous ne disons pas que cela soit cer-
« lain : Neque hinc scquitur nos scire tempns ultima; did : dici-
a mus cnini probabile esse mmidum non duraturum ultra sex
« millia annorum , non autem dicimus id esse cerium *. » « Re-
<v jctons , dit Gcnebrard , une determination fixe ct precise
a du nombre dcs annees; mais considerons en general
« comme yraie ia tradition du rabbin Elie ; car en general
« elie ne manquera pas d'etre verifice par Tevenement,
« sur tout puisque meme parmi nous la meme chose a etc
« enseignee par Lactance et autres : Dejinitam ergo et nii-
« nnlam annorum circumscriptionem rejiciamus ; pronunlia-
« turn autem rabbini Elice universe verum intelligamus : nam
« non carebit suo eventu in genere , pnesertim cum apud nos
n idem tradiderint Lactanlius , etc. ^. » Feu-Ardent dans ses
notes sur saint Irenee , dit : « Ce sentiment de saint Ire-
« nee touchant laduree du monde est soutenuet confirmc
« par tant et de si grands hommes , et appuyc sur des rai-
a sons si plausibles , que pourvu que Ton ne pretende pas
« temerairement donner des bornes a la puissance divine,
« j'entrcrois assez volontiers dans la meme pensee : Hcec
« Irencei sentenlia dc mundi per mans ionc , tot tanlosquc habet
« vindiccs et conjirmatorcs J ac plausibiles persuasioncs , mode
' BcUnvni. de Bern. Pont. lib. m. cajj. 3. — ^ Centbr. Clmnogr. lib. i.
SLR i-'antechrist. 58
n (tivina^polestali nihil Icmere prascribatur , ut in earn itibens
" disccndfrrm '. » Malvenda dit aussi : « Si Ton preicnd as-
« surer que le mondo iic doil diircr que six millo ans, en
«> sorte que Ton pretendc en conclure qu'il doit se Irouver
H preciscnient deux millc ans avant la loi, deux mille ans
.< sous la loi, el deux mille ans sous le Messie , cela est as-
« surement tres faux , tout-a-fait intolerable, ou du moins
« tres temeraire ; car on pourroil de la delerniiner facile-
« nicnt la fin du monde , puisque Ion salt combien de
« temps s'estdejaccouledepuislanaissancedeJesus-Christ.
« Mais qu'en general le nionde ne doivedurer que six mille
« ans , quoique la chose soit incertaine , cependant, a cause
« de I'autorite des peres qui I'onl ecrit ainsi , je ne vou-
« drois nullenient condamner cette opinion : car je ne
« croirai jamais que ces grandes lumieres de I'Eglise aient
« avance cela sans de grandes raisons : AHamen universe
« sex millibus lantnm annis incliidi mnndi afatem , quamris
■ res sii incerta , propter aiictorilatem nihilominus palnun qui
« id scripscrnnl , non prorsus damnaverim : 71am Ecclesice ilia
" magna lumina ad earn diccndani scnlcnliani nunquam e.xisli-
o maverim sine magnis ralionibus accessisse. Mais de la on ne
« peut pas savoir ni connoitre certainemcnt la fin du
« monde , puisque le nombre des annees qui se sont ecou-
« lees depuis la creation est jusqu'ici si incertain etsiin-
" connu, comme nous I'avons deja fait remarquer : Nee
a inde certn sciri cognosciquc potest mundi Jinis; cum ratio
CI annorum ab orbe condilo adeo incerta et inexplorata hacle-
« nus sit, ut prcediximus. kxx reste, qui peut nier qu'on ne
n puisse on quclque maniere pressentir par certaines con-
o jectures probables la fin du monde? Quis vero luget pro-
« babili quadam conjeclura prasenliri utcumque posse rerum
« occasuiii ^? »
Ge qui prouve que I'Antechrist ne doit paroitre qu'a la
fin des siecles, c'est 1° que, selon saint Paul, cet impie
doit 4tre extermine par I'eclat du dernier avenement de
Jesus-Chrisfe ^ ; c'est 2° que , selon saint Jean et selon Da-
niel, saperscculion ne doit durer que quarante-deuxmois,
ou trois ans ct demi^, et qu'aussitot apres cette perse-
cution , Ic monde doit etre juge ^. C'est done unc verite
' Feu -^rdeiuins, in tiotis ad S. Ji-en. lit/, v. c. 28. — - MaL'enda , ile
Anlicla: lib. 11. cap. 23. — ' j-.Thess. n. 8. — * Pan. xii. 7. Jpoc. xi. 2. —
' Dan. VII. 8. <j. 2 1.-2C. Jpoc. xi. iti.ctseqr/.
•^^ DISSERT ATIOJS
fondee sur I'autorite iii^me dcs divines Ecritures ; et loute
la tradition rend temoignage a cetle verite. II seroit inutile
d'accumuler ici les expressions des peres ; il suffit de rap-
porter cette parole celebre de saint A.uguslin : « Voici , dit
« cepere, ce que nousavonsappris devoir arriverau temps
« de ce dernier jugement ou vers ce temps : I'avenement
« d'Elie de Thesbe , la conversion des Juifs , la persecution
« de rAntechrist, I'avenement du souverain .Tuge, etc. :
« In illo itaque judicio vcl circa illud judicium, has res didi-
« cimus esse venturas , Eliam Thesbitem , fidein J udceorum ,
« Anlichrislum persccuturum , Christum vcnturum , etc. *, »
Rernarques L'opinion commune dc peres sur la naissance de I'An-
st.i anais- techrist est qu'il sortira du milieu de la nation iuive.
techrist. Sor- Samt Jerome , dans son commentaire sur Daniel , dit e.v-
lira-t-il du pressement : « L'Anlechrist doit s'elever d'une nation
mi!ieu des „ foible, c'est-a-dire du peuple juif : Consurgere debet Anli-
ui s, c pir- ^^ chrislus de modica frcnte , id est, de populo Judceorum^. »
ticulierement .. c \ > ii
de la tribu de Ccttc opmion est londee sur ce que la plupart des peres
Dan? ont aussi cru qu'il sortiroit de la tribu de Dan, et qu'il se-
roit recu par les Juifs en qualite de Messie , qui ne peut
ctre que juif.
Trois textes des sainles Ecritures ont donne lieu de
croire que rAntechrist sortiroit de la tribu de Dan : le pre-
mier texte est la prophetic de Jacob touchantla tribu de
Dan , dont il dit : Dan jugcra son peuple et il deviendra
eomme un serpe7it dans le chemin , ct comme un ceraste dans le
sentier, quimord le pied du chcval, ajin que celui qui le monte
tombe a la renverse ^. Sur quoi saint Augustin s'exprime
ainsi ; « Ce que Jacob dit de Dan en benissant ses enians
« donne lieu de penser que c'est de cette tribu que naitra
« rAntechrist : Cum Jacob Jilios suos benediceret , lalia dixit
« de islo Dan, ut de ipsa tribu existimelur nasciturus Anti-
« chrislus^. » Saint Gregoire-le-Grand dit aussi : « Quel-
« ques-uns disent que TAnlechrist viendra de la tribu de
« Dan, parce que dans cetendroit il est dit que Dan de-
« viendra comme un serpent et qu'il mordra Et il est
« compare non-seulement au serpent , mais encore au ce-
« rasle ; car le mot grec y.ioy.-zy. signifie des comes , et on dit
« que ce serpent apyjele ceraste porte des cornes ; ce qui
« marque fort bien I'Antechrist, parce que lorsqu'il vien-
' Aug. dc CzV. Dei, l.\x. c. 3o. — - Hier. in Dan. xi. — •* Gen. XLix,
iG. et 17.— * jdiii^.quwst. 22, in Josue. ^
^1 i; I ANTECHHIST. 55
« dra , il allaqueia les fideles par la morsure d'une prcdica-
" tionpestiferee, ct s'annera conlre cux dcs comes de la
« puissance : Per quern digne Anlichrisii advcnlus asserilur ,
n quia conlrn Jidelinm vilam cum morsu pcstifera; pra'dicatio-
u nis ,armalur cliam conubus polestatis. Et parce que c'est a
« la fin du monde que 1' Antechrist deploiera tous ses efforts,
« il est dit aussi que ce ceraste iiiordra le pied du cheval ,
« car c'est mordre Ic pied du cheval que d'atlaquer les
« hommos a la fin des siecles : Et quia Antichristus cxlremu
« mundi apprehcndere nililur , cerastes isle equi ungulas mor-
« derc pcrhihetur : ungulas quippe ccpii mordcre est cxtrema
« seculi fericndo contingere. Et parce que les Juifs pris dans
a les filets de leur erreur attendent un faux Christ , au lieu
« du Christ veritable , Jacob ajoule fort bien aussitot : Le
u salut que vous domicrez , Seigneur, sera I'objet demonat-
^^ tcnte ; c'est-a-dire, je n'atteudrai point un faux Christ
« comme ces hommes infideles, mais je croirai au Christ
« veritable , et je lui serai fidele : Et quia Judma eiroris sui
« laqueis capta , pro Christo Antichristum expectat ^ bene Ja-
« cob dicit : Salutare tuum rxpcctabo , Domine ; id est , non
« sicut injideles Antic hristum, sed vcrum credendo Jideliter
n Christum '. » Beaucoup d'autres ont explique dans le
raeme sens cette prophetie de Jacob.
Le deuxieme texte qui a porte a croire que I'Anlechrist
sortiroit de la tribu de Dan , est la prophetie de Jeremie
qui dit : On entend de Dan le bruit de sa cavalerie ; toute la
terre retentit des hcnnissemens de ses chevaux de bataille : ils
sont venus , et ils ont devore la terre et ses fruits , les villes et
leurs habitans ^. Ce qui faisoit dire a saint Irenee parlantde
I'Antechrist : « Jeremie a fait connoitre, non-seulement
o son avenem'ent subit, mais encore la tribu d'ou il vien-
« dra; car il dit : Nous cntendrons de Dan, etc. ^.» Saint
Hippolyte, saint Gregoire-le-Grand , et plusieurs autres
I'entendent ainsi.
Le iroisienie texte sur lequel est elabli ce sentiment , est
I'omission de la tribu de Dan dans le denombrement des
douze tribus au chap, vn de TApocalypse. Saint Irenee ,
apres avoir dit que , selon la prophetie de Jeremie , 1' Ante-
christ doit sortir de la tribu de Dan , ajoute : « Et c'est
« pour ce!a que dans 1' Apocalypse cette tribu ne se trouve
' Greg. Mag. in Job, lib. xxxi. cap. lo. — ' Jercrn. vm. ; '• - ^ Ii'cu-
ad^. hwres. I. y. c. 1.
56 DISSERTATION
« point dans Ic denombrcment de coux d'cntre les enfahs
« d'lsrael qui doivcnr etre sauves^. » Andre el Arelas, eve-
([iics de Ccsarce , le venerable Bede , et plusicurs aulres
penscntainsi,
Mais quant a la prophetic dc Jacob , clle pent s'cntendre,
scion la letlre , dc Samson qui etoit de la tribu de Dan , qui
jugea Israel, ct nuisit bcaucoup auK Philistins. C'est ainsi
que I'cxplique saint Jerome : Sanrson judex Israel de Iribu,
Dan fail : hoc ergo dicil , etc. ^. Et plusieurs meme de ceux
qui pretcndent appliquer ce texte a rAntcchrist recon-
noissent ce premier sens.
Quant a la prophetic dc Jeremic, die peut s'cntendre, a
la Icttrc , de I'irruption de Nabuchodonosor sur la Judec ;
et alors Dan signifiera la vlUe de ce nom , qui se trouvoit
situee a I'extremilc septentrionale de cette province : c'est
ainsi que I'explique saint Jerome : Describitur aiilem a Dan
per Phcenicem vcniurus cum cxcrcilu Nabuchodonosor : in quo
loco Jluvius Jordanis oritur ^ .
Quant a I'omission de latribu dc Dan dans I'Apocalypsc,
Rellarmin se contcnte dc dire qu'on ne sait point assez
pourquoi cette tribu est ainsi omise : Cur aulcm Apocal. vii
omittalur Dan , non satis constat'^. Et Jean le Mercier con-
jecture que dans cc denombrement , au lieu de Manasse ,
il faudroit peut-etre lire Dan, parce que Manasse pouvoil
etrc deja compris sous le nom de Joseph : Dan sane in Jpo-
calypsi omittitur : qua de causa ignoralur , nisi forte pro Ma-
nasse Dan legendum sit, quia jam trihus Joseph meminerat "^ .
Et en cU'et il peut se (aire qu'cn grec, de A AN soit venu
par crreur de copiste MAN , ct de la Manasses.
Ainsi Ics trois preuvcs sur lesquclles est fondcel'opinion
qui faitnaitre I'Antcchrist dc la tribu de Dan ne sont point
absolumentconvaincantes: c'est pourquoiBcllarmin,aprcs
avoir rapporte les tcmoignagcs des peres qui ont tenu ccltc
opinion , conclut ainsi : « Cclte opinion est tres probable
« a cause de I'autorile de ces hommes si respectables ; mais
« ccpendant elle n'est pas tout-a-fait certaine : Non tamen
« omnino ccrta; soit parce que la plupartdes pcresne discnt
« point cxpressement qu'ils savent cela, mais insinucnt scu-
« Icment que cela est probable ; soit parce que I'Ecriturc
'/re/j. ads', lucres. I. v, c. ^.—-IJicwn. in trad. Hcbr. —'' Hicivn. in
Jcrcm. ym.—'" Deltann. dc RoM. Ponlif lib. in. c. 12.— ^ Joan. Mcrccrus
in Gen. XLix. ■jJ' 17-
SLll L A.NTKCHRISr . 5"
i n'cn donno auciinc prcuvc convaincanlc : Turn qiiianulla
Sciipluru amvincil^. »
Maintcnant , pour savoir si I'Anlechrist doit sortir de la
nation juive , il nous rcsteroit a examiner s'il doit etre recu
par les Juifs : nous aurons occasion d'y revenir dans la
suite. Passons a ce qui regarde Ic lieu dc sa naissance.
C'cslune opinion assczcomnuineque rAntcchristnaitra I^'Anieclnisi
I Babvlonc. Saint Jerome , dans son commentaire sur Da- "^V"^?' •»
. I \- ,, . I . t 11 . . . . lial)yIone;
luel , clit que 1 Antechrist naitra de la nation juive , et Yien- viendra-t-Il
dra de Babylone : Qui iiascilurus est de populo Juda;orum , decc\)ays-\ii^
ct de Babylone vcnlurus ^. Andre et Aretas, eveques de Ce-
sarce , s'expriment a peu pres de raeme : le venerable Bede
dit expressement que c'est de cette ville qu'il tirera sa nais-
sance : De Babylone nalum^ . Et beaucoup d'autres le disent
dc meme.
Cette opinion peut avoir pour fondement , i^ le temoi-
gnage de saint Jean , qui nous fait assez connoilre que le
second malheur annoncc au son de la sixieme trompette ,
et termine par la persecution dc rAiitechrist , doit venir
de I'Euphrate , ou est siluee Babylone. En efiet, Andre,
eveque de Cesaree , expliquant ces mots de 1' Apocalypse ,
Dclicz les quatre anges qui sent lies sur le grand Jleuve de
rEiiphrate '* , dit : « 11 est croyable qu'il est ici fail men-
« lion dc TEuphrate , parce que Ton ci^oit que I'Antc-
« christ doit sortir de ces lieux ^. » Aretas le pense de
meme.
2" Le temoignage des anciens prophetes, etspecialement
d'Isaie,qui semblent designer 1' Antechrist sous lesymbole
et meme sous le nom de roi de Babylone. Nous avons dcja
vu que saint Cyprien applique a 1' Antechrist ^ ce qu'Isaic
dit lilteralement du roi de Babylone "^ .
3" La prophetic de iNahum , qui s'adrcssant a la eapitale
desennemis du peuple du Seigneur, lui dit : De loi sorlira
un homme qui former a de noirs desseins conlre le Seignew^.
C'est precisement ce que dit I'auteur du livre de 1' Ante-
christ attribuc a Nicolas Orcsme : « Quant au lieu ou 1' An-
te icchrisl doit naitre , Ic prophets Nahum paroit dire que
« ce sera dans Babylone, eapitale de I'empire des Assy-
M riens : de la vient que ce prophetc s'adrcssant a la capi-
« tale de cet empire, scion quelques-uns , lui dit : De loi
' Bcllcsnn. (le Rom. Pont. I. in. c. 12. — - Ilietrjii. in Dan. xi. — ^ Bedu
in J/mcul. xviii. — * Jpocal. ix. 14. — ^ ^,iJ,. Ccesai: ih J/wc. c. 27.
— ^r>/«\ Tcstim. lib. iii. c. 1 1^.—'' Isai. xiv. iG. tl 16.—'* Nalium, 1. n.
58 DISSERTATION
« sortira un h omme qui formcra de noirs dcsseins conlre le
« Seigneur ^ . »
Mais Oresme confond ici les Assyriens et les Chakleens.
11 est bien vrai que le prophete parle a la capitale ties
Assyriens , mais cettc capitale etoit Ninive , dont le meme
prophete annonce expressement la ruine. Babylone etoit
la capitale des Chaldeens , dont le prophete ne parle point.
Quant aux temoignages des autres prophetes , qui sem-
blent annoncer 1' Antechrist sous le syrabole et sous le noni
de roi de Babylone , on ne peut en conclure que cet inipie
doive tirer son origine de cette ville.
II en est de meme du teraoignage de saint Jean , duquel
on pourroit peut-etre seulement conclure que 1' Antechrist
viendra de ce pays-la ; Andre et Aretas n'en disent pas da-
vantage ; et saint Jerome memCse contente de dire qu'il
viendra de Babylone , De Babylone venturus ; ce qui ne si-
gnifie pas qu'il y naitra, Ou plutot le temoignage de saint
Jean peut prouver seulement que le fleau qui precederala
persecution de 1' Antechrist viendra de ce pays-la.
L'Antechrist Nous n'examinons point quelle sera la naissance de I'An-
seraleplus techrist, ni quelle sera son education : ce sont de vaines
sc^lerat de questions auxquelles on ne peut repondre que par de vaines
conjectures. Nous remarquerons seulement ici que selon
le temoignage meme de saint Paul , ce sera le plus seelerat
de tous les hommes , puisque cet apotre I'appelle par dis-
tinction I'liommc de peche^ ; et nous avons vu que saint Je-
rome ne craint pas de dire que Satan habitera tout entier
corporellement dans cet homme '. In quo lotus Salanas ha-
bilaturus sit corporalilcr^ . Cependant il ne faut pas en con-
clure que Satan habitera subslanliellement et hyposta-
tiquement dans cet homme, comme la divinite habite
substanticUcment ct hypostatiquement en Jesus-Christ :
mais seulement que toute la malice de Satan se trouvera
en lui, qu'il sera anime plus qu'aucun autre de I'esprit de
Satan. G'est preciscment la pensee de saint Jean Damas-
* Oresm. de Aniichr. lib. nt. cap. 2. num. 8. II y a lieu de douter que
eel ouvrage ait pour auleur Nicolas Oresme. On y trouve deux epoques qui
montrent qu'il a ele compos<^ vers I'an laSo, au temps de la vacance de I'em-
pire, apres la deposition de I'empereur Frederic. Alors Oresme nVtoitpas ne;
mais c'cloil Ic temps do Guillaume de Saint-Amour, qui pourroit bien etre
I'auteur de cet ouvrage. Yoyez le Merciire d'oclobre 1750, page 61 et suiv. ,
sous ce titre, liemarques siir Nicolas Oresme, wequede Lisieux. {Njte dela
prec^dente edition.) — ^ 2. Thcss. 11. 3.- — " Hieron. inDan. vn.
tous les bora
mes
SLR L ANTECHRIST. OQ
cene , qui s'en exprime ainsi :« 11 ne faut pas pretendre
« que comme Ic Seigneur a pris la nature humaine , de
« ui^me le diable sera fait homnie ; loin de nous celte pen-
« see : mais cet homnie recevra toute I'inapiration de Sa-
« tan '. » C'est aussi ce que dit saint Jean Chrystomc : a Cc
a sera un homnie qui possedera toute la puissance de Sa-
il tan ^. » Theophylacle s'cxprime de meme : « Ce sera un
« honiine qui aura recu loute la puissance de Salan ^ . » Nous
aurons lieu de parler dans la suite de ses vices , de sa doc-
trine et de ses miracles. Voyons maintenant quels sont les
sigues qui doivent preceder et annoncer son avenement
et son regne.
Toute la tradition enseigne que I'Antechrist ne paroitra ^^'0"^ qui
point que Tcmpire roniain ne soit detruit , et que la mine ^^*^ ^^
de cet empire sera I'un des principaux signes qui annon- ^.j jg re^ne de
ceront I'avenement de cet impie. « 11 y a encore pour nous, rAniechrisi :
« disoitTerlullien dans son Apologetique , une plus grande laruineen-
« necessite de prier pour les empereurs, et niemc pour tout ^^"^ ^^'
,, . • . ^ I 11 pire romam.
n 1 empu'c ; c est que nous savons que la grande violence
« que tout I'univers doit eprouver , et les maux horribles
a qui doivent accompagner la fin des siecles , sont retardes
o par la duree de I'empire romain : Romani imperii com-
ix mealu scimiis retardari* . » Et ailleurs, rappelantles expres-
sions de saint Paul qui ecrivoit aux Thessaloniciens : fous
savez bicn ce qui emptcke qii'il nc vienne , ajin qu'il pai'oisse
en son temps. Car le mystere d'iniquile se forme des a present.
iSe ulement que celui qui li cut maintenant , lienne jusqn'dce qu'il
soit die du monde^ : a Qui esi-ce qui tient, dit Tertuliien ,
« sinon I'empire romain , dont la division et la separation
o en di\ rovaumes amenera TAntechrist , selon ce que I'A-
a pdtre ajoute : Et alors paroitra eel impie , etc. ? Quis tenet ,
« nisi Romanus status , cujus abscessio in decern reges dispersa
n jinlichristum superinducet. Et tunc , etc.® ». Lactance dit
aussi , parlant du regne de I'Antechrist : « Alors une dcso-
" lationaffreuse se repandra dans toute la terre ; et la cause
« de ce ravage sera que le nom romain ( j'ai horreur de le
< dire , mais cepcndant je le dirai parce que cela sera ) sera
« ote de dessus la terre : I'empire retournera dans I'Asie ,
« rOrient donjinera de nouveau , et 1' Occident sera assu-
' Damasc. Fidei Orthod. lib. iv. cap. i-. — * ChysosL horn. 3. in a.
Thess. — 5 TheoffhyL in a. Tlwss. — * 7'ertuU. iJi Jfjologet. cap. 3i. — * 2.
Thess. 11. Q.eiseqq. — ^Tertull. de Resur. camis , cap. 24.
Co DISSEUTATIOM
« jeli : Romanum nomen, quo nunc regitur 01 bis [horrel ani-
« mus diccre , scd dicam quia fat urum est ) , lolletur de terra ,
« ct impcrium in Asiam rcvertetur , ac rursus Oricns domina-
« bitur , atque Occulens scrviet'^ , » Saint Cyrille de Jerusa-
lem dit : Le demon amen era nn liomme fameux qui usur-
« pera la puissance de Tempire remain « cet Anlechrist
« viendralorsque le temps de I'empire romain sera rempli ,
« et que la fin du monde approchera *. » Nous avons deju
fait remarquer •* ailleurs que saint Jerome , dans son cpm-
inenlaire sur Jeremie, reconnoit que saint Paul sous le
nom de cclui qui ticnt , entend I'empire romain. Hie repete
dans une de scs leltres^,ou apres avoir fait remarquer
qu'il etait de la prudence de I'xVpotre de ne pas dire ouver-
tement qu'il falloit que I'empire romain fut detruit avant
que rAnlechrist vint , il rapporte les expressions de I'Apo-
tre : Seulemcnt que cclui qui lietU , etc. , et il les explique
ainsi : « Seulement que I'empire romain qui tient mainte-
« nant sous sa puissance toutes les nations , se retire et soit
« ole de ce monde ; et alors I'Antechrist viendra : Tantum
« ul Romanum impcrium , quod nunc universas genles tenet ,
« recedat et de medio Jiat; ct tunc Antichristus veniet. » Il y a
encore sur cela un celebre passage de ce pere dans son
commentaire sur Daniel; nous aurons lieu de le rappeler
dans la suite. Saint Jean Chrysostome expliquant le texte
de la seconde epitre auxTliessaloniciens , dit : a On pourra
« demander ce que I'Apotre entend en disant : Vous savez
« ce qui empeche qu'il ne paroisse; ct ensuite on voudra sa-
« voirpourquoiilenaparlesiobscurement. Qu'cst-cedonc
o qui Tempcche de paroitrePLes uns disent que c'esl la
« grace du Saint-Esprit ; les autres, I'empire romain ; et jc
« suis fort de leur avis. Pourquoi? Parce que s'il avoit
« voulu parlor du Saint-Esprit, il se scroit exprime claire-
« ment ; et d'ailleurs il y a long-temps que les dons graluits
« ont cesse. Mais parce qu'il a en vue I'empire romain, c'est
« avec raison qu'il parle d'unc manicrc couverte et enigma-
« tique , pour ne pas irriter inutilement les Remains. 11 dit
« done : Seulement que celui qui tient , tienne jusqu'd ce qu'il
a soit ole ; c'est-a-dire , quand Tempirc romain sera ote du
« monde, alors rAnlechrist viendra. Quand cet empire sera
' LncUintAiisiu. lib. vit. cnj). i3. I'ide cl cap. aS. — ^ Cyrill. Ilieros.
Calecli. t5.— ^ Voyez la preface sur la seconde <^pilre aux Tlicssa'.oniciens.
— -' Tlicr. cj), ad jflgasiain, olim i5i. ijuccsi. 11.
sin L ANTECHRIST* 6 I
a dclruit, TAntcchrist le irouvera vacant , s'cn emparcra ,
(I ctciitreprcndradcs'arrogerainsil'enipireetdeshommcs,
« et menic de Dieu. Car comine les aulrcs empires qui ont
« precede ont ete renverses , celui des Mcdes par celui des
a Babvloniens , celui des Babyloniens par celui des Perscs ,
« celui des Perscs par celui des Macedoniens , ct celui des
« Macedoniens par celui des llomains , de raemc celui des
o Remains sera renverse par I'Antechrist, et rAntcchrist
« sera extermine par Jesus-Christ. C'est ce que Daniel nous
<> montre dune nianiere tres evidente * n. Saint Auguslin,
dans son grand ouvrage de la Cite de Dieu , rappelle aussi
ic texte de saint Paul , et dit : « Quelques-uns croicnt que
w I'Apotre parle de I'empire romain , et que c'cst pour cela
n qu'il n'a pas voulu parler clairement : Quidam putant hoc
« dc imperio dictinn fmssc Romano : et proptcrea Paulum apos-
a tolum non id apcrle scribere voluisse'^.-a Et un peu plus bas
0 il ajoute , « que ce n'est pas sans raison que Ton croit que
a I'Apotre en cet endroit parle de I'empire romain : Non
a absurde de ipso liomano imperio crcdilur dictum. » Theo-
phylacte, sur la seconde epitre auxThcssaloniciens,rcpete
precisement ce qui avoit etc dit par saint Jean Chrysos-
tomc, et il ajoute : « Recevez celte explication de saint Jean
o Chrysostome comme la plus vraie. » OEcunienius suit de
nieme saint Jean Chrysostome. Et presquc tons ceux qui
sont vcnus depuis sont aussi convcnus qu'il y auroit une
liaison inlime entre la mine de Tempire remain ct I'avene-
ment de I'Antechrist ; c'est ce que reconnoit Malvcnda,
qui avoit soigneuseraent 'examine cette maticre : Atqui Ro-
manum imperium prius destriundum et abolcndnm , qnam ve-
nial Antichristxis , atqueco imperio everso , mox venturum An-
tichrislum , posterioresfere omnes siimmo consensu docuerunt ^.
Celte opinion est done fondee , i" sur Ic temoignage de
saint Paul; i^ sur le temoignage de Daniel. Quant au te-
moignage de saint Paul , il nous suffira de remarquer ici
avec Malvenda , qua la verite il y a quelque partage de
senlimens sur le sens de ce texte , mais que lintcrpretation
sur laquelle cette opinion est fondee est la plus approuvee
et la plus recue : Ilia omnium probalissima ac receplissima
laudalur iiurito hujiis oraculi Paali explanatio *.
Depuis cet oracle de I'Apdtre , I'empire romain a dcja
' Chysost. in 2. Thess. fiomil. 4. — - ^ug. de Civ. Dei, I. xx. c. 19.
— Miilxeuilui dt: Antichr. lib.s ztp. \8. — ^ Ibid. cap. ly.
62 DISSERTATION
souffcrt differcntcs revolutions. Lorsque I'Apdtre ecrivoit,
Rome etoit la capitale de cot empire ; et eile posseda cet
avantage jusqu'au temps de Constantin , qui transfera le
siege de I'cmpire a Constantinople. Apres la morl de I'em-
pereur Theodose , I'empire fut divise entre ses deux fils :
Arcade eut I'Oricnt, et Honorius I'Occident; Constanti-
nople fut la capitale de I'empire d'Orient, et Rome la capi-
tale de I'empire d'Occident. Lcs barbares se jetcrent sur
les provinces de I'empire : Rome fut prise , et I'empire
d'Occident fut eteint dans la personne d' Augustule. Cepen-
dant I'empire d'Orient subsistoit toujours , et continua de
subsister jusqu'a Constantin Paleologue , en qui cet empire
fut eteint, lorsque Constantinople fut prise par Mabomet ii,
empereur des Turcs, qui y etablit le siege de son empire.
Mais long-temps auparavant I'empire d'Occident avoit ete
releve par Charlemagne ; et il subsiste encore aujourd'hui
dans I'empire d'Allemagne. Malvenda le reconnott et le
prouve ; et il ajoute : « 11 nous reste done a comprendre de
« la que la pensee claire et certaine de saint Paul et des
o peres est que , puisqu'il est certain que I'empire romain
« subsiste encore aujourd'hui dans I'AlIemagne , I'Ante-
« christ ne viendra point qu'auparavant ce memc empire
« n'ait ete entierement detruit ; et qu'ensuite cet empire
« etant detruit , alors paroitra I'Antechrist : Reslat igilur ut
« inlelUgamus hanc esse certametperspicuam Paiili palrumque
« mentem; cum cerium sit Romanum ipsum impcrium ad
a hcec usque nostra tevipora in Germania adhuc stare non
« venturum Anlichristum ,nisi prius hoc ipsum imperium.Ro-
<nm,anmn quod hodieque subsislit , tollatur penitus de mundi.,. .
« sublato autem omnino imperio Romano , mox revelandum
« Anlichristum ^ . »
Venons maintenantau temoignage de Daniel , ou plutot
vcnons aune opinion fort commune fondee sur le temoi-
gnage de Daniel ; c'est celle que saint Jerome exprime en
ces termes : « Disons ce que lous les ecrivains ecclesiasti-
« ques ont enseigne , qu'a la fin du monde , lorsque le temps
« de la destruction de I'empire romain sera venu , il y aura
« dix rois qui partageront entre eux cet empire , et il s'en
« elevera un onzieme qui sera d'abord plus foible que les
« autres ( c'est I'Antechrist ) : Ergo dicamus quodomnes scrip-
» tores ecclesiastici tradiderunl , in consummalione mundi,
* Malvenda, de Anlichr. lib. y. cap. 20.
SLR I.'A.?«TECURISr. 63
n (jiumt/orepium deslruendum est Romanorum , decern fniaros
« reses qui orbcm Romanum inter se dividanl , el iindecimum
" surrectnnimesseregcmparvulum, etc. *. » Cela est fonde sur
la prophetic du chap, vii de Daniel , c'est-u-dirc sur la vi-
sion desquatre betes , dont la quatrieme porte sur son front
dix comes , du milieu desquelles une petite s'eleve, qui de-
vicnt cnsuile plus puissautc que toutes les autres. Mais nous
avons fait voir aillcurs ^ que le deraembrement annonce
par Daniel paroit etre celui que I'empire romain a eprouve
au temps de I'irruption des barbares ; et nous avons fait
remarquerque c'est precisement apres ce demembrement
que commence de s'elever I'empire antichretien de Maho-
met, qui paroit etre ainsi represente par celte petite corne
qui s'eleve du milieu des dix cornes de la quatrieme bete.
« lis sont venus ces dix rois , dit I'abbe de la Chetardie ;
« ilsontdemembrectpartage I'empire romain : ilfautdonc,
CI si Ton veut entrer dans I'esprit et la tradition de tous les
<( premiers Chretiens qui ont ecril sur cette matiere, recon-
« noitre que I'empire antichretien, ou celui d'ou doit sor-
« tir I'Antechrist , a paru dans cette conjoncturc , c'est-a- '
<i dire des le commencement du septieme siecle ^'. « Ufaut
icidistinguer deux choses , le demembrement de I'empire
romain , et sa ruine enticre , la naissance de I'empire an-
tichretien, etravenementde I'Antechrist. Daniel annonce
le demembrement de I'empire romain et la naissance dc
I'empire antichretien ; et on peut dire que cela est verifie.
Saint Paul annonce la ruine entiere de I'empire romain et
I'avenement de lAntechrist ; et c'est ce qui reste a tfccom-
pUr. Le demembrement de Tempire romain a ele bientot
suWi de la naissance de I'empire antichretien ; de merae la
ruine entiere de I'empire romain sera bientot suivie de I'a-
venement de I'Antechrist, parce que , comme le dit saint
Paul , II reste scidement que celui qui lienl soil ole du monde ;
el alors par 0 lira cct impie.
Mais saint Paul nous decouvre encore un autre signe qui Autre signe
doit annoncer I'avenement dc I'Antechrist, c'est I'apostasie ^,"' precedera
dont il parle , lorsqu'il dit : Le jour du Seigiieur ne viendra eUerI™c"de
point que I'apostasie , anc-JtaTta , ne soil arrivee apparavant , I'Antechrist :
^Hieron. in Dan. vii. — * Voyezla Disscilalion sur les qiiatie empires, a
la t^le de la prophetic de Daniel, torn. xvi. — s Explication de I'Apocalvpse ,
64
DISSi:nTAT10W
saint Paul.
I'aposfasic ct qiion nait vnparoiire I'homme depechc'^, H y a 8ur ce textc
pnditc par trois senLimcTis differens.
Les iins ont pretendu que sous le nom fS!apostas{e I'Apf^-
polre designoit ici rAntcchrist mcme. C'cst la pensee de
saint Jean Chrysostomc qui s'cn cxplique ainsi : « Qu'esl-
« cc que I'Apolrc appelle ici I'apostasie? G'estl'Antechrist
« mcme , comme devant olre Touteur et le principe d'une
« grande apostasie ^. » G'est le sens qui a ele le moins
suivi.
D'autrcs ont cru que I'Apotre , sous le nom d'aTO!7Ta(7ia,
discessio on dcfeclio, niarquoit la defection et la revoke des
nations soumises a I'empire roniain. C'est la pensee de saint
Jerome, qui rappelant le texte de saint Paul , I'cxplique
ainsi : « Le jour du Seigneur ne viendra point qu'aupara-
« vant ne soit arrivee la defection qui est appelee en grec
« OTouiaG-ta ; en sorte que toutos les nations qui sont sou-
« misesarempireromain se retircnt derobcissancetiu'elles
« lui rendent : Nisi, inquit, venerit discessio primum , quod
fi. grcece dicitur caiooxaoict. , lUfimnes gcnlcs qiice impcrio Ro-
« mano subjacent , reccdant ab co^ . » G'est I'opinion qui a
ele la plus suivie.
Mais il y en a une troisleme qui est encore cclcbrc, scion
la rcmarque nieme de Malvenda ; c'est celle qui entend ici
sous le nom d'apostasie une defection tres grande et pres-
que universelle a I'cgard de la foi en Jesus-Ghrist, ct dc
I'obcissance et soumission legitimement due a I'eveque de
Uouie , vicaire de Jesus-Ghrist, et successeur de saint
Pierre , dont le siege est le centre de I'unite catholique :
Ilia quoque Celebris habelur hnjus loci explanatio , quce apos-
tasiam scu discessionem intelligit discessionem sen dejcclionein
viaximam etpene universalcm omnium genlium ctnationum ,
a fide Chrisli , ct ab obedientia ct subjectione Romani ponliji-
cis, Chrisli vicarii^.
G'eloit la pensee de saint Gyrille de Jerusalem , qui s'en
exprime ainsi : « Quant ace que cet Ap6tre dit, que le jour
u du Seigneur ne viendra point qu'auparavanl ne soit arri-
« vee I'apostasie , et qu'on n'ait vu paroitre I'homme de pc-
« che ; et des a present voici I'apostasie ; car les hommes
« abandonnent la vraie foi, en soile que les unsconfondcnt
« en Dicu le Pcre avec le Fils, les autres meltent Jesus-
' ■>.. lliess. II. 3. — ^ Chiys. in ■>.. Tltcss. — ^ Hieivn. ep. ad Algasiani,
ohm I 5 1. — ^Malvenda, dc Anlkkf. I. v. c. Zi.
SCR i/antechrist. 65
<t Christ au nonibrc ties creatures. Lcs homines s'eloig;nent
« de la verite , et ont une demangeaison d'entendre I'er-
« reur ; la pkipart ont de I'eloignement pour les saines in-
« structions , el ils prefcrent ce qui est niauvaisa oe qui est
« bon ; voila done I'apostasie ; et il ne nous reste plus qu'a
« attendre I'ennemi de Jesus-Chrisl*. » Dans I'afFaire du
monolhehsme , saint Maxime, moinc de Constantinople ,
disoit aux defenseurs du type de Constant: « Prenez garde
a que sous pretexte de paix nous ne tombions dans I'apos-
« tasie qui, selon I' Apolre, doil prcceder V Anlechrist^ . » Saint
Thomas d'Aquin , Liran , Estius , Cornelius a Lapide , Uel-
larmin, Suares , et plusieurs autres , enlendent ainsi le
texte de saint Paul. Et TA-potre expliquc lui-meme sa pen-
see , lorsque bient6t apres il ajoule : Dcs dpresenL le mys-
tere d'iniquite s'opire. Le mystere d'iniquite commencoit de
s'operer dcs lors par les premieres heresies qui des lors
prii ent naissance , el commencerent d'operer cette apos-
tasie funeste. Mais il s'expliquc encore plus clairement ,
lorsque ensuite il ajoute-* que cet i-mpie viendra avec toutes les
illusions capables de porler a I'iniquite ccux qui peris sent ^
puree qu'ils n'auront pas rccu V amour de la virile pour ttre
SaUVCS : Eo quod CHARITATEM VEIIITATIS KON RECET'ERLNT ut
SALvi FiERE?nT. C'csl pourquoi , continue I'Apotrc , Dieu leur
enverra des illusions si efjicaces , qu'ils croironl aumensongc ,
ajin que tous ceux qui n auront point cru a la vei'ile,mais qui
auront coHsenli a I'iniquite , so ienl condamnes : Ux judicentur
OMNES QUI NON CREDIDERUKT VERITATI , SED CONSEKSERUNT I.M-
QUiTATi. L'apostasicprepareradonclesvoiesarAntcchrisl;
ou plutotdeja depuis long-temps I'apostasie lui prepare les
"voies. Les premieres heresies qui s'eleverent des le temps
des ap6tres ; I'arianisme qui parut ensuite ; les autres
grandes heresies qui se f'ormerent dans lcs siecles suivans;
le mahometisme , le schisme des Grecs , les heresies de
Luther et de Calvin , sont les degres et les progres de cette
aposlasie : en sorte que cellequi prccedera I'avenementde
lAntechrist ne fera que consommer ce que les autres ont
commence ; et alors paroitra cct'impie.
Lorsque cet impie paroitra, I'cmpire romain sera- t-il Lorsque
divise entre dix rois? de ces dix rois , rAntechrist en I'Antechrisi
abattra-t-il trois? C'est I'opinign commune des anciens. P'"''^i'.'''^i
* i empire rc-
^ Cjrrill. Hiews . caiecli. i5. — ^ Jet. S. Maxinii. — '2. Ihess.u. 10.
el seqq.
25. 5
GG DISSERTATION
main sera til Salnt-.Terome s'on expliquc ainsi : « Dlsonri done ce que
divis6 eniro ^^ xqus Ics ccrivaiiis ecclcsiasliqucs out eriscigne , qua 1<'»
cesilixrois " ^^^ ^" nionde , lorsque Ic lemps de la destruction de
cnabattra-L- « I'empire romain sera venu , il y aura dix. rois qui parta-
iliroie? « geront cnlre eux cet empire, et un ou/iemc s'elevera,
« qui d'abord sera foible , et surmontcra cnsuite iroisroi*
« de ces dix , savoir , les rois d'Egypte , d'Afrique et d'E-
« thiopie : lesquels etant tues , les sept autres se soumet-
« tront au vainqueur : Undecimun surrccliirum esse regein
« parvulum , qui Ires regesde decern prior ib as superalurus est ,
« id est , Epjpfioriim regem, et Africa , el/Elhiopice : qiiihns
« inierfectis,eliam seplemaliircges viclori colla suhmitlent> . »
G'est aussi la pensee de plusieurs dcs modernes.
Cette opinion est fondee, i" sur la prophetic duchap. vu
de Daniel , ou Ton voit * que du milieu des dix cornes
qui sont sur le front de la quatricmc bete il s'cn eleve une
onzieme qui d'abord est plus petite que les autres ; et en-
suite trois des premieres tombent devant elle : ce que I'ange
explique en disant que les dix cornes sont dix rois , aprcs
lesquels il s'en clcvera un autre qui abattra trois rois.
2" Sur la prophetic du chap, xi du meme prophcte , ou
il est dit ^ qu'il s'clevera un homme meprisable , a qui Ton
nc donnera point les honneurs de la royaule , mais cjui
\iendra a petit bruit, etsc rendra mailre du royaume par
fraude ; et que ce prince, desigvie sous le nom de roi de
laqiiilon , viendra contre le roi du midi , qu'il se rendra
niaitre de I'Egypte , et qu'il passera aussi par la Libye et
par I'Ethiopie : sur quoi saint Jerome s'explique ainsi :
o Nos ecrivains rapportant cela a rAntechrist,disent qu'il
« combattra d'abord contre le roidu midi ,c'est-a-dire de
« I'Egyptc , et qu'il vaincra cnsuite les Libyens et lesEthio-
« piens : ce sont la les trois cornes cpiidoiventctrebrisees
«i par lui , comme nous le lisons plus haut : Noslri aiilem
« ad Antichristam et isla rejercntes , dicunl quod priinum. pii-
« gnatiirus sit contra regem aiistri , id est , Egypli, et poslca
« Libyas et Ethiopas superalurus : quee de decern comibus
« tria contrita curnua supra Icgimus "*. »
Quanta la prophetic du chap, xi , les ancicns et les mo-
dernes conviennent que dans le sens litlcral et immediat
elle regarde Anliochus Epiphancs. « La conduite d'Antio-
* Hicroiiym. in Dan, vn. — - Dun. \\i. S. 2/, . — ^ Dan. xt. 7.1. 40. 42.
43. — ^ Ilicron. in Dan. xi.
sun L ANTECHRIST. C)!
n ohus , dit Uollin rappelant ccltc prophetic , fait voir
« combien en effetil etoit meprisable — II ne monta sur
« le trone ni par ie droit de sa Tiaissance.... ni par !e choi.v
« volontairc dcs pcuples — Etant revenu d'Occident a
« petit bruit pour surprendre son rival , il sut gagner Ic
« peuple par ses artifices , et par les dehors d'une clemence
«< etudiee '. » Rien n'est plus celebre que les diverses ex-
peditions d'Antiochus sur I'Egypte. L'auteur menie du
i^'' livre des Machabees dit expresseraent qu yhiUochus
elanl entre dans I'Egypte avec une puissanle armie , pril les
villes les plus fortes de ce pays, et s'enrichit de ses dcpoiiilles ^,
II estvrai que I'hisloire ne dit point qu'il ait passe par la
Libve et par I'Ethiopie. Mais d'abord le texte hcbreu ne
dit jpas expresseraent qu'il dut y passer : on y lit sculement
que Us peuples nommes Lubun et Cuschim eloieiit a ses pas ^ ;
ce qui peut signifier seulement qu'a sa suite il y avoit dcs
peuples de ce nom. De plus la version grecque , recue
dans le canon des Ecritures , et qui est pour ce livre celle
deTheodotion, porle qu'enserendant niaitre des trcsors
des Egyptiens , il se rendit maitre aussi des Libyens ct des
Ethiopicns qui etoient dans leurs forteresses '. Ce qui forme
un sens fort naturel ; car comme la Libye et I'Ethiopie
etoient voisines de I'Egypte , il est fort vraisemblable que
le roi d'Egyptc avoit appele ces peuples a son secours.
Enfin , ccs provinces elant voisines de I'Egypte, il aurait
pu se faire qu'Antiochus y fut entre sans que I'histoire en
outparle.Toute la prophetic du chap, xi de Daniel se rap-
porte visiblement au temps des Lagides et des Seleucides,
successeurs d' Alexandre ; et eile a ete alors verifiee^ d'unc
manicre si exacte, qu'il est fortdouteuxqu'elledoiverece-
voir unnouvel accomplissement. On peut bicn dire qu'An-
tiochus etoit la figure de I'Anlechrist par les violences qu'il
a cxercees sur le peuple fidcle ; mais il n'en resulte pas
que tout ce qui est dit d'Antiochus doive s'entendre aussi
de I'Antechrist.
Quant a lapi'ophelie du chap, vn , quelqucs-uns d'ontre
les modcrnes pcusent quelle peut regarder I'empire anli-
chretien de Mahomet. IJn arabe d'une naissance obscure,
avec une poignee d'hommes qui se joignent a lui , voila
I'origine de cet empire : Cornu parvulum. Ce n'est d'abord
* Hist. anc. liv. xviii. art. 2. § 2. — * t. Mack. i. 17.-20. — ' CD^D*^!
08 DISSEIITATION
qu'une petite conie ; mais bienl6tcette come dcvient plus
puissante que les autrcs : dcvaiit cUe tombe d'al)ord Tem-
pirc dcs Perscs , premiere corne abattue ; ensuitel'empire
des Grecs , secbnde corne abattue : une troisicme corne
subsiste , dont la ruinc , comme nous I'avonsvu , doit pre-
ce'der et annoncer I'avenement de I'Antechrist : Ties reges
hmniliabil. C'est ce que nous avons explique plus ample-
nient ailleurs '. Les commencemcns et Ics progres de
Tempire anlichretien ayantdonc ainsi verifiela prophetic
de Dani'jl , il pourra bien arriver quelle ne recevra pas
d'autre accomplisscment. Les trois rois que les anciens
croyoienl devoir etre abattus par rAnlcchrist auront ete
abaltus ainsI avant lui par rcmpire a la tete duquel il doit
paroilre.
QueTloscra C'est ainsique se formcra le vaste empire au milieu du-
roiondue de quel cet impie doit regner. Saint Jean parlant de cette bete
empiie <. o -^ nioule de I'abime , et qui , selon toute la tradition , re-
ct comment prescntc cct mipie, declare expressement que la puissance
II se formera. lui Jul donnec sur to ale Iribu , lout paiplc , toule langue et
loule nation ^. Toute la tradition reconnotl que I'Antechrist
dominera sur toute la terrc. Nous avons deja vu que,
selon TertuUien , la grande violence que cet impie doit
exercer menace tout I'univcrs : Vim maximam universo
orhi imminenlem ^ . Le martyr saint Hippolyte dit que toute
la terre et la mer lui obeiront *. Lactance dit qu'il tour-
mentera I'univcrs par une insupportable domination :
InsuslentabiU dominatione vexahit orbem ^. Sulpic-e Severe,
' d^ moins dans quelques exemplaires de ses Dialogues, dit
avoir appris de la bouclie de saint Martin que tout I'uni-
vcrs , toutes les nations , doivent etre reduites sous la
puissance de I'Antechrist : Sub illius jintichrisli potcstate
nniversum orbem, cnnclasque genles esseredigendas ". Saint
Jerome croyant que cet impie seroitjuif, disoit : « Aucun
* Voyezla Dissertation sur les qualre empites , a la t6te de la prophetic
de Daniel, torn. xvi. — "^Jpoc. xni. 7. — ^Tertull. Apolog. c. Sa. — '^Hippol.
Mart, de Consuniinat. inundi. — * Laclant. Instil. I. vii. c. \6.- — ^ Sulpit.
Sever, dial. 1 . de vita S. Mart. Le fragment d'oii cetle parole est liree ne se
trouve point dans la plupart des manuscrils , et dans quelques-uns il se trouve
renvoye a la tin. On y reinarque en effet quelques ideas singulieres qui pa-
)oissent pcu dignes de saint Martin : ce qui dcnne lieu de soupgonner qu'il ne
\ lent pas de Sulpice Severe, mais d'une main otrangere. Quoi qu'il en soil, du
nioins la parole qui est alle.^uee ici u'a rien qui ne soit Ires digue de Sulpice
Severe el de saint Martin son maitre : c'est le sentiment commun.
>l i; I. AMKCHKIST. 69
a des Juifs n'a jamais regne dans tout ruiiivers , exceple
« rAntcclirist , a qui cela est reserve ? Nullns Judaoruin
« absque .IfUichrisfo in lo(o unquam orbc regnavW. » Saint
Auguslin parlant de la persecution que cet impie doit
cxercer, dil : « Ce sera la la deniiere persecution; elle
« eclalcraauxapprocliesdu dernier jugenient ; et lasainlc
« Eglise I'eprouvera dans toute la terrc , c'est-a-dire que
a toute la cite de Jesus-Christ eprouvera cette persecution
« de la part de toute la cite du diable , dans toute I'eten-
o due qu'elles auronl alors I'une et lautre suria terra :
« Uac crilnovissima persecnlio , novissimo imminenle jndicio ,
« quam sancla Ecchsia to to terrarum orbe patielur , iiniversa
a scilicet civitas Christi ab universa diaboli civitale , qiianta-
o cumque ulraque crit super lerram'^. » Et entre les moder-
nes Bcllarmin dit aussi : « jNous lisons dans les Ecriturcs
« que TiVnlechrist deviendra le monarque de tout I'uni-
« vers ; In Scripliiris legimiis Antichristiim monarcham tofius
« mundi eiasamm ^. » Enfin , Acosta inslstant sur !e te-
moignage de saint Jean, dit : «« II est certain que rcnipire
u de I'Antechrist ii'aura d'autres bornes que celles de
o I'univers , selon ce que nous lisons dans 1' Apocalypse :
V. La puissance lui fat donnee sur toute tribu , lout peuple ,
o toute langue et toute nation. Tputes les terres connues lui
« seront done assujeties : Illldest certum imperium An-
« tichristi teircejinibus terminandurn , ut legimus Apocalyps.
« xni .• Data est illi potestas in omnem tribum, et poplldm,
« et linglam, iLiGZti-i^yi.Quidquidergoterrarumrcpcrtumesl,
« illius imperio ccdet*. » Ceux qui renvoien t a la fin des siecles
la formation de Tcmpire de I'AntecIirist trouvent ici unc
difBculte que Malvenda propose lui-meme en ces lermes .
• II se presente seulement , dit-il , une difhcuKe , c est
« que I'esprit huniain ne peut concevoir comment en si
« peu de temps un seul homme pourra etendre et etabiir
« son empire et sa monarchie dans toutes les regions de
n I'univers , sans en excepter aucune , quelque eloignee
« qu'elle soil , ce qui paroit absoluinent impossible : His
o illud dwntaxat obslare ridetur , quod humana mens capere
« non possit , quonampacto tarn brevi tempore,.... unus homo
fi omnium , nulla relicta , quantumvis extremarum mundire-
« gionum , imperium el monarchiam nancisci et stabilire va-
' Hieron. in Dan. xi. — * -dug. de Civ. lib. xi. cay. \ i. — ^ Beltarm. de
fiom. Pont. lib. in. cap. i6. — ' Acoita, de Nwiss. Tenip.lib w. cap. «j.
JO mSSERIAlIOfC
« /eat, quodfactu vidctur prorsus. impossihile '. » 11 repond
a cela en faisant rerfarqucr que l' Antechristscra un homme
extraordinaire , et qu'alorstoutrenl'er sera dechalne pour
liii soumetirc I'univers. Sans doute cela y contrihuera
Ijeaucoup ; mais il est fort vraisemblable que tout !e pro-
gres qu'a deja fait I'empire dc Mahomet et celui qu'il
pourra faire encore , n'y contribueront pas peu. Get em-
pire deja repandu dans I'Asie , dans I'Afrique , et dans unc
partie de I'Europe , occupera peut-etre , malgre sa mal-
heureuse compagne de 1829, tout cet hemisphere avant
que TAntechrist paroisse , en sorte que cette irapie venan'e
alors , il ne lui resteroit plus qu'a porter I'etendue de son
empire jusque dans le nouveau monde. D'ailleurs il faut
observer que selon I'Apocalypse mcme , quolquc la puis-
sance doive lui etre donnee sur toute la terre , cependant
il ne regnera pas seul sur la terre. Saint Jean dit expres-
sement qu'il vit la bete , et avec elle les rois de la terre el
Icurs armi'c^. Il y aura done aiars avec lui sur la terre plu-
sieurs autres rois , mais qui lui seront tous soumis: et leur
soumission ne sera pcut-elrepas lant I'effet de ses conque-
tes que I'elfet de leur etonnement et de leur admiration a
la vuedesa puissance : c'estce que saint Jean memeinsinue
en disant : Et toute la terre Hant dans I' admiration , siiiv it la
bete : Et admirata est universa terra post bestiam ^.
CWi Bcra lo L'Antechrist sera done en ce sensle monarque de I'uni-
ei^gederem- vers : mais ou serale siege de son empire ? I'opinion com-
piredel An- uj^jig ggt que ce sera a Jerusalem. Saint Irenee s'en ex-
Icclinsl • • •
plique amsi : « L'Antechrist, au temps de son regne,
« transfererale siege de son empire dans la Jerusalem ter-
« restre , et il s'assiera dans le temple de Dieu ■*. » G'etoit
peut-etre ce que Lactance avoit en vue , lorsqu'il disoit
que I'empire devoit relourner dans I'Asie : Imperinm in
Asiam revcrtetur ^.
Cette opinion est fondee,' i° sur le temoignage de saint
Paul , qui dit que cet impie sassiera dans le temple de Diea'^.
Plusieurs croient qu'il rebalira Jerusalem et son temple ,
et qu'il ctablira la le siege de son empire et de sa religion
impie.
Cetle opinion est fondee, 2° sur le temoignage de saint
^ Malvendd , de Jntichr. I, vi. cap. 35, — ^ Apoc. xix. ry. Vide et%\u
14.— 5 yijwc. xiir. 3. — ^ Lvn. adv. hccres. I. v. c. 25. — * Lactam. Instil
lib. VI. c. i5, — " 2. Thess, 11. 4.
SUR L ANTECHRIST. 7 I
Joan , qui dit que Ics deux temoins seront mis a niort tlans
la grande ville oh kiir Seigneur a clecrucific \ Ges mols ca-
ractcrisent asscz Jerusalem ; ct on en conclut que si les
tleux teiHoiiis sont mis a mort dans cctte vilie , c'est parcc
«jue I'Anlechrist y auralc ^lit^e^ deson empire.
Cette opinion est i'ondee, 3" sur la prophetic du chap, xi
de Daniel , oil il est dit que le roi da se.pltnlrion cnlrera
dans la terre d€ gloirc , qui est la Judce ; et plus loin le pro-
j)heteajoule que ce prince drcsserasa tcnle siir la monlagnc
celehrc et sainle , qui est le lieu ou il doit perir ^. On pre-
tend que cette niontagne sainte et celebre est la monlagne
des Qij^viers d'oii Jesus-Christ est monte au cie||||^
Mais quant a la prophetic du chap, xi de Daniel _, nous
avons deja fait remarquer que , scion la leltre , elleregarde
Antiochus Epiphanes et a ete verifie en lui. Antiochus
cloit le roi da septenLrion, par rapport au roi d'Egyptc , que
le prophete nomme roi da midi ,• tout le monde sait qu'il
entra dans la lerre de gloire , c'est-a-dire dans la Judee : ce
que la Vulg;atc exprime par la montagtie celebre et sainte ,
rhebreurexprime par la monlagne sainte deSabi on Sabci^:;
c'est ainsi qu'Aquila et Theodotion I'avoient rendu , selon
la remarque meme de saint Jerome ; et nous le trouvons
ainsi encore aujourd'hui dans la version grecque authen-
tique , qui est celle de Theodotion ^. Or , I'auteur du a*'
livre des Machabecs nous dit expressement qu' Antiochus
etant alle dans un pays eloigne , y mourut miserablement
dans les montagnes : In omnibus ^. Polybe et Quinte-
Curce nousdisent que ce fut dans un lieii nomme Tabw ,
Ta'oat ^. Porphyre , ennemi du christianisme , convenoit
que c'etoit la precisement le lieu marque par Daniel ;
parce qu'en effet chez les Orientaux et chez les Grecs la
letlre 5, sipna, tsade, se confond aisement avec Ic T,
tau ou teth. C'est la remarque d'un grand nombred'in-
terpretes sur cet endroit; d'ou Rollin conclut en ces
lermes : « Le prophete marque done qu' Antiochus cam-
« pera pres de la monlagne de Sabi ( la meme sans doute
« que Tahce , ou Polybe dit qu'il mourut ) , et que la il
« trouvera sa fin , et perira abandonne de Dieu et sans
• Afioc. XI. 7. 8. — * Dau. xi.4r. ei 45. — ' ^Q•m l'^'^ ^nS- — * Edit.
Horn. SiaexEtv.w?.?. Alex. Sageiv. Edit. Compl. IolQu. — « Much. ix. 28. —
'^ Poljrb. in Excerpt. Fales. p. t45. Q. Curt. I v. c. iS.
7 a DISSEHTATION
« seco'urs '. » On peut voir ce que nous avons dit de ce
texte dans la preface et dans les notes sur la prophetic de
Daniel , torn. xvi.
Quant au temoignage de saint Jean touchant la mortdes
deux tcmoins , il est aise de coMcevoir que les deux pro-
phetes peuvent etre mis a mort dans Jerusalem par I'ordrc
de I'Antechrist , sans que I'Antechrist ait alors dans cette
ville le siege de son empire , meme sans qu'il y soit alors
residant.
Quant au temoignage de saint Paul , qui dit que cet im-
pie s'assiera dans le temple de Dieii, il n'est pas certain qu'en
cet endroiUsaint Paul ait en vue le temple de Jerusalem :
les sentimens sont partages sur cela. Saint Jerome expli-
quantcesparolesde I'Apotre , s'exprime ain?i : « Ils'assieray
« dit I'Apotre , dans le temple de Dieu , c'est-a-dire , ou dans
n Jerusalem , comme quelqucs-uns le pensent , ou dans
« I'Eglise, ce qui nous paroit plus vrai ; Vel Jcrosohjmis ,
« ut qiiidani putant ; vel in Ecclesia , iitteriasarbitramur^. »
Saint Jean Chrysostome ditaussi expliquantce texte : « //
■« s'assiera dans le temple de Dieu , non dans celui de Jeru-
« lem , mais dans le temple de I'Eglise ^. » Mais comment
I'Antechrist s'assiera-t-il dans I'Eglise , dans le temple de
I'Eglise ? Theodoret Texpliquc , lorsque interprelant ce
meme texte il dit : « Ce que I'Apotre appelle le temple de
« Dieu , ce sont les eglises dans lesquelles cet impie pren-
« drale premier rang , la premiere place , s'efforcant de se
« faire reconnoitre pour Dieu ''. » Ti)eophylacte s'exprime
« encore plus clairement en disant : « // s'assiera dans le
« temple de Dien , non pas specialement dans le temple de
« Jerusalem , mais simplement dans les eglises , dans tout
« TEMPLE coNSACRE A DiEU ^. » OEcumcnius dit aussi :
« Dans le temple de Dieu ^ c'est-a-dire , non pas dans le
« temple de Jerusalem , mais dans I'Eglise de Dieu ^. »
Saint Augustin laisse la question indecise : « Mais quel est,
« dit-il , le temple de Dieu oil I'Antechrist doit s'asseoir?
« Sera-ce sur les ruines du temple que Salomon avoit fait
« batir? sera-ce dans I'Eghse de Dieu? cela est incer-
« t,ain '. » Saint Hilaire I'entendoit de nos temples , et
' Hisl. anc. 1. xviii. art. 2. § 4. — ^ ffigron. d'Mgasiam. , qucest.ii. —
' Chiys. in 2. Ttiess. 11. — * Theodor. in 1. Thess. n. — * Theophyl. in
2. Thess, II.—® OEcumen. in 2, Thess. i\. — ''■^ug, de Cis^. I. xx. c. 19.
suR l'awtecurist. 78
regardoil meine celte interpretation comme indubitable.
Cest ce que Ton voit dans son ecrit conlre Auxenoe , ou
c\horlant les catholiques a fuir la communion des ariens ,
il leur dit : « Vous faites mal de tant aimer les murailles ,
M de respecter en celte maniere I'Eglise dans ses balimeiis,
« etde vous couvrir de ce pretexte pour faire valoir le nom
n de paix. Peut-on douter que TAntcchrist ne doive s'as-
« seoir dans ces memes lieux ' ? » Entre les modernes ,
Cajelan dit : « Le nom de temple de Dieii ne signifie point
« ici un certain temple determine ; mais en quelque temple
« que ce soit , qui soil consacre a Dieu , cet impie s'y as-
o siera , comme etant lui-meme le dieu de ce temple : Sed
« in quocumque templo Deo dicafo sedebit tamquam sibi di-
o cato ^. » Estius embrasse aussi le mcme sens. Et certes
c'est a quoi conduit fort naturellement I'usage que les Ma-
hometans font de nos eglises qu'ils changent en mosquees.
Que rAntechrist paroisse , et qu'il se fasse rcndre les lion-
neurs divins , par exemple dans la grande mosquee de
Constantinople, qui eloil autrefois la celebre eglise de
Sainte-Sophie , ne seroit-ce pas la veritablement I'homme
de peche assis dans le tenjple de Dieu ? Faudra-t-il autre
chose pour verifier I'expression de saint Paul ?
Mais souvenons-nous que I'empire romain doit elre en-
tierement detruit avant que I'Antechrist paroisse ; souve-
nons-nous que tout I'univers doit etre assujeti a cet impie.
Et que sait-on si dans celte revolution Irs ennemis du nom
chrelien, qui en se rendant mailres de Constantinople y
ont etabli le siege de leur empire , ne prelendroienl point
un jour a transferer le siege de leur empire dans Rome
meme? « Certes , dit Lessius , il ne doit paroitre incroyable
« a personne que Rome recouvre un jour son ancien em-
« pire. El que sait-on si un jour les Turcs appeles ou invites
« par des Chretiens impies ne se rendroient point maitres
« de I'lialie , et n'etabliroient point dans Rome le siege de
« leur empire ? Neque alicui videri debet incredibile , Romam
« ahquando rursus imperium oblenlnram. Quid enini si Tiirca
« Ilaliam, impiis quibusdam C/iristianis eum acccrsenlibus vel
u miilantibus , aliquando oblineal , et sedem regni Romce cons-
« tUnat ^? » Bellarmin reconnoit que rien n'empeche que
' Hilar, in Auxent. n. 12. — - Cajelan. in 2. Thess. 11. -- ^ Lessius, tie
■dniichrisio, demonsir. 1 2 . § TeJtio pivbalur.
74 DlSSERTATlOn
« Romo no puissc a la fin des siccles tomber entre les mains
« dcs enneniis du nom clirclien, « Mais de telle sorle ce-
« pendant que le souverain pontife seia tou jours appele , et
<< sera en clfet toujours pontife romain, quoique peiit-etre
« la violence dcs cnncmis rempechc d'habiter dans Home ,
« commc il arriva au temps de Totila roi des Goths : Ttinc
« cliam siimmus pontifcx , Romanus pontifcx diccliir ct erit ,
« licel Romce non habilet , sicut accidit tempore Totilce regis
« Golhormn '. A quoi nous ajouterons avec Malvenda, que
« quand cela arriveroit, TEglisc de Jesus-Christ, quoique
" affligec, chassee, fugitive au milieu dc cette affreuse tem-
« pele , demeurera toujours neanmoins constante ct invio-
« lable dans la religion chretienne et dans la foi orthodoxc,
« avec le pontife romain son pasteur legitime , parce que
« les portes de I'enfer ne prevaudront jamais contre elle :
» Veruvi hie opportune monemus , si ea opinio vera ulca7nque
« esset Ecclesiam tamcn Christi, cum suo legitimo pastore
« Romano , inter eas procellas ct turbines , etsi a/Jlictani , cjec-
« tarn , profugam , nihilominus conslantem et inviolabilem in
<iji(le et rcligione Christiana et orthodoxa mensuram : siquidejn
« nunquam advcrsus cum portm inferi prcevalebunt^ . » Bos-
suet, s'elcvant contre Tabus que les protestans faisoient de
cette opinion , disoit trcs bien dans sa Refutation du Catc-
chisme de Paul Ferry : « Quand j'accorderai au ministre
« que rAntcchrist rcgncra dans Rome, ct que Rome sera
« le siege de son empire , je n'en respecterai pas moins I'e-
« glise romaine. Les Neron, les Domitien , etautrcs perse-
« cuteurs des fidcles , y ont bien regne autrefois ; et ncan-
« moins ce seroit une pensee trcs extravagante de croire
« queregliscromaineensoitdeshonoree.llfautfairegrande
« difference entre I'eglisc de Rome et la ville ^. »
Quel sera Sous quel nom paroitra ce monarque puissant ct impie
Ic nom de qui doit dominer sur toute la terre? Saint Jean nous dit
rAntcchrist ? sculement que le nombre du nom dc cet impie sera six
cent soixante-six ^ . Mais quel sera le nom qui renfermera ce
nombre? II est impossible de le savoir avant que cet impie
paroisse. Nous rappellerons seulement ici ce que nous
avonsdejafait remarquer, que ce nombre se trouve preci-
' BcUaiin. de Horn. Pont. lib. iv. cap. /|. Vide et lib. ni.can, i3. —
^Malvenda , de Anticlir. lib. y . cap. 8. — 'Bossuef , Ucfuf. du Calocli. do
Ferry, ic\i\..\\. — '^Apoc. xiu. i8.
SLR t AMECHRIST.
Rcment dans le noin grec dc Mahomet, prccurseur M 4o
Je cet impic , ct fondateur d'un empire antichre- A i
lien , qui semble elre celui a la tete duquel parol- O 70
Ira cct impie. Nous ferons aussi observer que le M io
prince Ottoman qui subjugua I'cmpirc des Grecs E ^ 5
portoit aussi le nom de Mahomet; en sorte que T 3oo
dans le nom de ce prince se retrouYoit encore le I 10
jiombre du nom de la bete. Peut-elre arrivera-t-il S 200
que I'Antechrist portera aussi lui-meme le nomde
Mahomet '. jjgj*
Quel sera le caractere de cet homme ? Nous avons deja Q"t'J ««" Io
fait remarquer que ce sera le plus scelerat des hommes ; pT''l'*^K^ • \y
mais on croit que sa sceleratesse sera couverte du voile de vices qu'on
riiypocrisie ; et en ce sens on lui applique cette parole de luiauribue.
I'un des amis de Job : Dicufait rcencr I' homme hypocrite a
cause des pcches da peuple^. Sur quoi saint Gregoire-le-
Grand s'exprirae ainsi : « Celte parole peut designer le chef
« meme de tous les hypocrites, c'est-a-dirc I'Antechrist ;
« car alors ce seducteur se couvrira du voile meme de la
saintete pour entrainer les hommes dans I'iniquite. Et
Tempire qu'il exercera alors sur les impies sera I'effet
« non de I'injustice du souverain Juge, mais de I'iniquite
« meme de ceux qui auront merite de lui etre assujctis : In
<t eo.... potest ipsiim oviJiiiim hypocritarum caput Antichrislus
v^designari : seductor quippe ille tunc sanctitatem simulabil ,
« utad iniqu'Ualcm trahat. Quod ergo tujic Antichristus super
« impios rcgnabit, non est ex injustitia judicantis , sedex culpa
i<^ patient is •*. »
On lui attribue la ruse et I'artifice ; et I'on pretend le
Irouver ainsi caracterise dans la prophetic de Jacob tou-
chant la tribu de Dan * , dans la prophetic des chap, viii
etxi de Daniel ^ , dans ccUc du chap, vii du meme pro-
phete*', et dans celle du chap, xiu de I'Apocalypse ". Mais
• Un souscripteurde cetle Bible a Lien voulu adresser a Tediteur, dans une
Jeltre anonyme, quelques observations relativement a la personne de I'Ante-
christ. L'opinion que ce cruel ennemi du nom chretien sera un sectateur de
Rlahomel lui parotl plus ingenieuse que solide , et il lui oppose les revelations
altribuees d unesainle religieuse ; ces revelations, selon nous, necontredisenl
en ricn notre sentiment. Tout en regrettant de ne pouvoir nous ranger de son
avis, nous offrons nos sinceres remercimens i cet excellent Chretien, dans
lequel , a en juger par sa letlre , la piele se trouve unie au savoir. — - Job.
Xixiv. 3o. — ^ Gi-eg. inJob, lib. xss. c. 14. — * Genes, xlix. 17. — ' Dan.
VII. 24. eiji.1. 21. cr 24. — "Dan. VII. 8.cf 20. —'' Jpoc. xiii. i.
76 DISSEHTATION
nous avons fait remarquer que la propheiie do Jacob re-
garde plutot Samson; celles des chap, viii et xi dc Daniel
se rapportent plulot a Antiochus. Dans celle du chap, vu
on insistc sur ce que celle pelite corne que vit Daniel avoit
des yeux commc des ycux d'homrnes; mais nous avons fait
voir ailleurs que ce caractere convient particulicrcment a
Mahomet meme^, fondaleur de I'empire anlichrctien. En-
fin , dans la prophetic du chap, xni de I'Apocalypse , on in-
siste sur ce que la bete que saint Jean vit s'elever de I'a-
bime avoit le corps du leopardei les pieds de Vours, ce que
Ton regarde commc deux symboles de la ruse et de I'arti-
fice de I'Antechrist represente par cette bete : mais nous
pourrions montrer que cette bete paroit representcr en
meme temps et I'Antcchrist et son empire; et que cet as-
semblage du corps du leopard avec les pieds de Xours pour-
roit signifier que I'empire antichretien reunira deux em-
pires puissans, representes dans Daniel par I'ours et par le
leopard , c'est-a-dire les Perses et les Grecs ; c'etoit la pen-
see d' Andre , cveque de Cesaree , qui remarquoit dans les
trois parties qui composent cette bete les trois premiers
empires designes par Daniel : « Le leopard , disoit-il , re-
« presente I'empire des Grecs ; Tours, I'empire des Perses ;
« le lion , I'empire des Babyloniens : et ces trois empires
« seront reunis sous I'Antechrist^. » Et en effct, deja nous
voyoHS toute cette vaste elendue de pays soumise aux
■ Mahometans.
On attribue encore a rAntechrist I'impudence, I'audace
et la teracrite ; et on insiste principalement sur cette pa-
role du chap, vni de Daniel : // s'eUvera iin roi qui aura
I'impudence sur le front ^ . Mais la prophetic du chap, vni
regarde , selon la lettre , Antiochus.
On attribue a I'Antcchrist toute la science et toute la
vertu de la magie ; et ccla est fonde sur ce que saint Paul
dit , qu'il viendra avec la puissance de Satan, operant toutes
sortes de miracles , de signes et deprodiges de mensonge ^. Nous
en avons parle ailleurs ^.
On lui attribue une ardeur insatiable pour les richesses :
on insiste sur ce que Daniel dit d' Antiochus, c[\x il enlrera
dans les villes les plus grandes et les plus riches , et c^^ilamas-
* Voyez 1^ Disserlalion sur les quaire empires, a la tele de la prophctio Je
Daniel, tom.xvi. — ^Andrceas Ccesar. in Jpoc. \ni.~—^ Dan. viii. 23. —
■•a. Tkess. n. 9. — * Voyez la preface qui precede cette Dissertation.
SLR !- ANTECHRIST. 7 «
sera iin £rnnd hatin de Icnrx dcpouilles , ct pillcra (antes Icurs
richesses^. L'aiitcurclu i^ livre desMachabeesnonsapprend
(ju'en e^elAntiochus prit les villcs Ics plus fortes de I'Egypte,
ct s'enrichit de ses dcpouilles ^. On insiste encore sur quel-
([ues autres textes qui regardent de meme A.ntiochus, au
nioins selon la leltre ^. On y ajoute cette parole du livre de
Job , ou le Seigneur parlant de Leviathan , dit ; // marchera
sar lor comme sur la boue^. Job parle de deux raonstres,
Behemoth et Leviathan; et si I'un Je ces deux monslres a
quelque rapport a I'Antechrisl, qui estl'un des deux mons-
tres dont parle saint Jean , il y a lieu de croire que c'est
plutot Behemoth , dont le nom meme signifie en hebreu la
bete , qui est le nom sous lequel saint Jean designe tou jours
TAntecbrist;. cn^orte que Leviathan designcroit plutot le
monstre que saint Jean appelle lejaux prophcte de la btie.
Enfin , on atlribue a rAntechrist la passion pour les
femmes. Et on insiste sur unc parole de Daniel , que la Vul-
gate exprime ainsi '.II sera dans la passion des femmes^. Mais
celtc parole qui est du chap, xi regarde , selon la lettre ,
Antiochus , en qui elle se trouve verifiee , selon la remarque
in6nie de saint Jerome , qui reconnoit que ce prince passe
pour avoir ete tres debauche : Antiochus luxuriosi&simus
fuisse dicitur^. Et on voit une preuve de la passion de ce
prince dans le second livre des Machabees ",.ou il est rap-
porte qu'il donna a une de ses concubines deux villes de
Cilicie , ce qui fut regarde comme une insulte faite aux ha-
bitans de ces deux villes. On pent aussi remarquer que
cette parole peut avoir un autre sens : saint Jerome meme
dit que le texte hebreu pourroit signifier : // n'aura aucim
( gard pour les femmes ; ct qu'Aquila avoit traduiten cesens^ ;
il en conclut que I'Antechrist alfectcra les dehors de la
chastele. Mais cette parole ainsi traduile peut marquer la
cruaute d'Anliochus, qui en efTet dans les sanglantes exe-
cutions qu'il ordonna contre les Juifs , n'eut aucun egard
pour les femmes , comme on le voit par les livres des Ma-
chabees^.
L'Antechrist aura-t-il tous les vices qu'on lui altribue ?
*Dan. XI. 24. — * I. Mach. r. 20. — ^ Dan. xi. 2S. 3S. 39. 43. ^^viii,
25. — * Job, XLi. 21. — * Dan. \i. St. — * Hicron. in Dan. xi. — ' 2. Macli.
IV. io. — " C'esl-a lijre, qu'au lieu de Iraduire : Et erii in conciipiscenliisfe-
miiiarum, nee quemquam Deiim cunibil, on pourroit Iraduire: Etdecon-
cupisccnlia feniir.arum, el de omniDeo non curabit.' — ' i- Macti. i. 34
G'{. 64. eti. Alccli.y. iS.
78 DISSERTATION
Cela pourra ctrc ; mais ii faut avouer que la plupart dcs
preuvcs sur Icsquelles on se fonde pour les liii altribuer ,
ne sont pas bien convaincantes , parce qu'il n'cst pas cer-
tain qu'i[ soil Tobjet de la plupart des textes d'ou Ton pre-
tend tirer les preuves de tous les vices qu'on lui attribue.
1/Anieclirist Quelle sera la doctrine de I'Antechrist? S'annoncera-t-il
s'annonccra- conuuc le Christ? C'est I'opinion commune. Saint Irenee
Clirist ^Sera- "''' ^1" <^" ^ asseyant dans le temple de Jerusalem , il tentera
i-il rocu par dc se faire reconnoitre pour le Christ \ Lactance dit qu'il
JcsJuifs? supposera etre le Christ, ct s'annoncera comme ie\ : Se
ipse^Christum mentietiir^. Saint Cyrille de Jerusalem dit
qu'il s'altribuera faussement le nom de Christ ^. Saint Am-
broise dit qu'il se servira meme des saintes Ecritures pour
prouver qu'il est le Christ : Ex Scripturis contcndens esse sc
Christum'^. La plupart des anciens etdes modernesliennent
le meme langage.
Cette opinion est fondee sur ce que Ton croit comraune-
ment qu'il sera recu par les Juifs. Saint Cyrille de Jerusalem
tht qu'en s'attribuant faussement le nom de Christ, il trom-
pera par ce nom les Juifs qui attendent le Christ, c'est-a-
dire le Messie ^. Plus loin il dit que par I'imposture de la
magic il seduira les Juifs , leur persuadant qu'il est le Christ
(ju'ils attendent. Saint Jerome pensoit qu'en effet rAntc-
christ seroitrecu par ics Juifs. Ils'en explique ainsi '\" « Le
« Seigneur parlant de I'Antechrist dit aux Juifs : Je suis
« venu au nom de nion pere , et vous n'avez point cru en
« moi ; un autre viendra en son nom , et vous le recevrcz :
« Riirsnnique de Aniichrislo loquilur Dominus ad Jiidceos :
'( Ego I'cni nomine Patris mei , et non crcdidistis mihi : alius
il. vcniei in nomine sua, ilium suscipielis. » Et pkis loin il
a joule : « L'Aniechrist fera toutes ces choscs, dit I'Apotre ,
t< non par sa vertu , mais par la permission de Dieu a cause
« des Juifs , en sorte que comme ils n'ont point voulu rece-
« voir I'amour de la verite , c'est-a-dire I'esprit de Dieu par
« Jcsus-Christ , — Dieu leur enverra, non-seuiement un
a operateur d'errcur, mais I'operation meme, c'est-a-dire
<t la source del'erreur, en sorte qu'ilscroientaumensonge :
« MillelillisDeusnonsolum operalorem,scdopcralionemipsain,
« idest ,Jo7ilcmerroris, ul credant mendacio . "Etbicntotapres
* Iivn. ath. lucres, lib. v. cap. 25. ■ — - Laclaiit. Inslit. lil>. vn. caj). i<).
— ^ Cyj'ill. Jlierus. calcch. i5. — "• Ambr. in Luc. xn. — * Cjn'll. llicixi.';.
€<aiech. i5. — " Jlietvn. ad Algasicnn, .yi/asi. n.
SIR L ANTECIIRIST. 79
il s'cxpliqiie , en disanl que « Ics Juifs, apres avoir nicprise
' la vcriU' en la pcrsonnc tie Jcsus-Clirist, recevront le inon-
songc en rccevant rAntcclirist : Chrisliveritate contempfa,
>. mendaciiim , id est ^ ^lulichtislum susccpturi sunt. »
Cette opinion est fondee sur deux lextes. i°On vientde
voir que sainl Jerome I'etablit d'abord sur cette parole que
Jesus-Christ adressc aux Juifs : Je suis venu an nom de moit
Perc , et vous fie m'avez point rerii; si iin autre vient en son
hom , vous le recevrez^ . Saint Irenee , saint Cyrille de Jeru-
ilem, saint Ambroise, saint Jean Chrysostome, saint
Vuguslin , saint Prosper, saint Cyrille d'Alexandrie, Theo-
tlorct, saint Gregoire-le-Grand , Theophylacte, OEcume-
nius, et la plupart des modernes I'entendentainsi; ils sont
persuades que par cette parole Jesus-Christ annonce que
r\nlechrist sera recu par les Juifs; et il iie pent I'etre
qu'en s'annoncant comrae le Christ et le Messie promis a
leursperes. II est vrai que saint Thomas remarquant que
deja plnsieurs faux Messies ontparu, qui ont etc recus par
les Juifs, tels que fut, par exeraple, le iaraeux Barcoque-
bas, il en conclut que par cette raison , ce texte considere
(^n hii merae ne paroit pas absolument convaincant en fa-
A cur de I'opinion commune , mais que cependant il peut
etre recu en ce sens a cause de I'aulorite des saints peres
qui I'ont entendu ainsi : Locus probabilis est propter auctori-
lalcm sanctorum patrum^.
On insiste 2° sur cette parole de saint Paul : Puree qu'ils
ont point recu V amour de la verite pour etre sauves j Dieu
icur enverra unc operation d'erreur, en sorte qu'ils croiront an
mcnsonge^. 11 est vrai que ccttc parole en clle-raeme ne rc-
garde pas plus les Juifs incredules que les gentils apostats
ou infideles quiabandonneront la verite, on qui reluscront
de la rccevoir ; mais il est vrai aussi quelle peut conve-
nir egalement aux uns et aux autrcs. On vient de voir que
que saint Jerome I'appliquoit aux Juifs : saint Irenee,
saint Jean Chrvsostome , saint Angus tin , saint Prosper ,
saint Cyrille d'Alexandrie , Theodoret , Tlieophylacte ,
OEcumenius, saint Gregoire - le - Granil , saint Jean
Damascene, et plusieurs des modernes en font le nit'nie
usage.
Mais il y a encore deux autres textes qui peuvent scrvir
*Jonn. T. 43. — - Jliom. ditp. 5\, seel, i . 5 Dicoterlr'o. — ' 2. Thess. n.
8o DISSERTATlOi^J
aussia prouver que I'Antechrist s'annoncera sous le nom
de Christ : c'est d'abord ce que dit Jesus-christ a ses dis-
ciples , en leur annoncant la seduction des derniers temps ;
et ceci regarde peut-elre les premiers commencemens de
I'Antechrist avant qu'il soil monte sur le trone : Alors, dit
Jesus-Christ, si qiielqiiim voiis (lit : Le Christ est ici , ou il
est Id, ne le croyez point , parce qiiil s'elevera dejaux christs
et defaiix prophetes , qui fcront dc grands prodiges ^t des
choses etonnanles , jusqu'd seduirc , s'il etoit possible , les elus
meines. J'aivoulu vous en avertir auparavant. Si done on voas
dit : Le void dans le desert, ne sorlez point pour rj aller. Si on
vous dit : LjC voicidans le lieu le phis retire de la maison , ne le
croyez point; car comme un eclair qui sort de V orient paroit
toutd'un coup jusqu'd I' accident, ainsi sera I'avenement da
Fils de I'homme^. Et dans une autre occasion il disoit en-
core en s'adressant specialement a ses disciples : Ilviendra
un temps oil vous desirerez voir un des jo urs da Fils de Vhomme,
et vous ne le verrezpoint. Et on vous dira: II est ici, ilest Id.
Mais n'y allez point , et ne le suivezpoiyit; car comme un eclair
brille et se fait voir dun cote du del jusqu'd I' autre , ainsipa-
roitra le Fils de I'homme en sonjour^. C'est ce qui donne lieu
a saint Cyrille de Jerusalem de penser que le demon pro-
fltera de I'attente ou sc trouveront et les Juifs et meme les
Chretiens : les Juifs qui attendent leur Mcssie ; ctles Chre-
tiens qui alors desirant voir un des jours du Fils de I'homme
pour les consoler dans leurs maux , seront dans I'attente
du dernier avenement de Jesus- Christ. « Lorsque le vrai
« Christ sera pres de paroitrepour la seconde fois, dit ce
« pere , notre adversaire , prenant occasion de I'attente
n des simples etprincipalement de celle de Juifs, suscitera
« un hommc qui prendra faussement le nom de Christ^. »
Saint Gregoire pensoit aussi que I'Antechrist, non-seule-
ment prendroit !e nom de Christ, et s'oft'riroit comme tcl
aux Juifs , mais qu'il tenteroit meme de seduire sous ce
nom les Chretiens qui attendent Jesus-Christ ; c'est ce qu'il
marque assezclairement lorsqu'il dit que les hommes alors
seront enlraines par une erreur contagieuse , de raaniere
qu'en servant I'Antechrist ils croiront servir bien plus
reellement le vrai Christ; et tout ce qu'ils feront par une
injuste perhdie , ils croiront le faire pour la verite de la foi
^ MaUh. x\w. I'S. etseqcj ^ Liic-nyu. 11, eiseqq.—''' Cyrill. Hieros.
catech. r5.
SLR L ANTECHRIST.
8l
la plus pure : Pestijero enore persuasi , si in islis famulantur
Antichristo , ut lutic vcrius prcebere sc astimenl obsequium
ihrislo Levialluin isle ila seducet corda rcproborum , ut
quidquid agunl ex iniquilale perjidia , pro vent ate recta Jidei
se agere suspicentur, quasi bene eis olet id quodzelo religionis
exerccnt^ .
II paroit done qu'a la fin des lemps il doit s'elever plu-
sieurs faux prophetes, plusieursfaux christs, entre lesquels
sera le dernier Antechrist; et que lorsque cet impie com-
mencera a se montrer, ce sera d'abord , comme dit lEvan-
gile , dans des lieux deserts ct secrets : In deserlo , inpene-
tralibus ; il s'annoncera sous le nom de Christ, et Ion
dira : Le Christ est ici , ou il est la : Ecce hie est Christus ,
aiil illic. Sous ce nom respectable , et par I'eclat des pro-
di^es qu'il fera, il seduira peut-etre une partio des Chre-
tiens, mais principalement la plupart des Juifs. Son parti
se fortifiera , sa puissance s'accroitra ; et pour augmenter
le nombre de ses sectateurs en attirant a lui tous les enne-
mis de Jesus-Christ , il se declarcra lui-meme ouvertement
contre Jesus-Christ et contrc les Chretiens fideles, qui re-
fuseront de le reconnoitre.
« II s'attribuera faussement le nom de Christ, dit Lac- Orpo^'*»<''»
o tance, et il combattra le Christ veritable : Se ipse ^^''^-y- lAntechrist
• lam menlieliir , et contra verum dimicabit^. » C'est cela a leganide
menie qui lui a fait donner le nonnW-Zntechrist , c'est-a-dire 3.-C.
oppose a Jesus-Christ. Trois textes de saint Jean nousde-
couvrent quelle sera la doctrine de cet impie touchant
Jesus-Christ.
11 niera lincarnation du Verbe : c'est ce que saint Jean
nous marque, lorsqu'apres avoir dit : Plusieiirs seducteurs
se sent eleves dans le monde qui ne confessent pas que Jesus-
Christ est venu rcvttu de noire chair, il ajoute : Tel est le se-
ductearet V Antechrist /Oi/To; h-vj o rlx-joz y.xl r.A'j-Jyc.Kxoc.K
Carilfautbienremarquer qu'ilnedit pas: Ojto; h-i -lobjoq
xai AvTc/iis-o; : C'est Id un seducteur et un Antechrist ; mais
il dit bien expresseraent : Telest le seducteur et I' Antechrist ;
^. ^^^"'^-"''■e , lel sera ce seducteur qui doit venir a la fin des
siecles, et qui sera par distinction rAntechristpropremeait
dit : OvTo'-c z'j-vj 6 z'/uafvoc /.'A i Av':J/ct7T0--.Il niera done que
Jesus-Christ soit venu revetu de notre chair. C'est ce que
' Gt-eg. Mor. in Job. Ub. xxxjv. n. 3 r . « 32 . - * Lact. Instit. I. vie. c.
19. — '2. Joan, f 7.
23. ' a
DlSSERTAl'lON
saint Jean confirnie et explique encore dans un autre en-
droit^ lorsqu'il dit : Void a quoivous reconnoilrez I' esprit de
Dieu. Tout esprit qui confesse que Jesus-Christ est vena revetu
de notre chair ^ est de Dieu. Mais lout esprit qui divise Jesus-
Christ ( c'est ['expression de la Vulgate ; le grec porte :
Tout esprit quine confesse pas que Jesus-Chrits est vena revetu
de noire chair ) n est pas de Dieu : et c'est Id I' Antechrist , ou
selon le grec , c' est la, I' esprit de V Anlechrist dont vous avez
enlendu dire qu'ildoit venir : Kat to'jto iattv zo tou Avri/piffTO'j,
0 ar/]/.o'aT£ ov. Ip/eiat'- Saint Jean ne pouvoit s'expliqucr
d'une nianicne plus exprcsse.
Get impie niera que Jesus soit le Christ. C'est ce que
saint Jean nous enseigne encore dans un autre endroit
lorsqu'il dit : Qui est le menteur? Tt; iaziv b 'j^sucrr/];, sinon
celui qui nie que Jesus soit le Christ ? C'est Id I' Anlechrist ,
OuTo;£(7Ttv 6 AvTt'xpwTo;^ : ou il faut encore remarquer
qu'il ne dit pas seulement Oiito; eanv Avziypi^xo^ : C'est Id
un Anlechrist; mais precisement, C'est Id V Anlechrist ,
O'jTo; £i7Ttv 6 kvxiyrA'szoz,. Ce sera la son caractere propre.
11 Jiiera que Jesus soit le Christ.
II niera le pere et le fds. C'est encore ce que saint
Jean nous apprend au meine endroit : C'est Id V Anlechrist
qui nie le Pere et le Fils : Ovzoz laziv 6 Ayxi'/oiazoq, 6 apyou-
P.£vo;t6v T.axipy.y.oLixov utov.Il niera que Jesus-Christ soitFils
de Dieu ; il niera que Dieu soit le pere de Jesus-Christ no-
tre Seigneur.
Mission d'E- ^^ homme si ouvertement ennemi de Jesus-Christ , et
Jitetd'Hc- deja soutenu par un parti puissant forme de Juifs incredu-
noch qui les , et dc gcntils ou infideles ou apostats , sera bientot re-
viendront connu pour chef par les ennemis du nom chretien : place
rActeclu-ist. alors a la tete de I'empire antichretien, qui depuis si long-
temps lui prepare les voies, il se verra bientot en etat de
faire eclater sa fureur conlre le peuple fidele. Mais saint
Jean nous apprend que les quatre vents prets a exciter alors
surlaterrela plus alireuse tempete, sont suspendus jusqu'a
ce que les cent quarante-quatre mille Israelites choisis des
douze tribus d'Israel , soient marques' du sceau de Dieu^.
C'est alors que doivent paroitre les deux lemoins dont I'un
sera Elie qui doit etre envoye pour operer la conversion
des Juifs.
' I Joan. IV. 2. et 3. — ^ i. Joan, ii, 22. — '^ Jpoc. vm. t. etseqq.
suu l'\ntechrist. 83
Toute la tradition a reconnu que les deux temoins dont
parle saint JeanS sont Elie et Henoch , et que Tobjet de
leur mission sera de s'opposer a TAnlcchrist, qui est re-
presente par cette bete qui monte de Tabime , et par la-
quelle ils doiventetre nils a mort. Et en efiet ces deux pro-
phetes sont les seuls dont I'Ecriture nous apprenne la
'j^ conservation, et dont elle nousannonce le retour. Moise
'"nous apprend qu'Henoc ayant vecu sur la lerre pendant
trois cent soixantc-cinq ans, et ayant marche dcvant Dieu,
ne parut plus , parce que Dieu I'enleva : Non apparuit, quia
tulit earn Deus'-^. L'auteur du iv* livre des Rois nous ap-
prend qu'Elie etant pret d'etre enleve au ciel , etoit avec
son disciple Elisee, lorsqu'un char de feu ct des chevaux
de feu les separerent tout d'un coup I'un de I'autre, et EHe
^ monta au ciel etant enleve par un tourbillon : Et ascendil
^ E lias per Lurbinem in coeliim^. L'auteur du livre de I'Eccle-
siastique nous decl;\re qu'Henoch ayant plu a Dieu a ete
transfere dans le paradis pour faire entrer un jour les na-
tions dans la penitence : Translalus est in paradisum , ut
DET GENTiBLS poENiTENTiAM*. Et plus loin , cu parlaut d'Elie,
et s'adressant meme a lui, il dit : Qui pent sc glorijier
comme vous ? vous qui avez ete enleve au ciel dans un tour-
billon de feu , et dans un char tratnepar des chevaux ardens ;
vous qui avez tie destine pour reprendre les prevaricaleurs dans
le temps prescrit, pour apaiserla colere du Seigneur avant que
sajurcur s'enjlamme , pour reunir le cceur des peres et des en-
fans ^ et pour retablir les tribus de Jacob : et restitleue tri-
al's Jacob"^. Le Seigneur dit aussi par la bouche du pro-
phete Malachie , en s'adressant aux enfans d'Israel et do
Juda : Je vous enven^ai le prophete Elie avant que le grand et
leirible jour du Seigneur arrive , el il reunir a les cceur s des
peres avec Icurs enfans , et des enfans avec leur s peres , de peur
queje neviennc , et que je ne frappe la terre d' analheme^ . Et
Jesus-Christ meme dit a ses disciples : // est vrai qu'Elie
doit venir, et ilretablira toules choses : Elias quidem veniu-
RUS EST, ETRESTITUET OMNIA ^. Tcls SOnt IcS ICXtCS SUF Icsquels
les saints peres ont ete fondes a dire que ces deux prophe-
sontles deux temoins que saint Jean annonce dans TApo-
calypse.
* ^poc. XI. 3. etseqff. — * Gen. v. 24. — ' 4. Reg. ir, ii.—'^Eccli. xliv.
16. — * Eccli. TttTHi. 4t etseqq. — <"' Mai. iv. 5. et6. — ''Matt. xvii. 11.
DISSEnTMION
Saint Justin , apr^s avoii' fait remarquer que , comme
il devoit y avoir deux avenemcns du Messie , Elie est re-
serve pour etrc le precurseur du second, ajoule : « Et
« cerles notre Seigneur I'a aussi enseigne , lorsqu'il a dit
« qu'Eliememeviendroit; et nous savons que cela arrivera
« lorsque notre Seigneur Jesus-Christ sera pres de venir
« du ciel dans sa gloire*. » Tertullien dit : « Henoch et
n Elie ont ele transferes, eton ne trouve point leur mort,
« parce quelle est differee. Mais ils doiventmourir, etils
« sont reserves pour eteindre I'Antechrist par leur sang :
o Ceternm moriluri reservanlur , ul Anlichrisium sanguine
« suo extinguanl ^. » C'etoit sans doute d'Elie que Lactance
parioit, lorsqu'il disoit : « La (in des temps etant proche ,
« Immincnte jam lempormn conchisione, un grand prophete
« sera envoye dc Dieu, pour rappeler les homines a la
« connoissance de leur Dieu, etc. ^. » Le martyr saint Hip-
polyte dit : « Le premier avenement de Jesus-Christ a eu
« pour precurseur saint Jean - Baptiste ; ie second aura
« pour precurseurs Elie et Henoch *. » Saint Ephrem dit :
« Dieu dans sa misericorde enverra Elie et Henoch qui ex-
tthorteront ouvertement le peuple a ne point croire a
« I'Antechrist ^. » Saint Hilaire dit : « Le Seigneur re-
« pondit a ses disciples qu'Ehe viendroit et retabliroit
« toutes choses , c'est-a-dire qu'il viendroit pour rappeler
« a la connoissance de Dieui ce qu'il restera alors d'lsrae-
« lites sur la terre °. » Saint Ambroise pai^lant d'Elie et dc
saint Jean-Baptiste, dit : « Celui-ci a ete le precurseur du
« premier avenement du Seigneur , celui-la le sera du se-
tt cond : Hie prions , ille sequentis dominici prcecursor erit
(^ adventas "^ . » Et ailleurs : « Cette bete, dit-il, qui est
« I'Antechrist , monte de I'abime pour combatlre contre
« Elie et Henoch qui ont ete envoy es sur la terre pour
« rendre temoignage a Jesus-Chiist , comme nous le lisons
« dans I'Apocalypse de saint Jean ^, » Saint Jerome dit :
« Selon la prophetic de Malachie , Elie doit preceder le
« Sauveur dans son second avenement, et annoncer la
« venue du souverain Juge : In secundo Salvaloris advoilu,.
' Justin. Dial, cum Tryph. — * Teitull. de Anima., c. 5u. — ^ Laclant.
Inslit. I. VII. c. 17. — * Ilij'pol. Mart. Onit. de Amichristo. ■ — • ^ Ephrcum.
Sciin. ne Antichr. — ® Hilar, cap. 17. in Matt. — ^ Ambr. in Luc. r. — * Id.
inps. W.V.
SCR l'amtecmrist. 85
« juxla Malachiam , prceccssarus est Elias , et venturiim Ju-
a tticein nantiatnrus ^ » Et ailleurs * : « Selon I'Apocalypse
c. de saint Jean , il est dii qu'Henoch mcmc et Elie doivent
« mourir. » Et plus bas : « 11 n'est pas question ici d'He-
« noch et d'Elic, dont rApocalypse annonce ravencnient
o et la mort. » Saint Augustin reconnoit ^ que Ton croit
a qu'Henoch et Elie , qui sont soumis a la mort en la per-
« Sonne d'Adajn, et qui portent dans leur chair une se-
tt mence de mort , doivent revenir dans celte vie pour
« payer ce tribut, et subir enfmla mort qui leur a ete si
« long-temps differee. » Saint Prosper traite fort au long
de la mission des deux temoins, Elie el Henoch; et il re-
connoit que « comme Dieu a envoye conlre Pharaon dieux
a temoins , Moise et Aaron, et contre Neron deux temoins,
« saint Pierre et saint Paul , il enverra dc meme contre
« rAntechrist deux prophetes, Henoch et Elie : Et contra
« jiritichristum duo, Henoch et Elias prophe tee ^.n Saint Jean
Chrysostome dit : « Les prophetes font mention des deux
« avenemens de Jesus-Christ, et ils assurent qu'Elie sera
« le precurseur du second ^. » Saint Cyrille d'Alexandrie
dit : « Elie le Thesbite doit un jour paroilrc a nos yeux ,
« lorsqu'il viendra annoncer a tous les hommes I'avene-
« ment du souverain Juge ^. » Theodoret dit : « L'Ante-
« christ se portant a ces exces, le grand Elie paroitra an-
« noncant aux Juifs I'avenement du Seigneur". » Saint
Gregoire-le-G rand dit « qu'Elie precedera le second ave-
« nement du Seigneur ^. » Ailleurs, parlant des deux te-
« moins,ildit « que ces deux excellens predicateurs ont
« ete soustrails a la mort pour etre a la fin rappeles et em-
« ployes au ministere de la predication : Duo illi priedica-
« tores eximii dilata morle subtracti sunt , ut ad prcedica-
« tionis usum in fine revocentur ^. » Ailleurs il les nomme ,
et il dit que « par la predication d'Elie et d Henoch , la plu-
« part de ceux d'entre les Juifs qui etoient restes jusqu'a-
« lors dans I'infidelile reviendront a la connoissance de
« la verite : Elia et Henoch pnedicante , multi ex his qui
« tunc in Judcea in injidelitate remanserint , ad cognitionem
*Hieron. iriMaU.xx. Et j'lirsus in Matt. xvii. Ipse {Elias ) tfui ventu-
rus est tn secundo ad\>entu Sal^atoris juxta corporis Jidem. — ^ Hieron-
ad Marceliam, ep. olim. 148. — ^ Aug. de Gen. ad lilt. lib.\^. cap. 6. —
♦ Prosp. in Dim. temp. c. i3. — ' Chrysost. in Matt. horn. 58. — « Cy rill-
Alex, in Mai. IV. — ' Theodoret. in Dan. xn. P'ide et in Mai. it.— ■* Gjvg
magn. in Evang. hom.-;. — ^ Greg. magn. in Job, l.ix. c. 3.
8fi DISSERTATIOW
« verkalis redeunt *. » Ailleurs , parlaiit dc I'Antechrist, il
dit o qu'Elie et Henoch seront envoyes au milieu dcs
« hommes pour s'opposer a lui : Elias et Henoch i7i ejus ex-
n probralionem ad medium deducuniur ^. » Mais il est inutile
de pousser plus loin cetle tradition ; c'est la doctrine de
tous les siecles.
Conversion £|jg gg,,^^ Jonc alors envoye , et il est principalement
] ^miiiistere ^lestinc pour retablir Ics tribus de Jacob : Restiluere Iribus
d'Elie, Jacob. C'est done alors que les Juifs seront rappeles et
convertis par son ministere. Nous ne rassemblerons point
ici toutes les preuves que les divines Ecrilurcs nous fournis-
sent de leur futur retour ; nous rernarquerons seulement
que la conversion future de ce peuple est clairement an-
noncee par saint Paul dans I'epttre auxRomains , chap, xi.
V 25. et 26. : Quia ccecilas ex parte contigit in Israel , donee
plenitudo gentium intraret , et sic omnis Israel salvus Jieret.
Nous ajouterons qu'elle est annoncee par les anciens pro-
phetes, principalement sous Ic syrabole du rappel de la
maison d'Israel , et de sa reunion avcc la maison de Juda
qui represente I'Eglise de Jesus-Christ ^. Enfin , nous ob-
serverons qu'elle est annoncee par saint Jean dans I'Apo-
calypse sous le symbole de ces cent quarante-quatre milie
Israelites , qui sont marques du sceau de Dieu precisement
entre louverture du sixieme et du septicme sceau ; ce qui
concourt visiblement avec la mission des deux temoins
qui est aussi placee de meme entre le son de la sixieme et
de la septieme trompette ; parce que , comme le remarque
tres bien I'Abbe de la Chetardie , les symboles qui accom-
pagnentl'ouverture des septsceaux etle son des sept trom-
pettes representcnt I'histoire de I'Eglise partagee en sept
ages , et qu'a la fin du sixieme age doivent se rencontrer
ces deux evenemens , la mission des deux temoins el la
conversion des Juifs.
Et certes , « quoique nous sachions , dit ici Malvenda ,
« que ce nombre de serviteurs de Dieu, choisis d'entre les
« Juifs pour etre marques du sceau de Dieu, est explique
« diversement par les interpretes , cependant quelque
« grande que soit 1' obscurite de 1' Apocal ypse , nous croyons
« que ce n'est point une interpretation etrangere , que de
« dire que par ce nombre de douze mille de chaque tribu
^ Greg. magn. iiiEzech. horn, ii.- — -Id. in Job, l.xy.c. 39. — ' Voyez
les prefaces que nous avons raises a la lelc dcs livresdes proplieles.
SLR L a:stechrist.
«. d'lsrael, marques du sceau de Dieu , saint Jean a enlcndu
n le nombre des Israelites qui , appeles de chaque tribu... ,
u einbrasseront la reliiiioii rhretienne vers la fin du nionde
u a ia predication d'Elie ct d'Henoch , recevront le saint
« bapieme , cL seront marques du signe de la croix : /«
a tmita tamcn ^pocalypsis obscuriUUe , haud alicnam illam
a interprclationem exislhiMJuus , quco docet Joannem hie per
a numerum istinn duodecim milliuin signatorum ex unaqua-
« que Israelidca Iriha , intcUexisse ninnenim Israelilarum ,
I, qui ex singulis I rib ub us in jine mundi , prcedicatione
« Henoch el Elia , christianam religionem amplectenlur , bap-
« tismale sacro iniliabunlur , el signo crucis consignabuntur. »
Ensuile il fait remarqucr qu'enlre les anciens, Victorin ,
Andre et Vretas , eveques de Cesaree , ont eu oette pensee.
Victorin dit : « Saint Jean montre ici ie nombre de ceux
a d'entre les Juifs qui seront ramenes a la foi par Elie. »
Andre , aprcs avoir presente d'abord un autre sens ,
ajoute : « Ou ce qui nous paroit beaucoup plus crovable
n et plus vraisemblable, c'est ici le nombre de ceux d'entre
B les Juifs qui a la fin des siecles seront sauves par la foi. n
Aretas preferant ce sens dit aussi : o Cela se verifiera d'une
« maniere plus parfaite au temps de I'Antechrist. » Entre
les modernes, I'auteur du traite attribue a Nicolas Oresme
remarque expressement « qu'au cliap vii de 1' Apocalypse
« il est dit qu'un grand nombre de Juifs sont marques du
« sceau de Dieu , afin quits ne perissent pas cntieremcnt
u par la seduction de I'Antecbrist , qu'ils quitteront pour
u retourner a Jesus-Cbrist ^ lorsqu'ils seront rappeles par
« la predication d'Elie et d'Henoch : Jpocal. cap. vii, di-
« cilur quia de Judceis plurimi signanlur , nc per ilium ( An-
li lichrislumj lotaliter percant , per prcedicationern Henoch ct
« Elice ab ipso ad Christum Dominum revcrsuri *. » Liran ,
Gagnee, Ribera , Pereira , et quelques autrrs ont aussi
adopte celte interpretation. Mais independamment de
cette interpretation , toule la tradition a reconnir que les
Juifs seront rappeles a la foi par le ministere d'Elie a la fin
des siecles, et au temps meme de I'Antechrist. On peut se
rappeler ici ce que nous avons dit ailleurs de la liaison in-
timc de la mission d'Elie , et de la conversion des Juifs ,
avec le regne et la persecution de I'Antechrist 2.
' Nic. Oresmti, de ^ndchr. I. in. c. lo. — *\ojcz\a Preface stir Mar
lachi'e, torn, xtii, ot la Disseitation sur les sigiies dc la mine tie J,rifs<i-
lem el du dernier ave'nementde Jesus~Ch:st,loni. xtx.
88 DISSEKTATIO?«
Gorversion ^ m^me qu' autrefois saint Pierre fut choisi pour an-
d'une multi- noncer I'Evangile , principalement aux circoncis, et saint
lude innotn- Paul pour Tannoncer principalement aux incirconcis ' , do
hrable de meme a la fin des temps , Elie sera envoye principalement
mini'stere^'^ ^ pour retablir les Iribus de Jacob , et Henoch principale-
d'H''noch et ment pour faire cntrer les nations dans la penitence : Ut
par Ve-nemi>le del gentibus panitentiam. Mais, d'ailleurs, selon la remar-
etlezeledes que, et selon les expressions memes de I'Apotre : Si la
chute des Juifs a ete la richesse da monde , et sileiir petit nom-
bre a ete la richesse des gentils , combien leur plenitude enri-
chira-t-elle le monde encore davantage P Si leur reprobation est
devenue la reconciliation du monde , que sera leur rappel , si-
non un retour de la mort d la vie ^ ? Des a present disperses
partout , ils annonceront partout I'Evangile ; ils seront
alors comma une semence sainte qui en peu de temps pro-
duira une abondante moisson. Aussi voyons-nous qu'a-
pres que les cent quarante-quatre mille Israelites ont ete
marques du sceau de Dieu , saint Jean voit paroitre devant
ie trone de Dieu U7ie multitude innombrable , turbam ma-
GNAM QLAM DINUMERARE NEMO POTERAT , de tOUtC nation^ de
loule tribu , de tout peuple , et de toute langue , vetus de robes
blanches , et tenant des palmes en leur main ^ . Et il lui est dit
precisement que ce sont ceux qui sont venus de la grande tri-
bufdztion: Ovxoi daiv oi Ipj^ofzcvot f/. zri^ S"}.r-{;;w; iric, txiyaJr,:;, *;
ou il faut bien remarquer qu'on ne lui dit pas simplement
qu'ils sont venus d' une grande tribulation , iy. S-}.t'^£oo; ^syo:-
}:riq,, mais qu'ils sont venus de la grande tribulation, eKX-/iQ
y/Mzw-Tvii u.syJ}:ri;, c'est-a-dire de cette derniere tribula-
tion que I'Ante.christ doit alors exciter, et qui sera la plus
grande que I'Eglise ait jamais eprouvee. Dieu appellera
done alors une multitude innombrable d'elus de toutes les
nations , qui passeront tons par cette grande tribulation :
OuTOj' ehiv ol epy6fj.evot. iz to; S-At^l^ew; r/y; ^lydlriz. Et plus
loin , lorsque saint Jean voit paroitre ces cent quarante-
quatre mille Israelites avec I'Agneau sur la montagne de
Sion ^ , aussitot il ajoute ^ qu'il vit un autre ange qui voloil
par le milieu du del portant I' Evangile etemelpour I' annoncer
dtous ceux qui sont sur la terre , a toutes les nations , a toutes
les tribus , d toutes les langues , et d fous les peuples , disant d
haute voir : Craignez Dieu, et rendez-lui gloire , parce que
* Gal. II. 7. 8. — -Rom. xi. 11. tS. — ^ Apoc. vn.9. — ^J]x)c. vii. 14. —
' Jpoc. .\iv. I . ctseqcj. — * jdpoc. XIV. G. ef 7.
stR l'a!«techrist. 8g
r funre d4 son jugement esl veiiue ; el adorez celui qui a/ait le
id et la terre , la mer et ks Jontaines . Ce sera principale-
uient Henoch qui sera le ininistre de cette predication en
faveur desgentils : a sa predication sejoindront Texemple
(tie zeletles Juifs coiivertis parle niinistered'Elie; etc'est
linsi que se forniera sur la terre cette multitude innom-
brabie de toute nation qui doit elre appelee lorsque I'heure
du juj^ement sera proche , et qui doit passer par la grande
tribulation qui precedera celte heure si terrible pour les
mechans , et si desirable pour les elus.
C'est done alors que doit s'elever cette grande tribula- L'Aniechrist
tion : le souffle des quatre vents jusque-la suspendu se re- "surptrale
pandra enfiu sur la terre pour v exciter la terapete la plus """^ ,? ' ."^
cc II ' ' i ^ tt 1 ■ 11 ' -1 inlenlira§t-il
iitreuse et la plus generate. L Antecnrist, abandonne cles i,. cultedes
luifs et d'une multitude innombrable de gentils, excitera idoles?
contre eux toute la fureur des ennemis du nom chretien.
hisque-la il avail seulemenl affecte le nom de Christ et de
Messie ^ pour s'attacher les Juifs ; et s'il avoit ose prendre
plus tot le nom de Dieu , cela seul aaroit suffi pour les
eloigner de lui. Mais abandonne d'eux , il ne craindra plus
de s'elever jusqu'a se faire rendre les hommages divins ;
c'est alors que, selon I'oracle de I'Apoire, cet inipie s'e-
llvera aii-dcssus de tout ce qui est appele Dieu, on qui est
adore , jusqu'd s'asseoir dans le temple de Dieu, , voulant lui-
mime passer pour Dieu '. Et saint Jean nous annonce qu'en
effet cette bete dont il parle et qui represente cet impic ,
sera adorec par tous ceux qui habitent sur la terre , dont les
noms ne sont pas ccrits dans le litre de vie de I' Agneau ^. Il va
plus loin , et il nous dit ^ qu'il vit une autre bete qui monloit
de la terre , au lieu que la premiere etoit montee de la mer ;
cette scconde bete avoit deux comes semblables d celles de
I'Apicau , mais elle parloit comme le dragon. La suite des
lemps nous apprendra quelle est cette seconde bete , que
>aint Jean appelle ailleurs Ic faux prophete de la bete ^, et
diiiit on ne pourroit parle r maintenant que par conjecture.
Nous remarquOns seulementici que selon le temoignage
de saint Jean, cette seconde bete seduisit ccux qui habitent
sur la terre a cause des prodigcs quelle exit le pouioir de faire
dcvant la premiere bctc , en disant d ceux qui habitent sur lei
terre qu'ils drcssassenl une image a la btle. . . Et il luifut donne
'a. 'lliess. II. 4 — ^ Jpoe. x«". s ^Jpoc. xiii. n. elsetfq.—*Jffoc.
X\I. iS. XIX. 20. xt. lo.
«0 DJSSEKTATiO
le pouvoir d'animcr I' image de la bete , ajin que celte image
parldty etdejaire luer tons ccux qui n adoreroient pas V image
de la bete \ On adorera done ct I'Anlccliristet son image,
et c'est ce qui donncra lieu a celte terrible et violente per-
secution qui doit s'elever alors , en sorte qu'il y aura peine
de mort prononcee contre tous ceux qui n'adoreront pas
la bete ou son image. L'Antechrist se fera adorer dans Ic
lieu de sa residence ; ct dans les villes et les provinces
eloignees , on adorera son image , sa statue , son idole.
Yoila done une idolatrie qui sera repandue alors par
toute la terre. Mais I'Antecbrist interdira-t-il toute autre
especed'idolatrie, lout autre culted'idoles? C'estl' opinion
commune. Saint Ircnee dit : « II deprimera les idoles, pour
« persuader qu'il est le seul vrai Dieu, se mettant ainsi lui
« seul a la place dc toutes les idoles^. » Saint Cyrille de
Jerusalem dit que « I'Antecbrist aura en baine les idoles ,
« mais qu'il s'assiera lui-meme dans le temple de Dieu pour
« se faire adorer^. » Saint Jean Chrysostome dit que
<( I'Antecbrist n'entrainera point les bommes dans I'idola-
«trie, mais qu'il s'elevera lui-meme contre Dieu, qu'il
« renversera et deprimera tous les Dieux, et se fera lui-
« meme adorer comme Dieu"*. » Saint Jerdme dit que « I'An-
« tecbrist s'opposera a Jesus-Cbrist, et que cVst pourcela
« meme qu'il est appele AnlcchrisL ^ ct qu'il s'elevera au-
*y dessus de tout ce qui est appele Dieu, en sorte qu'il fou-
« lera aux pieds les dieux cle toutes les nations, et toute
« religion recue, ainsi quela religion veritable;^M/ advcrsa-
« lur Chrislo, et ideo t^ocrt/Mr Antichristus; et extollilar supra
« omne quod dicitur Deus , ul cunctarum gentium deos , sive
ta probatam omnem el vcram religionem , suo calcet pede^ . »
Cette opinion est done fondee, i" sur le texte de saint
Paul , qui dit que eel impie sera un adversaire qui s'elevera
au-dessus dc tout ce qui est appele Dieu, ou qui est adorf^ ;
2° sur la propbelie du cbap. xi de Daniel qui dit que le roi
du septentrion/cVtr^^m et porlera lejaste de son orgueil contre
tout bien ; o^\' il pari era insolemmcnt contre le.Dieu des dieux ;
fYOi'il n'aura aucun tgard an Dieu d£ ses pcrcs ; et qa'ifne se
souciera de quclque Dieu que ce soit^ .
Mais quant a la propbelie du cbap. xi de Daniel, nous
^jdpoc. xiir. 1 4. el 1.1. — ^ I/vn. adv. hceres. I. v. c. 2.5. — ^ Cyrill.
Uieros, catech. i5. — * Clays, ini. Thess. 11. — ' Hieron. ad jdlgasiam,
qucest. II. — " 2. Thess. yu 4. — " Dan. xi. 36. 37.
SUH L A^fTECHRIST. QI
avons deja fait remarquer que Ic roi du septentrion dont
elle parle est Antiochus Epiphancs, en qui elle se trouvc
verifiee. « Epiphanes , dit lloUin , iraduisoit toutes les
a religions en ridicule. 11 pilla les temples de la Grece , et
a voulut encore depouiller celui d'Elymaide : et il exerca
a principalement sa fureur inipie contre Jerusalem et les
o Juifs". » D'ailleurs celte prophetic ne dit pas qu'il ren-
versera les idoles, et qu'il en interdira le culte ; elle dit
seulement qu'il les meprisera , et qu'il s'elevera au - dessus
d'elles : Ele.vahitur et magnificabitur adversus omnem Deiim;
ou selon I'licbreu rendu plus littcralement, supra omnem
Deum^.
Et c'est aussi ce que dit I'Apotre, en parlant de I'Ante-
chrisl : Cet impie s'elevera au-dessus de lout ce qui est appeU
Dleu , ou qui est adore : Extollitl r supra omne quod dicitur
Decs, aut quod colitur. Car, comme le remarque tres
bien saint Jerome, il ne faut pas confondre dans ie texte
de I'Apolre adversalur avec cxtollilur; ces deux expressions
renferment deux caracteres difTerens de I'Antechrist : il
sera oppose a Jesus-Christ, et il s'elevera au-dessus de tout
ce qui est appe'e Dieu : c'est ainsi que saint Jerome meme
I'explique , comme on vicnt de le voir : Qui adversatur
Christo , et extollitur supra omne quod dicitur Deus. II s'op-
posera a Jesus-Christ; etcest pour cela meme qu'il est ap-
pele Antechrist : Qui adversalur Christo , el ideo vocatur
Aktichristus ; et il est visible que c'est cela meme que I'A-
potre marque par I'expression 6 u'jxiY.iiu.z'jo:, qui pourroit
meme signifiersimplement quicst adversarius. Mais I'Apotre
nc dit pas qu'il s'opposera au cuke des idoles ; il dit seule-
ment qu'il s'elevera au-dessus de toutes les idoles : jE"/ £;^-
lollitur supra omne quod dicitur Deus. S'il interdisoit le culte
de toutes les idoles, il pourroit trouver de I'opposition
dans les infideles memes ; mais laissanrsubsister le culte de
toutes les idoles , etse conciliant ainsi la multitude des in-
fideles, il se contentera de se faire adorer comme le pre-
mier de tous les dieux ; et I'eclat de sa puissance lui attirera
de la part des infideles cet hommage qui laissera subsister
toutes leurs autres superstitions : Et extollitur supra omne
quod dicitur Deus,
II y a plus ; c'est qu'il semble que saint Jean insinue cela
dans I'Apocalypse. Et d'abord il nous rapporte que dans
* Hist.anc.l.xv-ii. art. 2. § 4.— "Sx SsSy SliTI'l
92 DISSERTATION
une autre vision oa cette meme bete lui fut monlree,range
lui (lit : La bete que vous avez vue etoit , elle nest plus , et elle
doit monler de I'ahtme, et perir ensuite malheureusement ; et
les hahitans de la ten'e dont les noms ne sont pas ecrits dans le
livre de vie des le commencement du monde , s' etonneront de
voir cette bete qui etoit, qui n est plus , et qui doit venir^ . Cette
bete sur laqueile etoit alors montee la grande proslituee ,
representoit dans cette vision I'empirc romain dont Rome
paienne etoit la capitale. Get empire idolalre etoit au lemps
des persecuteurs paiens; il n'existe plus depuis Constan-
tin; mais, selon cette parole de I'ange , il doit reparoitre
pour perir ensuite malheureusement : et les habitans dela
terre s'etonneront de voir cet empire idolatre qui etoit ,
qui n'est plus, et qui alors reparollra. Ce n'est pas tout;
cette bete avoit sept tetes; et I'ange dit a saint Jean : Ces
sept teles sont sept rois ; dont cinq sont marts ; il en reste un , et
t autre n'est pas encore venu, et quand il sera venu , il doit
demeurer peu detemps^. Nous pourrions faire remarquer
avec I'abbe de la Chetardie que ce dernier est ou Julien
I'Apostat qui entreprit de rctablir I'idolatrie, ou plutot
I'Antechrist represente par Julien , et que les six autres
sont les six principaux tyrans qui ont persecute I'Eglise
dans-les trois premiers siecles : Neron, Domitien , Dece ,
Valerien, Aurelien et Diocletien. Or , lorsque saint Jean
voit cette bete monter de rabime, il nousdit^ qu'elle avoit
recu une plaie mortelle dans I' une de ses sept tetes , et qu'a-
lors cette plaie fut guerie; et toute la terre etonnee suiuit la
bete. L'empire idolatre a recu une plaie mortelle dans
I'unetle ses sept tetes, c'est-a-dire dans la personne de
Diocletien , en qui cet empire a commence d'expirer ;
mais au temps de I'Antechrist cette plaie mortelle sera
guerie : I'empire idolatre sera done alors retabli , non par
un ordre expres, mais par une tolerance impie ; et c'est
cela meme qui entrain era dans le parti de I'enncmi de Je-
sus-Christ toute la multitude des infideles : Et plaga mortis
ejus curata est; et admirata est universa terra post bestiam.
C'est aussi par ce motif, selon saint Jean^, que le fauxpro-
phete de la bete persuadera aux habitans de la terre de
dresser une image a cette bete, qui represente en meme
temps I'Antechrist et son empire : il leur dira de dresser
* Jimc. XVII. 8. — ^ Ayoc. xvii. lo. — ^ 4poc. xni. 3. 12. — ^Jpoc. xm-
14
SUK l'antechiust. gS
uno iina<^e a la b^leqiii , ayant ete blcssce par I'epec , sera
oopcndant encore vivante. C'est clans I'une de ses teles
tiu'elle a ele blessee; c'est par I'une de ses teles qu'ellc
I Hvivra : elle a (3te blessee ii morl dans la personne de Dio-
t leiicn ; elle revivra dans la personne de I'Anlechrist : et
Ic faux prophcte, pour engager plusaisement !a multitude
dcs infideles dans le parti de eel impie , les invitera , en
leur reprc>sentant que c'est a lui qu'ils doivcnt le rcjiablis-
seraent de I'empire idolatre : Dicens hahilantibiis in lend ,
ut faciantimuginem heslice quce habet plagam gladii, et vixil.
II y a plus encore; c'est que saint Jean dit expressement*
que ceux qui adoreront la bete , adoreront aussi le dragon,
c'est-a-dire le demon meme dans leurs idoles. Ils adore-
i.ENT, dit saint Jean , le dragon qiiiavoit Jonne sa puissance
a la bile, et ils adorerem la bete, en disant : Qui est sem-
hlablf a la bete , et qui pourra combattre contre cllc? Voila
deux cultes differens bien distingues, et qui subsistent en
m^me temps ; le culte du dragon , et le culte de la bele ;
le culte du demon , et le culte de rAntecliristqui, sans in-
terdire le culte des idoles, se contentera de s'eiever au-
dessus de tdfiteslcs idoles : Et adorayerlnt draconeji, qui
dtdil poteslalem bestice : et adoraverunt bestiam, (//c^w/^^ .•
Quis similis bestia: , et qnis pcterit pugnare cum ea?
Mais tandis que cet impie tolerera le culte profane des inti rdiction
idoles , et se fera rendre a lui-meme un culte sacrilege , il Ju culte de la
lournera toute sa fureur contre le peuple fidele , et s'effor- '■p''8'o" chre-
cera d'abolir le culte divin de la religion chretienne. C'est pAn'tecbrist.
ce que Daniel annonce lorsqu'au chap, xii de sa prophe-
tie, il marque le temps d'une dcisolation alTreuse au milieu
de laquelle le sacrifice perpclucl sera aboli'~. On pretend y
rapporter aussi les propheties des chap, vni et xi, ou I'a-
boliticm da sacrifice perpeluclle se trouve aussi marquee'.
Quelques-uns y ajoutent meme la prophetic du chap, ix,
ou se trouve annoncee V abolition des sacrijices au milieu
de la demiere des septanle semaines*.
Mais quant a la prophetic du chap, ix, elle regarde uni-
quement I'abolition des sacrifices anciens par I'etablisse-
ment du sacrifice nouvean, c'est-a-dire par la mort meme de
Jesus-Christ au milieu de laderniere desseptantese<naines,
que Ton pretendroit en vain etendre au-dela. Les septanle
* Jpoc. xin. 4. — * Dan. xii. ii. — ^ Dan.rw. 1 1. ra. i3. et xi. 3i. —
* Dan. i\. 27.
9^ D£S8RKTAT10H
semaines annoncees par Daniel se lerminent a la raort
de Jesus-Christ, laquelle sc trouve precisemcnt au milieu
dela derniere, comme Daniel I'avoit annonce : nous I'avons
montre ailleurs *. Cette prophetic est pleinement accom-
plie:eten vainen attendroit-onunnouvelaccomplissement.
Quant aux propheties. des chapitres viii et xi , nous
avons fait remarquer que , selon la lettre , elles regardent
Antiochus ; et elles ont ele accomplies en lui. Les livres
des Machabees nous apprennent ^ que ce prince impie
ayant rendu une ordonnance qui obligeoit tous les Juifs
de changer de rehgion sous peine de la vie , envoya a Jeru-
salem des officiers avec ordre de souiller le temple, et d'y
faire cesser le culte du Seigneur, lis dedierent cc temple
a Jupiter Olympien , et y placerent sa statue, lis erigerent
dans toute la ville des temples et des autels profanes , et
contraignirent les Juifs d'y sacrifier, et de manger des
viandes immolees aux idoles.
Mais quant a la prophetic du chapitre xii, il est evident
qu'elle ne peut regarder que le temps de I'Antechrit ,
parce qu'il y est clairement parle de la resurr^tion gene-
rale qui doit suivre cette derniere desolation. C'est ce qui
faisoit dire a saint Jerome au commencement de ce cha-
pitre ^ : « Jusqu'ici Porphyre s'est soutenu comme il a
a pu Mais que dira-t-il de ce chapitre ou se trouve
a marquee la resurrection des morts , dont les uns ressus-
« citent pour la vie eternelle , et les autres pour un op-
o probe qui ne finira jamais? Haclenus Porphyrius utcum-
« que se tenuit — De hoc capilulo quid diclurus est , in quo
« mortuorum describilur resurrectio , aliis suscilatis in vitam
« atemam , aliis in opprobrium scmpilernum? » Et quand il
vient a I'endroit ou Daniel dit que , depuis le lemps oil
le sacrifice perpetuel sera aholi , et oil V abomination de la
desolation sera etablie , il se passera mille deux cent quatre-
vingt- dix jours y il s'exprime ainsi : « Porphyre pretend
« que ces mille deux cent quatre-vingt-dix jours de de-
« solation ont ete accomplis au lemps d' Antiochus , et
« dans la desolation du temple , tandis que, comme nous
« I'avons fait remarquer , Josephe et le livre des Macha-
« bees marquent que cette desolation ne dura que trois
* Voyez la Dissertation sur les septante semaines , a la t6te de la prophe-
tic de Daniel, torn. xvf. — * i. Mach. i. 3o. et seqq. et i. Mach. vi. i. et
seqq.
-^Hieron. in Dan. xii.
S' I ANTECMRIST. 9>
;iiis '. D'ou il estclair, Ex quo pcrspicaum est , que ces
" Uois ans et clemi doiit Daniel parle ici, regardent le
>. temps de I'Antcchrist , qui pcrsecutera les saints pen-
>; ii!t irois ans et denii , c'est-a-dire pendant douze cent
. ..iire-vingt-dix jours ; Ex quo perspicuiim est Ires islos
el semis annos de Antichrislidicitemporibus, qui tribiis et
semis annis , hoc est mille duccntis nonaginta diebus sanclos
persecuturus est. Ainsi, ajoutc-l-il , depuis I'abolitionde ce
que les Grecs appellent e'voz/.i/t^jio; , et que nous avons
rendu par jige sacrificilm, le sacrifice perpetual ,\ots-
" que I'Anlechrist occupant toute la terre , aura inter-
« dit le cuke de Dieu, jusqu'a sa mort, il se passera
u trois ans et demi , c'est-a-dire douze cent quatre-
vingt-dix jours. A tempore igitur abJationis vjozi:/i'zu/^\) ,
quod lies intcrprctati sumus jlge sacrificilm, quando An-
tichristus orbem obtinens , Dei cullum inlerdixerit, usque ad
interfeclionem ejus , tres et semis anni , id est mille ducetUi
el nonaginta dies complebuntur. » Quelques-uns ont nienie
pcnse que sous le nom de sacrijice ptrpetud est ici designe
specialemenl le saint sacrifice de la messe , qui est la par-
tie la plus essenlielle du culte de Dieu, etle vrai sacrifice
perpeiuel qui a succede aux sacrifices de I'ancienne loi.
C'est le sentiment de Liran , de Maldonat , de Bellarmin ,
de Suarcs , de Malvenda et de plusieurs autres; non que
ce sacrifice doive jamais eire entieremcnt aboli, mais
parce que I'ennemi de Jesus-Clirist fera tout ce qu'il
pourra pour I'abolir , qu'il en lera cesser entierement la
elebration publique, en sorte qu'au milieu de cette yio-
icnte persecution il ne sera plus possible de I'offrir que
dans le plus profoud secret, comme autrefois au temps des
persecutions que I'Eglise eut a souflrir des empereurs
paiens : c'est la remarque et I'expression de Malvenda :
Sic enim olim fieri consueverat in primceva Ecclesia, quando
principes seculi immanitcr debacchabantur in Christianos ~.
L'Antechrist nc se contentera pas d'interdire le culte Persecution
sacre , il y aura peine de mort prononcee contre le peuple del'Ante-
fidele. Saint Jean nous le declare expressement. Et d'a-f'"'^Tr*
1 1 , , ,..,*,. , ^ -1 '^ peuple n-
oora , pariant des deux temoms, il nous dit qu apres qu lis j^ig; sa du-
auronl ac/ieie f/e rendre leiir temoignage , la bite qui monte de ree.
/'a^/'w^, c'est-a-dire 1' Antechrist , leiir fera la guerre, les
' I. Mach. I. 5-. IV. S2, clseqq. — - Mulv. de Jntichr. lib. ix. cap. it.
g6 DISSERTATIOIT
vaincra, el les tucra '. Plus loin , decrivanl et caraclerisant
cette bete , il ditqu'e//^; reciiL le poiivoir\de faire la guerre ^ ;
et Lientot apres ii s'explique en ajoutant : il liiifut donne
de faire la guerre aux saints ct dc les vaincre ^ ; c'est-a-dire
de les persecuter et de les faire mourir , comme elle aura
fait mourir les deux temoins. El la puissance luifuldonnie,
continue saint Jean , sur les homines de toute Irihu , de lout
peuple , de loule langue et de toute nation. Celte persecution
sera done universelle. Enfin saint Jean parlani de la se-
conde bete qui est le faux prophete, dit preciscment qu';/
lui Jut donne de Jaire tuer Lous ceux qui nadoreroienl pas
Vintage de la premiere ^e/e *. C'est done alors que doit
s'elever cette grande tribulation ^ par laquelle doit passer
cette multitude innombrable d'elus de toule nation et de
tout peuple qui paroissent a la suite de cent quarantc-
quatre mille Israelites. C'est done alors qu'arrivera cette
desolation affreuse dont il est parle au chap, xn de la pro-
phetic de Daniel, lorsque Fange lui dit : // viendra un
lemps lei qu'on n'en aura point vu dc semblable dcpuis que les
peuples sont ctablis jusqu' alors ^. Jamais il n'y aura eu de
persecution ni si universelle ni si sanglante que cellc que
i'Eglise eprouvera alors de la part de cet impie. Saint Je-
rome reconnoit que c'est la le sens le plus veritable dc
cette prophetic de Daniel : Tempore autem Antichristi
talem tribulationem fore , qualis numquam fuit ex quo gentes
esse cceperunt , verius intelligilar.
Combien de temps cette persecution durera-l-elle? Da-
niel et saint Jean nous le marquent expressemcnt. Daniel
ayant demande jusqu'a quand seroit differee la fin de ces
choses etonnantes ", il lui fut repondu qu'elles dureroient
un temps, deux temps et la moitie d'un lemps. Saint Jean par-
lant de la bete qui representc I'Antechrist et son empire ,
nous dit aussi que le pouvoir lui fut donne de faire la
guerre durant quarante-deux mois ^. Cette parole myste-
rieuse pourroit designer en meme temps la duree de I'em-
pire antichretien marque par cette bete , et la duree de la
persecution de I'Antechrist marque par I'une des sept
tetes de cette bete. Ces quarante-deux mois font precise-
ment I'intervalle de trois ans et demi , qui repondent aux
* Apvc. »i. 7. — - Apoc. xni. 5. — ' Jpoc. xm. 7. — '' Apoc. xin. i5, —
* Apoc.yn. i4- — ^ Dan. xn. i. — ' Hieron. in Dan. xn. — ^ Dan. xn. fi. 7.
SUB l'antechrist. 97
Irois temps et tlemi marques de m^me par Daniel en par-
lant do rcmpirc antichretien *, eten parlant dc la jicrse-
cution do TAntcchrist ^. Enfin nous venons de voir que
^elou la prophelie de Daniel, dcpuis que le sacrifioe pL-r-
petucl aura ete aboli il se passera milk deux cent quairc-
vingt-dix jours ^. Nous avons vu aussi que saint Jerome
*?toit persuatle que ces mille deux cent qualre-vingl-div
jours sont le menie intervalle que les trois temps ct demi
dont il avoit ete parle d'abord : Tres ct semis anni , id est ,
mille ducenli ct nonaginla dies *. II est vrai que douze cent
quatre-vingt-dix jours font un peu plus de trois ans et
demi ; et que si Ton compte les mois a trente jours cliacun ,
les douze cent quatre-vingt-dix jours ferontquarante -trois
mois : cependant saint Jean ne parle que de quarante-
deux mois; et il le repete meme lorsque parlant de cette
meme persecution il dit ^ qu'alors les gentils louleront aux
pieds la ville sainte pendant quarante-deux mois. II y a sur
cela deux voies de conciliation, i" Les quarante-deux mois
a trente jours font precisement douze cent soixante jours :
et peut-etre qu'originairement dans le texte on lisoit 1 2G0 ,
au lieu de 1 290. Saint Jerome meme lisoit peut-etre ainsi.
2" En supposant m^me douze cent quatre-vingt-dix jours ,
il se pent faire que I'interdiction du sacrifice perpetuel
commence quelques jours avant la persecution ouverte.
Et c'est peut-etre bien le sens le plus naturel. Les mois dc
trente jours ne sont usites ni chcz les Chretiens, ni chez
les Mahometans. Les Chretiens comptent par annees so-
laires de trois cent soixante-cinq jours , etles Mahometans
par annees lunaires de trois cent cinquante-quatre jours.
Les douze cent quatre-vingt-dix jours font quarante-deux
mois et douze jours chez les Chretiens , ou quarante-lrois
mois et vingt-un jours chez les Mahometans. II peut done
arriver que I'interdiction du sacrifice perpetuel etant I'e-
poque des douze cent quatre-vingt-dix jours , la persecu-
tion ouverte eclate environ quinze jours , ou peut-etre
seulement six ou sept semaines apres , et alors sera I'epo-
que des quarante-deux mois qui repontlent aux trois temps
etdemi.
L'ange qui parle a Daniel ajoute : Heureux celui qui attend Woii Je TAn
> I qui arrive jus qu a mille trois cent trente -cinq jours ^' ; ce que tccbrisi. Der-
' Dan. vu. a5. — - Dan. xa. 7.—' Dan. xii. 11 .~*Hieron. in Dan. xn.
--'^poc.xw. — * Dan.XM. la.
25.
sus-Glirist.
98 DISSERT A.TIOIX
nierav(^ne- saint Jer6mo explique ainsi : « Heureux celui qui apres Ic
mcnt^dcJc- „ mort de rAntechrist attend encore au-dela dcs douze
« cent quatre-vingt-dix jours qui vicnaent d'etre marques,
« quarante-cinq jours, aprcs lesquels Jesus-Christ notre
« Seigneur et notre Sauveur viendra dans sa majcste : Bea-
« tiis qui , inter feclo AnlickrisLo , dies supra nnmerum prcefini-
« turn quadraginta quinque prceslolalur , quihus est Dominus at-
n que Salvator in sua majestale venturus. Pourquoi, continue
« ce pfere , ce silence de quarante-cinq jours apres la mort
« de I'Antechrist? il n'appartient qu'a Dieu dc Ic savoir , si
« ce n'est que nous puissions dire que Dieu diflere de mettre
« les saints en possession du royaumc eternel , afm d'cprou-
« ver par-la leur patience : Quare autem post interfectionem
« Antichrisli, quadraginta quinque dierum silentinm silPdivinee
« scientice est : nisi forte dicamus , Dilatio regni sanctorum ,
a palientice comprobatio est *. » En effet nous avons deja rc-
marque que selon toute la tradition , I'Apolre parle du der-
nier avenemcnt de Jesus-Christ, lorsqu'apres avoir an-
nonce I'avenement de I'Antechrist, il ajoute ^ que le Sei-
gneur Jesus dctruira cet impie par le soujjle de sa houche, et le
perdrapar V eclat de sa presence , ou merae de son avenement ;
car le mot grec r.apovaia. signifie I'un et I'autre, et la Vulgate
liieme prefere avenement : Ille iniquus quern Dominus Jesus
interjiciet spiritu oris sui, et destruet illustratione adventus
sui.
Mais de ce lexte nieme nalt ici une observation ; car si
Jesus-Christ doit exterminer cet impie /?ar V eclat de son ave-
nement , comment saint Jerome a-t-il pu penser qu'il y au-
roit une distance de quarante-cinq jours entre la mort de
I'Antechrist et le dernier avenement de Jesus-Christ? Nous
avons deja rcpondu a cette objection en faisant remarquer
qu'il pourroit arriver qu'au milieu des signes prodigieux
qui preccderont immediatement le dernier avenement de
Jesus-Christ , I'Antechrist {\x\ extermine d'une maniere
eclatante , et comme par le souffle du Seigneur pres de pa-
rottre , en sorte que quoique Jesus-Christ ne dut peut-^tre
paroitrc que quarante-cinq jours apres , cependantil seroit
vrai de dire que cet impie seroit extermine par I'eclat de
I'avenement de ce Dieu Sauveur , c'est-a-dire par I'eclat qui
precedera de si pres son avenement. Et Malvenda dit aussi:
« On entend ici par V avenement , ou la presence du Seigneur,
* Hiemn. in Dan. xn. — - 1. Thess. u. 8.
SIR 1. ANTECHR1ST. ()(j
" rnvenement ineme de Jesus-Christ au temps du dernier
" jiigement ; non que fAntechrist doive etre extermine par
« Jesus-Christ precisement a ravencmeut de Jesus-Christ
a au jour m^nie du dernier jugement , puisqu'en effet il doit
« sc trouver un inlervalle de pUisieurs jours entre la mort
« de I'Antechrist et le dernier jugement , comme nous le
« ferons voir ; mais parce que V avcntmenl da Seigneur doit
« se prendre ici dans un sens phis etendu , en sorte que
n sous ce terrae se trouve compris toutle temps qui s'ecou-
« lera depuis la mort de I'Antechrist jusqu'au jugement ,
« qui sera alors tres prochain : Hie , adventum seu pr.esen-
o TiAM DoMi:«i , inlcllifunt ipsiim Chrisli ad judicium adven-
« Inm ; non quod proEjixe in ipso advenlu Chrisli ad judicium
« sit Anlichristus interjiciendus a Christo , cum revera plurcs
« dies interccssuri sunt a morte Antichrisli ad diem judicii ^ uZi
« cap. X ostendemus ; sed late el exlense dicalur adve:<tus
n DoMiM latum illud tempns , quod eril a Jine AyUichristi
« usque ad judicium , quod in proximo erit ^. » II expose
ensuite les differens sentimens des interpretes soit sur les
raille trois cent trente-cinq jours dont parle Daniel , soit
sur la liaison plus ou moins intime de la mort de I'Ante-
christ et du dernier avenenient de Jesus-Christ ; et il con-
clut en ces termes : « Au reste , si nous considerons bien
« les paroles de Daniel, et I'interprelation de saint Jerome,
« de Theoderet , et des autres qui ont pense Qomrae ces
« deux peres , nous regarderons comme bfeaucoup plus pro-
u bable que depuis la mort dn I'Antechrist jusqu'au juge-
n mentil n'y aura que quarante-cinq jours d'intervalle ; et
« c'est aussice que pensentdes theologiens distingues, lels
« que Bellarmin, Acosta, Valentia, Suares , Henriques :
« Ceterum si verba Danielis , si interprelcUionem sancli Hiero-
« nymi , Theodoreti , et aliorum cUlente considerernus , mullo
» probabilius exisUmabimus , a nece Antichristi (td judicium
n non nisi quadraginta quinque dies inter Jluxuros. Sicquoque
<i sentiunt prcBSlantes quique ikeologi , B ellar minus , elc.^. n
Sur cela nait encore une objection : S'il doit y avoir un
intervalle precisement de quarante-cinq jours entre la mort
de I'Antechrist et le dernier avenement de Jesus-Christ ,
ceux qui seront temoins de la mort de I'Antechrist pour-
ront done connoitre quel sera le jour du jugement ; et ce-
pendant selon I'Ecriture ce jour doit etre inconnu. ('cite
' Malvenda, de ^nticfir. 1. xni. c. 7. — * Ibid. c. 10.
lOO DISSERTATION
objection a ele prcvue et refulee specialemcnt, par Bellar-
niin ct Suarcs ; et voici ce que Malv^nda y oppose * :
a i"Le jour du jugement a toujours ete inconnii aux
« hommcs, et ils Tignoreront jusqu'a la dernicre extremite
« des siecles ; mais alors la fin du monde elant proche , et
« rAnteclirist exer^ant deja son regne tyrannique, il ne
« peut pas etre douteux que les homines pieux et instruits
« des Ecritures , reconnoissant alors TA-ntechrist , ne com-
« prennent en meme temps que le monde sera pros de finir ,
« et que le dernier jugement sera proche , puisque, de I'a-
« veu de tons les orthodoxes , il est certain que I'Antechrist
« ne doit venir que vers la fin du monde ; et quoiqu'ils ne
« puissent designer ou determiner d'une maniere certaine
« le jour du jugement , cependant ils comprendront facile-
« ment que ce jour sera tres proche.
« 1^ A. la vue de ces signcs horribles que le Seigneur a
« predit devoir arriver , signes dans le solcil , dans la lune ,
« dans les etoiles , dans la mer , les hommes ne sauront-ils
« pas certainement que le jour du jugement sera alors tres
« proche, que le Juge sera, pour ainsi dire , a la porte?
« n'en seront-ils pas saisis de frayeur ? et Jesus-Christ
« meme ne dit-il pas ^ qu'alors les hommes secheront dc
i.i frayeur dans Valtcnle de la revolution que I'univers seraprcs
« d'eprouver? Et certes pourquoi le Seigneur a-t-il averti
« de ces signes ses serviteurs^ sinon afin qu'ils pussent con-
« noitre et comprendre I'approche de ce jour? Cependant
« ils ne pourrontpas encore par-la connoitre ce jour d'une
« maniere certaine et precise.
« 3" De ce que , entre la mort de I'Antechrist et le juge-
« ment dernier se trouve determine un intervalle de qua-
« rante-cinq jours , il ne s'ensuit pas que le dernier jour
« pourra etre connu d'une maniere certaine ; parce qu'au
« fond iln'estpointenseignecommeune chose absolument
« certaine et indubitable qu'il ne doive y avoir que cet in-
« tervalle entre la mort de I'Antechrist et le dernier juge-
« ment, puisque les opinions des interpretes varient sur
« cela , et que I'oracle de Daniel sur cette chose future est
« tres obscur, et explique en differens sens : I'intcrpreta-
« tion dont il s'agit ici est seulement proposce commc pro-
« bable , vraisemblable , appuyee sur les meilleures conjec-
« tures; or, rien n'empeche de conjecturer reloignemen t
* Mah'enda, de Andchr. I. xiii, c. lo. — - Luc. xxi. 26.
Sl'H L ANTBCURIST. lOl
« ou la proximitc tlu dernier jugcment : Conjecluris autem
t< invtsli gave judicium nihil vetat. »
Ajoulons que cclte determination de jours, quelque in-
ccrlaine qu'elle puisse elre, est cepcndant un secours , uu
soulagement, unc consolation que Dieuaprepareepourses
serviteurs dans ces derniers temps. 11 n'a pas voulu leur
laisser iii^orer la duree de cette desolation afi'reuse, de cello
persecution violente , dont ils sont menaces : il leur an-
nonce par la bouche de Daniel quelle durera un temps, (hiix
temps , et la moitie d'nn temps. Cette expression pouvoit
avoir quelque obscurile ; Jesus-Christ nous I'explique par
la bouche de saint Jean , en nous declarant deux fois que
cette persecution durera quaranle-dexix mois, ce qui fait con-
noitre que les trois temps etdemi marques par Daniel signi-
fionl certainemen t trois ans e t demi . Ce n'est pas tout encore ;
le nombre m^me des jours est marque ; et Dieu nous declare
par la bouche deDaniel , que depuis I'interdiction du sacrifice
perpetucl,il se passera mille deux cent quatre-vingt-dix jours :
il sera aise de les compter ; et ce sera sans doute une consola-
tion pour les fideles. Enfin le Seigneur ajoute qu'heureuxest
celui qui attendrajusqu'au nombre de millc trois cent trcnte-
cinq jours :\\ ne dit point ce qui arrivera apres ce terrae ; il
neditpasmeme d'oiidoitse prendre le commencement de
ce nombre de jours ; mais en nous declarant par saint Paul
que I'auteur de celte persecution doit elre cxtcrmine par
V eclat de I' averumcnt de Jesus-Christ , il nous laisse a com-
prendre que le terme heureux qu'il promet a ses serviteurs
est I'avenement meme de Jesus-Christ, que ce terme heu-
reux ue pent elre differe beaucoup au-dela de celte perse-
cution ; qu'ainsi ces mille trois cent trente-cinq jours
doivent avoir la meme epoque que les mille deux cent
quatre-vingt-dix dont il vient de nous parler; qu'ainsi il
n'y aura que quaranle cinq jours d'intervalle entre la fin
de cette persecution et le dernier avenement de Jesus-
Christ; que la fin de cette persecution ne pent guere avoir
pour cause que la mort de I'Antechrist; qu'ainsi il y aura
quarante-cinq jours d'intervalle enlre la mort de r.\nte-
christ et le dernier avenement de Jesus-Christ; et afin de
donner plus de poids a ces conjectures, il veut qu'elles
nous soient proposees par celui d'entre les saints docleurs
sur qui il a repandud'unemanierc plus particuliere le don
de rintelligence des saintes Ecritures : Beatns qui , inler-
frclo Anlichristo^dics supra numcrum prajinitum quadraginla
I02 DiSSER TiiTlON
qiiinque pratsiokUur, quibus est Dominus atque Salvator in sua
maj estate va^ turns.
JUV^apituU;- Voici done a quoi peuvent se reduire les differens points
tion el con- quenous avons eu lieu d'examiner dans cette dissertation.
dusion. 1/Anlechrist sera un hoiume qui, par I'exces de son ini-
piele et do son opposition a Jesus-Christ, meritera d'etre
appele par distinctiou V Anlechrist , c'est-a-dire I'ennenii
de Jesus-Christ. Cet homme impie a deja eu differens pre-
tnirseurs, entre lesquels le plus distingue est Mahomet,
fondateur d'un empire anlichretien qui semble etre celui
a la tete duquel paroitra enfin le dernier ennemi de Jesus-
Christ. Ce veritable et dernier Antechrist ne paroitra qu'u
la fin des sidcles ; mais on ignore quand arrivera la fin des
siecles : une tradition assez repandue enseignc que le
monde ne durera que six mille ans; mais corabien a-t-il
deja dure?rien de plus incertain. L'opinion commune est
que cet enfant de perdition naitra de la nation juive , et
meme de la tribu de Dan ; il n'est pas certain que ce soit
de cette tribu; mais la suite donne lieu de penser qu'en
effet cc sera de cette nation. Plusieurs croient qu'il vien-
dra de Babylone, ou meme qu'il y naitra : sur cela rien de
certain. En vain chercheroit-on quelle sera sa naissance
ou son education; ce que Ton sail c'est que ce sera le plus
mechant de tons les homraes. Deux signes principaux doi-
vent precederet annoncer son aveneraent; premier signe,
I'entiere destruction des derniers restes de I'empire ro-
main ; second signe , la consommation de cette apostasie ,
qui depuis les premiers siecles de I'Eglise a deja fait tant
de progr^s par cette suite d'heresies et de schismes qui se
sontsuccedes d'age en age. Lorsque 1' Antechrist paroitra,
rerapireromain sera-t-il divise en dix rois? de cesdixrois,
en abatlra-t-il trois?ll paroit que cela regarde plutot son
empire que lui-meme. Mahomet s'est eleve precisement
apres le demembrement de I'empire romain ; et I'empire
antichretien qu'il a fonde a deja subjugue deux empires
puissans. L' Antechrist dominera sur toute la terre; mais il
ne faut pas attendre que son empire se forme dans un clin
d'oeil : depuis plus de onze siecles Tempire de Mahomet
deja repandu dans I'Asie , dans I'Afrique et dans I'Europe ,
lui prepare les voies. Ou sera le siege de cet empire im-
mense? plusieurs ont cru que ce seroit a Jerusalem; quel-
ques-uns croient que cet impie , alors maitre de toute la
terre, pourroit bien placer son siege dans Rome m,eme.
stR l'antechrist. 108
Ouani au noiii de cet homme , personne nc le sail ; saiut
Jean uous apprend seulementque dans ce norase trouvera
le nombre sijf cent soLvantc-six; cenombre se trouve dans le
uomde Mahomet; le deslructcur de I'empire gi*ec portoil
le meme uom ; lei sera peut-etre aussi le nom du dernier
enuemi de Jesus-Christ. Cetiinpie se couvrira-t-il du voile
de rhyocrisie? celapourra etre dans les commencemens.
Faul-il lui attribuer la ruse et rartificc, rimpudence et
I'audace, I'amour des richesses, la passion pour les fem-
mes? sur tout cela rien de certain. Possedera-t-il toute la
science et toute la vertu de la niagie? Saint Paul nous dit
seuleuient que cet impie viendra avec toute la puissance do
Satan , operant toutes sortes de miracles , de signes et de
prodigcs trompeurs. S'annoncera-t-il comme le Christ ,
ct sera-t-il recu comme tel par les Juifs? e'est I'opinion
commune fondee principalement sur ce que Jesus- Christ
meme paroit le predire ainsi. Mais son caractere essentiel
etdistinctif, e'est qu'apres avoir usurpe lenom de Christ ,
et avoir tente de seduire par ce nom les Juifs et meme les
Chretiens , il s'opposera ouvertement a Jesus-Christ ; il
niera que le Fils de Dieu se soit fait homme en la personne
de Jesus-Christ; il niera que Jesus soit le Christ promis, et
qu'il soit Fils de Dieu. Aux progres de la seduction de ce
laux Christ viendront s'opposer les deux temoins que Dieu
doit envoyer , Elie et Henoch. Par le ministere d'Elie , les
Juifs seront rappeles et converlis. La vocation et la con-
version d'une multitude innombrable de gentils , sera le
fruit etdu ministere d'Henoch, et du zele des Juifs|pour
Jesus-Christ. L'Antechrist alors abandonne des Juifs, mais
toujours soutenu par les ennemis du nom chretien , s'ele-
vera jusqu'a se faire rendre les hommages divins : il n'est
pas certain qu'il interdise pour cela le culte des idoles; il
paroit meme qu'il ne I'interdira pas ; mais il est certain
qu'il s'elevera au-dessus de tout ce qui est appele Dieu.
Par lui le sacrifice perpetuel sera aboli, c'est-a-dire inler-
dit; et il ne sera plus possible de rendre publiquemeut au
vrai Dieu le culte qui lui est du. Par lui les deux temoins
seront mis amort; il aura le pouvoir de faire la guerre aux
saints et de les vaincre , c'est-a-dire de les perseculer et
de les faire mourir ; et cette persecution durera quarante-
deux mois , c'est-a-dire trois ans et demi; elle remplira le
nombre des mille deux cent quatre-vingt-dix jours qui
doivent s'eco-uler depuis Tinterdiciion du sacrifice perpe-
lOl DISSERTATION SUR L ANTECHRIST.
tuel. Enfin Ic tcrme de cette persecution sera la mort
meme dc cct impie , que le Seigneur Jdsus detruira par le
souffle de sa bouche, et perdra par I'eclat de son avene-
nicnt: niais il paroit qu'enlre la mort de cet impie et le
dernier avenement de Jesus-Christ, il y aura un intervalle
de quarante-cinq jours qui acheveront le norabre des millo
troiscent trenle-cinq jours dontle terme nous eslannonce
comme heureux et desirable. Alors Jesus-Christ descen-
dra des cieux ; un feu vengeur le precedcira : les morts res-
suscileront; tous les hommes seront juges; les bons etles
mechans seront separes ; le monde embrase sera renou-
vcle. Ainsi se verifiera ce que saint Augustin avoit appris
de ceux qui avoient vecu avant lui, ce que toute la tradi-
tion a enseigne apres lui, etce que nous attesterons aussi
nous-memes en demeurant inviolablemcnt attaches a cette
chaine respectable* : In illo judicio vcl circa illudjudlciiivi^
has res didicimus esse venturas , Eliam Thesbitem ,JidemJii-
dccoraniy yintichristum perseculurum , Chrislum venturum ju-
dicalnrum : mortaorum rcsurrcctionem , bonorum , malorum-
qiie diremptionem , mundi conjlagralionem , ej usque renova-
iioncm i'quce omnia quidem ventura esse credcndum est ; seel
quibus modis vel quo ordine veniant, tunc magis docebil re-
rum expcrienlia , quam nunc ad perjeclum inlelligenlia homi-
num valet consequi. Exislirnolamen co quo ame commemorala
sunt ordine esse ventura.
' *dtfi^. de Ctw. Dei, I. xx. cap. ult.
DEUXIEME EPITRE
DE SAINT PAUL
AUX THESSALOMCIKNS.
CHAPITRE PREMIER.
SainI Paul salue lea Thes^toniciens. II rend graces i Dlen de leur foi, et de
leur Constance dans les maux. II anoonce les vengeances qui seront cier-
cecs sur les mecbans, et la gloire dont les justes seront combles a I'avene-
ment de Jesus-Christ.
1. Paclcs et Silvanus ,
et Titnotheus, Ecclesiae
Thessalonicensiuin , in
Deo Patre nostro , et Do-
mino Jesu Christo.
2. Gratia vobis et pax
a Deo Patre nostro , el
Domino Jesu Christo.
5. Gratias agere debe-
mus semper Deo pro vo-
bis, fratres, ita ut dignum
est, quoniamsupercrescit
fides vestra, et abundat
charitas uniuscuj usque
vestrum in invicem :
4- Ita ut et nos ipsi in
vobis gloriemur in Eccle-
siis Dei , pro patientia
vestra, et fide, et in om-
nibus persecutionibus
vestris, ettribulatiouibus,
quas sustinelis ,
o. In exemplum justi
1. Paul, Silvain ' et Timolhee ,
a I'Eglise de Thessalonique , qui est
en Dieu notre Pere, et en Jesus-
Christ notre Seigneur.
a. Que Dieu notre Perc et le
Seigneur Jesus-Christ vousdonnent
la grace et la paix.
3. Nous devons, 6 frires, rcndrc
pour vous a Dieu dc continuelles
actions de graces; et ilestbieu juste
rue nous le fassions , puisque votre
foi s'augmente de plus en plus, et
que la charite que vous avez les uns
pour les autres s'accroit tous les
jours;
4. De sorte que nous nous glo-
rifions en vous dans les Eglises de
Dieu , a cause de la patience et de
la foi avec laquelle vous demeurez
fermes dans toutes les persecutions
et les afflictions qui vous arrivent,
5. Qui sont les marques du juste
> I
G'estic m6me que Silas Voyez la preface sur la i'«^pitrc
ir EPITRE DE SAINT
jiigeinent de Dicu', pour nous rcn-
drc dignes de son royaume', pour
iequcl aussi vous souiFrez ,
6. Cai-' il est bien juste devant
Dieu , qu'il aillige a leur tour ccux
qui vous affligent uaaintenant;
7. Et qu'il vous console avec
nous, vous qui etesdansralfliction,
lorsque le Seigneur Jesus descen-
dra du ciel et paroitra avec les anges
de sa puissance,
8. Lorsqu'il viendra au milieu
des flammes so venger de ceux qui
ne connoissent point Dieu, et qui
n'obeissent point a I'Evangilo de
notre Seigneur Jesus-Christ,
Q. Qui souffriront la peine d'une
iternellc damnation', etant confon-
dus par la face du Seigneur, et par
la gloire de sa puissance,
10. Lorsqu'il viendi-a pour fitre
glorifie dans ses saints , et pour s©
faire admirer dans tons ceux qui
auront cru en lui, puisque le temoi-
gnage que nous avons rendu a sa
parole a ete recu de vous dans I'at-
tenle de ce jour-la : '
11. C'est pourquoi ' nous prions
gans cesse pour vous, et nous de-
mandons i notre Dieu qu'il vous
rendre dignes de sa vocation, et
SSSALONICl
judicii Dei, ut digni ha-
beamini in regno Dei ,
pro quo et palimini :
6. Sitamen justum est
apud Dcum , retribuere
tribulalionem iis qui vos
tribulant ,
7. Et vobis , qui tribu-
lamini, requiem nobis-
cum in revelatione Do-
mini Jesu de coelo cum
angelis virtutis ejus,
8. In flamraa ignis dan-
tis vindictam iis qui non
noverunt Deum , et qui
non obediunt Evangelio
Domini nostri Jesu Chris-
ti :
9. Qui poenas dabunt
in interitu aeternas a facie
Domini, et a gloria virtu-
tis ejus,
10. Cum venerit glori-
ficari in Sanctis suis, et
admirabilis fieri in omni-
bus qui crediderunt, quia
creditum est testimonium
nostrum super vos in die
illo.
11. In quo etiam ora-
mus semper pro vobis, ut
dignetur vos vocatione
sua Deus npster, et im-
^ 5. Parce que si Dieu punit en cetto vie Ics bons mdmes , conibien pu-
nira-l-il les raechans en I'autre?
Ibid. En vous puriliant de vos peches.
y- 6. C'est le sens du grec.
•^ 9. C'est le sens du grec : o't.ve; (S'avjv Tiaouoiv, oXsOpov atwvijv k la letlre,
lesquels subiront la peine d'une eternelle perdition.
■^10. Autrement et selon le grec : qu'il vous console, dis-je , lorsqu'il
viendra pour etre glorifie dans ses saints, et pour se faire admirer en co jour-
lA dans tons ceux qui auront cru en lui, par la gloire dont il les coinblera ,
ct a laquelle vous participercz aussi vous , puisque le tcmoiguagc que nous
avons rendu i sa parole a ^te^ reiju de vous.
■>^ 1 1 . Sachant les giands bieus qui vous sont prepares.
LIIAIMTHE I.
I 07
plciil omneui voluntalem qu'il accoraplisse, par sa puissance,
l)Oiiilatis, etopusfiJei in lous les desseins fnvorables que <»a
viilutc, bonlc a sur vous, el roeuvre ile
\otre foi ;
12. Ll clarificetur no- 12. Afin que le nom de noln-
incn Domini nostri Josu Seigneur Jesus-Clirist soil f^lorilie
Christi in vobis, ct vos in en vous, et que vous soyez','lorifies
illo , secundum gratiani en lui, par la grace de noire Dieu ,
Dei nostri, et Domini et du Seigneur Jesus-Christ.
Jeju Christi.
CHAPITRE II.
\l>ostasie qui doit pr^cder I'av^nement de Jesus-Clirist. Mystere d'iniquite
qui s'opere jusqu'a I'aveuement de I'Anlcchrisl. Caracleres decethomme
de p^che qui doit 6ire extermin^ par i'avenement de J^sus-Christ. Saint
Paul rend graces de la foi des Tbessalonlciens , et les exbortc ^ garder les
traditions qu'il leur a laissees.
1 . RoGAMus autem vos ,
I'ralres , per adventum
Domini nostri Jesu Chris-
ti , et nostras congrega-
tionis in ipsum :
2. Ut non cito movea-
uiini a veslro sensu, ne-
que terreamini , neque
per spiritum , neque per
sermonem, neque per e-
pistolam tanquam pernos
missam, quasi instet dies
Domini.
3. Nequis vos seducat
ullo mode , quoniam nisi
venerildiscessioprimum,
et reveiatus fuerit homo
1. Oh, nousTOus conjurons, nos
frferes, par I'avenement de notre
Seigneur Jesus-Christ, et par notre
reunion avec lui ',
2. Que vous ne vous laissiez pas
legereinent ebranler dans voire
premier sentiment, et que vous ne
vous Iroubiiez pas, en croyant, sur
la foi de quelque esprit propheti-
que, ou sur quelques discours, ou
sur quelque leltre qu'on supposeroit
venir de nous, <^ue le jour du Sei-
gneur est prfes d'arriver.
5. Que personne ne vous seduise, Ephes. v. 6.
en quelque maniere que ce soil ;
car ce jour-la ne viendra point que
la revolte et Tapostasie ' ne sort ar-
y I. Gr. aulr. tonchaat I'av^nemeat de noire Seigneur Jesus-Christ , el
notre reunion avec lui.
y 3. C'esl rexpression propre du grec ; et plus bas {-i 7) saint Paul re
marque que le niyslere d'iniquit^ commen^oil k s'operer des son temps. Ainsi
les beresies des premiers siecles, et surtout I'arianisme, et les autres qui ont
iUrain6 des peuples en tiers , ont commence sur la terre cetle funeste aposta-
te; elle s'es4 etendue presquc dans lout I'Orient par le scbisme des Grecs ;
-^
Io8 11° EPITRE DE SAINT PAUL ALX TUESSALOMCIENS.
Isai. X.1 .
rivee auparavant, et qu'on n'ait vu
paroilre cet homme dc pcche, qui
doit pcrir miscrablemeut ',
4. Qui, s'opposant a Dieu , s'eld-
vera au-dessus de tout ce qui est
appcle Dieu , ou ce qui est adore ,
jnsqu'a s'asseoir dans le temple de
Dieu,' voulant lui-meme passer
pour Dieu.
5. Ne vous souvient-ils pas que
je vous ai dit ces choses lorsque
j'ctois encore avec vous ?
6. Et vous savez bicn cc qui cm-
pechc qii'il ne vienne, alia qii''il
vienne en son temps".
7. Car le mystere d'iniquite se
forme des a present ; mais que celui
qui a la foi la conserve jusqu'a ce
que cet homme ° soil detruit.
8. Et alors se decouvrirarimpie,
que le Seigneur Jesus detruira" par
le souffle de sa bouche, et qu'ilper-
dra par Teclat de sa presence :
peccati, filius perdilionis.
4- Qui adversatur, et
exloUitur supra omne
quod dicitur Deus, aut
quod colitiir, ita ut in
templo Dei sedeat, os-
tendens se tamquam sit
Dcus.
5. Non relinetis quod
cum adhuc essem apud
vos, ha;c dicebam vobis ?
6. Et nunc quid deti-
neat scitis, ut revcletur
in suo tempore.
7. Nam mysteriurajam
operatur iniquitatis : tan-
tum ut qui tenet nunc ,
teneat donee de medio
fiat.
8. Et tunc revelabitur
ille inlquus, quern Domi-
nus Jesus interficet spiri-
tu oris sui , et destruet
illustrationc adventus sui
eum :
elle a enleve presque sous nos yeux les peuples du Nord ; die pc'nelro insensi-
Lleinentjusqu'au milieu dc nous par la depravation des mouurs , par licence
des opinions, par l'esprild'irr61i^ion et d'incredulite.
it i. Liu. cet enfant de perdition.!
■)^ 4. Le grec ajoute : comme s'il cloitDicxi.
f 6. La fermete de la foi des Chretiens , qui dolt 5tre affoiblie un jour a
I'avenemenl de I'Anteclirist.
•^ 7. Aulr. celle aposlasie.
Jbid. Le grec peut se Iraduire : tantum qui tenet nunc, donee de medio
fiat. C'est-a-dire et il resle sculement que celui qui ticnt mainlenant, soil
file du monJe. Sous le nom de celui qui iient, saint Jerome, saint Jean Cbry-
soslome , et la plupart des peres, entendent I'empire remain , et pensent que
l'Ap6lre annon^ant ici la destruction decet empire, s'cxprimc en termes cou'
verts, pour ne pas blesser la delicatesse des Remains , sous la domination des-
quels I'Eglise se trouvoit. Ceux d'entre les interpretes modcrnes qui out
suivi en cela le sentiment des peres , observent que I'empire romain detruit
dans rOccident s'esl main lenu long-temps dans I'Orient, et qu'avant qu'il y
fut detruit, il a ete rcleve dans I'Occidenl en la personne de Cbarlernaiine , en
sorle qu'il subsisle encore aujourd'Lui dans rempire d'Alleniagne , donl la
conservation nous prouve que nous ne touclions point encore a la lin des temps.
y 8. C'est Ic sens du grec.
^^
»). Cujus est adventus
^ocmiduin opcrationciii
SiitaiuT, in omni virtute,
vt siguis, etprodigiis men-
ilacibus,
10. Et in omni seduc-
tione iniquitatis iis qui
pereuut : eo quod chari-
taleiri veritatis non rece-
perunt ut salvi fierent.
Idee mittet illis Deus ope-
rationcm erroris , ut crc-
dant niendacio ;
11. Ut judicentur om-
nes qui non crediderunt
veritati, sedconsenserunt
iiiiquitali.
1 2. Nos autcm debemus
gratias agere Deo semper
pro vobis , fratres dilecti
a Deo, quod elcgerit vos
Deus primitias in salu-
tem, in sanctiQcaiipne
Spiritus et in fide verita-
tis :
i5. In qua et vocavit
vos per Evangeliuui nos-
trum , in acquisitionem
gloriae Domini nostri Jesu
Christi.
i4. Itaque, fratres, sta-
te : et tenete traditiones,
quas didicistis sive per
•^crmonem, sive per epis-
tolam nostram.
i5. Ipse autem Domi-
minus noster Jesus Chris-
tus, et Deus et Pater nos-
riiAi'iinE 11. J 09
9. Get impie qui doit vcnir ac-
coiiipagne de la puissance do Satan
avcc toutes sortes de miracles, de
signes et de prodigcs trompeurs,'
10. Et avec toutes les illusions
qui peuvent porter a I'iniquite ceux
qui perissent , parce qu'ils n'ont
])as recu et aimc la verite ' pour
filre sauves. C'est pourquoi Dieu
leur envcrra des illusions si elFica-
ces ' qu'ils croiront au mensonge ,
11 Afin que tons ceux qui n'ont
point cru la verite, et qui ont con-
senti ii I'iniquite , soient condamnes.
12. Mais quant a nous, 6 freres
cherisdu Seigneur," nousnoussen-
tons obliges de rendre pour vous i
Dieu de continuelles actions de gra-
ces, de ce qu'il vous a choisis des
le commencement, ' pour vous sau-
ver par la sanctification de I'Esprit-
Saint' et par la foi de la verite ,
1 3. Vous appelant i cet etat' par
notre Evangile, pour vous faire ac-
querir la gloire de notre Seigneur
Jesus-Christ.
i4' C'est pourquoi, nos frferes,
demeurez fermes , et conservez les
traditions que vous avez apprises,
soit par nos paroles, soit par notre
lettre.
i5. Que notre Seigneur Jesus-
Christ, et Dieu notre Pfcre, qui
nous a aimes, et qui nous a donnc
i 9. Voyez I'analyse.
y 10. Litt. parce qu'ils n'onl pas recu I'amour de la verile.
fj^'d. A la leltre ; Dieu leur enverra une ef(icacit(5 d'orreur ; I'l fjennettm
qu'ils soient scduiis et trompes. Voyez I'analyse.
■^ XI. C'est I'expression du grec.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ihid. Qu'il vous a communique,
f i3. C'est le sens du grec : ei; 5 acoXeosv up.a«.
I lO
11^ EPITRE DE SAINT PAUL AUX TIIESSALOiNIClEINS.
par sa grace une consolation cter- qui dilexit nos , et dedit
nelle et une si hciiseuse esperancc, consolationcni aetcrnaiTi
16. Console'lui-menievoscoeurs,
et vous affermissedanstoutes sortes
de bonnes oeuvres, et dans la bonne
doctrine. "
et spciYi bonaJTi in gratia ,
iG. Exbortetur corda
vestra , et confirmet in
on:ini opere et sermone
bono.
■j^ 16. C'esl le sens du grec.
Ibid. Gr. litt. dans la bonne doctrine et dans toutes sortes de bonnes
ccuvres.
CHAPITRE III.
Saint Paul demande aux Thessaloniciens Je secours de ieurs prleres. II les
avertit de se relirer de ceux qui vivoient d'une maniere dercglee. II ieur
recommande le travail. II Ieur souhaite la paix. Salutation.
Ephes.vT. If)
Col. IV. 3.
I. Au reste , nos i'rferes, priez
pour nous, afin que la parole de
Dieu' se repande de plus en plus ,
et qu'elle soit partout en bonneur'
ainsi qu'elle Test parmi vous ;
a. Et afin que Dieu nous garan-
tisse des hommes deraisonnables *
et mecbans , ' car la foi n'est pas
commune a tons;'
3. Mais Dieu' est fidele , et il vous
affermira'et vous preservera du ma-
lin esprit'.
4. Quant a vous , nous avons
cette confiance en la bonte du Sei-
1 . De cetero , fratres,
orate pro nobis, ut sermo
Dei currat, et clarificetnr,
sicut et apud vos :
a. Et ut liberemur ab
importunis et malis homi-
nibus : nonenim omnium
est fides.
5. Fidelis autem Deus
est, qui confirmabit vos ,
et custodiet a malo.
4. Confidimus autem
de vobis in Domino, quo-
Ibid.
Ibid.
Gr. litt. du Seigneur.'
Grec : en gloirc.
C'est le sens du §rec.
Qui s'opposent au progris de I'Evangile, auquel ils ne veulenl point
Ibid. Dieu par un juste jugement en laisse plusieurs dans Ieur aveuglc-
ment.
f 3.
Ibid.
Ibid.
quel ils
Gr. litt. le Seigneur.
Dans la foi que vous avez embrass^e.
De tout le mal que lui et ses ministres voudroient vous faire, et au-
voudroient vous porter.
CHAPITRE III.
1 I I
iiiam qua; praecipimii? ,
el facitis, et facleti*.
5. Dominus aiitem di-
rigat corda vcstrain cha-
gncur', que vous aocomplissez, et
que vous acconiplirez toujours que
nous vous ordonnons.
5. Que le Seigneur vous donne
un cceur droit ' dans Tamour de
ritate Dei , et patientia Dieu , et dans la patience de Jesus-
Christi. Christ.
6. Denuntiamus aulem 6. Nous vous ordonnons , no?
vobis, fratres, in nomine freres, au noin de notre Seigneur
Domini nostriJesu Chris- Jesus-Christ, de vous retirer ' de
ti , ut subtrahatis vos ab tons ceux d'entre vos freres qui se
omni fratre anibulante conduisent d'unemaniere dereglee,
inordinate, et non secun- et non selon la tradition ' qu'ils
dum traditionetn quam ont recne de nous,
acceperunt a nobis.
7. Ipsi enim scitis 7. Car vous savez vous-memes
quemadmodum oporteat ce qu'il faut faire pour nous imiter,
imitari nos rqnoniamnon puisqu'il n'y a rien en de deregle '
inquieti fuimus inter vos : dans la maniere dont nous avons
vecu parmi vous.
8. Ncque gratis panem 8. Et nous n'avons mange gra- -^ct.^x. 34.
manducavimus ab ali- tuitement le pain de personne ; 'X^/j ^'^■^^'
quod, sed in labore et in mais nous avons travaille jour et ^' *•"•<.<
fatigatione, nocte et die nuit avec peine et avec fatigue ,
operantes, ne quem ves- pour n'etre a charge a aucuu de
trum gravarenius : vous.
9. Non quasi non ha- 9. Ce n'est pas que nous n'en
buerimus potestatem, sed eussions le pouvoir, ' mais c'est
ut nosmetipsos Ibrmam que nous avons voulu nous donner
daremus vobis ad imitan- nous-memespour module, afin que
dum nos. vous nous iraitassiez. '
10. Nam et cum esse- 10. Aussi, lorsque nous etions
musapndvoSjhocdenun- avec vous, nous vous declarions
tiabamus vobis : quoniam que celui qui ne veut point travail-
si quis non vult operari, ler, ne doit point manger.
neo manducet.
y 5. Antrement et selon le gfec : que le Seigneur conduise et porte vos
ifpurs a Tamour de Dieu , et k I'altente de Jesus-Cbrisl.
y 6 . De Tous separer.
Ibid. La forme de vie.
Ibid. Par Texemple que nous lear avons montr^ , et pw Ics instractions
qne nous leur avons donnees.
y 7. C'est le sens du grec
y 9- Que nous n'eoseions droit, en voos pr^hant I'Evangile, de recevoir
devous notre subsistance.
Ibid. En travaillant, comme tout le monde doit faire, pour avoir droit de
manger.
I 12
11° EPITRE DE SAINT PAUL AUX TIIESSALONICIENS.
11. Car nous apprenons qu'il y
a parini vous quelqucs gens in-
quietS,' qui nc travaillent point,
mais qui sc mCIent de ce qui ne les
regardc pas.
12. Or, nous ordonnons h ces
personnes, et nous les conjurons
par notre Seigneur Jesus-Chrjst ,
de manger leur pain, en travaillant
en silence. '
Oal.\i.(). i5. Et pour vous, nos frtres,
ne vous lassez point de faire le
bien. '
i4- Si quelqu'un n'obeit pas ill ce
que nous ordonnons par notre lettre,
notez-le, et n'ayez point de com-
merce avec lui, afin qu'il en i)it de
la confusion.
i5. Ne le considerez pas nean-
moins comme votre ennemi; mais
avertissez-le ' comme votre frfere, '
i6. Cependant jeprie le Seigneur
de paix de vous donner la paix en
tout temps et en tout lieu. ' Que le
Seigneur soit avec vous tous.
17. Je vous salue ici de ma pro-
pre main, moi Paul : c'est la mon
seing dans toutes mes lettres : j'e-
cris ainsi.
18. La grace de notre Seigneur
Jesus-Christ soit avec vous tous.
Amen.'
11. Audivimus enim
inter vos quosdam ambu-
larc inquicte, nihil opc-
rantes, sed curiose agen-
tcs.
12. lis autem qui ejus-
modi sunt, denuntiamus,
et obsecramus in Domino
Jesu Christo , ut cum si-
lentio operantes, suum
panem manducent.
i3. Vos autem, fratres,
nolite deficere benefacien-
tes.
i4- Quod si quis non
obedit verbo nostro per
epistolam , hunc notate ,
et necommisceaminicum
illo, ut confundatur :
i5. Et nolite quasi ini-
micum existimare , sed
corripite ut fratrem.
16. Ipse autem Domi-
nus pacis, det vobis pacem
sempiternam in omni lo-
co. Dominus sit cum om-
nibus vobis.
1 7. Salutatio mea manu
Pauli : quod est signum
in omni epistola : itascri-
bo,
18. Gratia Domini nos-
tri Jesu Christi cum om-
nibus vobis. Amen.
y^ 1 1. Gr. der^gles aToarw?. C'est la m6me expression qu'aux -j^ fi. et 7.
■5^ 12. Gr. autr. en repos.
•j^ i3. De vous coiftduire cpnformement k ce que nous vous avons enseign^.
y^ 1 5. C'est ie sens dugrec.
Ibid. Atcc douceur et aveccharite.
y^ r6. Le grec imprime III : en touto maniere, ev uavTi Tpo'irw,
f 18. Les exemplaires grecs portent ici : La seconJe aux Thessalonicjens
fut ecrite d'Athenes en 106 versets.
PRE FACE
SUR LA PREMIERE EPITRE
A TIMOTHEE.
TiMOTHEE etoit de Lycaonie , cl apparcniment <lc la villc r.cranrquf=
<le Lyslres , ou I'Apotre le Irouva '. Ori<^ne a cru ^ qu'il snrTiraothec,
etoil parent de saint Paul , sur ce que cet apolre salue les aquiceiteepi-
Romains de la part de Timolhce le compagnon de s€s Ira- H^ 'o^Ii^
vaux , (le Luce, de Jason et de Sosipatre ses parens ^. Tinio- gigmetdecct-
tl.ee auroit pu etre parent de saint Paul du cfke d'Eunice iccpitre,
sa mere , laquelle etoit Juiye ; mais le texte de cet apotre
ne le prouve point. Quoi qu'il en soit , Timothee avoit ete
eleve dans I'eLude des saintes letlres des son enfance ^,
et il etoit deja du nombrc des fideles , avant que saint
Paul arrivat a Lyslres ^. Les freres lui rendoient un te-
moignage avantageux ; et saint Paul souhaila de I'avoir
pour disciple, et pour compagnon de ses voyages. Comme
il n'avoit pas reru la circoncision , parce que son pere
etoit gentil , saint Paul le prenant avec lui , le circoncit
aLystres, afin.de ne pas irriter les Juifs, qui auroient
trouve fort mauvais qu il prit avec lui un incirconcis.
Timothee recut I'ordination episcopale , en conse-
quence d'une prophetie et d'un ordre particulier du
Saint-Esprit "^ , et ce fut saint Paul meme qui lui imposa
les mains' ; mais on ne salt pas distinctement le temps de
son ordination. On sait seulement que s'elant une fois
attache a I'xVpotre, il ne le quilla plus que par se.s ordres ,
et qu'il travailla avec lui a la predication de I'Evangile ,
comme un fils avec son pere ®. lis passerent ensemble
de I'Asie en Macedoine; et lorsque saint Paul fut oblige
' Jlcl. XVI. I. fide Chrys. in Bom. horn. ig. et in 2. Tim. horn. 8. et
Theodoret. in Rom. xvi. 21. Tillemont, note i.sur saiulTiniotUec. — -Oii-
gen, in Bom. p. fi32. — ^ Bom. \\i. ai. — * 2. Tim. iii. i5. — * ^ct. xvi. i.
etsetjq. — * I. Tim. iv. 14. — ' 2- Tim. i. 6. — ' Philipp. 11. 22.
23. 8
1 I i PREFACE
de quitter Beree , pour aller a A.thcnes , il laissa en Mace-
tloine Silas et Timothec '. Aussitot que I'/Vpotrc fut arrive
a Alhenes, il leur manda de venir promptemcnt le trouver.
Tiriiothee y etant vcnu , saint Paul le renvoya d'Athenes a
Thessalonique ^ , pour y fortifier les fidcles dans les per-
secutions qu'its souffroient alors. Pcu de temps apres il
revint ti^ouver saint Paul a Corinlhe ^.
Il y a assez d'apparence qu'il accompagna cet apotre
dans le voyage qu'il fit de Jerusalem a Corinthe ; et a son
retour de Jerusalem a Ephese. Saint Paul I'envoya d'E-
phese en Macedoine * et en Achaie'' avec Erastc , pour y
faire preparer les aumones qu'il recueilloit pour les Chre-
tiens de Jerusalem. Timothee vint quelque temps apres
retronver saint Paul a Ephese , et lui rendit compte de
son voyage. lis partirent ensuite d'Epliese*^, et allerent
ensemble en Macedoine et a Corinlhe, d'ou saint Paul
revint en Asie, pour de la passer a Jerusalem. On ne sait
pas precisement si Timothee I'accompagna dans lout son
voyage ; mais on apprend de saint Paul meme , qu'il de-
nieuroit a Rome avec lui, puisque, quand cet ap6tre y
etoit dans les liens , il le nomme conjointement avec lui
dans le litre des trois lettres qu'il ecrivit a Philemon, aux
Philippicns et aux Colossiens-' ; et il y etoit libre , puisque
I'Apotrc marque aux Philippiens qu'il espere le leur en-
voyer bienlot^.
II parott qu'il fut mis en prison un pen avant la deli-
vrance de saint Paul; car dans I'epitre que celui-ci ecrivit
aux Hebreux vers I'an (53 de I'ere chret. vulgaire , il leur
mande que Timothee est delivre de prison, et que s'il re-
vient bientot, il ira les voir avec lui'-'. On ne sait ou etoit
alors saint Paul. Timothee vint le rejoindre ; ils se trouve-
rent ensemble a Ephese , ou 1' Apotre le laissa pour avoir
soin de cette Eglise^". D'Ephese saint Paul passa en Mace-
doine ; et il paroit que c'est de la qu'il lui ecrivit cette pre-
miere epitre , dans laquelle il lui marque tous les devoirs
de son ministere, non que Timothee put les ignorer, lui
qui avoit ete si long-temps son disciple , mais afin que les
eveques de lous les siecles eussent dans les instructions
* ^ct. xvu. r4. et seqq. — - i. 7'hess. iir. r. ctsecjq. — ^Act. xvin. 5. —
* Act. XIX. 22. — * I. Cor. svi. 10. — ^ Act. xx. 4. — '' Philipp. i. i. Co-
loss. I. r. Philem. -jj^ i. -— * Philipp. ii. 19. ?.3. — » Hebr. xm. aS. — '" i.
Tim. 1.3.
SlU LA l" KPITRE A TIMOTKKE. I I j
iju'il lui (lonne un excellent abrege cle toutcs leurs obli-
i^alions. Cost ce qui a fail dire a saint Augustin que ceux
<jiii sont destines a servir I'Eglise doivent avoir continuel-
lemcntdevantlesyeux Ics deux epitresaTimothee, et celle
a Tite.
L'Apotre salue son disciple bien-aime ( chap, i ) , en lui Analyse de
souhaitant la grace , la misericorde et la pais'. II veut d'a- ct«eepitrc.
bord lui recoinmander d'observer fidelement Ics devoirs
dont fl I'a charge en le placant a la tete de I'Eglise d'E-
phese ; et c'est ce qu'il commence a lui dire en lui rappe-
lant la priere qu'il lui fit en partant pour la Macedoine, de
denieurer a Ephese pour veiller a la conservation du depot
de la foi , et avertir certains faux docteurs de ne point
enseigner une doctrine qui s'en ecarte, etde ne point s'a-
muser a des fables et a des analogies sans fin, qui servent
plutot a exciter des disputes qu'a former et elever I'edi-
fice de Dieu, qui ne se construit etne s'eleve que par la
foi"^. Ceci regarde apparemment certains docteurs iuifs
qui , comptant pour un grand avantage d'etre nes de la race
d'Abraham, s'appliquoient a recueillir et a discuter les
preuves de cette naissance pour eux-memes et pour leurs
disciples. Et parce que ces faux docteurs se glorifioient de
leur zele pour la loi, I'Apotre interrompant ici la phrase
qu'il avoit commencee , fait remarquer a son disciple que
la fin des commandemens est la charite qui nait non-seule-
ment d'un coeur pur et d'une bonne conscience , raais en-
core d'une foi sincere, de laquelle ces faux docteurs s'ecar-
tent^ II avoue que la loi est bonne , si on en use comnie
on doit en user ^, c'est-a-dire comme d'un moniteur fidele
qui nous montre la voie ou nous devons marcher, et nous
conduit a Jesus-Christ , a qui seul il appartient de nous y
taire marcher par le secours de sa grace. Et en meme
temps il declare qu'il sait que la loi n'est pas pour le juste,
qui la pratique deja, parce qu'il la porte gravee dans son
ccEur par I'impression de I'araour ; inais pour les mechans
qui s'en ecartent , et contre qui elle prononce sesanathe-
jnes-*. Le denombrement de ccux contre qui la loi est eta-
blie le conduit a les renfermer tous sous im seul caractcro
qui est celui d'infracteurs de la sainte doctrine de I'Evan-
gile dont la dispensation lui a ete confiee''. Ccci lui donne
• V" 1. eii. — *y 3. tV .;. — ^ V 5.-7. — * y 3. — ' y 9. et in.—" >- 10.
et n.
ii6
PKEFACE
lieu d'insisler sur son apostolat conlre lequel les faux apo-
Ires elolent loujours prets a s'elever. II rcmercle Jesus-
Christ, qui a fait eclater sur lui les riehesses de sa grace, en
le changeant dc persecuteur en ap6tre*; et il reconnoit
qu'en cela comme dans tout le reste I'lionneur et la gtoife
sont dus a Dieu dans tous les siecles^. Apres cela if re-
prend la phrase qu'il avoit interrompue ; et il recommandc
a Timothee I'avertissement et le prccepte qu'il lui avoit
laisse de se tenir en garde contre les fauxapotres, afin
qu'il s'acquilte des devoirs de la milice sainte , en conser-
vant la foi, et evitant le naufrage de ceux qui s'en sont
ecartes^, entre lesquels il en note deux qu'il a livres a Sa-
tan , pour leur apprendre par ce chatiment a ne plus blas-
phemer*.
De la I'Apotre prend occasion de recommander tres
expressement ( chap, n ) a son disciple de faire toutes
sortes de prieres et d'actions de grace pour toUs les hom-
mes, sans distinction de Juifs ou de gentils, et speciale-
ment pour les rois , et pour ceux qui sont eleves en di-
' ,'^^y^\le^. 11 declare que ce zele pour le salut des gentils
"^ inemes est bon et agreable devant Dieu qui veut que tous
les homines, sans distinction de peuples ou de nations ,
soientsauves , et viennent a la connaissance de la verite*^.
Car, comme il est dit ailleurs , Dieu n'est-il le Dieu que des
Juifs? ne I'est-il pas aussi des gentils? Oui certes, il Test aussi
des gentils; car il n'y a qu'un seul Dieu qui justifie par la
foi les circoncis et les incirconcis'. Et c'est aussi ce qu'il
dit ici : II n'y a qu'un Dieu, et un mediateur entre Dieu et
les hommes, Jesus-Christ homme quis'est livre lui-meme
pour etre le prix de la redemption de tous , sans distinction
de circoncis ou d'incirconcis , en rendant ainsi dans le
temps marque un temoignage eclatant a I'amour ineffa-
ble de Dieu pour les hommes**. Ce qui lui donne lieu de
confirmer encore son apostolat, en ajoutant que c'est pour
faire connoitre ce temoignage meme de Jesus-Christ qu'il
' -jj- i9..-tfi. — ^ i I-;. — 5 ^ i8. ct iQ. — * -j^ 20. etult. — ^ f t.eti. —
c -j^ J. cf 4. Qui ornnes homilies {§r. r.mTO.^ avOpraw&Ui;) vult salvos fieri , et
ad agnitionem veriiatis venire. — ^ Rom. iii. 29. ef3o. An Jiidceorum Deus
tanluin ? noiine et gentium ? Imino et gentium. Quoniam quidem unus est
Deus, qui j ustifical circumcisionem ex fide., et prcepulium per fidem. —
" ^ 5. eiG. Unus enimDeus, unus et mediator Dei et liominum homo Chris-
tus Jesus, qui dedit redemplionem semetipsum pro omnibus , testimonium
temporibus suis. (Gr. i^ioi^, ptvpriis .)
sua LA l'* EPITRK A TIMOTHEE. I I "J
a cle ciabli predicatcur ct apotre , et specialemcnt tloctcur
lies nations pour les inslruire de la foi et de la verite'. Ce
011*11 vienL do dire de la priere lui donne lieu de regler
les dispositions inlericures et exlerleures meme avec les-
quellcs doivent s'acquittcr de cet exercice en tout lieu les
personnes dc I'un etde I'autresexe*. De la il passe aux de-
voirs parliculiers des fenunes , a qui il recommande spe-
cialement la modestie , la soumission et le soin de leurs en-
fans.
Apres cela il vient aux devoirs des ev^ques ( chap, iii ).
11 declare d'abord que si quelqu'un desire I'episcopat , it
desire, non un vain lionneur qui doive I'enfler , mais une
ceuvre saintc qui exige des dispositions qui y soient pro-
poriionnees * ; et aussitot il les expose , et en fail le denom-
hremenl^. Ce qu'il dit de I'eveque est egalement applica-
ble aux prelres qui partagent avec lui les fonctions de son
luinisterc; c'est pourquoi il passe aussit6t aux diacres,
dont il prescrit aussi les qualiles ''. II declare a son disciple
que quoiqu'il espcre le revoir dans peu, il lui ecrit ces
choses , afin que si son retour a Ephese est retarde par
quelque evenement imprevu, il sache comment il doit se
conduire dans la maisou dc Dieu qui est I'Eglise du Dieu
vivant, la colonne et la base de la verite', dans le sein de
laquelle les gentils se reunissoient aux Juifs fideles. La for-
mation de I'Eglise par la reunion des deux peuples en Je-
sus-Christ eloit un mystere que les Juifs charnels ne com-
prenoient point : c'est pourquoi I'Apotre qui les avoit en
vue des le commencement de cette epitre, insisle ici sur la
grandeur de ce mystere , qu'il appelle ailleurs le mystere
tie Jesus-Christ^. 11 I'appelle ici viysUrc de piete^ ,' puree
qu'en effet ce mystere estl'objet essentiel de la piete ; et
le considerant dans toutes ses parties , il remonte jusqu'au
moment de I'incarnation qui en est le principe. Jl dit ail-
' T 7 - -^ 8. ef Q. Iii omniloco, etc. ( Gr. ev •rtav:'. to'ttw , etc.) — ^f lo,
ad flnem. — * ji. — * •^'pt.-'j. — ^ -^ 8.-r3. — "y 14. .: i5. — ^Cphes, 111, 4. et
seqtf. Potestis legeiues intelli'gere prttdenliam meqm in mysterio Chi-isiS
(jucd aliis geueralionibus non est agnitnni filiis hominum, sicuti nunc re-
velatiim est Sanctis apostolis ejus el proplietis in spin'tu : Gentes esse cohere-
des, et coucorporales, et comparticipes promissionis ejus in Christo Jesii
per Evatigelium. Col. 1.26. ef 27. Mysverium quod abscondilum J'uit a se-
cutis et geneixuionibus , nunc autern inani/estatum est Sanctis ejus, qui-
bus voluit Deus notasj'acere dii'itias glorice sacranientihujus ingentibus,
quodest Christus in vobis spes glorite. — ^ 1^ 16. i^tmanifpste magnum est
pietalis sacramentum.
1 I 8 PREFACE
leurs que ce mysl^re c'est Jesus-Christ meme rccu des gen-
tils ct (leveiiu Tesperancc de leur gloire^ ; ct de meme ici
il declare que ce inystcre c'est Dieu meme ( car c'est ainsi
que porte le grec, non-seulcment dans les editions impri-
mees , mais dans presque tous les manuscrits , et dans tous
les peres grccs ) , c'est Dieu meme manifeste dans la chair,
justifie par I'esprit, vu des anges , preche aux nations , cru
dans le monde , recu dans la gloire ^ ; c'est Dieu manifeste
ilans la chair; c'est le Verbe fait chair ; c'est Dieu vu sur la
terre , revetu de la forme humainc , et conversant parmi
les hommes; c'est Dieu jiistijie par V Esprit ; Jesus-Christ
meme avoit annonee que I'Esprit de verite qu'il repan-
droit sur ses disciples lui rendroit temoignage , ct le jus-
tifieroit en attestant jon innocence et sa justice, etprou-
vant qu'etant vraiment Fils de Dieu , il etoit vraiment re-
monte vers son Pere ^ ; c'est en effet ce qui resulte des dons
surnaturcls communiques aux disciples de Jesus-Christ,
et des prodiges operes par eux en son nom : ces prodiges
ct ces dons procedoient de I'Esprit de Dieu ; et c'est ainsi
que le Verbe de Dieu, apress'etre manifeste dans la chair,
a ete justifie par FEsprit. Ce mystere , c'est Dieu vu des
anij^es dans la forme humaine dont il s'est revetu : les hom-
mes n'ont vu en lui sur la terre que sa forme humaine;
mais les anges ont vu sa forme divine meme que les hom-
mes ne pouvoient voir. Ce mystere , c'est Dieupreche aaa:
nations, annonee aux gentils ainsi qu'aux Juifs, comme
devant etre egalement pour tous I'esperance de leur
gloire, le bien souverain a la possession duquel ils sont
tous egalement appeles; c'est Dien cm dans le mond^ , vu
des anges et cru des hommes, rejete par les Juifssuperbes
et incredules , et cru par ceux que Dieu lui-raeme a choisis
d'entre les Juifa et d'entre les gentils, sans distinction
' Col. I. a;. Ill supra. — ^^ 17. Quod manijestatum est in came, jusli-
Jicalum est in spiriiu, apf>ai'uit angelis, prccdicatum est gentibus^ credilum
est in mundo, assumplum est in gloria. (Gr. 0£oj ti^ avEpwQn ev csa.^x[ , etc.)
Deus manifestatus est in co.fne, etc. II y a lieu de conjecturer que les deux
firemleres lellres de ©ebc ayant disparu, on aura lu os; eiaavepwOr) , comme on
e trouve meme dans quelques exemplaires. Et parcequelemasculin &; con-
venoit mal avec le neulre [/.uoTTipicv, on aura mis le neulre 0, d'oii sera venue
la le^on que suppose notre Vulgate, 3 ecpavepwOyi. — '^ Joan. xv. 26. Cum au-
teni venerit Paracletus quern ego mitlam vobis a Patre, Spiritum veritatis
qui a Patre pi-ocedit , ille testimonium pcrhibcbit de me. Etxvi. 8. ro. Et
cum venerit ille J aiguet muiulum de peccato, etde justitia, etde judicio...
De justitia vero , quia adPatrem vado.
SLR LA 1"EP1TUE A TIMOTIIEE. I ly
(!c pcuples ni de nations. Enfin c'est Dieu manifeste dans
!a chair , el recu dans la gloire ; c'est Jesus-Christ fils de
Dieu eieve dans le ciel , et assis a la droite de Dieu son
pere.
Apres cela I'ApAtrc annonce a son disciple ( chap, iv )
les heresies qui devoient s'elever dans le temps a venir * ;
il desigue principalernent deux erreurs , Tune qui sera d'in-
lerdire et de condamner le mariage , et I'autre de defendre
I'usage de certaines viandes^. Ces deux erreurs furent
communes a plusieurs des heretiques qui s'elcverent des
le temps menie des apotres , ct dans les siecles suivans :
lesebionites , les encratites, Marcion, Saturnin, Montan ,
ct autres. Quelques-uns croient que cette prediction de
TApolre regarde principalernent Manes et ses sectateurs ,
dont les autres avoient ete en quelque sorte les precur-
seurs. L'Apotre, sans s'arreter a la premiere erreur, qui se
detruit d'elie-meme , refute seulement la seconded. 11
exhorte son disciple a enseigner loujours la bonne doctrine
qu'il a recue , et a fuir les fables de lerreur*. II lui recom-
mande de s'exercer de plus en plus a la piete, dont il lui
fait sentir I'avantage en comparant cet exercice spirituel a
i'cxercice corporel des athletes^; comparaison qu'il em-
ploie aussi ailleurs*". 11 assure la verite de ce qu'il vient de
dire des avantages de la piete pour la vie presente et pour
la vie future '^ , et il declare que ce qui le soulient au milieu
dc tous ses travaux, c'est I'esperance des biens qu'il attend
du Dieu vivant qui est le sauveur de tous les hommes , sans
distinction de Juifs ou de gentils, mais principalernent de
ceux d'entre ces deux peuples qui croient en lui^. Il I'ex-
horte a annoncer et enseiguer ces choses^. II lui recom-
mande de faire en sorte que personne ne meprise sa jeu-
he^e , mais de s'atlirer le respect en se rendant I'exemple
des fideles^". Il lui prescrit les principaux devoirs qu'il
doit remplir pour se sanctifier lui et ceux qui ecoutent sa
voix^*.
II Ivri marque de quelle maniere il doit se conduire ( cha-
pitre v) avec les personnes jeunes ou agees de I'lm et de
I'autre sexe^'. 11 lui recommande d'honorer, c'est-a-dire
!20
PHEFACK
d'assistcr les vraies veuves^ ; il lui marque qu'clles doivcnt
etre les qualiles dc celles a qui il doit accorder cettc assis-
tance ^. II en cxclut parliculierement les jeunes veuves
pour les motifs qu'il expose ^ 11 ordonne que les fideles'as-
sistent eux-memes les veuves qui leur sont proches, afin
que I'Eglise puisse suffire a celles qui sont vraiment veuves
et qui ont besoin dc son assistance"*. II ordonne que les
j)retres qui gouvernent bien soient doublement honores
dans la distribution des offrandes: etil en marque un dou-
ble motif\ Il avertit son disciple de la conduite qu'il doit
tenir a I'cgard des pretres accuses ou coupables'' . Et
comme cetle matiere est tres grave , il le conjure dans les
termes les plus forts de ne suivre en cela aucun prejuge,
aucune passion '. II lui recommande de n'imposer legere-
ment les mains a personne, dans la crainte de se rendre
ainsi participant des peches d'autrui^. Il I'exhorte a se
conserver lui-^meme pur^. A. cette occasion , il modere
I'austerite de spn disciple , en lui conseillant d'user d'un
peu de vin a cause de la foiblesse de son temperament^". Il
revient a ce qui regarde I'examen et le choix de ceux a qui
on peut imposcr les mains; il montre la necessite de cet
examen^*.
U regie ensuite les devoirs des fidelcs qui sont sous le
joug de la servitude ( chap, vi ) , et il prescrit a son dis-
ciple les avis qu'il doit leur donner '^. Apres cela il s'elcve
avec force conlre quiconque enseigneroit une doctrine
qui ne sei'oit pas conforme a celle qu'il enseigne , et qui
est etablie sur les saines instructions de Jesus-Christ et
conforme aux regies de la vraie piete ; et il ordonne a son
disciple de se separer de ces sortes de personnes *■*. 11 in-
siste principalcment centre ceux qui regardent la piete
comme unmoyen de s'enrichir. Il refute cet abus par plu-
sieurs considerations , ct montre le danger de I'amour des
richesscs'^. Ilexhorte son disciple a fuir cette funesle pas-
sion et les malheurs qu'elle entraine apres elle, et il lui
marque les vertus auxquelles il doit principalcment s'ap-
pliquer'''. 11 lui ordonne devant Dieu et devant Jesus-
Christ de garder fidelement les preceptes qu'il lui donne ,
en se conservant sans tache et sans reproche jusqu'a la
manifestation de Jesus-Christ que doit faire paroltre en
' i^. —^ y 4.- to. — ^ ii.-r5. — ^ ir lo. — 'f 17. ci 18. — * y^ 19. et-io.
'-''i 21.— ",^22.— » I6id.— >o y^aS.— ")^ 24. adjinem.^^*i i.efa.
SLR LA I*"* EPirRE A TIMOTHEE. 12 1
son lemps Ic Dicu supreme dont il relcve ici les principaux
atlribiils '. II marque a son disciple les devoirs qu'il doit
prescrire au.v riches du siccle '. Enfin il I'exhorte a ijarder
ildclemeut le dep6t de la foi qui lui a ete conQe, et a eviter
pour cela toules les profanes nouveaules de paroles et de
discours contraires au langage pur de la foi, et toutes les
vaiues objections fondees sur une doctrine qui porte faus-
sement le nom de science ^ : il lui fait remartjuer que
quelques-uns faisant ainsi profession d'une science fausse,
se sont egares de la foi ^. Etapres lui avoir montre le dan-
ger contre lequel il doit se premunir , il le quitte en lui
souiiaitant la grace du Seigneur ^.
Les souscriptions qui se lisent a la fin des cxemplaires Remarqucs
crccs portent que celle epilre fut ecrite dc Laodiccc, capi- suHe iem|>s
tale de la Fkrygie pacaliaine. Mais ces souscriptions ne sont ^^^^^ epUre
par elles-memes d'aucune autorite , comme etant assez fut ecrite.
nouvelles, et ayant ete ajonlees par des auteurs sans aveu.
Le nom de Phrype pacatienTic n'a ete connu que depuis
I'empire de Constantin. Le texte du chap, i"^ de cette
epitre , i^ 3. : Coinire tn pari ant pour la Maccdoinc ,je vols
ai prie de dcmeuTt,! d Kphlse , etc., seniblc insinuer que
I'Ap^tre etait iiv. Mc ■ :^ ine lorsqu'il ecrivit cette epitre ,
et qu'il u'y avoi.. ; • : icine long-temps qu'il avoit quitte
Timothee. C'estit ..cutimentqui a ete suivi par saint Atha-
nase ^ , par Theodoret ' , et par nos meilleurs critiques ^.
On trouvea la fin du comnienlairede Theodoret la meme
souscription, a peu de chose pres, que dans les imprimes ;
raais il y a apparence que ce savant eveque ne I'y lisoit pas
et qu'on I'y a ajoutee depuis, ou du moins qu'il ne faisoit
aucun fond sur cela, puisque dans son prologue sur I'epitre
aux Roraains , il dit formellement que la premiere a Timo-
thee a ete ecrite de Macedoine. On voit la meme chose
dans les inscriptions qui se lisent a la tete de cette epitre
dans quelques manuscrils grecs , et dans quelques impri-
mes^. Baronlus croit qivelle futenvoyee par Tychique ; et
le cophte, par Tite ; i7"ais on n'a aucune preuve ni dc I'un,
ni de I'autre. II paroit que cette lettre peut avoir ete ecrite
vers I'an 64 ou 65 de I'ere chr. vulg. , qui est le temps ou
saint Paul devoit etre en Macedoine.
' i i3.-i'i.— i ^ 17. _,g._s^ 20.— * y^ 21.— « Ibid.—^ AJian. inSy-
nopsi. — ''I'heodor.pnef. in Rom. — ' Grot, Baron. Ligf. Horn. Ca/>eU. in
Jppendice cn'iic. p. 3919. TiUemont. Got/ioft-ed. MilL Est. — ^ Edit.
Complul. et Fivhen. Msi. Lin. Laud. 1. lioe 2. IftaU. 1. fide Mill .d
calcem hujus epist.
PREMIERE EPITRE
DE SAINT PAUL
A TIMOTHEE.
CHAPITRE PREMIER.
Saint Paul salue TImolhee. Questions non ddifiantcs. Charity, fin dcs com-
mandomens. Saintelc et iisago de la loi. Paul donne pour excmple de la mi-
scricordc de Dieu. Vie cpiscopale, milicc sainte.
I. Paul, apotre de Jesus-Christ,
par Pordre de Dieu notre Sauveur,
et de Jesus-Christ notre esperance;
Act. XVI. I. 2. ATimothee son cher' fds dans
la foi : que Dieu notre Fere, et Je-
sus-Christ notre Seigneur vous
donnent la grace , la misericorde et
la paix.
3. Je vous prie, comme je I'ai
fait en partant pour la Macedoine,
de demeurer a Ephese, et d'avertir
quelques-uns de ne point enscigner
une doctrine etrangerc ,
Infr. IV. 7. 4- Et de ne point s'arreter i des
■i. Tim. II. 2 3. fables et a des genealogies sans fin,'
Til. in. 9. qui scrvent plutot A exciter des'dis-
1. Paitlus apostolus
Jesu Christ! secundum
impcrium Dei Salvatoris
nostri , et Christi Jesu
spei nostras :
2. Timotheo dilccto fi-
lioinfide : gratia, miseri-
cordia et paxa Deo Patre
et Christo Jesu Doinino
nostro.
3. Sicut rogavi te ut
remaneres Ephesi , cum
irem in Macedoniam, ut
denuntiaresquibusdam ne
aliter docerent,
4. Neque intenderent
fabulis, et genealogiis in-
tenninatis : qua) quaes-
^ 2. Le grec imprim^ lit: son vrai fds, •prKJiM -exvw.
■^ 4. Comme faisoient les Juifs pour prouvcr qu'lls dcscendoient d'Altra-
ham, croyant que la Wnediclion de Dieu n'ctoit promise qu'a la race dece
patriarche.
,^
r^LI'llHB DK SAIXT PALL A HMOIIIKE, CHAP. 1.
12.3
tioiic< pra;stant magis
(|iiaiii a'lHficationem Dei,
(jute est ill fide.
5. Finis autem pra;-
(opti est charitasde corde
puro, et couscientia bo-
na, et fide non ficta :
6. A quibus quidatn
aberranles, conversi sunt
in vaniloquium,
7. Volentes esse legis
«U>ctorcs, non inlelligen-
tes ncque quae loquuntur,
ucqiie dc quibus allir-
nianf.
8. Scimus autcm quia
bona est lex, si quis ea
legitime utatur :
g. Sciens boc quia lex
justo non est posita , sed
injustis et non subditis,
impiis et peccatoiibus,
sceleratis et contaminatis,
parricidis et matricidis,
homicidis,
10. Fornicariis, mas-
lulorum concubitoribus,
plagiariis , mendacibus ,
et perjuris, et si quid
jiliud Sanaa doctrinae ad-
Aersatur,
11. Qu<e e$t secundQiri
Evangel! um gloriae beati
5>ei , quod oreditum est
mihi.
putes , qu'i fonder par la foi I'edi-
fice de Dieu.
5. Or, la fin des commandcmens
c'est la charite qui nait d'un coeur
pur , d'une bonne eonscience et
d'une foi sincere.
6. Dont ' quelqnes-uns se detour-
nant , se sont egares en de vains
discours ,
7. Voulant ctreles docteurs de la
loi , et ne sacbant ni ce qu'ils disent
ni ce qu'ils aflinncnt.
8. Or, nous savons que la loi est Rom. vn. 12.
bonne , si on en use scion I'esprit
de la loi/
g. En reconnaissant que la loi
n'est pas pour le juste , ' mais pour
les mechaus et les esprils rebclles,
pour les impies et les pccbeurs ,
pour les sc^lerats et les profanes ,
})our les meurtriers de leur pere ou
de leur mere, pour les homicides ,
10. Pour les fornicateurs, les abo-
minables,' les voleurs d'esclaves,'
lesmenteurs, les parjures, et s'il y a
quelque autre chose qui soit oppo-
see a la .saine doctrine,
1 1. Qui est selon I'Evangile de la
gloire de Dieu bie.'iheureux, TE-
vaugile qui m'a etc confie.
•i- S. Liu. : « qu'a redificalion de Dieu dans les ames. » La chariuS est
VodiGce de Dieu dans les ames.
y Ct. Lilt, desquelles choses.
•jr 8. Liu. legitimemeat ; comnie on doit en user.
f 9. La loi ne fait que commander, en menacant et punissant. Le juste ,
jvirte au bien par amour et sans contrainte , pratique la loi pour ainsi dire
spontancmeni , parce qu'elle est gravee dans son cceur.
y 10. Adonnes au pech^contre nature, si commun parmi les paiens.
Ibid. Ou plut6t : ccux qui volent des hommes libres pour en fairc des
esclaves.
124
ire EPITRE DE SAINT PA
12. Je rends graces k notre Sei-
gneur Jesus-Christ , qui m'a forti-
fie, dece qu'il m'a juge fidele ," en
m'etablissant dans son ministere;
i3. Moi qui etois auparavant un
blasphcmateur, un persecuteur et
un cnnemi outrageux: mais j'ai ob-
tenu inisericorde de Dieu , ' parce
que j'ai fait tous ces maux dans
rignorance, n'ayantpasla foi. '
i4- Kt l<i gi'ace de notre Seigneur
s'est repandue sur moi avec abon-
dance, on me remplissant de la tbi
et dc la charite qui est en Jesus-
Christ.
Mau. IX. i3. i5. C'est une verite certaine, et
Marc. II. 17. (ligne d'etre recue avec une en-
tiere deference , que Jesus-Christ
est venu dans ce monde sauver les
pecheurs, entre lesqueis je suis le
premier. ' ,
16. Mais aussi j'ai recu miseri-
corde, afin que je fusse le premier
en qui Jesus-Christ fit eclater son
extreme patience , " et que je ser-
visse d'exemple i ceux qui croi-
ront en lui, pour avoir la vie eter-
nelle.
17. An Roi des siecles , immor-
tel, ' invisible, a I'unique Dieu,'
soit honneur et gloire dans les sie-
cles des siecles. Amen.
ULA TIMOTHEE,
12. Gralias ago ei qui
me confortavit , Christo
Jesu Domino nostro, quia
fidelem me existimavit,
ponens in ministerio :
i3. Qui prius blasphe-
mus fui, et persecutor,
etcontumeliosus : sed mi-
sericordiam Dei consecu-
tus sum, quia ignorans
feci in incredulitate.
1^. Superabundavitau-
tem gratia Domini nostri,
cum fide et dileclione,
quae est in Christo Jesu.
i5. Fidelis scrmo, et
omni acccptione dignus,
quod Christus Jesus vcnit
in hunc mundum pecca-
tores salvos facere , quo-
rum primus ego sum.
16. Sed ideo misericor-
diam consccutus sum : iit
in me primo ostenderet
Christus Jesus omnem
patientiam, ad informa-
lionem eotum qui credi-
turi sunt illi , in vitam
ajternam.
17. Ilegi autem secu-
lorum immortali , invisi-
bili, soli Deo, honor et
gloria in secula seculo-
rum. Amen.
■j^ 12. Fidele dlspcnsalcur de sa parole et de sa grace.
^ i3. Ce moi Dei n^esl pas dans le grec.
Ibid. Ne croyant pas que Jfsus-Christ fiit le Messie.
y- 15. Le plus insigne , le plus coupable. II sc qualifie ainsi par une pro-
fondeliumilite, a cause de racharnement avec lequel il aralt persecute' I'figUse
de J(5sus-Christ. '
V if). Lilt, afin qu'en moi premier Jcsus-Chrisl fit eclater, etc.
•)^ 17. Gr. lilt. incorruplible,"a<pGaf>T».
Jdid. Le grec imprime 111 : au seulDieu sage, ou a Dieu qui est le scu! sage.
Mais les mcilleurs manuscrils el la plupart des anciens peres lisent couform^-
meut a la Vulgale.
CHAPITRK 1.
I 20
18. Ce que je vous rccommande
done, nion fils Tiuiolhee, c'esl
qu'accomplissaiit les propheties
qu'on a faites autrefois de vous,
vous vous acquittiez de tous les de-
voirs de la milice sainte /
19. Conservant la foi ct la bonne
conscience , a laquelle quelques-
quain quidam repellen- unsayantrcnooce, ont fait naufrage
tes, circa Gdem naufraga- en la foi.
verunt :
20. Ex quibus est by- 20. De ce nombre sont Hyraenee
nienaeus, et Alexander, et Alexandre, que j'ai livres a Sa-
quos tradidi Satanae, ut tan,' afin qu'ils apprennent a ne
discant non blaspheinare. plus blasphemer. '
18. Hoc prspceplum
t oinuiendo tibi, liliTinio-
ihce , secundum praece-
dentes in te prophetias,
ut niilites in illis bonam
uiilitiacn,
19. Habens fldein, et
bonaui conscientiam ,
y 18. C'est ainsi qu'il appelle lestravaux aposloliques.
•^ to. Que j'ai frappes del'excommunication.
Ibid. A ne rien enseisner dc contraii'e k la foi de Jesas-Christ.
CHAPITRE II.
Prief €» rendre giaces pour t6tts. Volonte de Dieo a I'egard dasalut. Media-
tion et redempilon de Jesus-ChrisL Paul apotre des genlils. Condilions de
la priere. Modeslie et sounaission recummandees aux femmes.
1. Obsecko igitur pri-
mOm omnium fieri obse-
crationes, orationes, pos-
tulationes , gratiarum ac-
tiones pro omnibus homi-
nibus :
2. Pro regibus, et om-
nibus qui in sublimitate
sunt, ut quietara et tran-
quillam vitam agamus,
in omni pietate et casti-
tate.
3. Hoc enim bonum
est, et acceptum coram
Salvatore nostro Deo ,
1. Je vous conjure done, avant
toutes ehoses, que Ton fasse des
supplications, des prieres, des de-
mandes et des actions de graces
pour tous les hommes,
2. Pour les rois, et pour tous
eeux qui sont eleves en dignite,
afin que nous menioiis une vie pai-
sible et tranquille dans toute sorte
de piete et d'honnetete. '
5. Car cela est bon , et agreable
5 Dieu Dotre Sauveur,
i a . C'est Ic seaa du grec.
laG
jre EPITUE DE SUNT PAUL A TIMOTHEE,
4- Qui veut que tons les homines
soient sauvcs, et qu'ils viermcnt ii
la connoissance de la verite'.
5. Car il n'y a qu'un Dieu et un
mediateur enlre Dieu et les hom-
raes, Jesus-Christ homme, '
6. Qui s'est livre lui-merae pour
la redemption de lous, en rendant
temoignage ' dans les temps mar-
ques.
■n. C'est pour cela que j'ai ete
etabli moi-meme predicateur et
apotre ( je dis la verite et je ne
mens point)", le docteur des gentils
dans la foi et dans la verite.
8. Je veux done que les hommes
prient en tout lieu, elevant des
mains pures, avec un esprit eloi-
gne de colere et de contention,
9. Que les femmes aussi prient,
etanl vetues comme I'honnetele le
demande : qu'elles se parent de
i.Petr. III. 3. modcstie et de chastete ', et non
avec des cheveux frises, ni des or-
nemens d'or, ni des perles, ni des
habits somptueux;
10. Mais avec de bonnes ceuvres,
comme doivent le faire des femmes
qui font profession de piete. '
11. Que les femmes se tiennent
en silence ' et dans une entiere sou-
mission lorsqu'on les instruit.
1. Cor. XIV. 12. Je ne permets point aux
34.
/'|. Qui omncs homines
vuit salvos fieri , et ad
agnitlonem veritalis ve-
nire .
5. Unus enim Deus,
unus et mediator Dei ho-
ininum homo Christus
Jesus :
(). Qui dedit redemp-
tionem scmetipsum pro
omnibus , testimonium
temporibus suis :
7. In quo positus sum
ego praedicator et apos-
tolus ( veritalem dlco,
non mentior ) , doctor
gentium in fide et vcri-
tate.
8. Volo ergo viros ora-
re in omni loco , levantes
puras manus sine ira et
disceptalione.
9. Similiter et mulieres
in habitu ornato , cum
verecundia et sobrietale
ornantes se, et non in
tortis crinibus , aut auro,
aut margaritis, vel veste
pretiosa :
10. Sedquod decet mu-
lieres, promittentes pie-
tatem per opera bona.
11. Mulier in silentio
discat cum omni subjec-
tione.
12. Docere aulem mu-
■f 4. Etant tous crees par le m^me Dieu , et rachelcs par le m^me Jesus-
Christ.
■f 5. Homme et Dieu tout ensemble.
•^ 6. C'est-a-dire en rendant temoignage a la verite.
f 7. C'est le sensdu grec : /e^Ks-Christ m'est temoin que jedls la vi'rile.
■j^ 9, Autr. avec modeslie etavec chastete.
•j^ 10. C'est le sensdu grec, qui renferme entre parentheses ces mots 0
wpETrei -j'uvat^'tv £7tayyeX>vop.£vai? GEoasSatav.Lelatinlpeut se traduirea laletlre
mais comme il sied a des femmes qui font voir leur pi<^t6 par Icur vie reglce.
-jr i\. Aulieu de causer etdes'entretenir dans rEglise> selon la coutume
de ce scxe. (Bible de Sacy.)
CHAPITRE II. 127
litri non periniUo, neque feinines d'enseigner ' ni de prcndri;
(lominari in virum, sed autorite sur leurs maris; mais je
(•5se in silentio. lour ordonne de demeurer dans le
silence , '
i5. Adam cniin primus i5. Car Adam a ete forme le pre- Ce/i. t. 27.
lormatus est deinde He- mier, et Eve ensuite;
va :
14. Et Adam non est 14. Et Adam n'a pas ete seduit,
-t'ductus : niulier autem mais la femme ayant ete seduile, Gen.m.e.
t'ducta in praevaricatione est tombee dans la desobeissance,
nit.
i5. Salvabilur autem i5. Se sauvera par les enfans
per filiorum generalio- qu'elle mettra au monde, en fai-
nem , si permanserit in sant qu'ils demeurent ' dans la foi ,
flde , et dilectione , et dans la charite, dans la saintete et
sanctificatione cum so- dans une vie bien reglec
brietate.
o*
y 12. Publiquemcnt et dans I'Eglise Voy. x.Cor. xi. 5. xxiv. 34. 35.
I6id. Dans la soumission et la dependance qu'elk-s leur doivent.
y^ 14. Dans la revolle conire Dieu , et elle y a engage son marl , qui s'est
lalsse entrainer par I'amour qu'il portait a cello que Dieu lui a^oit donnee
pour aide et moilie.
T^ i5. C'est le sens du grec : eiv ixEivfexrw. Selon la Vulgate : « elle se sau-
vera neanmoins (la femme) en mettant des enfans au monde, si elle demeure
dans la foi, dans la charite, dans la saintete, etdans une vie bien reglee » parce
qu'alors elle elevera scs enfans dans la crainte de Dieu. — Apres avoir fait
defense a la femme de precher et d'enseigner publiquement, rAp6tre la con-
sole en lui offrant, corame par compensation , la ressource d'exerccr le don
de la parole sur ses enfans dans I'interieur de sa maison. La plus belle voca-
tion d£ la femme est d'elever saintement sa jeune famille , et ce doit ^tre sa
principaje occupation.
CHAPITRE HI.
Qualites des ^v^ques et des pr^tres. Qualiles des diacres et des diaconesses.
L'Eglise est la maison de Dieu, la colonne et la base de la verite. Gran-
deur da raystere de Jesus-Christ
1. FiDEtis sermo : Si x. C'est une verile certaine, que
quis episcopatum desi- si quelqu'un souhaite I'episcopat, il
derat, bonum opus desi- desire une ceuvre sainte. '
derat.
•jf I. Une fonction qui demande desaintes dispositions. L'episcopat Impo-
soit, surtout dans les premiers temps, un travail rude, continuel, difficile, ac-
128
ire EI'lTRE DE SAINT lAU!, A TJMOTIILIE,
Tit. 1. 7. 2. II faut done que I'cvGque ' soil
irrepreJicnsiblc, qu'il n'ait cpoiise
qu'une femmc, " qu'il soil sobre,
prudent, grave ct modeste,' chas-
te, "aimant a exercer I'hospilalite,
capable d'instruire ;
3. Qu'il ne soil ni sujet au vin,
ni violent et prompt i\ frapper; '
mais equitable etmodere, " cloigne
des conteslations, desinteresse; '
4. Qu'il gouvernc bien sa propre
I'amille, et qu'il maintienne ses en-
fans dans I'obeissance ct dans toule
sorte d'honngtete. '
5. Car si quelqu'un ne sait pas
gouverner sa propre famille , com-
ment pourra-t-il conduiie I'Eglise
deDieu?
6. Que ce ne soit point uu neo-
phyte', de peur que s'elevant d'or-
gueil ', il ne tombe dans la raeme
condamnation que le diable. "
7. 11 faut encore qu'il ait bon te-
moignage de ceux qui sont hors de
riglise, de peur qu'il ne tombe
3. Oportet ergo epis-
copum inoprchensibilcin
esse, unius nxoris virum,
sobrium, prudentem, or-
natum, pudicum, hospi-
! ilem, doctorem :
3. Non vinolentum ,
non percussorem 5 sed
modestum : non litigio-
sum, non cupidum, sed
4. Suae domui bene
prtepositum, filios haben-
tem subditos cum omni
castltate.
5. Si quis autem domui
suae praeesse nescit, quo-
modo Ecclesiae Dei dili-
gentiam habebit?
6. Non neophytum : ne
in superbiam elalus, in
judicium incidat diaboli.
7. Oportet autem ilium
et testimonium habere
bonum ab iis qui ibri-s
compagnc d'une persecution frcquente, ct termlne ordinairement par le mar-
tyre et lamort.
•^ 2. Quelques-uns croienl que sous le nom A''e^>eque saint Paul comprend
id les prelrcs : il paroit que les noms de pretres et d^e'wc/ues se metloient
alors I'un pour Tautre : ici on volt qu'aux qualiles dos cvequ'es saint Paul
joint aussit6t les quaUtes des diacres ; ce qui paroit supposer que les pretres
sont comprls eux-memes ici sous le nom d'ewtjiies , qui signilie a la leltre ,
surweillans . Quoi qu'il en soit, on convient que ce qui scroit dit ici des 6y&-
ques seuls pourroit aussi s'appliquer aux pretres.
Ibid. Dans ces commcncemens on ne pouvoit prcsque Irouver pour le saint
ministere que des liommes veufs ou maries.
Ibid. Le molgrec xc.'a[i.tov renferme ce deux idees.
Ibid. Le mot pudicum n'est pas dans le grec.
■]>■ 3. De ces deux expressions la premiere explique la seconds qui esll'ex-
pression litlerale du texte.
Ibid. Le mot grec STrteot^ rcunlt ces deux idees.
Ibid. Le sed qui est dans la Vulgafe n'est pas dans le grec.
^ 4- C'cslle sens du grec osjAvoTriTO?.
i- 6. C'est-a-dire un homme nouvellement converli a la foi.
Ibid. En se voyantdans les premieres dignites de I'Eglise, sitolapressa
conversion.
Ibid. Qui ue put soutenir Ic poids de la gloire oii Dieu I'avoit crcc.
CHAPITRE III.
sunt, ut non m oppro-
brium inridat, el in la-
queum diaboli.
8. Diaconos simililer
pudicos, non bilingues,
non multo vino deditos ,
non turpe lucrum sec-
tantes :
9. Habentes mystc-
riuui fidci in conscientia
pura.
10. Et bi aulem pro-
bentur primuui : et sic
ininistrent, nullum cri-
men habent€S.
11. Mulieres similiter
pudicas, non detrahen-
tes, sobrias, fideles in
omnibus.
12. Diaconi sint unius
uxoris viri : qui filiis
suis bene praesint, et suis
domibus.
i3. Qui enim bene mi-
nistraverint, gradum bo-
num sibi acquirent, et
multam fiduciam in fide,
qua est in Christo Jesu.
dans I'opprobre, et dans le piege
du demon, '
8. Que les diacres de raeme
soient honn^les ' et bien regies ;
qu'ils ne soieut point doubles dans
leurs paroles, ni sujets aboire beau-
coup de vin; qu'ils ne cherchent
point de gain honteux;
9. Mais qu'ils conservent le rays-
tere de la foi avec une conscience
pure. '
10. lis doivent aussi elrc eprou-
ves auparavant , puis admis dans le
ministcre, s'ils ne se trouventcou-
pables d'aucun crime. '
11. Que les femmes de meme '
soient honneles et d'une conduite
reglee', exemptes de raedisance,
sobres, fideles en toutes choses.
12. Qu'on prenne pour diacres'
ceux qui n'auront epouse qu'une
femme, qui gouvernent bien leurs
enfans et leurs propres families. '
1 5. Car le bon usage qu'ils au-
ront fait de leur minislere les fera
monter a un degre plus haut , et
leur donnera une grande confiance
dans la foi qui est en Jesus-
Christ. '
y 7. Qui DC manqueroit pas de se servir da meprls qu'on auroil pour cct
homme, pour le degotiter de la sainlele de la religion direlienne, el pour Ten-
gager de nouveau dans le crime.
y 8. C'esl if sensdugrec , dont I'expression osavcj- est relative a cellc
duy4. ^
y 9. Evitaot tout ce qui a apparence de poche.
y 10. Autreinent et selon le grec : s'ils sent sans reproche.
yii. C'est-a-dire les diaconesses qui eloient des femmes cliargees d'as-
sister et quelquefois d'inslruire les personnes de Icur scxc.
Ibid. C'esl le sens du grec.
- y 12, Lorsqu'on sera oblige de prendre pour cela ties licmracs marii's.
Ib/'d. AGn qu'on ait lieu d'espcrer qu'ils s'acquiucrcnt do mdme des de-
voirs de leur ministere.
y 1 3 . Pour I'annoncer avec hardiesse, et poor repreadre les pecheurs avec
force.
23. cj
[3o
1T9 i^piTRE I>E SAINT PAUL A TIMOTHKE.
14. Je vous ecris ceci, quoique
j'espcre allcr bientot vous voir;
i5. Afin que si je tardois phis
long-temps, vous sachiez coiTinient
vous devez vous conduire dans la
maison de Dieu,'qui est I'Eglise du
Dieu vivant, la colonne et la base
de la verite.
16. Et sans doule c'est quelque
chose de grand que ce mystfere d'a-
mour ' qui ' s'est fait voir dans la
chair', qu'il a ete justifie par I'Es-
prit ', qu'il a ete manifeste aux an-
ges, preche aux nations, cru dans
le monde , recu dans la gloire. '
14. IIa;c libi scribo,
sperans ine ad te venire
cito :
i5. Si aulem tarda-
vero , ut scias quonnodo
oporteat te in dorao Dei
conversari, qua? est Ec-
clesia Dei vivi, colunina
et firmamentum veri-
tatis.
16. Et manifeste ma-
gnum est pietatis sacra-
mentum , quod manifes-
talum est in came, justi-
ficatum est in Spiritu ,
apparuit angelis, prredi-
catum ert gentibus, cre-
dilum est in mundo, as-
sumptum est in gloria.
•j^ i5. Sur laquelle vous 6tes etabli,
^ x6. A la leUre et selon le grec: ce mystcre de piele ; c'esl-a-dire qui est
I'objet essentiel de la piete.
Ibid. Grec: Dieu qui s'esl , etc. La Vulgate a la leltre : ce mystcre de
piete qui a paru dans la chair, qui a cl6 justifie par I'Esprit , etc' Pietatis
sacramentum, quod manifestatum est in carne, j ustijicatum est, etc. Les
manuscrits latins et les peres latins lisent ainsi. Mais les peres grccs et pres-
que tous les manuscrits grecs lisent ici le mot Deus , ce qui donne ce sens :
pietatis sacramentum, [quod) Deus manifesialus est in carne, justijicalum
est, etc., comme I'exprime ici la traduction paraphrasee. Voyez I'analyse.
Ibid. Dans le corps humain dont ils'etoilrev^tu.
Ibid. Par le saint Esprit dans son baptdme.
Ibid. A son ascension.
CHAPlTftE IV.
Heresies annoncees. Timolliee exliorte a se nourrir de la bonne doctrine , a
fuir I'erreur, k s'exercer a la piet6, a se rendre le modele des fideles, a lire
et eriseigner, i ne pas negliger la grace de son ordination.
iTim. III. I 1. Or, I'Esprit de Dieu dit ou- i. Spiritus autem ma-
\.Petr.uu verlement, ' que dans les temps a nifeste dicit, quia in no-
3.
y r. C'est I'exnression du grec.
CHAPITRB IV.
l3l
vissiints tcmporibus dii-
oedenl quidain a fido ,
atteudente? spiritibus cr-
roris, et doctrinis daemo-
niorum .
2. In hypocrisi loquen-
tium mendacinm , et cau-
teriatam hahentium suam
conscientiam ,
5. Prohibenliuinnube-
re.abstinere a cibi?,quo8
Deuscrcayil ad percipien-
dum cum gratia rum ao
tione fidclibus, et iis qui
cognoverunt veritatem :
4- Quia omnjs crealura
Dei bona est, et nihil re-
jiciendum quod cum gra-
tiarum actione percipi-
lur :
5. Sanctifica'ur enim
per verbum Dei, et ora-
tionem :
6. Hsec proponens fra-
tribus , bonus eris minis-
terChrisli Jesu. enulritu3
verbis fidei , et bnnae doc-
trinal, quam assecutus es.
7- Ineptas autem et
aniles fabulas devita :
exerce autem teipsum ad
pietatem.
8. Namcorporalisexer-
citalio, ad modicum uti-
'is est : pieta? autem ad
omnia ulilis est , promis-
venir' quelques-uns abandonneront •^"•^'- '8.
la foi, en suivant des esprits d'or-
reur et des doctrines diaboliques,
3. Enseignces par des imposteurs
pleins d'hypocrisie , dont la con-
science est noircic de crimes ,
5. Qui interdiront le mariage , oi
I'usage des viandes ' que Dieu a
creees pour etr%rerues avec action
de graces par les fideles , et par
ceux qui connoissent la verite.
4. Car tout ce que Dieu a crcc
est bon, et on ne doit rien rejeler
de ce qui se mange avec action dc
graces ,
5. Parce qu'il est sanctifie par la
parole de Dieu, et par la priere. '
6. En enseignant ceci a nos fre-
res, vous serez un bon ministre de
Jesus-Christ, vous nnurrissant des
paroles de la foi, et de la bonne
doctrine que vous'avez apprise. '
7. Fuyez les fables impertiuentes Supr. i. 4.
et pueriles, ' et exercer-vous u la ^.T'j/j/. 11.23.
piete. ^''-- '"• y-
8. Car les exercices corporels
.«;ervent i peu de chose ; ' mais la
piete est utile a tout,et c'est a elle
que les biens de la vie pr^sente et
0.
C'est le sens du grec Voyez I'analyse.
y 3. Tels Furent depuis cette prediction les Marcioniles ct les Manlclieens.
lis condamnoient tout mariage, et soutenoient que le vin et la chair ctoienl
de leur nature quelque chose de mauvais, dont on ne peut se servir sanspeche.
■/ 5. Que Ton fait en lerecevant.
y^ 6. Gr. autr. que vous avez suivie.
y 7. Lilt, et scmblables aux contes que les vleilles femmes font aux petits
€nfans.
V S. N'ayant pour recompense qn'^ne gloire passagere et une couronne pe-
ri ssable.
1 32 1" EPITRE DE SAINT PAUL
ceux de la vie future ont ete pro-
mis.
9. Ce que je vous dis est une ve-
rite certaine , et digne d'etre recue
avec une entifere soumission.
10. Car ce qui nous porte a souf-
tVirtous les maux et toutes les ma-
ledictions ' dont on nous charge ,
c'est que nous esperons au Dieu
vivant, qui est le Sauveur de tous
les hommes, et principalement des
fideles , ' . «
1 1. Annoncez ' ces choses, et en-
seignez-Ies.
12. Ayez soin que personne ne
vous meprise a cause de votre jeu-
nesse; mais rendez-vous le modele
des fiddles dans les entretiens, dans
la maniere d'agir avec le prochain,
dans la charite, dans la foi, dans la
chastete.
i3. En attendant que je vienne,
appliquez-vous a la lecture, a I'ex-
hortation et a I'instruction.
14 • Ne negligcz j5as la grace qui
est en vous, qui vous a ete donnee,
suivant une revelation prophetique,
par I'imposition des mains 'des pre-
tres.
i5. Meditez ces choses, soyez-
en toujours occupe, afin que votre
avancement soit connu de tous.
16. Veillez sur vous-meme et
sur I'instruction : ' demeurez ferme
dans ces exercices; car agissant de
y^ 10. Gr. litt. tous les outrages.
Ibid. Nous atlendons avec une enliere confiance la gloire'<5lernene qu'il
nous donnera pour recompense de notre fidelite.
■5}^ 1 1 . C'est Texpression du grec.
■j} 14. Qui a ele faile sur vous dans votre ordination, selon I'ordre qu'on en
avoit recu du Saint-I]sprit.
Ibid. Ou des anciens, c'est- a-dire desdveques, et particulierement de
saint Paul. 0.. Tim. i. Ci.
i 16. Sur la purctc de la doctrine que tous devez cnseigner.
A TIMOTHEE.
sionem habens vitae, quae
nunc est , et futurae.
9. Fidelis sermo, et
omni acceptione dignus,
10. In hoc enim labo-
ramus et maledicimur,
quia speramus in Deum
vivuin, qui est Salvator
omnium hominum, maxi-
me fidelium.
1 1 . Praecipe haec , et
doce.
12. Nemo adolescen-
tiam tuam 'contemnat :
sed exemplum esto fide-
lium, in verbo, in con-
versatione, in charitate,
in fide, in castitate.
i5. Dum venio, atten-
de lectioni, exhortationi,
et doctrinae.
14. Noli negligere gra-
tiam quae in te est, quae
data est tibi per prophe-
tiam, cum impositione
manuum presbyterii.
i5. Haec meditare, in
his esto : ut profectus
tuus manifestus sit om-
nibus.
16. Attende tibi ^ et
doctrinae : insta in illis.
Hoc enim faciens, et
^
CUAPITRE IV.
33
teipsum salvum facies , la sorle, vous vous sauvercz vous-
et eos qui te audiunt. inenie , et ceux qui vous ecou-
tent.
CHAPITRE V;
Regies de condjiite a legard des personnes igees ou jeunes. Veuves qui m^ri-
tent d'etre assistces. Veuves qui meriteni d'etre employees pour Ic service
de I'Eglise. Recompense des pretres. Accusation , reprehension, ordination
des pretres.
1. Sekiobem ne incre-
paveris, sed obsecra ut
patrem : juvenesj ut fra-
tres:
2. Anus, ut inatres :
jurenculas, ut sorores,
in omni castitate.
3. Viduas honora, quae
vere viduae sunt.
4- Si qua autem vidua
filios aut nepotes habet :
discat primum domuin
suam regere, et mutuam
vicem reddere parenti-
bus : hoc enim acceptum
est coram Deo.
5. Quae autem vere vi-
dua est et desolata, spe-
ret in Deum, et instet
obsecrationibus et oratio-
nibus nocte ac die.
1 . Ne reprenez pas les vieillards
avec rudesse ; mais avertissez-les '
comme vos peres, les jeunes hom-
mes comme vos freres;
2. Les femmes agees comme vos
meres, les jeunes comme vos
soeurs, avec une purete parfaite.
3. Honorez' les veuves qui sont
vraiment veuves. '
4. Mais si quelque veuve a des
CIs ou des pelits-fils, qu'elle ap-
prenne premiferement a gouver-
ner sa famille, et k rendre a ses
pere et mere ce qu'elle a recu
d'eux,' car cela est agreable ' a
Dieu.
5. Que la veuve qui est vraiment
veuve et abandonnee espere en
Dien, et qu'elle persevere ' jour
et nuit dans les prieres et les orai-
sons.
y 1. C'est le sens du grec.
T 3. C'est-a-dire assislez. — Le mot Titta, ea hebreu "123 ^ <P' signifie ho-
norer seprenoit souvent au sens A^assister. Infr. -j- it.
luid. Denaees de tout secours. — C'est ce q>ie signifie en grec le nom
meme de veuve -ji.za. de xff sc depoiiille.
T 4. En leurdonnant 1 assistance dont ilsontbesoin , comme ils I'ont as-
sistee depuis sa naissance jusqu'a ce qu'elle fiit eleyee. — Grec : « qu'ils ap-
prennent, etc. , » lout le reste au pluriel.
Ibid. Grec : cela est juste (a la lettre , bean xaXov) et agreable Ik Dieu.
•j 5, C'est le sensdu grec. Ou plulot selon le grec a la lettrre: Mais la veuve
qui est vraiment veuve , etc., espere en Dieu, etelle pers^ere , etc. Et pou5
celle qui vil d^s les delices, etc.
1 34
if« Ei'iinu Dt sAmr pall a timotiiee.
6. Nam quae in delicib
est, vivens mortua est.
6. Car pourcelle qui vit dans Ics
deliccs , ' elle est morle ," quoi-
qu'elle paroisse vivanle.
7. Failes-leur done entendre ceci,
afin qu'elles se conduisent d'une
inaniere irreprehensible.
8. Que si quelqu'un n'a pas
soia dessiens, et particuli^rement
de ccux de sa xnaison,' il a renoncc
k la tbi , et est pire qu'ua infi- fidein negavit, et est infi
dfele.'
9. Que la veuve qui serachoisie,"
n'ait pas moins de soixanto ans,
qu'elle n'ait eu qu'un uiari ;
7. Et hoc praecipe, ut
irreprehensibiles sint.
8. Si quis autem suo-
rum, et maxiuie domes-
ticorum curain non habet,
deli deterior.
9. Vidua eliKatur non
scxairinta anno-
imnus
rum, quaj i'uerit unius
viri uxor^
10. In operibus bonis
testimonium habens , si
Olios educavit, si hospitio
10. Etqu'on puisse rendrc temoi-
gnage de ses bonnes ceuvres , si
elle a bieu elevo ses enfans, si elle
a exerce I'hospitalite, si elle a lave recepit, si sanctorum pe-
les pieds' des saints, si elle a se- deslavit, si tribulationem
couru les afiliges, si elle s'est ap- patientibus subministra-
pliquee a toutes sortes d'exercices yit, si omne opus bonum
de picte. ' subsecula est.
11. Mais n'admettez point en ce 11. Adolescentiores au-
nombre de trop jeunes veuves, tern viduas devita. Ci^m
parce que la mollesse de leur vie enim luxuriate fuerint in
les poitant a secouer le joug ' de Cliristo, nubere volunt :
Jesus-Christ, elles Yeulent se re-
marier ,
13. S'engageant ainsi dans la 12. Habentes damna-
condamnation, ' par le violement tionem, quia primam fi-
de la fol qu'elles lui avoient donnee dem irritam fecerunt.
auparavant.
■f 6, II parle de la veuve riche ou ais^e qui ne demeure dans I'etat de vi-
dtill^ que pour mieux jouir de son inddpendance, et se livrer sans reserve aux
plaisirs du nionde.
Ibi'J. Scion la Grace et aus yeux de Dieu.
y S. De sa proprc famille.
Ibid. Qui ne luanqueroit jamais de s'acquilter de ces devoirs de la loi natu-
relle.
4- g. Pour 6lre raise au rang des diaconessea employees au service de I'E-
gKse, et entretenues 4 ses depens.
f 10. G'etoit une civilile commune autrefois dans toutl'Orient.
Ibid. Lill. de bonnes ceuvres.
•jj- II. Grec : lorsqu'elles se sont abandonn^s a la mollesse centre Jesus-
Christ.
•)} 12. Attirant sur elles !a colore deDicu.
ij. Sanul uuteia et
oliosa) discunt circuirc
(lomos : non solum otio-
i', sed et verbosje, ct
. siriosa;, loqiientes quae
DOD opoi let.
14. Volo ergo juniores
iiubere, filios procreare ,
raalres familias esse, nul-
lain occasionem dare ad-
crsario lualedicti gratia.
i5. Jam enim quadam
unverstc sunt retro Sa-
tauam.
16. Si quis fidelis habet
\iduas, subministret illis,
ct non gravetur Ecclesia :
ut lis quae vera vidua;
sunt, sufficiat.
CUAPURE V. I So
i3. Mais du plus dies devienneut
faineantes; ellcs s'accoutument a
courir par les maisons , et elles ne
sont pas seulement faineantes, mais
encore causeuses el curieuses, s'en-
tretenant de choses dont eiles ne
devroient point parler.
14. J'aime done mieux que les
jeunes veuves se remarient, qu'elles
aient des enfans, qu'elles gouver-
nent leur menage , et qu'aiosi elles
ne donnent aucun sujet aux enne-
mis de notre religion de nous iaire
des reproches.
i5; Car deja quelques-unes se
sont egarees ' pour suivre Satan.
17. Qui bene praesunt
16. Que si quelqu'un des fiddles'
a des veuves,' qu'il leur donnece qui
leur est necessaire , et que I'Eglise
n'en soit point chargee,afin qu'elle
puisse sufflre i I'enlretien de celles
qui sont vraiment veuves.'
ly. Que les pretres qui gouver-
presbyteri , duplici hono- ncnt bien soient doublement bo-
re dignihabeanlur: maxi- nores;' principalement ceux qui
me qui laborant in verbo travaillent a la predication de la
ct doctrina. parole, et a I'instructlon des peu-
ples. '
18. Dicit enim Scriptu- 18. Car I'Ecriture dit: Vous ne /)^„/. xit. v.
ra : Non alligabis os bovi Herez point la bouche au boeuf qui i. Cor. ix.g.
trituranti : Et, Dignusest foule le grain ; et : Celui qui tra- Maa. x. 10.
vaille, est digne du prix de son tra- ^"^- ^- '■
•vail.
19. Ne recevez point d'accusa-
tion contre un pretre , que sur la
deposition de deux ou trois te-
moins.
ao. Reprenez les pecheurs' de-
operarius mercede sua.
19. Adversus presbyte-
rum accusationem noli
recipere, nisi subduobus
aut tribus testibus.
20. Peccantes coram
y 1 5. C'estle sens du grec ; ou plus liltcralement : ee sont d^tourn^.
y i6. Gr. si ua homme fidele ou une femme fidele.
Ibid. Des veu?es qui lui soienl procbes.
Ibid. Qui n'ont personne qui puisse les assister.
y 1 7 . En ce qui regarde leur sul>sistaDce. Vofez la premiere note sar le
■i 10. Lc$ pecheurs publics ct scandalcux.
i38
l'^ EPITRE DE SAINT PAUL A TIMOTHEE.
\aiit loutle raondc/afin que les au-
tres aient de la crainte. '
21. Je vous conjure, devantDieu
ct devant Jesus-Christ, et les an-
ges elus, d'observer ces choses sans
prevention, ne liiisant rien par des
affections particuiieres.
33. N'imposez legerement les
mains a personne , et ne vous ren-
dez point participant des peches
d'autrui. ' Conservez - vous pour
Yous-ineme.
35. Ne continuezplus a neboire
que de I'eau ; inais usez d'un peu
de vin, a cause de voire estomac ,
et de vos IVequentes maladies.
34- H y a (les personnes dont les
peches sonl connus' avant le juge-
ment. ' H y en a d'autres qui ne se
decouvrent qu'ensuite. '
25. II y en a de raeme dont les
bonnes ceuvres sont visibles ; *^ et si
elles ne sont pas visibles,' elles ne
demeureront pas long-temps ca-
chees.
omnibus argue : ut et ce-
teri timorem habeant.
21. Tester coram Deo
et Christo Jesu, et electis
angelis, ut haic custodias
sine prejudicio, nihil ta-
ciens in alteram partem
declinando.
32. Manus cito nemini
imposueris, neque com-
municaverispeccatis alie-
nis. Teipsum castum cus-
todi.
23. Noli adhuc aquam
bibere, sed modico vino
utere propter stomach um
tuum, et frequentes tuas
infirmitates.
34- Quoruradam homi-
num peccata manifesta
sunt, praecedentia ad ju-
dicium : quosdam autem
et subsequuntur.
35. Similiter et facta
bona manifesta sunt : et
quae aliterse habent, abs-
condi nonpossunt.
f 2o. Aulr. reprenez, devant eux tous, ceux d'eiitre eux qui sui' la depor-
sidon de ces temoins seronl trouves coupables de crimes j afin que les au-
tres, etc.
Ibid. Soicnt relenues par cette confusion,
y^22. Par des ordinations inconsiderees.
>'^ 24. Lilt, sont connus et se pr^sentent avant, etc.
Jbid. L'examen qu'on pourroit en faire.
Ibid. Apres cet examen ; c'est pourquoi il faul le faire avec loute la dili-
c;ence et I'exactitude possible, afin de n'y etre pas tromp6. Quant aux preiniers^,
its portent en quelque sorte avec eux leur condaranation.
y 25. Avant qu'on les elise : el ceux-la dolvent etre admis sans difficulte.
Ibid. Dans plusieurs autres, qui onl cependanl beaucoup de mcrile.
Ibid. Litt. elles ne peuventdemeurercachees.
CHAPITIIE VI.
i37
CHAPITIIE VI.
Devoirs des scrvileurs. Faux docteurs. Pauvrete coil ten te. Piege des richesses.
Verlus d'un liomine de Dieu.'Avenement de Jesus-Christ. Avis pour les
riches. Depot de la foi.
1. QciccMQDE sunt sub
jugo servi, dominos suos
oiiini honore dignos ar-
hitrentur , nc iioinen Do-
mini , et doctrina blas-
phcmatur.
2. Qui autem fidelea
habent dominos, noncon-
lemnant , quia fratres
sunt : sed magis serviant,
quiafideJessuntet dilecti,
qui beneficii participes
sunt. Haec doce, et ex-
liortare.
3. Si quis aliter <iocet,
et non acquiescit sanis
sermonibus Domini nos-
tri Jesu Christi, etei, quae
secundum pietatem est,
doctrinae :
4. Superbus est , nihil
sciens, sed languens circa
quaestiones , et pugnas
verborum : ex quibus
oriuntur invidiae, conten-
tiones, blasphemiae, sus-
piciones malae,
5. Conflictationes ho-
minum mente corrupto-
1. Que lous ceux qui sontsousle
joug de la servitude sachent qu'ils
sont obliges de rendre toute sortc
d'honneur a leurs maitres, aQn de
n'etre pas cause que le nom et la
doctrine de Dieu" soient exposes a
la medisance' des hommes. '
2. Que ceux qui ont des maitres
fideles ne les mcprisent pas, parce
qu'ils sont leurs freres ; mais qu'ils
les servent au contraire encore
mieux, parce qu'ils sont fideles,
etplusdignes d'etre aimes, comme
etant participansdela meme grace.
C'est ceque vous devez leur ensei-
gner, et A quoi vous devez les ex-
porter.
3. Si quelqu'un enseigne autre
chose et n'embrasse pas les salutai-
res instructions de notre Seigneur
Jesus-Christ, et la doctrine qui est
selon la piete,
4. II est enfle d'orgueil; il nesait
rien ; mais il est possede d'une ma-
ladie d'esprit, qui I'emporte en des
questions et des combats de paro-
les, d'oii naissent I'envic, les con-
testations, les medisances,' les
mauvais soupcons ,
5. Les disputes pernicieuses de
personnes qui ont I'esprit corrom-
T^ I . C'est rexpregsion du grec.
Ibid. C'est If sens du grec.
Ibid. Coniuie s'il favorisoit la desobeissance des serviteurs.
y 4 . C'est le sens du grec.
i38
ire EpiTRE DE SAINT PALL A TIMOTIIKE.
i
Job.
■26.
pu, quisontprivees de la verite, et
qui s'imaginent que la piete doit
leur servir de moyen pour s'enri-
chir. '
6. II est vrai neanmoins quec'est
une grande richesse que la piete ,
et la moderation d'un esprit qui se
contente de ce qui suffit. '
7. Car nous n'avons rien apporte
Eccli. V. 14. en cemonde; et il est hors de doute
que nous n'en pouvons aussi rien
euiporter.
"• 8. Ayant done de quoi nous
nourrir et de quoi nous couvrir,
nousdevons etre satislaits.'
9. Parce que ceux qui veulent
devenir riches lombent dans la
tentalion et dans le piegedu diable,
et en divers desirs inutiles' et per-
nicieux , qui precipitent les hom-
mes dans I'abiLne de la perdition et
de la damnation.
10. Car I'amour des richesses'
est la racine de tous les maux; et
quelques-uns en etant possedes, se
sont egares de la foi , et se sont em-
barrasses dans une infinite d'afflic-
tions.
11. Mais pour vous, 6 homme
de Dieu, fuyez ces choses ; et sui-
vez la justice, la piete, la foi, la
charite, la patience, la douceur.
12. Soyez fort el courageux dans
le saint combat de la foi rtravaillez
a remporter le prix de la vie eter-
nelle, a laquelle vous etes appele ,
rum, et qui veritate pri-
vati sunt, existimantium
quaestum esse pietatem.
6. Est autem qusestus
magnus , pietas cum suf-
ficientia.
7. Nihil enimintulimus
in hunc mundum : baud
dubium quod nee auferre
quid possumus.
8. Habenles autem ali-
menta, et quibus tcga-
mur, his contenlisimus.
g. Nam qui volunt di-
vites fieri, incidunt in ten-
talionem et in laqueum
diaboli, et desideria mul-
ta inulilia, etnociva, quaj
mergunt homines in in-
teritum et perdilionem.
10. Radix enim om-
nium malorum est cupi-
ditas : quam quidam ap-
petentes , erraverunt a
fide, etinseruerunt se do-
loribus multis.
1 1. Tu autem, 0 homo
Dei, haec fuge : sectare
vero juslitiam, pietatem,
fidem, charitatem, pa-
tientiam, mansuetudi-
nem.
12. Gerta bonum cer-
tamen fidei : apprehende
vitam seternam, in qua
vocatus es, et confessus
■jl^ 5. Le Grecajoute: Separez-vous de ces sortes de personnes.
y- 6. De ce qui est n^cessaire pour les besoins de la vie pr^sente; c'est tout
ce que nous devonssouliailer. '
y 8. C'est le sensdugrecdpK5(79-/i(7c;p,e9a. Dans les exemplaircs latins ou a
varie : les uns ont mis simus el les autres sumus; mais les meilleurcs ^itions.
portent simus, etle sens de !a plirase I'cxige.
•^g. Gr. insenses.
yio. C'est le sens du grec.
CUAPITRE VI.
189
nam confessionein co-
in mullis teslibus.
ayant si excellemineat confesse la
Ibi en presence de plusieiirs te-
moins.
i3. Pi aecipiolibi coram i5. Je vousordonnedevanlDieu, Mau. xxvn,
: 'CO, qui vivifical omnia, qui viviGe toutes choscs , et devaiii 1 1.
et Christo Jesu , qui les- Jesus -Christ qui a rendu , sous Joan, \siii.
timonium reddidit sub Ponce Pilate, un si excellent te- ^^'
Pontio Pilato, bonamcon- moigoage i la verite ,
'■'"5sionem :
14. Ut serves manda- 14. De garder les preceptes que
luia sine macula, irrepre- Je vous donne, en vousconservant'
kensibilu , usquo in ad- sans tache et sans reproche, jusqu'a
ventum Domini noslri Je- I'Hvenenient ' de notre Seigneur Je-
suChrisll, Bus-Christ,
ID. Quern 3uis tempo- i5. Que doit faire paroitreenson
ribus osteodet bcalus et temps celui qui est souverainement
solus potens, Rexregum, heureux, qui est le seul puissant, ^poc. xvii.
et Domiuus domioan- le Roi des rois, et le Seigneur des '4 xix. iG.
tium : seigneurs :
i(j. Qui solus habetiinr 16. Qui seul posside I'immorta-
mortalitatem , et lucem Iit6, qui habite une lumiere inac-
inhabitat inaccessibilem : cessible, que nul des hommes n'a Joan, i iS.
quem nullushonanumvi- yu ni ne pent voir, a qui est I'hon- i.Joan. iv.i.
dit, sed nee videre potest: neur et I'empire dans I'eternite.
cui honor et imperium 4iiid-
sempiternum. Amen.
j^. Divitibus hujus se- 17. Ordoonez aux riches de ce
cull praecipe, uon subli- monde de n'etre point orgueilleux;
ine sapere, neque sperare de ue point mettre leur confiance
inincerto diviliarum, sed dans lesrichesses incertaines, mais Luc. \\\. 17
in Deo vivo ( qui praestat dans le Dieu vivant, qui nous
nobis omnia abunde ad fournit avec abondance tout ce qui
fruendum) est necessaire a la vie;
18. Bene agere, divites 18. D'etre charitables et bienfai-
sans ; de se rendre riches en bonnes
oeuvres ; de donner I'aumonc de
bon cceur; de faire part de leurs
biens ;
ig. De s'acquerir un tresor, etde
fundamentum bonum in s'etablir un fonderaent solide pour
futurum, utapprehendant I'avenir, afln d'arriver a la veritable
veiam vitam. vie. '
fieri in bonis operlbus,
facile tribuere, coranmni-
care ,
19. Tbesaurizare sibi
y 14. C'esl le sensdugrec.
Ibid. Gr. litt. jusqu'i la manifestation.
y 19. Gr. litt. a la vie etemelle.
1 4o l*^ EPITRE DE SAINT PAUL A TIMOTHEE, CHAP. VI.
20. 0 Timothee, depo-
situm cuslodi , devitans
20. O Timothee, gardez le de-
pot' qui vous a ete confie, fuyant
les profanes nouvcautes de paroles,
etloute doctrine contrairequi porte
faussement le nom de science;"
21. Dont quelques-uns faisant
profession , se sont egares de la
foi. ' Que la grace soit avecvous.
Amen.
profanas vocum novita-
tes , et oppositiones falsi
nominis scienliae :
31. Quam quidam pro-
mittentes.
ciderunt.
Amen.
circa fidem ex-
Gratia tecum.
-^ 2o. La foi, la doctrine chrelienne.
Ibid. Saint Paul paroit avoirici en vue principalement les gnostiques, dont
le nom signifie ceux qui possedent la science.
y 2 1 , Preferant la philosopliie paienne a la lumiere de I'Evangile.
Les exemplaires grecs portent a la fin de celte cpitre : « Premiere a Timo-
thee ecrile de Laiceeod , capitale de la Phrygie Pacalienne, en 23o versets. »
PREFACE
SUR LA DEUXIEME EPITRE
A TLAIOTHEE.
Saint Paul etant parti de Macedoine , vint passer I'hiver c\
Nicopolis , ville d'Epire ^ 11 en sortit au commencement Quelle fut
du printemps pour retourner en Asie : il passa a Troade ^, J'o<^cas'on do
et vint ensuite a Ephese voir Timothee , comme il le lui ^ f *^^' "^f ',
avoit promis ^. 11 demeura peu avec Im, et il le quitta syjet.
pour retourner a Rome. Avant de sortir d'Asie , il alia a
Milet, oil il laissa Trophime malade *. De Milet, il passa a
Corinthe, ou Eraste, I'un de ses disciples, demeura^, et il
arriva a Rome au commencement de I'ete. II s'y employa
a la conversion des Juifs et des gen tils avec son zele ordi-
naire. Saint Jean Chrysostome dit '^ qu'ayant converti
une concubine de Neron , ce prince le fit arreter. II y a
beaucoup d'appaience que ce fut alors qu'ii parut devant
I'empereur pour sa premiere justification ', et que Dieu
lui fit la grace de le delivrer de ce lion. On ne sait pas s'il
fut absolument renvoye absous , et delivre de prison , ou
s'il evita simplement le danger de la mort ; mais il est cer-
tain qu'il etoit dans les liens lorsqu'il ecrivit a Timothee
celte seconde lettre *. Le temps de son martyre appro-
choit ; et il se consideroit comme une victime deja arrosee
des libations, et prete a etre consumee ^. Aussi , selon la
pensee de saint Jean Chrysostome , on peut regarder cette
lettre comme le testament de I'Ap^tre *". II I'ecrivit pour
prier Timothee de venir le trouver ; mais en meme temps
il la remplit, comme la premiere, de plusieurs instructions
tres importantes pour ce cher disciple et pour tons les mi-
nistres de Jesus-Christ.
' TiL HI. 12.—* 2. Tim. IV. i3.— ' I.Tim, ui. 14. iv. i3.— *2. Titn.
TV. 20. — * Ibid. — « Chr/sost. in Act. liomil. 46. — ^ 2. Tim. iv. 16. el 17.
— *2. Tim. I. 8. ei n. 9. — »2. Tim. iv. 6. 8. — ^^ Chyysost. homil. n.
pag. 6i5.
T-ia PREFACE
Analyse de L'Apotre salue Tiniolhec ( chap, i ) en liii sonbailanr,
ccue cp tic, comme dans sa premiere epitre , la grace , la misericorde
et la paix : la grace pour faire le bien , la misericorde pour
effacer ses fautes, la paix pour le consoler et le soutenir
au milieu des travaux de son ministcre ^. 11 rend graces a
Dieu de ce que dans ses prieres il se souvient conlinuelle-
menl de ce disciple ^. 11 lui temoigne que se souvenant de
son affection et de sa foi , il desire le voir pour elre con-
" sole et rempli de joie par sa presence ^. II I'avertit de ral-
lumer en lui le feu de la grace qui lui a etc conferee dans
son ordination , dont lui Paul a ele le ministre^. II lui re-
presente que I'Esprit de Dieu repandu sur les ministres de
I'Evangile n'est pas un esprit de timidite , mais un esprit
de courage J d'amour et de sagesse *. 11 I'exhorte a ne
point rougir de Jesus-Christ , ni de lui Paul ^, mais a souf-
frir avec lui scion la force qui lui vientde Dieu , etpar un
motif de reconnoissance pour les bicnfaits de' Dieu qui
nous a sauves par son election , et nous a appeles par sa
vocation sainte , c'est-a-dire dont la saintete estl'objet''.
II fait remarquer la gratuite de cette vocation , en ce que
Dieu nous a appeles non selon nos oeuvres, mais selon le
decret de sa volonte, et selon sa grace, c'est-a-dire par
I'operation meme de sa grace ^. II fait remarquer que cette
grace nous a ete donnee en Jesus-Christ avant tous les sie-
cles dans les desseins de Dieu, et qu'elle a paru dans le
temps par la manifestation de Jesus-Christ, en ce que
Jesus-Christ a detruit la mort , et a decouvert^ et en quel-
que sorte mis au jour , la vie et Tincorruptibilite ^ ; la vie
que Dieu repand en nous par sa grace dans le siecle pre-
sent , I'incorruptibilite dont nous possedons des a present
les gages en Jesus-Christ, et dont nons serons nous-menies
revetus dansle siecle futur. 11 ajoute que ces deux avan-
tages sont annonces par TEvangile pour lequel il a ete
etabli predicateur et apotre , et maitre des nations ^**. Et
excitant le courage et le zele de son disciple par son
propre exemple , il lui represente que les motifs qu'il lui
^^i.eti.— ^i^. — ^i 4.ef5.— *T^6. — *T^7.— fiy-8.— 7>'-8.cf().
Sed collabora Ei>angelio secundum virtutem Dei, qui nos libevavit el voca-
vit vocatione sua sancta, — " ■jj- 9. Non secundum opera nostra, sed secun-
dum propositum suum , etgraiiam. — ^ yg. et 10. Et graiiam quce data est
nobis in Christo Jesu ante tempora secularia, manifestata est autcm nunc
jfer illuminationem (gr. ETri'^avE'.ct;, id est manifestationem) Sahatoris nostri
Jesu Chiisli. — '°^ 10. <?i 1 1.
9l'R LA II" ^pitRB A TIMOTIIBE. 1 ^Z
propose sont aussi ceux qui le soutiennent lui-m6me, ct
renipechent de rougir des maux qu'il souffre '. Aux motifs
qu'il vient de proposer, et qui sont tous renfermes dana
celui dc la reconnoissance , il en ajoute un autre qui esi
celui de la puissance du Dieu supreme qui a resolu de nous
combler de ses bienfaits : il declare done que ce qui le
souiient encore , c'est qu'il sail qui est celui a qui il se
confie en lui consacrant ses travaux et ses soufTrances , et
qu'il est certain que celui a qui il remet ce depot est tout-
puissant pour le lui garder jusqu'au dernier jour, c'est-a-
dire pour lui conserver la recompense de ses soufTrances
et de ses travaux ^. II exhorte son disciple a se proposer
pour modele les saines instructions qu'il a recues de lui
louchant la foi et la charite , ce qui comprend et le dogme
qui est lobjet de la foi , et la morale qui est toute ren-
fermee dans la charite ^. 11 I'exhorte a garder I'excellent
depot qui lui a ete confie , c'est-a-dire le dep6t meme de
la saine doctrine ; et en meme temps il lui fait vemarquer
que ce sera par la vertu du Saint-Esprit qu'il sera fidele a
garder ce depot"*. Ceci lui donne lieu de lui apprendre
raffoiblissement des Asiatiques qui etoient a Rome, et qui
setoient eloignes de lui , et au contraire la fidelite d'One-
siphore qui I'ayant assiste a Ephese , I'avoit aussi souvent
soulage a Rome ^. II souhaite que Dieu repande sa miseri-
cordc sur la famille de celui-ci , et lui fasse trouver grace
devant lui au dernier jour •"; ce qui insinue qu'il etoit mort ;
et la suite le confirme.
De la il prend occasion d'exhorter Tiraothee a se forti-
fier dans la grace ( chap, n ) , et a confier a des hommes
fideles le depot des verites qu'il a apprises de lui '. Il I'ex-
horte a souffrir constamment toutes les peines de son mi-
nist^re ^. 11 emploie diverses comparaisons par lesquelles
il I'avertit de ne point s'embarrasser dans les affaires du
siecle , et de corabatlre pour Jesus-Christ selon les lois sa-
crees de la milice sainte ; et il le soutient par I'esperance
de la recompense ^. II lui recommande de bien com-
prendre le sens de ces comparaisons , et lui souhaite que
Dieu lui donne I'intelligence en toutes choses *°. II lui rap-
pelle I'exemple de Jesus-Christ meme qui apres tous les
travaux de sa vie mortelle , en a recu la recompense daus
1 y 12.— 2 Ibid.—^ i ii.—*i iSf—'i i5. et i6.— «y 17. ad/mem.—
■ f I. et a.— » i 3.-» y 4.-6— '« i 7-
d
1 44 PREFACE
sa resurrection glorieuse *. II lui propose de nouveau son
propre exemple, et lui represente que les peines qu'il
soulfre , et les chaines memes tlout il est charge , n'arre-
tent point les progrcs de I'Evangile , parce que la parole
de Dieu ne peut elre liee ^. U declare que c'est ce qui le
porte a souffrir tout avec courage pour procurer aux elus
le salut et la gloire ^. II revient a I'exemple de Jesus-
Christ, et il declare que c'est une verite ires certaine que
si nous avons part aux souffrances de Jesus-Christ , nous
aurons part a sa gloire *. 11 ajoute que si nous le renon-
cons , il nous renoncera; et que si nous lui sommes infi-
deles, il ne laissera pas de demeurer fidele dans ses pa-
roles , en faisant tomber sur nous I'effet de ses menaces ^.
11 exhorte son disciple a annoncer ces verites, et a re-
primer ceux qui s'amusent a de vaines et pernicieuses dis-
putes de paroles^. Il I'exhorte a bien dispenser lui-meme
fa parole de la verite ''. 11 lui recommande encore de re-
primer les discours vains et profanes , dont il lui repre-
sente les progres et les effets funestes ^. 11 rassure son
disciple en lui faisant remarquer qu'au milieu de ces maux
le solide fondement de Dieu, c'est-a-dire son decret
eternel et invariable en faveur de ceux qu'il a choisis , de-
meure ferme , ayant pour le sceau authenlique de sa fer-
mete la prescience infaillible de Dieu , qui connott et dis-
cerne sans se tromper ceux qui lui appartiennent ; etpour
le sceau de sa notoriete et de sa manifestation a I'egard de
chacun de nous, la fidelite a s'eloigner de I'iniquite, selon
qu'il convient a quiconque porte le nom de Jesus-Christ ,
et se declare son disciple ^. II explique la cause des pro-
gres de I'erreur, par la comparaison qu'il fait entre I'E-
glise remplie de bons et de mechans , d'elus et de re-
prouves, et une grande maison ou se trou vent des vases
riches destines a des usages honnetes, et des vases vils
destines a des usages honteux'"; et il ajoute que quiconque
se gardera pur de I'erreur et de la corruption, sera re-
connu comme un vase d'honneur ^^ 11 exhorte son dis-
1 ^ 8, — 2 ^ g , — 3 ^ ig, Ideo omnia susdneo pivpier clecios, lit et I'psi
salutein consecjuantur quce est in Christo Jesu, cum gloria coelesti. —
•y^ ix.etii. — "f 12. et i3.— fi-jj- 14. — ^-j^rS. — ^i i(i.-i8. — '^ it().
Sed firmiim fundamentum Dei st-it, liabens signaculum hoc : Cognovit
Dominus qui sunt ejus : et, Viscedat ab iniquiiaie , omnis qui nominal
nomen Domini. ( Gr. wa? 6 &vop.a'Cwv to ovoaa XptaTCu.) Ce qui pourroit
signifier : omnis qui nominat se nomine Christi. — '" i^ 20. — *• ^ ai.
SUU LA ll'fipixRB A TIMOTHEK. 1 15
iplo a fuir les passions des jcunes gens , et lui nionlre ce
nil tloit suivre *. 11 lui present la manieredont il doit sc
>nduire envers ceux qui resistentala verite, et les motifs
le celte conduile ^.
II lui annonce ( chap, iii ) que dans les derniers jours ,
il y aura des temps fachcux et pleins de perils pour Ic
salut, parce qu'il s'elevera alors des hommes vicieux et
corrompus en toules manicrcs \ U les caracterise par une
suite alTreuse de passions et dc vices *. Avant d'avoir
aclieve cettc peinture , il ordonne a son disciple , ou plulot
en sa personne aux pasteurs qui se trouveront en ccs
te.mps , de fuir ces homnnes pervers ^ ; et a la fin , il ajoute
pour la consolation des pasteurs et des fideles qui ^ivront
alors, que Dieu meltra des bornes aux progres de ces
hommes corrompus ^ , et qu'il rendra leur folie aussi ma-
nifeste que le fut celle des magiciens qui resislerent a
Moise ". Aux moeurs et aux sentimens de ces faux docteurs,
il oppose son exeraple comme un raodcle que doivent
suivre les ministres fideles ^ : il insiste parliculierement
sur les persecutions qu'il a eu a souffrir , et dont Dieu I'a
delivre ^ ; et il declare que la persecution est une epreuve
inevitable pour tous ceux qui voudront vivre avec piete
en Jesus-Christ '". Il annonce de nouveau les progres des
mechans ** ; et il exhorte son disciple a denieurer ferrae
dans les choses qu'il a apprises et qui lui ont ete confiees ,
sachant de qui il les a recues , c'est-a-dire d'un apotre
instruit par Jesus-Christ '^ ; tel est aussi le devoir de tous
les pasteurs , de conserver le depot precieux de la verite
qu'ils ont recu par une succession non interrompue qui
reraonte jusqu'aux ap6tres et jusqu'a Jesus-Christ. A cctte
chaine respectable de la tradition se joint I'autorite divine
des saintes Ecritures , sur quoi I'Apotre insiste' en rappe-
lant a son disciple la connoissance qu'il avoit des saintes
lettres '\ dont il releve aussitot I'excellence et I'utilite :
I'excellence, en ce qu'elles sont inspirees de Dieu ; ruliliie,
en ce qu'elles servent a enseigner la verite , a refuter I'cr-
reur , a corriger le vice , et a conduire dans la vertu '* :
*/22. — *y^a3. adfmem. — ^ ^ r . eti. Hoc autem scito (jnodin no-
vissimis diebus [h iT/ji-x'j; ritspxi?) instabunt lempora peri-:ulosa, etc. —
* ^ ?'~,^' — * ^ ^" ^* devita. — *y 9. Sed ultra ivon pixjicieiu. (Gr.
Sjlk ca wf oxiiJ-j-Jdiv e7:wT>.ci!;v.) — ^ Ibid. — * f lo. — * ^ it . — *" y 12. Et
omties (jitipie volunt vwere in Chn'sio Jesu, penecuu'onem patieiilnv. —
"y i3.^"V U.— •'>' i5.— i»y ifl.
a3. 10
l46 PREFACE SUR LA 11'= ^^PITRE, elC.
ulilile csseritielle pour un pasteur qui se formant a I'exer-
cice de ces quatre fonctions par I'etude des livres saints ,
devient parfait , et dispose a remplir tous les devoirs de
son ministere ^.
Apres cela, employ ant les expressions les plus fortes
( chap. IV ) , I'Apotre conjure son disciple d'annoncer la
parole du Seigneur en tout temps et de toutes manieres
sans se lasser ^. 11 predit un temps oil les hommes ne pou-
vant plus souffrir la saine doctrine , fermeront I'oreille a
la verite, et I'ouvriront aux fables de I'erreur ^. Enfin il
exhorte son disciple a remplir tous les devoirs de son mi-
nistere , qui consistent principalement dans la vigilance ,
la patience et le travail ^. Et terminant ainsi les instruc-
tions qu'il lui donne , il lui declare qu'il est comme une
victime pr^te a etre immolee , et qu'il ne lui reste plus
qu'a atlendre la couronne de justice qui lui est reservee ^.
II lui mande de venir le trouver au plus tot , et lui marque
I'abandon ou il se trouve ^. Il lui donne quelques autres
ordres ' , lui fait savoir I'etat de son affaire, et lui temoigne
sa vive confiance dans le secours du Seigneur **. II le prie
de saluer de sa part Prisque et Aquilas, et la famille
d'Onesiphore ; ce qui confirme qu'Onesiphore etoit mort^.
II lui marque encore quelques autres nouvelles *",le presse
de venir avant I'hiver *' , le salue de la part des fideles de
Rome ^^, lui souhaite I'assistance de Jesus-Christ, et sa
n grace a toute I'Eorlise d'Ephese i^.
Uemarques " o i _
gur le temps ^^ cophtc et le manuscrit alexandrm portent que cette
et le lieu ou lettre fut ecrite de Laodicee ; et le cophte ajoule qu'One-
cette epitre sime en fut le porteur. Mais tous les autres conviennent
quelle fut ecrite de Rome ; et on ne sait qui la porta a Ti-
niothee , si ce n'est que Ton puisse dire que ce fut Tychi-
que meme que saint Paul envoyoit a Ephese **, pour con-
duire cette Eglise pendant I'absence de Timothee. La fin
de cette lettre prouve qu'elle fut ecrite vers I'automne de
I'an 65 de I'ere chretienne vulgaire *^, environ neuf mois
avant le martyre de saint Paul dont la date la plus probable
tombe au 29 juin de Tan 66.
* -jf^ 17. etult. ■ — ^ -^ I. et2. — 3 f S. ei4. — ' ^ 5. Tu veiwigila, in
omnibus labora (gr. jcaxoiraflviaciv), opus fac ef^angelistce, minisierium tuum
imple. Le soh-ius esto, que la Vulgate ajoute,est un second sensdu motgrec
vr«pe, rendu auparavant itar vigila. — * -^ 6.-8, — ® ^ 9--ii- — ^ T^ 12. -i5. —
8 j 16.-18, — 9^19. — '"t^ 20. — "^21.— 12/W.— <='^22. etult.—
" a. Tim. :v. 12.— *» 2. Tim. iv. 6. 8. 21.
fut ecrite.
DEUXIEME EPITRE
DE SAINT PAUL
A TIMOTHEE.
CHAPITRE PREMIER.
Saint Paol saluc TimotWe, lui t^moicine «on affection, J'eiborle i raUumcr
CD Jui la grace de son ordiDalion,eta ne point rougirda Seigneur. II met sa
conBance en Jesus -Christ. Plusieurs rabandonneDt. II rend temoignage au
8el« d'Ondsiphore.
1. Paclus Apostolus Je-
su Christiper voluntaletti
Dei , secundum protnis-
sionem vitae qua est in
Christo Jesu :
a. Timotheo , charissi-
mo filio : gralia, miseri-
cordia, pax a Deo Patre ,
et Christo JesQ Domino
nostro.
3. Gratias ago Deo, cui
serrio a progenitoribus in
conscientia pui-a , quod
sine intermissionehabeain
lui memoriam in oratio-
nibus meis, nocte ac die:
4. Desiderans te ride-
1. Papl, apotre de Jesus-Christ,
par la Tolonte de Dieu , selon la
promesse de la vie qui esten Jesus-
Christ:
a. A Timothee, son fils bien-ai-
tne :'que Dieu le pere et Jesus-
Christ notre Seigneur vous don-
nent la grace, Ja misericorde et la
paix.
5. Je rends grace A Dieu, que je
sersdesmesancetres' avec une con-
science pure, dc ce que nuit et jour
je me souviens continuellenienl de
vous dansmespri^res;'
4. Et me representant vos lar-
y 2. C'est le sens dn grec.
-f 3. Que je sers des mes ancetres , c'est-a-dire le Dieu veritable que mcs
anc^tres ont senri dans I'altente du Messie promis, comme je le sers anres
raccomplissement de cette promesse, unique but de toutcs les proplielies.
y 3.-5. Gr. aulr. me souvenant contiauellement dc vous dans les priercs
que je lui adresse jour et nuit, me representant vos larmes , et desirant vous
voir, afin d'etre rempli de joie, et conservant le souvenir de cette foi, etc.
lis
Il« EPITRE DE SAINT PAUL A TniOTHKE.
mes, jo (loijirc vous voir, afin d'etre
rempli de joie, '
5. Dans le souvenir que j'ai dc
cettc foi sincere qui est en vous, '
qu'ont cue premiereincnt Loide
voire aieule, etEunice votrc mere,
ct que je suis aussi tres persuade
que vous avez.
6. G'est pourquoi je vous avertis
dc rallumer' ce feu de ia grace de
Dieu que vous avez repue par ['im-
position de uies mains. '
Rom.ym. i5. r,. Car Dieu nc nous a pas donne
un esprit de timidite , mais un es-
prit de courage , d'amour et de sa-
gesse. '
8. Ne rougissez done point de
notre Seigneur, que vous devez
confesser, ni de moi, qui suis son
captif: ' mais souffrez' avec moi
pour I'Evangile, selon la force que
vous recevrez de Dieu ,
g. Qui nous arachetes' et nous
a appeles par sa vocation sainte ,
Tic. ni. 5. non selon nos ocuvres , mais selon
le decret de sa volonte , et selon la
grace qui nous a cte donnee.en J6-
sus-Christ avant tous les sifecles,
1 0. Et qui a paru mainlenant par
I'avenement ' de notre Sauveur
re , mcmor lacrymarum
tuarum , ut gaudio im-
plear,
5. Rccordationem acci-
piens ejus fidei , quae est
in te non ficta, quae et ha-
bitavit primum in avia
tua Loide , et matre tua
Eunice : certus sum au-
lem quod et in te.
6. Propter quam cau-
sam admoneo te, ut re-
suscites gratiam Dei, quae
est in te per impositio-
ncm manuum mearum.
7. Non enim dedit no-
bis Deusspiritumtimoris,
sed virtulis , et dilectio-
nis, et sobrietatis.
8. Noli itaque erubes-
cere testimonium Domini
nostri , neque me vinc-
tum ejus : sed coUabora
fivangelio secundum vir-
tutem Dei :
9. Qui nos liberavit, et
vocavit vocatione sua
sancta , non secundum
opera nostra, sed secun-
dum propositum suum ,
et gratiam quae data est
nobis in Christo Jesu ante
tempora secularia :
10. Manifestata est au-
tem nunc per illuminalio-
i ^. Ayant aupres de moi une personne dont j'ai re^u des t^molgnages
d'amilie si sensibles, et qui montre une si grande Constance k souffrir.
■j^ 5. Cost le sens du grcc, ejus quai in te estjidei nonjictce.
f &. C'cst I'expresslon du grcc.
^ Ibid. De concevoir une nouvcUe fervcur pour annoncer la parole de Dieu
avec force et avec hardiesse.
■^ 7. C'est le sens du grec acofovtafAcii.
■^ 8. Elantdans les fers pour I'amour de lui.
Ibid. C'cst le sens du grec.
^ 9. Vulg. lilt, qui nous a delivrcs. Gr. lilt, qui nous a sauves.
■j- 10. C'est le sens du grcc qui peut se Iraduire a la Icttre : par la mani-
festation.
iiem Salvatoris iiostri Je-
sii Christi, qui destruxit
quidem mortem , illumi-
navit aulem \itam et in-
corruptioncm per Evan-
gelium :
1 1 . In quo positus sum
ego praedicator, et apos-
tolus, et magister gen-
tium.
la. Ob quam causam
rliara haec patior : sed
non confundor. Scioenim
cui credidi, et certus sum
quia potens est deposi-
tum meum servare in il-
ium diem.
i5. Formam habe sa-
norum verboruui , qua; a
rae audisti in fide et in
tlilectione in Christo Jesu.
14. Bonum depositum
custodi per Spiritum
Sanctum , qui habitat in
nobis.
i5. Scis hoc, quod
aversi sunt a me omoes
qui in Asia sunt, exquibus
est Phygellus, et Hermo-
genes.
16. Del mlsericordiam
Dominus Onesiphori do-
mui : quia saepe merefri-
geravit, etcatenammeam
non erubuit :
17. Sed cum Romam
IIIAPIIHE I. lig
Jesus - Christ , qui a dctruit la
mort, ' et a d^couvert an monde ,
par I'Evangile , la vie et riaconup-
tibilile. '
11. C'est pour cela ' que j'ai ete '• Tim.w.',
etabli predicateur, apotre et maitre
des nations :
13. Et c'est aussi ce qui m'a at-
tire les maux que je souflre; mais
je n'en rougis point; car je sais a
qui je me suis confie:' et je suis
persuade qu'il est assez puissant
pour me garder mon depot jusqu'u
ce grand jour. '
i5. Proposez-vous pour modele
les saines instructions que vous avez
entendues demoi, touchant la foi
el la charite ' qui est en Jesus-
Christ. ^^
14. Gardez, par le Saint -Esprit
qui habile en nous, rexcellent de-
pot' qui Tous a ete confie.
ID. Vous savez que tousceux qui
sont en Asie ' se sont eloignes de
moi : Phygelle et Hermogine sont
de ce nombre.
16. Que le Seigneur repande sa /n/r.-jv. 19.
misericorde sur la famille d'Onesi-
phore, parce qu'il m'a souYent sou-
lage, el qu'il n'a point rougide mes
chaines;
17. Maisqu'etant venu a Rome,
y 10. En se ioumeltant lui-meme a la morl.
Hid. Qu'il destine a seselus.
y 1 1 . Pour annoncer aux hommes cette vie incorroplible.
y 12. Lorsqoe j'ai mis ma confiance en J^sas-Christ.
Ibid. Auquel j'espere recevoir de lui une Tie glorieuse et immortelle ,
pour cette vie languissante et p^rissable que je remets aujourd'hui entre scs
lunins, et que je sacrifie pour lui.
y i3. Aulr. en conservant\3t. foi et la charite, etc
y 14. La saine doctriDC.
y t5. On pcJt-^r^ *''r.^ ccwx q".! sont d'Asie.
lOO
H8 EPllRK DK SAli:«T PAUL A TIMOTHEE.
il m'a cherchd aveo grand goin, et il venisset, soUiclte me qua;-
iii'a trouve.
18. Que le Seigneur lui fasse la
grace de trouver misericorde de-
vantlui," en ce jour, 'car vous savez
mieux que personne combien d'as-
sistances il ui'a rendues h Ephfese.
eivit, et uivenit.
18. Det illi Domlnus
invenirc nibericordiani a
Domino in ilia die. Et
quanta Ephesi ministravit
mihi, tu melius nosti.
■)^ 18. On croit qu'On&iphore otoif mort, parceque ci-dessus -f- i6, et ou
chap. IV. ■)?■ 19, saint Paul ne parlo que de sa famille.
Ibid. Au jour out II viendra juger le mondo , el rendre a chacun selon scs
ccuvres, pour le rccompenser de la chjirito qu'il a euc pour moi, et donl vous
pouvez rendre tdraoignage.
CttAPlTRE II.
DepAt de doctrine. Vie laboriense des ministrcs evangel iques. Souffrir avec
Jcsus-Christ pour regner avec lui. Vaines disputes. Doctrine contagieuse.
Solide fondemcntde Dieu. Ya?es d'bonpeur et d'ignominie. Fuir les con-
testations.
1. FoHTiFiEz-vors done , 6 mon
fils, par la grace qui est en Jesus-
Christ :
2. Et gardant ce que vous avez
appris de moi devant plusieurs t.e-
moins, donnez-le en depot a des
hommes fiddles , qui soient eux-
raemes capables d'en instrutre d'au-
tres.
3. Travaillez' comme uti bon
soldat de Jesus-Christ :
4. Celui qui estenrole au service
de Dieu , ne s'embarrasse point
dans les affaires seculieres, pour ne
s'occuper qu'a plaire u celui a qui
il s'estdonne.'
5. Celui qui combat dans les jeux
1. Tu ergo, fili mi,
confortare in gratia qua;
est in Christo Jesu :
2. Et qua; audisti a me
per multos testes , ha;c
commenda fidelibus ho-
minibus, qui idonei erunt
et alios docere.
5. Labora sicut bonus
miles Christi Jesu.
4. Nemo militans Deo
implicat se negotiis secu-
laribus : ut eiplaceat, cui
se probavit.
5. Nam et qui certat in
f 3. Selon le groc : souffrez constamment toutes ies peines de votre minis-
tere.
rassc point 1
qui I'a enr61e.
j. Le grec lit: Celui qui est enriAi au service d'un prince, ne s'embar-
point dans les emplois dela vie civile , afin d'etre prdt a satisfaire celui
CHAPITRE II.
161
agoaO) non coronatur nisi publics, n'cst couronn6 qu'apres
li'gitiine cerlaverit. avoir combattu selon la rfegie des
combats ;
6. Laboranleui agrlco- C. Un laboureur qui a bien tra-
lain oportet primum de vaille doit avoir la premiere part
Iructibus percipere. dans la rccolte des fruits. '
7. Intellige quae dico : 7. Comprenez ce que je dis; car -
.labit enim tibi Dominus le Seigneur vous donnera I'intelli-
iu omnibus intellectum. gence en toutes choses.'
8. Memor esto Domi- 8. Souvenez-vous que notreSei-
num Jesum Chrisum re- gneur Jesus-Christ, qui est ne de
gurrexisse a mortuis ex la race de David , est ressuscite
d'entre lesraorts, ' selon I'Evangile
que je preche,'
g. Pour lequel je souffre beau-
coup de maux, ' jusqu'a etre dans
les cbaines corame un malfaiteur;
mais la parole de Dieu n'est point
enchainee.
10. C'est pourquoi j'endure tout- '
neo propter electos, ut et pour I'amour des elus, afin qu'ils
ipsi salutem consequan- acquierent aussi bien que nous le
tur, quae est in Christo salut qui est en Jesus-Christ, avec
Jesu, cum gloria coelesti. la gloire du ciel. '
11. C'est une verite tres assuree,
que, si nous mourons avec Jesus-
Christ , nous vivrons aussi avec
lui;
12. Si nous souffrons avec lui , Mattx. 33.
nous regnerons aussi avec lui; si Marc. rm. 3 S
nous le renonfons, il nous renon-
cera aussi;
i3. Si nous lui sommes infidfeles,' Rom. m. 3.
semine David, secundum
Evangelium ineum,
9. In quo laboro usque
ad vincula , quasi male
operans : sed verbum Dei
uon est ailigatum.
10. Ideo omnia susti-
1 1. Fidelis sermo :
Namsicommortuisumus,
t convivemus :
12. Si sustinebimus ,
el conregnabimus : si ne-
gaverimus, etille negabit
nos :
i3. Si non credimus ,
fGthe v. deCarrieres traduit : et qu'un labourenr doit premierement
traTailler, et ensuite recueillir les fruits de son travail. On a pretendu que
le grec pouvoit se prendre ea c« sens ; mais le grec ne s'y prete pas plus que
la Vulgate.
y 7 . Gr. autr, Comprenez bien ce que je vous dis ici, et non-seulement ce
(jue je vous dis ici; car je souhaite que le Seigneur vous donne Tintelligence
en toutes choses.
y 8. Gr. lilt. souvenez-TOus de Jesus-Christ, ^uz&to/it n£'de la race de
David, est ressuscite d'entre les morts.
Ibid. Lilt. Selon mon Evangile.
•j^ g. C'est le sens du grec.
i 10. Gr. litt. la gloire ^ternelle.
T 1 3 . Si nous abandonnons son ocuvre.
*5af
li'^ I^piinK Dli SAINT PALL A lIlttOTIlKE.
ii ne lalssera pas de demeurci- fi-
dele;'car il ne peut so deinenlir
lui-niGuie. '
14. Donncz cet avertissemcnt, et
prenez-en le Seigneur a tcinoin. '
Ne vous ainusez point' a des dispu-
tes de paroles, quinesont bonnes
qu'a perverlir ceux qui les ecou-
tent.
i5. Mettez-vous en etat de pa-
roitre devant Dieu comme un mi-
nistre digne de son approbation ,
qui ne fait rien dont il ait sujet de
rougir, el qui sait bien dispenser'
Ja parole de vcrite,
iG. Fuyez ' Ics entretiens rains
et proCanes, car its contribuent
beaucoup u iuspirer I'impiete : '
17. Et les discours qu'y tiennent
certaines gens sont comme une
gangrene ' qui repand insensible-
ment sa corruption. De ce nombre
sont Hjmenee et Philete ,
18. Qui se sont ecartes de la vi-
rile, en disant que la resurrection
est deja arrivee, ' et qui ont ainsi
renverse la foi de quelques-uns.
19. Mais le fondement de Dieu'
demeure ferme", ayant pour sceau
cette parole : Le Seigneur connoit
ceux qui sont a lui ; ' et cette autre :
ille fidelis permanet, nc-
garo seipsum non potest.
14. HytJC commone ,
tcstificans coram Domi-
no. Noli contendere ver-
bis : ad nihil enim utile
est, nisi ad subversionem
audientium.
J 5. SoUicite cura te-
Ipsum probabilem exhi^
bere Deo , operarium in-
confusibilem, recte trac-
taatem verbum vcritatis.
16. Profana autem, ct
vaniloquia devita : mul-
tuui enim proficiunt ad
impietatem :
17. Et sermo eorum ut
cancer serpit : ex quibus
est Hymcnajus , et Phile-
te s ,
18. Qui a verftate exci-
derunt , dicentes resur-
rectioncm esse jam lac-
tanij et subverlerunt quo-
rumdam fidem.
19. Sed firmum funda-
mentum Dei stat , babens
signaculum hoc : Cogno-
y 1 3. II saura bien I'accomplir sans nous.
Ibid. II operera par un autre moyen le salut de ses elus.
y 14. Commed'unev6ril6 incontestable.
Ibid. Gr. aulr. Rappelez cesclioses dans la memoiro desjideles; lesLon-
jurant devant le Seigneur de ne point s'amuser, etc.
ir i5. -C'est Je sens du grec.
y 16. Gr. autr. rcprimez.
Ibid. Aulrement el selun le grec : car ceur (juiL's tiennent, crohront de
plus en plus dans rimpii'to, et leur discours serout conirae, etc.
y 17. C'esl I'expression du grec : -Yayfoatva.
•j^ 18. Qu'elle s'esl faite dans notre banlcme, ou nous sommcs morts cl res
suscites avec Jesus-Christ ; qu'il n'y en a point d'autre a attendre.
^19. Son decret clerncl , sur lequel est fonde le salut de ses cIus.
Ibid. Malgre tons les efforts du demon.
Ibid. Et il nes'en perdj'A aucun. — Cette paivile c^t prise <ln livTc !,^ ^ ,.
bres,sYi. 5, scion la version des Septantc.
CMAIMTKE II. I 63
TilDoininusquisuntejus: Que quiconquc invoque le nom ilu
eU Uiscechit al) iiiiqiiilate, Seigneur ' s'eloigne do I'iniquile. '
ouinis qui uoininat no-
luei) Domini.
20. In iiiogna autcin
doiDO nort sulutn sunt
vasa aurea et argentea,
sed et lignea et ilctilia :
et quaedain quidem inho-
norem, quacdamautetn in
coDtutneliam.
2 1. Si quisergo emun-
daverit se ab istls , erit
vas in honoreni sanctifi-
catum, el utile Domino ,
ao, Dans une grande maison, il
n'y a pas seuleraent des vases d'or
et d'argcnt, mais aussi de bois et
terre ; et les uns sent pour des
usages honorables , et les autres
pour des usages honteux. '
a I. Si queJqu'un done se garde
pur de ces choses , ' il sera un vase
d'honneur, sanctifle , et propre au
service du Seigneur, ' prepare ponr
ad omne opus bonum pa- toutes sortes de bonnes oeuvres. '
ratum.
22. Juveniliaautemde- aa. Fuyez les passions des jeu-
siilcria fuge : sectare vero nes gens ; elsuivez la justice, la foi,
justitiam, fidem, cbarita- la charite et la paix, aveo ceux qui
ttm, el pacem cum iis qui invcquent le Seigneur d'un cceur
invocant Dotnlnum de pur.
corde puro.
20. Slultas autem et aS. Quant aux questions imper- r.T'iffi.i. -
iine disciplinaquasslioaes tinenles et inutiles , ' evilez - les , ^''<- "i> 9-
devila : sciens quia^ene- sachant qu'elles sont une source de
conlestalions.
24- Or, il ne faut pas qu'un ser-
teur du Seigneur dispute ; mais il
dolt etre modere envers tout le
omnes docibilem, patlen- monde, capable d'instruire, et pa-
tera, tient;'
a5. Cum modestia cor- aS. II doit reprendre avec dou-
ranl lites
34- Servum autem Do-
mini non oportet liligare,
ged mansuetum ess© ad
y 19. Grec : le nom de Jesus-Christ. Voyoz I'analyse.
Ibid. Cetle parole peut faire allusion'au texte'du livre desNombres , xti,
R^,cn sorle que les deux paroles rapportees ici seroieDt relatives Tune el
Tautre au m^me chapitre du texte de ^loise.
^"^ 50. Ainsi dans I'EgUse de Dieu il y a des dlus et des rcprouv^s. O^xt-
ferez Rom. ix. aa. a3.
j' 2.1. L'eloigne decee crreurs.
Ibid. Gr. lilt, du mailre.
Ibid. Au oontraire ceux qui les suivent, et qui se liyrenl 4 la corruption
de ieur cceur, el aux ^garemens de leur esprit, seronl dans la maison de Dieu
comniedes vases honteux.
y 23. Lilt. insens<5es el sans discipline , sans regie el sans discreiiott.
y 24. Grec : patient enrers les m<5tbans; ou, palient dans les maus.
1^4
n° KPilRK DE SAINT PALL A IIMOIUEE.
ccur ' ceux qui rcsistent i la verite,
dans resperance que Dieu pourra
leur donner un jour I'esprit de pe-
nitence pour la leur faire connoi-
tre,
26. Et qu'ainsi revenant de' leur
egarcincnt, ils sortiront des pieges
du dial)ie, qui les tient captifs pour
en faire ce qu'il lui plait. '
ripientem eos qui resis-
tant vcritati : nequando
Deus det illis poeniten-
tiara ad cognoscendam
verilatem ,
26. Et resipiscant a dia-
boli laqueis, a quo captivi
tenenturad ipsius volun-
talem.
f i5. C'est lesens du grec.
i 26. Gr. autr. lantque Dieu le lui permet.
CHAPITRE III.
Faux docteurs annoncds et caract^risds. II faut les fuir : leur progrcs aura des
Lornes. Saint Paul exhorte TImothee a suivre son cxemple, A souffrir la
persecution, i conserve rle depot de la foi, as'inslruire par I'ficriture.
1.7mm, IV. 1. i.Oa, sachezque dans les derniers
^.Pefr. III. ]3. jours , il viendra des temps fS-
lud. 18. cheux •
a. Car il y aura des horatnes
personnels, avares, ' glorieux, su-
perbes, medisans,' desobeissans i
leurs peres et a leurs meres, in-
grats , impies,"
3. Denatures, ennemis de la
paix,' calomniateurs, intemperans,
inhumains, sans affection pour les
gens de bien,'
4. Traitres, insolens, enfles d'or-
gueil , et plus amateurs de la vo-
lupte que de Dieu,
1. Hoc autem scito
quod in novissimis diebus
instabunt tempora peri-
culosa :
2. Erunt homines se-
ipsos amantes , cupidi ,
elati, superbi, blasphemi,
parentibus non obedien-
tes, ingrati, scelesli ,
3. Sine affectione, sine
pace , criminatores , in-
continentes, immites, si-
ne benignitate ,
4. Proditores, proter-
vi, tumidi, et voluptatum
amalores magis quam
Dei :
■j^ I . Dangereux pour le salut. C'est le sens du grec.
■jJ- a. C'est Ic sens du grec'dans les trois expressions.
)?■ 3 , Gr. autr. sans tendresse pour leurs pjvches , sans fid^Iile a leurs
promesses.
Ibid. C'est le sens du grec acpiXa-jafloi ; sans affection pour les gens do
bien, ou pour le bien.
CHAPITHE 111.
1^6
5. Habentes speciem 5. Qui auroDt unc apparence de
qiiideni pielalis, virtutem piete , niais qui en ruineront la
aulem ejus abnegantes. yerite et I'esprit. Fuyez done ces
J5t hos devita : personnes.
6. Ex his enim sunt, 6. Car de ce nombre sont ceux
qui penetrant domos, et qui s'introduisent dans les maisons,
caplivas ducunt mulier- ct qui trainent apres eux, comme
culas oneratas peccatis , captives , des femmes chargees de
qua; ducuntur variis desl- peches, et possedees de diverses
deriis : passions,
7. Semper discentes, et 7. Lesquelles' npprennent tou-
nunquam ad scientlam jours, et n'arrivent jamais' jusqu'ii
ventatis pervcnientes.
8. Quemadmodum au-
tem Jannes et Mambres
restiterunt Moysi : ila et
hi resistunt veritati , ho-
mines corrupt! meote, re-
probi circa fidem.
g. Sed ultra non profi-
cient : insipientia enim
eorum manifesla erit om-
nibus , sicul et Ulorum
fait.
10. Tu autero assecatas
la connoissance de la rerite. '
8. Car comme Jannes et Mam- Excd.vit.it.
br6s, * resisterent I'k Molse ; ' ceux-
cl do meme resistent a la verite. '
Ce sont des hommes corrompus
dans Tesprit , et pervertis dans la
Col,
9. Mais le progrfes qu'ils feront
aura ses bornes, car leur folic sera
connue de tout le monde , comme
le fut alors Celle de ces magiciens.
10. Quant k vous, vous savez
esmeam doctrinam , ins- quelle est ma doctrine, quelle est
tilutionem, propositum , ma mani^re de vie, quelle est la
fin que je me propose, quelle est
ma foi, ma tolerance , ' ma charite,
et ma patience;
11. Quelles ont ete les persecu-
tions et les afflictions qui me sont
arrivees, coinme celles d'Antioche,
£dem , longanimitatem ,
dilectiooem, patientiam,
11. Persecutiones, pas-
siones : qualia mihi facta
sunt Antiochise , Iconii,
et Lystris : quales perse-
cutiones sustinui , et ex d'Icone,'et de Lystres; combien
y :• L'expression de la Vulgate peut Aire «?qaivoque ; iDaiscelie du grcc
ne Test pas : discentes se rapporle a niulierculas.
Ibid. Gr. lilt, et ne peuvent jamais arriver.
Ibid. Etant irompees par ces imposleurs.
7 ^- Celebres magiciens d'Egypte. Ces noma ne se trouvent point dans
1 Ecrilure : on pense qu'ils avoient ete conserres par tradition.
Ibid. Devant Pharaon, opposant leurs prestiges a ses miracles.
Ibid. Lui opposant leurs illusions.
y 10. Lilt, ma longanimity.
1^ ri. C'est-a-dire d'Antioche de Pisidic. Act. xiu. 5o. m seqq.
i56
11^ EPiTRE DE SAINT PALL X TIMOIIILE.
grandes otit ete oes persecutions que
j'ai souffertes; et comment le Sei-
gneur m'a tire de toutes.
12. Car tons ceux qui veulent
vivre avec picte en Jesus-Christ,
seront persecutes.
i3. Mais les hommes medians et
les imposteurs ' se fortifieront de
plus en plus dans le mal, etant dans
I'erreur, et y faisant tombcr les
autres.
14. Quant a vous , demeurea
ferme dans les choses que vous
avez apprises, et qui vous out ete
confiecs, sachant de qui vous les
avez apprises ; '
i5. Et considerant que vous avez
ete nourri des votre enfance dans
les lettres saintes, qui peuvent
vous instruire pour le salut par la
tbi qui est en Jesus-Christ. '
16. Toute ecriture qui est ins-
piree de Dieu est utile ' pour
instruire , pour reprendre , pour
corriger, et pour conduire a la jus-
tice :
2. Pe//-. 1. 20. 17. Afin que I'homme de Dieu
soit parlait et dispose ii toutes
sortes de bonnes oeuvres.
omnibus eripuit me Do-
minus.
la. Et omnes qui pie
volunt vivere in Cbristo
Jesu , persecutionem pa-
tientur.
J 3. Mall autem homi-
nes, et seductores, profi-
cient in pejus, errantes,
et in errorem mitt(?ntes.
i/}. Tu vero permane
In iis quae didicisti, et
credita sunt tibi : sciens a
quo didiceris :
i5. Et quia ab inlantia
sacras lilteras nosti , quae
te possunt instrucre ad
salulem , per fidem quae
est fti Christo Jesu.
16. Omnis scriptura di-
vinitus inspirata, utilis
est ad docendum, ad ar-
guendum, ad corripien-
dum in justitia :
17. Ut perfectus sit ho-
mo Dei, ad omne opus
bonum inslructus.
y 1 3. C'est le sens du grels.
f 14. Vous souvenant que c'est d'un apotre instruil par la revelation de
Dieu, et par la Louche de Jt'sus-Clirist, de loutes les verltes de sa religion.
y^i5. G'cst-a-dire que lessainles ecritures de I'Ancien Testament appre-
naient aux hommes lanccessite de la foi en Jesus-Christ, commeclant le seul
par qui on put etre sauve.
i 16. Gr. aulr. Toute (kriturc est inspir^e de Dieu ct utile, etc.
CMAPIIRE IV.
107
CHAPITRE IV
DcToirs d'un evik[uc. Faux docteurs anaoac^s. Saint Paul prcdil sa mort
prochainc. II prie Timoihee devenir le trouvcr, et I'insiruit de sod etat
present. II (init pardes salutations-
1. TEsTiFicoa coram
Deo, et Jesu Christo,
qui judJcaturus est vivos
ct mortuos, per adven-
tutn ipsius, et regnum
ejus :
a. Praedica Terbum :
insta opportune , impor-
tune : argue , obsecra,
increpa in omni patientia
et doctrina.
3. Erit eniin tempus,
cum sanam doctrinam
non sustinebunt , <ed ad
sua desideria coaccrva-
bunt sibi magistros, pru-
rieotes auribu? :
4. Et a veritate quidem
aoditum avertent, ad fa-
bulas autem converten-
tur.
5. Tu vero Tigila, in
omnibus labora , opus fac
1. Jetous conjure donc'dcvanl
Dicu , et devant Jesus-Christ , ' qui
jugera les vivans et les morts dans
son arenement et dans I'etablisse-
ment de son regne,
2. D'annoncer la parole. Pressez
les hommes a temps et a contre-
temps; reprenez, suppliez, mena-
cez, sans vous lasser jamais de les
tolerer ' et de les instruire.
5. Car il viendra un temps oii
les hommes ne pourront plus souf-
frir la saine doctrine; au contraire,
ayant une extreme demangeaison
d'entendre ce qui les flatte , ils au-
ront recours a une foule de doc-
teurs propres a satisfaire leurs de-
sirs :
4. Et fermant I'oreille a la verite,
ils I'ouvriront h des fables.
5. Mais pour vous, veillez con-
tinuellement, ' souffrez constam-
y^ I. Cette particule est dans le greo.
Hid. Grec : le Seigneur Jesus-Christ.
Ibid. Autrement et selon la Vulgate i la letlre : je vous en conjure par son
avenement .^forieiMr (le grec a la letlre , sa manifestation), et par l'e'uil>lisse-
ment de son regne.
y 2. C'est le sens du grec qui signifie k la lettre : avec toute sorte de lon-
ganimite ou de tolt'rance.
•^ 5. AGn d'arr^ter le cours de ces desoidres. — Gr. autr. gardez-vous de
I'enivrement de lame. C'est ce que la Vulgate exprime k la fin du verset par
ces mots, Sobrius esto , qui ne sonl pas dans le grec , ou plut6t qui ne sont
qu'une seconde version de I'expression qui est ici dans le grec.
58
11« EPilRE DE SAINT PALL A TIMOTHEE.
merit toutes sortes de travaux : '
laites la charge d'un e^angeliste ; "
remplissez tons les devoirs de vo-
ire ininistere. Soyez sobre. '
6. Car pour moi, je suis comrne
une victime qui a deji repu I'asper-
sion pour gtre sacrifice ; ' et le
temps de ma mort ' s'approche.
7. J'ai bien combattu, )'aiachev6
ma course; j'ai garde la fot.
8. Au teste, lacouronne de jus-
tice m'est reservee, couronnc que
le Seigneur, comme un juste juge,'
me rendra en ce grand, jour; ' et
non-seulement i moi , mais encore
a tous ceux qui aiment son avene-
ment. ' Hatez-vous de venir me
trouver au plus tot;
9. Car Demas m'a abandonne,
s'etant laisse emporter a I'amour
du sifecle ; et il s'en est alle a Thes-
salonique;
10. Crescent en Galatie; ' Tite
en Dalmatie.
Col. IV. t4t 11. Luc est seul avec moi. Prenez
Marc " avec vous , et I'amenez, car
il pent beaucoup me servir pour le
ministere de I'Evangile.
evangelistaj, mlnisterium
luum jmple. Sobrius esto.
6. Ego enim jam deli-
bor, et tempus resolutio-
nis meae instat.
^. Bonum certamen
certavi, cursum consum-
mavi, fidem servavi.
8. In reliquo reposita
est mihi corona justitiaj,
quam reddet mihi Domi-
nus in ilia die Justus ju-
dex : non solum aulem
mihi, sed et iis qui dili-
gunt adventum ejus. Fes-
tina ad me venire cito.
g. Demas enim me re-
liquit, diligens hoc secu-
lum , et abiit Thessaloni-
cam :
10. Crescens in Gala-
tiam, Titus In Dalma-
tiam.
11.
solus.
Lucas est mecum
Marcum assume ,
et adduc tecum, est enim
mihi utilis in minisle-
rium.
f 5. C'est'le sens da grec.
Ibid7 Qui annoDce I'Evangile dans toute sa purete.
Ibid. Sobrius esto, n'est pas dans le grec. ,
f 6. Chez les anciens Grecs et Romains, on rcpandoit des grains et des li-
queurs sur la victime avant I'immolation.
Ibid. Ou plus litleraleraent: de ma delivrance, du moment oil mon ame
tera degagee des liens du corps.
•^ 8. Qui donne a cliacun ce qui lui appartient.
Ibid. Oil il viendra juger le monde.
Ibid. Qui s'y preparent par toutes sortes de bonnes auvres. — Gr. Hit. sa
manifestation,;
■^ to. Aulr. en Gaule. Le nom de Galatie, dans lesauteurs grecs, se prend
sonvent pour la Gaule. Plusieurs I'entendent ici en ce sens.
■j> i I . C'est Jean Marc, cousin de saint Barnabe, dont il est par!«5 dans les
Actes, xii.etsuiv.
\}. Tychicutn autem
inisi Kphesum.
1 3. Penulam quam re-
liqui Troade apud Car-
puiTi,veniensafler tecum,
ct libros, maxime auteui
membranas.
14. Alexander aerarius
imilta mala mihi ostendit :
rcddet illi Dominus se-
cundum opera ejus :
i5. Quem et tu devita ,
valde enim restitit verbis
nostris.
16. In prima mea de-
fensione nemo mihi af-
fuit : sed omnes me dere-
liquerunt : non illis impu-
tetur.
17. Dominus autem
mihi astitit. et conforta-
vit me , ut per me praedi-
catio impleatur, et au-
diant omnes gentes : et li-
beratus sum de ore leonis.
18. Liberavit me Domi-
nus ab omni opere malo,
et salvum faciet in reg-
num suum coeleste : cui
gloria in secula seculo-
rum. Amen.
19. Saluta Priscam et
Aquilam, et Onesiphori
domum.
20. Erastus remansit
Corinthi. Trophimum au-
tem reliqui infirmum Mi-
leti.
CHAriTRBIII. 169
12. J'ai aussl envoys Tychique a
Epht'se.
i5. Apportez-moi en venant Ic
manteau que j'ai laisse <i Troade
chez Carpus, et mes iivres , et sur-
tout mes papiers. '
14. Alexandre rouvrieren cuivre
in'a fait beaucoup de mal : le Sei-
gneur lui rendra selon ses ceu-
vres. '
i5. Gardez-vous de lui, parce
qu'il a fortement combattu la doc-
trine que nous enseignons.
16. La premiere fois que j'ai de-
fendu ma cause,' personne ne m'a
assiste;mais tous m'ont abandon-
ne. Je prie Dieu de ne leur point
imputer.
17. Mais le Seigneur m'a assiste,
et m'a fortifie ' aOn que j'achevasse
la predication de I'Evangile , et que
toutes les nations I'entendisseut :
et j'ai ete delivre de la gueule du
lion. '
1 8. Le Seigneur me delivrera *
de toute action mauvaise, et me
sauyant, me conduira dans son
royaume celeste. A lui soit gloire
dans les siecles des siecles. Amen.
19. Saluez Prisque et'Aquilas, et
la famille d'Onesiphore. Supr. i, 16.
20. Eraste est demeure A Corin-
the. J'ai laisse Trophime malade a
Milet.
y i3. Litt. mes parchemins. \oyez la Dissertation sur la mau'ere ct la
forme des Iivres anciens torn. xi.
■j^ 1 4 . II prWit ce qui lui arrivera sans le lui soubaiter.
y 16. Que j'ai comparu devant le tribunal de I'empereur.
y 1 7 . Quelques-uns expliquent I'expression, Dominus mihi astitit, comme
si cela signifioit : le Seigneur m'a apparu.
Ibid. C'est-A-dire de la fureur de Neron.
i 18. C'est le sens du grec : Uberabit.
l6o lie EptlRE Dli SAINT I'Al L A TIMOTHI'E, CtC.
a I. Festina aiilc hie-
mem venire. Saliiliint te
EiibuluSj, ct Piidens, ct
Linus, el Claudia, ct fra-
tres omnes.
22. Que le Seigneur Jesus-CIiiist 22. Dominus Jesus
soit avec votre esprit. La grace soit Christus cum spiritu tuo.
avec vous. ' Amen. Gratia vobiscum. Amen.
21. Iiritez-vous de vcnir avant
I'hiver. Eubule , PucLent , Lin ,
Claudie, et tons les freres ' vous
saluent.
■jf- 21. Les fidelcs.
■jj^ 22. Plusieurs anciens lisent : la grace soit avec nou».
Les exemplaires grecs portent a la fin de ccltc cpitre : La secondo (^pUre i
Timolliee, ordonne premier eveque de I'Eglise d'EpIiese , a 6tii ccrile dc
Rome., lorsque saint Paul y parut devant Neron pour la seconde fois.
PHEFACE
SUR L'EPJTRE A TITE.
TiTE etoit gcnlil ot incirconcis ' ;on ne sail pas a quelle R* maniiies
occasion il s'allacha a saint Paul ; mais ce qui est certain , sui Tiie, a
c'cst que cct apolre se scrvit do lui trcs utilcment pour !e 'I"' '^<^"'^^f*''
j^ouvernemcnt de I'Es^lise. II le mena avee lui a Jerusalem s[;c.Quellerut
pour soulenir la liberie de I'Evangile contrc les partisans I'occasion de
de la circoncision ^. II I'envoya a Corinthe pour remedicr '^ei'^ epHrp
a quelques desordrcs qui etoient dans cette Eglise^ , et en- 1"5' '''^ *^*'*^
core uue seconde lois pour y porter sa seconde lettre et ^^^'' '
prendre soin de la collectc qui devoit s'y faire pour les fi-
dcles de Judee ^. Saint Paul apres son premier voyage de
Rome, ayant etc mis en liberie, en I'annee 63 de Jesus-
Clirisl , revint en Orient ; il precha , a ce qu'on croit , dans
rtlc de Crete, aujourd'hui appelee Candie , et y jeta les
fondemens de la loi ^. II n'eut pas le loisir d'y demeurer
assez long-temps pour donncr an.\ Eglises toutes les ins-
tructions necessaires , ni pour etablir dans toutes les villes
des pretres pour les gouvcrner. II y laissaTite son disci-
ple , I'ordonna eveque , et lui donna commission de sup-
pleer a ce qu'il n'avoit pu faire par lui-merae ; apres quoi
il passa apparcmment dans la Judee , coiumc il I'avoit
promis aux Hebreu\ dans la lettre qu'il leur ecrivit ''. iT
revint ensuile en \sic ' , d'ou il se rendit en Macedoinc **.
11 rcsolut de passer I'hiver a ^'icopole ^ , villc dc Thrace ,
a 1 entree dc la Macedoine, suivant les peres grecs, ou a
^iicopole , villc d'Epirc, sur le golfe d'Ambracic, seloa
saint Jerome ct la plupart des nouveauv critiques. 11 etoit
deja a Nicopole , ou plulot il etoit en chemin pour v aller ,
loisqu'il ecrivit a Tite. Ce fut pour lui ii^ander de venir le
trouver '^' ; mais en meme temps il lui donnc , commc :i
' Gal. II. 3. — - Gill. 11. I. — ' 2. Cor. vir. 6. elseqij. xii. i3. — ':j. Cot\
vn. 6. — ' Tit. I. 5. — * Ilebr. xiii. 23. — ^ a. Tim. iv. i3.' — ^ Phili'pp. ii,
a. -» Tit.xu. I? -'»//>.;/.
25. I I
i6:
PREFACE
Tiniolhee , plusieiirs instructions touchant les fonctions de
son minist^re.
,j f [[® Saint Paul s'annonce ici comme serviteur de Dieu ct
. e i,pi r . gp^^j,g ^g Jesus-Christ ( chap, i ) , et il marque pour la fin
de son apostolat la foi qu'il devoit precher aux elus dc
Dieu^ ; car encore que plusieurs autres aient part a la
parole et aux autres traces que Dieu fait aux hommes ,
c'est neanmoins pour les elus que tout se fait dans 1 EgUse ,
aussi bien que dans le monde. II fait consisterceite foi dans
la connoissance de la verite ^ ; mais comme la philosophie
et la loi de Moise faisoient aussi connoitre la verite en leur
manicre , il designe cette connoissance qui vient de la foi
par deux caract^res qui la dislinguent de I'une el de
I'autre : dela philosophie , parce que la foi donne une con-
noissance qui est selon la piete ^ , c'est-a-dire qui a pour
finle vrai cuUe de Dieu , au lieu que la philosophie paienne
ne regardoit que les verites naturelles et les devoirs civils ;
de la loi de Moise , parce que ce culte de la foi est fonde ,
non sur la promesse des biens temporels, que les Juifs
charnels avoient principalement en vue , mais sur I'espe-
rance de la vie eternelle , que Dieu qui ne pent mentir
nous a promise et destinee avant tons les siecles •*. Et pour
donner plus d'autoriie aux reglemens qu'il doit etablir
dans cette epitre, il ajoute que cette promesse eternelle
nous a ete signifiee en son temps par la predication de
I'Evangile qui lui a ete confiee par I'ordre de Dieu notre
Sauveur ^. 11 termine cette inscription en saluant Tite , et
lui souhaitant la grace et la paix ^. II lui rappelle d'abord
les ordres qu'il lui a donnes touchant les deux objets prin-
cipaux du ministere qu'il lui a confie en le laissant en
Crete ; I'un , d'y regler ce qui restoit a y regler ; I'autre ,
d'y etablir des pretres ou des eveques ^ De la il prend
occasion de lui exposer les qualites que doit avoir celui
qui est choisi pour etre eleve au sacerdoce ^. Et comme le
sacerdoce etoit dans ces premiers temps un degre qui con-
duisoit souvent a I'episcopat, il passe aussit6t aux devoirs
' y^ I . Paulus seivns Dei, apostolus autem Jesu C/irisli, secundum Ji-
dem electorum Dei. — * Ibid. Secundum fidem electorum Dei, et agniiio-
nem veritatis. — ' Ibid. Qnce secundum pietatem est. — * -^ 7.. In spem vitce
cetcrnce, quam promisit,qui non meniitur Deus, ante tempora secularia. —
*)f 3. Manifesta\'it autem tempoiibtis suis verbum suum in prcedicatioiie
quce credita est mihi .secundum prceceptum Salvatoris nostri Dei — * ^ 4. —
'-j^ 5. — " if 6.
SLR l'epitre a the. |63
des ev^ques , et entre sur cela dans un plus grand detail '.
En finissant il insiste sur la capacile necessaire pour con-
vaincre ceux qui s'opposent a la saine doctrine ; ce qui lui
donnelieu des'elever contre les faux docteurs qui se trou-
voient dans cette ile , el qui etoient principalement des
Juifs zcles pour les observances legales ; il prcscrit a son
disciple de lour fermcr la bouche ^. 11 caracterise ensuite
le naturel vicieux des peuples dc cette ilc , et il ordonne a
son disciple de les reprendre fortement , afin qu'ils s'atta-
chent a la purete d« la foi, et qu'ils n'ecoutent point les
faux docteurs ^, 11 refute en passant ces faux docteurs sur
ce qui regarde I'abstinence de certaines viandes comnie
impures * ; et il les caracterise comme des gens qui , fai-
sant profession de connoitre Dieu, le renoncent par leurs
ocuvres , et de qui on ne pent attendre aucun bien taudis
qu'ils persev^rent dans leurs dispositions *.
Apres cela il prescrit a son disciple ( chap, ii ) la saine
doctrine qu'il doit enseigner pour regler les moeurs de
chaque condition ^. 11 marque les devoirs des personnes
agees de I'un ct de I'autre sexe'. II confie aux femraes
sigees le soin de la conduite des jeunes feraraes , dont il
prescrit aussi les devoirs ^. II laisse a son disciple le soin
des jeunes homraes , dont il reduit les devoirs particuliers
a celui dune raodeste et sage retenue^. II I'avertit de se
rendre lui-meme I'exemple des autres par toufes sorles de
bonnes oeuvres ; d'observer dans ses instructions une in-
tegrite exempte de toute erreur , et une gravite sans me-
lange de choses vaines ; et de veiller en toute occasion sur
ses paroles, en sorte qu'elles soient toujours saines et irre-
prehensibles ^*'. II vient ensuite aux devoirs particuliers
des esclaves*'. II pouvoit sembler que les esclaves, quisont
Ja demiere condition des hommes , ne meritoient pas
qu'il s'abaissat ainsi jusqu'a eux dans le reglement des de-
voirs des fideles ; mais il declare que la grace de Dieu notre
Sauveur a paru a tous les hommes, de quelque condition
qu'ils fussent; et il marque tout ce quelle a fait pour nous'^.
L'Ap6tre renferme ici en quatre versets les plus grandes
verites de la religion, et pour ainsi dire I'abrege-de tout
* 1^7.-9- — 'yro.ef ii. — '^".-14.— i* 71 5. — * -^ i&.etuU.—^-^ i.
— T y a. et 3.—' y 4. et 5.— » -^ 6.— »" r 7- « 8.—" y 9. el lo.— 'S-^n.-
1 4 . Apparuit enim gratia Dei Salvatan's iioslri omnibus liominihus (iraoiv
iv6p«iiici;), erudiens nos, etc.
Ic christianisme ct de loulc la morale cranf^clique ; car
tout consisle dans reconomie dcs dcu\ avenemcns de
Jesus-Clirisl distingues ici : I'un d'abaissement cl dc soul-
frances , deja accompli ; I'aulre , de gloirc et de puissance,
que nous altcndons : le premier, pour nous rendre saints,
en nous apprenant la loi dc Dieu, nous la faisant aimer
par sa grace, et nous separant pour cela du monde et ilu
peche ; le second , pour nous rendre heureux. , en nous
unissant a Dieu, en nous consommant dans sa gloire , et
en perfectionnant en nous la charite par la destruction dc
toute cupidite. La grace de Dieu aparii, dit I'Apotre ' ;
la loi a ete donnee par Molise ; la grace a ete laite par Jesus-
Christ. 11 est lui-mcme la grace substancielle, essenticUe
et divine ; la splendeur de son Pere et son image eternelle,
emanee de lui comme sa bcaute et I'eclat de sa gloire ; le
premier don gratuit fait aux pecheurs , qui comprcnd et
dou dcrivent tous les autres ; la beaute , la perihelion et la
grace par laquelle est agreable a Dieu tout cc qui lui est
agreable. La grace de Dieu notre Sauveur 2, non grace
du Createur donnee a Adam , et qu'il a perdue en se per-
dant lui-meme ; mais grace du Sauveur , grace de redemp-
tion , de reparation , de guerison et de salut , qui se con-
serve etse sentient ellc-meme , en nous soutenant et nous
sauvant. Ou , selon le grec , la gbace salut atre df. Dieu '.
La loi est une grace, et une grande grace ; mais par elle-
meme elle est infructueuse pour le salut ; et elle est une
loi de mort et de condainnation, si la grace vivifiante dc
Jesus-Christ, cette grace salutaire qui opcre le salut, ne
raccompagne point. La grace de Dieu a paru * ; le Verbe
de Dieu, sa grace, son image et sa beaute invisible, le
Sauveur si long-temps desire , si long-temps attefidu , a
paru au monde , s'est rendu visible par Tincarnation : la
grace du Sauveur, cachee sous les ombres de la loi, et
donnee a plusieurs avant la loi et sous la loi durant quatre
mille ans , est rcpandue plus abondamment au temps de
I'Evangile, el manifestce clairement en Jesus-Christ. La
grace de Dieu (ipara a tous les hommes ^. La loi de MoJfse
n'etoit que pour un seul peuple, et pour un temps limile ;
!a loi et la grace du nouvcau testament sont pour tous les
' tJ- ( I . Crratia Dei. — "■ Ibid. Gratia Dei Sabaloiis noslri. — « A x«?'?
Tou 0£ou r owrrif ic;. Gmu'a Dei saltttaris. — * Ibid. Jpparuit. — ^ Ibid. Otn-
nibushominibus,-KOL^vt avOpcdicot;.
SLU l/l^PITRB \ HIE. I (Ji
Uuinines Uc toulcs Ics nations ct de tous Ics si6clcs , snns
t'M'oplion lie scxt; , d'ages etde conditions. 11 n'y a point
ini autre livangile pour les riches et les grands du nionde ,
I on aiiire }>our Ics ])auvrcs et la lie du peuplc : tons
.(iitiajucme loi, les nieiues obligations de renoncer au.v
desirs du siccle, de garder la sobriete , la justice , et les
lois tie la religion , comme tous ont le in6mc Dicu , le
incuie Sauveur, et les menics prdniesses. Et ei.i.e nols a
vrrr.is *. ISouveau niaitre , nouvellc ecole , nouvelles le-
mons, nouvcllc maniere d'cnseigner, nouvelles graces,
nouvelles esperances, tout estnouvcau en Jesus-Christ. 11
Irappe les sens par sa parole et par ses exemples ; et il
louche el enleve le cocur par sa grace. 11 n'appartient qu'a
clui (|ui est lui-nieme la parole , la verite , la luniiere, la
-cience , et limago subslanticlle de son Pere, et qui ne
respire eternellenicnt avec lui que la charite , de parlor a
des cu'urs qui ne sont faits que pour la verite el pour la
« harile. iNi Moise , ni les prophetes , ni les apotres memes
u'ont pu cnscigner les honimes que par le son ou I'ecriture
exlcrieure des paroles ; la maniere d'cnseigner du Sau-
veur est de porter ia iumierc de la verite dans les espriis,
li en repandrc Tamour dans le cocur, et d'y ecrire sa loi
!vce le doigt de Dieu qui est le Saint-Esprit, et par I'in-
lusion de la charite meme. Elle nous a appris qle reno.n-
TANT , etc. ^. La premiere lecon de .lesus-Christ , et la
;i'ace propre du christianisme , sont une lecon et une
-,race d'abnegalion et de renoncement , et dune circonci-
sion interieure de lout ce qu'il y a en nous de vicicux , de
dercgle et de corrompu par la generation d'Adam , pour
idherera ce que le Sainl-Esprit a fait en nous par noire
regeneration en Jesus-Christ. C'est a cetle condition que
nous somraes entres dans la I'amille et dans le corps de .Je-
sus-Christ. Ellenous a appris que renoncant al'impiete, etc. ^.
Nousnaissous impies, puisque nous naissons ennemis de
Dieu , attaches aux creatures comme des idolalres , et dans
I'oubli etl'ignorancedenos devoirs en vers noire Crealeur :
le peche nous plonge de nouveau dans rimpiele, puisque le
pecheur, en meprisanl la loi, les menaces et les promessesde
son Dieu, ne cherchequ'en lui-meme, sans y penser, la regie
de sa vie, le principedubien , et la source de son propre
bonheur. Elk nous a appris que rcnonrant a I'impicU et aux
' r 12. Ei-uditns 1WS — - Ibid. Ui abncgantcs. — * Ibid. Impieiatem.
1 66 Pli£FA£E
PASSIONS Mo?«DAinES , ctc. *. Non 3 I'usage modere , mais a
I'usage et aux desirs deregles des choses du monde : Jesus-
Christ ne nous cnseigne pas seulement a renoncer a la
oi'uaute , a I'impiete, a I'orgueil^ a I'envie, et aux vices
honteux ou grossiers, mais aux passions du siccle ,«c'est-
a-dire a tout ce qu'on a d'atlachement et de passion au
luxe des habits et des ameublemens , aux delices de la ta-
ble , a la magnificence des maisons , aux ajustemens super-
flus, aux ornemens de la vanite, al'amour deregle et ex-
cessif de cette vie mortelle, de la reputation, du faux
honneur et des autres choses du siecle , commc il arrive
quand on en jouit , non par necessite et par rapport au
siecle a venir, mais par I'amour du plaisir present , en
quoi consiste la cupidite. Que renoncant a I'impiele et aux
passions mondaines , nous devons vivre dans le siecle pre-
sent, etc.^, vivre dans le sieete comme dans un exil ; il ne
fout pas jouir du siecle comme de sa patrie , ni s'attacher
a la vie par le plaisir , mais la souffrir par la patience ; il ne
faut pas la passer a se divertir, mais I'employer a faire pe-
nitence, a s'acquiter des devoirs de son etat, et a se rendrc
digne d'une vie meilleure et eternelle. Qiu nous devons
vivre dans le siecle present ky%c temperance^; sobrement ,
avec mesure, en nous renfermant dans les bornes de la
necessite , dans les regies de Tutilite moderee , et dans la
fin de la charite. Le pecbe nous a prives de tons les droits
que nous avions a I'usage des creatures, qui ontete confis-
quees a la justice de Dieu : Jesus-Christ nous en a rachete
I'usage necessaire; hors cela c'est une usurpation du pe-
cheur, et une espece de revolte contre la justice de Dieu.
Que nous devons vivre dans le siecle present avec justice*.
Quiconque se laisse dominer par les desirs du siecle , est
toujours pret a commettre toutes sortes d'injustices con-
tre son prochain , dans sa reputation, dans son corps, dans
ses biens : les devoirs memes de la charite sont des devoirs
de justice, puisque Dieu nous y oblige , et que les parties
d'un meme corps sontredevables les unes aux autres. Que
nous devons vivre dans le siecle present avee piete ^. Rien ne
nous detourne de ce que nous devons a Dieu que la cupi-
dite des choses que sa loi nous interdit ; plus I'homme est
fidele a retirer son coeur des affections de la terre , plus il
'■j^ 12. Et secularia desi'deria. — ^ Ibid. Fivainus in hoc seculo. — ^ Ibid..
Sobrie.— * Ibid. Et Juste. — ^ Ibid. Etpie.
SUR l'epItRE A THE. 167
est embrase de Tainour de la vraie justice et de la sagessc
iminuable , en quoi consiste la veritable piete. C'est une
illusion de s'imaginer qu'on ii'est impie ct idolatre que
que quaiid on adore lor et I'argent sous la figure dune
statue, et qu'on ue Test pas quand on livre son coeur a
I'araour de Tor et de I'argent monnoye ou sous une autre
lorine, qu'on se rend esclave de lafaveur des hommes , et
que les creatures occupent tout notre esprit. C'est injuste-
ment qu'un homine pretendroit avoir de la religion et de
la piete , quand il en a fait exaclement les exercices exte-
rieurs, s'il ne regarde la loi et la justice etemelle coinme
la regie surlaquelle il doit former ses desirs, ses moeurs et
ses actions ; s'il n'adore et n'aime Dieu corame le principe
de sa justice et de son bonheur ; et s'il ne reconnoit que
Jesus-Christ est son Sauveur, et que non-seulement il lui
doit la connoissance du bien et de ses devoirs, mais encore
que c'est lui qui lui lait vouloir, pouvoir et faire tout ce
qu'il fait de bien. Etam toujolrs daxs l'atte>te de la. bea-
TiTLDE qlenolsespero:«s^ A voir la plupart des Chretiens
Iravailler a se faire une beatitude sur la terre , diroit-on
qu'ils en attendent une autre dans le ciel? II faut renoncer
acelle-la, si nous pretendons a celle-ci. Ce n'est pas une
esperance chretienne , mais une presomption aveugle et
Icmeraire , que de s'attendre a recevoir I'effet des promes-
ses, sans vouloir le meriter par raccoraplissement de la loi :
c'est alors qu'on pent I'attendre avec confiance, si renon-
cant a toute impiele et a toutes convoitises pour I'amour
de Dieu , on vit avec retenue et mortification en soi-nieme,
avec equile et bonne foi envers le prochain, avec religion
etamour al'egard de Dieu. Etant toujours dans V attenle.. ,.
DE l'avekemem glorieux , ctc.^. La grace du judaisme con-
sistoit a attendre un Dieu humilie et souffrant ; la grace du
christianisme , a attendre un Dieu glorifie et triomphant.
Le judaisme renfermoit une religion pompeuse et magni-
fique dans ses ceremonies , pour figurer et attendre I'ave-
nement d'un Dieu pauvre et aneanti ; le christianisme
demande un coeur conlrit et humilie , pour se disposer a
ravenement d'un Dieu dans I'eclat et la splendeur de sa
gloire : gloire terrible et accablante pour les superbes qui
auront vecu dans I'oubli de cet avenement ; gloire aimable
etbeatifique pour les humbles qui auront gemi et soupire
' V i3. Expecuinles beatam spent . — - Ibid. Et advenUim glorice.
1 (i^ I'UEI'ACE
(lanscelto atlenlo. Elanl toujoars dans I'aUcntc — deVavlnc-
inenl i^'lorieux du cnAivD DiEU i:r notre Sau vkuii Jesus-Ciir isi ' .
Qui ne se rend a revidcncc de celte prenvc de la divinile
de Jesus-Clij'ist, est ou un Juif qui a le bandeau sur les
ycux , ou un ijnpie (jue la corruption dc son eojur avcugle.
Union aimahio de ccs irois nonis, qui font ioute notre cs-
])erance! 11 n'esl J/sus (}ue parcc qu'il est Sauveur ; ii n'cst
Saavcur que parce qu'il est Dicii; el il est dans la gloirc dc
Dieu par le droit de sa naissanee elernelle , et par le njerilc
dc son abaissement dans la chair. Qui s'est i.ivkk uji-meme
vouH Nous^. O bonlc infinie d'un Dicu, qui ne se donnc
pas seuleuient a nous en s'incarnaiit , mais qui se livre
pour nous en se sacrifiant! Qui s'esI livue lli-meme. La
souveraine niajeste s'est livree aux opprobres, la gloire a
I'ignominie, la sagcsse a la lolie de la croix, Dieu aux
bourrcaux, la vio a la mort, par un sacrifice tout volon-
laire , irremeable et sans reserve. Pour nous : Dieu pour
ses cnnemis, le itiaitre pour les esclavcs, la saintele pour
les pcchcurs, la bonle memc pour les ingrats. Le juge a
pris la place du criminel , et if est condamne au dernier
supplicc pour fairc montcr le criminel sur le tribunal et
sur le trone. Dicu se livre a rhomme pour rhommc ; et a
peine I'liomme veut-il se donner a Dieu pour son proprc
bien ! nous nous pretons plutot que nous ne nous donnons
a Dieu ; mais avec quelle violence , avec combien de reser-
ves , avec quelle froidcur , avcc quelle infidelite, avec
combien de retours! Qui s'est livre lui-meme pour nous,
AFIN de nous RACHETER DE TOUTE INIQUME, ET DE NOUS PURI-
FIER POUR SE FAHIE UN PEUPLE PARTICULIEREMENT CONSACRE, ET
FERVENT DANS LES RONNEs oEuvRES^. Aduiirons ici Ics divcrs
degres de I'operation de Jesus-Christ noire Sauveur , et les
divers eliets de son sacrifice en nous, i" 11 nous rachete et
nous 'retire de la puissance du demon par son sang ; 2" il
nous purifie de nos peches par son esprit ; 3" il nous con-
sacre a Dicu dans la saintele et I'unite de son corps ; 4" il
nous fait faire le bien, et nous enrichit de meritesparsa
grace. Par le premier, il nous meritc la charitc ; par le
second , il repand en nous la charitc ; par le troisieme , il
• -j}^ I'i. MagniDei el Sahntoris noslri Jesu Chrisli. — - ^ 14. Quidedit
semelipsuin jn-o nobis. — ^ Ibid. Ut nos ivdinio-et ah omiii inn/iiitatt; , el
ini/ndarel sibi poptdiiui accc/Hidn'lcm (^vepiciiaiov), scctatorcm bonorum of>e-
. rum. Ge mot icEpiouai&v scxa cxjiliquo plus bas.
SLii L^pirnE A riTE. i '> >
110U9 enraciac daiis la charito; par Ic guatritinc , U fait agir
til Moiisla charile. Afin de nols uacuftkr'. L'Uoinme sans
•lesus-Clirisl est done un eselave ; il n'a done dc vraie , do
{>;ulailc liberie pour le bicii que ce que Jesus-Christ lui
eu a acquis; noii que le libre arbilre soit peri, et ait eto
uneanti ])ar le peclie d' Adam ; niais parce que par sa pro-
prc cupidito il est eomme lie a legard du bien , ct qu'il a
bcsoin que la graee de Jesus-Christ le previenne et I'ac-
coinpa<,'iie pour laire ce bien surualurel et meriloire du sa-
lut. Mulheureuv mille fois , el niillc fois ingrat, s'il use de
sa liberie conlre sou liberaleur ! A qui som:nes-nous?
pour qui devons-nous travailler? au service de qui som-
incs-nous obliges de consumer noire vie , sinon de celui
qui nous a racheles? Mais dc quoi raclietes.' de tolte ini-
ytiTE-- Quand Jesus-Christ ne nous auroit rachetes quo
dun seul peclie mortel , ce seroit toujours de la servitude
ilu peche, de la concupiscence, du demon , de I'enfer , ct
de la mort cternelle, qu'il nous auroit rachetes : qu'est-cc
done d'avoir cle rachetes de loule iniquile originelle et ac-
luellc , volontaire et involontaire , passee , presente et
avenir, dans sa racinc et dans ses branches? Qui porte la
cupidite dans son sein, v porte toute iniquile dans son
principe : il n'y a que Tiniusion de la charile qui nous de-
hvre de la servilude de la cupidite ; delivrance de remis-
sion pour le passe, d' operation pour le present, de pre-
vention pour I'avenir. O Jesus! en combien de manieres
vous etes notre liberaleur! Et quel est le moment ou je
n'aie pas besoin que vous mc delivriez de la domination
de ce raonde d'iniquite qui est en moi? Ut non dominelur
vui omnis vijuslitia. Ex de nous plrifier^. Le peche nous
rend incapables de tout ce qui est de Dieu : si le sacrifice
de Jesus-Christ ne nous purifioit , nous serions eternelle-
ment indignes d'etre sacrifies et consacres a Dieu. Quelle
impurele qui ne pent etre lavee t[ue dans le sang d'un
Dieu I quelle bonte d'un Dieu , de vouloir bien faire de son
sang un bain pour nous purifier ! pour se faire ln pelple
PARTiCLLit;REMEM coNSACRE*. Qu'cst-ce que I'homme, 6
' y 14. Ut nos rediinci'el. — * Ibni. Ab omni I'niquitatc. — '' Ibul. El
mundaret. — * Ibid. Et miindiiret sibi pvpulum acceptabilem (— cpioaonv).
Sur quoi saint Jer6me s'explique ainsi daus soncommcnlalre : So'/tc meciim
consulemns quki sibi velletxiei-bnnC^i^'.riit'jt.r,'), ct a siipicniibus htijus secuU
itueirogans sijhrte id alicubi legissent , niimjutun inveniiv potui. Qitamob-
rem compuUus sum ad veius Testnmenuim recurrere, unde arbitrabttr et
170 PREFACE
inonDieu! pour que vous vous souvcniez de iui? mais
qu'est-ce que riiomme, pour meriter que vous nieltiez
votre gloire a avoir son coeur; que vous fassiez consister
le fruit de votre sacrifice et de vos raysteres a vous former
d'entre les hommes un peuple parliculierement consacre' :
que vous fixipz vos regards sur ce peuple ; que vous I'ai-
miezd'un amour de jalousie, comme votre domaine, voire
royaume? Le christianisme pratique ne consiste done pas
dans quelque action passagere de piete, ni dans un eloi-
gnement exterieur du mal, qu'une crainte d'amour-pro-
pre peut operer, ni dans quelques devoirs auxquclsl'habi-
lude , la'bienseance, ou I'interet peuvent nous engager;
inais dans une consecration interieure, permanente et in-
violable, qui en nous purifiant du peche et nous separant
de I'amour des richesses , des honneurs et des plaisirs du
monde, nous attache a Dieu , par une charite qui nous
reude ses vrais adorateurs en esprit et en verite, et les
fideles imitateurs de son fils. Faites, 6 mon Dieu! que je
comioisse, que j'estime , que j'aime, que je conserve aux
depens de toule chose une consecration si glorieuse. Mal-
heur a moi, si je vous ole jamais mon co3ur pour ie don-
ner au monde etau peche! Jesus, prelre et victime de mon
Dieu , c'est a vous de conserver ma consecration , puisque
c'est par vous et en vous que je Iui suis consacre. Et feu-
Aposloliim sittnpsisse quod dixerat. Hebrccus enirn ex Uehrceis^ et secundum
legem pharisceus, utique id ponebal in epistola sua quod in vetei'i Tesia-
menlo legisse se noi'crat. In Deuteronomio ilaque reperi: Quoniaiii popuIu&
sanctus tu Domino Deo luo ; et in te complacuit Domino Deo luo : ul esses ei
in populum Trjpi&uaiov ex omnibus populis qui sunt super faciem terrae. Et in
psalmo cxxxiv ubi nos habemus : Psaliite nomini ejus , quoniam suave est,
quoniam Jacob elegit sibi Dominus , Israel in possessionem sibi ; pro eo quod
est in possessionem, in grceco scriplum est ei? Trsfiouaiacrabv, quod quidem
Aquila etquinta editio £i; •jveoioucgv expresserunt , Septuaginta verx> et
Theodotio 7rEpioua[aff[j,ov tfansjerentes, commututionem sjrllabcejecere, non
sensus. Symmachus igilurptv eo quod est in grceco Tcepicuaiov , in hebrceu
autem Segola, expressit s^aipsTov, id est egregium velprcecipuum .'pro quo
uerbo, in alio volumine , latino sermone ulens, peculiarem interpretatus
est. Rede igitur Christus Jesus, magnus Deus noster alcjue Sal^ator, rede-^
mit nos in sanguine suo, ut sibi christianum populum PECVhiA.HEM Jaceret,
quipECVUARis tunc esse posset, si bonorum operum (emulator existeret. Le
lextedu Deuleronomecite par saint Jerome estceluidu chap. vn. ^6. ounous
nous lisons dans la Vulgate : Te elegit Dominus tuus ut sis ei popblus pecu-
LiARis. (Sepl. Xaiv wepioufftov.) Et au chap. xiv. -jJ^ 2. Ut sis eins popcldm
PBCULiARFM. (Sept. Xstov auTw ikEptouaiov.) Et au chap. xxvi. ■j^ iH.Ut sis ei
POPOLU8 PEcnLiARis (Sept. Xabv TTcptouatov.) A quoi on peut encore ajouter cc-
Iui dc I'Exode. xix. 5. Eritis mihi in peculium. (Sept. Xao; ivepiouati;.)
SLR l'epItRK a TITE. I 7 I
VK5T DASS LES BONNES OELVREs*. Nous DC sommes pas con-
sacres a Dieu pour vivre dans I'oisivete. La charite qui
nous consacre a lui ne peut subsister sans les bonnes
oeuvres, comme les bonnes oeuvres ne peuvent nous
eire parfailenient utiles , ni entierement agreables a
Dieu sans la charite. Ce n'est pas assez a un Chretien de
faire dc bonnes oeuvres , il faut encore , pour ainsi dire, en
^tre anioureux, en chercher partout les occasions, les
embrasser avec joie, les executer avec ardeur, prompti-
tude , courage et perseverance , par I'amour fervent et li-
bre de la justice, non par una crainte froide et servile de
la peine. C'est done a I'amour des bonnes oeuvres, c'est-
a-dire a accomplir de bon coeur la loi et la justice de Dieu,
que I'Apotre rcduit les desseins de Dieu surleshommes
dans rincarnation, dans la mort et dans le sacrifice de Je-
sus-Christ; c'est le caraciere d'un Chretien, le parlage
dcs enfans , la difference du peuple choisi d'avec le peuple
rcprouve, le sceau de notre consecration, I'assurance de
notre election, et la marque la plus certaine dc I'accom-
plissement de la redemption de Jesus-Christ en nous , et
de notre liberte en lui. Phecuez ces verites, ajoute I'Apo-
tre'. Ce sont done la des verites qu'il faut precher , qu'on
ne preche point assez, et qu'on ne sauroit trop precher.
La servitude dc I'homme par le peche , la necessite d'un
liberateur , son incarnation et son sacrifice, ses desseins
et son Evangile, sa morale , ses jugemens et son avenement
dernier, ses bienfaits , I'obligation d'y repondre par une
vraie charite, et la puissance de sa redemption et de sa
grace pour nous delivrer de la cupidite, et creer en nous
la charite : Pnchez ces verites : H^c loquere. Mais I'Apotre
ne se contente pas d'exliorter son disciple a instruire ainsi
tout le monde en annon^ant a tous ces verites importan-
tes; il I'avertit encore d'exhorteretencourager les foibles,
de reprendre et presser les opiniatres , et de se comporter
en tout et partout avec Tautorite et la majeste d'un niinis-
Ire de Jesus-Christ , mais en meme temps avec la douceur
et la tendresse d'un pere , de sorte qu'il ne rende le minis-
tere , ni meprisable par des manieres basses et pueriles ,
ni odieux par une conduite fiere et hautaine ; mais qu'il
parlc et agisse avec la dignite d'un homme qui tient la place
y 14. Secuuorem bonorum operuni. — *y iS. et uU. Heec loc/ueiv.
J 72 PREFACE
lie J(5su8-Christ , aulanl pour la charilc que pour I'auto-
rite*.
Apr6s cela il marque a son disciple les principaux de-
voirs qu'il doit prescrire au cominun des fidelcs (chap, in),
cL il insiste parliculicremcnt sur la douceur qu'ils doiveiit
temoigner a I'egard de tous les liommes^, e'cst-a-dire a
regard meuie des plus aveugles et des plus corrompus. 11
en apportc deux inotifs : le premier, c'est qu'eux-memes ,
avant leur conversion, avoientele dans le meine elat d'a-
veuglementet de corruption^; le second, c'est I'cxemple
de .fesus-Christ meme , qui nous aimant gratuitcment nous
a sauves , non a cause des onivres de justice que nous eus-
sions faites , niais a cause de sa scule uiisericorde*. 11 ne se
conteiite pas de nous faiie remartpier la gratuile du salut
qui nous est procure par Jesus-Christ, mais pour en faire
sentir ertcore davanlage I'excellcnce, il en marque le com-
mencement, qui est la regeneration et le renouvellement
que I'Esprit-Saint a produit en nous par les eaux du bap-
teme'; la cause, qui est la riche et abondante effusion
du Saint-Esprit que Dieu a repandu en nous par Jesus-
Christ notre Sauveur dans le bapleme et dans la confirma-
tion"'; i'effet et le caractero propre , qui est notre juslifi-
cation par sa grace ' ; la fin , qui est d'etre deja les heri-
tiers presomptifs de la vieeiernelle, et d'avoir mie ferme
el solide esperance de la posseder un jour comme notre
heritage^. II confirme toutes ces choscs , et il ordonne a
son disciple de les assurer en les prochant comme des A^e-
rites tres certaines , afin que ceux qui croiont en Dieu , et
qui ont mis leur confiance en lui , se distinguent par les
bonnes oeuvres , comme etant les seules choses qui leur
soienl utiles et avantageuses''. Apres avoir regie la doc-
trine que son disciple doit precher, il lui prescril la ma-
niere dont il doit se conduire envers ceux qui la combal-
tent. S'ils I'attaquent par des questions folles et insensees,
par des genealogies sans fm, par des disputes outrees, et
par des entctemens sans raison touehant les ceremonies de
la loi , il ordonne a son disciple de n'y point repondre ,
' if i5. Hcec loquejv, ctcrJivHarc, el argue cum oinni imperio : nemo tc
conlcinnal. — ^^ i. eii. — ^ -jr 3. — ^ ^ li. cL5. Non ex opcribus jusliliw quoi
feciinus /los, sed sccundutn suum miscviconliam. — '^ Ibid. — " v (i. — 'y 7.
SIR l/tpiTRE \ TITE. I«3
mais d'etoufier toiitcs ces disputes dcs le comincnccmciit ,
<()mmc cntiercmcnt vaines et iuulilcs'. S'ils souliemieni
opiniatremcnt Ijiirs errcurs , il vcut que son disciple les
avcrlissc une et deux fois; et qu'aprcs deux monitions inu-
liles, il les evile et se separe d'eux.^. 11 en donne deux
rajsons : la premiere, c'cst qu'un hommc dans cetle dis-
position peut etre regarde conirae un esprit incurable , et
en qui rcdifice de la foi est enlierement renverse^; I'autre,
c'est 'que ces gens-la s'etant separes yolontairement les
premiers du sentiment de I'Eglise, ils se sont condamnes
eux-m^mes parleur propre jugement, en sorte qu'on ne
leur fait point de tort en executant au dehors la sentence
qu'ils ont deja porteecontre eux-memes*. Le resle de cetle
epilre ne regarde plus que quelques affaires personnelles ,
et quelques recommandations. L'Apotre mande a son dis-
ciple de venir le trouver a Nicopolc , ou il avoit rcsolu do
passer Thiver; mais en meme temps il lui marque de ne
partir que lorsqu'il lui auroit envoye Artemas ou Tychi-
que pour gouverner I'Eglise de Crete en son absence^. II
lui mande d'envoyer devant lui Zenas , dorteur de la loi ,
et.VpoUon, et de prendre soin qu'on leur fournissc tout
ce (|ui leur scroit neccssaire pour leur voyage, en sorte
qu'il ne leur manque rien de la part des fidcles'', qui doi-
vent menager ces occasions de prendre part aux bonnes
oeuvres , selon que la necessite le demande , s'ils veulcnt
que leur foi ne soil pas sterile". II le salue de la part de
tons les fideles qui sont avec lui ; et il le prie de salucr de
sa part tous ceux qui ont pour lui cette affection sainte qui
ravit les ca^urs par I'esprit de la foi. II souhaite a tous la
grace deDieu*.
La souscriplion grecque qui se trouve a la fin dc cctlc Rcranrquos
epilre porte qu'ellc fut ecrite de la ville de Nicopole en Ma- ^i"" 'c tcmp^
cedoine ; ce qui s'accorde avec Topinion des pcrcs grccs , ^^ , ." **"
soil que celtc opinion soil fondee sur celte souscriplion fuu^;riu•^^
meme, soil que celte souscriplion ait pris naissance de
celte opinion, qui d'ailleurs pourroit etre aussi appuyee
sur ce que dans cette lettre I'Apolre mande a son disciple
de venir le Irouver a Nicopole^. MaisD. Calmet remarque
que celte parole de I'Apolre pourroit simplemenl sigriifier
' ^9.— ->■ 10.— sy It.— t/W.— »f 11.—^ i i3.— V !'». — '■^i''-
etult. — * Tit. HI. 12.
17^^ PREFACE SLR L'l?PlTnE A TITE.
qu'il etoit alors en chemin pour aller en cette ville, qu'il
croit etre plut6t Nicopole , ville d'Epire , comme le pen-
sent la plupart des nouveaux critiques apres saint Jerome.
II suppose que cette lettre fut ecrite vers Tautomne dc
I'an Gi del'ere chret. vulg., et que I'Apotre etait encore
^lors dans la Macedoine ou dans la Grece,
EPITRE
DE SAINT PAUL A TITE.
CHA.PITRE PREMIER.
Paul salue Tile. Devoirs des pretres et des cv4ques. 11 exliorte Tite a repren-
dreles faux docteurs. Tout est pur pourceux qui sent purs. On renonce
Dieu en vivant tnal.
1. PAtLcs, servusDei,
apostolus autem Jesu
Christi secundum fidem
electorum Dei, et agni-
tloncm veritatis. quae se-
cundum pietatemest,
2. In spem vitcc aeter-
oae, quam promisil qui
non mentitur, Deus, ante
tempora secularia :
3. Manifestavit autem
temporibus suis rerbum
suum in praedicatione ,
qua; credita est mihi se-
cundum praeceptum Sal-
vatoris nostri Dei :
4. Tito diiecto filio se-
cundum communem fi-
dem : gratia et pax a Deo
Patre , et Christo Jesu
Salvatore nostro.
5. Hujus rei gratia reli-
qui te Cretae, ut ea quae
desunt corrigas, et consti-
1. Pavl, serviteur de Dieu, et
apolre de Jesus-Christ, pour ins-
truire les elus de Dieu dans la foi
et dans la connoissance de la veri-
te , qui est selou la piele ,
2. Et qui donne I'esperance de
la vie eternelle, que Dieu, qui ne
peut nientir, a promise et destince
avant tons siecles,
5. Ayant fait voir en son temps
raccomplissement de sa parole dans
la predication de I'Evangile qui
m'a ete confiee par I'ordonnance de
Dieu notre Sauveur;
4- A Titesonfils bien-aime'dans
la foi qui nous est commune : que
Dieu le Pere et Jesus-Christ notre
Sauveur vous donnent la grace ' et
la paix.
5. Je vous ai laisse en Crete, afin
que vous y regliez tout ce qui reste'
a y regler, et que vous etablissiez
y 4- Gr. litt. son vrai fils.
Ibid. Grec : la grace, la misericorde et la paix.
V 5. C'est le sensdu prec : TaXsiirovTa.
170
I'l'iru
E nE SAINT PAUL A TITE.
T .Tint.nx, •>.,
(Ics prCtres ' en chaquo villo, pclon
I'ordrc que Je vous en ai donne , '
6. Choisissant,' cclui qui sera
irroprochabic, ' ct qui n'aura opou-
se qu'unc fcinmc, " donl les cnfans
seront fidcles, non accuses de de-
bauchc, ni desobeissans.
7. Car H faut que r6v6quo soil
ineprochable, ' comme etant le
dispensaleuret I'ecoiiome'de Dieu;
qu'il ne soit point altier, ni colere,
ni sujet au vin, ni violent et
prompt a Irapper, nl porle i'l un
gain bontcux :
8. Mais qu'il exerce I'hospita-
lite, ° qu'il soit affable, ' sobre , '
juste, saint, temperant. '
9. Qu'il soit fortement attache
aux verites de la foi, lelles qu'on
les lui a enseignees, afin qu'il soit
capable d'exhorter selon la saine
doctiine, et de convaincre ceux
qui s'y opponent.
10. Car il y en a plusieurs, ct
surtoiit d'enlre Ics Juifs," qui ue
veulent point se souinetlre, " qui
s'occupent a conter des fables, et
qui seduisent les ames. '
tuas per civitatcs presbj-
fcros, sicut el ego dispo-
siii libi :
0. Si quis sine crlnilnc
est, unius uxoris vir,filio.s
babcns fidcles, non in ac-
cusalione luxuriaj , aut
non subditos.
7. Oportet enini epis-
copuin sine criinine esse,
sicut Dei dispensatorein":
non supcrbum , non ira-
cundum, nonvinolentum,
non pcrcussorem , non
turpislucri cupidum :
8. Sed hospilalcm , bc-
nignuni, sobriiun, jus-
tum, sanctum, continen-
tem ,
9. Amplectentem euin
qui secundum doclrinam
est, fidelem sermoncm :
ut potens sit exhortari in
doctrina sana, et eos qui
contradicunl, arguere.
10. Sunt enim mulli
etiam inobcdicnies, vani-
loqui, seductores : maxi-
me qui de circumclsione
sunt :
■j^ 5. Ccux qui prcnnent a la Ictlrc Ic noni d^euC'que au V^ 7 . croienl qu'ici
le noni dc prvtrcs se prcnd pour cvcqtics.
Ibid. Cost le sens du grcc.
y^ 0. Pour CO minislere 8acr(5.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Voyez i. 2im. iit. 2.
y 7 Voyez I. Tim. lu. 2.
Ibid. Ces deux expressions rendenl le sens du grec owcvJoxv.
-^ 8. Gr. aulr. qu'il aime a exercer riiospilalite.
Ibid. Le grec (fiXa-yaOov signifie: qu'il aimelcs gens dc bien; ou, qu'il ninn-
le bien.
Ibid. Gr. autr. sage et bien j-egle.
Ibid. Maitre de ses passions ot de scs appelils.
i- ID. De ceux qui out embrasst^ I'fivangile. Lilt, d'enlre les circoncis.
Ibid. Qui refusent de se soumeltre a lout te que I'Kgliscleur cnseii^iic.
C'est rexpression du grcc.
CHAPITUK ).
ni
11. Quos oportet re- ii. Ilfaut fermer la houche ' a
ilargui : qui iiniversasdo- ces personnes qui renversent ' les
inos subveitunl, docentes fainiiies enlieres, enseignant, par
quae non oportet, lurpis un interet horiteux, ce qu'on ne
lucri gratia. doit point enseigner.
13. Dixit quidam ex il- 12. Un d'entre cenx de cettc ile,
lis, proprius ipsorum pro- dont ils se font un proplu'te , ' a dit
phcta : Cretenses semper d'eux : Les Cretois sont toujours
inendaces : malje bestiae, menteurs; ce sont de mechantes
ventres pigri. betes , qui n'aiment qu'a manger el
a ne rien faire.
i5. Testimonium hoc i3, Ce temoignage qu'il rend
verum est. Quam ob cau- d*cux, est yeritable. C'est pour-
sam increpa illos dure, quoi reprenez-les forlement, afin
ut sani sint in fide , qu'ils conservent la purcte de la
foi,
i4.Non intendentes ju- 14. Et qu'ils ne s'arretent point
daicis fabulis, et mandatis a des fables judaiques, ' et a des
hominum aversantium se ordonnances de personnes qui se
a veritale. detournent de la verite. '
i5. Omnia lounda i5. Or, tout est pur pour ceux liom.xiY.io.
muiidis : coinquinatis au- qui sont purs;'et rien n'est pur
lem el infidelibus nihil pour ceux qui sont irapurs et infi-
est mundum : sed inqui- deles : mais leur raison et leur
conscience sont impures et souil-
lees.
1 6. lis font profession de con-
noitre Dieu, mais ils le renoncent
ncgant : cum sint abomi- par leurs ceuvres, etant detesla-
nati , et incredibiles , et bles, ' et rebelles , ' et reprouves
ad omne opus bonum re- a I'egard de toute bonne oeuvre.
probi.
y II. C'est le sens du grec t— lorcaS^sw
Ibid. Penrertissent.
y 12. C'est Epimenides, poete celebre natif de Crete.
>*■ i4- Aux ridicules et absurdes inlerprelalions et allegories des rabbins.
Ibid. En enseignant qu'il y a des viandes impures par elles-mdmes, dont
on ne sauroit manger sans contracter quelque impurele. — Gr. autr. qui ont de
I'aversion pour la verite.
y 1 5. Qui n'usent des creatares que selon les regies que la foi et ia charite
leur prescrivent.
Ibid. Tout devient impur entre leurs mains, par la mauvaise disposition de
leur coeur,
y 1 6. Par la corruption de leurs mccurs.
Ibid. Rebelles aux instruclions qu'on leur donne. — C'est le sens du grcc.
natae sunt eorum et mens
et conscientia.
16. Confitentur se nos-
se Deum , factis autem
,78
EPITRE DE SA^INT PAUL A TITE.
CHA.P1T1\E II.
Avis que Tite doit donner aux vieillards et aux jeunes gens de I'un et do I'au-
tre sexc. Conduite qu'il doit garder lui-m6nie. Avis qu'il doit donner aux
serviteurs. Abrcge de tout le chrislianisme renferme dans rcconomie des
deux avenemens de Jesus-Glirist.
1. Mais pour vous, instruisez
votre peuple d'une maniere qui
soil digne de la saine doctrine :
2. Enseignez aux vieillards a ctre
sobres, ' chastes, " prudens,' et i\
se conserver purs dans la Ibi , dans
la charite, ct dans la patience.
3. Apprcnez de meme aux fem-
raes avancees en age a faire voir
dans tout leur exlerleur une sainte
modestie , " a n'etre point medisan-
tes, ni sujettes au vin ; mais i don-
ner de bonnes instructions,
4. En inspiranl la sagesse ' aux
jeunes femmes, et en leur appre-
nant a aimer leurs maris ct leurs
enfans,
5. A avoir une conduite reglee,'
chastes, sobres," attachees a leur
menage, bonnes, soumises a leurs
maris; afin que la parole de Dieu
ne soit point exposee au blasphe-
me.'
1. Tu autem loquere
quae decent sanam doctri-
nam :
2. Senes, ut sobrli sint,
pudici , prudentes , sani
in fide, in dilectione, in
patientia :
3. Anus similiter in ha-
bitu sancto , non crimina-
trices, non multo vino
servientes , bene docen-
tes :
4. Ut prudentiam do-
ceant adolescentulas , ut
viros suos ament , filios
suos diligant,
5. Prudentes, castas,
^obrias, domus curam ha-
bentes, beniguas, subdi-
tas viris suis, ut non blas-
phemetur verbum Dei.
■jj- 2. Gr. autr. vigilans; ou, selon toute la force de ['expression vv,cpaXtou;,
exempts de rassoupissemenl que cause I'ivresse du siecle.
Ibid. Gr. autr. honneles, d'une gravUe decenie etf/ui les rende respec-
tables.
Ibid. Gr. autr. sages et nioderes.
■f i. C'est Ic sens du grec , ou mieux encore : une modestie digne de leur
saint etat.
y- 4. C'eslle sens du grec.
■jl- 5. C'est le sens du grec cwcppova;.
Ibid. Ce mot sobrias est une double version du mot grec auippova; dejk
tradult par prudentes, comme on le voit par le -^ suivant.
Ibid. Atin que les infideies ne prenncnt pas de Id occasion de calomnier la
doctrine clireliennc , comme favorisant le dereglenient ou Tanibilion des
femmes.
CBAPITfE II. 179
6. Juvenes simililer 6. Exhorleiaussi les jeunes hora-
hortarc, ut sobrii sint. ines a etre sobres. '
y. In omnibus teipsum 7. Rendcz-vous TOus-mSme un
prsebe exemplum bono- modele de bonnes oeuvres en toules
rum opernm, in doctrina, choses, dans la purete de la doc-
in integritate, in gravi- trine, dans I'integrite de voire vie,
tale : dans la gravile de vos mceurs. '
8. Verbum sanum, ir- 8. Que vos paroles soient saines
reprehensibile : ut is qui et irreprehensibles , afin que nos
ex adverse est , vereatur, adversaires rougissent, u'ayant au-
nibil habens malum dice- cun mal a dire de nous,
re de nobis.
g. Servos dominis suis
subditos esse, in omni-
bus placentes, non con-
tradicentes ,
10. Non fraudantes,
sed in omnibus fiilem bo-
nam ostendeutes : utdoc-
trinam Salvatoris nostri
Dei ornent in omnibus.
11. Apparuit enim gra-
tia Dei Salvatoris nostri
omnibus hominibus,
12. Erudiens nos, ut
abnegantes impielatem ,
et secularia desideria , so-
brie , et juste, et pie vi-
vamus in hoc seculo,
i5. Expectantes bea-
tam spem, et adventum
gloriae raagni Dei, et Sal-
9. Exhortez les serviteurs ii etre Ephes. vi. 5.
bien soumis a leurs maitres, a Co/- i"- 22.
leur complaire en tout ,' a ne les f^-Petr.n.i^.
point contredire ,
10. A ne detourner ' rien de leur
bien, mais a leur temoigner en tout
une entiere fidelite ; ' afin qu'en
toules choses ils fassent honneur
a la doctrine de Dieu ootre Sau-
veur. '
11. Car la grace de Dieu notre Jnfr. ni, 4.
Sauveur ' a paru a tous les hom-
mes ,
12. Et elle nous a appris que,
renoncant a I'impiete et aux pas-
sions mondaines, nous devons vi-
vre dans le siecle present avec
temperance , avec justice -^t avec
piete,
10. Etant toujours dans I'aUente
de la beatitude que nous esperons,
et de I'avenement ' glorieux du
V' 6- Modestesel bien r^les. — C'estlesensdu grec. L'expression ao>-
VpcvEw est relative a celle du y precedent.
T^ 7- Gr. autr. que Tolre doctrine soit exempte de corruplion et accompa-
gnee d'une gravile qui la fasse respecter.
y . 9 En ce qui est juste et conforme a la voloale de Dieu.
y^ I o. C'est le sens du grec.
ibid. Gr. lilt, mais a temoigner toute sorte de bonne foi.
Ibid. Faisant voir dans toute leur conduite la justice et la saintete qu'elle
inspire k ceux qui la suivent.
"i^i. Gr. autr. la grace salutairedeDiea.
y^ i3. Gr. litt, de la manifestation, ijti<fav£tav.
i«o
EPITIIE DE SAINT PAUL A TITE.
grand Dieu et notreSauvcur Jesus- vatoris nostri Jesu Chris-
Christ, " ti :
14. Qui s'est livre hii-meme 14. Qui dedit seraetip-
pour nous, afin de nous racheter sum pro nobis, ut nos
de toute iniquitc , et de nous puri- redimeret ab ornni iniqui^
fier, pour se faire un peuple parti- tate, et mundaret sibi
culierement consacre a son ser- populum acceptabilem ,
vice," et fervent dans les bonnes sectatorembonorurn ope-
ceuvres. rum.
i5. Prechez ces verites; exhortez i5. Ha^c loquere , ct
et reprenez avec une pleine auto- exhortare , et argue cum
rite. Faites en sorte que personne omni imperio. Nemote
ne vous meprise. contemnat.
^ i3. La construction du grec prouve que magni Deise rapporle k Jesu
Christi.
•j^ 1 4 . C'csl le sens du grec. Voyez ce qui est dit sur cela dans la preface.
CHAPITRE III.
ftoumisslon aux princes. Effusion de la grace de Jesus-Christ. D'ou il nous a
tires ; a quoi il nous destine. S'appliquer aux bonnes oeuvres. Fuir les dis-
putes. Eviter les herctiques. Saint Paul prie Tite de vcnir Ic trouver. Sa-
lutations.
1. AvEBTissEZ-LEs' d'etre soumis
aux princes et aux magistrals , de
leur rendre obeissance, d'etre prets
c\ faire toutes sortes de bonnes oeu-
vres ;
2. De ne medire ' de personne ,
de fuir les contentions, d'etre mo-
deres , ' et de temoigner toute es-
pfece de douceur a I'egard de tous
les hommes.
5. Car nous etions aussi nous-
memes autrefois insenses , deso-
beissans, ' egarcs, 'asservis a une
•jj- r. Gr. litt. faites-les souvenir.
•^ 2. C'est le sens du grec.
Ibid. Gr. autr. d'etre dquitables,
"5^ 3.^ C'est le sens du grec.
Ibid. Detournes du cbemin de la veritc.
1. Admonb illos 'princi-
pibus et potestatibus sub-
ditos esse , dicto obedire ,
ad omne opus bonum pa-
ratos esse :
2. Neminem blasphe-
mare, non litigiososesse,
sed modestos , omnem
ostendentes mansuetudi-
nem ad omnes homines.
3. Eramus eniin ali-
quando et nos insipientes,
increduli, errantes, ser-
vientes desidcriis et vo-
luplatibus variis, in m;jli-
lia el invitlia agentes,
odibiies , odienles invi-
cem.
4. Cum autem benigui-
Jas et hutnanitas apparuit
SaWatoris nostri Dei ,
5. Non ex operibus jus-
liliae, quae fecimus nos,
sed secundum suammise-
ricordiam salvos nos fecit,
per lavacrum regenera-
lionis el renovationis Spi-
ritus Saocti,
6. Quem effudit in nos
abunde per Jesum Chris-
tum Salvatorem nos-
trum :
7. Ut justificatl gratia
ipsius, heredes simus ,
secundum spem , vitae
aeternae.
8. Fidelis sermo est :
et de his volo te confir-
niare , ut curent bonis
operibus praeesse qui cre-
dunt Deo. Haec sunt bona
et utilia hominibus.
9. Stultas autem quaes-
tioues , et genealogias, et
contentiones, et pugnas
legis devita : sunt enim
inutiles et Tanae.
10. Haereticum homi-
nem , post unam et se-
cundam correptionem de-
vita.
cuAPirnE III. 181
infinite de passions et de vohiptes,
pleins de malignite et d'envie , di-
gnes d'etre hais,et noushaissant les
uns les autres.
4. Mais depuis que la bonte de Supr.u. fi.
Dieu notre Sauveur, et son amour
pour les hommes, a paru dans le
monde,
5. II nous a sauves, non h cause 2. Tim. 1. 9.
des oeuvres de justice que nous eus-
sions faites , raais a cause de sa mi-
sericorde , par I'eau de la renais-
sance, ' et par le renouvellement '
du Saint-Esprit,
6. Qu'il a repandu sur nous arec
une riche effusion , par Jesus-
Christ notre Sauyeur,
r. Afin qu'etant justifies par sa
grace , nous devinssions les heri-
tiers de la vie eternelle, selon I'es-
p^rance que nous en avons.
8. C'est une verite trfcs certaine,
et dans laquelle je desire que vous
affermissiez les fideles, que ceux
qui croient en Dieu doivent etre
toujours les premiers a pratiquer
les bonnes oeuvres. Ce sont la des
choses vraiment bonnes et utiles
aux hommes.
9. Mais evitez les questions im-
perlinentes , les genealogies, les ^ '' '* ^'
disputes et les contestations de la ^^'' „•,
, .^ ,1, . n.Jitn.ii.ii
loi , parce qu eiles sont vaines et
inutiles.
10. Fuyez celui qui est hereti-
que , apres I'avoir repris' une et
deux fois ;
y^ 5. Du baptdme.
Ibid. C'est le sens du grec qui porte k la lellre : per lavacrum regetieratio-
nis et renovalionem Spiritus Sancli.
•f I o. Gr. autr. averii .
l82
EPITKE DE SAINT PAUL A TITE.
11. Sachant que quiconque est
en cet etat est perverti, et qu'il
p6che , etant condamne par son
propre jugement- "
12. Lorsque je vous aurai en-
voye Artemas ou Tychique , hatez-
vous de venir me trouver a Nico-
pole , ' parce que j'ai resolu d'y
passer I'hiver.
i3. Envoyez devant Zenas doc-
leur de la loi , et Apollon, et ayez
soin qu'il ne leur inanque rien. "
14. Et que nos freres aussi ap-
prennent a etre toujours les pre-
miers a pratiquer les bonnes oeu-
Yres, lorsque le besoin et la neces-
site Ic demandent , afm qu'ils ne
demeurent point steriles et sans
fruit.'
i5. Tons ceux qui sont avec moi
vous saluent. Saluez ceux qui nous
aiment dans I'union de la foi. La
grace de Dieu soit avec vous tons.
Amen.'
11. Sciens quia subvcr-
sus est, qui hujusmodi est,
et delinquit, cum sit pro-
prio judicio condemna-
lus.
12. Cum misero ad te
Arteniam, aut Tychicum,
festina ad me venire Nico-
polim : ibienimstatui hie-
mare.
i3. Zenam legisperi-
tum, et Apollo sollicite
praimitte, ut nihil illis
desit.
i4« Discant autem et
nostri bonis operibus prae-
esse ad usus necessarios,
ut non sint infructuosi.
i5. Salutant te quime-
cum sunt omnes. Saluta
eos qui nos amant in fide.
Gratia Dei cum omnibus
Yobis. Amen.
•^11. Par la sentence qu'il prononce conlre lui-m^me, en s'eloignant de
la doctrine de I'Eglise, et seseparantdu corps des fideles, qui est cclui de Je-
sus-Christ.
■^12. Les unsl'entendentde Nicopole, ville de Macedoine ; lesautres, de
Nicopole, ville d'Epire. D. Calmet prefere ce dernier sentiment. Voyez la
preface.
y^ 1 3. Gr. aulr. Ayez soin du depart de Zenas le docteur de la loi , el d'A-
pollon, afin qu'il ne leur manque rien.
y^ 14. Afin qu'ils ne re£;ardent pas comme une charge lorsqu'on les excite a
pratiquer les ceuvres de misericorde : care' est pour eux une occasion de cueil-
lir les fruits derelernite bienheureusc.
■)f r5. Les exemplaires grecs portent ici:Ecrite de Nicopole, en MaccdoinCjj
i Tite qui a ^le ordonne premier ev6que de I'Eglise de Crete, en 97 versets.
PREFACE
SUR LEPITRE A PHILEMON.
Philemo , homme riche et de qualile , de la \ille de Co- Remarquts
losse ea Phrygie, avoit ele converti a la foi, ou par I'apolre ^"''^J'J^*'^™*'"'
saint Paul lorsqu'il precha a Ephese , oupar Epaphras son ^pitreest ad-
disciple , qui avoit annonce le premier I'Evangile a Colosse. ressee. Occa
11 avoit fait un si grand progres dans la vertu, que sa mai- sioneisujetde
son etoit devenue comrae une Eglise^ par la piete qu'il '^"^^P''"'^-
avoit inspiree a toute sa famille, et par les bonnes oeuvres
qui se pratiquoient chez lui ^ Onesime son esclave, loin de
profiler des bons exemples qu'il avoit devant les yeux ,
n'en devint que plus mechant. II vola son mailre , et s'en-
fuit a Rome , ou Dieu permit qu'il trouvat saint Paul qui y
etoit prisonnier pour la premiere fois. Get apotre qui se
faisoit tout a tons, pour gagner tout le monde a Jesus-
Christ, recut cet esclave avec une charite et une tendresse
vraimentpaternelle. II I'instruisitdela doctrine de I'Evan-
gile, le convertit a la foi , et le baptisa^. II pensa ensuite
ale retenir aupres de lui, afin qu'il lui rendit les services
que son maitre meme auroit ete bien aise de lui rendre
dans les chaines qu'il portoit pour Jesus-Christ; mais il ne
voulut pas le faire sans le consentement de celui a qui il ap-
partenoit,ni priver Philemon dumerited'une bonne oeuvre
alaquelle il etoit persuade qu'il se feroit un plaisir de cou-
tribuer^ 11 resolut done de lui renvoyer Onesime charge
de cette lettre , par laquelle il le prie de lui pardonner son
larcin et sa fuite. C'est en ce genre un chef-d'oeuvre d'elo-
quence. Rien n'est plus tendre, plus pressant, plus per-
suasif , plus anime, 11 y mele les prieres avec I'autorite , les
louanges avec lesrecommandations, les motifs de religion
avec ceux de I'honnetete et de la reconnaissance ; enfin il
y met tout en oeuvre pour reconcilier I'esclave avec le mai-
tre. II y reussit comme il le souhaitoit. Philemon , non-
•• Phileni. y 2. cl 6. — • y 10. et 11. — ^ -^ i3. eti\.
l84 PnEKACE
seulement re^ut Onesimc clans ses bonnes graces , mais
il le renvoya pen de temps apres a Rome aupres de I'Apo-
tre , afin qu'il continual de lui rendre toutes sortes de ser-
vices.
Analyse de Des I'inscription meme de sa lettre, TAptkre dispose
ceiie epitre. Philemon a lui accorder sa demande. U s'annonce d'abord
adniiraUede ^o^^ii^e prisonnier de Jesus-Chrisl, Paulas vinctus Chrisli
saint Paul. Jesu^ , qualite la plus propre a toucher le coeur de Phile-
mon, et a lui rendre recommandables cette lettre qui lui
estadressee, ct la demande qu'elle contient, et Tesclave
meme qui en est I'objet. Mais pour donner encore un nou-
veau poids a son intercession, il y joint celle de Timotheo
qu'il appelle son frere , Et Timothcusf rater, disciple connu
de Philemon comme etant du meme pays, et outre cela
fort celebre dans I'Eglise, compagnon presque insepara-
ble de saint Paul, etpour lors a Rome avec lui. 11 s'adresse
a Philemon, et il ne se contente pas de lui donner le litre
de cher et bien-aime, Philomeni dilecto , qualite qui lui
etoit commune avec tous les fideles; il le nomme encore
son cooperaleur, Et adjutori (selon le grec, cooperat07'( )
noslro , comme pour partager avec lui le fruit et la gloire
des iravaux de son apostolat , parce qu'apparemmenl ce
disciple fidele s'applfquoit a contribuer, aulant qu'il etoit
en lui, aux progres de I'Evangile. Pour interesser davan-
tage Philemon, il falloit interesser aussi Appie son epouse;
I'Apotre la salue en lui donnant le litre de chere soeur : Et
Appicb^ sorori cfiarissimce ( ou , selon le grec traduit plus
lilleralement , dilectcB) , litre fonde sur la foi et la piete de
cette femme digne de I'epoux a qui elle etoit unie. Ce n'est
pasassez; TApotre veut interesser encore celui qui con-
duisoit alors I'Eglise de Colosse : I'eveque Epaphras etoit
prisonnier a Rome ^ ; et en son absence il paroil que cette
Eglise etoit gouvernee par Archippe^. L'Apolre le salue ,
et en I'appelant le compagnon de ses combats, il rend le-
moignage a ses travaux et a son zele : Et Archippo commi-
Utoni nostra. Ce n'est pas tout encore ; il falloit interesser
la maison de Philemon : mais cette maison etoit fidele , et
formoit ainsi une Eglise domestique ; et c'est sous ce litre
que I'Apotre la salue : Et Ecclesice quce in domo twi est. II
souhaite a tous la grace et la paix de la part de Dieu notre
Pere et de Jesus-Christ notre Seigneur ; c'est son salut or-
* -^ I. — - >^ 2. — ' ■)} 23.—'' Coloss. IV. 17.
SUR t'EPllKE A rniLEMON. 1 85
(liiiuire : mais quo pouvoil-il ajouter de plus? Que pouvoit-
il leur souhaiter tie plus avantageux que la grace qui est
Ic priucipe de tout bien salutaire, et la paix qui en est le
iruit et la recompense? Gratia vobis ct pax a Deo Patrc
fioslro el Domino Jesu Christo *. Apres ce salut et cette ins-
cription, I'Apotre commence sa letlre dans laquelle on peut
distinguer trois parties, qui sonl I'exorde, la proposition
et la conclusion.
L'exorde consiste dans un eloge Ires delicat de la vertu
tie Philemon , eloge qu'il tourne en actions de graces et en
congratulation qui en sont comme les deux parties. L'A-
potre commence done par teraoigner qu'il rend graces a
Dieu : Gratias ago Deo meo-. L'action de grace estl'eloge
le plus parfait et le seul digne dun Chretien qui salt que
tout bien vient de Dieu a qui seul en est due la louange ; et
en meme temps elle est le temoignage d'un coeur affec-
lionne qui s'interesse au bien de ceux pour qui il rend
graces. C'eloit done deja s'insinuer favorablement dans
1 esprit de Philemon , que de commencer par lui presen-
ter cette idee generale d'aclion de graces : Gralias ago
Deo meo. Mais voici quelque chose de plus personnel , de
plus interessant , de plus touchant, c'est que cette action
de graces regarde Philemon meme , c'est que non - seulc-
ment dans le moment present , mais dans tous les temps ,
semper J Paul conserve le souvenir de Philemon , memoriam
tui faciens: mais encore dans quelles circonstances s'en
souvient-il? dansses prieres : in orationibus meis. L'Apotre
pouvoit-t-il marquer a ce disciple fidele une affection plus
lendre, que de lui apprendre qu'il rend graces pour lui,
qu'il se souvient de lui, qu'il prie pour lui, et cela dans
tous les' temps? Mais quel est !e sujet de ses actions de
graces? c'est particulierement ce qu'il apprend de la cha-
rile el de la foi de Philemon : Audiens charitatem tuam et
fidem^ \ deux dispositions qui doivent egalement porter
Philemon a accorder la grace que I'Apotre va lui deman-
der. 11 s'agit ici d'une oeuvre dont la charite sera le prin-
cipe , et dont la foi sera le motif : voila done pourquoi I'A-
potre insiste particulierement sur ces deux dispositions ;
voila pourquoi il insiste d'abord sur la charite , et ensuite
sur la foi. Foi envers le Seigneur Jesus : Quam habes in
Domino Jesu ; et cela mdrae est encore important, car il
I
186 PREFACE
s'agitici d'un membre de Jesus- Christ. Charite, non-seu-
lement envers les saints en general, non-seulement envers
tous les saints sans distinction, mais envers tousles saints
sans exception ; car c'est ce que marque le grec , qui porte
non simplement , xat eic, r.ocvi:ot.g ayioviy qui marque tous sans
distinction, mais y.c/.iek'Ka.VT(xgzobc,dyiQvc,y qui marque tous
sans exception^ : Etin omnes sanclos; et celameme encore
interesse dans la circonstance presente , car les saints sont
les fideles , et il s'agit d'un fidele, et par consequent d'un
saint. Non-seulement rAp6tre a appris quelle est la cha-
rite et la foi de Philemon , mais il a appris comment la li-
beralite de Philemon ( car c'est ce que signifie dans le Ian-
gage de I'Apotre le mot Y.oiv(tiviy. que la Vulgate rend a la
lettre par communicatio , liberalite qui consiste a communi-
quer aux autres les biens que Ton possede , a leur en faire
part , ce qui est I'exercice meme de la charite ) , il a appris
comment cette liberalite qui nait de la foi de Philemon
devient evidente; c'est I'expression de la Vulgate : Ut
communicatio Jidei tuce evidens fiat ^ ; expression qui prouve
que le traducteur latin lisoit dans le grec , ivapyriq ,, qui si-
gnifie evidens ; on lit aujourd'hui dans le grec ivepyYjq, qui
signifie ejjicax : il a appris comment la liberalite de Phile-
mon devient efficace : ce qui rentre a pen pres dans le
meme sens ; mais cependant la lecon que suppose la Vul-
gate parolt preferable , parce qu'elle convient mieux avec
la suite ; car cette liberalite devient evidente, parce qu'elle
se fait connoitre par toutes sortes de bonnes ceuvres ; et
c'est le sens fort nalurel qu'exprime la Vulgate : Ut com-
municatio Jidei tuce evidens Jiat in agnitione omnis operis boni;
et voila encore deux motifs qui contribuent a assurer le
succes de la demande de I'Apotre ; car dans les circons-
tances presenles Philemon ternira-t-il, effacera-t-il I'eclat
de ses liberalites par un refus?Lui qui embrasse toutes sor-
tes de bonnes ceuvres , pourra-t-il refuser celle que I'Apo-
tre va lui demander, et ou il ne s'agit pas meme de repandre
dans des mains etrangeres des biens dont il est si liberal ,
mais seulement de rendre sa bienveillance et son amitie a
un de ses esclaves? Mais il y a encore ici deux circonstan-
* C'est ce que I'on volt clans le verset sulvanl m6me, oii I'expression Travro;
a-yaOou signifie tout bien sans distinction , c'csl-a-dire toute sorte de bien , an
lieu que s'il y avoit wavTo; roii a-yaOou , ce seroit tout bien sans exception,
c'est-^-dire tout le bien possible. — *)f 6,
SLR l'^pItBE A PHILEMON. 187
ces que I'ApAtre ne neglige pas ; et d'abord e'est que ces
bonnes ceuvres qui rendent ainsi evidente la liberalite de
Philemon , ne se trouvent pas seuleraent en lui ; toute sa
maison y contribue; c'est un bien qui leur est commun :
Omrns operis boni quod est in vobis. Puisqu'ils contribuent
ainsi tous aux bonnes oeuvres qui naissent de la foi de Phi-
lemon, ils contribueront aussi sans doute volontiers a
cclle que 1' Apotre va demander , et pour laquelle il les in-
teresse enrappelantle souvenir de toutes celles auxquelles
ils ont deja contribue. Mais de plus c'est que tout cela se
fait pour Jesus - Christ , car c'est ce qu'exprime le grec :
zi; XoiTT&v \r,'jO'jv, in Christum Jesum. Or, c'est pour un
membre de Jesus-Christ que I'Ap^tre va interceder; sa
demande ne pourra done pas etre refusee. Ainsi voila deja
beaucoup de motifs capables d'appuyer la demande de
r Apotre; mais il ne les presente qu'indirectement, et en
disant simplement qu'il rend graces de toutes ces choses.
A Taction de graces iljointla congratulation, c'est-a-dire le
temoignage de cette joie qui est le principe meme de son
action de graces. II declare done que s'il rend graces aDieu
pour Philemon , c'est parce qua I'occasion de ce disciple
fidele,il a ete touche d'une grande joie : Gaudium enim
magnum habui^ ; et cette joie a ele pour lui une consolation
au milieu de ses afflictions et de ses maux : Gaudium enim
magnum habui et consolalionem. Le sujet de cette consola-
tion et de cette joie etoit sans doute en meme temps et la
foi et la charite qu'il trouvoit dans ce disciple , et dont il
vient de rendre graces : mais insistant toujours davantage
sur la charite qui devoit etre le principe de I'oeuvre qu'il
valui demander, il ne parle ici que de cette seule vertu :
in charitate tua. Il a ete console parce qu'il a su que ses
freres I'etoient: ce que Philemon a fait pour le soulagement
et la consolation des saints , Paul I'a regarde comme un
soulagement et une consolation pour lui-meme ; il a ete
console par la charite de Philemon , parce qu'il a su que
les entrailles des saints avoient ete consolees et soulagees
par Philemon : Quia viscera sanctorum requieverunt per fe.
N'est-ce pas lui insinuer qu'il tiendra comme fait a lui-
meme ce qu'il va lui demander pour cclui dont les inte-
rets lui sontchers? Et pour mieux marquer a Philemon son
affection , il termine cette congratulation par le tendre
l88 PUEFACE
iiom de frere , quia viscera sanctorum requieverunt per le ,
frater.
11 vient ensuite a la proposition qui est le principal ob- i
jet de sa leltre ; et d'abord il fait sentir a Philemon que |
tout ce qu'il vient de dire ne fait qu'exprimer le motif
sur lequel est appuye ce qu'il va ajouter : Propter quod^\
L'autorite du ministere dont il est revetu lui donne le
droit de commander a Philemon; etil ne neglige pas ce
motif: mais comme ce n'est pas la voie qu'il juge a propos
de prendre dans cette occasion , il se contente de repre-
senter a Philemon qu'il pourroit en Jesus-Christ prendre
la confiance et la liberte de lui commander une chose qui
est tres convenable , et qu'il auroit m^me beaucoup de
sujet de le faire : multamjiduciam , izoKkriV 'naopri'jia.v, habens
in Christo Jesu imperandi tibi quod ad rem pertinet. Apres
avoir ainsi seulement montre ce motif, il I'abandonne
et temoigne qu'a cause de I'affection qu'il a pour Phi-
lemon , il aime mieux prendre la voie de demande et
de supplication : Propter charitatem magis obsecro ^.
Mais en meme temps il releve cette priere par la con-
sideration de ce qu'il est a I'egard de Philemon : Cum
sim talis; c^Y c'est Texpression du grec, towlIto; wv. II
lui represente done ce qu'il est, cum sim talis. II pourroit
insister sur son apostolat, et il I'avoit deja fait sentir en
parlant de la liberte qu'il pouvoit prendre en Jesus-Christ:
ici done il se contente d'abord de se nommer, ut Paulus.
Ce seul mot disoit beaucoup : mais ce n'est pas tout; a
l'autorite de sa dignite il ajoute celle de son age, c'est-a-
dire de sa vieillesse : Senex ; et enfin celle des liens qu'il
porte actuellement pour le nom de Jesus-Christ : Nunc
autem et vinctus Jesu Christi. Tant de titres si respectables
lui donnoient bien le droit de commander; mais enfin il
aime mieux prier; il le repete done : Obsecro te^. Mais
pour qui prie-t-il? pour un de ceux qu'il regarde comme
ses enfans en Jesus-Christ : Projilio meo. II y a plus ; ce
fils lui est d'autant plus cher, que c'est dans ses liens qu'il
I'aengendre: Quern genui invinculis. Mais quel est -il ce
fils si cher? L'Ap6tre enfin le nomme; c'est Onesime :
Onesimo. Ce nom rappelle aussilot au souvenir de Phile-
mon le tort que lui avoit cet esclave : rAp6tre I'avoue
tacitement en reconnoissant que Philemon n'avoit pas
1 ^ 8. — -y 9-—' y- 10.
SIR L EPITREA PHILEMON. 1 8,^
recti tie cet esclave I'utilite qn'il devoit en attendre : Quid
tibi aliquando iniitilis fuit^. Et il y a ici dans le fjrec une
allusion secrete entre le nom d'Onesime , OviViuo;_, qui en
celle langue signifie avanlagenx , et le mot a.yor,rr:o^ qui si-
gnifie inutile. L'Apotre avoue done qu' autrefois Onesime
n'a pas rempli aupres de son maitre la signification de son
nom; qu'il ne lui a pas ete utile : Qui libi aliquando in-
utilis fuil; mais il lui declare que maintenant il est tout
different de ce qu'il etoit alors; cet esclave que Paul a
engendre a une nouvelle vie , est maintenant capable
d'etre utile a Philemon et a Paul. La Vulgate porte : Nunc
avUem et mihi el libi utilis : et le grec : Nuvi Bs aol /.xl iaoi
rJyorjTrov : Nunc autem libi el mihi utilis. Enfin il de-
clare a Philemon que c'est lui-meme qui le lui a en-
voye : Quern retnisi libi. C'etoit deja assez I'inviter a le
recevoir ; mais il le lui demande en termes expres , et de
la maniere la plus pressante : Tu autem ilium, ut viscera mea,
suscipe^. 11 avoit temoigne la joie et la consolation qu'il
avoit recue de ce que par la charite de Philemon les en-
trailles des saints avoient ete soulagees; mais maintenant
ce sont les entrailles de Paul meme qui seront soulagees
par la charite avec laquelle Philemon recevra Onesime :
quel motif plus pressant? Tu autem ilium , ut viscera mea ,
suscipe. Paul vient de dire qu' Onesime pouvoit mainte-
nant etre utile el a lui et a Philemon meme ; il s'explique,
et il montre comment Onesime pouvoit lui etre utile. 11
declare done qu'il avoit eu dessein de retenir aupres de
lui ce disciple : Quern ego volueram mecum detincre^ . II vou-
loit le retenir pour recevoir de lui les services dont il avoit
besoin : Ut mihi minislraret ; mais services qu'il avoit
droit d'attendre de Philemon meme, et que cet esclave
lui auroit rendus au nom et en la place de son maitre : Ut
pro te mihi ministraret , services dont Philemon meme se
seroit fait un honneur, non-seulement a cause de la dignite
ct de lage de I'Apotre, mais encore a cause des liens que \
I'Apotre portoit alors pour I'Evangilc : Ulpro te ?fii hi mi-
nislraret in vinculis Evangelii. Paul avoit done droit de rete- ,
nir aupres de lui cet esclave qui lui auroit ete vrairaent j
utile ; mais il n'a rien voulu faire sans I'avis de Philemon \
a qui cet esclave appartenoit : Sine consilio autem tuo nihil
volui facer e'^. Pourquoi? parce qu'il n'a pas voulu user de
•y ii._St^i2._-> f i3.— ♦y 14.
I go PREFACE
son autorite pour obtenir cela de Philemon ; il n'a pas voulu
que le bien que Philemon feroit en lui laissant cet esclave
fut un bien pour ainsi dire force , et accorde seulement
a la necessite : Ud ne velut ex necessitate bonum tuum esset.
II le lui renvoie done , afin que si ensuite Philemon juge a
propos de le laisser retourner a Rome pour y etre utile a
Paul, ce soil de sa partune bonne oeuvre toute volontaire:
Utine velut ex necessitate bonum tuum esset, sed volunta-
rium. Aprcs cela Philemon pourra-t-il refuser de recevoir
avec charite ce disciple que Paul lui recommande , et dont
il seprive par attention pour lui? Ne s'empressera-t-il pas
plutot de rendre son amilie a Onesime , et de le renvoyer
en son nom et de sa part vers Paul? Mais voici encore un
autre motif qui a determinePaul a renvoyer Onesime, et qui
doitporterPhilemon ale recevoir;: c'est que cet esclave n'a
peut-etre quitte son mattre ( ou, selon le grec, n'a ete separe
de son mattre) pour un temps, qu'afin que son maitrelere-
couvrat ensuite pourjamais: Forsitan enimideo discessit[^r.
separatum est) ad horam a te ,ut celemum ilium reciperes ' ; et
qu'il le recouvrat non plus comme un esclave, mais comme
un frere , a cause de sa nouvelle naissance en Jesus-Christ ,
Jam non utservum, sed pro servo fratrem^ ; et un frere bien-
2im\e,fratrem c^fVec^awi; c'est la construction du grec ; aulieu
de quoi la Vulgate porte , charissimumfratrem : au fond c'est
la meme chose , mais la gradation est mieux observee dans
la construction du grec. L'apolre justifie cette expression,
en faisant remarquer que ce disciple est en effet un frere
bien-aime principalement pour lui en particulier : Maxi-
me mihi ; et que s'il lui est cher , a lui auquel il n'appar-
tient que par les liens de la foi , il doit I'etre encore
plus a Philemon , auquel il appartient et selon la chair et
selon le Seigneur , c'est-a-dire et par le tiire de son an-
cienne servitude , et par le titre de sa nouvelle naissance :
Quanto autem magis tibi , et in carne et in Domino ? Mais ce
lien de fraternite qui unit ensemble tous les fideles , four-
nit encore ici a Paul un nouveau motif. En demandant
qu'Onesime fut recu comme ses propres entrailles, il s'e-
toit exprime d'une maniere tres vive , mais au fond ce
n'etoit cependant qu'un motif d'humanite : il s'el^ve
plus haut , et il emploie un motif de foi. II fait abstraction
de son apostolat qui le meltoit au-dessus de Philemon ;
»^ i5.— 2>^ If).
sua L EPITRE A PHILEMON. igi
il se considereseulement comme disciple de Jesus-Christ ,
et par consequent etroitement uni a Philemon par les
liens de cette commune fraternite ; il suppose qu'au moins
Philemon le considcre comme lei : Si ergo habes me so-
ciiim * ; et sous ce point de vue il le prie de recevoir One-
sime comme il le recevroit lui-meme , parce que Onesime
qui lui est devenu en Jesus-Christ un frere bien-aime, est
en effet un autre lui-raeme : Suscipe ilium sicut me. Est-
il possible de se refuser a de telles instances ? ne pas re-
ceroir Onesime, ce serait blesser les entrailles de Paul,
ce seroit le rejeter lui-meme : que repondre a deux motifs
si pressans ? Ilium , ut mea viscera . . . Sucipe ilium sicut
me. Mais Onesime a fait tort a Philemon , et il lui reste
redevable : I'Apolre veut bien encore le supposer, ou
plutot ill'avoue ,et il suppose seuiement que Philemon lui
lasse cette objection : Siaulcm aliquid nocuit libi , ' aut de-
bet^ ; mais en ce cas, il consent que tout lui soit impute a
lui-meme : Hoc mihi impula. Et pour mieux assurer cette
caution si tendre et touchante, il marque expressement
que c'est lui-meme , lui Paul , qui ecrit cela de sa propre
main : Ego Paulus scripsi m^a manu ^. Ce n'estpas assez ;
non-seulement il consent que tout lui soit impute , mais il
prometqu'en effet , s'il le faut , il rendra tout : Egoreddam.
Cependantil n'oublie point sa dignite ; Philemon doit sen-
tir que loin d' accepter la caution de Paul , et d'exiger quel-
que chose de lui , il se doit lui-meme tout entier a Paul de
qui Dieu s'etait servi pour appeler les nations a la foi dont
il avait ete rendu participant : I'Apotre temoigne done qu'il
ne veut pas meme insister sur cela : Utnon dicam, libi quod
et teipsummihi debes.
Enfiu vient la conclusion. L'Apotre la commence par
une invitation tendre et pathetique; et donnant encore
une fois a Philemon le nomde frere, il le presse et lui de-
mande que lui Paul puisse recevoir de lui Philemon cet
avanlage comme un effet de cette union intime qui esten-
tre eux en Jesus-Christ notre Seigneur: Ita , frater , ego
le Jruarin Domino^, c'est I'expression de la Vulgate ; mais
le latin ne pent pas rendre ici toute I'energie du grec :
^a£j i'^i/.^s eyoj {>ou ovaiariv svKjotcj). Le parallele de ces
deux idees rapprochees, ego le , moi Paul , vous Philemon,
a aussi une force singuliere que le latin meme conserve
192 PHEFACE
assez , mais que la langue francaise ne pent cxprimcr ,
ISaly a^elcohj, syw cou 6vc(.iiJ.-f]v h Kupto). L'Apotre rcunit en-
suite les deux motifs lesplus puissans qu'il avait employes ;
c'est d'accorder ce soulagement aux entrailles de Paul ,
mais de I'accorder en vue du Seigneur, parce que c'est
dans le Seigneur meme que ses entrailles recevront ce sou-
lagement : Rejice viscera meain Domino. II lui declare qu'en
lui ecrivant cette lettre il a beaucoup de confiance dans sa
docilite et sa soumission : Conjidens in ohedienlia luascripsi
libi^. U va plus loin ; et il tcmoigne qu'il est persuade que
Philemon fcra meme plus qu'il ne luidemande ; c'est-a-dire
qu'il espere que non-seulement Philemon recevraOnesime
sans rien exiger de lui, mais qui lui rendra toute son ami-
tie , et le renverra meme vers Paul pour lui etre utile :
Paul a seulement demande qu'Onesime fut recu ; mais il
est persuade que Philemon fera plus : Sciens quoniam et
super id quod dico fades. Apres cela il prie Philemon de lui
preparer un logement , parce qu'il espere que Dicu le ren-
dra a Philemon , a sa famille et a toule I'Eglise meme de
Colosse par lemerite de leurs prieres : Simul autem et para
mihi hospilium : nam spero per orationes vestras donari me
vohis^. II salue personncllement Philemon de la part de
d'Epaphras, evequede cette ville, quietaitprisonnier avec
lui a Rome pour la cause de Jesus-Christ : Salutat le Epa-
phras concaptivus meus in Christo Jesu^. Au salut d'Epa-
phras il joint ceux de Marc , cousin de Barnabe dont il
parle dans I'epttre aux Colossiens *, d'Aristarque , Juif dont
il parle aussi au meme endroit ; de Demas , qui alors lui
etait attache , et dans la suite se separa de lui ^ ; il y joint
le salut de Luc Tevangeliste ; il les appelle tous ses aides
et les compagnons de ses travaux : Marcus , Aristarchus ,
Demas et Lucas, adjutores (^selon legrec, cooperatores)mei^.
Enfin il salue Philemon et toute sa famille , et leur souhaite
a tous que la grace de Jesus-Christ notre Seigneur soit
avec leur esprit: Gratia Domini nostri Jesu Christi cum spi-
piritu vestro. AmenK
Remarques La souscription qui est au bas de cette epttre dans les
sur le temps exemplaires grecs , marque qu'elle fut ecrite deRome , et
el le lieuou portee par Onesime : le texte meme prouve I'un et I'autre;
celleepilre ^ K^ ,., - •, *, 1 m- - f >• ...
fut ecrite. el ^^ T ^o^*- ^" "^ esperoit etre delivre de ses hens , et retour-
* y 21.= — - >' 32. — '^ <jt 23. — * Coloss. IV. lo. — " 2. Tim. iv. q. — ^ j^ 2/,.
.-■'1^25.
suR l'epitre a PHILEMO.1. igS
ner en Phry^e; ce qui prouve que c'etoit au temps de sa sursacanoni-
preniiere captivite, c'est-a-dire vers Tan 62 de I'ere ch. *^'*^'
vulg.
Saint Jer6me remarque ' qu'il y avail quelques personnes
qui trouvaient quele sujet de cette epitre etoit peu digne du
soin de I'Apotre , et qui par celle raison voulaient qu'elle
ne fut pas de lui , ou du moins pretendoient qu'elle ne me-
ritoit pas d'etre mise au rang des saintes Ecriturcs , comme
n'ayant rien de necessaire pour notre edification , ni qui
fut digne du Saint-Esprit. Mais ce raisonnement m^me est
bien indigne de ceux qui adorent un Dieu qui n'a pas de-
daigne de mourir pour des esclaves rebelles et impies , et
qui savent que ce Dieu choisit ce qu'il y ade plus foible
selon le raonde , pour confondre ce qu'il y a de plus fort ,
et ce qu'il y a de plus bas selon le monde pour confondre
ce que le nionde estinie de plus grand. Aussi cette epitre
a-t-elle toujours ete recue dans I'Eglise , qui I'a regardee
comme eiant tresdigne du zele et de la charite de saint
Paul , et trespropre a faire comprendre aux premiers pas-
teurs de I'Eglise le soin qu'ils doivent avoir des moindres
de leurs brebis. On peut aussi tirer de cette epitre beau-
coup d' instructions tres utiles pour tous les fideles.
^ Hieron. prooem. in ep. ad Philem.
a3. i3
EPITRE
DE SAINT PAUL
A PHILEMON*.
CHAPITRE UNIQUE.
Philemon exhorle h recevoir On^sime son esclave , qui s'elant enfui de cbez
lui, etoit venu Irouver saint Paul a Rome , et y avoit re^u le bapleme.
1. Paul, prisonnier pour Jesus-
Christ, et Timolhee son frere, a
notre cher Philemon, notre coope-
rateur, '
2. A notre tr eschere' soeur Ap-
pie,' a Archippe ' le compagnon
de nos combats, ' el a I'Eglise qui
est dans votre maison :
3. Que Dieu notre Pere et Jesus-
Christ notre Seigneur vous don-
nent la grace et la paix.
4. Me souvenant sans cesse de
vous dans mes prieres, je rends
graces a mon Dieu ,
5. Apprenant quelle est votre
1. PAULcsvinctus Chris-
ti Jesu, et Timotheus fra-
ter , Philomeni dilecto ,
et adjutori nostro,
2. Et Appiae sororicha-
rissimse , et Archippo
commilitoni nostro , et
Ecclesiae quae in domo
tua est :
3. Gratia vobis et pax
a Deo Patre nostro , et
Domino Jesu Christo.
4- Gratias ago Deo
meo , semper niemoriam
tui faciens in orationibus
meis,
5. Audiens charitatera
* La preface de celte ^pitre peut lenir lieu de commentaire sur tous les ver-
setsduchapitre^
•^ r. C'estrexpression du grec.
f 2. Selon le grec : notre chere Appie. Le mot de soeur n'est pas dans le
grec imprime.
Ibid. Son epouse.
Ibid. C'estceluidont iIestparIedansr^pilr^auxColossiens,iv. 17. On
croit qu'alors il etoit pretre ou ni^me ev6que , etqu'il gouvernoit I'Eglise de
Colosse en I'absence d^Epaphras, qui en etoit rap6tre el le premier dveque, et
qui ^toit alors prisonnier i Rome. fnfr. 7^ 1 3,
J bid. De nos travaux evangeliques.
liiam,etfiJeinquam ha-
lies in Domino Jesu, et
in onmcssanctos :
0. Ut coiumunicalio
(idei tiiac evulens fiat in
a^nitione omnis operis
boui, quod est in Yobis in
Christo Jesu.
ep!tre DE SAinr PAUL, etc. laS
foi envers le Seigneur Jesus, et
votre chariteenverslous les saints;*
6. Et de quelle sorte la liberalite*
qui nait de votre foi eclate aux
yeux de tout le monde , se faisant
connoitre par lanl de bonnes ceu-
vres qui se pratiquent dans votre
maison pour' I'amour de Jesus-
Christ.
7. Car Totre charite , mon cher
frere, nous' a connbles de joie et
de consolation , voyant que les
coeurs' des saints ont recu tant de
requieverunt per te , fra- soulagement de votre bonte.
ter.
7. Gaudium enlm ma-
'j^num habui , et consola-
tionein in cbaritate tua :
quia viscera sanctorum
8. Propter quod mul-
tam fiduciam habens in
Christu Jesu imperandi
4ibi quod ad rem pertioet :
9. Propter charitatem
magis obsecro , cum sis
talis , ut Paulus senex ,
nunc autem et vinctus
Jesu Christi :
1 o. Obsecro te pro meo
fdio, quem genui in vin-
culis, Onesirao:
11. Qui tibi aliquando
inutilis fuit, nimc autem
et mihi et tibi utilis :
12. Quem remisi tibi.
Tu autem ilium, ut mea
viscera, suscipe ;
8. C'est pourquoi , encore que
je puisse prendre en Jesus-Christ'
une enti^re liberte ' de vous ordon-
ner une chose qui est de votr€ de-
voir;
g. Neanmoins , a cause de I'a-
mour que j'ai pour vous, et puis-
que vous etes si charitable, j'aim«
mieux vous en supplier, comme
Paul, comme vieillard, et comme
prisonnier pour Jesus-Christ. '
lo.Or, la priere que je vous fais
est pour mon fils Onesime, que j'ai
engendre dans mes liens : '
1 1. Qui vous a ete autrefois inu-
tile, mais qui vous sera maintenant
utile, aussi bien qu'a moi.
12, Je vous le renvoie; et je
vous prie de le rccevoir comme
mes entrailles : '
y 5. LesfiJeks.
■f 6. C'est le sens du grec
Ibid. C'esl le sens du grec : m Chriititm Jesunt.
i 7. C'esl le sens du grec : habuiinus.
Ibid. Liu. lesenlrailles.
y 8. Comme son ap6lre.
/Aiirf. C'est le sens du gi-ec.
V^ 9 . Grec : quoique je sois lei que je suis, cest-d-dirc que je sois Paul, etc,
y 10. L'ayanl converti k la foi depnis que je suis en prison .
y 1 5. Comme mon cher fils.
EPITIIE DE SAINT PAUL
196
i3. J'avois pense de le i-etenir
aupr6s rle mol , afin qu'il me rendit
quelque service en voire place,
dans les chaines que je porte pour
I'Evangile;
14. Mais je n'ai rien voulu faire
sans votre consentemcnt , ' desirant
que le bien que je vous propose
n'ait rien de force, mais soit en-
tierement volontaire.
i5- Car peut-elre qu'il n'a ete
separe de vous pour un lenips
qu'afln que vous le recouvrassiez
pour jamais,
16. Non plus comme un simple
esclave , mais comme celui qui
d'esclave est devenu I'un de nos
fr^res bien-aiines , ' qui m'est tres
cher, i moi en particulier, et qui
vous le doit etre encore beaucoup
plus, etant i vous, et selon le
monde,' et selon le Seigneur.'
17. Si done vous me considerez
comme etroitement uni a vous, re-
cevez-le comme moi-memc.
i8. S'il vous a fait tort, ou s'il
vous est redevable de quelque
chose, mettez cela surmon compte.
ig. C'est moi Paul qui vous
I'ecris de ma main ; c'est moi qui
v^us le rendrai , pour ne pas vous
dire que vous vous devez vous-
meme a moi. '
20. Oui, mon frere , que je re-
coive de vous cette joie' dans le
Seigneur; donnez-moi au nom du
Seigneur cette sensible consola-
tion.
i3. Quern ego rolue-
ram mecum detinere , ut
pro te mihi ministraret in
in vinculis Evangelii :
14. Sine consilio au-
temtuo nihil voluifacere,
uti ne velutex necessitate
bonum tuum esset , sed
voluntarium.
i5. Forsitan ideo dis-
cessit ad horam a te, ut
Eeternum ilium reciperes;
16. Jam non ut ser-
vum, sed pro servo cha-
rissimum fratrem, maxi-
me mihi : quanto autem
magis tibi , et in carne et
in Domino?
17. Si ergo habes me
socium,suspice ilium sic-
ut me.
18. Si autem aliquid
nocuit tibi, aut debet,
hoc mihi imputa.
ig. Ego Paulus scripsi
mea manu : ego reddam,
ut non dicam tibi quod
et teipsum mihi debes.
20. Ita, frater, ego te
fruar in Domino : refice
viscera mea in Domino.
y^ 14. Lilt, sans votre avis.
V- i5, C'est I'expression du grec.
■j^ 16. C'est le sensdu grec.
Jbid. Comme votre esclave par sa condition.
Ibid. Comme votre frere par la foi en Jesus-Christ.
■i 10. Qi^cje pourrois vous demander la grace d'Oncsime, en compensation
decelle du salul que je vous ai procuree.
4 20. Gr. autr. cet avantage.
a I. Confidens in obe-
ilientia tua scripsi tibi :
sciens quoniam et super
id quod dico, facies.
33. Siiiiul autem et
para mihi hospitium :
nam spero per orationes
vestras donari rae vobis.
aS. Salutat te Epapbras,
concaptivus meus in
Christo Jesu ,
24. Marcus , Aristar-
chus, Demas , et Lucas ,
adjutores mei.
25. Gratia Domini nos-
tri Jesu Christi cum spi-
ritu vestro. Amen.
A PHILEXON. 1^1
21. Je Tous 6cris ceci dans la
confiance que rotre soumission me
donne, sachant que yous en ferez
encore plus que je ne dis.
22. Je vous prie aussi de me pre-
parer un logement , car j'espire
que Dieu me redonnera a vous en-
core une fois, par le raerite de vos
prieres.
20. Epaphras ,' qui est comme
moi prisonnier pour Jesus-Christ,
TOus salue,
24. AvecMarc,' Aristarque, De-
mas et Luc, qui sont mes aides et
mes compagnons. '
25. Que la grace de notre Sei-
gneur Jesus-Christ soil avec Totre
esprit. Amen.
■/ 2 3. Voyez la note sur le f a.
^ 24. Quelques-uDs croientqae c'est Jean Marc , cousin de Bamabe. Col.
IT. 10.
Ibid. Dans le ministere de I'ETangile. — Selon le grec : qui sont mes coop^-
rateurs.
Les exemplaires grecs portent ici : Ecrilede Rome k Philemon parl'entre-
mise d'On^sime, en 37 versets.
PREFACE
SUR
LEPITRE AUX HEBREUX
L'epItre aux Hebreux est un des plus beaux et des plus
c.'n^ralesTur' P^^^^^ux monuniens que possede I'Eglise chretiennc. La
.eiie opiire. grandeur des choses ,et rimporlance de la matiere y soril
Tariage de partout soulenues par la noblesse des expressions et par
cc'.iepretat^e. I'elevation du style. Mais aussi nulle autre epitre n'a donne
plus d'exercice aux interpretes, et n'afourni plus de ma-
tieres a la contestation ; nulle autre n'a ete plus combal-
tue , et n'a ete exposee a plus de jugemens divers. On a
doute de son authenticite, et del'inspirationde son auteur;
on I'a contestee a saint Paul , et on I'a altribuee a saint
Clement pape , ou a saint Luc , ou a ApoUon , ou a Barnabe ;
on a dispute sur la langue dans laquelle elle a ete ecrite,
si c'est en grec ou en hebreu ; enfin on a forme des difficul-
les sur le lieu d'oii elle avoit ete envoyee , sur le temps au-
quel elle a ete ecrite, sur le rang quelle doit tenir parmi
les Epttres de saint Paul, et sur les personnes a qui elle est
adressee. Nous allons examiner chacun de ces points; et
apres avoir rapporte les raisons pour et contre, nous
prendrons le parti qui nous paroitra le plus conform e a J a
verite.
ARTICLE PREMIER.
De I'auteur de I'^pltre aux Hebreux.
Opinion de Orig&ne*, apres avoir balance tout ce que Ton disoitde
ccnx qui oni I'auteur dc cette lettre , avoue que Dieu seul en connoit
allribiic telle >
' Origen. komil. in epist. ad Hebrceos, apudEuseb. lib. vi.cap. aS. Hisl.
PREFACE SUB t'EPtTRE AUX IIEUREUX. I QQ
le veritable autcur. II clit que Ics uns rattribuoicnt a saintVpiireAsaint
Clt'ineul pape , qui a vecu avec les apolres, et d'autres aCltmcut.
levani^elisle saint Luc. Pour lui il croit que le fond des
pensees est de saint Paul , mais que le style , la composi-
tion et I'arrangement , sont de quelque autre qui , etant
rempli des senlimens de I'Apotre , les a rediges par ecrit
dans cet onvrage. 11 soulient , el il en prend a temoin
tons ceux qui ont lu les ecrits de saint Paul , et qui sont
capables d'en juger, que le style et le tour en sont plus
beaux et plus polis que ceux de ses autres lellres. Le sens
et les pensees en sont admirables , et comparables a tout
ce que les apotrcs ont ecrit de plus grand et de plus ins-
Iructif.
Ceux qui du temps d'Origene attribuoient cette epilre
au pape saint Clement se fondoient premierement sur la
ressemblance du style * qui se remarque entre cette epitre
et celle de saint Clement aux Corinthiens; et ensuite sur
ce que ce saint pape emprunte souvent , et les pensees,
et les tours de phrases , et meme les propres paroles de
I'epilre aux Hebreux , sans toutetois la nommer ; ce qui
semble insinuer qu'il la regardoit comme son propre ou-
vragc. Muhis de epislola qiice sub Pauli nomine ad Ha-
braos fertur , non solum sensibus , sed juxla verborum quo-
que ordinem abutilur , dit saint Jerome apres Eusebe de
Cesaree^.
Ce dernier, quoiqu'il ait Tort bien remarque la confor-
mile du style de ces deux epitres, et les morceaux de I'e-
pitre aux Hebreux que saint Clement avoit inseres dans
sa lettre aux Corinthiens , n'ose pas dire toutefois que ce
saint pape ait compose celle qui est adressee aux Hebreux :
eccl. Ti; St c ff aij^ct; ttv s-toroXiJrv, to ulJv iXr.Oe; ©eb; cl^rv, % Si eu; riAOC <pOd-
oao* iff-ropia Itko t'.vmv u.£v XE-yivrwv oti IQr^an? 6 •'pr.vo'p.Evc; Iitiotccitc; Pouaiuv
£-ypat{/£ -rh eiTt(rro).T,v, uiro twojv ^e OTt Avjy^SL; 6 "i^d^au; to euayysAicv, xal to?
1730451;. Et un peu plus haul: E-jto Si aTTC9awou.»vc; s'tvoiu.' iv, cti Ta jjisv
voTaotTa TC'j A7TC<rTC/cu iazh, r, SI osast;, xat r ffuvfleot; a7rc(Avr,u.cv£U(T»vT5';
two; toc dicGOToXixa, xat etoxEp cxoXicypa^iffot'/TO^ ri tipujuva urcb tgu <J'i^tt<rxa-
Xcu.
* Idem ibidem : Oi Sk tov RXxjAEvTa toutcv airbv lpfiTrȣt3(iai Xe'-ycudi viy
-jrpacpT.v. O xal [xoXXo'tf e'r, av i>.rfiii to tov ou-cicv tt; 9paa£&>; x*p**'"i?* "^ '^
Tcu K).T.p.cVTO? eiTKrrcXTr*, xal tt< ■ttjo; Eopaicu; aTrcdu^eiv. — * Hieronym . in
Catalogo, voce Clemens. Eiiseb. Hist. eccles.Jib. lu. cap. 38. Ev -rr, wfb;
KcptvBio'jjjTTi; TTfb; E6pa:0'j; izuj.k vcxjAaTa napaOEt; , fiSr, Sk, xal aoToXe^Et
priTci; Tta". i^ aurjj; xfr.'ji^i.vtci, tjcL^iTrcnx raps(TTr,ot on (xt vjov uirapxet to
a\rY{fOiu.u.x. Vide Clem, epist. paragr. 17. 36. 43. 58.
200 PREFACE
il temoigne seulemenl qu'on lui imputoit de I'avoir tra-
duite de I'Hebreu en grec'. Mais nous esperons renverser
celte opinion par son fondement , en faisant voir que i'e-
pitre aux Hebreux ne fut jamais ecrite en hebreu. A. I'egard
de la ressemblance du sLyle , elle ne paroit pas assez sen-
sible pour pouvoir en interer que ces deux epttres soient
du meme auteur^. 11 est vrai que saint Clement a copie
quelques passages de I'eptlre aux Hebreux , sans la citer ;
mais souvent il en use ainsi, de meme que saint Polycarpe
et saint Ignace : ils emploient les paroles des apolres et de
notre Seigneur, comme si c'ctoient leurs propres expres-
sions , soit qu'ils le fassent pour orner leurs discours , soit
pour donner du poids a leur raisonnement. De plus , tou-
tes les circonstanccs qui se remarquent dans cette epttre
ne conviennent nullement a saint Clement, lequel d'ail-
leurs n'a jamais passe dans I'Eglise pour un esprit inspire ,
au lieu que I'auteur de cette epitre a ete regarde comme
tel des le commencement du christianisme.
Opinion de Les peres qui paroissent les plus favorables a saint Cle-
cevixquiont nient n'ont pas ose la lui attribuer absolument : ils par-
auribue ceue jgj^j. aygc doute ; ils reconnoissent que plusieurs la don-
dpilre i saint • . v . , ' , ^ * • t ' •.
j^m; noient a saint Luc , les uns croyant que saint Luc en etoit
le veritable et premier ecrivain , et les autres qu'il n'en
etoit que le traducteur , ou au plus que le secretaire , qui
rendoit en grec d'un style plus pur et plus poli ce que
saintPaul lui dicloit d'une maniere raoins elegante et moins
correcte. On fait aussi vnloir ici la conformile du style ; et
on ajoute rattachement de saint Luc a saint Paul , et la
confiance de saint Paul en saint Luc , comme des motifs
propres a persuader qu'il est au moins traducteur de cette
piece,
Mais de toutes ces raisons , celle de la ressemblance du
style est la seule qui merite qu'on s'y arrete. Or, on irouve
sur cela bien de la diversitc. Saint Clement d'Alcxandrie^
croyoit y voir les memes caracleres , le meme gout , la
meme couleur, comme il parle , que dans les ecrits de saint
^Euseb.JIist. eccl. I. iii. c. 38, — ^ Spanheim. de Auctore epist.ad Hehr.
parle i.e.']. n. 7. 8. • — "^ Clem. Alex. lib. hypotypos. apud Euseb. Hist.
7r,aTt Tvi; £~iCT<j?.r)?, >c(/.; rwv vrf a^srov.
sun l'epitrk alx h^breux. aoi
Luc. Grotius* trouve dans I'epkre aux Hebreux plusieurs
manicrcs de parler qui sont familieres a saint Luc ; et quoi-
qu'il avoue que cette epitre est d'un style beaucoup plus
releve que I'Evangile et les Actes, il reraarque que saint
Luc n'est pas toujours egal dans son style , et que dans les
endroits ou il peut donner un pen plus de liberte a son
discours, comnie quand il n'est pas contraint de rappor-
ter les propres paroles de Jesus-Christ, etqu'il s'abandonne
a son genie, il est beaucoup plus eloquent. Erasme^ re-
connoit aussi dans I'epitre aux Hebreux le meme style ou
un style fort approchant de celui des Actes des apotres :
Et Lucas quid£m ipse in Acds apostolicis parum abest ab hu-
jiis epistoUe eloquentia. Malgre tout cela, il n'ose I'attribuer
a saint Luc ; il aime niieux la donner au pape saint Clement :
Admodam probabile est quod subindicavit D. Hieronymus ,
Clevientem , Romanuni pontijiccm a Petro quartum , auclo-
rem kujiis epislolcejuisse. Mais Grotius va plus loin ; il ne
se contente pas de dire que saint Luc I'a traduite , ou qu'il
lui a donne son style avec I'agrement de saint Paul; il veut
qu'il I'ait composee, et envoyee de son chef.
Spanheim pretend au contraire que cette piece n'est
point I'ouvrage de saint Luc , principalement a cause de la
difference du style ; le langage de saint Luc , selon lui , est
plus grec que celui de cette epitre : Stylus epistolce a dic-
tione et phrasi Luccb magis grcecanica longissime distat^.
Jacques Capelle soutient de meme qu'il y une grande dif-
ference entre le style de saint Luc, et celui de I'auteur de
la letlre aux Hebreux : Cum hujus epistolce stylus stylo Lucce
sit dissiniillimus*. Apres des sentimens si opposes, quel
fond peut-on faire sur les jugemens des plus habiles criti-
ques touchant la pretendue conformile ou difference des
styles?
Venons a ceux qui I'ont attribuee a saint Barnabe. Ter- Opinion de
tullien est le premier auteur de cette opinion : Extal ^^ ceux qui ont
Bamabce litulus ad Hebrceos^ . Et ce qui est remarquable , Lj^re^a saini
ilia lui atlribue sans temoigner aucun doule , et comme Barnabe.
si c eut ele le sentiment commun de I'Eglise d'Afrique ou
il eioit, et de I'Eglise romaine qu'il altaquoil. Saint Jerome
en plus d'un endroit*^, et apres lui saint Philaslre , eveque
^Groi. in cpist. ad Ilebrceos, prcef.—^Evasm. sub finem, annot. in epist.
adHebr. — 'Spanheim toco citato', pane 2. c. 7. etpavl. 3. c. n. 9. 10. —
Jac. Capell. prcef. in epist. ad Hebr.—' Ten. de Pudic. c. 10.— ^Hier.
a02 PREFACE
de Bresse^, rapporlent la meme opinion, mais sans I'ap-
prouver. Cameron^ enlre les modernes en a entrepris [a
defense; et par un gout assez bizarre, il la croit la plus
probable de toutes.
On ne fait pas valoir ici la conformite du style. On rc-
connoit qu'il y a bien de la difference a cet egard entre
I'epttre aux Hebreux et celle qui est attribuee a saint 13ar-
nabe. Mais comme on doute que cette derniere piece soit
de saint Barnabe , on ne pent en tirer aucun argument cer-
tain dans la question dont il s'agit ici. On ne pcut pas se
prevaloir non plus de I'autorite des anciens. Nul des peres
grecs qui ont vecu avant ou apres Tertullien , ou de son
temps, n'a donne a saint Barnabe I'epitre aux Hebreux.
11 n'y a aucun fondement de cette conjecture ni dans la
lettre meme, ni dans la vie de saint Barnabe , ni dans I'His-
loire ecclesiastique. On ne sail d'ou Tertullien avoit puise
cette opinion, si ce n'est peut-etre qu'ayant entendu par-
ler d'une lettre de saint Bai nabe , qu'il ne connoissoit que
de reputation, et voyant que quelques-uns contestoient
celle-ci a saint Paul, il se sera imagine que c'etoit celle de
saint Barnabe : peut-etre sa conjecture etoit-elle aussi fon-
dee sur ce que dans Tune et dans I'autre on se propose de
prouver I'abolition des ceremonies legales : et cet auteur
ayant cnsuite hasarde cette conjecture avec la confiance
quilui etoit assez ordinaire, elle a ete recueillie par d'au-
Ires , dont elle a frappe I'attention par sa singularite Quant
aux preuves dont Cameron s'efforce de I'appuyer , elles
sont si peu solides , qu'on croiroit perdre le temps en les
rapportanl^.
Opinioiis do Le martyr saint Hippolyte*, dans son livre contre les lie-
couY qui oni resies , et saint Irenee dans Etienne Gobar Tritheite , cite
iitiribue celle jg^s Photius^, disoient que Paul , auteur de I'epttre aux
PaJincoiimi Hebreux , etoit un certain Paul different de I'Apotre. Mais
ou a Apollon, on ne nous donne aucune preuve d'une opinion si singu-
in Catalog, in voce Paulas : Epislola quasfertur ad Hebrceos, non Pauli
preditur, propter siyli , sermonisque distantiain ; sed vel Barnabce , juxta
Tertullianum : vel Lucce evangelistce, juxta quosdam; vel Clementis ,
Romance postea ecclesice episcopi.
' Philast.hceres. 4 1 . — * Camera, qucest. 2. inepist. adHebr. — ^ On peut
les Toir refutees dansSpanheim, Tract, de Auct. epist. ad Ucbr. pait. 2. c.
8. — ■ ^ Hippolyt. lib. contra Jioires. apud Phot. cod. 111. As'-yei 81 aXXxri
Ttva dcjcpiSsia; XeiTTo'aeva, x.a.\ on •« Trpb; ESpaiou; imarolr, oux roii aTvoffroXcu
IlauXou. — * Photius, cod. 2 32. IirTro'XuTO? , xal Etpyivalo? nov itpo; ESpat'ou?
ETnaroXTiv TlauXou cujt sxeivo'j v.t%\ cpaot.
SIH l'^pItHB AUX HEBHEU\. ftoS
licrc. Qui etoitcc Paul? d'ou etoit-il? quand vivoit-il? Un «" * 8^'"*
lioinme du merite et de la capacite de cet ecrivain, quel ^l',"^*^',,*^" *
qu'ilsoit, seroit-il cnseveli dans roubli?
Quelques-uns* ont altribue celte epttre aApollon, cc,
Juif converii , dont saint Luc fait une si honorable men-
tion dans les Actes*, et saint Paul dans la premiere epiire
aux Corinthiens'. C'etoit un homme eloquent , savant dans
les Ecritures , rempli de zele , et en fort grande reputation
dans les Eglises. Si Ton avoitdansl'antiquite ecclesiastique
de quoi appuyer la conjecture dont nous venons de par-
lor , il n*y auroit peut-etre aucun homme qui meritat mieux
qu'on lui fit honneur de cette excellente piece. Mais les
auteurs qui la lui attribuent sont nouveaux , et ils n'ont pas
de preuves assez solides pour oser eux-memes se declarer
affirmativementsur cesujet;ilsn'euparlentqu'avec doute,
et en hesitant.
Ceux qui I'ont attribuce a Saint Marc "* sont encore
moins fondes. Mais ceux qui ont voulu la donner a Tertul-
lien ^ sont refutes par Tertullien menie , qui veut en faire
Barnabe I'auteur, et par tous les anciens qui ont vecu avant
Tertullien , et qui citent cet ouvrage comme un monument
du temps des ap6trcs, ou comme ayant ete ecril par saint
Paul mem c.
Reste a examiner le sentiment commun des Eglises grec- Sentiment
que et latine, qui croient aujourd'hui unanimement que co™™"" '^*^*
I'epitre aux Hebreux est I'ouvrage de saint Paul. Tout con- ^ 'ses grec-
courl a nous faire embrasser ce sentiment; I'autorite deSquicroient
anciens , les caracteres memes de cette epitre , les circons- que cette epi-
tances de la vie le I'Apotre , et enfinla foiblesse des raisons ^'"^ estl'ou-
que Ton apporte pour I'atlribuer a d'autres. Si elle n'est p'^^°5 J^®*^"
d'aucun des auteurs que Ton vient de dire , il y a toute tiree du te-
sorte d'apparence qu'elle est de saint Paul. moignage de
1^ premiere preuve que Ton apporte pour notre senti- saint Pierre,
ment , est I'autorite de I'apotre saint Pierre**, qui^ au ju-
gcment de quelques savans', a voulu parler de I'epitre
aux Hebreux dans ces paroles de sa seconde epitre , ecrite
peu de temps avant sa mort , et plus d'un an apres celle
aux Hebreux : Paul notre Jirere bien-aime vous a ecrit snr ces
' Luther, in Genes, xltiii. 20. Bezaepist. ad Hebr. — * Act. xviii. 24-
— ^ r. Cor. I. 12. III. 4. 6. — ^ Quidam apud Spanheim, loc. cit. parte i.c-
<). — ' Quid. apudSixt. Sen. Biblioih. Z. vii. c. 8. — ^2. Pelr. lii. 14. — ■
''Baron, an. 66. Pearson. Oper. posth. p. 58. Spanheim, alii.
204 ■ PREFACE
choses , suivant la sagesse qui lui a ete communiquee , ainsi
qu'il le fait dans loutes ses lellres , oil il parlede ces mimes
choses y el dans lesquelles il y a certains endroits difjiciles d
entendre , auxquels des pcrsonnes peu instruites et pen cons-
tantes donnent unfaux sens , de meme qu'aux aulres Ecritu-
res , pour leur propre ruine^.
Ces ecrivains trouvent dans ces paroles quatre carac-
teres, qui les portent a croire quesaintPierre y parle de
I'epitre aux Hebreux. i*' II dit que saint Paul a ecrit aux
memes personnesque celles a qui ii ecrit lui-meme : Scrip-
sit vohis. Or , ces personnes sont certainement des Juifs
convertis , corame il paroit par ces paroles du ch. in. i.:
Void la seconds, lettre que je vous ecris, comparees a celles-
ci du commencement de sa premiere lettre : Pierre , apo-
tre de Jesus-Christ ^ d ceux qui ont ete choisis , et qui sont
disperses hors de leur pays , dans les provinces du Pont, de la
Galatie , de la Cappadoce, etc.
2° II dit que saint Paul a fait paroitre dans cette lettre
la sagesse dont il est rempli : Secundum datam sihi sapien-
tiam ; or , la sagesse de saint Paul, et la sublime connais-
sance qu'il avoit des secrets de Dieu et des mysteres de
notre religion , ne paroissent nulle part ailleurs avecplus
d'evidence que dans son epitre aux Hebreux.
3" Saint Pierre dit qu'il y a dans les epitres de cet ap6-
tre des endroits difficiles a entendre dont on abuse : In
quibus sunt qucedam difjicilia intellectu , etc. Et il y a aussi
dans cette epitre plusieurs choses difficiles a entendre, dont
les esprits mal faits peuvent abuser, et dont ils ont abuse
en effet 5 comme par exemple ce qu'il dit de I'impossibi-
lite qu'il y a que ceux qui ont ete une fois illumines ^soient
de nouveau renouveles a la penitence , etc.
4:" Enfin , saint Pierre dit que saint Paul leur a ecrit sur
le meme sujet que lui : Loquens in eis ( epistolis) de his. Or,
saint Pierre dans sa seconde lettre exhorte les fideles a la
purete de vie , a I'attente des jugemens de Dieu , a la pe-
nitence. Saint Paul traite le meme sujet dans I'epttre aux
Hebreux ^. II n'y a aucune autre de ses epitres ou il traite
ces choses , nulle autre a qui tous ces caracteres convien-
nent ; c'est done de I'epttre aux Hebreux que saint Pierre
* Nous mellons I'epitre aux Hebreux en I'an 63 de I'ere chr. vulg. , et celle
de saint Pierre en I'an 65. — * Hebr. vi. 4. 6. x. 26. 27. xii. i5. 16. 17. —
' Hebr. vi, la. x. 25. et seqq. xii. xin.
suR l'epItre aux hebreux. 2o5
a voulu parler. Car ce que quelques-uns ont voulu dire
que cette epitre de saint Paul , dont parle saint Pierre ,
est perdue , se dit sans aucune apparence et sans aucun
fondeinent.
L'epitre aux Hebreux a un caractere d'autorite qui ne Preuves ti-
peut convenir qu'a un ap6tre ; et toulefois elle n'est d'au- r^del'opi-
cun de ceux qui ont ete formes iramediatement par Jesus- V® m^me
Christ , mais d'un homme instruit par les apotres , et te- °
moin des ceuvres merveilleuses qu'ils avoient faites parmi
les Juifs , pour confirmer la verite de leur predication :
^4b eis qui audierunl , in nos conJirmtUa est *. Quelques-uns^
ont voulu inferer de ce passage que saint Paul n'en etoit
pas I'auteur , parce que partout ailleurs ^ il paroit fort
jaloux de I'honneur qu'il a eu d'etre enseigne immediate-
meut par Jesus-Christ meme , duquel il declare qu'il a
re^u sa mission, non pas de la part des hommes, ni de
la part des autres apotres. Mais on doit bien distinguer
ce que saint Paul a recu par la revelation immediate de
Jesus-Christ , et ce qu'il a appris par le canal des ap6tres
et des disciples qui avoient vuet connule Seigneur. Jesus-
Christ lui a revele les principaux mysteres de la religion,
et les verites les plus importantes du christianisme ; mais
pour ce qui est du detail des actions, des maximes , des
miracles de notre Seigneur , des circonstances de sa mort
et de sa resurrection , c'est des ap6tres et des disciples
qu'il I'a recu immcdiatement.
Uue autre preuve que cette epitre est de saint Paul ,
c'est la promesse qu'il fait aux Hebreux d'allerles voir, et
de mener avec luiTimothee son cher frere *, circonstan-
ces qui ont fait tant d'impression sur I'esprit de quelques
savans critiques ^, qu'ils ont cru qu'elles suffisoientseules
pour lui assurer cette epitre. Il y fait mention de ses
liens , comme dans toutes celles qu'il a ecrites d'ltalie ^.
* Hebr. ii. 3. — * Qu/if apud OEcumen. prcefat. in ep. ad Hebr. fi 7:30?
E'J?*i;v»; £:Tt<rro>.r, ^cxeT asv cjjc eivai HavXcj 8<.i te tov xapax-rnpa, jcat to avi
TTSS-fpaGs'.-; w; sv irraaji; i>^ai; -%:% £iT'.(jTC/,aI;, x-al to Xs-j'tiv 77a>; Tu-=t; sxq/£U—
5ofic6a, eic. Vide Calvin, in Heb. ri. 3. Grot, alios, ibidem. — ^ Galat. i.
- r . 12. Evangelium , quia non est secundum hominem : neque enim
ab ftomine accepi illud, neque didici, sedper revelationem Jesu Christi.
. iJe etEphes. ni. 3. et i. Cor. xv. i. 2. 3. — * Hebr. xiii. 23. II lui donne
aussi le nomde frere, i.Cor. 1. i.Coloss. 1. r.r .TTiess. in. 1. etc. — 'Pearson,
du Pin, Tillemont^Mille. — ^Uebr. x. 34. La Vulgate porte : Nai]i et vinctia
iipassi estis : Vous avez eu compassion des prisooniers. Mais le grec lit :
'U» avez eu compassion de mes liens : Kxt -yip tiic ^eapLoI^ a&aajwjaradwars.
206
PREFACE
On remarque dans cette cpitre , comme dans les aulres de
saint Paul , la menie metliode , la meme nianiere de citer
et d'inlerpreter I'Ecriture , les memes allusions el applica-
tions des passages. On y voit regner le grand dessein dont
il etoit rempli , et qu'il ne perd jamais de vue , qui est de
montrer I'inutilite des ceremonies legates , 1' abrogation
du sacerdoce d' Aaron , des sacrifices sanglans ; 1' abolition
de I'ancienne alliance , et I'etablissement de la nouvelle ;
la duree passagere de la premiere , etl'eternile de la se-
conde. La maniere dont il conclut celte lettre est la
meme que celle qui se voit dans I'epilre aux Romains, et
dans les deux aux Thessaloniciens. Lesvoeux qu'il fait, les
prieres qu'il demande aux Hebreux, le salut qu'il leur
donne , et vingt autres particularites qui se font sentir a
ceux qui sont accoutumes a son style , sont aussi des preu-
ves capables de persuader que cet ouvrage est de lui.
Preuve liree L'autorite et le consentement des Eglises , des peres et
de I'autorite des commentateurs qui donnent cette epilre a TApotre ,
eidu consen- g^j^j. gjjcore un des plus forts arsfumens dont on se serve
iciiicnl Qcs • • .
pour la lui attnbuer. L'Eglise grecque a toujours ete per-
suadee de cette verite ; si I'Eglise latine a balance quelque
temps a mettre cette epitre parmi celles de saint Paul, elle
s'est reunie sur ce point d'assez bonne heure aux peres
grecs , et depuis le quatrieme siecle nous voyons sur cet
article une parfaite conformite de sentimens entre Tune
etl'autre Eglise.
Saint Clement d'Alexandrie la cite souvent sous le nom
de saint Paul , quoiqu'il suppose qu'elle ait ete traduilepar
saint Luc*. Origene , dont nous avons rapporte ci-devant
le temoignage , la cite assez souvent sous le nom de saint
Paul ^. El quoique ailleurs il temoigne quelque doute sur
son auteur, il avoue toutefois qu'elle renferme les senti-
mens de cet apotre ; que si quelque Eglise la tient sous son
nom, elle doit conserver cette tradition , car ce nest pas
en vain , dit-il , que les anciens I'ont attribuee d saint PauP.
Eusebe de Cesaree en plus d'un endroit se declare pour
le meme sentiment*. La lettre de saint Denis d'Alexan-
Eglises,des
peres et des
commenta-
teurs.
* Clem. Alex, hypotypos. apttd Euseb. Hislor. cedes, lib. vi. c. 14. el
Strom, lib. n.pag. 43o. etlib. w.pag. 5 14. et alibi. — ^ Origen. lib. 111,
contra Cels.pag. 143. Philocal. p. 17. 55. Protrept. adMart. el I. de era
p. 89. 97. 99. hom. 1.2.3. 4. in Cant. Comni. in Joan. p. 56. 58. 4 16. e
alibipassim. — ^ Oiigeii. apudEuseb. lib. ti. Hist, codes, cap. 5. — * Eu-
seb. Hist. lib. m. cap. 3. et 32. etalibi.
i
SUR L EPITRE AliX UEBREUX. 307
drie , et cellc du concile d'Aiitioche a Paul de Samosatc ,
cellc d'Alexandre eveque d'Alexandrie , saint Athanase ,
saint Cyrille de Jerusalem , saint Basile , saint Gregoire de
Nazianze, saint GregoiredeNysse, saint Amphiloque, saint
Epiphane , le concile de Laodicee ; en un mot tous les Grecs
depuis ceux-la,la reconnaissentunanimement comme de
saint Paul'.
Les sentimens des peres latins ne sont pas tout-a-fait si
uniformes. Caius , pretre de I'egUse de Rome , qui vivoit
au commencement du troisieme siecle , ne reconnoissoit
que treize epitres de saint Paul , et il disoit que la quator-
zierae, qui est celle auxHebreux , n'etoit point de lui : Epis-
lolas quoque Pauli tredecim lantum enumerans , decimam
quartam , qua fcrtur ad Hebraos , dicit ejus non esse^.
Saint Jer6me ajoute qu'encore de son temps les Remains
doutoient qu'elle fut de cet apotre : Sed et apud Romanos
usque hodie quasi Pauli apostoli non habetur^. Et lorsqu'il
cite cette epitre , il temoigne ordinairement quelque doute
sur son sujet , en disant , par exemple : Si toutefois on la
recoit comme de saint Paul : Si quis tamen ad Hebrceos
epislolam suscipit ; ou bien : Quoique plusieurs des Latins
doulenl qu'elle soil de saint Paul : Licet de ea multi Latino-
rum dubitent quit scribitur ad Hebraos * ; ou enfin : Lisez
I'epitre de saint Paul aux Hebreux, ou de quelque autre
que ce soit a qui vous aimiez mieux I'attribuer : Relege ad
Hebrceos epistolam Pauli apostoli , sive cujuscumqu€ alterius
earn esse putas^. Cependant lememe pere, dans I'epitre a
Dardanus^, dit qu'elle est recue comme de saint Paul par
toutes les Eglises , lant de lOrienl que de la Grece ; que
si quelques Latins ne la recoivent point , pourlui il declare
qu'il aime mieux la recevoir, et s'attacher en ce point aux
uicicns.
Quoique saint Augustin reconnoisse " que de son temps
quelques-uns nioient que cette epitre fut de saint Paul , et
que d'autres craignoient ^ de Tadmettre dans le canon ,
' On peut voir les temoignages recueillis dans Spanbeim, Ttnct. de ^uc-
toreepist. ad Bebr. part. i. cap. 6. Tillemont, nole^a. sur saint Paul, Mill,
prolog, inepist. adHebr. — * Hieron. catal. de Caio, etEuseb. I. ti.c. 14.
— ° Hieron. in Szech.wyiii. — ^ Idem, in Matt xiti. — ' Idem, in ep. ad
Tit. cap. II. — ^ Idem, epist. lay, Hanc epistolam, qiice inscrititur, uid
Hebrceos, non solum ab ecclesiis Orientis, sed ab omnibus retro ecclesiasli-
cis grceci sermonis scriploribus , quasi Pauli apostoli suscipi. — ^ -^ug.
lib. XVI. de Civil, cap. 22. — * In ep. ad Rom. Exposit, inchoata, pag. g'ii.
208 PREFACE
parce que le nom de saint Paul ne s'y trouve pas , toule-
fois il dit ^ qu'il aime mieux suivre Tautorite des eglises d'O-
rient , qui la recoivent comme canonique , aussi bien que
les autres epitres de saint Paul. II la cite quelquefois sous
le nom de saint Paul , mais plus souvent sous le simple nom
dUEpilre aux Hebreux.
On ne trouve aucun pere latin dans les trois premiers
siecles qui I'ait citee expressement comme de saint Paul.
Elle est alleguee dans quelques ouvrages faussement at-
tribues a saint Cyprien , comme dans le livre des OEuvres
cardinales , et dans I'exposition du symbole , mais jamais
dans les ouvrages incontestables de ce pere. Eusebe de
Cesaree ^ dit qu'encore de son temps I'Eglise romaine ne
convenoit pas qu'elle fut de saint Paul. Saint Philastre ^
dit que plusieurs la lui contestoient ; mais il marque cette
opinion comme un sentiment heretique. Saint Isidore de
Seville dans son ouvrage des Offices ecclesiastiques , etRa-
ban Maur dans son livre de la maniere d'elever les clercs,
soit qu'ils copient simplement les anciens , par exemple
saint Jerome ; soit qu'ils nous expriment le sentiment de
quelques auteurs de leur siecle , assurent que plusieurs
Latins doutoient encore que cette epttre eut ete ecrite par
I'Apotre, a cause de la difference du style : Ad Hebrceos
epistola plerisque Lalinis ejus esse incerta est , propter disso-
nantiam sermonis.
Voila ce que Ton peutapporter de plus fort contre notre
sentiment. Mais on pent opposer a ces autorites celle de
tous les peres latins , depuis les quatrieme et cinquieme
siecles , qui I'ont citee comme de saint Paul * ; par exem-
ple , saint Hilaire , saint Ambroise , Faustin pretre romain,
saint Gaudence eveque de Bresse , Rufin , saint Paulin , le
pape Innocent i^'" dans son catalogue des livres sacres ,
Idace , Bacchiarius , Sedulius , Cassien , Cerealis , Fauste
deRies /Victor d'Utique, saint Gregoire-le-Grand , etune
infinite d'autres ; car on pent dire que c'est le sentiment
general de tous les peres qui ont vecu , et des conciles qui
se sont tenus depuis ce temps-la.
Quant aux modernes , nous n'en connoissons qu'un
^ De peccat. metit. lib. i. c. 27. — ^ Euseb. I. in. Hist. c. 38. On -{e. ^t.^
Ttve; •fiTibri^a-oi. ty)v Trpb; E^patou; irpb? tt? i*w{i.aiwv exxXriffia;, w; p.yi IlauXou
ou<rav auTVjv avTiXs''j'£(i9atcp75(javTe?, ou ^txaiov dpoelv, — ' Philasir. hceres. 41.
— * Fide apud Spanheim, Tract, de Auct. epist. ad Hebr. parte i.e. 7.
StR L EflTRK ALX HKBRLUX. aOQ
nvscz pelil nomhre qui aicnl la-dessus dcs seniimcns par-
ticulicrs. Grolhis la tloiine a saint Luc ' ; Erasme a saint.
Clement papc ^ ; Luther ' et Beze * a Apollon ; Cameron ^
a saint Barnabe. Calvin I'atlribue a saint Luc , ou a saint
Clement ; Joseph Scaliger ^ a nn helleniste. Louis Vivez " ,
le cardinal Cajetan '^ , Erasme , Schmidt , Tanegui le
Fevre^, Saumaise '" , et pcut-dlre quelques autres out
doute qu'elle apparllnta saint Paul. Mais qu'est-ce que ce
petit nonibre de critiques , en comparaison d'unc foule
d'ecrivains de tons les ages , de toutes les societes , de
toutes les communions , qui s'accordent a dire qu'elle est
de saint Paul ?
11 n'est pas malaise de salisfaire aux objections que Ton R^ponse A
fait contre le sentiment que nous venons d'etablir ; el on Tobjection
\ a deja en quelque sorte repondu dans tout ce que Ton a prisede la di-
dit, en refutant les opinions qui lui sont contraires. La ^[lie.'
principale raison de nos adversaires se tire de la diver-
site du style de cette epitre^ comparee a celles qui sont
indubitablement de saint Paul. Nous ne voulons pas con-
tester ici cette diversite ; elle paroit sensible : mais saint
Paul n'a-t-il pas pu, ce qui nous arrive tous les jours , di-
versifier son style, et ecrire dilTeremment une lettre, un
traite , une dissertation ? 11 n'est pas bien certain si cette
piece est ime lettre , ou un livre. Elle ne commence point
a la maniere des lettres , et I'auteur s'y excuse sur la brie-
vete de son ecrit ".Si c'est un livre, il est assez court ;
mais si c'est une lettre , elle est bien longue.
De plus saint Paul n'a-t-il pas pu employer la plume dc
saint Luc ou de saint Clement , pour donner le tour a cette
piece , et pour la mettre en style ''^ , comme il arrive tous
les jours que Ton fait retoucher ses ouvrages par ses amis,
qui y refoiinent certaines manieres de parler moins correc-
tes, ou qui nous avertissent de certaines fautes de langage
ou d'exactitude , qui echappent aux phis attentifs? Sans
iaire rienperdre aux sens et aux penseesde saint Paul dans
' Gix)t. inepist. ad Hebr. — * Et-asm. in c. xni. ad Hebi-^ — ^Lutlier. in
Gen. XLvni. 20. — * Beza in episi. ad Hebr. — * Cameron, qu. 2. in epist.
ad Hebr. — * Jos. Scalig. in excerpt, voce Uellenisla. — 'Lud. AVe; in lilt.
XVI. c. 11. Aug. de Civil. — « In ep. ad Hebr. — ' Tanaq. Fab. I. n. ep. 14.
— '** Salmas. de Prim, papce, apparat. p. 19. — " Hebr. xui. 22. Eteniin
perpaucis .^cripsi I'obis. — ** Origen. apitd Euseb. Hist. eccl. I. vi. c. 25.
Est. inepist. ad Hebr. quce.it. 2. Eellann. I. t. de Verba Dei. c. 27. Hy-
peinus prolegom. in ep. ad Hebr.
%o. li
2IO PREFACE
ses aulres cpitres, on pourroit sans douLe leur donner
beaucoup plus de clarte et d'elcgance. Pourquoi ne I'au-
roit-on pas fait dans celle-ci ? Nous ne parlons pas de I'opi-
nion qui veut que 1' Apotre ayant d'abord ecrit cette lettre
en hebreu , elle ait ensuite ete traduite en grec par quelque
autre. Nous allons faire voir que ce sentiment est insoute-
nable.
Spanheim,qui a travaille fort au long sur ce sujet,a
montre que cette diversite de style n'estpas si grande qu'on
sel'imagine, et que Ton rencontre encore dans cette epttre
un tres grand nombre d'expressions paralleles a celles qui
se voient dans les autres lettres de saint Paul ; qu'on y voit
ses raisonnemens , sa methode, ses tours memes^ et ses
hebraisraes , moins frequens a la verite , et moins rudes ,
mais toutefois assez sensibles pour faire comprendre quelle
est du meme ecrivain que les autres.
ARTICLE II.
En quelle langue cette ^pilre a-l-cUe el& Scrite ?
Opinion de '^ y ^ deux sentimens divers sur ce qui regarde la langue
ceuxquiont en laquelle cette epltre a ete ecrite : les uns soutiennent
pretendu que qu'elle a ete ecrite en hebreu , et les autres en grec. Saint
cette lettre Clement d'Alexandrie * , Eusebe^, Theodoret^ , un auteur
Ecrite en he- 8^^^ dans OEcumenius * , saint Jerome ^, et quelques nou-
breu. veaux^, conjecturent que saint Paul ecrivant a des Juifs,
^Clem. Alex, hypolypos. apudEuseb.'l. vi. c. 14. Hist. eccl. fi Tupoc E€-
paiou; iTiiaxoXri IlauXcu [xe'v eari. repaTVTat $& feSpatoi?s6pai)C'^ (fiMvvi.Aouxa? Si
^iXoTt[J.M; auTTiv u.£6ep[i.viveuaa? e^l(5'«)4£ toi; EXXr.at. — ^ Euseb. Hist, in. c. 38.
fegpaiot; -j'ap Sik tt; ivaTpiou '^\MTTn(; i-^'^^'X(f<>i<; MpLtXYUtOTO? tou IlauXou oi jxev
Tov Eua'Y'ysXiaTyiv Aouicav, ol Si ^li tov RXTjAswa toutov auTov epjAriVeuffai Xs-
■voufft T7)v 'Ypa«pviv. O -/.aX |i.aXXov ei-fl av alribkt;, to tov ojaoiov tt)? cppaasw? ya.-
paxTvipa, Tviv ts tou KXxp-evTO? EinffToXxv, xaiTYiv 7vpb;fe6pa(ou? aTTOdwCetv. —
^ Theodoret. prosf- in ep. ad Hebr. rs'-ypacps 81 cdivh tt! feSpatwv tpwvvi , Ip-
uvivcu6vivat 8\ auTYiv cpauiv otco KXTO|ievTo;. — ^Anonym, apud OEcumen.
prcef. ad epist. Hebr. tlpb^-Yap fcSpaiou; t^ acpwv (S'taXejcTw •ypacpsTaa, uaTspov
(i.eSepu.weuGwaiXs'YSTat, w? {asv tivs; utto Aouxa, w; ^e ol ttoXXoI utto KX7i|xev-
To;. — ' Hieronym. catalog, in voce Paul. Agobard. ep. adFredeges. —
® Jmbrosiast. Piimas. Hay mo. Tena piwlud. 4. Riber. Baron. Albert.
S«B lVHItUE \V\ HEUUEU.X. '21 I
Icuraeoritcn Icurproprc languc^ et que saint Luc ou saint
Clement iraduisircnt son epilre en grec : delavient, se-
lon saint Jerome , qu'elie est pluseloquenlc ct mieux ccrite
que ses autres leltres, parce que comme Juif il ecrivoit
plus polinienl en sa langue qu'en une langue ctrangere ;
et que saint Luc, qui I'a rendue en grec, possedoit celto
derniere langue beaucoup plus parfaitcment que saint
Paul. Ainsi d'un ouvrage bien ecrit en hebreu , il eloit na-
turel qu'il fit une belle traduction en grec. On ne doit done
pas s'elonner si cette piece se trouve d'un style assez dif-
ferent des autres letlres de I'Apotre. Scripsit tit Hcbrceus
Hebrceis hehraice , id est Stto eloquio disertissime , ut ea qxicc
Hoquenler scripta fucrant in hcbrao , tloquentius verlcrenlur
in gracum , et hanc cansam esse ^ quod a ceteris Pauli episto-
lis discrepare vidcatnr, C'est ce que dit saint Jerome.
L'original Hebreu de saint Paul s'esl perdu, dit- on ,
il'assez bonne heure , puisqu'aucun ancien ne temoignc
I'avoir vu , ni en avoir eu connoissance ; mais cela ne doit
point tropsurprendre^puisque I'evangilede saint Mattbicu,
si respectable par une infinite d'endroits, et connu par
Origcne et par saint Jerome , qui I'aToient vu et consul te,
est toutefois absolument inconnu depuis plus de douze
cents ans. Ilpeut en etre arrive de meme a I'epitre dont
nous parlons. La traduction grecque que Ton en avoit , et
qui etoit faite , a ce qu'on disoit > par saint Luc , fut cause
qu'on se mit moins en peine de conserver Toriginal he-
breu , d'autant que presque tons les Juifs convertis de la
Palestine , et tous ceux des provinces, parloient commu-
nernent grec.
Quelques savans , comme Vidmanslad et Guides Fabri-
cius, qui les premiers ont fait imprimer le Nouveau- Tes-
tament en syriaque , se sont imagine que I'epitre aux He-
breux, que nous avons aujourd'hui en cette langue, etoit
l'original de saint Paul ; ils supposcnt avec raisori, et per-
sonne ne pent leur contester , que saint Paul savoit le sy-
riaque , qui etoit la langue des Hebreux de Judee et de
Syrie. Mais on leur conteste que ce syriaque que nous
avons de Tepitre aux Hebreux, soit l'original de saint
Paul. On a diverses preuves tirees de ce texte meme , qui
Vidmanslad, Guido Fabricius, Matlh. Galenas, Cornel. aLapide, qitidam
Codd. Gra^et apud Mill, ad calcent hujus epislola: , Tossan. Zancliius ,
Snlmas. Hrllenistica, parte t . alii pliires apiid Spnnhrim.
2 1 2 PREFACE
montrent qu'il a etc prissur le grec , etque cen'estqu'uiie
\ersion , mais trcs ancienne. La mcme cpitre aux Hebreux
se trouve aussi imprimee en hebreu ; mais on convient
que c'est une version assez nouvelle , ct faile sur le grec.
Le sentiment qui veut que saint Paul ait ecrit celte epi-
tre engiec , est moins fort en aulorite , mais il I'cmporle
en bonnes raisons. La plupart des anciens se sont laisse
entrainer par I'autorite cle saint Clement d'Alexandrie ,
d'Eusebe , et de saint Jerome , qui ont cru qu'elle avoit
ete d'abord ecrite en hebreu. Ce denouement leur servott
a expliquer la diversite du style , qui a toujours ete une
raison embarrassante pour ceux qui I'attribuoient a saint
Paul. Par-la ils sauvoient toutesles difficultes. Saint Paul,
disoient-ils, a ecrit aux Hebreux en leur langue ; cela est
naturel. II a ecrit plus eloquemment et plus poliment en
sa langue qu'en une autre langue ; cela est specieux. On
trouve dc la ressemblance de style entre cette piece et
I'cpitre dc saint Clement pape , et les Actes des Apotres :
cela n'a rien d'incompatible , saint Luc ou saint Clement
I'ayant iraduite d'hebreu en grec.
Rofuiaiion Mais quand on examine tout cela de plus pres, il n'y a
nioTceife' ^'^"^ ^® l^'"*^ foible, ni de moins fonde. Saint Clement d'A-
leiireaeic lexandrie ne parlepas de I'original hebreu de cette epttre,
ecriieengrec, commc I'ayant vu et connu. II n'en parle que par conjec-
comraelepen- ture. Origene \ qui etoit si instruit de ces matieres et si
sent aujour- (.ypjg^x des vrais originaux hebreux , n'a eu garde d'en
habiles criti- pai'ler. II reconnott qu'elle est ecrite en grec ; et pour ce
ques. qui est de la difference du style , il s'en tire en disant
que saint Clement ou saint Luc I'ont ecrite sous saint
Paul , et mise en leur style. Eusebe et saint Jerome n'ont
pas examine la chose a fond , et n'ont pas connu I'original
hebreu de cette epttre ; ce qui fait grandement soupcon-
ner qu'il n'existoit point, vu leur curiosile , et leur atten-
tion a deterrer ces sortes de monumens. L'evangile he-
breu de saint Mathieu subsistoit encore de leur temps. Ils
en parlent, ilsle citent ; mais non pas lapretendue epttre
hebfaique aux hebreux.
Croire que les Hebreux de la Syrie et de la Palestine
* Origen. apud Eiissb. I. vi. c. 26. Hist. eccl. 6 x,apa)CT7)p ttj; Xs^sw?, t^i;
TTobc ESpaiou? dTTioToXy);, cu;c e/^a to ev Xo'-j'm iiJtOTtJCOv toO ATrca-oAcu. AXXa ecTtv
TQ STTiaToXvi duvOEdst Tyj; Xe'leo); ^Kkf,•^v/.mx^aoL m; mc h eiriffTaaevc;; y.pivetv cppaatw?
^wti^opa; iji-oXoynidai av.
SI R I.'EPirRE ACX. H^BRELX. Q | 3
auxquels'on prelencl que cctte lellre etoit principalement
adressee, ne parloient quhebreu , c'est se faire volontai-
rement illusion. Le grec n'etoit pas moins commuii dans
celle province que I'hebren *. Et si I'on suppose, avec
Spanheiin^, qu'elle etoit adressee aux Hebreux de toutes
les provinces d'Orient , ii y aura encore moins de neces-
sile de I'ecrire enhebreu, puisque dans tout I'Orient, oil
il y avoit des Israelites, on parloit grec depuis les con-
quetes d'Alexandre-le-Grand ; et la plupart des Juifs hcl-
lenistes qui demeuroient dans ces provinces ne savoient
pas memc le syriaque ^. Saint Pierre, saint Jacques et saint
Jean ont ecrit aux Hebreux , de meme que saint Paul ; et
toutefois ils leur ont ecrit en grec; pourquoi done saint
Paul ne leur auroit-il pas ecrit en la meme langue ?
On s'imagine que saintPaul savoit beaucoup mieux I'bc-
breu que le grec. L'hebreu, dit-on , etoit sa langue natu-
relle. Nous parions toujours mieux notre langue naturelle
qu'une langue elrangere. H y a , ce semble , dans cette sup-
position deux faussetes. i" Nous pensonsque la langue na-
turelle de saint Paul etoit la langue grecque, qui etoit celle
que Ton parloit a Tarse , capitale de Cilicie, ville celebre,
qui se piquoit alors de politesse et de science , de meme
qu'Athenes ct Alexandrie*. SaintPaul n'etoit pas ignorant
en grec. II avoit lu les poetes. L'obscurite de ses epitres
ne vient point tant de I'ignorance de cette langue que de
la vivacite de son genie , et de I'elevation et de la multi-
tude de ses pensees. II ne paroit nullement que ce soit la
langue hebraique qui lui ait gate le style. Cette langue au-
roit peut-eire ete plus propre a le rendre clair et serre ;
la langue bebraique ne souffrant point ces transpositions
et ces renversemens qui rendent souvent son grec diffi-
cile a entendre. INous croyons que I'hebreu etoit plutdtsa
langue d'ctude , et le grec sa langue naturelle. 2** 11 n'est
pas toujours vrai que nous parlions mieux noire langue
naturelle qu'une langue apprise par I'etude. On a une in-
finite d'exemples du contraire. Ainsi , quand on avoueroit
que saint Paul n'a su le grec que par etude , il ne s'ensui-
vroit pas qu'il le sut etqu'ille parlatplusmal que I'hebreu,
que Ton supposeroit etre sa langue naturelle. Ce qui con-
^ Tain; lid. MegiUa,fol. 7 1 . coL 1. et^.etin Sola ,fol. » i . col. 2 . et in
Schekalim per 3 . halac. 2 . — * Spanheim, partie i . cap. 2 . de Auct. epist.
<id Uebr. — -^ Hieronvm procem. inep. ad Galat. — * Sti-abo, I. xvl.
21* PREFACE
firmo cette scconclo reflexion , c'est quo saint Paul insiuue
iui-meme , cc me semblc , que I'hcbreu etoit sa langue na-
lurelle , lorsqu'il dit qu'il eloit Hebraus ex Hebrceis^.
Nous avons lait remarquer sur cela qu'il y avoit alors deux
sortes de Juils : les Juifs helUnisles , qui parloient grec ,
et les Juifs hebreux , qui parloient hebreu* Ainsi il paroit
que I'hebreu etoit reellement lalangue naturelle de saint
Paul; mais cela n'empeche pas qu'il ne put parler tres pu-
rement le grec qui etoit la langue de sa patrie.
D'ailleurs la lecture meme do cette piece nous fournil
des preuves qu'elleaete originairement ecrite en grec.
On y voit des allusions qui ne subsistent que dans cette
langue*. Les expressions , le tour, le style sont d'un grec
pur et original , et nullement d'une traduction ; il y a
moins d'hebraisraes ici que dans les autres ecrits de saint
Paul ; au lieu que si elle avoit ete ecrite originairement
en hebreu ou en syriaque , il devroity en avoir un plus
grand nombre. L'auteur y cite les Ecrilures , non selon
I'hebreu, mais selon la version grecque ^ ; et il fait des
raisonnemens fondes sur la signification des termes grecs
dans le style des hellenistes ou des Grecs , qui ne prou-
veroient rien en conservant les mots hebreux. Par exem-
ple , les Septante traduisent ordinairement I'hebreu TiH^,
Jcediis , alliance , par 8iaBriY.y\ , testamentwm - Ts'^'n signifie
une alliance, et ^la-Briyy^ un testament; en sorte que dans
le langage des hellenistes conjirmer le testament signijie ^
confirmer 1' alliance. L'auteur de cette epitre, sans faire
attention a la signification hebraique de nn:?, prend §ici.BY,r.r\.
dans le sens de leslament , etfonde sur cela un grand rai-
sonnement , qui n'a nul rapport a la signification iS' al-
liance. Enfin l'auteur donne des inlerprelalions des noms
hebreux qu'il rapporte , par exemple , de Melchisedech * ;
et il n'auroit pas eulieu d'expliquer ainsi ces noms, si la
piece cut ele en hebi*eu.
Ceux des anciens qui ont cru que cette epitre avoit ete
traduite par saint Clement , sentiment qui est devenu le
plus commun depuis Eusebe de Cesaree, n'ont pas ffait
attention que saint Clement n'etoit point Hebreu, et qu'on
n'a aucone preuve qu'il ait su la langue hebraique : du
' Philipp. m. 5. — ' Hebr. v. 8. £[ji.a6cv acp' wv i'ltotOe. xi. 37. Eirpiaflviaavy
iicEipoujd^aav. — ' Vide Ileb. 1,7. et n. 7.1V. 12. etx. 6. — * Hebr. vu. 2.
SUA L'EPiTRE 4UX B^BRKUX. ai5
niuins les anciens supposenl qu'il etoit Grcc ou Romain ;
ainsi il n'y a nulle apparence qu'il ait traduit I'epitre aux
Hebreux d'hebreu en grec. Ceux qui luidonnoient toule
cette piece raisonnoient plus consequemment ; mais ils
supposoient un fait faux , comme nous I'avons niontre.
Cette lettre est sureraent de saint Paul , et elle a etc ecrite
en grec, comme toutes les autres du merae apotre. C'est
le sentiment d'Origene , et des plus habiles critiques d'au-
jourd'hui'.
ARTICLE III.
En quel lieu , en quel temps , k quelle occasion , et k qui cette ^pltre a-t-elle
etc icrile?
Cette lettre a ete ecrite avant la destruction du temple En quel
de Jerusalem , comme il paroit par tout ce que I'auteur temps et en
dit des pretres et des sacrifices de la loi. Il marque assez ^p-jre'a^i^^^^He
qu'il etoit en Italic lorsqu'il I'ecrivit , puisqu'a la fin de sa ^t^ ecrite?
lettre il dit : Les frcres d' Italic vous saluenl^. Saint Jean
Chrvsostome ^, Theodore^, le manuscrit alexandrin^, et
quelques autres*^ croient qu'il I'ecrivit de Rome , un peu
avant ou un peu apres qu'il fut delivre de ses liens. D'au-
Ires pensent que ce fut plutot dans quelque ville d'ltalie.
S'il eut ecrit de Rome , il n'auroit pas manque den dire
nn mot, et il ne se seroit pas contente de dire : Lesjreres
(t Italic vous saluent ; mais , Lesjreres de Rome.
Quoi qu'il en soit , on ne doute point qu'il ne I'ait ecrite -
dans un temps ou il avoit la liberie , ou du moins ou il
etoit sur de I'obtenir bientot , puisqu'il promet aux Hebreux
d'aller les voir avec Timothee , si celui-ci venoit vers lui
assez tot ; et qu'il parle de ses liens comme d'une chose
passee : Vous avez eu, dit-il , compassion demes liens^ . Nous
^ Estius prolog, in ep. ad Hebr. Du Pin, Spanheim de Auct. ep. ad
Hel)r. part. 2. c. 2. Mill. var. led. in ep. ad Hebr. Givt. Pise. Jac. Capell.
Ligf. Hamm. Le Clerc. alii plures. — - Hebr. xiii. 24. — ' Chrysost. in ep.
ad Rom. prolog. — * Tfieodoret. prolo. in Horn. MsTa tou-t/j; ESpaici^ ejvs-
(TTtiXe, xal TcuTsi? 9i -js im Puar,?. — * MS. Alex, ad calcem hujus episU
Upb; Bopsticu; e^fotcpe airb ^^au-t^, — * Capell. append, ad hist. Apost. Span-
heim, parte 2. c. k-n. 8. Baron. Blondet. Usser. — ' Hebr. x. 34. Toij
ca
2'" I'niilACK
( royons done, avec Ic plus grand nombre des anciens et
des iiouveaux conimcntateurs ctchronologistes '^qu'il I'e-
rriv'n I'an soixante-troisieme de Jesus-Christ et le dixicme
dc 1 empire de Neron , lorsqu'apres avoir demeure pen-
dant deux ans a Home dans les liens , sous la garde d'uii
soldat qui le eonduisoit, il fut enfm renvoye absous par
Neron. II I'ecrivit peu de temps aprcs celles aux Philip-
piens^et a Philemon % dans lesquelles il fait esperer,
comme dans eelle-ci, qu'il ira bient6t voir ceux a,qui il
ecrit.
A qii Uo oc- On croit qu'il I'ecrivit principalement pour consoler les
canon ceiie Hebreux convertis dans les persecutions qu'ils souffroient
(^leccriie? "*^ '" pa^tcles Juitsmcredules , qui lesalHigeoient par toutes
sortcs de mauvais trailemens * , les chassoient et du temple
et des synagogues^, leur ravissoient impunenient leurs
biens , et les reduisoient a la derniere pauvrete. II avoit
aussi apparemment en vue de les consoler de la mort de
leur cveque saint Jacques le Mineur , qui avoit etc precipite
du haut du temple par I'ordre d'Ananus, environ un an
auparavant'^ ; c'est peut-etre a cela qu'il fait allusion par
ces paroles : Souvenez-vous de ceux qui vous onl gouvcmes ,
el qui vous onl enseigne la parole de Dieu , et considerant
quelle a etelajin de leur vie, imitet leur foi^. Comme il
avoit appris aussi la part qu'ils avoient prise a ses liens, il
les en remercie^.
Le zele dont ilbrAloit de repandre partoutla lumiere de
la verite, et la forte persuasion ou il etoit de I'inutilite des
ceremonies legales , et des sacrifices qui se faisoient dans
le temple , I'cngagent a parler d'abord de la grandeur de
Jesus-Christ au-dessus des prophetes , des anges et de
i^Ioise ; cnsuite il etablit la vertu de son sacrifice et de son
saccrdoce , d'ou il infere I'abrogation du sacerdoce
d'Aaron , et des sacrifices ordonnes parlaloi. 11 montre
aussi que les prophetes ayant promis une alliance nouvelle,
(jui devoit succeder a I'ancienne , cette alliance n'est autre
(}ue celle dont Jesus-Christ est le mediateur, et qu'il a
* Cluysosi. et Theodore t. ptvlog. in epist. ad Rom. Theophjl, prolog, in
cp. ad Hebr. BaJ'on. Blondel, Spanh. Tillemont, alii passim. — - Philipp.
I. 26. Pei'mcum adi>ejUum ilerum advos. — ^Philemon. -^ 22. Pammihi
Iiospilium: nam spero per oniliones vestras donari me vohis. — * Hebr. x.
3a. 33.—' Hebr. xiii. i3.— « Hebr. x. 3/|.— 'L'an 62 de Jesus-Chrisl i la
f^le tlu PAquo. Voyez Euscb. I. 11. c. a3. Hisl. eccl. — '^ Hebr. xm. 7. - -
» Hebr. x. 34- Grace.
StR L EPITRE AUX IIEBRELX. 217
sccllee parson sang. II proiive la nccessite et les avantagcs
de la foi , par une longue induction de la vi© des pairiar-
ches , des prophctes , et des aulrcs saints de I'Ancien Tes-
tament, dont it releve le meritc.
Mais comma il savoit que non-seuleraent son nom etoit
odicux parmi Ics Juifs qui no croyoient point en Jesus-
Christ , mais que plusieurs meme du nombre des fideles de
cette nation avoient concu de facheux prejuges contre
lui, s'imaginant qu'il etoit I'enncmi de la loi et des cere-
monies , il a la prudence de ne pas mettre son nom , ni sa
qualite d'apotre a la tete , ni dans le corps de cette epitre * ;
mais il propose d'une maniere si convaincante les verites
qu'il elablit , il les appuie de tant de preuves , il les expose
avec tant de discretion , que les plus entetes et les plus pre-
vcnus devoient se sentir comme forces de s*y rendre. De
j)lus, comme il n'etoit point propreraent ap6tre des He-
breux ^ , il jugea a propos de ne pas intituler de son nom
une piece qu'il leur ccrivoit dans la vue de les consoler ,
de lessoutenir, et de les instruire. Principium salulalorium
de induslria dicilur omisisse, dit saint Augustin , ne Judai
quiadversus eiivi piignaciter oblalrabant , nonune ejus ojfensi,
rel imviico animo legerent , vel omnino legere non curarent
quod ad eorum salulem scripserat^. On peut ajouter avec
quelques peres , que le respect souverain qu'il avoit pour
Jesus-Christ, dontil devoit parler dans toute cette epitre,
et principalement dans le premier chapitre , ne lui permit
pas d'y mettre ni son nom , ni sa qualite d'apotre *.
A la verite quelques-uns ^ on pretendu mferer de ce que
le nom de saint Paul ne paroit pas a la tete de cette epitre.
^ Clem. Alex, apud Euseh. Hist. eccl. I. yi. c. 14. Ou Trpc-^^Ysairrai <?«
T-, llauXc; i7K'aTc).c; cOcs'tuc. E6f aist? -yap £-:n<rri'>J.wv Tz^i't.r^u eu.r,<px<ji xar'
auTiJ, XXI UTto-Trrj'jc'jai auTOv • (rjvi-rw? Tjavj cux vt OL^yri aTs'(TTSc({(cv xutou; to
o/Cft* Oicij. Hieronym. Catalog, voce Paiilus: Quia Paulus scribebat ad
Ilebi-CEOs, propter invidiam suiapud eos itominis , tititlum in principio sa-
liitationis amputavit. Idem, in epist. ad Gal. 1. TheodoreL Ambrosiast.
Chrysost. prcef. in ep. ad Hebr. etc. — * Clem. Alex, apud Euseb. lib. vi.
cap. 6. Hist. eccl. )i8r,8\ w; d aoxap ic? e>.e-y£ KseoCuTcpcj, e— ci 6 Kiipit;
a:7c<rrcACC «v tij Travrcxp xTcpc? i:Tc(rrx>.Tj '—pi; feocxicu; , S:ii lisrsisTT-a 0
nouXCr? w; iv et^ ri eSvy, aTTSdray^ivc; svx £f-ypa9£i eaurbv fcSsatwv aTrcffrcXov.
— ' Aug. exposit. inclioata in epist. ad Rom. n. ti.p. 93 r. — * Clem. Alex,
loco cit. TTtemiorct. apiidOEcumen. Aixttv irpo^riv Kuptcv tijat."' lOx e-j-]ff*~
W'. savTov. Hieivnjm. in cap. i. ad Galal. Nonfuit congruum ut ubi Chris-
tus ajMsiolus dicendus erat, etiam Paulus apostolus poneretur. — * Caj'et.
Calv. Erasm. Grot. Camera.
ai8
PREFACE
qu'elle n'etoit pas de lui. Les anciens sc scrvoicntdQ cetle
raison pour la lui conlester ^ D'autres ^ ont cru que le
litre en etoit perdu ; mais sans recourir a cette exception ,
on peut repondre avec Primasius ^ , en retorquant Targu-
ment contre nos adversaires : Si Ton conclut qu'elle n'est
point de saint Paul , parce qu'elle ne porte point son nom^
on peut en conclure de meme qu'elle n'est de personne,
parce qu'elle ne porte le nom d'aucun auteur; ou plutot
qu'elle est d'un auteur inconnu et sans nom : mais nous
avons prouve ci-devant d'une maniere qui doit contenter
les lecteurs non prevenus, que cette epitre a tons les ca-
racteres qui peuvent la faire donner a saint Paul ; qu'elle
lui a ete attribuee de tout temps par I'Eglise grecque , et
dcpuis le quatrieme siecle par I'Eglise latino ; il faut done
la lui attribuer, encore qu'elle n'en porte pas le nom.
A qui ceiie La plupart des anciens * et des nouveaux commenta*
«^|)Ure a-i-el!e teurs ont cru que cette epitre etoit ecrite aux Juifs de Je-
eit^<5truc? rusalem et de la Palestine. Le nom dLHebreuxlQxxr con-
vient particulierement. On donne aux Juifs des autres pro-
vinces le nom d^ Hellenistes. Quand I'apdtre promet d'aller
les voir ^ , il y a toute sorte d'apparence qu'il I'entend de
ceux de la Palestine, et en particulier de Jerusalem ; car
peut-on dire qu'il promette aux Juifs de toutes les provinces
de I'empire d'aller les voir? Ce qu'il dit ailleurs^ , qu'ils
ont souffert avec joie le ravissement de leurs biens , les
designe aussi particulierement. Les Juifs convertis eureni
plus a souffrir de la part de leurs freres en Judee qu'en
aucun autre endroit du monde , parce que leurs ennemis
y etoient plus puissans , plus animes, et plus interesses a
supprimer , s'ils eussent pu, le nom de Jesus-Christ.
Mais s'il est vrai, comme on vient de le dire, que saint
Paul ait ecrit principalement aux Juifs de Jerusalem et de
Palestine, comment soutenir I'opinion que nous avons pro-
posee ci-devant , que saint Pierre parle de I'epltre aux He-
breux dans celle qu'il ecrit aux Juifs convertis, disperses
dans les diverses provinces de I'Asie ; dans la supposition
»' * T^ide Atfuinas. dialog, i. de Trim't. et Theodoret. prolog, in epist ad
Hebr. ■ — * Ita Gerhard, et Hyper, in ep. ad Hebr. — ^ Primas. prcefat in
epist. Pauli : Si propterea Paulinon erit, quia ejus non habet nomen j nee
alicujus est , quia nullius nomine tilulatur. Quod si absurtlum est, ipsius
magis'credenda est quce tanlo doctrince sucefulget eloquio. — * Chryaost.
Theodoret. Theophyl. Ambrosiast. — * Hehr. xiii. ii.—'^Hebr.x. 3i.
SLR b'EPtTilE AQ^\ II^BRELX. 21 Q *"
que TApolrc uvoit ecrit aux lu^ines personnes auxquelles
saint Pierre lui-m^me ecrivit depuis?
Pour se tirer de cette difficulte , Spanheim * repond ,
i** que celle epitre aux Hebreux a pu etre ecrite aux Juifs
de toutes les provinces de I'A-sie ; ce qui ne nous paroit
nullcmenl probable , pour les raisonsque nous avons alle-
i;uees ci-devant. 2'' II ditque l' Apotre ecrit principalement
aux Hebreux de la Palestine , et que c'est aussi a eux prin-
cipalement que s'adresse la promesse qu'il leur fait de les
aller voir au plus t6t ; niais que cela n'empeche pas que son
epilre ne se soil aussi repandue dans les provinces aux-
quelles saint Pierre ecrivit plus d'un an apres ; et de cette
inaniere il a pu leur dire que Paul son frere bien-aime leur
avoit ecrit auparavant avec sa sagesse ordinaire , des
choses fort diflQciles a comprendre , etc. Et c'est ce qu'on
pent repondre de plus plausible a cette objection, qui, mal-
j^re tout cela , souffre encore assez de dilBcultes.
il est remarquable que dans cette epitre il ne parle
qu'aux simples fidelcs d'entre les Hebreux. Il ne donne
aucun avis aux superieurs *. 11 prie seidement les Hebreux
de sa'.uer de sa part ceux qui etoicnt a leur tete , de con-
server pour eux beaucoup de respect , de leur rendre une
parfaite obeissance , d'imiter leur bonne conduite et leur
Kox, et de faire en sorte qu'ils s'acquittent de leur devoir
avec joie. C'est sans doute par un trait de sa sagesse et de
sa raodestie qu'il ne voulut pas s'eriger en maitre envers
les cliefs de I'Eglise de Jerusalem, qui etoient ou des
apotres , ou des disciples iramediats de Jesus-Christ , gens
sur qui il n'avoit aucune autorite.
11 est bon de remarquer aussi que plusieurs anciens ma- Kang qui lui
nuscrits', et presque tous ceux qu'avoit vus saint Epi- ^' J*""?^.^""
phane*, que Theodoret , I'auteur de la Synopse sous le j^^^^^^^j^J^
nom de saint Athanase , Euthalius , le manuscrit alexandrin,
et un autre de la bibliotheque de Coislin ^ , qui est tres
ancien , et que Ton croit etre du cinquieme ou sixiemc
siccte, sans parler de beaucoup d'autres , mettent cette
epitre immediatement apres la seconde aux Thessaloni-
ciens. II n'est pas aise de donner la raison de cet ordre.
Quelques-uns** ont cru que c'eloit afiu de mettre tout de
' Spanheim de Auct. ep. cdHebr. parte \. c. i.n 8.9. — ' Hebr.'xiii.
17.-24. — ^ ^lex. peu't. 3. Roc. 2. Colb. 7. Tres MSS. penes Bezam, et
Cod. ag. Bibl. Coislin. — * Epiphan. hceres. \-i. Marcionis. — ' Cod. 202.
BibUoth. Coislin —^ Beza, Mill.
2 30 PREFACE
suite lejs epltres qui avoient etc ecriles a des Ej^lises , et tie
les separer de cellos qui ont ete ecrites a des parliculiers.
Theodorel ' semble croire que I'Eglise I'a mise exprcs
immediatement apres celles aux Thessalonicicns, pour
niontrcr qu'elle la recoit au nombre des canohiques et
des vrais ouvrages de saint Paul. 11 accuse les ariens de Ten
avoir separee, et de I'avoir mise apres celles a Tile et a
Philemon , comme pour s'autoriser a nier son authenlicite,
et pour I'oter a saint Paul.
ARTICLE IV.
De I'authenticit^ et de la canonIcil(5 del'c^pitre aux H^breux.
Auiheiukiu^ D'apres ce que nous avons dit ci-devant de Tauteur de
intrinsequc cclte epitrc , que nous avons tache d'assurer a saint Paul,
deceticepi- j| gst aise de decider la question proposee ici , si elle est
ire, prise de . . , . ^ ^ r . ' . , v .
rinspiration ^^ispirce et canonique. Personne n a jamais conteste a sanit
desonauieur. Paul la qualite d'auteur inspire ; et ceux qui ont voulu nier
I'authenticite et la canonicite de celte epttre , ont com-
mence par soutenir qu'elle n'ctoit pas de saint Paul ; c'est
ce que pretendoient les ariens^ ; ou par supposer qu'elle
etoit corrompue et tronquee ; c'est ce que disoient les mar
cionites^. Saint Clement pape , a qui quelques-uns I'ont
atlribuee , n'a jamais passe pour un auteur divin. L'opi-
nion qui I'attribue a saint Luc ou a saint Barnabe , n'est
fondee sur aucune bonne preuve. Si done cetteepitre est
fle I'Apotre , comme on I'a montre d'une maniere incon-
testable, il s'ensuit qu'elle est inspiree , el d'une autorite
divine.
A II ill 01) lie i 10 Mais outre cette canonicite el celle autorite , qu'on pent "
oKiriosequc, appelcr intrinscqucs , elle a aussi de la partdu temoignage
priSC Qll iC" a. 1 1 > • 1 1 » r^ 1* J 1 ' "
inoi'^na"e el ^^ "^ ^ acceptation de 1 Lglise , lout ce qu on peut desirer
deraccepta- d'autorite. Les Grecs I'ont toujours reconnue pour cano-
* TJiiiodoret. prcefat. in ep. ad Heb?'. ©auaadTOv ourS'sv ^'pwai oi nfiv Apst-
aviXTjv £i(i(5'£?a(A£VGt vc'a&v, xara twv aTCoaroAauv '/uttwvtsi; 'ypai^.f/.aTwv, xai
Tf;v irpoc feopai&u; stckitoXviv tuv Xootwv (XTVoxpivovTSi; , y.a\ vo'Oov Taurr,v (XTroxa-
X&uvre?. — -f^ide J'heodoiel. prcefat. in episl. adHebr. — ^ Epiphan. ha^rei.
4a. Hieivnym. procem. in epist. ad I'itum.
SUR L EPITIIE \V\ HECREUX. 21! I
nique , et Ics Latins , depuis le quairieme et le cinquieme t'ondeTE-
siecle , Tont recue de memc. Saint Clement d' Alexaudrie' , p'ise.Temoi-
OriffcneS Eusebe \ les lettres de Denvs d'Alexandrie , ^"^?. ^' ''*;"
*?*.,,.'., V „,, c ' II ceplalionsde
et du concile u Antioche a Paul de bamosate , la lettrc FEglise grec-
d'Alexandre d'Alexandrie au concile de Constantinople '', que des les
saint xVthauase ^, saint Cyrille de Jerusalem '', le soixan- P'"*^™'*^''® ^"^"
tienie canon du concile de Laodicee , saint Epiphane", ^ *^^,*^, '^"?
r. •! « . ^ , . 1 i»T • o • y-T . • toule la suile.
saint Basilc**, samt Gregoire de Nazianze , saint Gregoire
dh Nysse "*, saint Amphiloque '*, saint Gregoire Thauma-
turge '^, Tite de Boslres^^, saint Ephrem '^, et les autres
I'ont admise , I'ont citee comme Ecrilure divine , et ont
lueme regarde corame heretiques ceux qui la rejetaient.
Theodore *^ reproche aux ariens de rejeter cette epi-
Ire , contre I'autorite de I'EgUse qui I'avoit recue de son
temps comme de saint Paul , et contre le temoignage t
d'Eusebe nieme , qu'ils regardoient comme le patron de T
leurs dogmes , et qui I'avoit citee comme de saint Paul
etcanonique. Saint Jerome ^'' temoigne aussi qu'elle etoit
reconnue comme canonique par toutes les egliscs d'O- '
rient , et par tous les peres grecs : Illiul noslris dicendiivt ,,
est , hanc epistoldm qua inscribiliir , Ad Hchraos , non so- \
lum ab ecjclesiis Orir.ntis , sed ab omnibus retro ecelesiasti-
cis gntci scrmonis scriploribus , quasi Paali apostoli suscipi.
Et dans un autre endroit ^' , il dit nettement que tous les I ^
Grecs recoivent I'epitre aux Hebreux : jE/jw/o/^z/m ad He- \
hraos omnes Graci recipiunt , et nonnulli Lalinorum.
A I'egard de I'eglise latine , elle a balance plus long- , Pariage de
temps a la reconnoitre comme etant de saint Paul , et a , ^?^ ^ '.'**^
, , , r . , . , ' dans les prc-
1 admettre dans le canon. >[Ous avons cite ci-devant ce miers siecles :
qu Eusebe de Cesaree , saint Jerome , saint Augustin , Phi- lemoignages
lastre, Isidore de Seville, etRaban Maur ontecritsur cela. ^} accopta-
Caius , pretre de I'eglise romaine, disputant a Rome sous **p°^j ^^
Zephirin , en 2 1 o , ne compte que treize lettres de saint depuis les
' CUm. Jlex. apifd Etiseb. lib. ti. c. i4. Hisi. eccl. — * Origen. apud
Eitseb. I. VI. c. 25. Hist. eccl. — ^ Euseb. I. jn. c. 3a. Hist eccl. — *.Jpud
Tlieodoret. l.i. c. 4. Hist. eccl. — * Aihaiias. de Niccen. Decret. de Synod.
epist. ad Serapion. etc. — ® Cyrill. Jeixtsol. catech. 4. — ^ Epiphan. hoeres. ': ',.
42. et 39. — ^ Basil, constit. mon. c. aa. et alibi. — ' Nazianz. cann. 34. et !p*!
orat. 2r. — ^^ Nrssen. de Hypost. t. 3. p. 35. — *• Amphiloch. apud
Greg. Naz. car. ia5. — '- Gi-eg. Jltaumat. Exposit.Jideiab.ein. — ^^ Tit.
Bostr. Comment, in Luc. xiiii. — ** Ephrem. Syr. de virtutib. et vit. pag.
3i. de toimentis injeriii pag. 204 et alibi. — " Theodoi-et. prcefot. in epist.
adUebr. — '* Hieron. ep. 129. ad Dardan. — *^ Idem, ep. 126. adEva-
gritm, vel Evangelium.
22 2 PUEFACK
quatrii^mcct Paul , et omet cello aux Hebreux. Le commenlaire giir
cinquiemo I'Apocalypse aUribue_ a saint Yiclorin ne parle pas non
siccles. pj^^ jjg celie aux Hebreux. Le faux Ambroise , ct Pelage ,
dont on a des commentaires sur les epitres de saint Paul ,
n'en ont point fait sur celle aux Hebreux. On ne la trouve
point citee dans saint Cyprien, ni dans les peres latins
des trois premiers siecles. Eusebe ' dit qu'encore de son
temps plusieurs eglises ne la fecevoient point comme de
saint Paul.
Saint Jer6me^ recon loh que la coutume des eglises
latines ne I'admettoit point aunombre des Ecritures cano-
niques : Quod si earn Latinoram consuelndo non recepil inter
Scripturas canonicas, etc. Et ailleurs : L'Apotre saint Paul a
ecrit a sept eglises *. car la huitieme epttre , qui est celle aux
Hebreux , est mise hors du canon par plusieurs Latins^
Et dans son commentaire sur Isafe : Earn ladna consuelndo
inter canonicas Scripturas non reeipit^. Et dans nn autre
commentaire : L' Apolre parlant de Sioncl de Jerusalem, si
loutefois la lalinite ne rejelle point I'autorite de la Grcce dans
I'epitre aux Hebreux , etc. ^. Du temps de saint Augustin ^,
plusieurs craignoient de la mettre dansle canon des Ecri-
tures , parce que le nom de saint Paul ne paroissoit pas a
sa tete : Unde nonnulli earn in canonem Scriplurarum red-
pere timuerunt. 11 temoigne dans ses livres de la Cite de
Dieu , que la plupart la recevoient comme de saint Paul ,
et que d'autres nioient qu'elle fut de lui''.
Mais le meme pere , dans ses livres de la Doctrine chre-
tienne ^ , compte quatorze epitres de saint Paul , et par con-
sequent admet celle aux Hebreux au nombre des autres
quisont incontestables. 11 la cite partout comme canoni-
que. Le concile de Carthage^ I'admet dans le catalogue
des livres sacres. Saint Jerome , qui lui paroit quelquefois
assez peu favorable , la cite souvent comme Ecriture sa-
cree , et il declare dans sa lettre a Dardanus, qu'il la re-
coit ^", suivant en cela plulot I'autorite des anciens , que
celle de quelques Latins de son temps , qui ne la recevoient
* Euseb. I. VI. 0. 20. Hist. eccl. — ^ Hieron. ep 129. ad Dairian. —
■^ Idem, ep. io3. adPaulin. — * Inlsai. vni. - — ' In Zachar. viii. — ''Aug.
exposit. inchoata in ep. ad Rom. n. 11. ■ — ■ ' Aug. I. xvi. de Cii>. c. •!■.■?..
Quamplures aposwli Pauliesse dicunt; quidain vcro negant. — ^ Aug. de
Doctr. clirist. lib. u.cap. 8. — ^ Concil, Carth. 3. c. 27. — '"///ip/wj. fpist.
129. adDa}xlan.
m
Sl'R l/EPirnE A.UX HEBRF.rX. 223
pas : Nos tamen lUramqiu ( Apocalypsin , et epistolam ad
Hebraos ) suscipimus , nequaquam hujus lemporis consuelu-
fiiftem , sed veterum scriptorum aucloritatcm sequentes ; qui
plerumque lUri usque abutunlur leslimoniis , nonut inlerdum
de apocrypkis facere solent , sed quasi canonicis et aposto-
lic is.
Depuis le quatrieme et le cinquiemesiecles, on la trouve
tres souvent alleguee par les peres latins , et comme de
saint Paul, et comme Ecriture canonique. C'est ainsi
qu'elle est citee par saint Hilaire*, Lucifer de Cagliari*,
saint Ambroise*, Rufin *, Salvien, ^, Cassien'', le pape In-
nocent I" ecrivant a Exupere , I'Ambrosiaster sur la se-
conde epitre a Tite , ch. !«% Phebade ", Victorin^, et les
autres que Ton a deja nomraes ci-devant dans la chaine
de la tradition des peres latins, pourprouver que cette
epitre est de saint Paul. On peut ajouter a tous ces temoins
les conciles et les auteurs de I'eglise latine, et les manus-
crits qu'ils nous ont donne des catalogues -des Ecriture^
canoniques ; tous ces monumens , ces conciles , et ces
ecrivains metlent tous quatorze epitres de saint Paul.
Mais dans les premiers siecles memes , nous la trouvons
citee comme Ecriture divine par des auteurs qui ontecrit
dans rOccidenl. Par exemple, saint Clement pape em-
prunte souvent des expressions et des passages dc cette
epitre , quoiqu'il n'en nomme pas I'auteur. Saint Irenee
s'en sert dans ses livres contre les heresies^. Tertullien '"
la cite de meme , quoique dans un autre endroit il I'at-
tribue a saint Barnabe. Novatieu emprunte aussi son au-
torite dans son livre de laTrinite , ch. xv. Etienne Gobare ' '
n'excepte que saint Hippolyte et saint Irenee, du nombre
de ceux qui ont admis I'epitre aux Hebreux ; il met saint
Clement pape et Eusebe au nombre de ceux qui la recon-
noissent comme de saint Paul. Or,'on a vu que saint Irenee
la citoit comme Ecriture canonique. Les ariens memes ne
' Hilar. I. it. de Trinit.p. 21, — ' Lucif. Calarit. de non conveniendo
cum hcereticis. — ' Ambros. de fide adGratian. Ub. 1. cap. 4. etc. — * Ru-
Jin. exposit. Symboli, apud Cyprian. — * Salvian. l.iy. ad Eccles. catJtoL
— ^Cassian. collat. i.e. 14. — '' Phcebad. lib . contra Jlrianos. — ^ P'icton'n.
Afer adi>ersus Arium , I. i. 2. ettract.de Homous. — ' Iren. 1. 11. c. 55. et
l.Vi.c.ii. 24. — "* TertuU. contra J udceos, c. 2. etconlra Marcion. I. 11.
c. 8. etde pudicit. c. 20. — ^^ Apud Phot, cod. 232. lO.rar,; p.svT-ci, xat
E'joe'Sh;, xai ttoXu; ^tXXc; twv deooo'pMv iraWpcov ^jxiXs; ral; dJXXai? (rjvapid|i.cu(n
224
PKEFACK
I'ontpas rejetee dans le commencement de leur heresie ;
et Marcion ne nioit pas qu'elle ne fut de saint Paul , niais
il la croyoit corrompue depuis lui.
Quelle a pu Qjj ^^oh cnie ce qui a le plus contribue a faire hesiler
eire la cause 1.^1 1,^ .^^ , . v ,. . ,
du pariage de Pendant quelque temps 1 Eglise lalme a ladmettre dans le
I'Eglise laiine canon des livres saints, est I'heresie des novaliens, qui
dans las pre- commencerent a troubler I'Eglise a la fin du troisiemc
miers siecles. gi^cle. Comme ces heretiques abusoient de certains pas-
sages de cette letlre^ pour autoriser leur erreur sur la pe-
nitence , on jugea prudemment a propos de ne pas donner
trop de credit a une piece dont ils tiroicnt avanlage. Lcs
ariens etant venus ensuite au commencement du quatrierae
siecle , et se servant de quelques autres passages pour sou-
tenir leur sentiment contre la consubstantialite et reternite
du Verbe ^, cela fut cause qu'on demeura dans la memo
reserve sur cette epitre. Spanheim croit que les marcioni-
tes quis'etoient jetes en Italie des le second siecle de I'E-
glise , avoient aussi contribue a entretenir rindif'ferencc
ou Ton paroissoit a I'egard de cette lettre, dont ils con-
testoient la verite^ Quoi qu'il en soit,il est certain que
depuis le quatrieme et le cinquieme siecle , I'Eglise latine
est d'accord avec la grecque sur la canonicite de cette epi-
tre, et qu'il y a plus de treize siecles que I'Apotre en est en
possession, dans laquelle il a ete confirme en dernier lieu
par le concile de Trente, qui I'a mise dans le canon au
nombre des Epitres de saint Paul.
ARTICLE V.
Analyse ou explication sommaire de I'ppitre aux Hebreux.
Excellence L'apotre ne commence pas cette epllre comme les au
de J.-C. an- tres par une inscription , dans laquelle il s'annonce et salue
dessus des ceux a qui il ecrit. Comme il etoit connu pour apotre des
'^n't^ "r'uda^s ^^'*'^*'^' ^^ craignoit peut-etre que son nom ne prevint
I'ancicnpeu- contre lui les Juifs, pour I'instruction desquels principa-
ple. lement il ecrivoit. II entre done d'abord en matiere par un
' Voyez Hebr. vi. 4. 6.x. 26. a'j.xii. i5. 16. 17. — - Hebr. i. }. 't. etu\.
2. — ^Spanheim dcAuctore ej>. ad HcLi: paHe i . c. 8.a/t. 1 1 . 12 . 1 3 . i ', .
SIR L EPITRE AtX HEBRELX. 221
eloi;e magnifique de Jesus-Christ , qu'il releve au-dessus de
tous les prophctes qui avoient paru dans I'ancien peuple ,
el au-dessus des angesmemes, par qui la loi avoitcte don-
nee aux Juifs. 11 commence par comparer Jesus-Christ
avec les prophetes qui avoient paru dans ccttc nation
( chap. I ). II represente aux Juifs que Dieu avoit autrefois
parle a leurs peres en differentes occasions et en diverses
manieres par les prophetes; mais que dans ces derniers
temps il leur avoit parle par son Fils , qui est lui-meme ce
prophete que Moise leur avoit promis ; mais prophete
d'autant plus eleve au-dessus des autres , que ceux-la n'e-
toient que les serviteurs du Seigneur , au lieu que cclui-ci
est son propreFils^ L'Ap6tre developpe ici les caracteres
augustcs qui distinguent le Fils de Dien : et d'abord c'est
lui que Dieu a etabli heritier de toutes choscs , en lui assu-
jetissant tout'. Non-seulement il est I'heritier de toutes
choses, mais il en est le principe ; c'est par lui qve Dieu a
fait jps siecles , et tout ce que les siecles renferment^. Ainsi
il est eleve au-dessus de toutes les creatures ; mais en meme
temps il est egal et consubsiantiel au Createur : il est la
splendeur de la gloire de son Pere , de qui il procede eter-
nellement comme le rayon procede du soleil sans en etre
separe ; il est le caractere de sa substance , son image vi-
vante , subsistante et substanlielle , qui represente parfai-
lement tout ce qu'il est lui-meme*. Non-seulement il est
I'heritier , le principe et le createur de I'univers , mais il
en est encore avec son Pere le conservateur : il soutient
tout par sa parole puissante ; il conserve par sa volonte
I'eire qu'il a donne a toutes les creatures ; il opere en elles
par sa puissance ; il regie leurs mouveraens et leurs actions
par sa sagesse ^. Non - seulement il est le conservateur de
i'univers, mais il est encore a I'egard des hommes leur re-
dempteur et leur reparateur : il est lui-meme notre pretre
et noire victime, qui dans la plenitude des temps nous a
purifies de nos peches en les expiant par son sang^; il est
noire mediatcur et noire avocat, et assis au plus haut du
ciel a la droite de la souveraine Majeste , il intercede sans
' y I. eti. Multijariam mullisqite modis ohm Deits loquens patribus in
pmphetis : iicvissime diebiis isli's loculus est nobis in Filio. — * -jf 2 . Quern
constituit heredem iiniversorum. — ^ Ibid. Per quern fecit et secula. — * •jf 3.
Qui cum sit splendor glorice etjigura substaniice ejui. — * Ibid. Portans-
que omnia verba virtulis sure. — ^ Ibid. Purgalionem peccalorumfaciens
a3. 1 5
U-Aij PREFACE
(esse pour nous aupres tie son Pere'. Mais il n'est ainsi
assis au plus haul du ciel a la tlroile de son Pcre , que
parcq qu'il est la splendeur de sa gloire et le caractere de
sa substance , c'est-a-dire parce qu'il lui est egal et con-
substantiel ^. Et ceci donne lieu a TApotre de faire remar-
quer aux Hebreux combien Jesus-Christ est eleve , non-
seulement au-dessus des prophetes , mais encore au-dessus
des anges par qui la loi avoit ele donnee a I'ancienpeuple.
Le premier titre de I'excellence de Jesus-Christ au-des-
Excellencc sus des esprits celestes, c'est le nom meme qu'il a recu ,
de J.-C. au- et qui renferme en abrege les principaux caracteres de sa
(lessus des grandeur^L'Apotre demande done a qui des angesDieu a
iTfol'S'^"' jamais donne le nom de fils" ; et pour prouver que ce titre
donnee aTan- auguste appartient a Jesus-Christ, il cite deux lextes de
cien peuple. I'Ecrilure, ou ce nom est donne au Messie, c'est-a-dire a
Jesus-Christ meme : Tun est tire du psaume n , ou David
parlant au nom du Messie dont il annonce le regne , declare
que Dieu lui a dit : Foas ties mon fils ; jc vous ai entendre
aujourd'hiii^ : I'autre est tire de ia promesse que Dieu fit a
David par la bouchc de Nathan , en lui annoncant le Messie
qui devoit sortir de sa race , et dont il lui dit : Je serai son
Pere, el il sera mon JiW^ . Les Juifs reconnoissoient done
alors que ces deux textes regardoient le Messie, et ceux a
qui I'Apotre ecrivoit etoient persuades que Jesus-Christ
etoitlui-meme le Messie, unique objet de ces predictions
et de ces promesses. Autre preuve de I'excellence de Je-
sus-Christ au-dessus des anges , c'est que Dieu ordonneaux
anges de I'adorer'. Ici I'Apotre apporte en temoignage un
texte du psaume xcvi , qu'il ne craint point encore d'appli-
quer au Messie , et a Jesus - Christ meme comme elant le
Messie. 11 fait remarquer dans ce psaume , Dieu qui intro-
duit son premter-ne dans le monde", c'est-a-dire Dieu
qui, apres avoir glorifie le Messie qui devoit elre son fils
et son fils premier-ne , I'introduit dans le monde en y eta-
blissant son regne ; car c'est precisement ce qu'annonce le
psaume qui commence par ces mots : Le Seigneur est enlre
dans son regne , etc. Le Seigneur , ou a la lettre selon I'he-
* Ibid. Sedet ad dexteram majestatis inexcelsis. — ^ -^ 3. Qui cum sit
splendor glovice etjigura substantice ejus. . . sedet ad dexteram niajestalis
in excelsis. — ^ -^ 4. Tanio melior angelis ejfecius, etc. — * y 5. Cin enuu
dixit alic/uaiido angelorum, etc. — * f 5. Filius meus es tu : ego hodwgenin
le. — ^ Ibid. Et rursum : Ego ero illiinpatrem, etc. — '' -^G. — " Ibid. Et
cum iteruiii inlroducit primogenitum in orbem terrai, dicit, etc.
SUR L EPITRE AIX HEBREUX. 227
breu, Jehova , est ici Ic Messie meine , qui , ^tant /ils .rfe
Dieu egal a son Pere , est desigiie sous le nom le plus res-
neeiablc , sous !e grand nom de JtuovA qui n'appartient
qu'a t)ieu. Et qu'ajoute le Psalmiste parlant toujours du
Messie? Que ious Us an^es de Dieii I'adorent^. C'est de la
que I'Apotre tire sa preuve. 11 est done certain que ce
texte regarde le Messie ; sans cela la preuve seroit sans
force. C'est ce qui rend ces teraoignages bien importans
pour rintelligencc des Ecritures anciennes. Autre preuve
de I'excellence de Jesus-Christ au-dessus des anges , c'est
qu'ils ne sont que les envoyes etles minislres du Seigneur,
et que Jesus-Cbrist est lui-meme le Roi et le Dieu dont ils
sonLles ministres et les envoyes^. Sur quoi I'Apotre cite
encore deux textes : Tun da psaunie cm, ou le prophete
celebrant les merveilles de la redemption sous le voile des
merveilles de la creation, dit que Dieu se sert du soufjle
des vents pour enjaire ses envoyes , el de lajlamvie da feu, ,
pour en [aire ses ministres , des\gnant sous le syrabole du
soafjle des vents , et de \a Jlamme du feu , dont Dieu se sert
pour executer ses volontes , les esprits celestes niemes plus
purs que le feu, etplus spirituals que ce qu'il y a parrai
nous de moins palpable : ou plutot le raeme mot en he-
breu, en grec et en latin m?, r:vzv;j.Xj spiritus^ signifie es-
prit et vent, el le meme mot aussi "]S;r, X/'/iioz, signifie ange
atenvoj/e: en sorte que rien n'est plus naturel que cette
allegoric dans ces trois langues. Dieu se sert du souffle des
vents pour en faire ses envoyes , et de la flamrae du feu
pour en faire ses ministres, c'est-a-dire qu'il se sert des es-
prits celestes memes pour en faire ses envoyes et ses minis-
tres : c'est ainsi que I'Apotre Tentend ; et c'est de la
qu'il tire sa preuve^. L'autre texte qu'il cite est tire du
psaume xliv, qui estevidemmentle cantique destine a ce-
lebrer Talliance ineffable de Jesus-Christ avec son Eglise ;
c'est la que I'Apotre nousmontre le Fils de Dieu, c'est-a-
dire le Messie, Jesus-Christ meme, designe par ces mots :
Voire trune , 6 Dieu , estun Irone eternel; et le sceptre de voire
empire est un sceptre (fequite ; d'oii il resulte que Jesus-
Christ est Roi, puisqu'il a un lr6ne, un sceptre, un em-
pire; que son tr6ne est eternel, et que son sceptre est un
W C. El adult nt etimomnes angeli Dei. — - y 7.-9. £t ad angelos r/ui-
dem dici'tf etc. . . adFilium auteni , etc. — ' y •^, Etad angelos qiiulem dicit :
^Jii! f'acu angclos si/os sftivilus, etmrttisiros suns /larrm^r: ignk.
i28 Pit EF ACE
sceptre d'equite ; et qu'enfin I'eternite cle son tr6ne, et
I'equite de sa domination sont fondees sur ce qu'il est.
Dieu egal et consubstantiel a son Pere *. A. cette premiere
prcuve de la royaute et de la divinite de Jesus-Christ,
I'Apotre en ajoute une seconde tiree de la suite de ce
meme texte , ou le Psalmiste continuant de parler a ce Roi
eternal ,ala gloire duquelilconsacrececantique,illuidit :
F'ous avezaime la justice, et vous avez ha'i I' Iniquile ; c est
pourquoi , 6 Dieu , voire Dieu vous a ointd'une huile dejoie ,
dune maniere plus excellente que tous ceax qui participent a
voire gloire. C'est le sens des Septante et de la Vulgate , ce
qui suppose que le prophete parle ici non de la premiere
onction dont Jesus-Christ fut oint dans sa concepl^io^ , et
qui preceda tout merite dans son humanite, niais de celle
dont il fut oint dans sa resurrection par la gloire ineffable
dont le Pere recompensa les merites de son humanite. On
lit presentement dans le texte de saint Paul et dans les
Septante memes au nominatif : Unxit te Deus , Deis ti;us,
Dieu qui est voire Dieu vous a oint'^. La Vulgate et Thc-
breu pourroient se prendre dans le meme sens : mais
I'hebreu pourroit aussi se prendre au vocatif : Unxit te ,
Deus, Deus tuus, 6 Dieu, votre Dieu vous a oint, etc. Plu-
sieurs pens^nt que les Septante I'avaient traduit ainsi; et il
parait-que saint Paul I'entendait en ce sens, puisque apres
avoir deja apporte en prcuve de la divinite de Jesus-Christ
le texte : Thronus tuus, Dels, f^otre trone , o Dieu, il y
joint le texte suivant comnie pour en tirer une seconde
prcuve , ce qui suppose qu'il le lisoit ainsi : Unxit te ,
Deus, Deus tuus, () Dieu , voire Dieu vous a oint , etc. Je-
sus-Christ est done Dieu : le premier texte en fournit une
preuve incontestable ; le second en fournit une nouvelle
preuve ; et Tonction qui y est imprimce est encore une
marque de sa royaute. Jesus-Christ est en meme temps
Fils de Dieu et Fils de I'homme ; c'est aussi ce que prouve
ce meme texte : comme fils de Dieu , il est Dieu egal a son
Pere ; comme Fils de I'homme, son Pere est son Dieu ; et
c'est aussi comme Fils de I'homme qu'il est oint de Dieu
son pere , mais oint d'une maniere plus excellente que tous
ceux qui participent a sa gloire, parce qu'il a recu dans
son humanite la plenitude de cette onction ineffable dont
* ^ 8. AdFilium auiem , thronus ijius , Deus, etc. — ' T^ 9- Dilexisti
j usiiiiatn, et odisli iiiiquitcuem : propterea unxit te, etc.
SI R l'epitre al°\ he&heux. ^ag
ceux qui participeiil a sa gloire ne reeoivent que I'ecou-
lement^. Autre preuve de la diviuite de Jesus-Christ dans
le psaume ci^. Le Juif charnel ne vait dans ce psauine
que les geuiissemens de ses peres, adresses aDieu par le
Psalmiste au nora de toul Israel; mais rAp6tre inspire par
le uieme Esprit qui inspira le Psalmiste , decouvre que sous
le voile des aftlictions de I'ancien peuple sont representees
les afflictions du peuple nouveau , et que le Dieu invoque
par le Psalmiste pour la delivrance de son peuple , est le
Messie meme , Jesus - Christ qui est en meme temps le Roi
de ce peuple et le Dieu que ce peuple adore, etant Fils de
Dieu , Dieu lui-meme egal a son Pere. C'est done a Jesus-
Christ que s'adresse le Psalmiste anime de I'esprit prophe-
tique ; I'Apotre n'en doute point ; c'est a Jesus-Christ que
le Psalmiste parle , en disant : Seigneur, vous avez cree la
terre des le commencement du monde , et les cieux sont I'ou-
vruge de vos mains. De la il resulte que Jesus-Christ est
Dieu , puisqu'il est designe sous le tire le plus auguste ,
sous le nom meme souslequel est invoque TEtre-Supreme,
Jehova.. De la il resulte que Jesus-Christ selon sa divinite
est avec son Pere le createur du ciel et de la terre ; c'est
parluique toutaete fait, etriendece quiaete faitn'a ete
fait sans lui^. II etoit done avant toutes choses; il existoit
done de toute eternite : et il existera aussi dans toule I'e-
ternite ; c'est ce que le prophete marque aussitot ; et c'est
encore sur quoi I'Apotre insiste en rapportant la suite des
expressions du Psalmiste , qui continuant de parler au
meme Dieu , ou plutot a la meme personne divine , c'est-a-
dire a Jesus-Christ, lui dit : Les cieux periront; mais pour
vous, vous dtmeurerez ; ils vieillirorU tous comme un ve'te-
ment, et vous les changerez comme un manleau , et ils seront
changes : mais pour vous , vous serez toujours le meme , et vos
annees ne Jinircrnt point. D'ou il resulte que Jesus -Christ
qui comme Fils de Dieu etoit avant tous les temps, serade
meme au-dela de tous les temps ; que comme c'est lui qui
a cree I'univers , c'est aussi lui qui le renouvellera; et que
toujours immuable, il subsistera toujours, parce qu il est
Dieu meme egal a son pere*. Qui d'entre nous auroit ose
assurer que ces grandes et imporlantes verites sont ren-
' T 9- Vnxit te, Deus, Deus Uiiis,eic. — *t^ 10.-12. Et: Tu in [jrincipi'o ^
Domine, etc. — * -^ 10. Tu in piincipio , Domine , terram fundasii , ete. — •
j 1 1 . p£ 1 2 . Ipsi peribunt, tu aiiiem permanebis, etc.
aSo PREFACE
fermees dans ce psaurae , si un apotre inspire par I'Esprit
de Dieu ne nous I'eut attesle par la preuve meme qu'il en
tire? Combieu de tresors precieux sont done renfermes
sous la lettre des saintes Ecritures! et qu'il est important
de bien profiler des ouvcrtures que nous donnent les
apoires I C'est d'eux que nous devons apprendre a entrer
dans le sens de ces divins livres. Autre preuve de Texcel-
lence de Jesus-Cbrist au-dessus desanges , c'est que Jesus-
Christ est assis a la droite de Dieu son Pere , d'ou il exerce
la puissance souveraine d'un empire sans bornes; au lieu
queles anges sont des serviteurs etdesministres employes
a executer les ordres de Jesus-Christ meme et de Dieu son
Pere'. Et ici 1' Apotre, pour prouver la souveraine puis-
sance que Jesus-Christ exerce a la droite de son Pere, cite
un texte du psaume cix , qui regarde evidemment le Messie
dont il marque bien expressement la divinite , la royaute ,
le sacerdoce , et sous un langage figure les souffrances
memes par lesqucUes il doit entrer dans sa gloire. L' Apo-
tre demande done a qui d'entre les anges Dieu a jamais
dit ce que Dieu dit au Messie, c'est-a-dire a Jesus -Christ
meme, dans ce psaume : Asscyez-vous a ma droite jusqu a
ce que jaie reduit vns ennemis a vous servir de marchcpied ;
paroles d'ou il resulte que Jesus-Christ est assis a la droite
de Dieu son Pere , et que par consequent il lui est egal et
consubstantiel, puisque nul ne peut etre assis a la droite
de Dieu sans lui etre egal , et que rml ne peut lui etre egal
sans lui etre consubstantiel, parce que Dieu est necessai-
rement un par essence : paroles d'ou ii resulte que Jesus-
Christ assis a la droite de Dieu son pere exerce sur les
hommes une puissance souveraine , en sorte que quicon-
que ne cederapas volontairement aux charmes puissans de
sa grace, sera force de ceder aux redoutables jugemens de
sa justice, lorsquetous ses ennemis, apres bien des efforts
impuissans, seront abattus a ses pieds pour subir un ana-
theme terrible , et etre ecrases sous le poids de ses justes
vengeances^. Jamais aucun des anges ne fut eleve a un si
haut degre de puissance ; mais ils ne sont tous que de sim-
ples creatures dont les prerogatives consistent uniquement
en ce que ce sont des creatures purement spirituelies, des
^ ir 1 3. ef i4. Adtjuem auiem angclorum dixit ahV/uando, clc — - ■j'^ i ^.
Sede a dextris meis, c/uoaditsque ponam, etc.
SUR i/ePITUE AliX JJKHHEHX. '2.3 I
creatures dont Dieu dispose commede ses serviteuisetde
ses ministres, dcs creatures dont le ministere a priricipale-
inent pour objet ceux qui doivent elrc les hcritiers du salut'.
L'Apotrc , apri's avoir ainsi (;tabU Tcxcellence de Jesus- Combien im-
Clirist non-seulernent au-dcssus des prophetes , mais en- portanteet
core au-dessus des anges, enconclut (chap. 1 1 ) que ceu.v indispensable
aui ont cru a I'Evangile de Jesus-Christ doivent s'attacher f.*^'obliga-
* ,, 11- I 'I liondobeira
avecdautant plus de soin aux cnoses qu ils ont enlen- i'Evan"iIequi
dues , pour n'etre pas comme des vases entr ouverts qui a etc annona'-
laissent ecouler ce qu'on y met : et afin que cet avertisse- parJ.-C. m^
ment fut mieux recu , il se met hii-meme au nombre de ™^'
ceux qui doivent y etre attentifs^. Mais en meme temps
pour donner plus deforce a cet avertissement, I'Ap^tre
developpe sa pensee en comparant la loi avec I'Evangile.
11 fait remarquer aux Hebreux que si la loi qui a cte an-
noncce par les anges est demeurce ferme dans ses me-
naces comme dans ses promesses , et si tons les violemens
de ses preceptes , et toutesles desobeissances de ceux qui
I'ont transgressee , ont recu , souvent meme d'une ma-
niere sensible , et des cette vie , la juste punition qui leur
etoit due , il ne sera pas possible d'eviter la peine qui me-
nace ceux qui transgresseront une loi aussi excellente et
aussi recommandable que I'Evangile ^. Les expressions
memes dont il se sert en parlantici de ces deux lois , font
sentir I'excellencede la seconde sur la premiere. La c'est
la parole; ici c'esi le saluf*: la loi parle,elle commandeet
elle defend, die promet et elle menace ; mais I'Evangile
sauve , en donnant et les vertus que la loi commande, et
les recompenses figurees par cellesquela loi promet. C'est
lesalut , mais le salut leplus excellent et le plus desirable:
la loi promet , selon la lettre , des avantages temporels ,
unelongue vie, une nornbreuse posterite , la j'ej'tilite des
campagnes, la fecondite des troupeaux , la irauquillite et
la prosperite sur la terre : mais I'Evangile donne des biens
infiniment plus precieux , les biens spirituels, les biens
eternels figures par les biens temporels etsensibles que la
loi promettoit ^. Voila en quoi consiste I'excellence de la
' y- i4- etith. Nonne oin lies sunt adiniiiistralorii spirilus in ministei iuin
iiiissi pi-opter ens qui hcreditatem capient salmis? — 'i r. Propterea ab-
undaiuius oportetobsetvare nos, etc.-^^ -^ -i.ttZ. Si eiiiiii qiiiper angelos
dictus estsenno, etc. — * Ibid. Sieiiim qui per angelos diclus est sernio,
f actus estjiimus quomodo nos effugiemus , si tantam neglexerimus.
salulem ? — ' ^^ 3. Si tantam neglexerimus salutem ?
282 PREFACE
loi nouvelle : mais voici ce qui la rend iiifinimcnt recom-
inandable : c'est que lesalut quelle procure a d'abordete
annonce par le Seigneur raeme ; la loi a etc donnee par
ies anges ; mais Dieu meme en la personne de Jesus-Christ
son Fils nous a apporte lEvangile du salut ^ Autre carac-
tere : le salut annonce d'abord par Jesus-Christ a ete en-
suite confirme par le temoignage de ceux qui ravoient
entendu de sa bouche , et qui en ont instruit tous ceux
ou qui ne I'avoient pas entendu , ou qui n'en avoient
pas alors profile^. Autre caractere : le temoignage des
apotres a ete confirme par le temoignage de Dieu raeme ,
> qui y a mis le sceau par Ies signes et Ies prodiges qu'il
a operes par eux , et en meme temps par Ies differens
effets de sa puissance , et par Ies differens dons de son
Esprit, qu'il a distribues en eux et par eux selon sa vo-
lonte ■*; en sorte que refuser de croire ou d'obeir a I'Evan-
gile , c'est rejeter non-seulement le temoignage de Jesus-
Christ et des apotres , mais le temoignage de Dieu meme ;
c'est, pour ainsi dire , accuser Dieu de faux temoignage.
L'Apotre Aprescette courte digression surrimporlante obligation
continue Je d'obeir a I'Evangile du salut annonce par Jesus-Christ,
cellencede ~ I'Apotre reprend I'eloge de Jesus-Christ , et continue de
J.-C. audes- niontrer combicn il est eleve au-dessus des anges. Ici
susdesanges. I'Apotre fait observer que Dieu n'a point soumis aux anges
le monde futur , au lieu que ce monde futur est soumis a
Jesus-Christ*. Remarquez que TApotre dit expressement
que ce monde futur est celui dont il parle^, c'est-a-dire
le monde uouveau forme par Jesus r Christ , son Eglise
raeme. Avant Jesus-Christ , ce monde etoit futur a I'egard
de son etablissement ; et depuis Jesus-Christ, ilest encore
futur a I'egard de son entiere consommation. Pour prou-
ver que ce monde futur est soumis a Jesus-Christ, I'Apotre
cite un texte du psaurae via , ou sous le voile des raer-
veilles de la creation , et des prerogatives nalurelles de
rhomme , le Psalmiste celebre Ies merveilles de la re-
demption, et Ies prerogatives sureminentesde Jesus-Christ
meme dont il marque en meme-temps Ies abaissemens,
L'Apolre rappelle done ici ce que le Psalmiste dit des
* 7?^ 3. Quce cum initium accepisset enarrari per Dominuin. — * Ibid.
Ah eis qui audierunt , in nos conjirmata est. — ' y 4. Contestante Deo si-
gnis et ponentis, etc. — * y 5.-3. JVon enim angelis subjecit Dens , etc. —
?)^ 5. Orbem Lerrce fulurian de quo loquimur.
SLR LEPtxRE kVX HEBREUX. a33
abaisscmens et des prerogatives de Jesus-Christ'. Car il
faut observer que ce meme homme dont le Psalraiste dit :
Qu'esi-ce que I' homme pour vous souvenir de lui ; ou h Jih
de r homme pour que vous levisiticzP est celui-la meme dont
il parle aussitot en ajoutant : Fbus I'avez rendu unpea ( ou,
pour unpeu de temps ) infer ie ur au.v anges ; mais vous I'avez
couronne de gloire et dhonneur. Vous tavez etabli sur les
ouvrages de vos mains , et vous avez mis loules choses sous ses
pieds. Ces trois versets sont si intimement lies , qu'ici
meme I'Apotrenelesseparepas. C'estdonc de Jesus-Christ
que le Psalmiste parle dans ces trois versets : I'Apotre en
est persuade. Dans le premier de ces trois versets le Psal-
miste nous montre les abaissemens de Jesus-Christ ; dans
le second , il reunit et ses abaissemens et sa gloire ; dans
le troisieme , il continue de nous montrer sa gloire. Les
abaissemens de Jesus-Christ consistent en ce que dans sa
personne leVerbe deDieu s'est fait homme, premier abais-
sement^ ; le Verbe de Dieu s'est fait fils de I'homme , se-
cond abaissement ^ ; le Verbe de Dieu a voulu paroitre
comme le dernier des hommes , et dans les jours de ses
souffrances ila voulu paroitre comme indigne du sou-
venir et des regards de Dieu sou Pere selon son huma-
nite , troisieme abaissement *. Ainsi revetu dune chair
passible et mortelle, qu'il a prise dans le sein dune vierge,
et dans laquelle il a souffertles douleurs et la mort la
plus ignominieuse , il a ete rendu inferieur aux anges,
mais pour un peu de temps ^; car c'est precisement le
sens de I'expression desSeptante etdesaintPaul, SoayJtt.
II est vrai que I'expression I3y2 de I'hebreu est equivo-
que ; elle pent egalement signifier le degre d' abaissement,
ce qui semble etre le sens de I'expression de la Vulgate ,
paulo minus, ou la duree de cet abaissement, ce qui
est proprement le sens du grec , (3oa/;j -i; et il falloit
qu'elje eut ce double sens , a cause du double sens du
psaume. Car dans le sens litteral et immediatement ou
le Psalmiste paroit ne parler que de I'homme , il devoit
dire : Vous I'avez rendu un peu inferieur aux anges : cette
expression ne pouvoit alors marquer que le degre de I'a-
' y 6.-8. Testatus estauiem I'n quoda/n loco quis, diceiis, etc. — • "^ 6.
Quid est homo? — * Ibid. AiufiUus hominis? — * Ibid. Quid est homo, quod
memor es ejus? autjilius hominis, quoniani visitas eum? — * y 7. MinuisH
eum paulo minus (fjf *y,'J ti) ab angelis.
2 34 PREFACE
baissement. Mais dans le sens mysterieux ct prophetique
ou le prophete annonce ce qui regarcle le Fils de Dieu
fait honiine , il falloit dire : f^ous I'avez rendu pour un
pea de temps inferieur aux anges : I'expression du prophete
ne pouvoit alors marquer que la duree de I'abaissement.
L'homme a ete rendu un pen inferieur aux anges ; mais
cet abaissement devoit durer pendant une longue suite
de siecles. Au eontraire le Fils de Dieu fait homnie a ete
abaisse non-seulement un peu au-dessous des anges, mais
jusqu'a paroitre comme le dernier des hommes, selon
I'expression d'lsaie ^ ; jusqu'a pouvoir se comparer a un
ver plutot qu'a un homme , selon qu'il le dit lui-meme
par la bouchedu Psalmiste^ ; mais cetabaissement extreme
devoit durer peu. L'Esprit-Saintadonc voulu que lePsal-
miste employat une expression qui renferme les deux sens,
afin qu'elle put egalement convenir et a I'abaissement de
l'homme , et a I'abaissement du Fils de Dieu fait homme.
D'ailleurs il est aise de s'apercevoir que I'expression du
Psalmiste convient encore mieux au Fils de Dieu qu'a
l'homme. L'homme n'a pas ete reellement abaisse au-des-
sous de I'ange , puisque jamais il n'avoit ele au-dessus; il
a ete seulement place au-dessous de I'ange. Au eontraire
le Fils de Dieu qui par sa nature estinfiniment au-dessus
de I'ange , a ete reellement abaisse au-dessous de I'ange
par le corps passible ct mortel dont il s'est revelu. Mais
le Psalmiste, aprcs avoir airisi marque I'abaissement tres
reel du Fils de Dieu fait homme , marque aussitot sa gloire
et son elevation , en disant que celui que Dieu a ainsi au-
paravant abaisse , Dieu la ensuile couronne d'honneur et
de gloire , premier degre d'elevation •* : il ajoute que Dieu
I'a etabli sur les ouvrages de ses mains, second dcgre^:
enfin il declare que Dieu lui a assujeti toutes choses, troi-
sieme degre'. Car , comme I'Apotre le remarque aussitot,
en disant que Dieu lui a assujeti toutes choses , le pro-
phete n'a rien laisse qui ne soit ainsi assujeti a Jesus-
Christ *". 11 est vrai que nous ne voyons pas encore que
tout lui soit assujeti ; c'est aussi la remarque de TApolre ' .
^Isai. Liii. 3. No\'issimum vii-orum. — ^ Psal. xxi. 7. Ego niitein sum
veimis ctnon liomo. — ^ -^ 7 . Gloria et honorc coronasti eum. — * Ibid. Et
consliluisli eiim super opera inaiiuum tuaruiii. — ^ ^ 8. Omnia siibjecisli
sub pedibus ejus. — <• Ibid. In co eniin, etc. . . .nihil dimisil non subjecluin
ei. — ' Ibid. Nunc aulem necdum videmus, etc.
sL'ii l'epitre ALX HEBREUX. 235
Mais voici ce que nous voyons : nous voyons que Jesus
qui a ete rendu pour un peu de temps inferieur aux an-
ges , a ete couronne de gloire ct d'honneur a cause de la
mort qu'il asoufterte*. Or, cequi est accompli est un gage
pour ce qui reste a accomplir ; il resuUe done de ce texte,
que tout est assujeti a Jesus-Christ, que le monde futur
lui est soumis , que les anges menies dependent de lui, et
sontses serviteurs etses ministres.
Mais la mort que Jesus-Christ avoit soufTerte etoit re- L'Apoire le-
gardee par les Juifs incredules comme un scandale qu'ils ^^'*^ **^"*^^}*^
ne cessoient dc reprocher aux Juifs fideles; I'Apotre pour j q
lever ce scandale va expliquer ici pourquoi Jesus-Christ
a voulu souHrir la mort. 11 declare d'abord que c'est
pour satisfaire au dessein de la bonte de Dieu a I'egard
des homnies, Dieuayant voulu que son propre filsgoutat
et eprouvat ainsi la mort pour tous^; c'est-a-dire que
Dieu par sa bonte ineflfable a voulu que son propre Fils put
tenir la place de tons les pecheurs sur la croix , en mou-
rant pour tous , et a ccnsenti de recevoir la mort tempo-
relle de son Fils au lieu de la morteternelle qui nous etoit
due , et a laquelle nous etions condamnes. O grace du
Pere, qui nous a aimesjusqu'a immoler ainsi pour nous son
Fils ! O bonte du Fils , qui s'est ainsi lui-meme offert pour
nous a son Pere ! Mais pourquoi Dieu a-t-il voulu que son
Fils goutat ainsi la mort pour tous? c'est ce que I'Apotre
explique en faisant remarquer qu'il etoit convenable que
Dieu, pour lequei etparlequel sont toutes choses, vou-
lant conduire a la gloire plusieurs enfans , consommat et
perfectionnat par les souflVances celui qui devoit etre le
chei et I'auteur de leur salut^. En effetrien n'etoit plus
digne de la majeste souveraine de celui qui est le principe
et la fin de toutes choses , que cette voie du sacrifice et
de la mort du Fils de Dieu pour la satisfaction due' a son
Pere et pour la reconciliation des hommes : ony voit eclater
sa grandeur, qui mcrite un tel sacrifice ; sa justice, qui
recoit une satisfaction si abondante; sa puissance , qui sait
sefaire rendre plus d'honneur quesa creature n'est capable
* y-p. Eum aiitem qui modico {^?<t'/jj ~'-) (juam aiigeli minoraiiis est, etc.
— - ^ 9. Ut gratia Dei, pro omnibiis gustnr-et mortem. — ^ y lo. Decebat
enim eum, etc. . . .quimultosjilios ingloriam addtixeral (gr. alit. adduce-
bat, iifa^ovra), auclorem {zvi apxTlfo*), salutis eorum perpassionem con-
summare.
a 36 PREFACE
de lui en oter ; sa sagesse , qui Irouve un remade si excel-
lent au plus incurable de tous les maux ; sa haine impla-
cable centre le peche , qui eclate dans la severite qu'il
exerce sur son propre et unique Fils ; sa saintete , qui ne
pent souffrir le peche impuni dans celui qui est I'inno-
cence meme , et qui n'est charge que des notres ;sa charite
excessive pour nous , qui va jusqu'a livrer a la mort I'au-
teur de la vie. Mais pourquoi falloit-il que I'auteur et le
chef du salut passat par les souffrances , et comment pou-
voit-il y passer? C'est ce que I'Apotre developpe en faisant
d'abord remarquer que dans I'economie admirable des
desseins de Dieu pour le salut des hommes , celui qui sanc-
tifie et ceux qui sont sanctifies viennent tous d'un meme
principe , ont tous la meme origine , participent tous a la
meme nature ^. Dieu ayant forme le dessein de donner
aux hommes son propre fils pour chef et pour sauveur , et
de sanctifier et sauver les membres dans la personne du
chef, en sorte qu'ils eussent un meme Pere avec lui dans
le ciel par la grace de I'adoption, comme il a sur la terre
une meme nature avec eux par le mystere de I'incarnation ,
il etoit convenable que le Fils de Dieu , devenu semblable
aux hommes, entrat danslevirs foiblesses, dansleurs dettes,
dans leurs interets , dans leurs devoirs , et dans I'engage-
ment a la souffrance et a la mort que leur commune nature
a contracte. Pour montrer que ce rappojrt et cette union
intime de celui qui sanctifie , et de ceux qui sont sanctifies,
etoit annoncee par les prophetes, I'Apotre ajoute que
c'est a cause de cette union meme , que celui qui sanctifie
ne rougit point d'appeler ses freres ceux qui sont sancti-
fies par lui ^. Sur quoi il cite un texte du psaume xxi , qui
est tout prophetique des souffrances et du triomphe du
Messie. C'est le Messie meme qui parle , et qui annoncant
son triomphe, dit : Je ferai connotlre voire nom d mes
freres ; je publierai vos louanges au milieu de I'assemhlee de
voire peuple ^. Si le Christ promis nous appelle ses freres ,
il doit done etre de meme nature que nous ; il doit done
avoir le meme principe. C'est ce que I'Apotre prouve en-
core par un autre texte qui paroit etre pris du psaume xvii,
ou sous le symbole des victoires de David sont celebrees
celles du Messie meme dont David etoit la figure. C'est en-
^ -^ 11. Qui enim sanciijicat, etc ex uno omnes. — * Ibid. Pmpter-
(juam causam nonconjundiiur, etc. — ^-^ ii, et 12. Dicens :Nuntiabo, etc.
SLR l'ePITRE AUX HEBREUX. 287
core le Messie m^me qui parle ; I'Apdtre n'en doute point:
mais que tlit en cet endroit le Messie? Z)/<?u est ma force , et
je mettrai ma conjiancc en lui^. Le Messie s'exprime comme
I'un de nous ; il doit done ^tre semblable a nous ; il doit
done avoir la meme nature que nous. Jesus-Christ nous
appelle ses freres, parce qu'il a la meme nature que nous :
mais en meme temps , comme epoux de I'Eglise qui est
notre mere , il est lui-m^me notre pere , et nous sommes
ses enfans; c'est encore un motif pour lequel le Fils de
Dieu a voulu participer a notre nature. L'A.p6tre nous le
fait remarquer en rappelant d'abord ce que dit Isaie : Me
void , moi et Us enfans que Dieu ma donnes ^. Le prophete
en disant cela representoit Jesus-Christ ; et I'Apotre ne
craignant point d'appliquer ces paroles a Jesus-Christ au
nom de qui elles onl ete prononcees, ajoute aussit6t que
comme les enfans donnes a Jesus-Christ sont d'une nature
composee de chair et de sang , Jesus- Christ a voulu par-
ticiper aussi lui-meme a leur nature *. Mais pourquoi?il
en marque deux raisons : premierement , afin de detruire
par sa mort celui qui etoit le prince de la mort, c'est-a-
dire le diable ^ ; secondement , afin de mettre en liberte
ceux que la crainte de la mort tenoit dans unc continuelle
servitude pendant leur vie "*. Et en effet tel a ete le double
fruit de la mort et de la resurrection de Jesus-Christ. Le
demon avant attente sur la vie de Jesus-Christ qui etoit la
justice et I'innocence meme , et sur lequel par consequent
il n'avoit aucun droit , a merite d'etre depouille du droit
que le peche lui avoit acquis sur les vrais coupables qu'il
a plu a Dieu de rappeler a lui en les rendant participans
de la justice de Jesus-Christ ; et la resurrection de Jesus-
Christ etant devenue le gage de la resurrection de ceux
qui auront cru en lui , la mort , qui sans cela u'auroit pu
etre qu'un objet d'horreur au pecheur durant toute sa
vie , comme devant etre pour lui le passage d'une mort
temporelle aune mort eternelle, est devenue au contraire
pour le juste un objet desirable , comme devant ^tre
pour lui le passage de la mort a la vie. II falloit done que
' y- 1 3. Et iterum : Ego erojidetis in eum. ( Gr. E"|fu z<s<,u.%\ ircTvciflft)!; i-r''
a.j-ii.) C'est I'expression dont les Septante se servent en traduisant le can-
tique rapportfi au 11* livredes Rois , chap, ixii , ou on lit au y- 3. : newsidfo;
Edcaai E17' a'jTO). Ce cantique est le m^meque le ps. xvii. — --y j3. El iterum:
Ecce ego et piierimeiquos dedit mihi Deus. — '-f r4 . Quia ergo pueri, etc.
— * Ibid. Ut per mortem destnieret, etc. — ' ^ i5. Eililieraret eos qui, etc.
•2ZS PREFACE
Jesus-Christ moui'ut pour detruire I'empire clu demon ; il
falloit qu'il ressuscilaL pour etablir la confiance de ceux
qui croiroieut en lui ; et afin qu'il ressuscitat , il falloit
qu'il mourut; et afin qu'il mourut , il falloit qu'il participat
a la mortalile de notre nature. 11 falloit done qu'il participat
a la nature de ceux dont il devoit etre en meme temps et
le frere selon la nature , et le pere dans I'ordre du salut :
il falloit qu'il participat a la nature de ceux dont il devoit
etre le liberaleur. C'est ce qui donne lieu a I'Apotre de
nous faire remarquer que le Fils de Dieu a fait pour les
hommes ce qu'il n'a point fait pour les anges , car il ne
s'est pas rendu le liberateur des anges , mais il s'est rendu
le liberateur de la race d' Abraham * ; ou , comme le tra-
duit I'abbe de Marolles , Car il ne procure pas le salut des
anges , mais il procure le salut de la semence d' Abraham ,
c'est-a-dire de la race d' Abraham; non toutefois de la seule
race charnelle de ce patriarche , mais de tous ceux qui par
I'esprit de la foi sont reputes enfans de ce patriarche, qui
est le pere de tous ceux qui croient, soit circoncis, soit
incirconcis , comme le dit ailleurs le meme apotre ^. Car ,
comme il le dit encore dans un autre endroit, ce sont les
enfans de la prOmesse, qui sont reputes etre la race
d' Abraham ^ Et dans une autre epitre : Si vous etes d
Jesus-Christ , dit-il , vous etes done la race d^ Abraham , et
Us heritiers selon la promesse ^. Jesus-Christ s'est done
rendu le liberateur de ceux qui par I'esprit de la foi doi-
venl etre reputes enfans d'Abraham ; et I'Apotre nous fait
remarquer que c'est pour cela meme que Jesus-Christ a
du se rendre en tout semblabie a ceux qui devoient etvc
ses freres ^ ; c'est-a-dire qu'il a fallu qu'il participat non-
seulement a notre nature , mais a toutes les foiblesses
memes de notre nature, excepte le peche. Mais ponr-
quoi Jesus-Christ, en se rendant notre liberateur, a-t-il
*■ -f iQ>. Nuscjuam enrm angelos apprehendit, sed semen AbTohce appre-
Iwndil. Oil il faut remarquer que le mot grec siriXap-gavsrai est au present, et
signifie proprement Taction de prendre un homme par |la main pour le tirer
de la servitude. 11 faut comparer cette expressionde I'Apotre avec celle de la
sainte "Vierge dans son cantique : Suscepit (AvreXocgcTC/) Israel pueriim
suinn. C'est la meme pensee. — -i?0OT. iv. n. eti-}.. IJt sit pater omniinn
credentium per prwputium, . . . et sit pater circiimcisioms, non iis lantinn
qui s.unt ex circuincisione, sed et iis (fui sectantuv vestigia Jideiquce est in
pra'piitio patris nosiri AbraliK . — ^ Rom. ix. 8. Qui Jilii sunt promissionis,
eesiimaniur insemine. — ■* Gal. iii. 29. Siauiem vos Chrisii, trgo semen
Al/rahm eslis, secundum promissionem hcredes. — ' y 17. XJnde debuit per
omnia frairibus siwilari.
SLR I- El'iTRE AL\ lltllREt X. 23o
clA parliciper a notre nature et au.v infirmites niemes de
noire nature? L'Apotre en a deja marque deux raisons prin
cipales , il va niaintenant en marquer trois autres : C'cst
premiereracnt , afin que le sentiment de la misere hu-
niaine aui*»iienlat, s'il etoit possible , sa compassion pour
nous ' ; secondement , afin de temoigner sa fidelite a Dieu
son pere , en s'acquittant des devoirs de son sacerdoce de
la maniere la plus di^ne de Dieu ^ ; troisiemement , afin
d'etre aussi victime pour le peche , et d'expier les peches
ilu peuple de la maniere la plus parl'aite ^. II a done du
parliciper aux infirmites de noire nature , parce qu'il
devoit etre pretre et victime. Coaime pretre, il devoit
reunir en sa personne la misericorde pour les pecheurs ,
ot la fidelite aux inter^ts de la justice et de la grandeur de
Dieu ; et il failoit que sa misericorde fut fondee sur I'ex-
perience meme de nos miseres , et que I'experience meme
de nos miseres conlribuat a sa fidelite. Commc victime,
ii failoit qu'il fut revelu dune nature passible et mortelle,
dans laquelle il put souffrir pour I'expialion de nos pe-
ches. Mais comment peut-on dire qu'il failoit que Jesus-
Christ nous devint semblable , pour devenir misericor-
dieux ? c'est ce que IWpotre explique lorsqu'il ajoute
qu'en cela meme que Jesus-Christ a soulfert les epreuves
que nous soufirons, il peut secourir ceux qui souffrent de
semblables epreuves *; c'est-a-dire qu'il est, pour ainsi
parler, plus dispose a nous secourir dans nos epreuves ,
dont il est instruit par son experience meme. 11 connois-
soit deja nos besoins avant qu'il les eiit eprouves: mais
depuis qu'il les a eprouves , nous ne pouvons plus douter
qu'il ne les connoisse ; nous ne pouvons plus douter qu'il
n'y compatisse , et qu'il ne soil dispose a nous y secourir.
Ainsi , quoique I'experience de nos miseres nait pas pu
reellement augmenter sa misericorde consideree en elle-
meme , cependant elle I'a en quelque sorte augmentee par
rapport a I'idee que nous en pouvions avoir. Elle a servi a
nous convaincre de sa misericorde de la maniere la plus
persuasive, et la plus capable de bannirdenos cceurs tout
doute et toute defiance, \oila done pourquoi Jesus-Christ
a du parliciper a la mortalite de notre nature ; c'est parce
* -^ t-j. Ut mi'sericors fieret — -Ibid. Et fidelis pontifex adDeiim. —
Ibid. Ut reptvpitiar-et delicca populi. — ■* ^ iS. et uk. In eo enim in quo
passtis est ipse et tenlaliis, potens est et eis qui lentanUn- auxiliari.
24o PREFACE
qu'il devoit etre notre liberateur ; c'est parce qu'en cette
qualite , il devoit etre en meme temps pour nous pretre
et victime ; c'est parce que sa mort meme devoit etre le
prix de notre delivrance , et que sa resurrection devait
en etre le principe et le gage. II a fallu qu'il fut passible et
mortel, parce que, par un effet admirable de la grace etde la
bonte deDieu, il a fallu qu'il goutat la mort pour tous; c'est
ce que I'Apotre avoit d'abord avance , et c'est a quoi peut
se reduire tout ce qu'il a ensuite ajoute pour expliquer ce
mystere profond et ineffable qui merite notre adoration ,
nos actions de graces, noire amour et notre confiance.
Excellence L'Apolre a interrompu I'eloge de Jesus-Christ pour
de J.-C. au- lever le scandale de sa mort : il va maintenant reprendre
dessus de la suite de cet eloge ; et apres avoir montre combien Jesus-
Moise. Christ est eleve au-dessus des prophetes et au-dessus des
anges , il va fairc voir combien il est eleve au-dessus de
Moise, qui etoil le plus distingue d'entre les prophetes, et
de qui les Juifs avoient recu la loi qui avoit ete annoncee
par les anges ( chap, ni ). Il vient de moutrer Jesus-Christ
comme un pontife compatissant et fidele , il en prend oc-
casion d'exhorter les Hebreux , etprincipalement ceuxqui
avoient eu part a la grace de la vocation celeste , et qu'il
appelle pour cette raison ses freres saints , a considerer
Jesus-Christ comme I'apdtre et le pontife de la religion
que nous professons ^ ; apotre , pour en etablir le fonde-
ment qui est la foi , par la parole de Dieu , qu'il a lui-meme
annoncee , et que ses ministres annoncent en son nom ;
pontife , pour exercer les fonctions qui en sont I'ame et la
perfection , et qu'il a lui-meme exercees sur la terre , qu'il
f continue d' exercer dans le ciel, et qu'il exerce encore sur
la terre en la personne de ses ministres , par eux et avec
eux , en communiquant aux hommes la grace et les dons
de Dieu par les sacremens , et en offrant a Dieu la recon-
noissance et les devoirs des hommes par le sacrifice. Ce
qu'il fait d'abord remarquer en Jesus-Christ revetu de la
double qualite d' apotre et de pontife, c'est sa fidelitea I'e-
gard de celui qui I'a etabli ^, c'est-a-dire a I'egard de Dieu
son pere de qui il a recu cette double qualite. II en prend
occasion de comparer Jesus-Christ avec Moise ; et il me
semble d'abord I'egaler a Moise , en disant qu'il a ete fidele
* jr i.XJnde,fratres sancti, vocationis ca-lestis participes, considerate, etc.
— 2 y^ a. Quijidelis est ei qui fecit ilium.
SUR l'ePITRE AUX.HEBBEUX. ail
commeMoise '. Mais aussitotil le releve au-dessusde Moise,
en declarant que le peuple entier aii milieu duquel MoIse
a exerce son niinistere, n'eloit aulre que la niaison meme
de celui que Dieu a etabli I'apotre et le poulife de notre
religion ^. II explique et developpe sa pensec , en ajoutant
qu'en effet Jesus-Christ a ete juge digue d'une gloire d'au-
tant plus grande que celle de Moise, que celui qui a bati
la niaison est plus estimable que la maison meme^. II fait
remarquer que toute maison suppose necessairement un
architecle par qui elle a ele batie *. Or , le peuple juif , qui
est celle maison dans laquelle Moise a exerce son minis-
lere , n'cst lui-meme qu'une partie d'un plus grand ediOce
qui est tout I'univers ; ce grand edifice suppose done un
architecle qui a toutcree; et cetarchilecte est Dieu meme^;
de la resulle I'excellence infinie de Jesus-Christ au-dessus
de Moise. C'est ce que I'Apotre developpe en comparant
Moise avec Jesus-Christ. Moise a ete fidele dans toule la
maison de Dieu , comme un serviteur ^ ; et son niinistere
se bornoit a annoncer au peuple tout ce qu'il lui etoit or-
donne de dire, et a lui rendre ainsi lemoignage des vo-
lonles du Seigneur " . Mais Jesus-Christ comrae fils egal et
consubstantielaDieuson pere , est fidele a I'egard de Dieu
son pere dans I'aulorite que Dieu son pere lui a confiee ,
et qu'il exerce sur la maison de son Pere qui est aussi sa
propre maison ^. Moise n'est que serviteur de Dieu ; Jesus-
Christ est fils de Dieu , Dieu lui-meme. L'Apotre n'ex-
prime pas ici en quoi consistele niinistere de Jesus-Christ,
et en quoi il differe de celui de Moise, parce qu'il I'a deja
assc'. marque en disant que Jesus-Christ est I'apotre et le
pontife de notre religion. Moise , charge seulement d'an-
noncer les volontes de Dieu a son peuple , n'exercoit ainsi
qu'une parlie des fonclions que Jesus-Christ devoit exer-
cer : il exercoit a I'egard de son peuple le ministere de I'a-
poslolat ; le sacerdoce eloil confie a Aaron : mais Jesus-
Christ reunit en sa pcrsonne le sacerdoce et Tapostolat;
et il exerce I'un et I'aulre d'une maniere bienplus parfaite
el bien plus excellenle.
* f ^. SicutetMojse*. — * Ibid. Inomni domo ejus. — ' -jl- 3. AmpUo-
ris enim glorice I'siepree Moyse, etc. — * / 4. Omnis namque domusfabri-
ealurab aliquo. — * Ibid. Qui autem omnia creavit, Deus est. — * V 5. Et
MoYses cf u idem Ji delis erat in tola domo ejus, tamjuam famulus. — ''Ibid.
In tesiimonium eorum quce dicenda eratit. — * ^ 6. Christus vero taniquam
fiUus in domo sua (gr. ijn tcv iUiv auTVj, super domum ejus).
a3. 16
2 4s PREFACE
L'Ap6tre ex- Apr^s avoir ainsl etabli rexcellence de Jesus-Christ spe-
horte les H6- cialement au-dessus de Moise , I'Apdtre va en prendre oc-
bieuxa s af- (.ggiQj^ d'exhorter les Hebreux a s'aiiermir dans la foi , et a
lermirdans la , , , i ' v , » /^m • ti i
foi etade- demeurer perseveramment attaches a .lesus-Llirist. II leur
meurer perse- reprcsente donc qu'ils sonl eux-memes la maison de Dieu,
veramment Jg majson de Jesus-Christ , ainsi que tons ceux qui sont
aiiaches a comme eux participans de la vocation celeste par le don de
Jpsus-Christ. , r ■ 1 • * . -11 »-^
II leur cite '^ '^i ; mais en meme temps ii les avertit que nous ne
sur cela I'ex- pouvons tous conserver ce precieux avaniage , qu'autant
horiation que que nous coMScrverons jusqu'a la fin une ferme confiance
Esprii-Saint g^ ^^^ attente pleine de joie des biens que nous espe-
leuradresse , .. ' . •' , p -. •. m
au ps. xciv rons ^ ; ce qui msmue assez que leur contiance etoit ebran-
lee , et qu'ils supporloient avec peine les epreuves dans
lesquelles ils se trouvoient. lis avoient donc besoin que
I'Apotre Vint au secours de leur foi , et employat les motifs
les plus pressans pourles preserver de la chute funeste dont
ils etoient menaces ; c'est aussi sur quoi il va beaucoup in-
sister : et afin queson discours leur fasse plus d'impression ,
il les rappelle aux anciennesEcritures, dontrauloritcleur
etoit si respectable ; et il leur fait remarque** que c'est le
Saint-Esprit meme qui y parle ^. Le texte qu'il leur cite est
tire du psaume xciv, qui est une invitation que I'Esprii-
Saint met dans la bouche du peuple fidele , et qu'il adresse
a toutes les nations , et particulierement a la nation juive ,
pour I'attirer , elle et tous les peuples , a I'obeissance de la
foi , a la religion sainte de Jesus-Christ. D'abord I'invita-
tion s'adresse a toutes les nations de la terre jusque-la en-
veloppees dans les tenebres de Tignorance et de I'infide-
lite : elles sont invitees a venir se rejouir dans le Seigneur,
etrendre graces au Dieu Sauveur, parce qu'il est lui-meme
le grand Dieu et le grand Roi eleve au-dessus de tous les
dieux ; qu'il estle maitre des plus profonds abimes, et des
montagnes les plus hautes ; que la nier est son ouvrage , et
que c'est lui qui a forme la terre. Ensuite I'invitation est
adressee a ceux que Dieu avoit choisis pour etre son peu-
ple , c'est-a-dire aux Juifs memes ; ils sont invites a venir
adorerle Dieu Sauveur qu'ils ontmeconnu ; a venir se pro-
sterner devant lui, et pleurer en la presence du Dieu qui
les a fails , le crime qu'ils ont comrais contre lui , parce que
'-;} 0. Qiice (oO, Cujus) domus surntis nos. — *y 6. Si Jiducianiet glo-
fiani spei [to xau)(^Y)(xa t^? ilmS'oi;) usque ad Jinem^ Jinnam relineamus . —
' / 7- Qitoptvpicr sicut dicit SpiriiiisSancLus, etc.
SLirt'EPlTRE ALX HEBREUX. iziS
ce Dieu Sauveur qu'ils ont meconnu est lui-m^me le Sei-
<;neur leur Dieu , le Dieu que leurs peres ont adore , le
Dieu que nous adorons , et qu'ils adorent eu.v-memes sans
le connoitre tel (ju'il est ; que nous sommes nous-memes ce
qu'ils etoient autrefois, et ce qu'ils serdYit un jour avec
nous, le peuple que sa main conduit, et les brebis qu'il
nourrit dans ses paturages. lis sont exhortes a ne pas fer-
raer les oreilles a la voix de ce Dieu Sauveur , et a ne pas
endurcir leurs coeurs, conime firent autrefois dans le desert
leurs peres , qui par leur infidel ite perseverante meriterent
d'etre exclus du repos que le Seigneur leur avoit prepare.
5/' vous entendez aujourct/iui sa voix , nendurcissez pas vos
caurs , comme il arriva au temps de la contradiction et aujour
de la lentalion dans le desert, oh vos peres me tenlerent , dit le
Seigneur , oa ils voalurent eprouver ma puissance , et oil ils
rirenl mes anvrts pendant quarante annees. Ce Jut pour cela
que je les supportai avec peine et avec degout , et je dis : Ce
peuple se laissc toUjonrs emporler a tegarement de son cceur ,
et line connoit point vies voies. C'est pourquoi je leur jarai
dansiiiacolere qu ils nenlrcroient point dans mon repos '. C'est
ainsi que I'Apotre rapporle ce texte , qui est celui sur le-
quel il insiste; et rien ne pouvoit mieux convenir , puisque,
comme on vient de le voir , ce texte regarde proprement
les Juifs memes, et que le Dieu Sauveur dont I'Esprit-Saint
les exhortea ecouter la voix, est eviderament Jesus-Christ
meme. C'est I'Esprit-Saint qui parle ; c'est de Jesus-Christ
qu'il parle ; c'est aux Juifs memes qu'il parle dans le texte
que I'Apotre rapporte. Ce sont trois verites que I'Apotre
reconnoit, et qui sont lefondement de toutce qu'il va dire.
S'il y a quelques differences entre son texte et le texte
hebreu , c'est qu'il suit la version des Septante. Mais ces
differences sont peu importantes, et n'interessent point
les consequences que I'Apotre va tirer de ce texte. L'Apotre
s'adresse done aux fidelesd'entre les Hebreux , et les appe-
lant ses freres , il les avertit de prendre garde que quel-
qu'un d'euxne tombe dans un dereglement de coeur et dans
uueincredulite qui le separe du Dieu vivant ^ ; et de s'ex-
horter chaque jour les vms les autres , pendant que dure te
temps que TEsprit-Saint dcsigne dans ce psaurae par ce
mot, Aujourd! hui^ ; parce qu'en effet comme ce psaume
' 7 7- ' I . Hodie si rocem ejus audieriiis, etc. — --^ 11. Vidtte, f retires.,
ne forte sit ill aliquo vestrum, etc. — -^ -j^ i3. Sed adhorutminivosmetipsos
per singulos dies donee Hodie cognominati/r.
a44 * PREFACE
regarde Jesus-Christ, ce mot Aujourd'hui renferine lout le
temps qui doit s'ecouler depuis le premier avenement de
Jesus-Christ jusqu'ason dernier avenement. L'Apotre les
avertit done de s'exliorter les uns les autres, de peur que
quelqu'un d'eux-etant seduitpar le peche, ne tombe dans
I'endureissement *. II les console en reconnoissant qu'ils
sont devenus participans de Jesus-Christ, qu'ils ont eu
part a ses graces , ainsi que tous ceux qui ont ci'u en lui ^ ;
maisen m^me temps il les avertit qu'aucun de ceux qui ont
cru en Jesus-Christ ne pent conserver le precieux avantage
de cette excellente participation , qu'autant cju'il conserve
inviolablement jusqu'a la fin le commencement de Tetre
nouveau que Jesus-Christ a mis en lui ^ , et qu'i! persevere
ainsi tantque dure ce temps dont I'Esprit-Saint parle lors-
que les invitant a croire en Jesus-Christ , il leur dit , Au-
jourd'hui si vous entendez sa voix , ri endurcissez pas vos cceurs,
comme il arriva au temps de la contradiction ^ , Il developpe les
menaces terribles renfermees dans ces paroles , et dans
celles qui les suivent ; et il leur fait sur cela trois questions ;
car saint Jean Chrysostome et Theodoret reconnoissent
que tel est le sens du grec , et que c'est aussi le sens le plus
clair et le mieux lie. 11 leur demande done premierement
qui sont ceux qui ayant entendu la voix du 3eigneur dans
le desert, I'irriterent par leurs contradictions: a quoi il
repond par une autre interrogation , en leur demandant si
ce n'est pas tous ceux que Moise avoit fait sortir de I'E-
gypte; parce qu'en eifet des six cent mille hommes compris
dans le denombrement de ceux qui sortirent de I'Egypte
sous la conduite de Moise , il n'y en eut que deux , Josue et
Caleb , qui ne prirent point part aux murmures et aux con-
tradictions du peuple , et qui echapperent ainsi aux ven-
geances du Seigneur^. L'Apotre leur demande seconde-
*y^ i3. Ut non ohduretur quis ex vobis fallacia peccati. — ^f 14. Par-
ticipes enim Chrisd effecti sumus . — ^ Ibid. Si lame n initium substantice
ejus usque adfinemfirmum retineamus. — * -^ i5. Eum dicitur : Hodie si
VQceni ejus^ etc. — * >^ 16. La Vulgate porteaffirmalivement.•QM^i/aw enim
audientes exaceibauerunt, sed non univeisi qui profecti sunt ex Mgypto
per Moysen : et cela est vrai , parce que , comme on vient de le voir, il faut
cxcepter de ces six cent mille hommes Josue et Caleb ; mais celte exception
n'eH>peche pas que Moise ne repete quatre fois que toute la multitude prit
part au murraure : Omnis multitudo. Num. xiv. i. 5. 7. ef ro Et lorsque
Dieu prononce la condamnation dc ces murmurateurs, il declare et repet« que
tous ceux qui ont vu ses merveilles , et qui ont ete compris dans le denombre-
SUA L'^ptxRS AUX Hl^BREUX. a45
ment, qui sont ceux que Dieu a supporles avec peine et
avec degoiit durant quarante aiis dans le desert ; et repon-
dant encore a ceia par une autre interrogation , il leur de-
mande si ce n'est pas ceux qui avoient peche contre le Sei-
gneur, et dont les corps deineurerent etendus dans le
desert' . Enfin il leur demande troisieinement qui sont
ceux a qui Dieu a jure qu'ils n'entreroient jamais dans son
repos ; et continuant la meme interrogation , il leur de-
mande si ce n'est pas ceux qui ont ele incredules et re-
belles a sa parole ^. II ajoute qu'en efTet on voit qu'ils n'ont
pu y enlrer a cause de leur incredulite ^. 11 va lui-meme
montrcr aux Hebreux quelles consequences ils doivent
lirer de la.
II les avertit done ( chap, iv ) que s'appliquant cette L'Apdtre
menace terrible, ou plutol cet arret redoutable que Dieu continue
prononca contre les incredules de son peuple , ils doivent d'exhorter
r --J . -I J •.. 1 -J • 1 • « les Hebreux
tous craindre , et il doit le cramdre aussi lui-meme avec , 'affermir
eux , que s'ils vieiment a negliger la promesse qui leur est jans la foi.
faite d'entrer dans le repos de Dieu , il n'v ait quelqu'un II leur mon-
d'entre eux qui en soit exclus , meme d'une maniere vi- tre lesconse-
sible par une apostasie ouverte a laquelle il seroit aban- <1"^6°<^" .
donne^. L'Apotre developpe sa pensee par le parallele de venuirerdu
raent, perlronl tons dansle desert, omnes, excepte seulement Caleb et Josue.
Ibki. 22. ef 29. Legrec de saint Paul lei qu'il est accentue et ponctue au-
jourd'hui, estconforme a la Vulgate : Ttvs; -yap dxiioavTe; :;af E'JTixp avav j
a)J.' c'j -avT£; ol £;£>.eivTe; i; AipTrrcj 8\.k Muffjuj. Mais I'usage des accens
etde la ponctuation n'est pas de la premiere antiquity : saint Jean Chrysos-
lome et Theodoret reconnoissent qu'il faut lire ces deux phrases dans un
sens interrogaiif'qui s'exprime ainsi : Tivs; •j'ocp ixxcuaavTE? ^istfeTTOcaixvav;
iXX' cii TTavTcc d zli'jfyit-t^ li AiyjTTTCJ ^ti Mtooiu; ; c'est-^-dire , Quinam
enini audientes exacerbaverunt? iionne iiniversi qui profecti sunt ex
Mgjrptoper MoYsen ? Et on vienl de voir que ce sens est pleinement autorise
etjustiliepar les expressions de Moise et de Dieu m^me, parce qu'il ne s'agit
ici que d'une tolalite morale , dont on excepte seulement Caleb et Josue. Ce
qui a donne lieu a requivoque, c'est I'expression iX>.' cu, qui k la verite dans
une proposition direcle signifie , Sed non \ mais la m^me expression se prend
interrogatiyement pour iionne : sur quoi Henri Etienne dans son diclion-
naire cite entre autres exemples cette phrase de Demosthene : aXX' eux a>
t&jt' ev6£«; eiKotsv ; imo vero nonne staiini hoc di'cerent? Voyez la douzieme
Dissertation du P. Mauduit , ou il montre que tel est le sens de ce texte de
saint Paul.
' y- 17- Quilms aulem infensus est quadraginta annis? Nonne , etc.
— * V^ 18. Quibus autem juravii non iiitroire in requiem ipsius\ nisi illis
qui increduli fuerunt? (Gr. Tci; iret6Tffaffi ) — ' ^ 19. ef ult. Et videmus
quia non potueruni introire propter increduliiatem. ■ — *y i. Timeamui
fT^o ne forte relicta pollicitatione, etc.
246 PREFACE
texte qu'il ee qui arriva aux Hebreux du temps de MoYse , avec ce qui
vient de ci- jg^^j, arrivoit alors depuis Jesus-Christ; mais pour les me-
iiager , il se contente de commencer ce parallele , et leur
laisse le soin de I'achever. II leur represente done qu'on
leur a annonce a eux-memes aussi bien qua leurs peres
une heureuse nouvelle^, qui est cette proniesse meme
d'entrer dans le repos de Dieu. Au temps de Moise , Dieu
en promettant a leurs peres de les faire entrer dans son
repos, s'ils etoient dociles a sa voix, leur promettoit en
meme temps le repos figuratif qu'il leur preparoit dans la
lerre promise , et le repos veritable qu'il reserve a ses elus
dans son sein : au temps de Jesus-Christ Dieu leur pro-
mettoit , non plus le repos figuratif donne aux enfans de
, ceux qui etoient morts dans le desert, mais le seul repos
veritable, qui est seul vraiment son repos. L'Apotre con-
tinue la premiere partie du parallele , et fait remarquer
aux Hebreux que la parole que leurs peres enlendirent ,
c'est-a-dire la promesse qui leur fut faite, ne leur servit
de rien^. II leur laisse a conclure qu'ils doivent craindre
que la parole qu'ils ont eux-memes entendue ne leur de-
vienne aussi inutile, et que la promesse qui leur a ele faite
ne demeure de meme pour eux sans effet. 11 leur fait re-
marquer que si la parole adressee a leurs peres leur fut
inutile , c'est parce qu'elle ne fut pas jointe avec la foi en
ceux qui Tentendirent^ ; et il leur laisse a conclure que
s'ils se laissent afl'oiblir dans la foi, ils s'exposent a perdre
de meme I'effet de la promesse qui leur a ete faite. Mais
les Hebreux pouvoient objecter que les enfans de ceux
qui etoient morts dans le desert avoient ete introduits
par Josue dans le lieu de repos que Dieu avoit annonce a
leurs peres , c'est-a-dire dans la terre que Dieu leur avoit
promise ; qu'ainsi la promesse etant accomplie , il n'y avoit
plus d' autre repos a attendre. 11 falloit done leur montrer
que la promesse n' avoit point recu son entier accomplisse-
ment; qu'il restoit encore un autre repos don t celui-la
n'etoit que la figure : il falloit expliquer en quoi consiste
ce vrai repos promis et reserve au peuple de Dieu ; c'est
ce que I'Apotre va faire en continuant d'expliquer les
*y-2. Eteaim et nobis niintiatum est^ quemadmodum et iUis. (Gr. Kai
•^ip 6(T(i.sv'£ur)"i''^tXiCT[Asvot, etc. — ^ Ibid. Sed non profuit ilLis sermo auditus.
— ^ Ibid, Non admistusjideiex iis qui audierunt, (Gr. rot; ixou(!(x.(si , in lis
qui audierunt.)
St'U t'CPiTRk A6X uisREUX. 2^7
verites iniporlantesrenfermces dans le lexle du psauine xciv
qu'il a cite. Aprcs avoir fail remarquer que ce sont les in-
credulcsqui par leur incredulile nicme denieurent cxclus
du repos proniis, il en conclut que lous ceux qui croient
entreront en ce repos' , c'est-a-dire tons ceux qui croient
de cetle foi vive qui opcre la charite. Pour prouver que
ceux qui croienl entreront dansce repos , il se contente de
rappeler ranallienie prononce centre ceux qui ne croient
pas: Je leur ai jure , dit le Seigneur, qiiils n entreront point
dans mon repos^. II va developper toule la force de cette
preuve. Et d'abord il insiste sur cette expression, doTis
mon repos; et il fait remarquer que I'unique repos qui
puisse etre verilablement appele le repos de Dieu est celui
ou Dieu est cntre apres avoir acheve ses ouvrages dans la
creation du monde^. Sur quoi il cite ce qui est dit dans la
Genese, ou Moise parlant du septieme jour, s'exprime
ainsi : Dieu se reposa le septieme jour apres avoir ackete toules
ses ceuvres*. A cette parole, ou le r^pos de Dieu est bien
marque, il compare aussitotle texte qu'il vient de citer ,
ou le Seigneur dit : lis 7i entreront point dans mon repos ^ '^ et
il laisse a comprendre que le rapport de ces deux expres-
sions etant si sensible etsi marque , il en rcsulte clairement
que le repos dont Dieu a parle par la bouche du Psalmiste,
est celui-la meme dont il parle par la bouche de Moise ,
et dans lequel il est entre apres les six jours de la creation
Or, cette parole : lis n entreront point dans mon repos , en
excluant les unsde ce repos, prouve que d'autresdoivent
y entrer; elle prouve que ce repos meme eloit annonce
et promis aux anciens Hebreux sous le symbole du repos
de la terre promise; elle prouve que ce fut de ce repos
meme qu'ils furent exclus par leur incredulite : I'Apotre
reunit ces trois verites'', el il en conclut que ceux-la ayant
merite d'etre exclus de ce repos par leur incredulite, il a
fallu que ce repos fut annonce a d'auires afin que d'aulres
pussent y entrer; c'est ce qu^il exprime en disant que
puisqu'il resulte de cet anatheme meme que quelques-uns
y 3. Insrediemurenini in requiem, qui credldimus. — -Ibid. Qitem-
admodum dixit: Sictttjuravi in ira mea, SiinliviSunt in requiem meam.
— •' y 3. Etquidem operibus ab insliiutione miiiidi peij'ectis. — * y \. Dixit
enim in quodam toco de die seplima sic : El r.quiex'it Deus die seplima ab
omnibus suis. — * ^^ 5. Et in isio rursum : Si introibunt in lequiem meani.
— * y 6. Quoniam ergo superesi intt-oire quosdam in illam . et ii qiiibus
prioribus annuniialum est, non iiuroieruiu propter incr€duli,.aiem, etc.
2^8 PREIACE
doivent entrer dans ce repos , et les premiers a qui ce re^
pos a ete annonce , n'y sont point enlrcs a cause de leur
desobeissanix^e , c'est pour ceia meme que Dieu determine
encore un jour particulier qu'il appelle Aajourd'hui, en
disant tant dc temps apres par David : Aujourd' hai si vou$
enlendez sa voix , n endurcissez pas vos cceursK II fait remar-
quer que si Jesus, c'est-a-dire Josue , eut donne aux He-
breux le vrai repos que Dieu leur avoit promis , Dieu ne
parleroit pas ensuite par la bouche de David d'un autre
jour dans lequel ii est encore temps de travailler a entrer
dans le repos qu'il promet et qui est seul vraiment son ra-
pes^. Etil conclut qu'il reste done encore unsabbat, c'est-
a-dire un repos pour le peuple de Dieu^. Remarquons ici
en passant combien etoit frivole I'argumentque les mille-
naires pretendaient tirer de ce texte pour montrer que le
peuple de Dieu jouiroit d'un repos de mille annees sur la
terre avant d'entrer dans I'eternelle felicite que Dieu a
preparee a ses elus dans son sein. L'Apotre vient de mon-
trer que ce repos reserve au peuple de Dieu n'est autre
que le repos de Dieu, c'est-ardire le repos donl Dieu jouit
en lui-,meme, et dans lequel il est entre apres les six jours
de la creation : ce repos n'est done autre que reternelle
felicite meme que Dieu a preparee a ses elus dans son sein.
Et c'est encore ce que FApotre confirme lorsque paracte-
risant ce repos il ajoute que celui qui est entre dans le
repos de Dieu se repose aussi lui-meme, en cessant de
travailler, comnie Dieu s'est repose apres ses ouvrages^.
Tout repos limite, tout repos distingue du repos ^ternel
qui est le vrai repos de Dieu, n'est point le vrai repos que
Dieu a promis a son peuple. L'Apotre , apres avoir ainsi
montre qu'il y a verilablementun repos reserve au peuple
de Dieu, et quel est le caractere distinctif de ce repos,
exhorle les Hebreux , et s'exborte lui-meme avec eux , k
faire tous leurs efforts pour entrer dans ce repos^, et surr
tout a bien prendre garde qu'aucun d'eux ne se laisse torn
ber dans une incredulite semblable a celle qui fut cause
*-^']. Tterum terminat diemc/uenidom, Hodi'e , in Daui'd dicendo, eic.
— * ^ S. Nam si eis Jesus ref/uiem prcestldsset, nunquam dc alia loquet^-
turposiliac die. — ^ V^ 9. liaque rellnquerctur sabiatismus popido Dei. —
* ^ 10. Qui enim ingressus est in requiem ejus , eliam ipse requievit ab.
operibus suis, sicui a suis Deus. — * ^ 1 1. Festinemus (gr. (J7rou<y^a<i«[A£v)
frgo ingrediin illam requiem.
commenta-
teurs.
SUR l'ePITRE AUX HEBREUX. 249
que leurs pferes demeurferent cxclus de ce repos que Dieu
leur avoil annonce et promis '.
Mais avant de quitter ceci, remarquons tout I'avantage Remarques
que rAp6tre a su tirer du texte qu'il a cite , toutes les ^^^ , "a*^?? ^
^ , r , . , ,., J, ^ o ¥i J quelApotre
grandes ventes qu il y a decouvertes. i 11 a reconiiu dans fait id da
ce texte , comme dans toutes les autres parties des divines texte du ps.
Ecritures, la voix de I'esprit-Saint ^ , la voix de Dieu par- xciv.Cette
lant par la bouche de David ^ , ainsi que par celle des au- p^^e j/galn,
ires ecrivains sacres. 2° 11 a reconnu que le Dieu Sau- pa^i auxH^-
veur dont il est parle dans ce psaume , et dont il faut breux est un
ecouter la voix , est Jesus-Christ meme , puisqu'il n'em- ^^^ P'*" ^^7
, • , . TT '!_ »•! J • cellens mcxie-
ploie ce texte que pourprouver aux Hebreux qu ils "O^- jeg que puis-
vent ecouter la voix de Jesus-Christ *. 3" II a reconnu que sent se propo
I'exhortation qui termine ce psaume regarde particuliere- series inter-
ment les Juifs dont les peres tenterent et irriterent le pretes et les
Seigneur dans le desert , puisque c est ici aux Juifs memes
qu'il adresse cette exhortation, etqu'en la leur adressant,
il insiste partioulierement sur ce qui est dit de I'incredulite
de leurs peres ^. Ce n'est pas que nous ne puissions aussi
nous appliquer a nous-memes cette exhortation : tout ce
qui est ecrit est ecrit pour notre instruction , et nous de-
vons profiler de tout; mais il est toujours vrai que cette
exhortation regarde encore plus particulierement les
Juifs ; les expressions memes du texte le prouvent assez.
4" L'Apotre a reconnu que ce mot Aujourd'hui regarde
particulierement le temps du Messie , et comprend tout
le temps qui doit s'ecouler depuis le premier avenement
de Jesus-Christ jusqu'a son dernier avenement; c'est ce
qu'il fait remarquer en insistant plusieurs fois sur I'etendue
de ce mot Hodie , et I'appliquant toujours au temps de
TEvangile *'. 5" 11 a reconnu que cette voix de Dieu qu'il
faut ecouter , cette voix du Dieu Sauveur , est celle de
Jesus-Christ; c'est une consequence qui resulte necessai-
rement de ce que ce Dieu Sauveur est Jesus-Christ , et
c'est ce qui lui a donne lieu d'insister jusqu'a trois fois sur
^•^ ti.Vt ne in idipsum quit indicai incredulitatis exemplum. — ^Supr'
III. -J. Sicut dicil Spiritus Sanctus. — ^ Supr. iv. 7. in Dai>iddicendo. —
* Supr. 111.7. Quapropier. . . .Hodie sivocem ejus audierilis, etc. — ' Supr.
HI. 7. etseqq. Quapropter, sicut dicit Spiritus Sanctus. . . Nolite obdurare
coi-da vestra. . . secundum diem lentationis in deserto, ubi tentaferunt me
palres veslri, etc. — ^Supi: in. i3. Per singulos dies, donee Hodie cogno-
mineuur. Ety li- et 1 5. Usque adjlnem . . .dtim dicitur, Hodie si vocem
ejus, etc. Et IV. 7. Iterum terminat diem quemdam Hodie.
aSo. PREFACE
cette parole : Aujourd'hui si vous erdendei sa voix , en ex-
hortant les Hebreux a ecouLer la voix cle Jesus-Christ et a
lui etre dociles '. 6° II a insiste particulierement sur cetie
parole : N'endurcissez pas vos cceiirs ^ ; et il en a pris occa-
sion d'exciter les Hebreux a s'entre^exhorter chaque jour
les uns les autres , pendant que dure ce temps que I'Ecri-
ture appelle^M/OM^</'Awf, de peur que queiqu'un d'eux no
tombat dans I'endurcissement en se laissant seduire par
le peche ^ 7" II a insiste encore sur cette parole : Comme
il arriva au temps de la contradicUon * ; et il en a pris occa-
sion de rappeler aux Hebreux quels progres et quels ra-
vages fit dans le desert cette contradiction par laquelle
leurs peres irriterent contre eux le Seigneur : il leur a
rappele le souvenir de ce que Moise leur avoit appris que
tous ceux qu'il avoit fait sortir de I'Egypte avoient pris
part a cette contradiction , a I'exception de deux seule-
ment ^ : souvenir terrible , bien capable de leur imprimer
cette crainte salutaire qu'il leur inspire ensuite ^. 8° II n'a
pas insiste de meme sur ces mots : Comme au jour de hi
tenlalion dans le desert , oil vos peres me tenterenl , oii.ils rou-
lurent eprouver ma puissance , et ils virevt mes ceuvres. Il les
a rapportes pour ne pas interrompre la suite du texte " ;
niais il n'y a pas insiste, parce que cela ne touchoit pas
particulierement ceux a qui il ecrivoit. Us etoient portes a
la contradiction et au murmure, a I'incredulite et a la
revoke contre Dieu; et voila sur quoi I'Apotre insiste.
Mais ils n'etoient pas portes a tenter Dieu, ni a vpuloir
eprouver sa puissance : I'Apotre ne leur fait sur cela
aucun reproche ; et voila sans doute pourquoi il n'insiste
pas sur cette partie du texte qu'il a cite. II proportionne
ses instructions a la disposition de ceux a qui il les adresse.
9° 11 insiste sur ces mots : J'ai supporte ce peuple avcc peine
ct degout ^ ; il demande aux Hebreux qui sont ceux que
^Siipr. m. 7. Qitapropter . . , Hodie si voceni ejus audieritis. Et ^ i5.
Dum dicitur^ Hodie sivocem ejus audieritis. Et iv. 7. Sicut supra dictum
est: Hodie sivocem audieritis. — ^Supr. in. 7. Noliie obdurare cordavestra,
Etrursum -^ i5. Et iterum iv. 7. — " Supr. ni. i3. Sed adhoriarnini vos-
metipsos per singulos dies donee Hodie cognominalur, ut non obdurctur
quis ex vobisfallacia peccati. — * Supr. 111.8. Sicut in exacerbaiione. Et
rursus, -jJ^ i5. — 'Supr. iir. 16. ex Gr. Quinani enim audienies exacerba-
i'erunt? nonne wwersi cjui profecli sunt ex jEg/pto per Moysen? —
— * Supr. IV. I. Timeainus ergo ne forte , etc. — ' Supr. ui. 8. 9. Secun-
4umdiemtentationis, etc. — ^ Supr. in, 10. Pivpler quod ojffinsusfui ge-
neixuionihuic.
SUR l'epItRE ACS HEBRELX. 35 I
Dieu a supportes ainsi : il leur fait remarquer que ce sont
ceu\ qui avoient peche contre lui , et dont les corps de-
nicurcrent eiendus dans le desert : ainsi en deux mots il
leur faitsentir quels I'urent la cause el refiet de ce degout :
la cause , le peche de leurs peres ; reffet, la mort de leurs
pores '. Quelle impression de crainte et d'elTroi cette
parole ne devoit-elle pas faire sur eux ! io° On peut dire
qu'il insiste sur ces mots Et j'ai dit : Ce peuple se laisse
toujoiirs emporter a VegarenurU de son caur^ , lorsqu'il ex-
horte les Hebreux a prendre garde qu'il n'y ait dans leur
coeur quelque mauvaise disposition qui les porte a se se-
parer de Dieu ^. 1 1° II n'in'siste pas sur ces mois : lis n'onl
point contiu mes voies , parce que cela ne regardoil point
du lout ceux a qui il ecrivoit : ils etoient instruits ; ils con-
noissoient la voie du Seigneur ; et le reproche qu'il leur
fera dans la suite sera plutot de ne pas profiler assez des
lumieres qu'ils ont recues^. Ainsi on volt encore en cela
raltention de I'Apotre a proportionner son discours a
I'elat de ceux a qui il parle. i 2° 11 insiste beaucoup sur
cette parole : Je tear ai jure dans ma colere quits n'enlre-
ront point dans mon repos^. 11 demande aux Hebreux qui
sont ceux contre qui cet anatheme a ete prononce , etil
leur fait remarquer que ce sont ceux qui furent incredules
a la parole du Seigneur ^; il leur fait remarquer qu'en
effet ces hommes incredules furent exclus du repos du
Seigneur, a cause de leur incredulite. Ainsi il leur fait
encore ici sentir quels furent la cause et I'effet de cet ana-
theme : la cause , I'incredulite de leurs peres ; I'effet ,
I'exclusion de leurs peres , prives d'entrer dans le repos
du Seigneur"; exclusion visible du repos figuralif, figure
de I'exclusion invisible du repos veritable a I'egard de
ceux qui pcrsevererent dans leur incredulite. Et de la il
prend occasion de les exhorter a craindre que negligeant
la promesse qui leur est faite d'entrer dans le repos de
Dieu, il n'y ait quelqu'un d'entre eux qui en soit exclus ,
' Supr. III. 17. Quibus autem in/ensus est quadraginta annis? Nonne
Wis quipeccavenint, quorum cadavera prostrata sunt in deserto ? — * Supr.
in. 10. Etdixi: Semper errant corde. — ''Supr. m. 11. FideLe. fra'.res, ne
forte sit inediquovestrum cor malum increduUtatis. discedendi a Deo vb'o .
— * Infr. V. 1 1. et seqq. — * Supr. iii. 1 1 . Sicutjuravi in ira mea : Si in-
troibunt in requiem meam. — * Supr. m. 18. Quibus autem juravit non
introire in requiem ipsius., nisi illis qui incredulifuerunt? — ' Ibid, t^^ »9-
Et videmus quia npn poiuerunt introire propter incredulitatem.
aSa PREFACE
meme en quelque sortc d'une maniere visible *. i3° 11
insiste particulierement sur cette parole : Dans mon repos ;
et il montre par le temoignage de Moise , que le repos de
Dieu est celui dans lequel Dieu est entre apres la crea-
tion ^. 14° De la il conclut que ce repos, qui est le seul
vrai repos de Dieu , a ete annonce aux anciens Hebreux
memes,sous le symbole du repos figuratif^. 1 6° Il con-
clut que c'est aussi de ce repos meme qu'ils ont ete exclus
par leur increduUte, c'est-a-dire que ceux qui perseve-
rerent dans leur incredulite, furent exclus non-seulement
du repos figuratif, mais encore du repos veritable, qui
est seul proprement le repos de Dieu ^. 1 6° II conclut que
ceux-la ayant ete exclus du vrai repos de Dieu , d'autres
doivent y entrer ; parce que Dieu ayant resolu de commu-
niquer aux hommes la gloire et la felicite de son repos , si
ceux-la ont merite d'en etre exclus a cause de leur incre-
dulite , d'autres qui seront justifies par la foi y entreront^.
17° 11 fait remarquer que c'est pour cela meme que Dieu ,
par la bouche de David , si long-temps apres la marche
des Israelites dans le desert , determine encore un jour
ou il est encore temps de se preparer a entrer dans son
repos, lorsque, par la bouche de ce prophete, il dit,
parlant du Dieu Sauveur : Aujourd' hui , si vous entendez sa
voix , n endurcissez pas vos cceurs comme vos peres , a qui
j'ai jure quails nentreroient point dans mon repos ^. L'Apotre
ne doute point qu'il n'y ait du mystere dans la liaison de
cet avertissement , Aujourd' hui n endurcissez pas vos cceurs,
avec cette parole, Je leur ai jure qu'ils nentreront point
dans mon repos. II reconnoit que cette liaison mysterieuse
est fondee sur ce qu'encore aujourd'hui , c'est-a-dire an
temps de I'Evangile , Dieu fait annoncer aux hommes la
promesse de les faire entrer dans son repos. 18° U est si
convaincu que tel est le fondement de cette liaison myste-
rieuse , qu'il en tire un argument centre ceux qui lui
objecteroient que Josue a fait entrer les Hebreux dans le
repos que Dieu leur avoit promis. Il auroit pu repondre
* Supr. IV. I . Timeamus ergo ne forte relicia pollicitadone intmeundt
in re(jiiiem ejus, exisiimetur alicjuis ex vobis deesse . — ^ Supr. iv. ^3 . ef 4 .
Eiquidem operibus ah institutione mundi perfeais. Dixit enirn in quodam
loco, etc. — ' Supr. iv. 6. liquibus prioribus annuntiatum est. — * Ibid.
Non iniroierunt propter incredulitatem. — * Supr. iv. 6. Superest iniroire
(juosdam in illam. — « Supr. iv. 7. Iterum terminal diem quemdam, Hodie,
m Daynd dicendot etc.
suR l'epitrb AUX HKBREUX. 253
que ce repos n'etoit point proprement le repos de Dieu ,
puisque , conime il I'a niontre , le vrai repos de Dieu est
celui dans lequel Dieu est entre apres la creation. Mais
sans rappeler ce principe qui auroit pu suffire pour de-
truire I'objection , il se contente de repondre que si Josue
e6t etabli les Hebreux dans le vrai repos , Dieu ne parle-
roit pas ensuite , par la bouche de David, d'un autre jour
ou Ton pent encore se disposer a entrer dans son repos *.
II est done certain que par la liaison myslerieuse de ces
paroles, Aujounf hui n endurcissez pas vos ccturs comnu
vos peres , a qui j'ai jure quits n'enlreroient point dans mon
repos , Dieu marque un jour, c'est-a-dire un temps ou son
repos sera encore annonce , et oii Ton pourra encore se
disposer a y entrer. 19' C'est de cette liaison mysterieuse
nieme qu'il conclut qu'il reste encore un sabbat ou un
repos pour le peuple de Dieu ^ ; repos qui est le vrai repos
de Dieu; repos dont celui qui fut donne par Josue n'etoit
que la figure ; repos qui consiste dans la cessation de tous
les iravaux et de toutes les peines de cette vie , de meme
que le repos dans lequel Dieu est entre apres la creation
consiste uniquement dans la cessation de ses ouvrages ^.
20° Enfin , apres avoir fait remarquer que ceux qui ont ete
exclus du repos du Seigneur en ont ete exclus a cause de
leur incredulite , H en conclut que ceux qui croiront a la
parole du Seigneur entreront dans son repos * ; et il en
prend occasion d'exhorter les Hebreux a faire tous leurs
efforts pour entrer dans ce repos, et surtout a bien prendre
garde de tomber dans une incredulite semblable a celle
qui en fit exclure leurs peres ^. C'est ainsi que TApotre
nous apprend par son exemple 1' usage que nous devons
faire des divines Ecritures. Ce morceau est un des plus
excellens modeles que puissent se proposer les inlerpreles
et les commentaleurs des livres sacres , particulierement
des livres prophetiques , et plus specialement encore du
livre des Psaumes.
L'Ap6tre, apres s'etre ainsi servi des expressions m^mes L'ApAire
continue d'ex-
' Sitpr. IV. 8. Nam si eis Jesus requiem prcestitisset , nunquam de alia
loquereiur posthac die. — * Supr. w. 9. luique relinquitur sabbatismus po-
pulo Dei. — * IV. 10. Qui enim ingressus est in requiem ejus, etiam ipse
requievit ab openbus suis, sicut a suis Deus. — * Supr. iv. 3. Ingrediemur
eium in requiem, quicredidimut. — * Supr. iv. 1 1. Festinemus ergo ingredi
in illam requiem : ut ne in idipsum quia indical incrtduliuuis exempUtm.
234 PREFACE
hor'.cr les jg I'Ecriture pour exhorler les Hebreux a demeurer fer-
Hebreux a i i /• • ^ ^ . • i . i r
s'affermir "^^^ clans la toi , et a se tenir en garde centre les lunestes
dans la foi ; progres d'une incredulite qui pourroit avoir des suites si
il existe sur terribles , excite sur cela leur vigilance; et afin qu'ils
cela leur vigi- craignissent non-seulement les effels exterieurs dc I'incre-
lance, et ra- i i-"' ■ • • » i i
nime leur dulite , mais ses principes meme les plus secrets , souvent
confiance. caches dans le fond du coeur, il leur represente que la
parole deDieu, son Verbe meme,quiainstruitleshonimes
de sa propre bouche , et qui continue de les instruire par
labouche deses ministres, est bien differente de la parole
de Ihomme. La parole de Thomme est par elle-meme
comme morte et sans subsistance ; ce n'est qu'un son qui
frappe lair et s'evanouit aussitot : la parole de Dieu est
vivante , elle subsiste par elle-meme\ La parole de
I'homme est faible et impuissante , elle ne pent par elle-
meme executer ni ses menaces ni ses promesses : la parole
de Dieu est efficace ; elle se suffit a elle-meme pour I'exe-
cution de ses promesses et de ses menaces^. La parole
de rhomme frappe I'oreille , et ne peut penetrer plus
avant; elle ignore ce que produisent au fond de I'ame les
ideas et les jugemens qu'elle exprime : la parole de Dieu
est plus penetrante qu'une epee a deux tranchans ; elle
penetre jusqu'au fond du coeur , non-seulement pour y
operer, mais encore pour le juger^ : elle eutre jusque
dans le profond repli qui en meme temps distingue et unit
I'ame et I'esprit, c'est-a-dire la partie animale et la partie
spirituelle*. Ce n'est pas encore assez dire ; les expres-
sions nous manquent pour (aire connoitre jusqu'ou va sa
penetration : elle perce , si on peut parler ainsi , jusque
dans les jointures et dans les moelles , jusque dans le fond
le plus intime de I'ame ^ ; en un mot , elle discerne les pen-
sees les plus secretes et lesmouvemens du cceur les plus
caches ^. INulle creature ne lui est invisible : tout est nu et
I * Cap. IV. -f 12. ^/Vm5 est enirn sermo Dei (gr. 6 ).o-fo; tcu 0ec&) ; on au-
roit pu traduire Ferbum Dei: la suite inontre que c'est le sens du grec; et il
y a lieu de croire quec'eloit aussi la pensee de I'ancien interprele latin , qui
dans I'Evangile meme de saint Jean avoit rendu le mot Xo'-yo; ^ar Ser-ino ,
comme on le \oit dans saint Cyprien, qui lisoil au commencement de cet evan-
gile: In principioerat Sermo, ei Sevmo erat apud Deum , et Deiis erai Ser-
mo, Jd^.Jud. /.II. c. 3. ei 6. — - Cap. iv. -^ 12. Etejficax. — -^ Ibid. El pe-
netrabilior omni gladio ancipiii. — '^Ibid. Et pertingens usque addivisionein
animce ac spiritus. — 'Ibid. Compagum quoque ac meduilarum. —" Ibid.
Et discretov cogitaiionum et iiUentionum cordis.
SUR L EPITRE ALX HEBRKCX. 203
a decouvcrt devantses yeux'. D'oii I'Aptitre leur laisse a
coiiclure que quand ils pourroient dissiniuler leur incre-
dulile a la vue des homines , qui ne voienl que les dehors,
ils lie pourroient la derober aux. yeux de Jesus-Christ, qui
estlui-meme cette parole si penetrante qui connoit tout
ce qu'il y a de plus secret dans le fond de leur coeur : mo-
tif hicn puissant pour les porter a rejeter lout ce qui seroit
capable d'eniretenir ou de. faire naitre au fond de leur
ame une disposition si funeste. Apres avoir ainsi excite
leur vigilance et leur zele , il ranime leur ferveur et leur
confiance par deux motifs : la grandeur de Jesus-Christ
considere comme notre pontife , et sa tendre compassion
pour les homnies^. II leur represente la grandeur de Je-
sus-Christ considere couime un pontife que trois carac-
teres distinguent des pontifes de I'ancienne loi. Ceux-la,
tous egaux entre eux , n'etoient superieurs qu'aux autres
prelres qui partageoientavec eux les fonctions de leur mi-
nislere ; mais celui-ci est le grand Pontife par excellence ,
iuOniment eleve au-dessus de tous les autres pontifes''. Le
privilege le plus distingue de ceux-la etoil de pouvoir seii?s
penetrer une seule fois I'annee dans le lieu le plus saint
du temple du Seigneur : celui-ci a penetre jusqu a* plus
haut des cieux , ou il est resle assis a la droite de £)ieu^.
Ceux-la ne sont que des homraes mortels , engendres par
des hommes mortels comme eux, a qui ils ont succede :
celui-ci est le fils de Dieu, egal , consubstantiel et cocter-
nel a Dieu son pere ^. C'est d'abord par ce motif qu'il les
exhorte a demeurer fermes dans la religion qu'ils profes-
sent, et qui a ainsi pour pontife le Dieu meme qu'elle
adore •". Mais parce que la grandeur supreme de ce pon-
tife pourroitpeut-etre leur faire craiudre qu'il ne fut moins
dispose a compatir a leurs souffrances, qui etoient alors
pour eux la tenlation la plus violente, il leur represente
qu'a cette grandeur supreme ce pontife joint la compas-
sion la plus tendre. II leur declare done d'abord que ce
pontife n'est point tel qu'il ne puisse compatir a nos foi-
blesses et a nos infirmites' ; et il le prouve aussit6t en leur
' y i3. Et non estuUa creatura invisibilis in conspectu ejus. etc. —
y 1 4. et i5. Habentes ergo Pontiftcem magnum ., etc. — ^ y li. Habentes
ergo Ponlificem magnum. — ^ Ibid. Qui peneiroi'it coelos. — 'Ibid Jesum
Filium Dei. — * Ibid. Teneamus confessionem. — ' -^ 1 5. Non enim Imbe-
rnus Poiuijicem qui noiifjossit conipaii infimiitatibus nostris.
256 PREFACE
faisant reraarquer que ce pontife , si grand et si eleve ,
s'est abaisse jusqu'a eprouver comme nous toutes les foi^
blesses que nous pouvions avoir a eprouver; les humilia-
tions , les souffrances , la mort , tout enfin , excepte le pe-
che , qu'il ne pouvoit pas eprouver , mais dont il a voulu
cependant porter pour nous la peine ^ II en conclut qu'ils
doivent, ou plut6t que nous devons tous , nous presenter
avec confiance devant le trone de grace sur lequel est
assis cepontife si eleve et en meme temps si compatissant^;
et il marque aussitot les deux choses pour lesquelles nous
devons nous en approcher, et qui doivent etre I'objet de
toutes nos prieres : c'est premierement afin d'y recevoir
misericorde pour nos peches passes ^; c'est secondemenfc
afin d'y trouver grace pour etre secourus dans nos besoins
presens et futurs*.
J.-C. est Jusqu'ici I'Apdtre a suppose en Jesus Christ la qualite
vraiment no- , .-r -i • » . > m \ ,
tre pontife; et ^^ pontile ; il va mamtenant prouver qu en effel Jesus-
comment ' Christpossede cette qualite ( chap, v ). Mais avant de mon^
cette quality trer comment cette qualite appartienta Jesus-Christ , qui
luiconTient esj fiig Jg Dieu , il commence par faire remarquer auels
etluiappar- j • ^ ». i ^> j,^ -r . 7, m"^ "
tient. doivent etre les caracteres d un pontife pris d entre les
hommes^. Premier caractere : il estetabli pour les hommes
en ce qui regarde le culte de Dieu *' : et le principal exer-
cice de son ministere a cet egard , c'est d'offrir a Dieu de
la part des hommes des dons et des sacrifices pour les pe-
ches^ Second caractere : ilfautqu'il soit dispose a entrer
dans les sentimens d'une juste compassion pour ceux qui
pechent par ignorance et par erreur ^ ; le fondement de
cette compassion , c'est qu'il est lui-meme environne de
foiblesse ^ ; et la preuve de cette foiblesse , c'est qu'il est
obhge d'offrir le sacrifice de I'expialion des peches pour
lui-meme comme pour le peuple **'. Troisieme caractere :
c'est que nul ne doit s'atlribuer a soi-meme cethonneur,
mais il faut y etre appele de Dieu , comme Aaron '^ L'A-
• y^ i5. Tenlatum autemper omnia pro similiiudiiie absque peccato.
— * y^ i6. etult. Adeamus ergo cumfiducia adihronum gratice. ^ Ibid.
Ut misericordiam consequamur. — ^Ibid. Etgratiam inveniamus in auxilio
oppoHiino. — * T^ I .-4. Omnis namquepontifex ex hominibus assumptus, etc.
— ^ Ibid. Pro hominibus constituitur in iis quae suntad Deum. ''Ibid.
Ut ojfferat dona el sacrijicia propeccatis.—^ j 2. Qui condolere possit iis
qui ignorant et errant. — » Ibid. Quoniam et ipse circumdalus est tnfirmi-
tate. — 'oy^S. Etpropterea debet, quemadmodum pro populo, ita eiiam et
pro semetipso offerre pro peecatis. — " V^ 4. Nee quisquam sumit sibiho-
norem, sed qui vacatur a Deo tanquam Aaron.
SUR L EPITRE \LX HEBREUX. 2^-
p6lreva monlrer comment ces irois caractercs convien-
nent a Jesus-Christ. 11 commence par le dernier, et il fait
reraarquer que Jesus-Christ n'a point pris de lui-ra^me ]a
qualite glorieuse de pontife , mais que c'est Dieu son Pere
qui la lui a donnee K Pour le prouver il va citer le temoi-
gnage des divines Ecritures , et il va montrer que le sacer-
doce de Jesus-Christ y est aussi clairement marque que sa
filiation divine. C'est pour cela qu'il commence par rap-
peler un texte qu'il a deja cite , et qui prouve la filiation
divine de Jesus-Christ , c'est celui du psaume ii , oil Ton
voit que Dieu son Pere luiadressecette parole quine peut
convenir qu'a lui : f^oust'les monFils ;je vous ai engendre
anjourdhni^. 11 declare done qu" le Dieu supreme qui a
ainsi declare et reconnu Jesus-Christ pour son fils es(!^
aussi celui quil'a etabli pretre; et il le prouve par ce texte
du spsaume cix : F'ous etes le prttre etemel selon tordre de
Melchisedech ^. Et en effet I'Apotre a deja fait remarquer
que Jesus-Christ estle seul a qui puisse etre adressee celte
parole du Seigneur, rapportee dans le meme psaume :
Asseyei-vovLS a via droite. C'est done aussi a Jesus-Christ
seul qu'est adressee cette autre parole qui en est la suite :
l^ous etes le prttre etemel. Jesus-Christa done veritablement
ele appele de Dieu au sacerdoce : premier caractere qui
est en lui le fondement de cette auguste qualite. Deux an-
tres caractcres doivent en etre la marque : la compassion
a regard des hommes , et la mediation entre les hommes
et Dieu : c'est sur quoi I'Apotre va insister. Et d'abord il
rappelle le souvenir dece que Jesus-Christa fait eteprouve
dans les jours de sa chair, c'est-a-dire dans les temps de
sa vie mortelle : il fait remarquer qu'alors Jesus-Christ a
ofFert ses prieres et ses supplications a celui qui pouvoit
le tirer de la niort ; il temoigne que ce fut meme avee
larmes et avec un grand cri , c'est-a-dire avec celte vive
instance qui est le criducceur ; et il ajoute que cette priere
si fervenle a ete exaucee a cause de l' humble respect de
celui qui I'ofTroit *. Ce que Jesus-Christa fait alors eloit
I'exercice m^me de sa mediation ; et ce qu'il a eprouve est
le fondement dcsa compassion , ou plut6t en est pour nous
•
* y 5. ^f 6. Sic et Chrislus non scmeiipsian clarijicavit ut ponvfex Jieret,
sedtjui locutus est ad eunt , etc. — - y 5 . Sed qui locittus est ad eum : Filtus
meus eslu, etc. — ^ -f 6. Quemadmodum tt in alio loco dixit : Tu es sa-
cerdos. etc. — * y 7 . Qui in diebus carnis sua, etc.
a5. T
258 rREFACE
la preuve et le {?age. Et en effet ici I'ApAtre nous fait re-
marquer que Jesus , en se soumettant aux soufiVances et
a la mort , quoiqu'il fut Fils de Dieu , a appris par tout ce
qu'il a souffert ce que nous coute I'obeissance ' ; ce qui
confirme ce qu'il aditplus haul, qu'il n'est paspossible que
Jesus-Christ ne compatisse pas a nos foiblesses apres qu'il
les a lui-meme eprouvees. II ajoute que Jesus etanl con-
somme , c'est-a-dire etant enlre dans la consommalionde
sa gloire, est devenu la cause et I'auteur du salut eternel
pour tous ceux qui lui obcissent : Jesus est done notre
mediateur, et dans ses souffrances, et dans sa gloire, qu'il
a meritee par ses souffrances ^. Ainsi il reunit en lui les
trois caracteres du sacerdoce , la mediation , la compas-
^ sion , et la vocation. L'Apotre insiste encore une fois sur
ce dernier caractere , en faisant remarquer de nouveau que
c'est Dieu meme qui a etabli Jesus-Christ pontile en le de-
clarant tel ^ ; mais s'il y insiste ainsi , c'est pour faire re-
marquer en meme-temps la difference essentielle qui se
trouve entre Jesus-Christ et Aaron: I'un et I'aulre ont ele
appeles de Dieu, mais pour un sacerdoce different ; Jesus-
Christ est pontife , non selon I'ordre d' Aaron, mais selon
I'ordre de Melchisedech^.
L'Apoirere- Ceci lui donne licudefaireunenouvelledigression.il
proche aux declare done qu'il auroit beaucoup de choses a dire sur
Hebreux leur (.g{_jg difference qui se trouve entre le sacerdoce d'Aaron
sitionaentrcr *^'- ^^ sacerdoce de Jesus-Christ, represente par celui de
dans I'inielli- Melchisedech ; mais qu'il lui est difficile de les bien expli-
gencedes qucr a ceux a qui il ecrit, parce qu'ils sont devenus pour
grandes ven- j^^ plupart peu capablcs d'entendre ces mysteres pro-
gion ' fonds^. 11 leur reproche qu'au lieu que, depuis le temps
qu'on les instruit, ils devroient deja etre capables d'en-
seigner les autres , ils auroient encore besoin qu'on leur
apprit les premiers elemens meme par oii Ton commence
a expiiquer aux hommes les verites de la religion ^ ; il
les compare a des enfans a qui il ne faut que du lait, et
dont le foible estomac ne pourroit digerer une nourriture
* ^ 8. Etquidem cum esset Filius Dei, didickex its fjuce passus est obe-
dieiuiam. — ^ V' 9- Et consummalus Jacius est omnibus obtemperaiuihus
sibi causa salutis eeternce. — ^ -^ lo. ^ppellalus a Deopontifex. — * Ibid.
Juxla oi'dinem Melchisedech. — * y ii. De quo nobis grandis sermo, et
ininlerprelabilis (a,r. J'uacfu.vivEUTc;) ad dicenduin, quoniam, etc. — "y la.
Etenim cum debervtis magistri esse propter tempus, etc.
SIR l'ei'Itre ALX HE^RELX. 25q
plus solide '. 11 explique cetle coinparaison ; ct il declare
que quiconque est ainsi reduit au lait, c'est-a-dire aux
jilus loibles instructions , est incapable d'entendre les dis-
tours do la justice^, c'est-a-dire les discours qui regar-
dcnt le principe et la source de la vraie justice , les dis-
cours qui tendenta monirer que la justice ne vient point
de la loi , mais de la foi ; car c'etoit precisement ce que les
Kebreux avoient plus de peine a comprendre, comme on
I'a vu par les epttres adressees aux Galates etaux Romains,
ou I'Apolre combat l«i docteurs judaisans sur I'origine et
le principe de la vraie justice ; et c'etoit aussi a quoi devoit
lendre ce que TApotre avoit a expliquer touchant la diffe-
rence du sacerdoce d'Aaron et du sacerdoce de Jesus-
Christ; il s'agissoitde montrer que le sacerdoce d'Aaron,
avec toutes ses ceremonies , ue pouvoit donner la vraie j us-
tice , et que cette vraie justice ne pouvoit nous etre meritee
et appliquee que par le sacerdoce de Jesus-Christ : tels
etoientces discours de justice dont plusieurs d'entre les
Hebreux n'etoient pas capables , etant devenus semblables
a des enfans par la foiblesse de leur intelligence ^. L'A-
polre ajoute que* la nourriture solide , Tinstruction forte
qui renferme le developpement des graudes verites de la
religion, est pour les parfaits , c'est-a-dire pour ceux dont
I'esprit, par une habitude et un long exercice , s'est accou-
tume a discerncr le bien et le mal, le vrai et le faux*,
et a ne pas se scandaliser de ces verites fortes qui surpas-
sent I'intelligence des foibles ; et en effet , par les epitres
aux Romains et aux Galates , on a vu combien alors etoit
commune chez les Chretiens judaisans cette disposition des
ames foibles , toujours pretes a se scandaliser de la doc-
trine et de la conduite de ceux qui abandonnoient le dis-
cernement des viandes et les autres ceremonies legales
comrae inutiles en elles-memes , et dangereuses a ceux qui
les croyoient necessaires.
L'Ap6tre , apres avoir ainsi reproche aux Hebreux cette L'ApAire ei-
espece d'enfance spirituelle dans laquelle plusieurs d'entre ,^^ .,T
eux etoient retombes par leur inapplicalion aux grandes veraveclui
verites de la rehgion, les exhorte a s'elever avec lui a ces aux grandes
' y 12. Elfacii estis quibus lade opus sit, non soUdo cibo. — 'j i3.
Omnis enini quilaclis est particeps, expers est (gr. a— sifc;,) seimonis j usti-
lice. — ' Ibid. Parvulus enim est. — *y 14. et ult. Perfectorum autem est
solidus cibus, eorum qui pro consuetudine, etc.
2 6o PREFACE
verltesdoniil grandes verites dont il va leur parler ( chap, vi ) ; et e«i
doilies in- consultant I'ulilite de ces homnies parfaits qui sont ca-
siruire,et pables des plus fortes instructions', il invite les foibles a
Icur fait sen- ', >, '■ » ^ » • j> •»'!.•
i;- 1« A^^rr^^ s elever avec eux et a s animer d une samte emulation
iir le aan£;er . ' .,,,,.
de Taposiasie pour les suivre. II les exnorte done tous et il s anmic lui-
alaquelleles meme a s'elever au-dessus des premieres instructions que
contluisoit j'qjj donne a ceux qui ne font que commencer a croire en
leur atfoiblis- ,, ^, • . -i i j . i ^ i
sement dans Jesus-Chrisl ; il leur propose de tendre a des connois-
la foi. sances plus parfaites^. II leur fait sentir que revenir a
ces premiers elemens , ce seroit re^mmencer un ouvrage
qui avoit ete fait, ce seroit en quelque sorte jeter de nou-
veau dans leurs coeurs les premiers fondemens de la reli-
gion ; et c'est ce qu'il n'a pas dessein de faire ^. II expose
en quoi consistent ces premiers fondemens , c'est-a-dire
ces premieres verites dont on doit instruire ceux qui se
presenlent pour embrasser la foi , et dont il n'a pas dessein
de parler. Ce sont celles qui ont pour objet , i" la peni-
tence des oeuvres mortes , c'est-a-dire le renoncement au
peche et les exercices qui disposoient au bapteme ; 2° la
foi en Dieu , c'est-a-dire la connoissance des principaux
mysleres dont il falloit etre inslruit avant d'etre baptise ;
3° la doctrine des baptemes, c'est-a-dire la difference es-
sentielle qui se trouve entre le bapteme institue par Jesus-
Christ et les autres baptemes ou lustrations pratiquees
chez les Juifs ou meme aussi chez les genlils ; 4" I'im-
position des mains, c'est-a-dire la vertu de cette impo-
sition des mains par laquclle le Saint-Esprit est confere
aux fideles , avec I'abondance de ses graces et de ses dons ;
5" la resurrection des morts ; 6° le jugement elerneP.
Voila les verites dont on doit instruire les commencans ,
et dont I'Apotre declare qu'il ne parlera pas ici : il se pro-
pose de s'elever plus haut, et il promet de le faire, si
Dieu le lui permet ^. Mais auparavant il explique pour-
quoi il ne revient pas a ses premieres instructions : c'est
qu'il est impossible que ceux qui ont ete une fois eclaires
par le don de.lafoi, qui ont goute le don celeste dans la
divine eucharistie , et qui ont ete rendus participans du
Saint-Esprit par I'imposition des mains , qui ont aussi
* 7^ r . Quapwpler inlcrmhientes inchocuionis Christi sermonem , adper-
fectiorafevamur. — * Ibid. Non rursum jacientesjundamentum. — * -jJ i.
et 2 . Fundamentum pceniientice ab operibus moriuis, etc. — ^ ^ 3 . Et hoc
facieniiis^ si quidein peimiserit Deus.
SUR t'EPilRK AtX UKBR£UX. iGl
goi^te I'excellence de la parole de Dieu par le don de I'in-
telligence, et les biens meines du siecle futur par la vertu
dc I'esperance' ; il est impossible que ceux qui apres cela
sont tombes , en abandonnant la toi^; car c'est precise-
ment de quoi il s'agissait a I'egard des Hebreux a qui saint
Paul ecrivoit ; il est impossible que ceux-la soient encore
renouveles par la penitence , c'esl-a-dire recus de nouveau
a cette penitence des ceuvres mortes qui disposoit au bap-
t^me , en un mot a un second catechumenat^ parce qu'ils
ne peuvent recevoir un second bapleme ; c'est ce que
rAp6tre lui-m^me explique en ajoulant qu'il est impossi-
ble qu'ils soient ainsi renouveles crucifiant de nouveau
pour eux-memes le Fils de Dieu, car c'est precisement ce
que porte le texte : Rursuin cracifigenles sibinutipsis Fi-
lium Dei *: c'est I'expression de la Vulgate, et le grec y
est conforme. Etl'Apotre explique lui-memesapensee lors-
que ecrivant aux Galates, il leur fait remarquer que Jesus-
Christ a ete crucifie en eux : In volis crucifixus ^. C'est
par le bapteme meme que Jesus-Christ a ete crucifie en
nous , parce que nous sommes baptises en sa mort ; le Dap-
t^me est pour nous I'application de sa mort; en sorteque
par le bapteme Jesus-Christ est vraiment crucifie en nous
et pour nous. Or, comme Jesus-Christ ne peutpas mou-
rir une seconde fois, et qu'il est ressuscite pour ne plus
mourir, il est impossible de reilerer le bapteme , qui fest
le mystere de son unique mort. Pour renouveler les pe-
cheurs par cette voie, il faudroit que Jesus-Christ fut de
nouveau crucifie en eux et pour eux ; c'est ce que I'Apotre
declare etre impossible. Maisnon-seulementce seroit cru-
cifierde nouveau Jesus-Christ , ce seroit encore I'exposer
a I'ignominie^ ; ce seroit rendre meprisable I'application
de ses mysteres. Pour leur faire sentir la justice de ce ju-
gement que Dieu exercesur les apostats en ne permettant
pas qu'ils puissent ere recus a un second bapteme , il em-
ploie une comparaison prise de la conduite ordinaire des
hommes, et du jugement qu'ils portent d'une bonne et
dune mauvaise terre. 11 leur represente done que lors-
qu'une terre , etant souvent abreuvee des eaux de la pluie
• ^ \. ei 5. Imposibile est enim eosqtii semel sunt illuminali , eic. —
' y 6. Et prolapsi sunt. — ^ Ibid. Ritrsus renovari ad pcenitentiam : scilicet
pcenitentiain aboperibusmonuis, de qua locutus est supra ^ i . — ' Ibid. (Gr.
avadTOupcjvTai ia'JTcI; tov ut« tcO ©ecu.) — * Gal. in. i. — * ^ 6. Etostenlui.
habentes. (Gr. xcli Tzx^a.^i'.-f^cLTZ'''*'^-)
262 PRfiFACK
qui y tombe , produit des herbages propres a ceux qui
la cultivent , elle rccoit la benediction de Dieu ; on la re-
garde comme une terre que Dieu benit , et on souhaite
qu'il continue de repandre sur elle ses benedictions ' :
mais quand une terre ne produit que des ronces et des
epines, elle est rejetee etreprouvee, regardee comme une
mauvaise terre; elle est proche de la malediction, pcu s'en
faut qu'on ne la maudisse, et sa (in est d'etre brulee; le
maitre qui la possede y met le feu ^. Telle est done aussi la
condamnation terrible qui menace ceux qui abusent des
dons de Dieu, etqui, apres I'avoir connu et servi, re-
tombent ou par une apostasie ouverte en renoncant a la
foi , ou par la depravation des moeurs en cessant de vivre
selon leur foi. Ce n'est pas qu'il ne leur reste encore une
ressource dans la penitence; c'est une planche que Dieu
leur laisse encore apres le naufrage; et I'Apdtre ne le nie
pas : il dit sculement qu'il leur est impossible de revenir a
cette penitence des oeuvres mortes qui disposoit au bap-
teniQ, et de crucifier de nouveau pour cux le Fils de Dieu
en recevant un second bapteme. Ainsiils demeurent en-
tierement prives de la ressource d'un second bapteme
semblable au premier; et s'ils perseverent dans leur infi-
delite , s'ils continuent a ne produire ainsi que des ronces
et des epines, leur fin sera d'etre condamnes au feu eter-
nel : voila a quoi se reduit ici la pensee de I'Apotre.
L'Apotre ra- Cela meme sulfisoit encore pour repandre la terreur
jiimelacon- dans le ccEur des Hebreux, qui sentoient leur affoiblisse-
iiancedes nient, et qui en recevoient actuellement des reproches de
Hebreux: il , i 1. » « » , 1 • • • m 1 » -i 1
excite leur ^'^ P^^'' de 1 Apotre. Apres les avoir amsi ebranlcs, 11 les
select leur consolc , ct ranime leur esperance; il leur temoigne son
courage par affection , et leur declare que quoiqu'il leur ait parle ainsi,
lemoiifde j[ ^ cependant une meilleure opinion d'eux et de leur
dontilleur' ^^^^^^ "*• Mais sur quoi est fondee cette confiance? il le
monireles marque aussitot : elle est fondee en meme temps sur la
fondemcns justice meme de Dieu, ct sur leurs bonnes ceuvres; car
inebrania- Dieu n'est point injuste pour oublier leurs bonnes oeuvres'*.
Et entre leurs bonnes ceuvres I'Apotre distingue particu-
' / 7. Terra em'in scepe venientem super se bibens imhrem, etc. , acci-
pitbeiiedictionem a Deo.- — -^-^B. Proferens autem spinas ac tribulos, rc-
probaest, et nialedi'cio proxima ; cujus consuminatio in combustionein. ■ —
^ y- 9. Confidimus autem de vobis, dileciissimi, meliora etviciniora saluti,
tainetsiila lorjuiinur. — * -jj- 10. Non enim injuslus Deus ut obh\'iscatiir
operis vestri.
SL'R l'ePITRB AUl UEBREUX. ^63^
Kerement celles tie leur charite, qu'ils ont temoignee par
les assistances qu'ils ont rendues et qu'ils rcndent encor©
aux saints en son nom '. Mais ce ne sont pas tant les
bonnes a?uvres que la perseverance dans les bonnes oeuvres'
qui aft'ennit notre esperance; c'est pourquoi I'Apdtre leur
temoigne qu'il souhaite que chacun deux fasse paroitre
jusqu'a la fin le meme zele , afin que leur esperance soil
remplie ^ ; il souhaite que, toujours animes de zele, ils ne
tombent point dansune funesle indolence pour les choses
du salut ^ , mais qu'ils deviennent imitaleurs de ceux qui
par leur foi et par leur patience sont devenus heritiers
des proraesses* , parce qu'en effet Ic zele et le courage
evangelique doit venir de la foi, et se terminer a la patience.
Entre ceux qui par la foi et par la patience ont obtenu I'effet
des promesses, il leur cite I'exemple d' Abraham m^me,-
qui estle pere des crovans. II leur rappelle le souvenir de
la promesse que Dieu fit a ce patriarche , et qu'il scella de
son serment: il leur represente done que Dieu, dans la
promesse qu'il fit a ce patriarche , n'ayant point de plus
grand que lui par qui il put jurer, jura par lui-meme, et
lui dit : Assurez-vous que je vous comblerai de benediction,
et que je multiplierai abondamment voire race^. II leur fait
remarquer que ce patriarche ayantaltendu avec patience,
a recu I'effet de cette promesse''. II a persevere jusqu'a
la fin dans I'esperance; et il a recu I'effet de cette pro-
messe non-seulement dans Isaac et dans la nombreuse
posterite de Jaqob , mais bien plus encore dans Jesus-
Christ meme , ne de sa race , et devenu le pere d'une mul-
titude innombrable de fideles de toutes nations, sur qui
se repandent les benedictions promises a Abraham et a sa
race. II insiste sur le serment que Dieu joignit a cette pro-
messe; il fait remarquer que comme les hommes jurent
par ceiui qui est plus grand qu'eux, et que le serment est
la plus grande assurance qu'ils puisscnt donner pour ter-
miner tous leurs differens, Dieu voulant aussi faire voir
avec plus de certitude aux heritiers de la promesse, c'est-
* 1^ lo. El dilectioTUS quean ostendistis in nomine ipsius, etc. — - i 1 1 .
Cupimiis aiiiem unumquemqiie vestrum, etc. — ' •^ii.Ut non segnes ejji-
ciamini. — * Ibid. Verum imitaiores eorum quijide et patienlia heredita-
bunt (gr. xXrpsvctJuivTwv, hereditaverunt) vromissiones. — • 7 i3. et i4-
Jlbrahie nanique promiUens Deus, etc. — *y 1 5. Etsic lonQanimiierJerens,.
adeptus est repromissionem.
264
PREFACr.
a-dire aux enfans de la foi , la fermete immuable de sa re-
solution, a ajoute le serment a sa parole S afin qu'elant
appuyes sur ces deux choses inebranlables , par lesquelles
il est impossible que Dieu nous trompe , nous ayons une
puissante consolation , nous qui avons mis notre refuge a
nous tcnir attaches a I'esperance qui nous est proposee ^.
II marque ici deux caractercs de I'esperance chretienne;
elle est pour notre ame comme une ancre tres ferme et assu-
ree qui doit la souteniraumilieudestempetesetdes dangers
dont elle est agitee ^ ; elle penetre jusqu'au dedans du
voile, jusqu'au sanctuaire celeste, oil Jesus est entre pour
nous comme precurseur * . Ceci le ramene a son sujet ;
et il fait remarquer que Jesus est ainsi entre dans le sanc-
tuaire celeste, comme ayant ete etabli pontife eternel selon
I'ordre de Melchisedech ^.
Caracieres L'Apotre va donc maintenant remplir la promesse qu'il
deWelcluse- a faite de s'elever au dessus des premiers elemens de la
sacerdoce est^ religion , et de passer a des verites plus hautes et plus su-
le symbole du blimes. 11 va expliquer ce qui regarde le sacerdoce de
saccrdoce de Jesus- Christ; il va montrer comment Jesus-Christ est
^■-^- pontife selon I'ordre de Melchisedech , et en quoi consiste
I'excellence de son sacerdoce au-dessus de celui d'A.aron.
Et ici il va nous apprendre a etudier Jesus-Christ dans les
Ecritures anciennes , et a y decouvrir ses mysteres et ses
plus grandes qualites cachees dans les figures; il va nous
montrer que tout parle dans les divines Ecritures, jusqu'aux
noms memes des personnes et des lieux, bien plus, jus-
qu'au silence meme, et que qtielquefois ce silence dit
beaucoup , si on saitbien I'entendre. Etudions avec atten-
tion un si excellent modele.
L'Apotre rappelle donc d'abord ce que Moise dit de
Melchisedech (chap, vii), et il y remarque cinq circon-
stances. Il est dit qu'il etoitappele Melchisedech ^, qu'il etoit
roi de Salem \ qu'il etoit pretre du Dieu tres haut^ ; il est
dit qu'etant venu au-devant d' Abraham lorsque ce pa-
' -f r6. et 17. Homines enim per majorem suijitrant, etc. In quo abun-
duntius volens Deus, etc. — ^ -jf i8. Ut per duas res immobiles, etc.^ for-
iissimum solatium haleamus, qui coiifugimus ad lenendam propositam
spem. — ' -^ 19. Quam sicut anchoram fuibemus animal tutam acjirmam.
— * ^ 19. ef 20. El incedeniem usque adinteriora velaminis, ubiprcecur-
sorpro nobis intivii'it Jesus. — « -j- 20. et ult. Secundum ordinem Melchi-
sedech pontifex foetus in miernum. — " ^f^ r. Hie enim Melchisedech. —
''Ibid. Hex Salem. — ^ Ibid. Sacej-dos Dei summi.
SUR l'epItRK ALX Hi^BHELX. 260
iriarche revenoil de la defaite des rois , il le benit • ; en6n
il est dit qu'Abrahain lui donna la dime de tout ce qu'il avoit
pris ^. Sur cela I'Apotre remarque d'abord que le nom de
Melcliisedech est mysterieux, et signifie rot de justice^, de
iSo , roi , et pTX , justice. II remarque que le nom merae de
la ville dont Melcliisedech eloit roi avoit aussi une signi-
fication mysterieuse, en sorte que dans I'hebreu ce nom
de roi de Salem signifie roi de paix de ZyTH , paix *. Avant
de passer aux irois autres circonstances, il insiste sur le
silence meme de I'Ecriture; et il fait remarquer que par
ce silence il se trouve que ce pretre paroit dans I'Ecriture
sans pere , sans mere , sans genealogie , et sans qu'on voie
ni le commencement ni la fin de sa vie ^ ; il ajoute qu'en
cela meme ce pr^trc est rendu semblable au Fils deDieu,
qui demeure pretre pour toujours •". Apres cela il vient a
la cinquieme et derniere circonstance , qui est la dime
payee par Abraham a Melchisedech ; il fait remarquer
combien grand devoit elre ce pretre , puisque le patriar-
che Abraham meme lui donna la dime de ses depouilles '.
Pour developper sa pensee , il compare cette dime payee
par Abraham avec celle que les pretres de la race de Levi
recevoient de leurs freres; il montre que ceux qui, etant
de la race de Levi;, entrent dans le sacerdoce , ont droit,
selon la loi , de prendre la dime du peuple , c'est-a-dire de
leurs freres , quoique ceux-cisoientsortis d' Abraham aussi
bien qu'eux ; mais que Melchisedech , qui n'a point de part
dans leur genealogie , a pris la dime d' Abraham . Si done
c'est une distinction et une prerogative pour les pretres
de la race de Levi de recevoir la dime de leurs propres
freres, combien plus pour Melchisedech de recevoir la
dime d' Abraham meme , pere de Levi ! II vient a la qua-
trieme circonstance, qui est encore plus remarquable.
Non-seulement Melchisedech a recu la dune d' Abraham ,
* y^ I. Qui obviavit Abrahcc regresso a ccede regum, et benedixit ei. —
* •f 2. Cui etdecimas omnium divisit Abraham. — ^ Ibid. Primum quidem
quiinterpretatur rex justitioe. — * Ibid. Deinde autem et rex Salem, quod
est rex pads. — * T^ 3. Sine poire, sine matre, sine genealogia, neque ini-
tium dierum, neque Jinem vitce habens. — * Jbid. Assimilatus autem Filio
X>ei (subauditur, qufj, manet sacerdos inperpetuum. L'ellipse du relatif qui
est un hebraJsme fort commun. Yoyez ce qui a el6 dit sur cela dans la Disser-
tation sur Melchisedech, torn. i*'. — ' ^^ 4- Intuemini atitem quantus sit
hie, cuiet decimas deditde proecipuis Abi-aham patriarclia. — ' ^^ 5. el&.
Et quidcm defiUis Leui sacerdotium accipientes, etc. . . . Cujus autem ge-
netxitio non anniimeratur in eis, decimas sumpsit ab Abraham.
eance.
26 n rREFACE
mais il a beni Abraham, Abraham a qui les promesses du
Seigneur etoient faites '. Or il est sans contredit que ceUil
qui recoit la benediction est inferieur a celui qui la liii
donne ^. Melchisedech est done grand et par la dime qu'il
recoit et par la benediction qu'il donne. L'Apckre revient
encore a cette dime, et il fait remarquer que dans la loi
ceuxquirecoiventladime de leurs freressontdes hommes
mortels, au lieu que celui a qui Abraham i'a payee n'est
represente dans I'Ecriture que comme vivant ^. 11 ajoute
que Levi, qui recoit la dime dans la personne de ses des-
cendans, I'a lui-meme, pour ainsi dire, payee en la per-
sonne d' Abraham , puisqu'il etoit encore dans Abraham
son aieul lorsque Melchisedech vint au-devant de ce pa-
triarche ^.
Changement Enfin il vient a la troisieme circonstance qui est la plus
Icvhiaue eUe ^^sentielle , et a laquelle se rapportent toutes les aulres ;
la loi mosai- c'est que Melchisedech etoit pretre du Dieu tres haut, et
que, fondesur encelala figure de Jesus-Christ, qui est appele pretre selon
leur insuffi- I'ordre de Melchisedech. Sur quoi I'Apotre propose une
question qui tend a montrer en meme temps 1 insuinsance
et du sacerdoce levitique et de la loi donnee par Moise. II
remarque done que ce fut sous le sacerdoce levitique que
le peuple d'Israel recut la loi des mains de Moise ; et en
supposant que ce sacerdoce cut pu commencer I'ouvrage
de la reconciliation et de la sanclification des hommes,
il demande comment il pouvoit etre necessaire qu'il s'elevat
en la personne de Jesus-Christ un autre pretre qui fut ap-
pele pretre selon I'ordre de Melchisedech , et non selon
I'ordre d' Aaron ^. Il ajoute que le sacerdoce etant change,
il faut nccessairement que la loi soit aussi changee '' :
parce que , comme il vient de le dire , c'est sous ce sa-
cerdoce que la loi a ete donnee : la loi est la condition
de I'alliance dont le sacerdoce est le fondement; ces trois
choses sont inseparables. Pour prouver le changement du
sacerdoce , TApotre fait d'abord remarquer que celui dont
* y^ 6. £t liunc qui hahebat repivmissiones henedixii. — * ^ 7 . Sine iilla
contradictione , quod minus est a meliore benedicilur. — ^ -^ 8. Ethic qui-
dem decimas morientes homines accipiunt ; ibi auiem coniestalur quia vi-
vit. — * -j?^ 9. e£ 10. £i ( ut ita dictum sit^ per Abraham et Lei/i qui decimas
accepit, decimatus est. Adhuc enim, etc. — " ^ 11. Si ergo consummalio
per sacerdotium le^ilicum erat [populus enim sub ipso legem accepit), quid
adhuc necessarium fait secundum ordinem Melchisedec alium surgere sa-
cerdotem, et non secundum ordinem Aaivn did? — * ^f 12. 2ranslat<x
enim sacerdotio, necesse est ut el Icgis translatio fiat.
SLR l'epItre aux hebreux. 267
ces choses ont ele prediles , c'est-a-dire celui qui a ele
predit et figuie dans la personne de Melchisedech , est
dune autre tribu dont nul n'a jamais servi a I'autel ,
puisqu'il est certain que notre Seigneur est sorti de la
Iribu de Juda , a laquelle Molse n'a jamais attribue le
sacerdoce *. Autre preuvc encore plus claire et plus ma-
nifeste ; c'est que ce nouveau Pretre qui s'eleve estpretre
non selon I'ordre et la ressemblance d'Aaron , mais selon
I'ordre et la ressemblance de Melchisedech ^. Autre diffe-
rence qui prouve encore le changement : c'est que le sa-
cerdoce d'Aaron est attache par la disposition raeme de
la loi a la succession charnelle des fils a leurs peres , qui
n'ont eu de droit au sacerdoce que comme les enfans de
leurs predecesseurs ; au lieu que le nouveau Prelre est
etabli dans cetle dignite en vertu de sa resurrection , et
par la puissance d'une vie rmmortelle , qui fait que, ne suc-
cedant a personne, personne aussi ne lui succede ^. Ici
I'Apotre prouve I'eternite du sacerdoce de Jesus-Christ
par le temoignage du psaume cix, ou il est die : Vousttes le
prttre eternel selon I'ordre de Melchisedech *. Puis il fait re-
marquer la cause pour laquelle cette loi d'une succession
charnelle est abolic; car ayant designe cette loi sous le
nom de loi d une ordonnance charnelle , il dit maintenant que
la precedente ordonnance , c'est-a-dire celte loi meme d'une
succession charnelle qui a precede le nouveau sacerdoce ,
a ete abolie a cause de sa foiblesse et de son inutilite ^. 11
s'explique aussitot en disant que la loi meme en general
n'a jamais rien conduit a la perfection'^ ; voila ce qu'il en-
lend par la foiblesse et I'inutilite ; et il ajoute qu'au lieu de
cette loi par elle-meme foible, et de ce sacerdoce parlui-
m^me impuissant , Dieu a substitue une mcilleure espe-
rance par laquelle nous nous approchons de Dieu , une
loi plus parfaitc, et un sacerdoce plus elTicace , qui, nous
rapprochant de Dieu par une vraie reconciliation , de-
• y 1 3. ef 1 4 • /« quo eiiim hcec diciintiir, de alia tribu est de qua nulltts
aliari prcBstofuiL Manifestum est eiii'in, eic. — --f i5. EtampUus adhuc
manifestum est; si secundum similitudinem Melchisedech exurgat alius
sacerdos. — ' y^ 16. Qui non secundum legem mandali carnalisjaclus est,
sed secundum virtutem vita insolubilis. — * -jf- 17. Contestatitr enim: Quo-
niam tu es sacerdos in aeiemum secundum ordinem Melchisedech. — * y iS.
Reprobatio quidem Jit prcecediiuis nutndati pivpter injirmilalem ejus et
inutili:aiem.~~^ -i f). Nihil enim ad petfectum adduxii lex.
268
PUEFACE
viennent pour nous le double fondement d'une meilleure
esperance *.
ExcelleDce Autre difference dont I'Apotre va conclure I'excellencc
deralliance de Talliance nouvelle : c'est que ce sacerdoce nouveau
nouvelle el de ^> „„,'»' '^ ui- o t > i » r • i
J.-C.quiea " ^ P^^ <^te etabli sans serment^. L Ap6tre fait done re-
estle media- niarquer que les autres pretres, les pretres levitiques,
leurparson ont ete etablis sans serment, au lieu que celui-ci a ete
sacerdoce. etabli avec serment' ; et il le prouve par le temoignage
pretre saint et ^^Psalmiste : Le Seigneur a jure , el ilne sen repentira pas :
immoriel. f^ous ^tes le pretre eternel selon Vordre de Melchisedech *. Et
il en conclut que TaUiance dont Jesus-Christ est le media-
teur est d'autant plus parfaite ^, parce qu'en effet le sa-
cerdoce ancien n'etoit sans serment que parce qu'ildevoit
etre aboli et I'aliiance changee ; au contraire le sacerdoce
nouveau est etabli avec le serment , parce qu'il doit etre
immuable et I'aliiance eternelle : le sacerdoce et i'aliiance
sont inseparables. Autre difference qui prouve I'excellence
du Pretre nouveau; c'est qu'au temps de I'ancienne alliance,
il y a eu successivement plusieurs pretres , parce que la
mort les empechoit de I'etre toujours ; mais comme celui-
ci demeure eternellement , il possede un sacerdoce qui est
eternel ^. II peut bien avoir des ministres ou des vicaires
qui participenta son sacerdoce, et qui en exercentlesfonc-
tions ; mais il ne peut avoir de successeur , parce qu'il vit
eternellement, et que son sacerdoce est eternel. Quelle est
done la dignite du sacerdoce de I'eglise chretienne , qui
rend un homme pretre du sacerdoce meme de Jesus-Christ,
non en le faisantsucceder a Jesus-Christ, mais en le faisant
un seul et meme pretre par lui , avec lui et en lui ! De I'im-
mortalite du Pretre nouveau et de I'eternite de son sacer-
doce, I'Apotre en tire un motif de confiance, etfait remar-
quer que ce prelre peut toujours sauver ceux qui s'appro-
chent de Dieu par son entremise, etant toujours vivant pour
interceder pour eux ^. Mais son immortalite est une preuve
* -j^ 1 9 . Introductio vero melioris spei, per quam proximamus ad Deum .
— - y^ 20. efi.1. Etcjuantum est non sine jurejuraiido. .. . intanlumme-
lioris testamenti sponsorjactus est Jesus. — ^ -^ 10. efi. i. Alii quidem sine
jureju7-ando sacerdotesjacti sunt, hie autem cum jure jurando. — * -^ ar.
Per eum qui dixit ad ilium : Juravit Dominus. — ^ ^ 7.1. In tantum me-
lioris testamenti sponsor factus est Jesus. — ^y- 23. ei 24. Et alii quidem
plures facti sunt sacerdotes, etc. Hie autem , eo quod maneat in oiter-
num, sempilernum habet sacerdotium. — ^ -^ 25. Unde etsaluarc in perpe-
tuum potest accedentes per semetipsum ad Deum , semper vivens ad inter
pellandum pro nobis {^r.pro eis).
SLR I. EPITRE AUX HEBREIX. 269
de sa sainlele , de laquelle on lire encore une difierence es-
sentielle qui le distingue ; c'est ce qui donne lieu a I'Apd-
ire de dire qu'en eflet il etoit bien convenable que nous
eussions un pontife tel que celui-ci ' : saint, etant lui-
ineme la justice el La sainlele par essence ^ ; innocent,
etant incapable de peche , etant I'innocence meme ^ ;
sans tache , incapable d'aucune souillure , ni inlerieure ,
ni ni^me exterieure , parce qu'clles ne peuvent venir que
du pecbe dont il etoit incapable , ou de rassujetissement
adeslois positives el ceremonielles auxquelles il n'etoitpas
sujel * ; separe des pecheurs par sa nature divine , qui est
la sainlele el I'innocence meme , el par son humanite
meme, loute pure el loule saiute des sa naissance, el de-
venue impassible el immortelle dans sa resurrection^ ; enfin
plus eleve que les cieux, residant dans la splendeur du
sanctuaire celeste , dans le centre de la sainlele meme ,
dans le seiu de son Pere , qui a place au plus haul des cieux
le trone de sa gioire " ; pontife cjui par cette raison n'est
point oblige comrae les aulres d'offrir lous les jours des
viclimes , premierement pour ses propres pecbes, efc en-
suite pour ceux du peuple '. II a suffi qu'il le fit une fois ,
non pour lui-meme considere en lui-meme , mais pour son
peuple qu'il represenloit el donl il avoil pris sur lui les pe-
cbes; elil Ta fallen s'offrant lui-meme*'. Ainsi la sainlele et
rimmorlalite du Prelre nouveausonl en meme temps deux
qualiles qui le dislinguenl des aulres pretres , el deux
preuves de son excellence infinie : c'est ce que I'Apolre
fait remarquer ici, en disant que cette derniere difTerence
qu'il vientde montreren Jesus-Christ et les aulres pretres
* est fondee sur ce que la loi n'elablil pour pretres que des
hommes foibles, c'csl-a-dire sujels au peche et a la mort ^,
au lieu que cette parole que Dieu prononce depuis la loi, et
qu'il confirme parle serment , etablit pour ponlife le Fils
de Dieu , qui est parfail pour toujours, saint el immorlel
de loute eternite selon sa nature divine , saint dans son hu-
manite des le premier moment de son existence , immorlel
dans son humanite depuis le moment de sa resurrection ,
' >- 26 Talis eni'm decebat ut nobis esset pono'fex . — * Ibid. Sanctus. —
' Jbiti. Imiocens. — * Ibid. Impollutus. — 'Ibid. Segfegatus a peccatoribus.
— ^ Et excelsior coelis factus. — •' ya?. Qui non habet necessiiaiem quoti-
die, quemadmodum sacerdotes, pfiuspro suis deliciis hosiias offerrc, deinde
propopuli. — ' Ibid. Hoc enim fecit semel, seipsum offerendo. — * T 28. t
ult. Lex enim homines conslititit saceidoles injirmiialem habentes."
^
a'TO PREFACE
depuis laquelle il reunit ainsi pour toujours dans son hu-
manite cesdeux perfections qu'il possede de loute elernite
selon sa divinite ^.
Excellence ^ ces deux qualites qui marquentrexcellence infiniede
, ^^cerdoce Jesus-Christ au-dessus des pretres de I'ancienne alliance ,
de J.-L., qui, ,, . ^ . n / i \ . ., .
assis dans le ^ Apotre en ajoute ennn( chap, viii ) une troisieme qui y
ciela la droite met le comble ; car , comme le remarquent :res bien saint
de son Pere, Jean Chrysostomc et Theodoret, c'est le sens de cette ex-
o redans le p^ession : Capilulam aulem super ea quae di'cunlur , ou au-
lesteunevicii- trement selon le grec, super ea quce dicta sunt ^. Ainsinon-
me celeste, seulement Jesus-Christ est un pontife saint et immoriel ;
mais de plus il est tel qu'il est assis dans le ciel a la droite
du trone de la souveraine majeste, elant le ministre du
sanctuaire celeste et du tabernacle veritable qui a ete
dresse deDieu meme et non pasde la main d'un homme^.
Mais puisqu'il s'agit ici du ciel , pourquoi parler de sanc-
tuaire et de tabernacle? c'est pour micux faire sentir que
Jesus-Christ y exerce une vraie sacrificalure. Car tout
pontife est etabli pour offrir a Dieu des dons et des victi-
mes ; c'est pourquoi il est necessaire que celui-ci ait aussi
quelque chose qu'il offre*; et le lieu ouil offre ne peutelre
niieux designe que par I'idee du tabernacle et du sanctuaire.
Ce pontife doit doncnecessairement offrir une victime, et
cette victime qu'il offre va encore prouver I'excellence de
sonsacerdoce. Car si ce qu'il doit offrir eut ete sur la terre,
si c'eut ete quelque chose de terrestre, il n'auroit pasmeme
ete prelre, puisqu'il y avoit deja sur la terre des pretres
qui offroient ces dons terrestres presents par la loi^. Ici
I'Apotre fait remarquer que le culte que ces pretres ren-
doient a Dieu dans le tabernacle terrestre n'etoit que la*
figure et I'ombre des choses celestes^; et il le prouve par
cette parole meme que Dieu dit a Moise en lui donnant ses
' ordres pour la construction du tabernacle dans le desert '' :
• -jj^ 28. et lilt. Sermo autem jurisjurandi qui post legem est, Filium in
celeriium perfeclum. — - 7^ i. KecpaXaiov 8k im toT; XE-^op-svot;. — ^-jr i. ef 2.
Talem habcmus ponlijicem qui consedit in dexiera sedis magniludinis in
coelis, sanctorum minisier; et tabernaculi z>eri quod Jixit Dominus et non
homo. — ■* y 3. Omnis enim pontifex adojferendum munera ethostias con-
stiluilur : undo necessc estethwic habere aliquid quod offer at. — ' -^ l^. Si
ergo esset super lerram , nee esset sacerdos, cum essent qui offerrent se-
cundum legem munera. — ^ ^ 5. Qui exemplari et umbrx deserviuntcoe-
lestum.- — ''Ibid. Sicut JVsponsum'esiMoysi, cum consummaret {gt. fi.£XXwv
i77t7c?.£Tv, cum consummaturus esset) tabcrnaculum.
SL R I. EPITRB AUX HEBREUX. 27 I
Ayez soin dtfaire tout selon le modcle qui vous aite montre sur
ia monlapie * : parole bien remarquable clans la bouclie de
^lolse , qui la rapporie ; encore plus remarquable dans la
bouclie de saint Paul , qui en montre le sens et I'applica-
tion: c'est la clef de toutle culte figuratif present par les
lois de Moisc. Toutes ces choses ont ete faites scion le mo-
dcle qui lui avoit ete montre sur lamontagne; etce mo-
dcle , ce sont les choses celestes raemes, dont celles-la n'e-
toient que la figure et I'ombre : Qui excmplari el umhr(B de-
serviunt cccleslium , sicut responsu7n est Afoi/si , cum consum-
maret (ou consummaturus essel) tabernaculum : Vide , inquit,
OMMA FACITO SECLJiDLM EXEMPLAR QLOD TlBl OSTENSUM EST I\
MOME. Le culte exerce par le sacerdoce levitique n'etoit
done qu'un culte terrestre et figuratif : maismaintenant le
Pontife nouveau a rcou une meilleure sacrificature ^, et le
culte qu'il rend a Dieu son Pere est pn culte celeste , qui
est la substance meme et la realitc dont I'autre n'etoit que
Tombre et la figure. Non-seulement il est le ministre du
sanctuaire celeste, niais la victime meme qu'il oftre est
toute celeste. Un pretre celeste etspirituel ne peut offrir
qu'une victime celeste el spirituelle ; et telle est la nature
humaine uuie a la personne du Yerbe en Jesus-Christ-, la-
quelle , sans rien perdre de ce qui est de I'e^sence du corps
humain et de I'ame raisonnable , est entree par la gloire
dans I'etat etdans les prerogatives des choses spirituelles,
et est devenue comme toute divine. La sacrificature de
Jesus - Christ est done infiniment au-dessus de celle d' Aa-
ron ; elle est d'autant plus excellente que Jesus-Christ est
le mediateur d'une meilleure alliance qui est etablie sur
de meilleures promesses ^. Le pretre est etabii pour etre
mediateur ; le mediateur , pour une alliance ; Talliancc
renferme des promesses , et le sacrifice en est le sceau :
aulantque ces promesses et cette alliance sont spirituelles,
celestes et eternelles , autant le sont aussi le pretre et le
sacrifice.
Ici, pour montrer auxHebreux qu'ilsnedoivent pas etre InsufBsance
surprisd'enleudre parler d'une alliance nouvelle meilleure ^^ I'ancienne
que la premiere, saint Paul ieur fait remarquer que si la ^'''^"ce'proa-
' * Tee par la pro-
',y 5. Vide, inquit, omnia facilo secundum exemplar (jucd tibioslen-
sum est ill monie. — ' y c. Nunc autem melius soititus est minisiei ium. —
•" Hid. Quando et melioris tcslameiui mediator est , quod in melioribus re-
pi-omissionibus saitcitum sit.
272 PREFACE
niesse mSme premiere alliance n'avoit rien eu de defectueux, Dieu n'au-
iiou"*^lt '^"'^^ ^^^^ P^^ pense a y en substituer une seconde ', et que ce-
pendant lui-meme, au milieu des reproches qu'il fait a
ceux qui apparlenoient a la premiere alliance , en annonce
une seconde ^. 11 cite sur cela le temoignage de Jeremie ^:
Ilviendra un temps, dit le Seigneur, auquel je fcrai une nou-
velle alliance avec la maison ct Israel et avec la maison de
Juda, non selon I' alliance que j'ai faile avec leurs peres au
jour oil je les pris par lamainpour les [aire sorlir de I'Egypte;
parce qu'ils ne sont point demeures dans cetle alliance que
j'avois/aite avec eux; et c'est pourquni je les ai meprises , dit
le Seigneur ( c'est I'expression* des Septante): mais void
V alliance que jeferai avec la maison d Israel, apres que ce
temps sera renu, dit le Seigneur: J'imprimerai mes lois dans
leur esprit, et je les ecrirai dans leur cceur; etje serai leur Dieu,
et ils seront mon peuple; el chacun d'eux n'aura plus besoin
d'enseigner son prochain et son frere, en disanl : Connaissez le
Seigneur; parce que tous me connoitront depuis le plus petit
jusqu'au plus grand; car je. leur pardonnerai leurs iniquites,
etje ne me souviendrai plus de leurs peches. II y auroit eu sur
tout cela bien des choses a dire: et il paroit que ce n'est
pas sans dessein que I'Apotre rapporte ainsi au long toute
cette proplietie. II est evident que cette prophetic re-
garde I'alliance nouvelle dont Jesus-Christ est le media-
teur, et dans laquelle sont compris les deux peuples repre-
senles dans le langage des prophetes sous le symbole des
deux maisons d'Israel et de Juda. Mais il est remarquable
' que selon^les expressions memes deJeremie cette prophetic
regarde specialement la maison d'Israel : Foici I'alliance
que je Jerai avec la maison d'Israel apres que ce temps -Id
sera venu, dit le Seigneur: c'est-a-dire que cette prophetic
regarde specialement les Juifs, que Dieu fera entrer en
participation de I'aliiance qu'ilafaite avec la maison de
Juda, c'est-a-dire avec I'Eglise de Jesus-Christ. Mais saint
Paul n'insiste ici que sur une seule chose, ou plutot sur un
seul mot; c'est que I'alliance que le prophcte annonce est
une alliance nouvelle. II fait remarquer qu'en disant cela le
prophete a faitassez connoitre que la premiere vicillissoit,
' •)?• 7. Nam si iilucl priiis culpa vacasset, non utiqiie seciinclilocus in-
quireretiir. — -^ 8. Fituperans enim eos dicit , elc — ^ -^ S.et siciq. Ecce
dies venienl , dicit Dominus, etc. — * Kafa> rfxeXy.oa auTtiv. LXX. I'^dit.
Rom. Kal s-,'w r.^j-iXxaa. aurcov. MS. Alex. Ka-j'a.
Il
sun l'e'pitre AUX H^BREUX. 2-j3
ct scroit im jour appcle I'ancienne alliance a cause de la
nouvelle qui liii auroit succede ' ; et il inonlre que cela
luemc annoncoit la fm de I'ancienne alliance, parce que,
clans I'ordre commun, lout cc qui se passe etvieillit tend
a sa fin *.
Apres avoir montre I'insufiisance de I'ancienne alliance insuffisan
par la promesse meme de I'alliance nouvelle, I'Ap^tre va del'ancien
maintenant prouver, paries ceremonies memes de I'ancien sacerdoce, et
culle, et I'insuffisancede I'ancien sacerdoce et la perfection P<^"^^'oi du
di /I . ,1 r • sacerdoce nou-
u sacerdoce nouveau (chap. ix). II commence par faire ^pj,u y.
observer que cette premiere alliance a eu des lois et des vees par les
regleraens touchant le culte de Dieu, et un sanctuaire ter- ceremonies
restre ^. II fait la description des diverses parties qui com- ™^™.^ ^^
posoient ce sanctuaire. 11 y avoit d abord un premier ta-
bernacle , ou etoierit le chandelier, la table et les pains de
proposition ; et cetie panic s'appeloit ie Saint * . Apres
le second voile etoit un second tabernacle appele Ic Saint
des saints, ou etoient un encensoir d'or, que le grand-
prelre y portoit tous les ans, et I'arche de I'alliance, toute
couverte d'or, dans laquelle etoit une urne d'or pleine de
mannc, la verge d' Aaron qui avoit fleuri, etlesdeux tables
de I'alliance (I'Apotre decritceschosescomme elles etoient
dans le tabernacle que Moise construisit dans le desert),
Au-d€ssus de I'arche, il y avoit des cherubins pleins de
gloire , qui couvroient de leurs ailes le propitiatoire ^. lei
I'Apotre s'arrete, en disant que ce n'estpas le lieu de par-
ler de toules ces clioses en deiaiP, soit pour les decrire,
soit pour les expliquer; car comme il vicnt de le dire, tout
cela n'etoit que des ombres ct des figures. II n'en a fait ici
mention que pour venira ce qu'ilvadire. Ilremarquedonc
que toutes ces choses elant ainsi disposees, les pretrcs qui
exercoient le saint ministere entroient en tout temps dans
le premier tabernacle " , mais qu'il n'y avoit que le seul
grand pontife qui entrat dans le second, qu'il n'y entroit
qu'une seule fois I'annee ^, et que quand il y entroit, ce
* y i3. elult. Dicendo autem novum, veierauit pnus . — * y i3. Quod -
auteiti antiquatur et senescit, prope interiutm est. — ^-^ i. Habuitquident
et prius j uslijicaliones cuUurce, et sanctum seculare. — * t ^. Tabema-
culum enimjlictum est pn'mum. etc. — * y 3.-5. Post velamentum autem
secundum, etc. — * -^ 5. De quibus nan est modo dicendum per singula. —
^ -j^ 6. His vero ila compositis , in priori quidem tabemaculo, semper in-
troibant sacerdotes , sacrijiciorum qfficia consummantes. — "^ In secundo
autem seme I in anno solus poiitifex.
23. i8
i>-j4 PHEF/VCE
n'etoit qu'en y portant du sang qu'il offroit pour ses peches
et pour ccux du peuple *. Et il fait observer que par-la le
Saint-Esprit moniroit que la voie du vrai sancluaire n'etoit
point encore decouverte pendant que le premier taber-
nacle subsistoit ^ : e'est ce que marquoit ce voile qui etoit
dresse devant le Saint des saints, et qui ne s'ouvroit qu'au
seul grand-pretre et une seule fois chaque arinee, pour
njontrer queJesus-Cbristseul,par son uniqueoblation, au-
roit le pouvoir d'ouvrir le ciel. L'A.p6lre fait reniarquer
que ces choses etoienl ainsi une parabole par rapport au
temps ou cela se passoit ^ , pendant lequel on offroit des
dons et des sacrifices qui ne pouvoient purifier la con-
science de ceux qui rendoient a Dieu ce culte *, puisqu'ils
ne consistoient qu'en des viandes et des breuvages, en
diverses ablutions ct en des ceremonies charnelles ^ ; et
il ajoute que tout cela n'etoit impose et ordonne que jus-
qu'au temps de la correction ^ , c'est-a-dire jusqu'au temps
ou ce culte imparfait devoit etre corrige par un culte plus
parfait. A.insi I'etat de I'ancien culte montroit que le ciel
n'etoit pas encore ouvert; et en meme temps il faisoit con-
noitre comment il seroit ouvert lorsque le temps marque
seroit venu. C'est ce que I'Apotre explique en faisant ob-
server que Jesus-Christ, qui estle pontife des biens futurs,
ayant enfin paru, est entre dans le vrai sanctuaire, mais
par un tabernacleplus grandet plus excellent, qui n'a point
ete fait par la main des hommes, c'est-a-dire qui n'a point
etc forme par la voie commune et ordinaire " ; qu'il y
est entre , non avec le sang des boucs et des veaux, mais
avec son propre sang ^ ; el qu'il y est entre une seule fois,
ayant acquis par cette unique oblation une redemption
eternelle^. Ceci lui donne lieu de faire sentir I'excellence
* -jj^ 6. Non sine sanguine quern offeri pi-o sua et populi ignorantia. —
* j} 8. Hoc signifiC(nite Spivilu Sanctn, nondum pivpalalam esse sanclo-
ruinviam, adhuc priore iabernnculo habente slaturn. — ^ f 9. Quce para-
bola esttemporis instaulis. (Gr. H rt; fcapaStXri ei; tov xatpov tov £Vc(iTV,)co'ra.
'i Ibid. Juxtaquam (y-afl' '6^ fuxta quod) inunera ethoslia; ojfernntur,
quce non possunt J uxta conscientiam perfecium faccre seivicnlem. — ' ^ 9.
et 10. Soiiimmodo in cibis et potibus, et vaJ-iis baplismalibus, et j'ust/tris
carnis. — *" l^ lo- Usque adtempus correciionis imposilis. — ' -^ r r. Chtistus
autem assislens ( gr. Trapa-ysvofj.cvo?) ponlifex futuvorum bonovum per am-
plius et perfeciius tabernaculum non manufacium, id est, non hujus crea-
tionis. — " T^ '2- Neque per sanguinem hircorum aut vitulorum, sedper
pmpriutn sanguinem. — ' Ibid. Intiviuit semel in sancta, ceterna redem-
ptione invenUt.
SUR l'ePITRE AUX HEBREUX. * 275
(Ju sang de cette victime nouvelle au-dessus du sang des
viclimes ancienncs ; cai' si le sang des boucs et. des tau-
reaux, el I'aspersion de I'eau melee avee la ccndre dune
genisse, sanetifient ceux qui ont ete souilles en leur don-
nant une purete exlerieure et cliarnelle, combien plus le
sang de Jesus-Christ, qui par le Saint-Esprit s'est offerl lui-
menie a Dieu comnie une viclime sans lache , purifiera-t-il
notre conscience des oeuvres mortes pour nous faire rendre
un vrai culte au Dieu vivant*] Nous avons passe rapide-
ment sur tout cela , parce que I'Apotre s'exprinie d'une
maniere assez claire; niais cependant lout cela merilcroit
bien d'etre approfondi. Nous remarquerons seulement ici
un enchamement admirable qui merite une attention par-
ticuliere. L'insuffisance del'ancien saceidoce consistoit en
ce qu'il ne pouvoit ouvrir le ciel; il ne pouvoit ouvrirle
ciel, parce qu'il ne pouvoit purifier les peclios; il ne pou-
voit purifier les peches, parce que le sang qu'il offroit
n'etoit que le sang des animaux. II falloit done qu'un sang
plus excellent fut offert; il falloit qu'il s'elevat un nouveau
Pretre d'un ordre plus sublime, qui par I'oblationd'un sang
plus excellent put purifier les peches et ouvrirle ciel. C'est
ce que la loi meme annoncoit; et c'est ce qui a ete accom-
pli en Jesus-Chrisl, devenu en meme temps pretre et vic-
time.
Ici I'Apotre fait observer que c'est par la reunion de ces Mediation
deux qualiles que .Tesus-Christ a merite d'etre le media- ^^ J-C fon-
teur du testament nouveau'*. Pourquoi? parce qu'il falloit ^^^-^^^ ^
que cela fut ainsi, afin que par la mort qu'il a soutferte il ex- meme temps
piat lesiniquites qui se commeitoient non-seulement avant pretre et vit-
celte premiere alliance, mais encore sous cette premiere al- V™^' ^*^'^*-'*-
liance meme, et qu'ainsi ceux qui sontappeles de Dieu pus- ^^^.^ ^^^j ^
sentelre reconcilies et recevoir I'heritage etcrnel qui leur Prix inCni de
est promis^ Mais pourquoifalloit-il que lesiniquites fussent son sang.
ainsi expiees par sa mort, et que ceux qui sont appeles de
Dieu a I'heritage celeste enlrassent en possession de cet
heritage par la mort meme du medialeur ? C'est parce
* y i3. ef i4- Si enim sanguis hircorum et taurorum , et cinis vitulce
aspersiis, inqtiinaios sanctificat ad emundaiionem carnis . quanlo ma-
gis, etc. — -fi5. Etideo luy^i lesiamenti mediator est. — ^ Ibid. Utmoite
mtercedente, in redemptionem earum prcevaricationum quae erant sub
priori lestamento, repromissionem accipiant qui vocati sunt ceternte here-
diiatis.
276 PREFACE
qu'ici le mediateur estlui-meme le testateiir. Cardansla
conduite merae ordinaire des hommes, lorsqu'il y a un
testament , il est necessaire que la mort du testaleur in-
tervienne, parce que le testament n'est affcrmi par I'exe-
ciition qu'apres la mort du tcstateur , et qu'au contraire il
demeure sans force etsans execution tant que le lestateur
vit ^. Or Jesus- Christ est lui-meme le testateur , parce
qu'il est Dieu ; et il a soufFert la mort , parce qu'il est
homme. II falloit done que le mediateur entre Dieu et les
hommes fut lui-meme Dieu et homme , et que ce media-
teur Dieu et homme mourut pour reconcilier les hommes
avec Dieu , et pour les rendre heritiers de Dieu. Pour re-
concilier les hommes avec Dieu, il falloit qu'un homme
mourut ; mais il falloit que cet homme fut Dieu, afm que
sa mort eut un prix capable de satisfaire a la justice de
Dieu. Pour rendre les hommes heritiers de Dieu , il falloit
que , s'il etoit possible , Dieu meme mourut; et Dieu , im-
mortel par sa nature , ne pouvoit souffrir la mort que dans
une nature mortelle qui lui fut si intimement unie qu'elle
ne format avec lui qu'une seule personne. 11 falloit done
que le testament nouveau fut scelle par le sang de Jesus-
Christ ; et ici I'Apotre fait remarquer que c'est pour cela
que le premier testament meme ne fut confirme qu'avec
le sang ^. Pour prouver cette circonstance, il rappelle ce
qui est ditdans I'Exode : Moise , ayant recite devant tout
le peuple toutes les ordonnances de la loi, prit du sang des
veaux et des boucs avec de I'eau , de la laine teinle en ecar-
iate et de I'hysope , et en jeta sur le livre meme et sur tout
le peuple en disant •* : C'est le sang da leslament que Dieu a
fait en votre faveur [du testament ou de V alliance, car le mot
grec §La%ySi et le mothebreunn^peuvent signifier I'un et
I'autre) ; il jeta encore du sang sur le tahernacle et sur
tous les vases qui servoient au culte de Dieu *. L' Apotre re-
marque aussi que selon la loi presque tout se purifie avec
le sang ^ , et qu'en general il n'y a point de remission sans
. 1
^ -^ 16. etl'^. Ubi eniin testamentrim est, mors necesse est mterccdat tes-^^*
taloris ; testamentum enim m mortin's confirmatuin est : alioquin nondiim
valet, duin v'lvit qui testalus est. — ^ -j^ iS. Unde nee prirnum qiiidem sine
sanguine dedicatum est. — ^ -^ 19. et-xo. Lecto enim omni maiidalo legis a
Moyse unii'erso poptilo, etc. — *y^ ar. Etiam tabernacubnn et ovinia vasa
niinisterii sanguine similiter aspersit. — * y 22. Etomniapene in sangtn'm
secundum legem mundalur.
sua l']^p1trb aux u^drbux. 377
effusion de sang ' , le peche ne pouvant ^tro cxpic que par
lesani^cruncvictime capable de salisl'aireaDieu.Le sangdc
Jesus-Christ eloit done necessaire ct pour scellcr I'alliance
et le testament de Dieu on favenr des hommes, et pour
purifier les hommes et les reconcilier avec Dieu : la lot
ni^me en rcndoit temoignage , mais par des ombres et des
figures auxquelles eloit proportionne le sang impuissant
des animaux. Ce qui donne lieu a I'Ap^lre de conclure
qu'il etoit necessaire que celui qui n'etoit que la figure des
choses celestes fut purifie par le sang des animaux , maiis
que les celestes monies le fussent par des victimes plus ex-
cellentes que n'ont ete les premieres^. Le tabernacle fi-
guralif etoit purifie par le sang des animaux ; mais il falloit
que le tabernacle celeste , qui est I'Eglise meme , ful puri-
fie par un sang excellent , par le sang d'un homme-Dieu ,
seul capable de satisfaire a Dieu pour les hommes. Car
quoique le tabernacle par lequel on enlroit dans le sanc-
tuaire represente , comme I'Apotre vient de le dire , le
corps meme de Jesus-Christ , qui est ce tabernacle excel-
lent par lequel Jesus-Christ est entre dans le sanctuaire ce-
leste, qui est le sein de son Pere ; cependant, sous un autre
point de vue, et par I'union intime m^me de Jesus-Christ
avec I'Eglise qui est son corps , il est egalement vrai dedire
que I'Eglise est elle-meme la maison de Dieu , comme I'A-
potre le dit ailleurs , sa demeure, son temple , son taber-
nacle ; et c'est ce tabernacle qui avoit besoin d'etre puri-
fie par le sang d'un homme-Dieu. Ccci ramene I'Apotre a
ce qu'il a ditdela ctiremoniede I'expialion solennelle, dans
laquelle legrand-prelre seul entroitune fois chaque anuee
dans le sanctuaire avec le sang des animaux. 11 falloit que
cetie figure fut accomplie en Jesus-Christ ; mais pour cela
il talloit qu'il put presenter un sang plus excellent, parce
qu'il devoit entrer, non dans ce sanctuaire fait de la main
des hommes, qui n'eloit que la figui'e du veritable , mais
dansle cielmeme; car c'est la qu'il est enlre, afindese pre-
senter maintenantpour noufi devaut la facede Dieu^. Mais
uneautre difference qui distingue encore excellemmenl la
r 22. Et sine sanguinis ejjfusione non Jit remissio. — - f 23. Necesse
est ergo cxempiaria quidem coelestium his mundari ; ipsa autem coeleslia
melioribus hosiiis quaniprimis. —^ ■^ 24. Non eniin in manufacta sancta
Jesus miimi^^ii , exeniplaiia veivi-um, sed in iijstim ccehwi , lU appaieal
nunc titUuiDei piv nobis.
278 PREFACE
\erite d'avec la figure , el qui inontre bien encore le prix du
sang de Jesus-Christ, e'estque Jesus-Christ eLant entre dans
le ciel,cen'est point pour yfaireune oblation qu'ilsoitobli-
ge de reiterer plusieursfois, en s'offrant plusieurs fois hii-
raeme, comme legrand-pretre entroit chaque anneedans le
sancluaireavec unsangetranger ^ ; autrementil auroitfallu
qu'il eut souffert plusieurs fois la mort depui? la creation
du nionde, au lieu qu'il n'a paru qu'une fois dans la con-
sommation des siecles , pour abolir le peche en s'offrant
lui-memepour victinie^; et c'etoit ce qui marquoit I'obla-
tion meme du grand-pretre , qui , quoique reiteree lous les
ans , etoit cependant unique dans chaque annee : c'etoit
I'annonce reiteree d'une oblation qui devoitetre unique;
unique toutefois par sa nature , niais perpetuelle dans sa
duree. Jesus-Christ ne devoit mourir qu'une fois; et il ne
pouvoit entrer qu'une fois dans le ciel pour y presenter son
sang , parce que sa mort et son sang etant d'un prix infini ,
nous ont acquis une redemption eternelle. Mais I'oblation
que Jesus-Christ a faite de son sacrifice, il I'a conimencee
des le premier moment de sa vie , ct la continuera dans
le ciel et sur la terre jusqu'a la fin des siecles. C'est un sa-
crifice d'expiationet d'impetration qu'il continuera d'offrir
jusqu'a I'entiere consommation du mystere de Dieu , qui
est la sanctification et la glorification des elus ; c'est un
sacrifice d'adoration etd'actionde graces, qu'il continuera
d'offrir eternellement avecleselus. L'uniquemort deJesus-
Christ donne lieu a I'Apotre de faire remarquer le rapport
et la difference qui se trouvent a cetegard entre les hora-
mes et Jesus-Christ. Comme il est arrete que les hommes
meurent une fois, et qu'apres cela ilssoient juges, ainsi Je-
sus-Christ a ete offert une fois sur la croix pour porter et
expier les peches de plusieurs ; et apres cela il paroitra
une seconde fois sans avoir plus rien du peche, pour le sa-
lut de ceux qui I'attendent ^. Les hommes meurent pour
etre ensuite juges; Jesus-Christ est mort, mais pour juger
' y- 25. Neque ut scepe ojjferat semetipsum , quemadmodum pontifex in-
tvnt ill Sanctn !>er siiii^ulos annos in sanguine alieno. — ^-^ 26. Alioquin
opoHehal earn frequenter pad ab origine mundi: nunc autem semel in con-
summalione seculorum addestilutioneni peccaliper hostiam suam apparuit.
— 3-^27. ad Jin. Et quemadmodum statutum est hominibus semel mori,
post hoc autem judicium : sic et Christus semel oblatus est ad muborum eoc
hauriendn {i'/c'/t'^fi^) peccatn ; secundo sine peccato upparebil expectanti-
bus sc in scluiem.
Sl!R l'epItRE AUX HKBRELX. 279
ensuiie les homraes. Ou plul6t I'Ap^tre ne considerant ici
que ce que Jesus-Christ fait pour les elus, il so contente
de dire que quand il paroitra pour la seconde lois , ce sera
pour le salut de ceux qui latiendent. Et ici, par un seul
mot , I'Apolre nous montre quel estle caraclere dun vrai
chretien , le caractere dun elu : c'est un homme qui se re-
gardant comme elranger dans ce monde, "vit dans le desir
et dans I'attente du siecle a venir et de ravenement glo-
rieux de Jesus-Christ.
L'Apotre revient ici a ce qu'il a dit de la reiteration de Insuffisance
I'oblation qui se faisoil au jour de rexpialion soleunellc , J„ai'« "j^ur
dans laquelle le grand-prelre renouveloit chaque annee la ai^iition. Ef-
confession de toules les iniquiles, de toules les prevarica- ficaciie du
tions, el de tous les peches des enfans disrael' , c'esl-a- sacrifice de
dire, non-seuleinent des peches qui avoient ete cominis " •
depuis I'annee precedente, raais de tous ceux qui avoient
ete commii par ce peuple depuis qu'il exisloit; et de cette
reiteratio^ de la meme oblation pour les memes peches,
il en cone ut I'insuffisance des victinies legales ( chap, x ).
Et d'abor J il remarque que la loi n'avoit que I'ombre des
Liens fut rs , et non I'iniage meme des choses^. Les ex-
pression* dont se sert ici I'Apolre paroissenl fondees sur
une simi ilude prise de lapeinlure, ou il y a une grande
difieren</e entre I'ombre et I'esquisse d'un portrait ou
dune image , el le portrait ou I'image : mais comme il y a
encore de la difference entre I'image el la verile , quelques
peres et quelques interpretes pensent que I'Apolre distin-
gue ici trois choses : I'ombre des biens fulurs , I'image des
choses , et les choses memes ou les biens fulurs. C'est ce
que saint Ambroise explique en disant : « C'est a la per-
« fection et a la verite cles mysteres que nous devons aspi-
« rer. Ici-bas se Irouve I'ombre , ici-has se trouve I'image ;
« mais c'est la-haul que se trouve la verite. L'ombre est
« dans la loi , I'image dans I'Evangile , la verile dans le ciel.
« Ilia nobis expetenda sunt, in quibus perfeclio , in quibus ve-
il ritas est. Hie umbra , hie imago , Ulic Veritas. Umbra in
o lege, imago in Evangelic, Veritas in calestibus. On sacri-
o 6oit auireiois des veaux et des agneaux ; voila I'ombre :
« maintenant on offre Jesus-Christ meme, mais on I'offre
u ici-bas sous une image, sous un voile sensible ; aulieu que
• Levit. XVI. ai . — - f i . Umbrani cnim habetis exfuturum boiiorum,
non ipsam imaginem rer urn.
28o TREFACE
« dans le ciel il est oltcrt sans voilo et sans image , dans la
« verite toute pure : u4nte ag7ius ojferebatur clvilnlas: nunc
« Chrislus offerlar..,. hie in imagine, ibi in verilaU^ . » La
loi n'avoit que Tombre des biens futurs , sans en avoir la
la realite : sous I'Evangile, nous avons la realitc, mais
couvcrte sous une image : dans le ciel, nous aurons la rea-
lite seule sans ombre etsans image. Voila done, ce semble,
ce que dit rAp6tre : La loi n'avoit que I'ombre des biens
futurs , et non I'image des choses , ou les choses memes
couvertes sous des images. II ajoute que la loi, n'ayant
ainsi que des ombres, ne pouvoit jamais par I'oblation
des memes hosties, c'est-a-dirc d'hosties toujours sem-
biables qui s'offroient perpetuellement chaque annee
dans ce grand jour d'expiation, ne pouvoit jamais rendre
justes etparfaits ceux qui s'approchoient de Dieu, n'ayant
a iui presenter que ces viclimes impuissanies*. II re-
marque que si ces victimes eussent ete suffisantes , et
qu'elles eussent opere I'expiation et la justification de ceux
pour qui on les oftroit, on auroit cesse de les offrir, parce
que ceux qui Iui rendoient ce culte n'auroient plus senti
leur conscience chargee de peches , en ayant ete une fois
purifies'. Si le peuple eihtete une fois purifie par une ex-
piation generale, il n'auroit plus ete necessaire de reiterer
cette expiation; et si quelques particuliers fussent apres
cela retombes dans le peche , ceux-la seuls auraient eu be-
«oin d'une expiation particuliere. Mais I'expiation generale
se reiteroit toutes les annees; toutes les annees on y re-
nouveloit la memoire de toutes les iniquites d'Israel , et on
en chargeoitles victimes que Ton offroif* : pourquoi cette
perpetuelle reiteration ? parce qu'il etoit impossible que
le sang des animaux, teis que des boucs et des taureaux,
otat et expiat les peches^. Ainsi I'Apotre prouve ici d'a-
bord I'insuffisance des victimes legales par la reiteration
perpetuelle de cette meme oblation pour les memes pe-
ches. De leur insulfisance vientleur abolition : leur aboli-
tion va former ainsi une nouvelle preuve de leur insuffi-
* Amhr. Offie. I. r. c. 48. — 2^ r. Umhram enim habenslex, etc
per singulos annos ekdern ipsis hosti'is r/nas offerunt iiidesinenter, nuin-
quain pulesi accedeiiics perjectas faceiv . — ^ >'^ 2. AUoquiii cessasseiit of-
ferri -. idea fjuod nullam hahercnt ultra conscienliam peccali, cultores se-
mel inundaa. — * -j^ 3. Sed in ipsis comineinovalio peccatorurn per singu-
los annos Jit. — ' ^ 4. Irnpossibile enim est sanguine tautvrum et hircoriim
iti'Jerri peccata.
SUR L'EptTltB ACX HEBREUX. 28 I
sance , ct cctlc abolition va etre prouvee par le lemoignage
lie Jesus-Christ inoine, s'exprimant par la bouche du Psal-
iniste dans le psainne xxxix. Ce psaume est done la voix de
Jesus-Christ. L'Ap6tre en est si assure, qu'il fonde sur cela
sapreuvc; et d'ailleurs ii est assez evident que les expres-
sions qu'il va rapporter ne peuvent en effet convenir qu'a
Jesus-Christ. Ce psaume est compose de deux parties prin-
cipales : il commence par une action dc graces, et il finit
par-une priere tres instante; dans I'une et dans I'autre,
c'est Jesus-Christ qui parle. D'abord il rend grace a son
Pere du secours qu'il a recu de lui dans les jours de ses
humiliations et de ses souffrances, dont il est sorti plein
dc gloire par sa resurrection ; ensuite il presenle a son
Pere les maux extremes qu'il souffre encore dans ses mem-
bres, et il sollicite pour eux son secours. C'est au milieu
de son action de graces que , renouvelant le souvenir des
merveilles de Dieu son Pere, il rappelle ce qu'il a dit lui-
meme a son Pere en entrant dans le monde , comme le
reraarque I'Ap^tre, qui tire de la sa preuve^ Voici done
ce que dit Jesus-Christ par la bouche du Psalmiste : F'ous
n'avez point voulu d'hoslie ni d' oblation; mais vous m'avez
fonnc an corps : vous n'avez point agree les holocausles ni les
sacrifices pour le peche ; alors j'ai dit ( c'est ceci que Jesus-
Christ dit, entrant dans le monde ) Me voici ;jeviens, scion
qu'il est ecritde moi dans le livre , pour Jaire , d Dieu, voire
volonlc. Sur quoi voici le raisonnement de I'Apotre : Jesus-
Christ commence par dire : Vous n'avez point voulu cthoslie
nid oblation ; et vous n'avez point ag-ree les holocaustes ni les
sacrifices pour le peche , qui sont toutes choses qui s'oflrent
selon la loi^. Ensuite il ajoute : Alors j' ai dit : Me voici , je
viens pour faire , 6 Dieu, voire volonte^ . Done par ces paroles
memes il montre qu'il ote et abolit ces premiers sacrifices
pour etablir le second*. lei I'Apdtre lait remarquer une
autre consequence qui resulie encore de ces memes pa-
roles; c'est que c'est la volonte dc Dieu qui nous a sancti-
fies par I'oblation du corps de Jesus-Christ qui a ete faite
ime fois par une immolation sanglaute^. La volonle de
* y- 5. etseqq. Ideo ingrediens mundum dicil : Hostiam, et oblaU'onem,
noLii'sO, etc. — * ^ 8. Superius diceiis : Quia hostias, el oblationes, etc. . . .
ifute secundum legem nj/eruntui: — ' ^ 9. 7'uiic di'xi (gr. shr^i-t, dixit) ;
Ecce vcnio, etc. — * Jl>id. AufcH pi-imum ut scf/ueiu statuat. — "^ 10. In
ijua txiluntate sancli/iccui sumus , per oblalionem ccrjjcrii Jesu Chrisli
sumcL.
282 PREFACE
Dieu est la source de notre sanctificalion , et le sacrifice de
son Fils en est le moyen. Ceci donne lieu a rAp6tre de
comparer I'impuissance de toutes les viclimes legaies avec
reffieacite de 1' unique vie time offerte par Jesus-Christ.
Tous les pretres qui exercent le sacerdoce levitique se pre-
sentent tousles jours a Dieu, sacrifiant et offrant plusieurs
fois les memes hoslies qui ne *peuvent jamais 6ter les pe-
ches ^ : mais celui-ci, d'un ordre tout different, n'a ofl'ert
qu'une seule victime pour les peches ; et apres cela il est
assis pour toujours a la droile de Dieu , ayant obtenu notre
redemption et noire sanctificalion, el n'ayautplas rien a
attendre que Taccomplissement de la promesse que Dieu
son Pere lui a faite, en lui disant alors : yisseyez-vous d
ma droile jusqu'd ce que je reduise vos ennemis d vous servir
de marc/iepied^. Car par cetle unique oblation de son
corps qu'il a immole sur la croix, il a consomme et rendu
parfaits pour toujours ceux qu'il a sanctifies par cette obla-
tion meme^. Par cette unique oblation , il a merite toutes
les graces necessaires pour notre sanctificalion, Et pour
monlrer qu'en effet ceile unique oblation a pleinement
expie nos peches, I'Apotre rappelle la prophetic de Jere-
mie qu'il a deja citee, touchant I'alliance nouvelle : et il
fait voir que dans cette prophetic meme I'Esprit-Saint ,
qui parlait par la bouche du prophele , rend lui-meme le-
moignage a Tefficacite de cetle unique oblation*. 11 fait
done remarquer qu'apres avoir dit : Void I'alliance que je
Jeraiavec eux apres que ce temps-Id sera venu ,dil le Seigneur ;
f imprimerai mes lois dans leur cceur, et je les ecrirai dans leur
esprit ^1, le Seigneur ajoute : Etje ne me souviendrai plus de
leur s peches ni de leurs iniquites^. II y aura done alors une
entiere remission des peches et des iniquiles de ceux qui
auront part a cette alliance; et lorsqu'il y a une entiere
remission, il n'est plus besoin d'une nouvelle oblation
pour les peches''. II resulte done de cetle prophetic meme
^ ■^ 11. Et omnis quidem sacerdos prceslo estquotidie miiiislrans, et eas-
dem scepc offerens hosti'as quce numquam possiiiit aiiferre peccala. —
* y^ 12. et i3. Hie autem itnam pro peccatis ojjferens hosliam, in sempiler-
num sedetin dextera Dei, de cetera expectans donee ponantiir inimicicjus
scabellum pedum ejus. — ^ y- i4. Una enim oblatione consummavit in sem-
pilernum sanctifieatos. — * ^ i5. Contestatur autem nos et Spirilus Sanetus.
—^ ^ iS. et 16. Postquam enim dixit : Hoc autem testamenlum quodies-
tabor ad illos post dies illos,dicitDominus , etc. — * ^ 17. Etpeccalorum
et iniquitatum eorum jam non recordabor amplius. — 't^ 18. Ubi autem
Jiorum remissio, jam non est ablatio ptv peccato.
SLR U KPITRK AUX HEBRELX.
l83
que I'alUance nouvelle devoit etre scellee par le sang d'une
victime dorit I'unique oblation devoit suffire pour effacer
les iniquitcs qui jamais ne pouvoient etre effacees par au-
cunc des victimes que la loi prescrivoit.
Apresavoir ainsifaitconnoilre rexcelleiicedu sacerdoce L'Ap6treex-
et du sacrifice de Jesus-Christ, l' Apotre va mainlenantras- ^°^^^ les He-
sembler Ics consequences qui en resultent; c'est ce qu'il pr^^erde^
va faire par une exhortation vivc et tendre, mais en meme Dieuaveccon-
temps pleine de force. 11 represente aux Hebreux que par fiance, a de-
la vertudu sangdeJesus-Christilsont maintenantia liberie meurerfer-
,,,, " « -^. 1''. mesuansla
de s elever avec contiance vers Dieu, et de penetrer par ^^j ^ s'entre-
I'esprit de la foi jusque dans le sanctuaire celeste, en sui- eshorter
vant cette voie nouvelle et vivante que Jesus-Christ leur muiuelle-
a lui-meme tracee par I'ouverture du voile qui est sa pro- ™^"'- ^' '"
pre chair brisee et dechiree sur la croix'. II ajoute q"^ doubfe motif
par I'excellence du sacerdoce de Jesus-Cbrist ils ont I'a-desmaux
vantage d'avoir en lui un pontife qui est infiniment plus qu'ils au-
grand et plus eleve que les auires, et qui est etabli avec "^'eni a
• ^ •' ...1 ■ iT-w- 1 craindresils
une souveraine autoriie sur toute la maison de Dieu, dans . -
iaquelle les autres n eloient que des serviteurs^. Amsi le roieotpas, et
prix du sang de Jesus-Christ et rexcellence de son sacer- des biens
doce sont le double fondement de I'exhortation qu'il va 1" '.'^ °"*.^
leur adresser, et qui se reduit a trois points. Premierement, *^*^^I,ln|
il les exhorte a s'approcher deDieu, mais a s'en approcher
avec un coeur sincere, et avec une pleine foi, comme ayant
recu dans le bapteme une double purification, dont I'une
est le symbole de I'autre, leurs coeurs ayant ete interieure-
ment purifies des souillures dela mauvaise conscience, tan-
dis que leurs corps etoient exterieurement laves dans une
eau pure"*. Secondement, il les exhorte a demeurer ferraes
et iuebranlables dans la profession qu'ils ont faite d'esperer
les biens proniis* ; et sur cela il ajoute un nouveau motif:
c'est la fidelite de celui qui a prorais ces biens^. Troisieme-
ment, il les exhorte a se considerer les uns les autres, afin
de s'entr'exciter a la charite et aux bonnes oeuvres par le
* y 19. ef ao. Habentes itaque^fratres, fiduciam in introitu (eicTTr» ewo-
•Jcv, in introitum) sanctorum : quam iniliavit nobis viam (id est, inviam
(fitam iniiiavit nobis) ncam el viventem per velamen, id est, carnem suam.
— * i- m.Et sacerdotem magnum super domumDei. — ' f 7.1. Ecce damus
cunt veto corde in plenitudine Jidei, aspersi corda a conscientia mala , et
abluli corpus atjua munda. — *y 2 3. Teneamus spei nostrce confessionem
indeclinabilem . — * Ibid. Fidelis enim esttfui repromisii.
284 PREFACE
bon exemple * ; a ne point se retirer de rassemblee des fi-
dcles, comme quelques-uns avoient coutume de faire ^,
mais a s'entr'exhorter les uns les autres ', ct a le faire avec
d'autant plus de zele qu'ils voient approcher davantage le
jour"*; il veut dire le jour ou ils doivent etre juegs par
Jesus-Christ; mais il n'acheve pas, et il s'interrompt lui-
meme pour insister vivement sur ce motif. II leur repre-
sente done que si apices avoir re9U la connoissance de la
vcrite ils pechent volontairement, en abandonnant vo-
lontairement la foi , et renonQant volontairement a Jesus-
Christ , il ne leur reste plus d'hostie pour Ic peche ^ ; car
les premieres etant abolies a cause de leur impuissance ,
s'ilsrejettent encore la nouvelle qui est Jesus-Christ meme,
seule victime dont le sang soit efficace , il est evident qu'il
lie leur en restera plus d'autre. Et par consequent tandis
qu'ils persevereront dans cette funeste apostasie, il ne
leur restera que I'attente terrible du jugement, et I'ar-
deur du feu qui doit eternellement devorer les ennemis
de Dieu, au nombre desquels ils se seroient volontaire-
ment remis *^. 11 leur represente ce qu'ils savoient si bien
cux-memes , que celui qui a viole la loi de Moise est con-
damne a mort sans aucune misericorde sur la deposition
de deux ou trois temoins '' ; et il leur demande combien
plus doit etre grand le supplice que merite celui qui par
une apostasie volontaire commet trois crimes horribles * ;
c'est-a-dirc qui foule axix pieds le Fils de Dieu , en se reu-
nissant a ceux qui I'ont traite avec ignominie ^; qui regarde
comme une chose vile et profane le sang precieux de I'al-
liance nouvelle , par le merite et I'application duquel il a
etc sanctifie *"; enfin qui fait outrage a I'esprit de la grace,
qui avoit ete repandu sur lui et en lui, et qu'il chasse de
son coeur ^^ Afin qu'ils pussent mieux en juger, il leur rap-
' -jj^ 24. Et consideremus invicem in piv^'ocalionem chafitalis et bonoruin
operum. — ^y- iS.Non desereiites colleclioiiem nostram, siciit consuetudiiiis
estffuibusdam. — ^ Ibid. Sed consolanles (wapaxiaXouvTe;). — * Ibid. Et tanlo
tnagis quanta videritis apptvpinquaiitem diem. — * "jJ^ 26. f^oluntarie enint
peccantibus nobis post acceptam notitiam vejilatis, jam non r-elinqiiilur
pro peccatis hoslia. — ^-jf-ay. Terribilis aiiiem quadam expectatio judicii,
et ignis cemulalio qux constimplura estadi>ersarios. — ^ y 28. Irriiam quis
faciens legem Moysi, sine iilla miseratione duobus vel tribus testibus mo-
ritiir. — ^ -^ 29. QuaiUo magis putatis deteriora mereri siipplicia , etc. ■ —
' Ibid. Qui Filium Dei conculca^'erit. — *° Ibid. Et sanguiucm testamenii
polluium duxerii , in quo sanctijicalus est. — " Ibid. Et spin'tui gratice
contumeliam feccrit.
I
SUR L EPITRE AL'X HEBREDX. 280
pelle ce que Dieu meine dit dans un cantique qui dcvoit
lour t^tre bien connu ; c'cst le £;rand cantique que MoTsc
])ronon9a avantsa mort, dans Icquel le Seigneur dit par
sa bouche : Oest d moi qii apparlienl la vengeance ^ ct c'est
moi qui hi rendrai^ ; et presque aussitot Moise ajoute : Lc
Scipienr jngera son peuple '^. Sur quoi I'Apotre remarque
que c'est une chose terrible, que de tomber entre les
mains du Dieu vivant ^ . lis doivent done craindre de s'ex-
poser aux supplices terribles que meriteroit leur apostasie;
niais ils doivent craindre aussi de perdre la recompense
qu'ils ont merilee par les travaux de leur foi : autre motif
sur lequel I'Apotre va insister. 11 les exhorte done a se
rappeler le souvenir de ce premier temps , auquel , apres
avoir ele eclaires par le don de la foi , ils ont soutenu dc si
grands combats dans les afflictions qu'ils onteu a souflrir'*.
II en distingue de deux sortes : les unes qn'ils ont souffertes
dans leurs propres personnes, ayant etc eux-memes ex-
poses devant tout le monde aux injures et aux mauvais
traitemens ^ ; les aulres qu'ils ont souffertes dans la per-
sonne de leurs freres, ayant pris part a I'etat de ceux qui
ontsouffert de semblables indignites, et particulierement
aux liens de I'Apotre meme*^. Non-seulcment ils ont souf-
fert de mauvais traitemens , mais ils ont vu meme piller
lous leurs biens, et ils I'ont vu avec joie , sachant qu'ils
avoient dans le ciel d'autres biens plus excellens , et qui
ne periront jamais '' . Ici I'Apotre les exhorte a ne pas
perdre cette confiance , c'est-a dire, selon le grec, ce cou-
rage qui doit recevoir un jour une si grande recompense ^.
II leur represente que dans la disposition ou ils sont , la
patience est presque la seule chose qui leur soil necessaire
pour obtenir , par une perseverante fidelite dans I'accom-
plissement de la volonte de Dieu , la possession des biens
•ySo. Scimus em'm tjui dixit : Mihi vindicta, et ego relribuam. —
• Ibid. Et iterum : Quia judicabit Dominiis populiim suiim. — ' ^ 3 1 . Hor.
rendum est indiderc in manus Dei viventis. — * y 32. Rememoramini
aiitem prislinos dies in qiiibim illuminati niagtutm certamen sustiniiistis
passionem. — * ^ 3i. Et in altera qnideni cpprobrlis ettribiilationibiis spec-
tacidunifacti. — ^-^ 33. et 34. In altera auiem socii taliter conversantium
effecti. Nam et vinctis ( tcI? ^eoaol; acu, linculis meis) compnssi estis. —
^ y 34 . Et rapinam bonorum vesfrorun cum gaudio snscepistis , cognos-
centes vos habere meliorvm etmanenlem substantiam. Le grec ajoute : m
ccelis. — 'y 35. Nolite itaque amitlere confidcntiam (wapprmav) lestrani,
quce magnam habetremunerationem.
286 PREFACE
qui leur sont promis '. Pourquoi? parce qu'ayanl deja la
foi, il ne leur reste plus que d'attendre encore un peu de
temps pour reccvoir les biens qu'ils esperent ; en sorte que
la patience , conservant et soutenant leur foi , leur fera
acquerir dans peu le salut eternel. Encore un peu de
temps , el celui qui doit venir viendra, el ne lardcra poinl ^. II
est evident que I'Apolre a ici en vue la proplietie d'Ha-
bacuc ^, qui dans un premier sens regarde Ic premier ave-
nement de Jesus-Christ, lorsque ce Dieu Sauveur est venu,
dans rinfirmitq de sa chair, sauver son pcuple par I'effu-
sion meme de son sang : mais les expressions du prophete
regardent plus particulierement encore le dernier avene-
ment de Jesus-Christ, lorsque ce Dieu Sauveur viendra
dans Teclat de sa majeste consommer I'entiere delivrance
de ses elus a la fin des siecles. C'cst de eel avenement
meme que Jesus-Christ parloit a ses disciples, lorsqu'aprcs
leur avoir dit * : Encore un peu de temps , el vons ne me verrei
plus,.... parce queje nrCen vais a mon Pcre , il ajouloit : En-
core un peu de temps . et vous me ver'rez,.. . et voire cceur se re-
jouira , el personne ne vous ravira voire joie. Voila done aussi
ce que dit I'Apotre : Encore unpeu de temps, et celui qui doit
venir viendra. Mais d'ailleurs cet avenement de gloire est
precede dun avenement de misericorde pour chacun des
elus a I'heure de la mort; en sorle que, soit a I'egard de
labrievete de la vie, soit a I'egarddela rapidite des siecles,
il est egalement vrai de dire qu'il n'y a tou jours qu'un peu
de temps a attendre. L'Apotre continue d'employer les
expressions du prophete : Le juste qui m'apparticnt vivra
de la foi; mais s'il se retire, il ne me sera pas agr cable ^. C'est
ce que ditle Seigneur par la bouche du prophete dans le
rneme endroit. L'Apotre change seulement I'ordre des ex-
pressions , en metlant pour premiere phrase celle qui est
la secondc dans le texte du prophete qu'il rapporte selon
la version des Septanle ^\ et insistant sur cela , il leur te-
moigne qu'il a cette confiance que ni lui ni eux ne sont du
* y- 3fi. Patienlia eniin vobis necessaria est, ut, volunlaiem Dei facien-
tes, I'epoHetis pi-omissionem . — * -f 37- Adliuc cn/'m modicum ah'quantulum,
quiventiirus est veniet, etnon tardabil. — ^ Hab. u. 3. Semens veniet, et
non taidabit.Sepl. Epx^"-''''? X^^i, Jtai cu, ari 7__pcvt(Tri . L'Apotre dit : O £p7,c-
|i.evo? r.^3t, /-al ou x^c\'.'J.. — * Joan. xvi. i6. 22. — "f 38. Justus autem
meusexfidevivit{%v.X,%oz-x\,vivet): quod si subtraxerit se, nonplncebit
animce mece. — * Hab. ir. 4. :feav uTroaTEi'Xy.Tat , my. eutJcjceT ii ifiyr, u.cj tv
SI R I. EPITUE \UX HEBRF.l X. 2^7
nombrc de ceux qui en se relirant de Dieu s'exposent a
perir pour toujours , mais qu'ils sont plutot du nombre de
cpux qui vivant de la foi, acquierent, par la foi et par la pa-
tience , le saint de leurs anies '.
De la I'Apdtre prend occasion de relever lexcellence et Dofinitlon
les avantages de la foi ( chap, xi ). II commence par la de- excellente,
finir, en disant que c'est I'cxistence anticipee des choses ^^aD'as^'s «'
It -.^ii' •.• lu • modeles de la
que 1 on espere , et la plenie conviction des choses qu on f^j
ne votl pas^. Ensuite , pour prouver I'excellence de celte
vertu, il fait remarquer aux Hebrcux que c'est par c\fe
que tous les anciens jnstcs qui les ont precedes ont me-
rite de recevoir un tcinoignage avantageux^. II remonte
jusqu'au commencement dec- siecles , et il fait remarquer
que c'est par la foi que les hommes ont connu , ce que les
Hebreux reconnoissent eu\-memes, que le monde aete
fait par la parole de Dieu*; que c'est par la foi qu'Abel
offrit ime victime plus excellente que celle de Cai'n^;
(|ue c'est par la foi qu'Henoch merita d'etre enleve du
monde sans mourir*^; que c'est par la foi que Noe prit
la resolution de construire I'arche selon I'ordre du Sei-
gneur, et devint heritier de la justice qui nait de la foi" ;
que c'est par la foi qu' Abraham obeit a Dieu en sortant
de son pavs^; que c'est par la foi que ce patriarche de-
meura dans la terre qui lui avait etc promise , comme
dans une terre etrangere, habitant sous des tentes avec
Isaac et Jacob, qui devoient etre heritiers de cette pro-
messe avec lui^ ; que c'est par la foi que Sara ctant ste-
rile recut la vertu de concevoir, et eut un fils lorsqu'elle
n'eioit plus en age d'en avoir'"; que c'est aussi dans
celte disposition de foi que tous ces saints patriarches sont
morts, n'ayant point recu les biens que Dieu leur avoit
promis, mais les vovant et comme les saluanl de loin , et
confessant qu'ils etoient etrangers et voyageurs sur la
terre". Ici I'Apotre s'arrete pour faire sentir que ce Ian-
gage prouvoit assez la foi de ces saints patriarches; puisque
s'ils eussent regarde comme leur patrie celles qu'il avoient
' y 39. et uU. Nos atttem non sumus siibtractionisjilii inperditionem,
sed fidei in acquishionem aniitKe. — ' >'• ' . Est autemjides, etc. — •^ -^ 1. In
hac e .im, elc. — *!?• 3. Fide iiUelli^imus , etc. — * 1^ 4- Fide pluriniam
hostiam Abel, etc. — * -^ 5. rt 6. Fidie Henoch, etc. — ^ f 7 . Fide Noe, etc. —
' y^ 8. Fide quivocatur Abnihamobedi^it,etc.-^^-js^. et lo. Fidedemora-
tus est, etc. — '° y^ 1 1 . e/ 1 2. Fide et ipsa Sara, etc. — ' * -f 1 3 . Juxtajidem
defuncii sunt omiies isii, etc.
288 PREFACE
qulttee, iis pouvoient y rctourner ; et^ n'y retoumant point
i!s montroient assez que celle qu'ils cherchoient etoit cette
patrie celeste que Dieu Icur avoit preparee, et qu'ils ne
connoissoient que par la foi^ L'Apotrc reprend le de-
nomhrement de ceux en qui la foi a parliculicrement
oclate ; et revenant a Abraham qui est le pere des croyans,
il fait remarquer que c'est par la foi qu' Abraham oft'rit a
Dieu son fils Isaac sur qui reposoient ies promesses ■' ;
que c'est par la foi qu'Isaac donna a ses deux fils Jacob et
Esati une benediction qui regardoit I'avenir^; que c'est
par la foi que Jacob mourant benit aussi chacun des enfans
de Joseph*; que c'est par la foi que Joseph aussi mou-
rant parla do la sortie des enfans d' Israel hors de I'E-
gypte^; que c'est par la foi que le pere et la mere de
Moise le linrent cache a sa naissance, n'apprehendant
point I'edit de Pharaon^; que c'est par la foi que Moise
devenu grand renonca a la qualite de fils de la fdle de
Pharaon , preferant des lors de participer aux ignominies
futures du Christ promis' ; que c'est par la foi qu'il quitta
i'Egypte a la tete des enfans d'lsrael , sans craindre la fu-
reur du roi ^ ; que c'est par la foi qu'il celebra la Paque , et
qu'il fit i'aspersion du sang de I'agneau^; que c'est par la
foi que Ies Israelites passerent au travers de la mer Rouge'^;
que c'est par la foi que Ies murs de Jericho tomberent** ;
que c'est par la foi que Rahab merita de n'etre point enve-
loppe dans la ruine des incredules^^; qu'enfin le temps lui
manqueroit s'il vouloit parler de Gedeon, de Barac , de
Samson , de Jephthe , de David , de Samuel et des prophe-
tes , qui par la foi ont conquis Ies royaumes, opere la jus-
tice , acquis Ies promesses , ferme la gueule des lions ,
eteint la violence du feu , evite le tranchant des epees ,
etc. '^. L'Apotre termine ce denombrement en faisant re-
marquer que toutes ces personnes, a qui I'Ecriture rend
un temoignage si avantageux a cause de leur foi, n'ont
point rc9u sous Fancienne alHance la recompense qui leur
» -j^ 1 4 .- 1 6 . Qui enim hcec dicunt, etc. — ^fi'i.-ig. Fide obtulit Abra-
ham Isaac, etc. ■ — ^"i 20. Fide et defutiiris benedixit Isaac, etc. — * if 2 1 .
Fide Jacob moriens, etc. — * -j^ 22. Fide Joseph moriens, etc. — ® -jf- aS. Fide
Morses natus, etc. — ^ -^ 24.-26. Fide Moyses grandis, etc. — '7?^ 27. Fide
felinuit ^gfptum, etc. — ^ 7^28. Fide celebravit Pascha, etc. — '"y^ 29. Fide
transiernnt mare Ilubrum, ^tc. — ** ^ 3o. Fide muri Jericho, etc. — ^' -^ 3 1 .
Fideliahab meretrix, etc. — '^ ^ 32.-38. Etquid adhuc dicam ? Dejicict
me tempus, etc.
SLR L'EPitREAtX HEBREUX. 289
rioit promise , Dieu ayant voulu, par unc faveur particu-
liere qu'il nous a I'aitc , qu'ils ne recussent qu'avec nous
I'accomplissement ilc leur bonhcur, soil quani a leurs
anies, qui ne sont cnlrees clans le bonheur du ciel que
(Jcpuis que le ciel a etc cuvert pour nous coniuie pour
eui au jour de I'ascension triomphante de Jesus-Christ;
soil quant a leurs corps , qui ne seront glorifies que
quand les notres le seront au jour de la resurrection ge-
nerale*.
Apres avoir ainsi rassemble cetle grande nuce de te- L'Apoire sc
nioins qui deposent en faveur de la loi , par laquelle ils ont *crt de tous
merite d'avoir part a raccomplissement dcs promesses ^ , '^^^ "^^^^'j^^.
I'Apotre en tire un motif ( chap, xii) pour exhorter les j^ H^breux a
Hebreux a deposer tout ie poids de la douleur que leur couHr avec
causent les afflictions auxquelles ils se voient exposes^, a P^^^^^pf '^°"'
ne point se laisser entrainer par I'infidelite de ceux qui /^^^'■"f'"^1"
» ,, , , I r • A V ff. • ^ leurestou-
autour d eux abanclonnent la toi*, a soulirir patiemment ^rte. lUeur
les niaux qui tombent sur eux^, enGn a courir avec une propose
sainte ardeur dans la carriere qui leur est ouvertc , a6n I'^emple de
de remnorter le prix qui leur est propose'^. A I'exemple "' '^ •°*'® ^
1 • I. » » ■ I • 1 T ' /->L • . surunlexte
des saints I Apotre ajoute celui de .lesus-Lnrist memo , ju livre des
qui est I'auteur et le consominateur de la foi' : I'auteur, Proverhes.
parce qu'il en est le principe, et que c'est de Ini que nous
la recevons; le consoramateur , parce que c'est lui qui la
soutient et qui la couronne. L' Apotre fait done remarquer
aux Hebreux que Jesus-Christ, au lieu de la vie tranquille
et heureuse dont il pouvoit jouir par le droit de sa nais-
sance eternelle et de sa parfaile innocence , a voulu , en se
faisant homme et prenant sur lui nos peches, soulirir le
supplice de la croix, en nieprisant I'ignoniiniequi accom-
pagnoit ce supplice''. 11 leur fait remarquer que Jesus-
Christ, en se soumeltant a ce supplice ci a cette ignomi-
nie , a merite , selon son humanite , d'etre maintenant assis
a la droite de Dieu son Pere^. II les exhorte a se rappeler
* y 39. ad Jin. Et hiomnes testimonio Jtdei probati ^ non acceperunt re-
pronii'ssionem, Deo pro nobis melius aliquid providente , ut non sine nobis
consummarentur. — * y i . Ideoque et nos tanUim habenies imposilam nubem
testium. — ' Ibid. Deponentes omne pondus (o-]pccv). — ■• J bid. Etcircum-
stans nos peccatum. — * Ibid. Per patientiam. — * Ibid. Curramus adpro-
posilum certamen. — ^ -j- a . j4spicieiu.es in auctoremjidei et consummalorem
Jesum. — ' Ibid. Quiproposito (ivri rrc -^cy.nuifr/;, pro proposito) sibi gau-
dio stistinuit crucem , confusione contempia. — ' Ibid. Jttqite in dextera
sedis Dei sedet.
a3. iQ i»
290 i'ri::f4Ce
Ic souvenir de ce Dieu Sauveur qui a souffert une si grande
contradiciion de la j)arl des pecheurs qui sesonteleves
centre lui , et a tirer de la unmolif pourne point se decou-
rager, et ne point tomber dans labattemcnt'. 11 leur re-
presente qu'ils n'ont point encore resiste comme Jesus-
Christ jnsqu'au sang en combattant contre le peche ,
contre I'infidelile de ceux qui veulent les seduire et leur
f'aire abandonner la foi^. A I'exemple de Jesus-Christ et
<les saints il ajoute I'exhortation que la sagesse divine leur
adresse par la bouche de Salomon; il leur demande s'ils
ont oublie cette exhortation qui s'adresse aeux, puis-
qu'ils sont eux-memes les enfans de Dieu , qui s'exprime
ainsi par la bouche de ce prince : Monfils , ne nigligez pas
le chaiiment donl le Seigneur vous corrige , et ne vous lais^ez
pas aballre lorsqu'il vous reprend ; car le Seigntur chdlie
celuiquil aime , el ilfrappe de verges tous ceux qu'ilrecoit au
7iombre de ses enfans^. L'Ap6tre rapporte ce texte comme
on le trouve dans la version des Septante: et il va de-
velopper les instructions qu'il renfcrme. Et reniarquons
ici que cette epitre fournit seule d'excellens modeles aux
commentateurs pour I'interpretation des irois parties qui
composent le corps des livres de I'Ancien-Tcstament. Les
reflexions que I'Apotre a faites sur ce qui est dit de Mel-
chisedech, et sur les ceremonies du sacerdoce levitique ,
nous apprennent a etudier Jesus -Christ et son Eglise
dans tout ce que renferment les livres meme historiques.
L'usage qu'il a fait de tant de propheties , et specialement
du psaume xciv, nous apprend dans quel esprit nous de-
vons etudier les livres prophetiques. Enfin les reflexions
qu'il va faire sur ce texte du livre des Proverbes vont nous
apprendre avec quel soin nous devons profiter des in-
structions que renferment les livres moraux. L'Apotrefait
done d'abord remarquer aux Hebreux que s'ils recoivent
des chatimens , Dieu les traite en cela comme ses enfans*.
C'etoit la consequence naturelle du texte qu'il venoit de
citer. II y ajoute I'exemple de la conduite ordinaire des
hommes, en leur demandant qui est I'enfant qui ne soit
' y^ 3. Recogiiate enini eum qui talent sustinuit, etc. — ' V^ 4. Nondum
enim usque ad sauguinein, eLc. — ' -J- 5. ef fi. Et obliii estis consolationis
(7Tapa)4XT'<T5W{, exhortalionis ) qua: vobis tamquamfiliis loquitur, dicens :
Fill mi. etc. — * y 7 In disciplina perseveraie (gr. Ei TraKJetoiv u7f6(Ae'v«Te, Si
dlsciplinam sustinetis) : tamquamjiliis vobis offertse Deus.
SUR L EPITRE ADX UEBREUX. 20 I
point chatic par son pere '. II en conclul que s'ils ne sont
point chaties , tons les autres I'ayant ele , ils sont done ba-
lards etnon de vrais enfans^, II continue le parallele, et
representant aux Hchreuv qu'ils ont dii respecter les pere,s
de leurs corps lors merae qu'ils en recoivent des chati-
mens, il leur demande s'ils ne doivent pas encore bien
plus de soumission pour celui qui est le pere des esprits,
afin de recevoir de lui la vraie "vie^. II ajoute que leurs
peres les chatioient comme il leur plaisoit, et afin de les
regler pour le peu de jours que dure cette vie ; mais que
celui-ci nous chatic pour notre bien veritable , afin de
nous rendre eternellcment participant de sa saintete*.
Enfin il avoue que tout chatiment, lorsqu'on le recoit,
semble causer de la iristesse etnon de la joie; mais il fait
remarquer qu'ensuite ce chatiment fait recueillir en paix
les fruits de la justice a ceux qui ont ete ainsi exerces^.
Ainsi la qualite meme du traitemcnt qui nous est fait , le
caractere de celui qui nous le fait, le motif pour lequel il
nous le fait, et le fruit que nous devons en recueillir, sont
quatre raisons qui doivent nous porter a recevoir les af-
flictions avec amour, avec respect, avec reconnoissance,
avec joie. Voila ce que I'Apotre a su tirer de quatre pa-
roles qu'il cite. Qu'il est avantageux d'apprendre d'un si
excellent maitre I'art de decouvrir les richesses inestima-
bles renfermees dans ces divins livres, qui sont vraiment
ecrits pour notre instruction et notre consolation ! Apres
avoir ainsi expose cette excellente morale, rAp6tre en
tire les consequences, et il exhorte les Hebreux a relever
leurs mains languissantes, et a fortifier leurs genoux affoi-
blis" , c'est-a-dire a ranimer leur courage , et a aplanir les
voies par lesquelles ils doivent marcher", c'est-a-dire a
adoucir par ces reflexions Tamertume des afflictions
qu'ils auront a souffrir; afin que s'il y en a quelqu'un
d'eux qui soit boiteux ou chancelant, il ne soil pas porle
a sortir d'un chemin qui lui paroitroit trop dur et trop dif-
* r 7 . Qtiis enim Jiliui qttem non com'pit pater? — ' y 8 . Quod si extra
ditciplinam estis, etc. — ' -f ii.DeinJe patres quidem carnis nostrce, etc. — ■
*-)r lo. Et 7 Ui quidem in tempore paiicorum dierum (gr. — po? oAifot; ru-spoj,
adpaucos dies) secundum voluntatem suam, etc. — * y- 1 1 . Omnis aulem
disciplina, in prtesenli quidem, etc. — ^ -^ a. Propter quod remissas ma-
nus, etc. — V li. £t gressus rectos (gr. TSCX'i; if^' orhitas rectas) facile
pedibus vestris.
292 I'R^FACE
ficile, maisque plut6t il se guerisse et s'affermissc dans la
foi'.
L'A])6treex- L'Apotre passe ensuile a des avis plus particuliers ; et
horie les He- d'abord il exhorte les Hebreux a tacber d'avoir la paix avec
reuxaiccier j^^^j^ le monde , mais en memo temps a conserver avec
u avoir la paix ,, ,, 1 ni t^-o
avec toutle som la purete du coeur, sans laquelie nul no verra Dieu^ :
inonde, mais deux cljoses qui sont quelquclois difficiles a allier, parce
en ni^me q^g souvent il arrive que pour conserver la paix on blesse
temps a con- pg^^^ purete dc I'ame. Pour eviler ce malbeur, I'Apolre ex-
server iivec ^ v ■■ . *■
soin la purete tiorte les Hebreux a prendre bien garde que quelqu'un
de leur ame. d'eux Tie manque a la grace de Dieu, et que quelque racine
II Jeor repre- amere, poussant en hautsatige, n'empecbe la bonne se-
sentecombien jj^gj^gg gj ^g souille Tame de plusieurs^ : c'est-a-direqu'il
iL leur scroll t ' *
dangereux "c s'eleve au milieu d'eux quelque docteur du mensonge
d'abandonner qui arrete Icurs progres dans la foi , ct souille leurs ames
I'alliance di- g^ jgyj. inspirant I'amour impur de ses vaines erreurs ^ en-
yine aque e ^^^ qu'ilne se trouveparmi eux quelque fornicaleur'*, c'est-
jisonieu ptiri, ^ i« i> ■ i ii !»/»••
a-dire quelqu un qui se rende coupable u une lornication
spiritueJle , en abandonnant le Seigneur pour s'attacher
aux idoles du mensonge et de I'erreur; quelque profane
comme Esaii, qui, pour se rassasier une seule fois , vendit
a son frere son droit d'ainesse^ ; quelque ame profane qui,
pour se conserver les vils avantages des biens temporels et
d'un repos passager, abandonne les precieuses preroga-
tives de la foi. Les Juifs fideles etoient vraiment les aines
a I'egard des gentils convertis a. la foi : ainsi de leur part
renoncer a la foi , c'etoit veritablement abandonner leur
droit d'ainesse. L'Apotre insiste done sur ce parallele si
naturel, et il leur represente que ce profane enfant d'lsaac,
desirant ensuite rececoir comme premier heritier la bene-
' y^ 1 3. Ut non claudicans qiii's erret, magis autem sanetur. — * V" ^4 •
Pncem sequimini cum omnibus , et sanctimoniam sine qua nemo videbit
Deifm. — ' y^ 1 5. Contemplantes ne quis desk g rati ce Dei : ne qua radix
amaritudinis sursum germinans impediat, etper illam inquinenturmuUi.
II faul comparer cela avec ce que dit Moise : Ne forte sit inter vos vir aut
mulier, faniilia aut iribus, cujus cor ad\>ersum est Jiodie a Domino Deo
nostra;. .... etsit inter vos radix germinans fel et amaritudinem . Deut.
XXIX. 18. — ^-^ ifi. iVe (/Mw/or/zicato/'. Dans le style des Hebreux rien n'est
si commun que celle expression prise dans le sens d'une fornication spiri-
luelle. De la vient que le Psaimisle disoit : Ecce qui elongant se a te peri-
bunt ; perdidisti omnes qui fornicantur abs te : Mihi autem adhcenre Deo
bonumest, ponere in Domino Deo meo spem meam. Psal. lxxii. 27. 28,
— "Ibid. Autprofanus ulEsau, quijiropier unam escam t'endiditprimiti^>a
sua.
SUR L'EPiTBB JMX HEBREUX. 298
clicLiou de son pfere, fut rejete, et ne put le porter a revo-
quer ce qu'il avail fait pour Jacob , quoiqu'il Ten conjurat
avec larmes'. II leur laisse le soin de se faire a eux-memes
lapplication de eel exeraple terrible , qui a ete depuis si
exactcment verific sur le corps cntier de cette nation in-
credule. 11 leur represente que quoitjue laloi nouveile n'ait
pas ete publiee avec un appareil aussi terrible que la loi
ancienne, cependant il n'y a pas moins de danger, et au
coutraire meme il y en a plus encore a la violer. 11 avoue
que pour recevoir cette loi, ils ne se sont point approches
corame autretois d'une raontagne sensible et terrestrc ,
d'uti feu brulant,d'un nuageobscuret tenebreux, des teni-
petes et des eclairs, du son dune trompette , et du bruit
d'une voix qui etoit telle que ceux qui I'entendirent sup-
plierent qu'on ne leur parlat plus^. 11 remarque que leui's
percsne pouvoient porter la rigueur de cette menace qui
fut alors prononcee , que si une bete meme touchoit la
montas^ne elle serait lapidee^. Il ajoute que tout etoit alors
si terrible que Molse meme dit : Je suis lout Iremhlant et
tout cjfraye^. On suj^)Ose que cette parole, qui semble ne
point se trouver dans les livres de Moise , avail apparem-
raent ete conservee par tradition. Peul-etre que saint Paul
fait allusion a quelques expressions de la version des Sep-
tante , telles que celle du Deuleronome , ix , 1 9 , oil on lit
comme ic'x, E xteirilus suvi^ . Quoiqu'il en soil, on voit done
icique dans la publication de la loi ancienne tout etoit ter-
rible, tout inspiroit la crainte ; mais dans la publication de
la loi nouveile tout inspire en meme temps el le respect
etramour. Illeur represente done que, pour recevoir cette
loi nouveile, ils se sont approches de la montagne de
Sion, c'est-a-dire de la cite du Dieu vivant, c'est-a-dire de
la Jerusalem celeste *"; comment cela? parce que par la foi
ils se sont approches et de la troupe innombrable des an-
ges, et de I'Eglise des premiers-nes, de I'assemblee des
elus, donl les noms sont ecrits dans le ciel, et de Dieu
meme qui est !e juge de tous, des anges el des hommes' :
' V" I : . Scitote enhn quoniam el posiea cupiens heredhare benedict/o-
nem, reprobatus , etc. — * y t8. et 19. Non enini accesiistis, etc. — ^ f 20.
Non enim portabaiU, etc. — ^ -^ 11. El ha urribile erat, etc. — * Deut. 11.
19. Dans la version des Seplanle , on lit commc ici acccSi; iw., Exiemlus
sum. — *y 22. Sed accessisus ad Sion montem, et civilaiem Dei vivenlis,
Jerusalem coelestem. — ^ -jl- aa. eta3. Et muUonun milUum angelorum fix-
29* PKEFACi:
par la foi ils se sont approches et des esprits des jusles qui
sont deja parfaits et consommes dans la gloirc, et de Jesus
qui est le mediateur de Talliance nouvelle, et enfin d'un
sang qui a ete repandu sur eux , et qui parle plus avanta-
geusement que celui d'AbeU; car celui d'Abel ne parloit
que pour demander vengeance , au lieu que celui-ci parle
pour demander grace, puisque c'est pour cela meme qu'il
a ete repandu. Apres celal'Apotre les exhorte a bien pren-
dre garde a ne pas mcpriser celui qui leur parle , c'est-a-
dire Jesus-Christ meme, qui estle legislateur delaloi nou-
velle^. II leur represente que si ceux qui ont meprise
I'ange qui leur parloit sur la terre do la part de Dieu n'ont
pu echapper a la peine, a plus forte raison nous ne I'evite-
rons pas si nous rejetons le divin legislateur qui nous parle
duciel^; car comme il I'a ditplus haul, c'est par lesanges
que la loi a ete annoncee , au lieu que I'Evangile du salut
est anonce par Jesus-Christ meme. Mais Jesus-Christ etant
lui-meme le Verbe de Dieu, c'est lui aussi qui a parle des
lors par la bouche de I'ange, et qui par sa voix pleine de
puissance et de terreur a alors eljrHple la terre*; et c'est
lui qui dans la suite a annonce par la bouche d'Aggee un
nouvel ebranlement ^. Le Seigneur dit par la bouche de ce
prophete: Encore Mwg/o/V(c'est I'expression desSeptante^,
et i'hebreu y est conforme,) encore une fois, etj'ebranleraile
del el la lerre. L'Apotre, instruit par I'Esprit de Dieu qui le
rend attentif a toutes les expressions des divins oracles,
remarque que par la bouche de ce prophete le Seigneur
dit : Encore une fois , et j'ebranlerai non-seule.ment la lerre ,
mais encore le del meme^. Dans I'etablissement de I'an-
cienne alliance , Dieu ebranla seulement la terre ; le ciel
demeura ferme, et le culte que Dieu etablit alors sur la
terre fut un culte terrestre el charnel : mais dans I'etablis-
sement de I'alliance nouvelle il ebranle en meme temps le
quentiam , el Ecclesiam priniiiivorum qui conscripti swU in coelis ; etj'u-
aicem omnium Deum.
' y -j'}. efi!^. EtspiriLus justorum peifectorum, et tesUunenti noi>i me-
duitorcm Jesum , et sanguinis aspersionem melius loquentem quam j4bel.
Gr. alit. sanguinem aspersionis melius loquentem^ etc. — ^ ^ 2^. f^idele ne
j-ecusetis loquentem. — ^ Ibid. Sienimilli nonejfugeruntrecusanies (wa-
saiTr,aa[Asvot) eum qui super terram loquebatur{y^fr.iJ.oL-:'.^C;-j~a.), muUo magis
nos, etc. — '' y^ 2G. Cujus vox mu\>it terrain tunc. — * Jbid. Nunc aulem re-
promiUildicens. — ^ Agg. 11. -j. £ti oct;*;. /ipjj^ -jiy. Adhuc semel. — '7 ati.
Picens: Adhuc semel, et ego uiovebo non solum tenam, sedet caelum.
SLR L £P1THE AL\ UEBREUX. 2^i>
ciel et la terre ; il ouvre le ciel, et il eiablit sur la terre un
cuke spirituel et celeste. Apres cela rAp6tre insisie sur ce
mot, Encore ime fois ; el il fait reiuarquer qu'eii disant
cela le Seigneur montre qu'il va faire encore un change-
uient qui sera le dernier; qu'il va faire cesser les choses
inuables conime elant faites, c'est-a-dire comaie etant par-
venues aulermeouelles tie voienllendre etouellesdevoient
6nir, et qu'il va y subslituer celles qui sont immuables et
qui demeureront loujours '. II est done vrai que dans cette
parole d'Aggee, Encore unefois, dit le Seigneur, elfebran-
lerai le ciel et la terre ^ saint Paul a vu le changement de
Tancienne loi et du premier etat de la religion , comme
nous le disions ailleurs, d'apres un interprete savant et ju-
dicicux, en expliquant cette prophetic d'Aggee^; et la
suite du discours de saint Paul en fournit encore une nou-
velle preuve : car apres avoir ainsi developpe le sens pro-
fond et mvsterieux renferme dans cette prophetic, il en
conclut que, recevant des a present le regne iramuable ,
et ayant part aux avantages de ce changement que Dieu a
opere en ce qui regarde la religion, et apres lequel il n'y
en aura point d'autre, nous recevons de Dieu par Jesus-
Christ cette grace salutaire par laquelle seule nous pouvons
lui rendre un culte qui lui soit agreable^. Mais en meme
temps il fait remarquer que ce culle doit etre accompagne
d'une crainte respectueuse* qui nous rende atlentifs a ne
rien faire qui puisse luideplaire ; parce que, comme le dit
Mo"ise, notre Dieu est unjeiudevoratii, et un Dieu jalotix ^ ,
qui par son amour consomme dans sa vie et dans son unite
divine la creature qui lui a ete fidele , mais qui par sa justice
consume dans une mort et une separation eternellesle pe-
cheur rebelle a sa loi ct violateur de son alliance, qui se
separe de lui pour s'attacher aux creatures.
L'Apotre continue de donner au Hebreux les avis par- L'Ap6irecon-
liculiers qui peuvent leur etre necessaires , et il enire ''""e de don-
ner aux He -
' y a 7 . Qitod autem, jddhttc semel, dicit , declarat mobilium translaiio-
tiem, tanujuamfactorum , utmnnrantea quce sunt immobilia. — ' Voyez la
preface sur Aggee, torn . xva. — 'y '^S. Itaque rcgniim immobile swcifjien-
tes, fialemus gmiiani per quain seryi'tmus placentes Deo. — * Ibid. Cum
metu et revei'emia. — ' -^ ay. et uU. Elenim Deus noster ignis consumens
est. Cetle parole est prise du Deuleronorae, if, 24- 3IoIse ajoule : Deus (emu-
lator^ parole qui convienl si naturellement ici que^ I'du peul dire ou que
I'ApAtre laisse aux H<»breax de la sous-enJendre, ou que peut-ilre m^me I'a-
▼oit-il exprimee. '
296 PREFACE
brciix quel- maintenaiit sur cela dans 1111 plus errand detail ( chap, xiu ).
quesavis II Icscxliorte a conscrvcr touiours la charite envers leurs
i>arliculiers; /. , 1 ti 1 1 i • . ' i- i»
j| !es console "^^'^s *. 11 leur rccommande de ne point negliii^er 1 exer-
tle la peine cice de Thospitalitc ; et pour les y engager davanlage, il
qu'ilsavoient leur rappelle (ju'eri Texercant quelques-uns autrefois, sans
de se voir j^ savoir ont recu pour holes des an":es memes ^ ; il leur
cnasses de la , . v " 1 > 1 \ 1
svna"o''ue l»JSse a compro^ndre qu un plus grand avantage encore leur
est reserve, c'est de recevoir Jesus-Christ meme en la per-
sonne de ceux qu'ils recevront en son nora. 11 les avertit.
de se souvenir de ceux qui sont dans les chaines , comme
s'ils y etoient eux-memes avec eux, et de ceux qui sont
affliges, comme portant eux-memes un corps passible et
mortel ^. U leur recommande que le manage soil traile
de tous avec honnelete, etquele lit nuptial soil sans tache,
parce que Dieu condamnera les fornicateurs et les adul-
teres *. Il leur recommande aussi que leur vie soil exempte
d'avarice , et il les exhorte a se contenler de ce qu'ils
ont ^. Il leur rappelle ce que Dieu dit a Josue : Je ne vous
laisserai point , et je nevous abandonnerai point^ : parole qui
marque le soin que Dieu prend de ceux qu'il choisit et
qu'il aime. 11 enconclut que nous pouvons dire tous avec
confiance ce que le Psalmiste disoil en noire nom : Le
Seigneur est mon secours ; je ne craindrai point ce que les
hommcs pour r ont mefaire \ 11 les exhorte a se souvenir de
leurs conducteurs cpii leur ont preche la parole de Dieu ,
et a imiter leur foi en considerant quelle a ete la fin de
leur sainle vie * : deja Jacques , frere de Jean , et Jacques,
frere du Seigneur et eveque de Jerusalem, avoient ter-
mine leur vie par le martyre dans celte ville meme. Le
motif qui doit porter les Hebrcux a imiter la foi de ces
hommes fidelcs, c'est que Jesus-Christ , a qui ces hommes
fideles ont rendu temoignage, est toujours le meme; il est
aujourd'hui ce qu'il etoit hier, etil sera le meme dans tous
les siecles -', En consequence de ce principe admirable qui
doit etre dans tous les temps le soutien et la consolation de
tous ceux qui connoissent et qui aiment la verile , I'Apolre
exhorte les Hebreux a ne point se laisser emporter a une
' ■)!• 1. Cliajnlas frniernitatis maneat in vobis. — - j- 7.. Ethospitaliuttem
noliie obliwisci, etc. — ^ ^ 3. Mementole vinctorum, etc. — ■* -^ 4. HoiwrabUe
connubium, etc. — ° ^ 5. Sim mores sine avaritia, etc.— '' Ibid. Ipse cniin
dixit : Non le deseram, etc. — ' ^ 0. Iia ul conjidenter dicamus : Dominus
inihi adjulor, etc. — "V^ 7- Mementole fnwposiioriiin vcslrorum , etc. —
'' f 8. Jesus Chrisms hcri, el hodic : ipse et in scciila.
Sl'K L EPllUK At .\ HKIlHhLX. 207
diversite d'opinions et a des doctrines etrangeres qui s'e-
cartent de lar^gle simple de la vraie foi '. Etparce que
ecus qui etoient encore attaches aux observances legales
insistoient particulierement sur le discernement des vian-
des , il leiir represente qu'il vaut bien mieux alTermir son
cceur par la grace que de s'attacher a ce discernement des
viandes, qui de lui-meme n'a jamais servi pour le salut a
ceux qui I'ont observe ^ , et qui etoit devenu encore plus
inutile depuis qu'il etoit aboli par I'alliance nouvelle qui
avoit mis fin a toutes les observances legales. Quant aux
Tiandcs des victimes dont les Juifs fideles se irouvoient
prives par Texcomniunication prononcee centre ceux qui
crovoient en Jesus-Christ , il console les Hebreux, d'abord
en leur representant qu'ils ont dans la religion de Jesus-
Christ un autel a la victime duquel ne peuvent participer
ceux qui rendent dans le tabernacle judaique un culte
abroge qu'ils regardent encore comme le seul culte legi-
time ^ ; et a cette occasion il leur rappelle une ceremonie
qui etoit la figure de cette verite meme. 11 leur represente
done que selon la loi les corps des animaux , dont le sang
etoit porte parle souverain pontife dans le sanctuaire pour
I'expiation dupeche au grand jourde I'expiation solennelle,
etoient brules tout entiers hors du camp ^, sans qu'il fut
permis aux pretres ni a aucun autre d'en manger , pour
montrer que ceux qui demeureroient attaches a ce culte
figuratit", sans en reconnoitre I'insuffisance , n'auroient au-
cune part a la divine victime dont le sang devoitetre porte
dans le sanctuaire celeste. Mais c'etoit hors du camp que
ees victimes etoient brulees; et c'etoit encore une figure,
dont rAp6tre leur developpe le sens en leur faisant remar-
qner que c'est aussi pour cela meme que Jesus , devant
sanctifierle peuple par son^u^pre sang, a souffert hors
de la porte de la ville ^ , jPbmplissant ainsi par cette
tirconstance de sa mort ce qui etoit annonce par cette
imcienne ceremonie ; et si I'Apotre insiste ici sur cette cir-
constance , c'est pour en tirer encore un motif de consola-
' y^ 9. Doctrinis variis elperegrinis nolite abduci. — ^ Ibid. Optimum
est enim gratia si-ibilin: cor, iioii escis qitce lonprofiteruntambularuibus
miis. — 'y 10. HdLeinus aliare , de qtio edere non habentpoiesialem qui
tabemaculo deser>-iunt. — * y 11. Quorum enim animalium inferiur san-
guis pro peccato in sancla per pijiui/icem , horuin corpora ctvmanlur extra
Castra. — '712. Propter quod cl Jesus, ut sanctijicaietper suum sangui-
nempopulum, extra portam passits est.
a^S PREFACE
tion pourlesHebreux,en leurfaisantconsiderer que Jesus-
Christ, ayantainsisouffert la morthors tie la portede la ville,
comme un homme digne d'etre chasse du milieu du peuple
d'lsrafil, ils ne doivent plus craindre de sortir du camp
pour aller a lui, c'est-a-dire de souffrir de la part des
hommes des tribulations a cause de leur foi, mais au cou-
traire s'eslimer heureuxde participer ainsi aux opprobres
de Jesus-Christ ^ EnGn un troisieme motif qui doit en-
core les consoler, et les porter a souffrir courageusement
toutes les privations et les separations qu on leur fait subir,
c'estque la cite terrestre dont onlesseparen'est pascelle a
laquelle ils doivent etre plus attaches, parce que nous n'a-,
vons point ici de cite permanente ; mais la cite future est
la seule que nous devons rechercher preferablement a
tout ^. Apres avpir propose aux Hebreux ces Irois motifs
de consolation, I'Apotre les exhorte a ne plus penser qu'a
offrir par Jesus-Christ a Dieu son Pere I'unique hostie di-
gne de Dieu ^ , qui n'est autre chose que Jesus - Christ
meme sous les especes eucharistiques : mais parce qu'a-
lors il ne lui etoit pas libre de s'exprimer clairement dans
une lettre , en parlant de ce mystere ineffable qui n'etoit
connu que des fideles, il designe cette divine hostie sous
deux nomsquila caraclerisent ; et d'abordil I'appelle /los-
tie de louange^', c'est le nom meme sous lequel le Seigneur
la designe dans le psaume xlix , ou , apres avoir marque
•en termes expresl'insuffisanceetmeme I abolition desvic-
times figuralives , il ajoute cette parole : Immplez^d Dieu.
I'hoslie de louange ^. Et a la fin de ce meme cantique il dit
encore : L' hostie de louange est celle qui m'honoreva ^. Une
hostie de louange, capable non-seulement d'etre offerte ,
mais d'etre immoUe, et seule digne d'etre substituee a tou-
tes les victimes figuratives, est assez manifesteraent la vic-
time eucharistique : il y a p|p memo, c'est que ce nom de
victime eucharistique est precisement celui que le prophete
lui donne dans le texte original , car I'expression du texte
original signifie I'hoslie d' actions de graces ^ qui est preci-
* y^ i3. Exeamus igiturad euni extra casira, imprvperium ejus portari-
tes. — 'y- 14. Non enim habemus hie manentem civitatem, sed Jutnrain in-
quirimus. — ' ^^ i5. Per ipsum ergo offeramus hostiam laudis semper Deo.
— * Ibid, hostiam laudis 0jmav aivsoctoc. — ' Ps. xliv. i 4. Immola Deo
sacrljicium laudis. lxx, ©liaov tw 0sw G'Jaiav aivsosw;. — * Ibid. 7^ 2 3. Sacri-
Jicium laudis honorijicabil me. lxx. ©jata v.hiauoi ^o^acte'. [i.e. — ' ri3^
•mm.
SUR L EPITRE AUX HEBRELX. 200
setncnt ce que signifie le nom de victime eucharistique. Mais
d'ailleurs I'Apdtre s'explique en ajoutant que ce qu'il ap-
pelle L'hoslie de louange, c'est celle qui est le fruit des levres
de ceux qui rendent gloire an nom de Dieii *. Urie hostie qui
est U/rait des levres, et le fruit des litres de ceux qui rendent
gloire aunom de Dieu ; cette expression peut-elle etre plus
exactement verifiee que dans le sacrifice eucharistique ,
dont I'hostie est vraiment le fruit des levres du pretre qui
la consacre , et qui est lui-merae du nombre de ceux qui
rendent gloire au nom de Dieu , et qui actuellement rend
gloire au nom de Dieu par la consecration meme de cette
hostie qui est le fruit de ses levres? Mais a cette hostie de
louange l' Apotre en ajoute encore d'autres , qui sont celles
de la charite qui nous portc a faire du bien a nos freres, et
a leur faire part meme de tout ce que nous avons : il re-
commande aux Hebreux de ne point oublier I'exercice de
cette vertu , et leur declare que c'est par de telles hosties
qu'on se rend Dieu favorable ^. II les invite a obeir a
leur conducteurs, et a leur etre soumis : le motif qu'il
leur propose , c'est que leurs conducteurs veillent pour le
bien de leurs ames , comrae devant en rendre compte ;
d'ou il conclut que par reconnoissance les fideles doivent
obeir a ceux qui les conduis^t , afin que ceux-ci puissent
s'acquitter de leur devoir avec joie , et non en gemissant ,
ce qui ne seroit pas avantageux a ceux qui seroient ainsi
un sujet de douleur pour les pasteurs fideles qui les con-
duisent ^.
II leur demande le secours de leurs prieres ; et pour ef- L'ApAtre de-
facer lesniauvaises impressions que les faux apotres avoient mande aux
pu repandre centre lui dans I'esprit de ceux a qui il ecrit, Hebreux le
il leur declare qu'il a la confiance de dire que sa conscience ^etours e
,.,,/» , * , leurs pneres.
lui rend temoignage de son mnocence, et qu en toutes prj^re admi-
choses il n'a d' autre desir que de se conduire comrae il le rable qu'il
doit, c'esl-a-dire d'une raaniere conforme a la volonte de f^'' lui-m^™®
Dieu*. 11 les prie particulierement de demander a Dieu ?P"'^,^'*^' j„
... . ,r ,r 1 A. , - T ... Conclusion de
quil puisse leur eire rendu au plus tot, c est-a-due qu "ceue^pUre.
puisse retourner bientot aupres d'eux^. II forme ici pour
eux une priere admirable qui a rapport en m^me temps
• y 1 5. Id est, frucUun labiorum confiteiUium nomini ejus. — - -f 1 6 .
Beneficentice auie/n et communionis nolite oblivisci : lalibus enirn Iiostiis
promeretur Deus. — ^ -^ 17. Obedke prcepositisv'eslris, eic. — *y 18. Orate
pro nobis, confidiinus enim, etc. — ' j 19. Amplius autem deprecor I'os, eie.
3oO PIIEFACE
et a la situation ou ils se trouvoient et a la doctrine conte-
nue dans cette epttre qu'il leur adresse. lis etoient dans
I'agitation et dans le trouble , et il commence par invoquer
sur eux le secours du Dieu de paix^ On leur reprochoit
comme un scandale la mort ignominieuse de Jesus-Christ;
il y oppose la gloire de la resurrection de ce Dieu Sau-
veur^. On leur exaltoit la gloire dc Moise, que Dieu avoit
autrefois etabli pour etre lepasteur de son peuple ; il y op-
pose la gloire surcrainente de Jesus-Christ, qui est par ex-
cellence le grand pasteur des brebis du Seigneur ^ On af-
fectoit de leur rendre recommandables et I'alliance an-
cienne dont Moise avoit ele le mediateur, et le sang des
viclimes que Ton avoit offertes des lors, et que Ton conti-
nuoit encore d'oifrir; il y oppose I'excellence de I'alliance
oternelle dont Jesus- Christ a ete le mediateur, et le prix
infini dc son sang qui a mis le sceau a cette alliance'*. Apres
avoir ainsi efface le scandale de la mort de Jesus-Christ
par la gloire de sa resurrection, par ie pouvoir supreme
qui lui a ete donne , etpar le prix de son sang , il le nomme
avec le titre augusle qui lui convient comme an Fils unique
du Pcre , egal et consubstantiel au Dieu supreme, qui est
seulappelepar excellence le Seigneur^. Le plus grand be-
soin des Hebreux etoit d'eWe appliques a tout bien , en
sorte qu'ils fissent en tout la volonte du Seigneur; et c'est
precisement I'unique avantage qu'il leur souhaite''. Et sur
cela I'ecueil le plus dangereux qu'ils eussent a craindre
etoit de meconnottre I'origine de la vraie justice; c'etoit
d'oublier que la vraie justice est celle qui vient de Dieu , et
qui est le fruit de la grace de Jesus-Christ; il leur rappelle
ces deux verites en leur temoignant qu'il souhaite que
Dieu lui-meme fasse en eux par Jesus-Christ ce qui est
agreable a ses yeux''. Principes admirables renfermes ici
en peu de mots : c'est Dieu qui nous dispose a tout bien,
afin que nous fassions sa volonte , voila 1' operation de la
grace : c'est nous-memes qui faisons sa volonte , voila la
cooperation du libre arbitre. II nous dispose afin que nous
fassions : sa grace nous previent. Nous faisons sa volonte.
* ^ 10. Deus pads. — ^ Ibid. Qui eduxii de moftuis. — ' Ibid. Pastotem
magnum avium. — * Ibid. In sanguine leslamcnti ueterni. — ' Ibid. Tov Ku-
piov incoiiv, Dominuin Jesum. La Vulgale porte : Dominum noswum Jesum
Ckrislum. — ^ -j 21. J[ptei vos in omni bono., ut facialis ejus i>oluntaie~'
— ^ Ibid. Faciens in vobis quod placeat coram se.
SLR l'epitre al'x hkbuflx. 3oi
lui-meme faisant en nous ce qui est agreable a ses yeux :
sa grace nous accompagne. Ainsi, comnie le remarque
tres bicn saint Bernard , « ce que la grace seule commence,
« la grace et le libre arbitre I'aclievent ensemble : Quoda
n sola gratia capluvi est , paritcr ab utroque perjicitur ; ■mv^'is
n de telle sorie que dans chaque action Tun et Tautre agis-
« sent ensemble etpar une operation commune, non sepa-
« rementni par une operation successive : Ut mtxtim , non
« singulatim , simulnon vicissim , per singulos profectus ope-
« rentur. Le bien que nous faisons n'est point produit en
« partie par la grace et en partic par le libre arbitre ;
n maisla grace et le libre arbitre I'operent ensemble tout
a entier par une operation indivisible : Non partim gratia,
upartim libcriim arbitrium , sed tolum singula opere individao
^i peragunt. Le libre arbitre fait tout, et la grace fait tout :
« Tolum quidem hoc , et totiim ilia; mais de telle sorte que
<< comme tout se fait dans le libre arbitre, tout aussi vient
« de la grace : Sed ut tolum in illo , sic tolum ex ilia ^. » Et
nous pouvons dire ici ce que disait saint Bernard a la suite
dcs expressions memes que nous venons de rapporter :
« Nous esperons etnous croyons que le lecteur verra avec
« satisfaction que dans tout ceci nous ne nous ecartons
a en ricn de la pensee de I'Apotre : Credinius placere lec-
<ii tori , quod a sensu Apostolinusquamrecedimus. » En effet
il est aise de reconnoitre que tout ce que ce saint docteur
vient de dire n'est que I'expression tres exacte et tres fidele
de la doctrine renfermee dans ces precieuses paroles :
Deis p.vcis aptet vos i.\ om>i bono, ut faciatis ejus vo-
lcntatem, faciens in vobis quod placeat coram se. enfin
coiume tout bien vient de Dieu par Jesus-Christ , aussi
loute gloire est due a Dieu par Jesus-Christ dans le temps
et dans leternite; et c'est par la que I'Apotre termine sa
priere^. Apres cela il supplie les Hebreux de vouloir bien
soutTrir etderecevoir favorablement ce qu'il vient de leur
dire pour leur consolation etpour I'affermissement deleur
foi^ ; etil s'excuse dece qu'il ne I'afait qu'en peu demots*;
parce qu'en effet si Ton considere la grandeur et I'impor-
tance des veriles dont il vient de parler, il est aise de com-
prendre qu'il auroit pu s'etendre beaucoup plus sans ex-
* Bernard, de grat. et lib. orb. cap. xiv. n. 46. — ' y^ 2 r . Cui est gloria
in secula seculorum. Amen. — ^ V- 22. Rogo autem vos, etc. — * Ibid. El~
enim perpaucis scripsi vobis.
•
302
PREFACE
ceder les bornes de son sujct. 11 leur apprend queTimo-
thee, son frere en Jesus-Christ, aete mis en liberie , et il
ajoute que si ce disciple fidele vient bientot, il ira les voir
avec lui^. II leur recommandc de saluer de sa part tous
ceux qui les conduisent, et en general tous les saints^,
c'est-a-dire tous les fideles qui , dans ces jours heureux ,
etoient tous regardes comme saints. II les salue de la part
des freres, c'est-a-dire des fideles qui se trouvoient alors
dans ritalie ^ ; ce qui montre que c'est de la que cette lettre
a ete ecrite. Enfin il souhaite que la grace soit avec eux
tous*; c'est son souhait ordinaire , et c'est par la qu'il ter
mine cette lettre ainsi que toutes les autres.
Recapitula- Dans cette epitre I'Apotre lait remarquer d'abord I'ex-
M°"^*^*P*'.'"" cellence de Jesus-Christ au-dessus des prophctcs qui ont
cipaux points i i, • is 1*1 ^
traitesdans paru Clans I ancien peuple^, et an-dessus des anges memes
ceueepitre. par qui la loi a ete donnee a I'ancien peuple^. il montre
combien est importante et indispensable I'obligalion d'o-
beir a I'Evangile, qui a ete d'abord annonce par Jesus-
Christ meme". 11 continue de faire voir combien Jesus-
Christ est eleveau-dessus des anges. II prend soin de lever
le scandale de la croix, en expliquant pourquoi il a fallu
que Jesus-Christ mourut^. 11 reprend I'cloge de Jesus-
Christ, et il montre combien Jesus-Christ est eleve au-
dcssus de Meise^. II exhorte les Hebreux a s'affermir dans
la foi, et a demeurer perseveramment attaches a Jesus-
Christ; il leur cite sur cela I'exbortation quel'Esprit-Saint
leur adresse dans le psaume xciv*". II leur applique ce
lexte"; il leur montre les consequences qu'ils doivent en
tirer'^. II continue de les exhorter a s'affermir dans la
foi ; et il excite sur cela leur vigilance , et ranime leur con-
fiance*^. II montre que Jesus-Christ est vraiment notre
pontife; il fait voir comment cette qualile lui convient et
lui appartient**. II reproche aux Hebreux leur peu de dis-
position a enlrer dans I'intelligence des grandes veriles de
la religion'^. II les invite a s'elevcravec lui aux grandes ve-
rites dont il va les instruire, et leur fait sentir \e danger
de I'apostasie alaquelle les conduisoit leur affoiblissement
* y^ 2 3. Cognoscite fraLrem nostrum^ etc. — - •)r 24. Salutaie, etc. — ' Ibid.
Salutantvos de Italia fratres. — * -f aS. Gratia cum omnibus vobis. .i4men.
. —'Chap. 1" . -f I. -3. — ^-jr 4. jusqu'a lafin. — 'Chap. 11. i r.-4- — * i 5.
■ jusqu'a la fin. — 'Chap. iii. -j- 1.-6. — '°^ 6.-11. — " i la. jusqu'a la fin.
• — '*,Chap. IV. -j^ i.-ir. — "i^ 12. jusqu'a \a fin. — ** Chap. v. i.- 10. —
" -i II. jusqu'^ la fin.
SIR l'ePITRE AUX HEBREUXi 3o3
ilans la foi '. II raninie leur confiance; et il exite leur zele
ot leur courago par le motif cle I'esperance dont il leur
montre les fondemens inebranlables^. Il vient aux gran-
des verites dont il a proniis de parler ; et d'abord il expose
it's caraclcres de Melchiscdech dont le sacerdoce est le
svmbolc du sacerdoce de Jesus-Christ^. II montre que le
sacerdoce levitique et la loi mosaique sont changes; etque
leurchangement est fonde sur leur insuffisance*. 11 releve
i'excellence de ralliance nouvclle , et de Jesus-Christ qui
en est le mcdiateur par son sacerdoce : il fait rcmarquer
que Jesus-Chrisl est un pretre saint ct immortel''. II releve
I'excellence du sacerdoce de Jesus-Christ qui, assis dans
le ciel a la droilc de son Pere , offre dans le sancluaire ce-
leste une victime celeste^. II prouve I'insuffisance de I'an-
cienne alliance par le temoignagc de Jeremie meme, qui
annonce ciairementunc alliance nouvclle". II prouve I'in-
sufSsance de I'ancien sacerdoce et la perfection du sacer-
doce nouveau paries ceremonies memesde Tancien culte".
11 faitremarquer que la mediation de Jesus-Christ est fon-
dee sur ce que Jesus-Christ est en meme* temps pretre et
victime; ce qui Ini donne lieu de montrer de nouveau la
necessiie de la raort de Jesus-Christ et le prix infini de son
sang^. Il fait remarquer I'insuffisance des victimes legales ;
il prouve leur abolition; il montre I'efficacite du sacrifice
de Jesus-Christ '''. II exhorte les Hebreux a s'approcher de
Dieu avec confiance , a demeurer fermes dans la foi , a s'en-
tr'edifieret s'entr'exhorter mutuellement : il lespresse par
le double motif des maux qu'ils auroient a craindre, s'ils
ne perseveroientpas , et des biens qu'ils ont a esperer s'ils
perseverent^'.De la il prend occasion de parler de la foi :
il en donne la definition; il en releve I'excellence et les
avantages dansle denombrement quil fait de ceux en qui
celte verlu a plus eclate'^. Il se sert del'exemple de tous
ceshommesfideles pour exhorter les Hebreux acouriravec
patience dans la carriere qui leur est ouvertc : il leur pro-
pose I'exemple de Jesus-Christ, et insisteparliculierement
sur I'instruciion que Dieu leur donne par la bouche de Sa-
lomon'^. 11 les exhorte a tacher d'avoir la paix avec tout
' Chap. VI. y I. -8. — • 7 9. jusqu'a la (in. — ^ Cbap. vii. y i.-io. — * y
1 1. -19. — * T 2(1. jusqn'a la fin. — * Cbap. vni. y 1.-6. — " ^ 7. jusqu'ala fin.
— * Chap. IX. y I.-I4- — ' T i5. jusqu'a la fin. — '" Cbap. x. j 1.18. — " T
x«). jusqu'a la fin. — " Chap. xi. y x. jusqu'a la fin. — " Chap. xii. ^ i.-i3.
^o4 PREFACE
le monde, mais en m^me temps a conserver avec soin la
purete de leur ame : il leur represente combien ii Icur se-
roit dangereux d'abandonner TaUiance divine a laquelle ils
ont eu part^ 11 continue de leur donner quelques avis
particuliers : il les console de la peine qu'ils avoient de se
voir chasses de la synagogue ^. Enfin il leur demande le
secours de leurs prieres, forme lui-meme pour eux I'ex-
cellente priere que nous venons tie voir ; et terminc par
les salutations ordinaires cette lettre precieuse que Ton ne
peut trop etudier ni trop mediler^.
Paralltle des Ainsi cette lettre admirable acheve de confirmer et de
trois epitres developper les grandes verites que 1' Apotre avoit deja trai-
de sainiPaul ^^^^ j^j^^ j^g ^pitj-gs aux Galates et aux Romains. Dans ces
Romaius, aux ^^^^^ epitres 1 Apotre e tab lit la necessite de la foi en Jesus-
<Ja1ateseiaux Christ; mais il le fait de trois manieres diffe rentes , selon
Hebreux. ]es differentes dispositions de ceux a qui il ecrivoit. Aux
Romains, il prouve la necessite de la foi , en leur prouvant
I'insuffisance dc la philosophie et meme de la loi. Aux Ga-
lates, il prouve la necessite de la foi, en leur prouvant
non-seulement I'insuffisance de la loi , mais encore le dan-
ger meme de s'attacher aux ceremonies charnelles qu'elle
prescrivoit , et de les regarder comme necessaires depuis
qu'elles etoient abolies. Aux Hebreux , il prouve la neces-
site de la foi, en leur prouvant Tinsuffisance et de I'alliance
ancienne, et dusacerdoce leviiique qui en etoitle fonde-
ment , et de la loi mosaique qui en etoit la condition. Aux
Romains, il prouve Tinsuffisance de la loi meme morale,
qui seule et par elle-meme ne peut donner la vraie justice,
Aux Galates, il prouve I'insuffisance de la loi ceremo-
nielle , et meme le danger de la regarder comme neces-
saire depuis qu'elle est abolie par Jesiis-Christ. Aux He-
breux , il prouve non-seulement I'insuffisance de la loi mo-
rale et de la loi ceremonielle, qui etoient I'une et I'autre
les conditions de I'ancienne alliance , mais encore I'insuf-
fisance de cette alliance ancienne et du sacerdoce levitique
qui en etoit le fondement. Aux Romains et aux Galates , il
prouve expressement la necessite de la foi , et implicite-
ment I'excellence de Jesus-Christ, et de I'aUiance nou-
velle dont il est le mediateur. Aux Hebreux , il prouve ex-
pressement non-seulement la necessite de la foi, mais
encore rexcellence de Jesus-Christ, rexcellcnce de son
' •} I/,, jusqu'a la fin.— ^ Cliap, xm. >^ i .-17.—^ >!■ iS. jusqu'a la fin.
SliR l'spItRE Ar\ HKBRKVX. 3o6
sacerdore et de son sacrifice , rexcellencc de lalliancc
nouvelle dont il est le mediateur. Au\ Komains , il prouvc
en m^me temps et la necessite de la foi , et la gratuite dii
don dc la foi. Aux Galates , il se contente de prouver la
necessite de la foi. Aux Hebreux, il prouve en nieme temps
et la necessite de la foi , et les avanlages de la foi. Insuffi-
sance de la philosophic , insuffisance de la loi mosaique ,
insufBsance des observances charnelles prescrites par celte
loi , insufGsance du sacerdoce levitique , insuffisance des
victimes legales , insuffisance de I'alliance ancienne ; ne-
cessite de la foi, gratuite du don de la foi, avantages du
don de la foi, excellence de Jesus-Christ, perfection de
son sacerdoce , prix infini de son sang , prerogatives de
I'alliance nouvelle dont il est le mediateur ; ce sont les
grandes verites respeclivement etablies dans ces trois epi-
tres , qui renferment aussi tout le fond de la seule religion
veritable que nons avons le bonheur de professer.
aS. so
EPITRE
DE SAINT PAUL
AUX HJ&BREUX.
CHAPITRE PREMIER.
Excellence de Jesus-Christ au-dessus des proplietes qui ont paru dans I'an-
cien peuple , et au-dessus des anges par qui la loi a 6l^ donnce k I'ancien
peuple.
1. DiEC ayant parle autrefois a
nos peres en diveises occasions, et
en diverses manieres, par les pro-
phetes ,
2. Nous a parle de nos jours,'
par son propre Fils , qu'il a fait he-
ritier de loutes choses, el par qui
il a cree les siecles : '
Sap.yn. a6. 3. Et comme il est la splendeur
de sa gloire , et I'image parfaite de
sa substance , et qu'il soutient tout
par la puissance de sa parole, apr6s
nous avoir purifies de nos peches ,'
il est assis au plus haut du ciel, a
la droite de la souveraine majeste.
4. Etant aussi eleve' au-dessus
des anges , que le nom qu'il a repu '
est plus excellent que le leur.
1. MULTIFARIAM , mul-
tisque modis dim Deus
loquens patribus in pro-
phetis : novissime
2. Diebus istis locutus
est nobis in Filio, quein
conslituit heredem uni-
versorum, per quern fecit
et secula :
3. Qui cum sit splen-
dor gloriae , et figura sub-
slantiae ejus, portansque
omnia verbo virtulis suae,
purgationem peccatorum
faciens, sedet ad dexteram
majestatis in excelsis :
4. Tanto melior an-
gelis effectus, quanto
differentius prae illis no-
men hereditavit.
■^ 2. Gr. litt. nous a enjin parl^ dans ces derniers jours.
Ibid. C'est-a-direle monde.
y 3. Par son propre sang qu'il a repandu pour nous. — Le grecajoule :
par lui-m^me.
7^4. C'esl Ic sens du grec.
Ibid. Lin. donl il a horile.
EpItRE DK SAIMT PAtL ALX HEBREUX, CHAP.
^07
5. Cui enJm d'lXh all- 5. Car qui est I'ange a qui Dicu
quando angeloium : Fi- ait jamais dil : ' Voiis fttes nion fils, /**. 11. 7.
lius mens estu, ego hodie je vous ai engetidre aujourd'hui?
genui te ? Et rursum ; Et ailleurs : Je serai son Pere, et ^.^e^j-yii. i4-
Ego ero illi in Patrem, et il sera ncou Fils?
ipse erit inihi in Filium?
6. El cum iterum in- 6. Et lorsqu'il introduit de nou-
troducit primogenilum in veau son preniier-ne dans le monde,' ^'■'- ^^vi. -.
orbem lerrae , dicit : Et il dit : Que tous les anges de Dieu
adorent euni omnes an- I'adorent. '
geli Dei.
7. Et ad angelos qiii-
dem dicit : Qui facit an-
gelos suos spiritus , et
ministrossuos, flammam
ignis.
8. Ad Filium autem :
Thronus luus , Deus , in
7. Aussi I'Ecriture dit touchant
les anges : Dieu fait des esprits ses p^_
anges, et des flammes ardcntes ses
ministres. '
8. Mais elle dit au Fils :' Voire p,.
trone, 6 Dieu ! sera un trone eler-
ecul.i : rirga iiel; le sceptre de voire empire sera
virga regni un sceptre d'equite.
seculum
aequilatis
tui.
9. Dilexisti justiliam,
et odisti iniquilatem :
propterea unxit te, Deus,
Deus luus, oleo exulta
p. Vous avez aime la justice, et
vous avez hai I'iniquite: c'estpour-
quoi, 6 Dieu! voire Dieu' vous a
sacre d'une huile de joie, en une
lionis prae parlicipibus manifere plus excellenle que tous
tuis. ceux qui participeront a voire
gloire.'
y 5. Comme a Jesus-Christ dans sa generation clemelle, son incarnalion
etsa resurrection.
y 6. Lorsqu'il I'enToie k la fin dessiecles pour juger les vlvans et les
morts. — Autr. Et encore lorsqu'il introduit son premier-ne dans le monde .
ettju'apres I' avoir glorifie, il luidonne la puissance sur les nations et e'ta-
blit son regne sur la lerrej il dit, eic.Voyez I'analvse.
Ibid. Ce qui moatre combien il est au-dessus d'eux.
y 7- Autr. Aussi quant aux anges, I'Ecriture dit : Dieu se s/crldu souffle
des vents pour en faire ses ambassadeurs el ses anges , el des Dammes de feu
pour en faire ses ministres. Mais quant au Fils , elle dit, etc. En hebreu, en
grec, et en latin le meme raot qui siiinitie eji/7/'/isignifie aussi vent, et le m^me
mot qui signifie aiige, signifie aussi ambassadeur. Vojez I'anaKse.
y 8. Le considerant, non comme un serviteur de Dieu, mais comme etant
Dieu lui-radme.
y 9. Vojez ce qui est dit decc texle dans I'analyse.
Ibid. Vous ayant donne la plenitude de la grace , dont ils n^auront qu'un
rconlcment et une participation, et vous ayant eleve a on de§re de gloire au-
quel ils n'arriveront jamais.
3o8
lipilRB DE SAIN I PAUL ALX HEBREtX.
P.t. CIX. I.
I .Cor.w.'iH.
10. Et ailleurs : ' Seigneur, vous
avez cree la terre dfes le commence-
ment, et lea cieux sont I'ouvrage
de vos mains.
11. lis periront, mais vousde-
meurerez : ils vieilliront tous
comme un vStement :
1 2. Et vous les changerez comme
un manteau, et ils seront changes ;'
mais pour vous , vous serez tou-
jours le meme , et vos annees ne
finiront point.'
i3. Aussi, qui est I'ange auquel
le Seigneur ait jamais dit : Asseyez-
vous a ma droite, jusqu'a ce que
j'aie reduit vosennemis a vous ser-
vir de marchepied ? '
14. Tous les anges nesont-ils pas
des esprits, destines pour servir,
elant envoyes pourexercer leur mi-
riistere en faveur de ceux qui doi-
vent etre les heritiers du salut ?'
10. Et : Tu in priiici-
pio , Domine , terram
iundasti : et opera ma-
nuum tuarum sunt coeli.
1 1. Ipsi peribunt, tu
autem permanebis : et
omnes ul vestimentum
veterascent :
12. Et velut amiclum
mutabis eos, et muta-
buntur : tu autem idem
ipse es, el anni tui non
deficient.
i3. Ad quern autem
angelorum dixit aliquan-
do : Sede a dextris meis,
quoadusque ponam ini-
micos tuos scabellum pe-
dum tuorum?
14. Nonne omnes sunt
administratorii spiritus,
in ministerium missi prop-
ter eos qui hereditatem
capient saiutis ?
y 10. L'ficriture le reconnoissant pour le Createur de toutes choses , lui
parle en ces lermes.
y- ra . Voyez dans ce volume la Dissertation stir la Jin du monde.
Ibid. Toutes ces paroles, qui s'entendent du Messie, c'esl-Mire de Jesus-
Christ, marquent admirablement sa grandeur, el font voir combien il esteleve
au-dessus des anges.
y r3. Ces paroles n'ont ^leditesqu'.^ Jesus-Christ, a qui cette place est due
comme elant Fils unique de Dieu , et non pas aux anges qui nesontque des
serviteurs etdes ministres.
y 14. Au lieu que Jesus-Christ est, con.me nous venons de le voir, le Fils
eooternel el consubjstanlie! de Dieu, egal en toutes choses a son Pere.
«;H\PiTnK It.
S09
CHAPITKE 11.
Cooibieii est importanle el indispensable robligalion d'ob^ir k I'ETangilc qui
a it6 annonc^ par J^sus-Christ m&ine. Autres preuves de I'excellence d«
Jesus Christ au-dessus des anges. Principes qui servcnt k lever lescandate
de sa luort.
I. PROPTEHEi abuodan-
tius oportetobservare nos
ea quae audirimus , ne
tbrte perefHuaiuus.
u. Si enim qui per an-
geloj dictus est sermo,
factus est firmus, et om-
nis praevaricatio et inobe-
dientia accepit justam
mercedls retributionem :
3. Quomodo nos effu-
giemus , si tantam ne-
glexerimus salutem, quae
cum initium accepisset
enariari per Doininum ,
ab eis qui audierunt , in
iio:- confirmata est ,
4. Contestante Deo si-
gnis , et porteiitis , et ya-
riis Tirtutibus, el Spiri-
I. C'est pourquoi ' nous devon*
observer ayec encore plus d'exac-
titude les choses que nous avons
entendues,' pour n'etre pas commc
des vases entr'ou verts, quilaissent
ecouler ce qu'on y met.'
12. Carsilaloi, qui a seulement
ete annoncee par les anges ,' est de-
menree ferme; et si tons les viole-
mens de ses preceptes, et toutes
les desobeissances ont recu la juste
punition qui leur etoit due,
3. Comment pourrons-nous !*e-
viter,' S4 nous negligeons une doc-
trine salutaire , ' qui , ayant ete
premi^renient annoncee par le Sei-
gneur meuie, a ete confirmee parmi
nous par ceux qui Tout entendue,'
4. Auxquels Dieu a rendu tenioi- Maiwwi.
gnage par les miracles, par les pro -
diges^ par les differens eSets de sa
y I. Si Qous avont ete obliges de garder fidelement les ordonoanocs de la
ioi.
Ibid. De la bouche de Jesus-Chrisl m^me. — Gr. autr. nousdeTons uoiis
ailacher avec encore plus de soin aux choses que nous avons entendues, etc.
Ibid. Pour ne pas laisser sortir de notre esprit el de noire <.oeur les divine?
paroles que Dieu nous a fait annoncer par son propre Fils. — Autr. pour
n'etre pas comme de I'eau qui s'ecoule ef seperd. Litt. afin que nous ne nous-
ecoulions pas.
7!^ a. Les scnriteurs de Dieu.
•^ i. fcviter cette punition.
Ibid. Lilt, un tel salut.
Ibid. Par les \p6Uv* qui Pont eniendne de ca pn>prc boiitho.
3io
EPITRE DE SAIKT PAV L ALX HEBUEUX.
puissance, et par la distribution
des graces du Saint-Esprit, qu'il a
partages comine il lui a pin ?'
5. CarDieu n'a point soumis aux
anges le monde futur dont nous
parlons. '
6. Aussi quelqu'un a dit dans un
Ps(,l. Till. 5, endroit de I'Ecriture : ' Qu'est ce
que riiomme , pour meriter votre
souvenir? et qu'est-ce que le flis de
I'homme, pouretre favorise de vos
regards ?
7. Vous I'avez rendu pour un peu
4( de temps' inferieur aux anges,'
vous I'avez ensuite couronpe de
gloire et d'honneyr : vous lui avez
donne I'empire sur les ouvrages de
vos mains;
Mati. ixvni. 8. Vous avez assujeti tontes
»8. choses sous ses pieds. Or, en di-
i.C'or.xv.sG sant qu'il lui a assujeti toutes
choses, il n'a ^-ien laisse qui ne lui
soil assujeti' : cependant nous ne
voyons pas encore que tout lui soit
assujeti.'
9. Mais nous voyons que Jesus,
qui avail ete rendu pour un peu
de temps' inferieur aux anges,
a cte couronne de gloire et d'hon-
iieur, a cause de la mort qu'il a
tus Sancti dislributionibus
secundum suam volun-
tatem?
5. Non enim angelis
subjecit Deus orbem ter-
rae futurum , de quo lo-
quimu^".
6. Testixtus est autem
in quodam loco quis , di-
cens : Quid est homo,
quod memor es ejus :
aut filius hominis , quo-
niam visitas eum?
7. Minu^sti eum pauIo
minus ab angelis : gloria
et honore coronasti eum :
et constituisti eum super
opera manuum tuarum.
8 Omnia subjecLsti sub
pedibus ejus. In eo enim
quod omnia ei subjecit »
nihil dimisit non subjec-
tum ei : nunc autem nec-
duni videmus omnia sub-
jecta ei.
9. Eum autem qui
modico quam angeli mi-
noratus est, videmus Je-
sum , propter passionem.
mortis glpria et honore
>'^4- Dontl'effusion a el' en m^me temps une preuve incontestable de la
verite de I'Evangile, et une marque evidenlede la grandeur de Jesus-Christ,
qui en est le premier ministre, elquiestetabli roi et chefdu monde Qouveau,
c'est-a-dirc de I'Eglise, dont le renouvellement commence ici par la grace , et
se consomme dans le ciel par la gloire.
■j^ 5. Maisbien k Jesus-Cbrist, qui en est le pere el le souverain adminis-
trateur.
■jj G. Kn admirant le pouvoirque Dieu lui a donne, et la grandeur ou la
nature bumaine a ete elevee en sa personne divine.
i 7. el 9. C'est le sensdu grcc : Ppay^u. Voyez ce qui est dit de ce textedans
I'analyse.
Ibid. En le rcndant passible et mortel.
y 8. Puisque Ics bommc? impies et Jes anges aposla'is se n'vollcnl san>
ccsseconlre lui.
CHAPITKE II.
coronatum : ut gratia
Dei pro omnibus gustaret
niorlcm.
10. Decebat enimeum,
propter quein omnia . et
per quem omnia , qui
mullos filios in gloriam
adduxerat, auctorem sa-
lutiseorum perpassionem
coflsummare.
11. Qui enim sanctifl-
cat, et qui sanctiGcantur,
ex uno omnes. Propter
quam. causam non con-
funditur fratres eos yo-
care , dicens :
la. Nuntiabo nomen
tuum fratribus meis : in
medio ecclesiae laudabo
te.
i3. Et iterum : Ego
ero fidens in eum. Et
iterum : Ecce ego, et
pueri mei quos dedit mi-
hi Deus.
i4- Quia ergo pueri
communicaverunt carni
et sanguini , et ipse simi-
liter participavit eisdem :
ut per mortem destrueret
eum qui babebat mortis
imperium, id est , diabo-
lum :
1 5. Et liberaret eos qui
soufferlCj Dieu par sa bonte ayaat
voulu quMI mourOt pour tou3.'
ID. 'Caril etoit bien digne de
Dieu, pour lequel et par lequel
sont toutes choses, que, voulant'
conduire a la gloire plusieurs en-
fans, il perfectionnat par les souf-
frances celui qui devoit etre I'au-
teur ' de leur salut.
11. Car celui qui sanctifle , et
ceux qui sont sanctifies, yiennent
tous d'un mSme principe : ' o'est
pourquoi il ne rougit point de les
appeler ses freres,
12. En disant : J'annoncerai to- "'• "'•^3,
tre nom a mes frferes; je chanterai
Tos louanges au milieu de I'assem-
blee de votre peuple.
1 3. Et ailleurs : ' Je mettrai ma ^•»- ^^i- 3.
confiance en lui.' Et encore dans '"•^'"•''•
un autre endroit : Me voici avec
les enfans que Dieu m*a donnes.'
14. Etainsl, parceque les enfans
sont d'une nature composee de chair
et de sang, il a aussi lui-meme
participe a cclte meme nature,
afin de detruire par sa mort celui *^^'*"'-^4-
qui etoit le prmce de la mort , c est-
a-dire le diable j
i5. Et de mettre en liberie ceux
ir 9. Si done les impics parmi les bommes et parmi les auges lui resistent
eii ce monde , ils !ui seront assujetis dans I'autre ; et la parole du prophcte
s'accomplira ence point, comme nousToyonsqu'elle Test dans les autres.
y to. II ne faul pas s'etonner que Dieu ait choisi ce moyen pour nous
sauver.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Le grec a la leUre : le chef et le prince.
y 1 1. Jesus-Christ, comma homme, ctant enfant d' Adam, aussi bien que
les autres hoinmes, quoique d'une manierediffi'rente.
y- 1 3. Jesus-Chrisl ditces paroles en parlant de Dieu.
Ibid. Ce qu'il n'auroit pu dire, s'il ne s'eloit rabaisse au-deJ<sous de Diea
son pere, en se faisant homme.
Ibid. Vojoz ce qui est dil dc cc texte dans I'analyse.
3ia
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
quelacrainte de la morltenoit dans
une continuelle servitude pendant
leur vie.'
16. Car il ne s'est pas rendu le
liberateur' des anges; mais il s'est
rendu le liberateur de la race d'A-
braham.'
17. C'est pourquoi il a fallu qu'il
f'Qt en tout ' semblables h ses freres,
afin qu'il fOt devant Dieu un pon-
tife compatissant' et fidele en son
ministere, afin d'expier' les peches
du peuple.'
18. Car c'est des souffrances
paemes, par lesquelles il a ete
tente,' qu'il tire la vertu tt la force
de secourir ceux qui sont aussi
tentes.'
timore mortis per totam
vilam obnoxii erant ser-
vituti.
i6. Nusquam enim an-^
gclos apprehendit, sed
semen Abraha? apprehen-
dit.
17. Unde debuit per
omnia fratribus similar!,
ut misericors fieret, et fi-
delis pontifex ad Deum,
ut repropitiaret delicta
populi.
18. In eo enim, in quo
passus est ipse , et tenta-
tus, potens est et eis qui
tentantur, auxiliari.
•^ i5. En leurdonnant I'esperance qu'elle seroit suivie d'une heureuse r^
surrection. C'est une faveur qu'il a falte aux hommes , et qu'il n'a pas faite
aux anges.
y^ 16. C'est le sens du grec. Voyez I'analyse.
Ibid. C'est-a-dire de tous ceux qui devoient croire en Jesus-Christ , selon
ce qui est dit ailleurs qu' Abraham est le pere des croyans, et que les enfans de
lafoisont les en fans d' Abraham. Rom.n. 16. Hal. ni. 7.
y- 1 7. Excepte le peche.
Ibi'd. Compatissant a leurs folblesses , etant instruit par sa propre expe-
rience des infirmitcs de leur nature.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Afin de trouver dans I'immolation d'une chair mortelle , unie a sa
nature divine , de quoi satisfaire a lout ce que la nature humaine devoit a la
justice de Dieu , el de quoi m^riter aux hommes les secours et les graces dont
ils avoient besoin.
•jf^ 18. Eprouve d^ns sa chair nouvelle.
Ibid. Autr . Car ayant cle tente et eprouve par les peines qu'il a souffertes,
il est dispose a secourir ceux qui sont aussi tenles et eprom'es.Yoyez I'analyse,
CHAPITKU HI
3l3
CHAPITRE HI.
Excfllence de J^sus-Christ au-dessus deMoise. Les H^breui sont exhortfc
a s'affermir dans la foi , et a demeurer persev^ramment attaches 4 Jesus-
Christ. Exhortation que TEsprit- Saint leur adresse dans le livre des
psaumes.
I. Unde, fratres sancti,
vocalionis coeleslis parli-
cipes , considerate apos-
tolum et pontificem con-
fessionis nostrae Jesuin :
a. Qui fidelis est ei qui
fecit ilium , sicut et
Moyses in omni domo
ejus.
5. Amplioris eniin glo-
riaeiste prae Moyse dignus
est habitus, quanto am-
piioiem honorem habet
domus , qui fabricavit ii-
1am.
4. Omnis namque do-
mus fabricatur adaliquo :
qui autem omnia creayit,
Deus est.
5. Et Moyses quidem
fidelis erat in tota domo
ejus tamquam famulus,
in testimonium eorum
quae dicenda erant :
6. Christus vero tam-
quam filius in domo sua :
1. Voxjs done, mes saints freres,
qui avez part a la vocation celeste ,'
considerez Jesus, qui est I'apotre
et le pontife de la religion que nous
professons ,
2. Qui est fiddle i celui qui I'a
etabli, comme Moise lui a ete fiddle
dans toute sa maison. Num. xri.7,
3. Car il a etc juge digne d'une
gloire d'autant plus grande que celle
de MoTse, que celui qui a bSti la
maison est plus estimable que la
maison meme.'
4. Car il n'y a point de maison
qui n'ait ete biltie par quelqu'un ;
et celui qui est Tarchitecte ' et le
createur de toutes choses , c'est
Dieu.'
5. Quant k Moise, il a ete fidfele
dans toute la maison de Dieu ,
comme un serviteur, pour annon-
cer' tout ce qu'il lui eloit ordonne
de dire :
6. iMaisJesus-Christ, comme Fils,
a Tautorite sur sa maison; et nous
y I. Qui fttesdu nombre de ceui que Dieu a cboisis pour les rendre parli-
cipansde sa gloire.
■f 3. Or, c'est Jesus-Christ qui a biti la maison dans laquelle Moise a ete
fidele, et dent il «?loit lui-m^me une partie.
y 4. C'eslcequ'exprimela force du mot grecxaraoxsuaca; qui est relatifa
la similitude prise d'une maison bAtie par un architecte.
Jbid. Notre Seigneur Jesus-Christ qui est Dieu , et par consequent il est
infiniment au-dessus de Moise.
■jr 5. Au peuple juif, qui etoit ct- He maison.
3i4
EPITRE DE SAINT PAUL AUX UEBREUX.
somrnes nous-uiemes sa maison ,
pourvu que nous conservfons jus-
qu'a la fin une ferme confiance ,
et une attente pleine d« joie ' des
biens que nous esperons ;
7. G'est pourquoi , le Saint-Es-
prit a dit' : Si vous entendez au-
Psal. xciv. 8. jourd'hui sa voix,
tnj'r, IV. 7 ,
8. N'endurcissez pas yos coeurs ,
comme il arriva dans le desert, au
jour de la tentation , et dans la
contradiction,"
9. Oii vos peres me tenterent, oii
ils voulurfint eprouver ma puis-
quae domus sumus nos,
si fiduciam , et gloriam
spei usque ad finem , fir-
mam retineamus.
7. Quapropter sicutdi-
cit Spiritus Sanctus :
Hodie si vocem ejus au-
dieritis ,
8. Nolite obdurare
corda vestra , sicut in
exacerbatione, secundum
diem tentatimiis in de-
serto ,
9. Ubi tentaverunt me
patres vestri , probave-
SJ^nces , et ou ils virent les grandes runt, et viderunt opera
choses que je fis.
10. J'ai supporte ce peuple avec
peine ' durant quarante ans '; et j'ai
dit en nioi-meme : lis se laissent
toujours emporter a I'egaremcnt
de leur coeur; ils ne cunnaissent
point mes voies.'
1 1. Aussi ai-je fait serment dans
ma colere, qu'ils n'entreront point mea : Si introibunt in ce
dans mon repos. ' quiem meam.
mea
10. Quadraginta an-
nis : Propter quod infen-
sus fui generationi huic,
el dixi : Semper errant
corde. Ipsi autem non
cognoverunt vias meas :
11. Sicut juravi in ira.
y 6. C'est le sens du grec : cujus domus sumus nos.
Ibid. Maison figuree par I'eglise judaique.
Ibid. C'est le sens du grec.
"3^^ 7. En parlant de Jesus-Christ.
f 8. Dans le lieu qui fut depuis appel^ le lieu de la coiUfadicu'on etdu,
murmure. Autr. au temps de la contradiction, el au jourde la tentation dans
le desert.
•^ 9. Sans toutefois qu'ils crussent que je pusse les nourrir dans le desert ,
ni les mettre en possession de la terre que je leur avois promise.
■^ 10. C'est ce qu'exprime la force du mot grec
Ibid. Dit Dieu dans le m^me endroit. — A la leltre, selon la ponctuation
du grec et du latin : oii ils virent les grandes choses que je fis pendant qua-
rante ans, C'est jiourquoij'ai supporte ce peuple avec degout , et j'ai dil, etc.
Mais quelques manuscrits grecs omeltent ici \a con]oncUon ptvpter c/uod, et
reunissent ces mots: J'ai supporte ce peuple avec degout pendant quarante
ans, etc. C'est ainsi qu'il se lit dans le psaume ; et la suite suppose cette le^on.
Infr.il'].
Ibid. Ils ne veulent point suivre celles que je leur ai marquees, ni secon-
fier en mes paroles.
ill. Le saint Apotre expliqiie lui-menic auchapitre suivant y 3 serfq. ce
qu'il entend par ce repos.
CHAPITRE III.
3l.
la. Videte, fratres, ne
forte sit in aliquo ves-
trum cor malum incredu-
litatis, discedendi a Deo
vivo :
i3. Sed adhortamini
vosmelipsos per siogulos
dies, donee Hodie cogno-
minatur, ut non obdure-
tur quis ex yobis fallacia
peccati.
i4> Participe? enim
Christi effccti sumus : si
tamen initium substan-
tiae ejus usque ad fineui
Hrmum retineamus :
1 5. Dum dicitur : Ho-
die si Tocem ejus audie-
ritis, nolite obdurarecor-
da vestra , quemadmo-
dum in ilia exacerbatione.
16. Quidam enim au-
dientes exacerbarerunt ,
«ed non universi quipro-
fecti *unt ex .Egypto per
Moysen.
17. Quibus autem in-
fensus est quadraginta
annis ? nonne illis qui
1 i.Prenezdonc garde, mes freres,
que quelqu'un de vous ne tombe
dans un dereglement de cceur et
dans une incredulite qui le separe
du Dieu vivant.'
1 3. Mais eihorlez-TOUS chaque
jour les uns les autres ,' pendant
que dure ce temps que I'Ecriture
appelle Aujourd'hui', de peur que
quelqu'un de vous etant seduit par
le peche, ne tombe dans Tendur-
cissement;'
i4- Car il est vrai que nous som-
mes entres dans la participation de
Jesus-Christ, pourru que nous
conservions inviolablement jusqu'a
la fin le commencement de I'ltre
nouTcau qu'il a mis en nous,'
i5. Pendant que Ton nous dit ;
Aujourd'hui , si vous eniendez sa
voix, n'endurcissez pas vos coeurs,
comm^ il arrira au lieu de la con-
tradiction.'
16. Car quelques-uns de ceux '
qui I'enlendirent ' irriterent Dieu
par leurs contradictions; ' mais cela
n'arriva pas a tons ceux que Moise
avoit fait sortir de I'Egypte/
17. Et qui sont ceux que Dieu
supporta a?ec peine ' durant qua-
ranteans, sinon ceux qui avoient 2v^ufl,,xiT.3.
y 12- G>miii€ ce people rebelle fut exclus de la terre promise , a cause de
ses incrpdulites.
T^ i3. Encouragez-vous mutuellement a persevercr dans la foi que rous
avcz embrassee, el a demeurcr fortement altaches k Dieu.
Ibid. C'est-a-dire le temps de notre vie.
Ibid. Et qu'ainsi il ne soit exclus du repos que nous attendons, el que nous
aurons en effet, si nous deraeurons fideles a notre Tocation.
T 14. Le pronom ejus n'est pas dans le grec.
Ibid. Demeurant fermes dans la foi qu'il nous a annoncee, el dans la jus-
tice qu'il nous a communiquee.
y i5. Autr. au temps de la conlradiction.
J 16. Vojez ce qui est dil de ce texle dans I'analysjS.
Ibid. CeUcvoix.
Ibid. Leurs desoboissances et leurs munnnres.
Ibid. II n y euld'exceplesque Caleb el Josu6. Voyez Panalysv.
T '7- Vovcz sur le y 10.
3i6
KPITUE DK SAINT PALL \UX HKBREUX.
p6che, dont les corps deuieur^-
rent etendus dans le desert ?
i8. Et qui sont ceux ^ qui Dieu
jura qu'ils n'entreroient jamais
dans son repos, sinon ceux qui
n'obeirent pas' i sa parole ?
19. En effet, nous voyons qu'ils
we purent y entrer , a cause de leur
incredulite.'
peccaverunl, quorum oa-
davera prostrata sunt in
deserto?
18. Quibus autem ju-
ravit non Introire in re-
quiem ipsius, nisi iliis
qui increduii fuerunt ?
19. Et videmus, quia
non potuerunt introire
propter incredulitatem.
■^ rS. G'esl le sens du grec.
^ 19. Car ils moururent presque tous dans le d&ert.
CHAPITRE IV.
L'ApAlre 'continue d'exhorler les Hebreux k s'affermir dans la foi. il leur
montre les consequences qu'ils doivenl tirer du texte qu'il vient de citer. 11
excite leur vigilance, et ranime leur confiance.
Ps. xcir. I
1 . GaAiGNONs done que , negli-
geant la promesse qui nous est
faite d'entrer dans le repos de Dieu,'
il n'y ait quelqu'un d'entre vous
qui en soit exclus. '
2. Car on nous I'aannoncee aussi
bien qu'Aeux; maisla parole qu'ils
entendirent ne leur servit de rien,
n'etant pas accompagnee de la foi
dans ceux qui I'avoient entendue.'
3. Pour nous qui avons cru ,
nous entrerons dans ce repos ,'
I . selon qu'il est dit : J'ai jure dans ma
colore qu'ils n'entreront point dans
mon repos, ' repos oii il est entre
1. TiMEAMTJs ergo ne
forte relicta poUicitatione
introeundi in requiem
ejus, existimetur aliquis
ex vobis deesse.
2. Etenim et nobis
nuntiatum est , quemad-
modum et illis : sed non
profuit illis sermc audi-
tus , non admistus fidei
ex iis quae audierunt.
3. Ingrediemur eniiTi
in requiem , qui credidi-
mus : quemadmodum
dixit : Sicut juravi in ira
mea : Si introibunt in
•^ t. Dontcelui de la terre proniise n'etoit que Tombre et la iigure.
fbj'd, Litt. qui paroisse en Atre exclus. Ou selon le grec aulreraent j qui
veuille en 6tre exclus.
y u . C'est le sens du grec.
y H. Ce repos donl l(s incredulcs seronl exclus.
CHAPITRB IV.
3.7
h
requiem nieain : vl qui-
dem operibus ab institu-
lione muadi perfectis.
4. Dixit eniui in quo-
dam loco de die septima
sic : Et requievit Deus die
septima ab omuibus ope-
ribus suis.
5. £t iu isto rursum :
Si introibunt iu requiem
meam.
6. Quoniam ergo super-
est introire quosdam in
illam , et iiquibus priori-
bus annuntiatum est, non
introierunt propter incre-
dulitatem :
7. Iterum terminat
diem quemdam, Hodie,
in David dicendo, post
lantum temporis, sicut
supra dictum est : Hodie
si vocem ejus audieritis,
nolite obdurarecordayes-
tra.
8. Nam si eis Jesus re-
quiem praestitisset, nun-
quam de alia loqueretur
posthac die.
apr^s avoir acheve ses ouvrages
dan.s la creation du raonde. '
4- Car I'Ecriture, parlantdu sep-
tierae jour , dit en quelque endroit :
Dieu se reposa le septifeme jour,
aprfes avoir acheve ses ceuvres.
5. Et il est dit encore ici : lis
n'entreront point dans mon repos. '
6. Puis done qu'il faut que quel-
ques-uns y entrent , et que ceux a
qui la parole en fut premierement
portee n'y sont point enlres k cause
de leur incredulite ,'
7. Dieu determine encore un
jour particulier qu'il appelle Au-
jourd'hui , en disant, tant de temps ^'^"p''- »"• 7-
apres,' par la bouche de David ,
ainsi que je viens de le dire : Au-
jourd'hui si vous entendezsa voix,
n'endurcissez pas ros cceurs. '
8. Car si Josue' les avoit etablis
dans ce repos / I'Ecriture n'auroit
jamais parle d'un autre jour poste-
rieur.'
y 3. Le repos dont Dieu parte en cet endroit est le mdme que celui dans
lequel il est entre apres avoir acheye I'oeuvre de la creation.
•f 5. Ainsi ce repos , dans lequel les incredules n'entreront point , etanf
appel^ le repos de Dieu , est sans doute celui dans lequel il pst entr^ lai-
mime, apres avoir acher^ loutes ses ceuvres.
■f 6. Parce que le repos que les Israelites ont trouve dans la terre promise
n'est pas celui dont nous parlons.
y 7. C''est-i<iire apres Ten tree des Juifs dans la Palestine.
fbid. Ce qui fait voirqu'il y a encore aujourd'hui un repos que Dieu nous
propose , et qui est bien different de celui que les Juifs ont trouve dans la
lerre promise.
y 8. A la lettre, Jesus : c'est ainsi que Josue est nomme dans la version
grecque des Septante.
• Ibid. En les mettanten possession de la lerre sainle.
/6m/. Jour dans lequel elle nous exhorte si ne pas endurcir nos cteurs, de
fpur d'Alre exilus du re[o» de Dieu.
3i8
EPITRE DE SAIKT PAUL AUX HEUREUX.
9. Aiosi il est reserve un autre
sabbat'au vrai peuple de Dieu.'
10. Car celui qui est entre dans
le repos de Dieu se repose aussi
lui-ineme , en cessant de travailler,
comrne Dieu s'est repose apres ses
ouvrages. '
11. Hutons-nous' done d'entrer
dAns cc repos,' de peur que quel-
qu'un ne tombe dans une des-
obeissance semblable a celle de ces
incredules.
12. Car la parole' de Dieu est vi-
vifiante etefficace, etelleperceplus
qu'une epee a deux tranchans : elle
entre et penetre jusque dans les
replis de I'ame et de I'esprit, jus-
que dans les jointures et dans les
inoelles; et elle demele les pensees
et les mouvemens du coeur.
Ps.xixii.iG. *^* Nulle creature ne lui est ca-
Eccli.xv. 20. chee; car tout est 11 nu et a decou-
vert devant les yeux de celui dont
nous parlous.'
14. Ayant dotic pour grand pon-
tife Jesus Fils de Dieu . qui est
monte au plus haut des cieux, de-
meurons fermes dans la foi dont
nous avons I'ai^ profession.'
g. Ilaque relinquitur
sabbatismus populo Dei.
10 Qui enim ingressus
est in requiem ejus : etiani
ipserequievit ab operibus
suis, sicut a suis Deus.
11. Festineinus ergo
ingredi in illain requiem :
ut ne in idipsum quis in-
cidat incredulilalis exem-
plum.
12. Vivus est enim ser-
mo Dei, et elTicax , et
penetrabilior oinni gladio
ancipiti ret pertingens us-
que ad divisionein animae
ac spiritus, cou)pagum
quoque ac medullarum ,
et discretorcogitationum
et intentionum cordis.
1 5. Et non ulla crealu-
ra invisibilis in conspectu
ejus : omnia autem nuda
et aperta sunt oculisejus,
ad quern nobis scrmo.
i4- Plabentesergo pon-
tificem magnum, qui pe-
netravit coelos , Jesum
fdium Dei : tenenmus
confessionem.
•^ 9. Un autre repos.
Ibid, G'esl-a-(lire aux Chretiens, dont le peuple juif n'etoit que la figure.
I's iloivent se roposer apres les travaux de cetle vie, conime Dieu s'est repose
lui-mdme apres I'ouvrage des six jours.
y^ I o. Celui qui veut entrer dans le repos de Dieu, doit s'abslenir de toutes
les ceuvres du vieil homme. Yoyez les -^^ suivans.
y^ II. Grec : effor^ons-nous done.
Ibid. Par noire altacliemenl a la foi, et noire fidelile a Jesus-Glirisf.
if 11. L'expression du grec : o Xo'-^o; signifie en m^rae temps la parole ou
le Verbe de Dieu. Voyez le -^ suivant et I'analyse.
•^ i3. C'esl-a-dire de Jesus-Clirist , qui est la parole substanticlle du
Pere, son Verbe elernel , el en menu; temps I'apblre el le pontife de la reli-
gion que nous profeJssons.
T^ 14. Et si nousa\ons ele asscz malheurcux pour lomber dans quelqiie infi-
delile a son egard, relevons-nous an plus lot en recourant au sacrement dc pe-
nitence, et relournons a lui aver confianre , etanl persn.idf's qu'il aura pillc d«
nous, et nous fera miserirorde.
1 5. Non eniin liaheiniis
Ponlificein qui non possit
coinpali infirmilatibiis
nostris : tentatiiin aiitem
per omnia pro similitudi-
ne absque peccalo.
i6. Adeainus ergo cum
fiducia ad thronum gra-
tise : ut misericordiam
consequamur, et gratiam
inveniaraus in auxilio op-
portuno.
CHAPITRE lY. 3l 9
i5. Carle Pontile que noiisavons
n'est pas tel qu'il ne puissc compa-
tir a nos foiblesses ; mais il a eprou-
vecomme noustoutes sorles deten-
tations , hormis lepeche. '
i6. Allons done nous presenter
avec confiance devant le trone de
sa grace,' afin d'y recevoir mise-
ricorde^ et d'y trouver ie secours
de so grace dans nos besoins. '
y 1 5. Autr. mais 11 a ele lenle et e'pwnue'de m^me que nous en toutes ma-
il ieres, sans etre ne'atwiouis sujci au peche.
y i6. Litl. devant Ie tr6ne de la grace : c'est-i-dire devanl le lr6ne du Fere
des misdricordes, aupres de qui nous avons acces par Jesus-Christ.
Ibid. Litl. et d'y trouver grace pour dtre secourus dans nos besoins.
CHAPITRE V.
Jesus-Christ est vraimenl notre pontife : comment cette qualite lui cOnvient
et lui appartient. L'Apotre reproche aui Hebreux , a qui il ecrit, leur
peu de disposition 4 entrerdans rinlelligencedes grandes verites de la re-
ligion.
1. Omm? namqiie pon-
lifex ex hominibus as-
sumptus, pro hominibus
constituilur in iis quae
sunt ad Deum, ut offerat
dona et sacrificia pro pec-
catis :
2. Qui condolere pos-
sit iis qui ignorant el er-
rant : quoniam et ipse
circumdatus est infirmi-
tate,
1. Car' tout pontife est pris d'en-
tre les hommes et est etabli pour
les hommes , en ce qui regarde le
culte de Dieu, afln qu'il offre des
dons et des sacriGces pour les
peches ,
2. Et qu'il puisse etre louche de
compassion' pour ceux qui pechent
par ignorance etparerreur, comme
etant lui meme environne de foi-
blesse.
y I. L'Apotre prouve ce qu'il a dit, que le pontife que non« avon< n'est pas
tel qu'il ne puisse comptir a nos foiblesses.
y a. Autr. d'une juste compassion. C'cst Ie sens du grec.
320
EPITUE DE SAINT PALL AUX HEBREUX.
3. (Etc'estce quiroblige tl'offrir
pour lui-mSme, aussi-bien que pour
lepeuple, les sacrifices pour I'ex-
piation des peches ) ;
Exod.xxvin. 4* Et nul ne s'attribue a soi-meme
I, cet honneur ; mais il faut y etre ap-
i.Par.hxxvi. pele de Dieucomme Aaron.
i8.
5. Ainsi Jesus-Christ ne s'est
pointeleve de lui-menie a la dignite
de souverain pontife; mais il I'a
Psal. cix. 4. repue de celui qui lui a dit : Yous
etes mon Fils, je vous ai engendre
aujourd'hui :
6. Cornme il lui a dit dans un
Psal. n. 7, autre endroit : Vous gtes le pretre
eternel selon I'ordre de Melchise-
dech :
n. Aussi durant les jours de sa
chair, ayantoffert, avec un grand
cri et avec larines, ses prieres et
ses supplications i celuiqui pouvoit
le tirer de la raort ,' il a ete exauce
de son humble respect pour son
Pfere.
8. Et quoiqu'il fat le Fils de Dieu,
il a appris I'obeissance , par tout ce
qu'il a souffert.'
g. Et par sa consommation il est
devenu I'auteur du salut eternel
pour tous ceux qui lui obeissent ,
lo. Dieu I'ayant declare pontile
selon I'ordre de Melchisedech.
3. Et propterea debet ,
quemadmodum pro popu-
lo,ita etiam et pro semet-
ipso ofFerre pro peccalis.
4. Nee quisquam su-
mit sibi honorera , sed
qui vocatur a Deo , tam-
quam Aaron.
5. Sic et Christus non
semetipsum clarificavit ut
pontifex fieret : sed qui
locutus est ad eum : Fi-
lius mens es tu, ego ho-
die genui te :
6. Quemadmodum et
in alio loco dicit : Tu es
sacerdos in aeternum se-
cundum ordinem Melchi-
sedech.
;;. Qui in diebus carnis
suae, preces supplicatio-
nesque ad eum qui possit
ilium salvum facere a
morte, cum clamore va-
lido et lacrymis offerens ,
exauditus est pro sua re-
verentia.
8. Et quidem cum es-
set Filius Dei, didicit ex
iis quae passus est obe-
dientiam :
9. Et consummatus ,
factus est omnibus ob-
temperantibus sibi causa
salutis eeternae,
10. Appellatus a Deo
pontifex juxta ordinem
Melchisedech.
•^ 7. Le ressusciter.
■^ 7 et 8. Autremenl;, et selon legrec : De plus il a etc environn4 defoi-
blesse et diiifirmite, et il est devenu comjuuissant a nos miseres par ses souf-
frances. Carnous voyons que dans les jours de sa chair, ayant offert avecun
grand cri et avec larmes ses prieres et ses supplications a celui qui pouvoit le
tirer dela morl, etayanl etc exauce a cause de son bumble respect /wwr son
Pere, quoiqu'il fiit le Fils de Dieu, il a appris ce que coutoit I'oWissance , par
tout ce qu'il a souffert ^owroArYr a son Pere; et I'tant entrf, etc.
1 1. Dequo nobis gran-
dis serino et ininterpreta-
bilis ad dicendutn : quo-
niatn imbecilles facti estis
ad audiendum.
13. Etenim cum debe-
relis magistri esse propter
tempus : rursum indigetis
ut vos doceamini quae sint
elementa exordii seriuo-
nuin Dei : et facti estis
quibuslacte opus sit, non
solido cibo.
i3. Omnis enim qui
lactis est partlceps , ex-
pers est serraouis justi-
liae : parvulus enim est.
i4> Perfectorumautem
est solidus cibus : eorum
qui pro consuetudine ex-
crcitatos habent sensus
ad discretionem boni ac
mali.
HAPITBET. 32 1
1 1 . Sur quoi nous aurions beau-
coup de choses a dire , mais qu'il
est difficile' de bien expliquer,
parce que vous vous etes rcndus
peu capables de les entendre.
12. Car au lieu que, depuis le
temps qu'on vous instruit, vous
devriez dejii etre maitre , vous
auriez encore besoin qu'on -vous
apprit les premiers elemens par oii
I'on commence d'expliquer la pa-
role de Dieu ; et vous gtes devenus
comma des personnes a qui on ne
devroit donner que du lail, et non
une nourriture solide.
i5. Or, quiconque n'est nourri
que de lait est incapable d'entendre
les discours de la justice,' comrae
etant encore enfant.
i4' Mais la nourriture solide'
est pour les parfaits, pour ceax
dont I'esprit, par un long exercice,
s'est accoutume a discerner le bieu
el le mal.
y 1 1 . C'est le sens du grec.
y i3. C'est-a-<lire les discours qui re§ardent le principe el la source de la
vraie justice. Voyez ranalyse.
y^ 14. La connoissance des grands mysteres dela religion.
CHAPITRE VI.
L'Apolre exhorte les Hebreui a s'elever avec lul aux grandes v^rit^s dont
il doit les iastniire; et il leur fait sentlr le danger de I'apostasiei laquelle
les conduisoit leur affoiblissementdansia foi. II ranime leur confiance, el il
eicile leur zele el leur oarage par le molif de I'espcrance dont il lear
montreles fondemens inebranlables.
I . QriPROPTER inter-
mittentes inchoatioriis
Christi sermonem , ad
perfectiora feramur , non
1. QciTTjiyr doncles instructions
que Ton donne a ceux qui ne font
que de coinmencer a croire en Je-
gus-Cbrist , passons a ce qui est
31
322
EPITRE «E SAINT PAUL AUX IIEBREUX.
Ic plus parfait, sans nous arreter
a etablir de nouveau ce qui n'est
que le fondement de la religion,
comme est la penitence des oeuvres
rnortes, lafoi'en Dieu,
2. Et ce qu'on enseigne touchant
les differentes sortes de baptemes,"
I'imposition des mains, la resur-
rection des morts , et le jugement
elernel.
3. C'est aussice que nous ferons,
si Dieu nous le permet.
3Iait.xu.f^5. 4- Car il est impossible que ceux
Infr.x.iQi. qui ont ete une Ibis eclaires," qui
i.Petr. 11.28. ont goute le don du ciel ," qui ont
ete rendus participans du Saint-
Esprit ,"
5. Qui sesontnourris dela sainte
parole de Dieu et de I'esperance
des grandeurs du siecle a venir,
6. Et qui apres cela sont tom-
bes ;' il est impossible qu'ils se
renouvellent par la penitence;"
parce que, autant qu'il est en eux,
ils crucifient de nouveau le Flls de
Dieu, et I'exposent a I'ignominie.'
rursum jacientes funda-
mentum poenitentiae ab
operibus raortuis , et fidei
ad Deura,
2. Baptismatum doc-
trinae, impositionis quo-
que manuum, ac resur-
rectionis mortuorum, et
judicii seterni.
5. Et hoc faciemus, si
quidem permiserit Deus.
4. Impossibile estenim
eosqui semel sunt illumi-
nati, gustaverunt etiam
donmn coeleste, et parti-
cipes facti sunt Spiritus
Sancti ,
5. Gustaverunt nihilo-
niinus bonum Dei ver-
buni, virtutesque seculi
venluri ,
6. Et prolapsi sunt :
rursus renovari ad poe-
nitentiam , rursum cru-
cifigenles sibimetipsis Fi-
lium Dei , et ostentui
habentes.
•jj^ I. Des pcches commis avanl le bapt^me.
jja. Ou simplement : touchant le bapteme. Quelques manuscrits lisent
ainsi ; saint Augustin litdememe. En supposant que ce soient les baptemes ,
cela s'enlendde la difference qu'il y avoit enlre le bapt^mc de Jesus-Christ
et les autres baptemes ou lustrations pratiquees chez les Juifs et chez les
gentiis.
y-4. Qui ont recu la lumiere de la foi dans le sacrement de dapt^mc.
Ibid. Dans la Ires sainte eucharistie.
Ibid. Dans la confirmation.
y^fi. Dans I'apostasie, ou dans quelque autre peche mortel.
Ibid. C'est-a-dire par un second bapteme , qu'ils recouvrenl par ce sacre-
ment cette nouveaute de vie qu'ils y avoient recue.
Ibid. Le bapleme etant une parfaite image de la mort et de la resurrection
de J^sus- Christ, il ne peut elre donne qu'une fois, comme Jesus-Christ n'est
mort et ressuscile qu'une fois ; et il faudroit , pour le reiterer, que Jesus-
Christ mourut de nouveau ; en sorte qu'on peut dire de ceux qui en perdent
la grace par leurs crimes, qu'autant qu'ils peuvent ils crucifient de nouveau en
eux-m6mes le Fils de Dieu, et I'exposent encore a I'ignonomie de la croix ,
puisqu'ils le metlent dans la nccessite de subir une seconde fois ce honteux
'•. Terra eiiiiu stepe
venientem super se bi-
bensimbrem, et generans
herbam opportunam iliis
a quibus colitur , accipit
benediclionem a Deo :
8. Proferens autein
spinas ac tribulos, repro-
ba est , ct maledicto pro-
xima : cujus consumma-
tio in combustionem.
9. ConOdimus autem
de vobis, dilectissirai ,
meliora , et viciniora
saluti : tametsi ita loqui-
mar.
10. Non enim injustus
Deus, ut obllviscatur 0-
peris vestri, et dilectiouis
quam ostendistis in no-
mine ipsius, qui minis-
trastis Sanctis, et minis-
tratis.
11. Cupimus autem
unumquemque vestrum
eamdem ostentare solli-
CHAPITRE VI. 323
7. Car lorsqu'une terre, etant
souvent abreuvee des eaux de la
pluie qui y tombe , produit des
herbages propres a ceux qui la cul-
tivent, elle recoit la benediction
de Dieu : '
8. Waisquand elle ne produit que
des ronces et des epines , elle est
abandonnee, elle est proche de la
malediction ; et a la fiu on y met
le feu.
9. Or, DOusayoDSune meilleure
opinion de tous et de voire salut,
mes tres chers freres, quoique
nousparlioDs de cette sorte.
10. Car Dieu n'est pas injuste
pour oublier tos bonnes oeuvres,
et la charite ' que vous avez temoi-
gnee par les assistances que yous
avez rendues en son nom , et que
vous rendez encore aux saints.
1 J. Or, nous souhaitons que
chacun de vous fasse paraitre jus-
qu'a la fm le meme zele, afin que
sapplice , pour leur redonner cette premiere innocence qu'il leor avoit com-
muniquee. etqu'ils perdent ainsi ptarleurs peches. Mais comme Jesus-Christ
ne peut plus mourir, ils ne peuvent plus aussi la recouvrer dans le sacremeol
de bapteme ; el ainsi, s'ils n'ont recours au bapteme laborieux de la penitence,
ils n'ont k altendre que la malediction de Dieu et le feu de I'enfer, pour les
punirdeleur ingratitude, et du mauvais usage qu'ilsont fait de la grace qu'ils
avoient reque. Ainsi il seroit inutile de nous arrdter a vous instruire deces
premiers principes de la religion chrelienne , comme si nous voulions tous
disposer de nou\eau a recevoir la grace du bapteme :• on ne la recoit qu'unc
fois ; et on ne la recouvre plus , si on est ensuite assez roalheureux pour la
perdre. — Autr. il est impossible, dis-je, qu'ils se renouvellent par la peni-
tence, par une penitence semblable a celle qui prepare au bapteme^ en cru-
ciflant de nouveau dans eux {ou pour eux) le Fils de Dieu par un second bap-
teme, et I'eiposant en cjuelque sorte i I'ignominie en rendani me'prisable par
cette reiteration meme V application de ses mysteres. Cette penitencequi dis-
posoit au bapteme est marque dans I'epltre aux Galates, 111 . i . Voy&c cc qui
a e!e dit de ce texte dans Tanalyse.
y 7 . Aulr. on I'appelle une terre benie de Dieu.
y- 10. Le grec imprime lit : et le travail dela charite. Mais les plusanciens
et les meilleurs manoscrits grecs sont conformes a la Vulgate.
324 EpItRE DE Saint PAUL AUX HEBREUX
voire esperance soit accomplie ;'
12. Et que vous ne soycz pa?
lenls et paiesseux; ' mais que vous
vous rendiez les iinitaleurs de ceux
qui, par ieur foi et par leur pa-
tience, sont devenus' les heritiers
des promesses.'
i5. Car Dieu, dans la promesse
qu'il fit a Abraham, n'ayant point
de plus grand que lui par qui il pQt
jurer, jura par lui-meme.
Gen.xxu.i6. i^. Lui disant : Assurez-vous
que je vous coniblerai de benedic-
tions , et que je inultiplierai beau-
coup votre race.
i5. Et ainsi Aljraham ayant at-
tendu avec patience, a obtenu
I'effet de cette promesse.'
16. Car comme les hommes ju-
rent par celui qui est plus grand
qu'eux, ct que le sernient est la
plus grande assurance qu'ils puis-
sent donner pour terminer tous
leurs diirereus,
17. Dieu, voulantaussi fairevoir
avec plus de certitude , aux heri-
tiers de sa promesse, la fermete
immuable de sa resolution, aajoute
le serment a sa parole,
18. Afin qu'etant appuyes sur ces
deux choses inebranlables, ' par
lesquelles il est impossible que
Dieu nous trompe , nous ayons
une puissante consolation, nous
citudinem ad expletioneila
spei usque in finem :
12. Ut non segues ef-
ficianiini, verum imitato-
res eorum qui fide et
patientia hereditabunt
promissiones.
i3. Abrahse namque
promiltens Deus, quo-
uiam neminem habuit per
quem juraret majorem,
juravit per semetipsum ,
14. Dicens : INisi bene-
dicens benedicam te, et
multiplicans multiplicabo
te.
i5. Et sic longanimiter
ferens, adeptus est re-
promissionem.
i(). Homines enim per
majorem sui juraut : et
omnis controversias eo-
rum finis, ad confirma-
tionem, est juramentum.
17. In quoabundantius
volens Deus ostendere
pollicitationis heredibus
immobilitatem consilii
^ui, interposuit jusjuran-
dum :
18. Ut per duas res
immobiles, quibus im-
possibile est mentiri
Deum, fortissimum so-
latium habeamus , qu i
y- 1 1 . Gr. autr. soit forme et assuree.
y^ 1 2. A vous avancer dans la connoissance, et dans la pratique des veritea
chretiennes. C'esl ce que I'Apotre prouvera au chap. xi.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Que Dieu avoit faites a Abraham, el qu'il avoit contirm^es, en Jurant
par lui-m^me.
^ r5. La naissance d'Isaac qui devoit ^tre le chef de la po»terit<^ nom-
breusequilui avoit ele promise. Gen. xxi. i.
■^ 18. La parole el le serment de Dieu.
CHAPITRK YI.
3a5
confugiinus ad teoendam qui avons mis notre refuge dans la
propobitam spein :
19. Quam sicut ancho-
ram haljerau« animae tu-
tam ac firmam, et ince-
dentem usque ad interio-
ra Teiaiiiinis :
ao, Lbl praecursor pro
nobis introivit Jesus , se-
cundum ordinem Mel-
recherche et I'acquisilion des biens
qui nous sont proposes par I'espe-
rance ,
19. Laquelle sert u notre ame
comme d'une ancrc ferme et assu-
ree ,' et qui penelre ju$(]u'aii sanc-
tiiaire qui est au dedans du voile,'
20. Oii
Jesus, comme notre
precurseur, est entre pour nous,'
ayant ete elablis ponlife eternel,
chisedech poutifcx Cactus selon I'ordre de Melchisedech. '
in aeternum.
y 19. Qai la rend inebranlable au milieu des troubles et des agttatious de
cette Tie.
Ibid. C'est-i^iire jusqu'au sein de Dieu, ou elle nous lient attaches.
y ao. AGn d'y preparer le lieu de notre repos Eternel , et pour »'j offrir
Mternellement en sacrifice pour noos.
Ibxl. Dont le sacerdoce est Eternel .
CHAPITRE VII.
Caracteres de Melchiscdecb, dont le sacerdoce est le svmbole du sacerdoce de
Jesus-Christ. Cbangement du sacerdoce levitique etdelaloi mosaique ,
fonde sur leurinsufOsance. Excellence de ralliance nouvelle , et de Jcsus-
Christ , qui en est le mediateur par son sacerdoce. Jesus-Christ est un
pr^lresaintct immortel.
1- Hic enim Melchise- 1. Car ce Melchisedech, roi de Gen. xiv. i!
dech, rex Salem, sacerdos Salem ,' pretre du Dieu tres haul
Dei summi, qui obviavit qui vint au-devant d'Abraham lors-
Abrahae regresso a caede qu'il retournoit de la dcfaite des
regum, et benedixit ei : rois, et qui le benit,
2. Cui et decimas om- 2. Auquel aussi Abraham donna
nium dirisit Abraham : la dime de lout'; ce Melchisedech
primum quideui qui in- qui s'appelle ', selon I'interpreta-
y r. C'est-a-direde Jerusalem.
T a- De lout ce qu'il atoit pris sur las rois Taincus.
r a et 3. Gr. autr. il s'appelle, etc., il paroil sane pefe, «ic., «t il a'a,«te. .
326
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
Deut.xv\ii.?t
Jos. XIV. 4.
lion de son nom, premierement
roi de justice/ puis roi de Salem,
c'est-a-dire roi de paix,'
5. Sans pere, sans mere, sans
genealogie ;" qui n'a ni commence-
ment, ni fin de sa vie, ctant ainsi
I'image du Fils de Dieu , demeure
pretre pourtoujours.
4- Considerez done combien
grand il doit etre , puisque le pa-
triarche meme Abraham lui donna
la dime de ses depouilles.
5. II est vrai que ceux qui , etant
de la race de Levi, entrent dans le
sacerdoce, ont droit, selon la loi ,
de prendre la dime du peuple ,
c'est-a-dire de leurs (Veres, quoi-
queceux-ci soient sortis d' Abraham
aussi bien qu'eux.
6, Mais celui qui n'a point de
place dans leur genealogie' a pris
la dime d' Abraham , el a bcni ce-
lui a qui les promesses ont ete
faites.'
terprelatur rex justitiae :
deinde autem ct rex Sa-
lem , quod est rex pacis :
3. Sine palre , sine
matre , sine genealogia ,
neque initium dierum,
neque finem vitaj habens ,
assimilatus autem Filio
Dei, manet sacerdos in
perpctuum.
4. Intuemini autem
quantus sit hie , cui et
decimas dedit de prseci-
puis Abraham patriarcha.
5. Et quidem de filiis
Levi sacerdotium acci-
pienles , mandatum ha-
bent decimas sumere a
populo secundum legem ,
id est, a fratribus suis :
quamquam et ipsi exierint
de lumbis Abrahae.
6. Cujus autem gene-
ratio non annumeratur in
eis , decimas sumpsit ab
Abraham, et hunc qui
habebat repromissiones ,
benedixit.
etant ainsi I'image du Fils de Dieu, qui demeure pretre pour toujours. II est
tres ordinaire aux H^breux de sous-entendre ainsi le pronom (juij si 1 on ne
s'en aperQoitpasdansles versions, c'est que communement les versions I'ex-
priment, lors m^me qu'il n'est pas exprime dans le texte. Ainsi dans le grec
de I'epitre aux fiphesiens, 1 1. 5.; on lit • Dieu nous a rendu la vie en Jesus-
Christ, par la grace duquel vous etes sauves : cujus gratia estis salvati ; ce
cujus n'est pas exprime dans le grec. Voyez la Dissertation sur Melchise'-
dech, torn, i" .
i 2. Melchisedech est compose des deux mots hebreux "^70 et p-jy qui
signlfient le premier roi, et le seconde yMsa'ce.
Ibid. Salem est le mot hebreux qV^ schalem, qui signifie paix.
-^3. L'ecriture garde un silence remarquable touchant I'origine de Mel-
chisedech, sa vie et sa mort.
•5^ 6. Etqui n'est point deleur tribu.
Ibid. C'est en cela m^me que parott davanlage la grandeur de Melchise-
dech ; et c'est ce qui montrc clairement combien il est au-dessu» des levites.
f. Sine ulla autem
< ontradictione, quod mi-
nus est, a meliore bene-
dicitur.
8. Et hie quideni deci-
mas "inorientes homines
accipiunt : ibi autem con-
testatur, quia Ti?it.
CHAPiTRE VII. 827
7. Or, il est sans Joule' que ce-
lui qui recoit la benediction est in-
lerieur a celui qui ia donne.'
Et ( ut ita dictum
per Abraham , et
8. Aussi dans la loi, ceux qui
recoirent la dime sont des hommes
mortels: mais celui qui la recoit
ici ' n'est represente que comme
vivant.
9. Et de plus. Levi, qui recoit la
dime des autres, I'a payee lui-me-
me, pourle dire ainsi, dans laper-
sonne d'Abraham ;
10. Puisqn'il etoit encore dans
Abraham son aieul, lorsque Mel-
chisedech vint au-devant de ce pa-
triarche.
1 1. Car si le sacerdoce de Levi,
sous lequel le peuple a recu la loi ,
aToit pu rendre les hommes justes
ptparfaits, qu'etoit-il besoin qu'il
se levat un autre pretre , qui fOt
sarium fuit, secundum appele pretre selon I'ordre de Mel-
ordinem Melchisedech chisedech, et non pas selon I'ordre
alium surgere sacerdo- d' Aaron ?'
tem, et non secundum
ordinem Aaron dici?-
12. Translate enim sa-
cerdotio, necesse est ut
9-
sit )
Levi, qui decimas accepit
decimatus est.
10. Adhuc enim in
lumbispatriserat, quando
obviavit ei Melchisedech.
11. Si ergo consum-
matio per sacerdotium le-
viticum erat ( populus
enim sub ipso legem ac-
cepit), quid adhuc neccs-
et legis translalio fiat.
10. In quo enim haec
12. Carle sacerdoce etant change,
il faut necessairement que la loi
aussi soit changee.'
i5. Car celui dont ces choses ont
y 7. Liu. sans contredit.
Ibid. Absi Abrabam est inferienr a Melcbisedecb ; et par consequent
Melcbisedecb est fort aa-dessus des levites.
y 8. Melcbisedecb.
y 10. Toutes ces circonslances relevent admirablement Melcbisedecb et
son sacerdoce , et font voir en m6me lemps que Jesus-Cbiisl, dont Melcbi-
sedecb n'etoil que la figure, est infiniment au-dessus d'Abrabam ; et que son
gacerdoceest infiniment au-dessus de celui des leTiles, qui sans doate ne pou-
yoitconduire les hommes a une justice aussi parfaite.
^11. ?«ous voyons que Dieu a ela Lli un autre pr^lre, qui est selon I'ordre
de Melcbisedecb ; que le sacerdoce de Levi selon I'ordre d' Aaron a cle aboli ;
la loi par consequent a dii ^tre aussi cbangee en meme temps que le sacer-
doce de Jesus-Christ , qui eat ce prfitre selon Tordre de Melcbis^ech , a ^te
etabli.
328
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBRELX.
dicunlur , de alia tribu
Psal. cix. \
tie predites' est d'une autre tribu,
dont nul n'a jamais ser?i a I'autel ;
14. Puisqu'il est certain que notre
Seigneur est sorti de Juda, qui est
une tribu a laquelle Moise n'a ja-
mais attribue le sacerdoce. '
i5. Et ceci *paroit encore plus
clairement, en ce qu'il s'eleve un
autre pretre selon I'ordre ' de Mel-
chisedech ,
16. Qui n'est point elabli par la
loi d'une succession charnelle /
mais par la puissance de sa vie im-
mortelle,'
17. Ainsique I'Ecriture le declare
par ces mots : Yous etes le pretre
eternel, selon I'ordre de Melchise-
dech.
18. Ainsi la premiere loi' est
abolie , a cause de sa foiblesse et
de son inutilile;'
19. Parce que la loi n'a Hen con-
duit a la perfection. Mais aussi une
meilleure esperance, par laquelle
nous nous approchons de Dieu, a
ete substituee en sa place.'
20. Et de plus,' ce sacerdoce'
est, de qua nuUus altari
praesto fuit.
14. Manifestum est
enim quod ex Juda ortus
sit Dominus nosier : in
qua tribu nihil de sacer-
dotibus Moyses locutus
est.
i5. Et amplius adhuc
manifestum est, si secun-
dum similitudinem Mcl-
chisedech exsurgat alius
sacerdos,
16. Qui non secundum
legem mandati carnalis
factus est, sed secundum
Yirtutem yitae insolubilis.
17. Contestatur enim :
Quoniam tu es sacerdos
in seternum, secundum
ordinem Melchisedech.
18. Reprobatio quidem
fit praecedentis mandati,
propter infirraitatem ejus,
et inutilitatem :
19. Nihil enim ad per-
fectum adduxit lex : in-
troductio vero melioris
spei , per quam proxima-
mus ad Deum.
20. Et quantum est non
y^ i3. A qui i! a ete dit: Vous eles pretre selon I'ordre de Melchisedech.
■^ Ik. Au lieu de de sacerdotibus , legreclit, de sacerdolio ; mais cela
rentre dans le meme sens.
y i5. Lilt, selon la ressemblance.
y^ 16. Commecelui d' Aaron, qui passe du pere aux enfans.
Ibid. Ce qui fait qu'il ne succede a personne , et que personne ne lui suc-
C(de, demeurant pretre pour Voujours.
y 18. Aulr. la premiere ordonnance ^oMc/irtnt le sacerdoce.
Ibid. Inefficacite pour le salut.
■jf^ 19. Parle sacerdoce de Jesus-Christ, qui nous donne , par I'abondance
desa grace, un acces libre et plus facile aupresdu Pere.
•^ 20. L'expression r/uantum dc ce versel repond h in tantum du ^aa.,
re que Ton pourroit exprimer ainsi a la leltre: Et d'aulant que ce sacerdoce
n'a pas elc etabli sans serment (car au lieu , etc., dc Melchisedech ) ; d'autant
I'alliance doni Jesus, elc.
*^ Ihid. Celui de Jesus-Christ.
CHAPURE VII. 329
sine jurejurando (alii qui- n'a pas ete etabli sans serment;
detn sine jurejurando sa- car au lieu que les autres pretres
cerdotes facti sunt
21. Hicautem cum ju-
rejurando, per euin qui
dixit ad ilium : Juravit
Dominus, et non pceni-
tebit eum : Tu es sacer-
dos in aeternum ) :
22. In tantum melioris
lesta^enli sponsor factus
est Jesus.
23. Et alii quidem
plures facti sunt sacer-
ont ete etablis sans serment ,
2 1 . Celui-ci I'a ete avec .«erment ;
Dieu lui ayant dit : Le Seigneur a Psai. cix. 4-
jure; et son serment demeurera ^
immuable : ' vous etes le pretre
eternel,'
22. Tant il est vrai que ralliance
dont Jesus est mediateur' est plus
parfaile que la premiere.
23. Aussi y a-t-il eu autrefois
successivement plusieurs pretres ,
dotes, idcirco quod mor- parce que la mort les empechoit de
te prohiberentur perma- I'etre toujours;
24. Mais comme celui-ci de-
meure eternelleraent , il possede
un sacerdoce qui est eternel,'
nere :
24- Hie autem eo quod
maneat in'aeternum, sem-
piternum habel sacerdo-
tium.
25. Unde et salvare in 25. C'est pourquoi il peut tou-
perpetuum potest acce- jours sauver ceux qui s'approchent
dentes per semelipsum de Dieu parson entremise, etant
toujours vivant pour interceder
pour nous. '
adDeum : semper vivens
ad interpellandum pro
nobis.
26. Talis enim decebat
ut nobis esset pontifex,
sanctus , innocens , im-
poUutus , segregatus a
peccatoribus et excelsior eleve que les cieux ,
ccelis factus :
27. Qui non habet 27. Qui ne fDt point oblige, Zci'. xti. 6.
necessitatem quotidie , comme les autres pontiles, ' d'of-
quemadmodum sacerdo- fiir tons les jours des yictimes,
les, prius pro suis delictis premierement pour ses propres
hostias offerre, deinde peches , et ensuite pour ceux du
26. Car il etoit convenable que
nous eussions un pontife comme
celui-ci, saint, innocent, sans ta-
che, separe des pecheurs, et plus
■)^ 21. Lilt, et il nc s'en repenlira pas.
Ibid. Legrec ajoute ces mots : selon I'ordre de Melcbis^ech.
-j^ aa. Lilt, le garant.
"i; a4 . Gr. litt. qui ne passe point, quin'estpas successif.
y 25. Gr. pour eux.
-^ 27. elaS. C'est Texpression du grec.
33o EPITUE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
peuple, I'ayant fait une fois en pro populi : hoc enim
s'offrant soi-mtMne/ fecit semel , seipsum of-
ferendo.
28. Car la loi etablit pourpon- 28. Lex enim homines
tifes' ties hommes pleins cle foibles- conslituit sacerdotes in-
ses : inais la parole de Dieu , con- firmitatem hahentes : ser-
firmee par Ic serment qu'il a fait mo autem jiirisjurandi ,
depuis la loi, etablit pour pontife le qui post legem est, Fi-
Fils, qui est saint et parfait pour Hum in aeternum perfec-
iamais. turn.
y^ 27. Toules ces excellentes qualiles , qui se Irouvent rcunies en Jesus-
Christ, noire souTeraia ponlife, font voir d'ane maniere admirable la diffe-
rence qu'ii V a entre les pretres de la loi ancienne et celui de la nouvelle al-
liance.
CHAPITRE VIII.
Excellence du sacerdoce de Jesus-Christ, qui, assisdans leciel aladroite de
son Pere , offre dans le sanctuaire celeste une viclime celeste. Insuffi-
sance de I'ancienne alliance prouvee par la promesse m^me d'une alliance
nouvelle.
1. Tout ce que nous venons de 1. CAPiTDLtiM autem
dire se reduit i ceci : " Que le pon- super ea quae dicuntur :
tife que nous avons est si grand , Talem habemus pontifi-
qu'il est assis dans le ciel a la droite cem , qui consedit in dex-
du trone de la divine majeste. tera sedis magnitudinis in
coelis,
2. Etant le ministre du sane- 3. Sanctorum minister,
tuaire, et de ce veritable tabernacle et tabernaculi veri , quod
que Dieu a dresse, et non pas un fixit Dominus, et non
homme.' homo.
5. Car tout pontife est etabli pour 5. Omnis enim ponti-
offrir des dons et des victimes : c'est fex ad offerendum mu-
pourquoi il est necessaire que ce- nera et hostias constitui-
y I . Gr. autr. Mais ce qui met le comble a tout ce que nous venons de
dire, c'est que, etc.
•^ 2. Bien different par consequent de celui dans lequcl entrent les pretres
de la loi , qui a etc dresse par Moise , et qui n'est que I'ombre et la figure de
celui-ci, dans lequel Jcsns-Christ exerce les fonctions de son ministcre.
cUAPiiKE vm.
33i
tiir : unde necesse al et lui k;i ait aussi quelque chose qu'il
iiunc habere aliquid quod puisse oflfrir.
iTerat.
4. Si ergo esset super 4- Si doncli n'avoit dQetrepre-
terrain, nee esset sacer- tre que sur la lerre, il ne rauroit
dos : cum esset sacerdos : point ele du lout, puisqu'il y ea
cum essent qui offerreut avoit deju d'etablis pour olTrir des
secundum lejiemmunera, dons selon la loi,
5. Et qui rendent en effeta Dieu
le cuUe qui consiste en des figures
et des ombres des choses du ciel :
ainsi qu'il fut dit a Moise , lorsqu'il
devoit' dresser le tabernacle :' Ayez
soin de faire tout scion le modele
ecundum exemplar quod qui vous en a ete montre sur la
tibi osteosum est in raon- montagoe.
5. Qui exeniplari et
umbrae deserviunt coeles-
tium , sicut responsum
est Moysi, cum consum-
maret tabernaculum : \ i-
ie, inquit, omnia facito
te.
6. Nunc autein melius
sortitus est ministerium,
quando et melioris testa-
menti mediator est, quod
in melioribus repromis-
sionibus sancitum est.
7. Nam si illud prius
culpa vacasset, uon uti-
6. iMais quant a notre pontife, il Exod.xx-v.^o
a obtenu une sacriflcature d'autant Jci.yu. 44.
plus excellente , qu'il est le media-
teur d'une meilleure alliance, et
qui est etablie sur de meilleures
promesses.'
7. Car s'ilo'y avoit rien eu dede-
fectueux a la premiere alliance,' il
■que secundi locus inqui- n'y auroit pas eu lieu d'y en sub-
reretur.
8. Vituperans enim eos
dicit : Ecce dies venient ,
dicit Dominus : et con-
-ummabo super domum
Israel , et super domum
Juda, testamentum no-
rum.
stituer une seconde.'
8. Et cependant Dieu parle ainsi, jer. xixi. 3i.
en blamant ceux a qui la premiere
avoit ete donnee : II viendra un
temps, dit le Seigneur, auquel je
ferai une nouvelle alliance avec la
maison d'Israel et avec la maison
de Juda.'
•fS. Cestle seusdu crec.
Ibid. Ou I'arche d'alliance devoit reposer.
■f6. La premier* alliance promettoit les biens de la terre pour recompen-
ser ceux qui en garderoient fidelement toutes les conditions ; au lieu que la
nouvelle alliance , en noos detachant des biens d'ici-bas , nous promet le^
biens du ciel et la possession deDieu merae. pour recompense de notre fidelite.
y 7. Gr. litt Si la premiere alliance avoit ele irreprehensible , qu'on n'eut
pu Y trouwer aucun defauL
Ibid. Litt. on n'auroit pas chercbe lieu a une seconde , on n'auroitpas
pense a y en subsliuter une seconde.
y 8. Aulr. com me avec la maison de Juda. La preposition et se prend
quelquefois pour ut; et la suite proure (y- 10. ) quececi regarde principale-
ment la maison d'Israel.
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
33a
9. Non selon I'alliance que j'ai
faite avecleurs peres, au jour oti je
les pris par la main pour les faire
sortir de I'Egypte ; parce qu'ils ne
sont point dcineures' dans cette
alliance que j'avois faite avec eux;
etc'est pourquoije les ai ineprises,
dit le Seigneur.'
10. Mais voici ralliance queje
ferai avec la maison d'Israel, apres
que ce temps-la sera venu, dit le
Seigneur : J'imprimerai mes lois
dans leur esprit,' et je les ecrirai
dans leur coeur; et je serai leur
Dieu , et ils seront men peuple ;
11. Et chacun d'eux n'aura plus
bcsoin d'enseigner" son prochain et
son frere , en disant : Connoissez le
Seigneur; parce que tous me con-
noilront, depuis le plus petit jus-
qu'au plus grand;
12. Car je leur pardonnerai leurs
iniquites, et je ne me souviendrai
plus de leurs peches.
i3. Or, en appelant cette al-
liance une alliance nouvelle , il a
montre que la premiere se passoit
et vieillissoit. Or, ce qui se passe
et vieillit est proche de sa fin.'
9. Non secundum tes-
tamentum quod feci pa-
tribus eorum, in die qua
apprehend! manum eorum
ut educerem illos de terra
vEgypti : quoniam ipsi
non permanserunt in tes-
tamento meo , et ego ne-
glexi eos, dicit Dominus.
10. Quia hoc est tesla-
mentum, quod disponam
domui Israel post dies
illos , dicit Dominus :
Dando leges meas in
mentem eorum, et in
corde eorum superscri-
bam eas : et ero eis in
Deum , et ipsi erunt mihi
in populum :
11. Et non docebit
unusquisque proximum
suum , et unusquisque
fratrem suum, dicens :
Cognosce Dominum :
quoniam omnes scient
me, a minore usque ad'
majorera eorum :
12. Quia propitius ero
iniquitatibus eorum, jam
non memorabor.
i3. Dicendo autem no-
vum , veteravit prius.
Quod autem antiquatur
et sencscit, prope interi-
tum est.
^ 9. C'est I'expression dcs Septante.
Ibid. Liu. je les ai neglig6s. C'est rexpression des Sepfanle. Voyez la note
8ur ce teste de Jerdmie.
» y^ 10. C'est Texpression des Septante.
y^ II. Litt. n'enseignera plus.
^ i3. Ainsi la premiere alliance a d6 finir , selon le lemoignage m^me de
I'EcrJture, et faire place a la seconde, qui est infinimenl plus parfaite.
r.H\PITKE IX.
3S3
CHAPITRE IX.
Insuffisance de Tanciea sacerdoce el perfection du sacerdoce nouveau prou'vees
par les ceremonies mdmes de I'ancien culte. ^Mediation de Jesus-Christ
fondee sur ce qu'il est cd meme lemps pr^lre et viclime. Necessite de la
morl de J^us-Christ. Prix infini de son sang.
1. Habuit quideni et
prius, justificationes cul-
turiE , et sanctum sccu-
lare.
2. Tabernacuiuin eniiii
factum est primum, in
quo erant candelabra, et
mensa, et propo.«ilio pa-
nutn, quaedicitur Sancta.
5. Post velamentum
autem secundum, taber-
naculum quod dicitur
Sancta sanctorum :
4. Aureum habeos thu-
ribuium , et arcani tesla-
menti circumtectam ex
omni parte auro, in qua
urna aurea habens manna,
et rirga Aaron , quai fron-
duei-at, et tabulae lesta-
menti :
1. La premiere aliiaDce a eu des
lois et des reglemens' touchant le
culte de Dieu , et un sanctuaire tcr-
reslre ; '
2. Car dans le tabernacle qui fut Exod. xxvi.
dresse, il y aroit une premiere x.xxxvi. 8.
partie oii etoit le chandelier, la
table, et les pains de proposition ;'
et cette partie s'nppeloit le Saint.
5. Apres le second voile,' etoit
le tabernacle appele le Saint des
Saints,
4. OCi il y aroit un encensoir Lev. xvi.
d'or, ' et I'arche de I'alliance cou- Num. xti.
verte d'or , dans laquelle etoient
une urne d'or pleine de manne, la
verge d'Aaron qui avoit fleuri, et 3.fleg^.vrii. 9
les tables de ralliance.' 2. Par.r. 10.
y I. Le mot justi/icationes s'employoit en ce sens, comme on le yoit par-
ticulierement dans lepsaume cxtiii.
Ibid. Materiel.
y 2. Qu'on ineUoil dessus pour dtre exposes devant le Seigneur.
■f 3. Lf premier voile etoit i I'entreedu Saint, el le separoitdu parrls; le
second voile separoil le Saint d'avec le Saint des saints.
y 4. Autr. ayanl au dehors et devant le voile un autel d'or, sur lequelon
offivil leparfum; eVau dedans rarche de I'alliance ; etc. Molse ne parle
point d'un encensoir d'or ; mais il parle de I'autel d'or qui ^toit Tautel des
parfums. Dans le grec il est aise de confondre le mot ftudistfrnfictcv qui signi-
fie autel. avec SuaiaTTpio'* qui signifie encensoir. Cel aatel etoit pres du ■voile
qui fermoit le sanctuaire. Exod. x\x. i . 3.6. xl. 5.24. Au reste , le grand-
pr^tre portoit un encensoir d'or lorsqu'il entroit une fois cbaque annee dans
le sanctuaire, elpeut-dtre qu'il le laissoit devant I'arche. Levit. xvi. 12.
Ibid. L'Ap6tre decrit ces choses comme elles Etoient dans le lab«macl«
334
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
5. Au-dessus de I'arche , il y avoit
des cherubins de gloire , qui cou-
vroient le propitiatoire ;" mais cc
n'est pas ici le lieu de vous en par-
ler en detail.
6. Or, ces choses etant ainsi dis-
posees, lespretresentroient en tout positis, in priori quidem
temps dans le premier tabernacle , tabernaculo semper in-
lorsqu'ils exercoient les fonctions
de leur ministere : "
Exod. XXX.
lO.
Lev. XVI. IS
5. Superque earn erant
cherubim gloriae obum-
brantia propitiatorium :
de quibus non est modo
dicendum per singula.
6. His vero ita com-
7. Mais le grand pontife seul
entroit dans le second , et une seule
fois I'annee , non sans y porter du
sang qu'il offroit pour ses igno-
rances ' et pour celles du peuple ;
8. Le Saint-Esprit nous montrant
par-la que la voie du vrai sanc-
tuaire , ' n'etoit point decouverte,
pendant que le premier tabernacle
subsistoit.
9. Et cela lueme etoit I'image de
ce qui se passoit en ce temps-la ,
pendant lequel' on offroit des dons
et des sacrifices qui ne pouyoient
purifier" la conscience de ceux qui
rendoient a Dieu ce culte, puis-
qu'ils ne consistoient qu'en des
viandes eten des breuvages,
10. En diverses ablutions, eten
des ceremonies charnelles,' et qui
n'avoient etc imposees que jus-
qu'au temps que cettp loi seroit
corrigee.'
1 1 . Mais Jesus-Christ , le pontife
troibant sacerdoles, sa-
crificiorum officia con-
sumnianles :
7. In secundo autem
semel inanno solus ponti-
fex, non sine sanguine,
quem ol'fert pro sua et
populi ignorantia :
8. Hocsignificante Spi-
ritu Sancto, nondum pro-
palatam esse sanctorum
viam, adhuc priore taber-
naculo habentestatum.
g. Qua) parabola est
temporis instantis , juxta'
quam munera et hostiae
offerantur, quae non pos-
sunt juxta conscientiam
perfectum facere servien-
tem , solummodo in cibis
et in potibus,
10. Et variis baptisma-
tibus, et justitiis carnis
usque ad tempus correc-
tionis impositis.
1 1 . Christus autem
que Moi'se construisit dans le desert. Voyez la Dissertation sur lamanne,
lom. It.
•jj- 5. Le couvrant de leurs ailes.
^6. C'est le sens du grec.
■^ 7. C'est-a-dire pour ses peches. Levit, xvi. 2 etsecjcf.
■j 8. Du ciel dont ce second sanctuaire etoit la figure.
■5^ 9. C'est le sens du grec.
Ibid. Lilt, perfectionner.
■f ID. Qui ne pouvoientsanctifier I'ame.
Ibid. Par une meilleure alliance.
CHAPITRK IX. 336
assistens pontifex future- des biens futurs ' etant venu ' dans
rum bonorum, per am- le monde ,' est entrc une fois dans
le sanctuaire,' par un tabernacle
plus grand et plus excellent', qui
n'a point ete fait par la main des
hommes, c'est-a-dire qui n'a point
ele forme par la voie commune et
ordinaire.'
12. Et il est entre, non avec le
sang des boucs et des yeaux, mais
avec son propre sang, nous ayant
acquis' une redemption eternelle.'
plius et perfectius laber-
uaculuui non manufac-
tum, id est, non hujus
creation is :
12. Neque per sangui-
neni-hircorum aut vitulo-
rum, sed per proprium
^anguinem , introivit se-
mel in sancta, seleroa re-
demptione inventa.
i3. Si enim sanguis i5. Car si le sang des boucs et Z.ev. xvi. i5.
hircorum et taurorum, et des taureaux, et I'aspersionde I'eau
cinis vitulse aspersus, in- melee avec la cendre d'une ge-
nisse ' sanctifie ceux qui ont ete
souilles, en Icur donnant une pu-
rete exterieure et charnelle.
14. Combien plus le sang de Je- i. Pe/r.1.19.
sus-Christ, qui par le Saint-Esprit *• Joan. 1.7-
s'est offert lui-nieme a Dieu comme ^P°^- '•
une victime sans tache, purifiera-
t-il notre conscience des oeuvres
scientiam nostram ab ope- mortes ,' pour nous faire rendre un
ribus mortuis, adservien- vrai culte au Dieu vivant !
quinatos sanctiGcat ad
emundatioaem carnis :
14. Quanto magis san-
guis Christi, qui per Spi-
itum Sanctum semetip-
- um obtulit immaculalum
Deo , emundabit con-
5.
dum Deo viventi?
i5. Et ideo novi testa-
menti mediator est : ut
morte intercedente , in
redemptionem earum
i5. G'est pourquoi aussi il est le GaU \\\.
mediateur du testament nouveau,
aGnque, par la mort qu'il a souf-
ferte pour expier les iniquites qui
■f 1 1. Des bieas celestes, dont par sa sacrificature il doit nous mettre ea
possession.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Par son incarnation.
Ibid. Le ciel.
Ibid. C'est-a-dire par sa chair, qui etant le temple oii la Divioite babite
corporeliement , est un tabernacle plus grand et plus evellent que celui de
laloi.
Ibid. Mais par I'op^ralion du Sain t-Esprit, dans le sein etdn plus pur sang
d'une vierge S jamais intacte.
y 12. Par I'effusion de ce sang adorable.
Ibid. Et par consequent bien differenle de la puret^ que Ton recevoit par
les sacrifices de la loi.
y 1 3. L'eau d'expiation ou lustrale. Yoycz Nombremx. 1. S.
■f i4- Des souillures que nous avons contractees par nos p&hes.
336 EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
96 commettoient sous le premier
Exod. ixiv.
testament , ceux qui sont appeles
repoivent I'heritage eternel qu'il
leur a promis.'
16. Car oOi il y a un testament,
il est necessaire que la mort du
testateur intervienne.
17. Parce que le testament n'a
lieu que par la mort, n'ayant point
de force tant que le testateur vit.
18. C'est pourquoi le premier
testament meme ne fut confirm^
qii'avec le sang.
19. Car Moise, ayant recite de-
vant tout le peuple toutes les or-
donnances de la loi, prit du sang
des veaux et des boucs, avec de
I'eau et de la laine teinte en ecar-
late, et de I'hysope, et en jeta sur
le livre mOme, et sur tout le
peuple,
20. En disant : Voici le sang du
testament ' que Dieu a fait en votre
faveur.
21. II jeta encore du sang sur le
tabernacle , et sur tous les vases
qui servoient au culte.
22. Et, selon la loi, presquc tout
sepurifie avec le sang; etlespeches
ne sont point remis sans effusion de
sang.
20. II etoit done necessaire que
ce qui etoit la figure des choses
celestes fftt purifie par le sang des
animaux; mais que les celestes
memes le fussent par des victimes
plus excellentes que n'ont ete les
premieres.
praevancationum , qua
erant sub priori testa-
mento, repromissionem
accipiant, qui vocati sunt,
aeternae hereditatis.
16. Ubienim testamen-
tum est, mors necesse est
mtercedat testatoris.
17. Testamentum enim
in mortuis confirmatum
est : alioquin nondum
valet, dum vivit qui tes-
tatus est.
18. Unde nee prinium
quidem sine sanguine de-
dicatum est.
19. Lecto ehim omni
mandato legis a Moyse
universo populo, acci-
piens sanguinem vitulo-
rum et hircorum, cum
aqua, et lana coccinea,
et hysopo, ipsumquoque
librum et omnem popu-
luin aspersit,
20. Dicens : Hie san-
guis testamenti , quod
mandavit ad vos Deus.
21. Etiam tabernacu-
lum et omnia vasa minis-
terii sanguine similiter
aspersit.
22. Et omnia pene in
sanguine secundum le-
gem mundantur : et sine
sanguinis effusione non fit
remissio.
25. Necesse est ergo
exeroplaria quidem coeles-
tium his nuindari : ipsa
autem ccelestia meliori-
bus hostiis quam istis.
y i5. Heritage qu'ils n'ont pu recevbir qu'apres la morl de Jesus- Christ,
•jf 20. C'est Teipression de I.t version des Septanle.
i4- Nonenira in manu-
facla sancta Jesus introi-
vit , exemplaria vcroruin :
sed in ipsum cceluin , ut
appareat nunc vultui Dei
pro nobis :
a5. Neque ul saepe offe-
ratseiTietip.<uni, quematl-
modmn ponlifex intrat in
sancta per singulos annos
in sanguine alieno :
26. Alioquin oportebat
eum frequenter pali ab
origine mnndi : nunc au-
tem semel in consumnna-
tione seculorum, ad de-
stitutionetn peccali , per
hostiam suam apparuit.
27. Et quemadmodum
statutuui est hoininibus
semel mori, post hoc au-
tena judicium :
28. Sic et Christus se-
mel oblatus est ad niulto-
rum exhaurienda pcccata :
secundo sine peccato ap-
parcbit expectantibus se ,
in salutem.
CHAPITRR IX. S37
24. En effet Jesus-Christ n'est
point entre dans ce sanctuaire fait
par la main des hommes ,' lequei
n'eloit que la figure du veritable;
mais il est entre dansle ciel meme,
a fin de sa presenter maintenant
pour nous devanl la face de Dieu.
25. Et il n'y est pas aussi entre
pours'offrirlui-memeplusieursfois,
comme le grand-prOtre entre tons
les ans dans le sanctuaire , portanl
un sang elranger ;'
26. Car aulrement il efit fallu
qn'il eQt souffert plusieurs fois de-
puis la creation du monde ; au lieu
qu'il n'a parujqu'une fois vers la
fin des siecles,' pour abolir le pe-
che, en s'offrant lui-m§me ' pour
victime.
27. Et comme il est arrete que
les hommes meurent une fois, et
qu'ensuile ils soicnt juges,
28. Ainsi Jesus-Christ a ete offert Rom. y. 9. '
une fois pour effacer' les peches i.Petr.\u.i%.
de plusieurs ; et la seconde fois , il
apparoitra sans peche,' pour le
salut de ceux qui I'atlendent.
T^ 24. Dans le saint des saints qui etoit aa dedans du second voile,
if a 5. Lesang des viclimes, et non le sien propre.
y a6. Aulrement ct a la leUre : dans la consommation des siecles , lorstjue
la plenitude des temps marques a ete accompUe.
Ibid. C'est le sens du grec.
7 a8. Gr. autr. pour porter sur soi.
Jbid. Sans avoir plus rien du peche a expier.
3»
338
KPITRE DF. SAINT PAUL AUX HEBREUX.
CHAPITRE X.
Insuffisance des victimes legales : leur abolition. EfEcacite du sacrifice de Je-
sus-Christ. L'Ap6tre exhorte les Hebreux a s'approcher de Dieu avec con-
fiance, a demeurer fermes dans la foi , a s'entr'edifier et s'entr'exhorter. II
les presse par le double motif des maux qu ils auroient a craindre, s'ils ne
perseveroient pas, et des biens qu'ils ont a esperer, s'ils per8<5verent.
/'».
i.CARlaloi n'ayant que l'on:ibre
(les biens a venir, et non Timage'
meme des choses ,' ne peut jamais ,
par I'oblation des memes hosties
quis'offrent toujourschaque annee,
rendre parfaits ceux qui s'appro-
chcnt de I'autel.
2. Autrement on auroit cesse de
les offiir, parce que ceux qui ren-
dent ce culte n'auroient plus senti
leur conscience chargee de peches ,
en ayant ete une fois purifies.
5. Cependant en offrant ces sa-
crifices on parle de nouveau lous
les ans de peches a expier.
4- En effet il est impossible que
le sang des taureaux ct des boucs
otc les peches.
5. C'est pourquoi le Fils de Dieu
entrant dans le monde dit' : Vous
n'avez point voulu d'hostie ni d'ob-
lation;" mais vous m'avez forme
un corps;'
6. Vous n'avea point agree les
holocaustes et ' les sacrifices qu'on
vous ofFre pour le peclie ;
1 . Umbkam enim habcns
lex futurorum bonorum.
non ipsam imaginem re-
rum, per singulos annos
eisdem ipsis hostiis, quas
offerunt indesinenter ,
numquam potest acce-
dentes-perfectos facere :
2. Alioquin cessassent
offerri : ideo quod nuUam
haberent ultra conscien-
tiam peccati, cultores se-
mel mundati :
3. Sed in ipsis comme-
moratio, peccatorum per
singulos annos fit.
4. Impossibile enim est
sanguine taurorumethir-
corum auferri peccata.
fi. Ideoingrediensmun-
dum dicit : Hostiam el
oblationem noluisti : cor-
pus autem aptasti mihi :
6. Holocautomata, pro
peccato, non tibi placue-
runt :
^ I. Voyez ce qui est dit surceladans I'aiialysc.
Ibid. De celles qui y etoient represenlc'es.
T^ 5. En parlant a son Pere.
Ibid. Telles qu'on vous les offre dans ia loi.
Ibid. Qui, etant uni a la divinile , sera une victime digne de voire majesle
supreme. C'est le sens de la version des Seplante.
y 6. Les holocaustes sont differens des sacrifices pour Ic peche. Pro peccalo
ne se rapporle pas a IfohcniitomaUi .
CIIAPITRE X.
339
7. Tuncdi\i : Ecce ve-
nio : in capile libri scrip-
turn est de me, ut faciam,
Deus, voluntatem tuani.
8. Superiiis dicens :
Quia hostias et oblatione?,
el holocautomata , pro
peccato, uoluisti, nee pla-
cila sunt tibi , quae secun-
dum legem otTeruntur :
9. Tunc dixi : Ecce ve-
nio , ut faciam, Deus,
■voluntatem tuam : aufert
primum, ut sequens sta-
tuat.
10. In qua roluntate
sanctificati sumusper ob-
lationera corporis Jesu
Christi semel.
11. Et omnis quidem
7. Mors j'ai dil : Me yoici ; jc Ps.
viens selon qu'il est ecrit de moi
dans le livre ,' pour faire, 6 Dieu,
TOtre volonte.'
8. Apres avoir dlt : Vous n'ave*
point voulu ni agree leshosties, les
oblations, les holocaustes, et'les
sacrifices pour le peche , qui sont
toutes choses qui s'offrent selon la
lot ;
9. II ajoute ' ensuite : Me voici;
je viens pour faire, 6 Dieu, voire
volonte.' Done il abolit ces premiers
sacrifices, pouretablir le second.'
10. Et c'est celte volonte qui
nous a sanctifies, par I'oblation du
corps de Jesus-Christ, qui a ete
faite une seule fois.
1 1 . \ussi au lieu que tous les
sacerdos praesto est quo- pretres' se presentent tous les jours
tidie ministrans, et eas- pour sacrifieret pour offrirplusieurs
fois les memes hosties qui ne peu-
vent effacer les peehes ;'
dem saepe offerens hos-
tias, quae numquam pos-
sunt auferre peccata :
12. Hie autem unam
pro peccatis offerens hos-
tiam, in sempiternumse-
det in dextera Dei,
i5. De cetero expee-
tans donee ponantur ini-
mici ejus scabellum pe-
dum ejus.
i4> Una enim oblatio-
12. Celui-ci , ayant offert une
seule hostie pour les peehes, s'est
assis a la droite de Dieu pour tou-
jours ,
i5. Ou il attend ce qui reste a
accoraplir : que ses ennemis
soient reduits k lui servirde marche- „
. 1 Fs. cix. a.
pied. ^ r
r r- I ui .• I. Cor. XV. a5
i4- Car, par une seule oblation,
f 7. Dans le Tolume de la loi el des pronhetes. C'est !e sens du grec et
de I'hebreu, qu'on peul traduire k la leltre : dans le volume ou le rouleau du
liyre.
Ibid. Pour ^tre immole a votre justice , a la place de ces TJclimes qui ne
peuvent vous Atre agreables.
■/ 8. Voyez Supr. -^ 6.
■^ 9. C'est le sens du grec.
Jbid. Pour Aire immole a votre justice.
Ibid. Celui de son corps, qu'il a offert sur la croix pr I'ordre el la volenti
de Dieu.
y 1 1 . De Tancienne loi.
Ibid. Comme oette repetition l«montre a<««e/.
34o
Ept
XRE DE SAINT PALL ALX HEBaEUX.
il a rendu parfaits' pour toujours
ceux qu'il a sanctifies,
i5. Et c'est ce que le Saint-Es-
prit nous declare lui-meuie; car
apr^s avoir dit :
/er. XXXI. 33. 16. Yoici Talliance que je terai
.9K;>r. viir. 8. avec cux apres que ce temps-la
sera arrive, dit le Seigneur : J'im-
primerai mes lois dans leur coeur;
et je les ecrirai dans leur esprit;
17. II ajoule : Et je ne me sou-
viendrai plus de leurs peches, ni
de leurs iniquites.'
18. Or, quand les peches sont
remis, on n'a plus besoin d'obla-
tion pour les peches.'
19. Puis done, mes freres, que
nous avons la confiance ' d'entrer
dans le sanctuaire ' par le sang de
Jesus-Christ ,'
20. En suivant cette voie nou-
velie et vivantequ'ii nous a le pre-
mier tracee par I'ouverture du voile,
de sa chair ,
21. Et que nous avons un grand-
pretre qui est etabli sur la maison
de Dieu ;
22. Approchons-nous de lui avec
un cceur vraiment sincere, et avec
une foi parfaite, ayant les coeurs
puriGes des souillures de la mau-
vaise conscience ,par une aspersion
interieure , et les corps laves dans
I'eau pure.'
a3. Demeurons fermes et in-
ne,consummavit in sem-
piternum sanctificatos.
i5. Contestatur autem
nos et Spiritus Sanctus^
Postquam enim dixit :
16. Hoc autcm testa-
mentum, quod testabor
ad illos post dies illos, di-
cit Dominus : Dando le-
ges meas in cordibus eo-
rum, et in mentibus eo-
rum superscribam eas :
17. Et peccatorum et
iniquitalum eorum jam
non recordabor amplius.
18. Ubi autem horum
remissio : jam non est
oblatio pro peccato.
19. Habentes itaque,
fratres , fiduciam in in-
troitu sanctorum in san-
guine Christi ,
20. Quam initiavit no-
bis viam novam et viven-
tem per velamen, id est,
carnem suam,
21. Et sacerdotem ma-
gnum super domum Dei:
22. Accedamus cum
vero corde in plenitudine
fidei , aspersi corda a
conscientia mala,fct ab-
luti corpus aqua munda ,
25. Teneamus spei nos-
ir 14. C'esl le sens (lu grec.
y 17. Ce qui marque qu'el les sont entif'rementcffaceesr
■j- i8. Eton peul enlrer dans le sanctuaire, sans y porter le sang d'une
nouvelle victime : c'est la grace que nous avons re(;ae par le sang de Jesui-
Christ, qui nous a ouvert I'entree du ciel pour toujours. *
•jf 19. Gr. autr. la liberte d'en'.rtr avec confiarce.
Ibid. Dans leciel.
Ibid. Gr. autr. par le sang de Jesus.
y 22. Dans Teau salutaira du bapt^mc.
CHAPITRE X.
34 r
trae confessioneua inde-
clinabilem ( fidelis enini
est qui repromisit),
a4. Et consideremus
invicem in provocatio-
nem charitatis, ct bono-
rum operum :
20. Non deserentescol-
lecuonem nostram , sic-
ul consuetudiuis est qui-
busdani : sed consolantes,
et tanto magisquanto vi-
ebranlables dans la profession que
nous avons faite d'csperer ce qui
nous a ete promis, puisque celui
qui nous I'a promis est tr^s^fidele
dans ses promesses.
24* Et considerons-nous les uns
les autres , aGn de nous entr'ex-
ciler a la charite et aux bonnes
oeuvres.
25. Et loin |de nous retirer dcs
assemblees des fidefes , comme
quelques-uns ont couturae defaire,
exhorions-nous' au contraire les
uns les autres, d'autant plus que
deritis appropinquantem vous voyez que le jour' s'approche.
diem.
26. Yoluntarie enim 26. Car si nous pechons volon- '^"/"'- ▼«• 4-
peccantibus nobis post tairement apres avoir recu la con-
acceptaui notitiam veri- noissance de la verite,' il n'y a plus
talis, jam non relinquilur desormais d'hoslie pour les peches.'
pro peccatis hostia,
27. Terribilis autem 27. 31ais il ne leur reste qu'une
quaedam expectalio judi- attente effroyable du jugement et
cii, et ignis seinuhitio, uu feu vengeur qui doit devorer
quae consumptura est ad- les eoncmis de Dieu.
versarios.
28. Celui qui a Tiole la loi de
Molse est condamnc u mort sans Deut.xyu.6.
misericorde, sur la deposilion de ^MiiaA. xtiu.
deux ou trois teuioins , ^^•
20. Combien done croyez-vous •/ocn. vm. 17.
que celui-la sera juge digne a un
plus grand snpplice, qui aura foule
aux pieds le Fils de Dieu, qui aura
tenu pour une chose vile et pro-
duxerit, in quosanclifica- fane' le sang de Talliance par le-
tusest, et spiritui graliae quel il avoit ete sanctifie, ct qui
contumeliam fecerit ? aura fait outrage a I'esprit de la
grace ?'
y 2 5. C'est le sens du grec.
I6id. Le jour du jugement.
i- 26. Si nous abandonnoDs Jesos -Christ, apres Fa-oir connu.
If>id. Puisque, comme nous venons de voir, toules les victimes de la loi ne
peuTent les ef facer, et qu'il u'y a que le sang de Jesus-Chrislqui ail celte Tcrtu:
ceui done qui j renoncent n'ont point de salul aesperer.
y ag. C'est le seas du grec.
Ibid. Qu'il a re«ju par le baptdme et.I'impoiition det mains. Ce «onl la
28. Irritam quisfaciens
legem Moysi, sine ulla
miseratione , duobus vel
tribus testibus, morilur :
29. Quanto niagis pu-
tatis deteriora merer! sup-
plicia , qui Filium Dei
conculcaverit, et sangui-
neni testamenti pollutum
Deut. xxxii
35.
Horn. xn. i(
342 EPITRE DE SA,1NT PALL AUX HEBREUX.
3o. Car nous Savons qui est celui 5o. Sciinus enim qui
qui a dit : La vengeance m'est re- dixit: Mihi vindicta, et
serves, et je i'exercerai;' et qui egoretribuam.Etiteruin:
a dit encore : Le Seigneur jugera Quia judicabit Dominus'
son peuple.* populum suum.
oi. II est terrible detomberentre 3i. Horrendum estin-
les mains du Dieu vivant.' cidere in manus Dei vi-
ventis.
32. Oi, rappelez en votre me- 52. Ilememoraminiaii-
uioire ce premier temps auquel, tern pristinos dies, iu
apres avoir ete eclaires , vous avez quibus illuminati , ma-
soutenu de grands combats et de gnum certamen sustinuis-
grandes afflictions. tis passionum :
33. Puisque, d'une part vous 33. Etinalteroquidem,
avez servi de spectacle an monde, opprobriiset tribulationi-
par les opprobres el les mauvais bus spectaculum facli : ia
traitemens que vous avez soufferls, alteroautem, socii taliter
etque, de I'autre, vous etes deve^ conversantium effecti.
nus les compagnons de ceux qui
ont souffert de pareils outrages.'
34- Car vous avez compali a ceux
qui etoient dans les chaines; " et
vous avez vuavecjoie tous vosbiens
piilc'S, sachant que vous aviez' gaudio suscepistis, cog-
d'autrcs biens plus excellens, et noscentes vos habere me-
qui ne periront jamais.
34- Nam et vinctis com-
passi est is, et rapinam
bonorum vestrorum cum
liorem et manentem sub-
stantiam.
35. JNolite itaque amit-
tere confidentiam ves-
35. Ne perdez done pas la con-
fiance que vous avez / et qui doit
etre suivie d'une grande recom- tram , quae magnam ha-
pense. bet remunerationera.
comrae autant de t^moins qui s'eleveront centre lui, etqui demanderonl ven-;
f^eance a Dieu.
■f 3o. Le grec ajoute: dit le Seigneur.
Ihid. Autr. le Seigneur rendra justice a son peuple, et le vengem des torts
ctdes oiilr-ages que lui font les medians. Yoyez au Deuteronome, xxxii. 3(5.
y 3i. A quels supplicesdoivent done s'atlendre ceux qui i rri ten t ce Dieu
vengeur, qui, ne cessanl jamais de vivre, necesse aussi jamais do punir?
^ 33. Par la part que vous avez eue a leurs maux, et par les senlimens de
compassion que vous avez eus pour eux — Gr. autr. el que de I'autre vous
•■ivc/; pris part k la peine de ceux qui eloient dans la meme situation.
■^ 34. Gr. Car vous avez compali ames liens.
Ibid. Grec iniprinie : que vous a- ez eu vous-memes. Ou selon dautres
exemplaires : que vous aviez dans les cieuxd'autres biens, etc.
■j' 35. Gr. autr. In conliance et la liberie avec luquelle vous avezjusquici
conjesse J e!s us- Christ.
36. Palientia enim vo-
bis necessaria est : ut vo-
luntatem Dei facientes,
reporletis promissionem.
Zy. Adhuc enim mo-
dicum aliquantulum , qui
venturus est, veniet, et
non tardabit.
58. Justus autem meus
ex fide vivit : quod si sub-
traxerit se , non placebit
animae meae.
59. Nos autem non su-
nius subtractionis filii in
perditionem, sed fidei in
acquisitionem animae.
CUAPITRE X. tit
36. Car la patience vous est ne-
cessaire , afin qu'en faisant la vo-
lont^ de Dieu , vous puissiez obtenir
les biens qui vous sont proniis.
37. Encore ud peu de temps, et
celui qui doit venir viendra; et ii
ne tardera point.
38. En attendant, le juste qui
vit de Ha foi; que ifabac. u. 3
m'appartient
s'il s'eloigne, il ne me sera plus
agreable.
39. Pour nous , nous n'avons
garde de nous retirer et de nous
affoiblir;'cequi seroit noire ruine:
mais nous demeurons fermes dans
la foi, pour le salut de nos ames.
Rom.
GaL
1^ 38. Le pronom meus n'est pas dans le grec imprime , ni ici, ni dans le
texte d'Habacuc.
■/ 39. Le moX Jilii n'est pas dans le grec.
CHAPITRE XI.
Definition , excellence , avantages et modeles de la foi.
1. Est autem fides spe-
randarum substantia re-
rum, arguraenlum non
apparentium.
2. In hac enim testi-
monium consecuti sunt
senes.
3. Fide intelligimus
1. Ok, la foi est le fondement'
des choses que Ton doit esperer,' et
une pleine conviction de celles qu'oii
ne voit point.
2. Car c'est par la foi que les an-
ciens peres onl recu un temoi-
gnage si avantageux dans PEcri-
ture. '
3. C'est par la foi, que nous G«n.
1.3.
y I . Litt. la substance, et en tfuelque sorte la re'aUte.
Ibid. Gr. des choses que I'on espere.
y 2. C'est lette foi qui, en lour inspirant une ferme confiance dans If*
promeises deDieu, leur a merile les litres glorieux de terrileurs (ideles. d'amis
ct d'enfans de Dieu, que I'Ecriture l«ur donne.
344
EPHKE DE SAIM PALL AUX HEBREUX.
Savons que le monde a ete fait par
la parole de Dieu; et que d'invi-
sible qu'il etoit auparavant , il est
devenu visible.'
Gen. IV. 4. 4, C'est par la foi qn'AbcI ofTrit
a Dicu line plus excelicnle hoslie
i»fa«.xxu.35. que Caiii ;' et qu'il est declare juste,
Dieu lui-inenie rendant temi)ig;Mage
a ses dons;" el c'est a cause de sa
foi qu'il parte encore apres sa mort."
Gen. V. 24
Eccli. XLir
i6.
5. C'est par la foi qu'Henoch a
ete enleve pour ne pas mourir; et
on ne I'a plus vu , parce que Dieu
Tavoit transporte ailleurs : " car
I'Ecrilure lui rend temoignage,
qu'avant d'avoir ete ainsi enleve, il
plaisoit a Dieu.
6. Or, il est impossible de plaire
u Dieu sans la foi; car pour s'ap-
procher de Dieu , il fiiut croire
premierement qu'il y a un Dieu ,
et qu'il recompense ceux qui le
clierchent."
Gen. VI. 14. 7« C'est par la foi que Noe ayant
Eccli. xLiv. rccu averlissement du ciel ," et ap-
'7* prehendant ce qu'il ne voyoit pas
encore, balit I'arche pour sauver
sa famille ; et la batissant, con-
aptata esse secula verbo
Dei : ui ex invisibilibu*
visibilia fierent.
4. Fide plurimam hos-
tiam Abel, quamCain,
obtulit Deo : per quam
testimonium consecutus
est esse )ustus, testimo-
nium perhibenle muneri-
busejus Deo , et perillam
defunctus adhuc loqui-
tur.
5. Fide Henoch trans-
latus est ne videret mor-
tem, et non inveniebatur,
quiatranstulitillum Deus:
ante translationcm enim
testimonium habuit pla-
cuisse Deo.
6. Sine fide autem im-
possibile e.-t placere Deo.
Credere enim oportet ac-
cedentem ad Deum quia
est, et inquirenlibus se
renumerator sit.
7. Fide Noe', response
acceplo de iis quae adhuc
non videbantur, metuens
aptavit arcam in salutem
doraus suae , per quam
■jJ^ 3. Gr. litt. en sorle que les clioses visibles n'ont point ete formees de
choses qui fussent visibles.
■jf 4. Parce que reconnoissant Dieu pour le createur el le souverain de lou-
tos choses , il lui sacrifia ce qu'il avoit de meilleur; ce que ne Gt pas son
frere.
Ibid. Parle feu du ciel qu'il fitdescendre pour consumer son sacrifice, ou
par quelque aulre signe cxlorieur qui fit connoitre ce qui est remarque dans
I'Ecriture, que Dieu avoil regarde favorablemenl Abel et ses prcsens.
Ibid. Car sa vie sera un modele de piele et de foi pour toutes les genera-
tions.
■\^5. \oyez\a Dissertation sui^ Henoch, torn. i^'.
y 6. Et ce n'estque par la foi qu'on peut ^tre assure de cette verity*.
y 7. C'est Ic sen5 du grec : x?i'i{A«'~t<j6£f,{.
CBAPITRB XI. 345
dawDavit uiuaduui : et damna le inonde,'et derint heritier
juslitiae, quae per fidem de la justice qui nait de la foi.
est, heres est instilulus.
8. Fide qui vocalur 8. Cast par la foi que celui qui Gen.xu.i.
Abraham , obedivil in lo- a recu le nom d'Abraham' obeit
cum exire, quern accep- a Dieu , en s'en allant dans la terre
turuseratin bereditatem: qu'il devoit recevoir pour heritage;
et eiiit, nesciens quo et qu'il partit sans savoir oii il
iret. alloit.
g. Fide demoralus est g. C'estparla foi qu'il demeura
in terra repromissionis, dans la terre qui lui avoil ete pro-
tamquam in aliena, in ca- mise , commedans une terre etran-
sulishabitando, cum Isaac gere, habitant sous des tentes ,
et Jacob, coheredibus re- comme firent aussi Isaac et Jacob,
promissionis ejuf-dem. lieriliers d'une meme promesse.
10. Expeclabal enim lo. Car il attendoit cette cite
fundamenta habenlem ci- batie sur un fondement dont Dieu
vitatem : cujus artifex et inerne est le fondateur et I'archi-
conditor t)eus. tecte.'
11. Fide et ipsa Sara ji. C'est aussi par la foi que Gen.xvii. ijj.
sterilis virtuteni in con- Sara etant sterile recut la vertu de
ceptionem scminis acce- concevoir dans son sein, ' lors-
pil , etiam praeter tempus qu'elle n'etoit plus en age d'en
aetatis : quoniam fidelem avoir; parce qu'elle crut fidele ce-
credidit esse eum qui re- lui qui le lui avoit promis.
promiserat.
12. Propter quod et ab 12. C'est pourquoi il est sorti
uno orli sunt ( et hoc d'un homme seul, et qui etnit deji
emortuo), tamqna m si- comme mort,' une posterile aussi
dera coeli in multitudi- nombrcuse que les etoiles du ciel,
nem, et sicut arena, quae et que le sable innombrable qui
est ad oram maris, innu- est sur le bord de la mer.
merabilis.
i3. Juxta fidem de- i3. Tousceux-cisoot raorts dan3
functi sunt omnes isli , la foi ,' sans avoir recu I'effet des
nonacceptis repromissio- promesses ; mais les voyant , et les
nibus, sed a longe easas- saluantdc loin ,' etconfessant qu'ils
•j^ 7 . Le monde iocredule qui se inoquoit de sa timide precaution.
y 8. Au lieu de celui d'Abram qu'il porloil auparavant.
■jr 10. La celeste partie dont la terre promise n'etoit que la figure; ainsi
il sc mel'.oit peu en peine de s'^lablir dans la terre de Chanaan, qui n'en eloit
que la Ugure.
y 1 1 . Grec : qu'clle cut un fils.
y 12. Par son extreme vielllesse.
■jr i3. Y ont persevere jusqu'a la fin.
Ibid. Us etoient persuades qn^elies s'aocompliroient dans la pertonne de
)«ors enfans.
346
EPITRE DE SAINT PAUL AUX HKKREUX.
etoienl etrangers et voyageurs sur
la terre/
picientes , et salutantes ^
et coiifitentes quia per-
egrini et hospites sunt :
super terrain.
14. Qui enim haec di-
cunt, significant se pa-
triain inquirere.
i5. £t si quidem ipsius
memiuissent de qua ex-
ils auroient eu assez de temps pour ierunt, habebant utique
14. Car ceux qui parlent de la
sorte font voir qu'ils cherchent
leur patrie.'
i5. Que s'ils avoient eu dans
I'esprit celle dont ils etoient sortis,
Gen. xxti. i
Eccli. XXIV.
21.
y retourner;
16. Mais ils en desiroient une
ineilleure , qui est la patrie celeste.
Aussi Dieu ne rougit point d'etre
appele leur Dieu , parce qu'il leur
a prepare une cite.
17. G'est par la foi qu'Abraham,
lorsque Dieu voulut le tenter/ lui
offrit Isaac son fils unique: et quoi-
qu'il eQt recu en lui les promesses ,
Gen.\k\. 11. 18. Et qu'il eQt 6te dit :' C'est
H om. IX. 7. d'Isaac que sortira la race qui por-
tera votre nom.
ig. Mais il pensoit en lui-meme
que Dieu pourroit bien le ressusci-
ter apr^s sa mort : et ainsi il le re-
couvra pour servir de figure.'
20 . C'est par la foi qu'lsaac donna
•k Jacob et a Esaii une benediction
Gen. XLviii. qui regardoit I'avenir. '
**• 21. C'est par la foi que Jacob,
en mourant, benit chacun des en-
Gen. XXV 11
27. 39.
tempus revertendi :
16. Nunc autem me-
liorem appetunt, id est,
coelestem. Ideo non con-
funditur Deus vocari Deus
eorum : paravit enim illis
civitatem.
17. Fide obtulit Abra-
ham Isaac cum tentare-
tur, et unigenitum offe-
rebat , qui Susceperat re-
promissiones ,
18. Ad quern dictum
est : Quia in Isaac voca-
bitur tibi seirien :
19. Arbitrans quia et a
mortuis suscitare potens
est Deus : unde eum et
in parabolam accepit.
20. Fide et de futuris
benedixit Isaac, Jacob et
Esau.
2 1 . Fide Jacob , mo-
riens, singulos filiorum
•^ 1 3.Se regardanl comme tels aa milieu de celle deChanaan qui leur avoit
ele promise, ils souplroient apres leur veritable patrie , c'est-ci-dire le ciel.
•^ Ik. Puisqu'ils se regardaient corame etrangers et voyageurs dans leur
propre patrie.
V" 1 7 . C'est-^-dire I'eprouver.
■^ 17. et 18. Gr. autr. C'est par la foi qu' Abraham offrit Isaac , lorsque
Dieu voulut le XenXev ou V eprouv/er , et qu'il offrit ce fils unique sur qui
etoient pass^es les promesses, et dont il lui avoit ete dit : C'est d'Isaac , etc.
■ji- 19. II lui fut rendu comme d'entre les morts, en figure de la resurrection
de Jesus-Christ, immole par la volonlede son Pere sur I'autclde la croix.
^20. Qui marquoit cequi dcToit arrivcr a ces deux freres.
CHAPITHE XI.
347
Joseph benedixit : et ado-
ravit fastigium rirgaeejus.
fans de Joseph, et qu'il s'inclina
profondement devant le b3toa ' de
commaademeDt que portoil son
fiis.'
a2. Cest par la foi que Joseph , Gen. l. a3.
en meurant, parla de la sortie des
enfans d'lsrael hors de I'Egypte ;
et qu'i! ordoona qu'on en trans-
portat ses os.
20. Cest par foi qu'apres qne Exod. 11. 2.
Moise fut ne , son p^re et sa mere
2a. Fide Joseph, mo-,
riens, de perfectione fi-
liorum Israel memoratus
est , et de ossibus suis
inandavit.
a3. Fide Moyses, na-
tus, occultatus est nieu-
sibus tribus a parentibus le tinrent cache durant trois mois,
suis, eo quod vidissent ayant vu que c'etoit unbel enfant;' Exod. 1. 17.
elegantem iofantem, et ils n'appreheodferent point I'edit du
noDtimueruntregisedic- r o.'
turn.
34. Fide Moyses grao-
dis factus negavit se esse
filium filiae Pharaoois,
I
aS. Magis eligens af-
fligi cum popuio Dei,
quam temporalis peccati
habere jucunditatem ,
26. Majores divitiasaes-
timans thesauro .Egyp-
tiorum , improperium
24. Cest par la foi que lorsque Exod. n. ir.
Moise fut devenu grand , il renon-
ca ' a la qualite de (lis de la fille de
Pharaon,'
25. Et qu'il aima mieux etre af-
flige avec le peuple de Dieu, que
de jouir du plaisir si court' qui se
trouve dans le peche ,
26. Jugeant que I'ignnminie de
Jesus-Christ etoif un plus grand
tresor que toutes les richesses de
y 21. Cest ainsi que la plupart exprimeat le sens du grec des Septante,
ici et dans la Genese , xlvii. 3r. Quelques-uns traduisent : et qu'il adora
Dieu, e'tant appuye sur son Mton. II faut remarquer que I'hebreu ponctue
par les rablns porle : s'inclina sur lehautdu lit HliErT, mais le saint Ap6lre
est d'accord avec les Septante qui ont lu riBSn le bdton.
Ibid. ReTprant en sa personne la grandeur et I'autorit^ de J^us-Christ,
dont Joseph etoit la figure.
V' 23. Ayant reconnu, par leur foi,quecette beaule estraordinaire etoit un
presage de sa future grandeur, et du dessein que Dieu avoit des'en servir pour
en faire le chef et le liberateur de son peuple.
Ibid. Qui ordonnoil qu'on jelAt les enfans miles dans le fleuve. — Quelques
cremplaires grecs et latins inserent ici ce verset : Cest par la foi que lorsque
Moise fut devenu grand , il tua I'figyptien , elant louche de Thumiliation de
ses freres.
•f ii. Cest le sens du grec.
Ibid. Laquelle I'avoll adopte.
y 25. Cest le sens du grec : Trsooxatpov temporalem jucunditatem-
348
EpItRE DE saint PAUL AUX HEBREUX.
Exod:.
I'Egypte, parce qu'il envisageoit la
recompense.'
27. C'est par la foi qu'il quitta
I'Egypte,' sans craindre la furcur
du roi ; car il demeura ferine/
comme s'il eut vu le Dieu invisible.'
Exod.x11.11. 28. C'est par la foi qu'il celebra
la Piique , et qu'il fit I'aspersion du
sang de I'agneau / afin que I'ange,
qui tuoit les premiers nes, nc tou-
chut point aux Israelites.
29. C'est par la foi qu'ils passe-
rent au travers de la mer Rouge ,
comme sur la lerre ferme; au lieu
que les Egypticns, ayant voulu
tenter le meme passage, furent en-
gloutis dans les eaux.
30. C'est par la foi que les mu-
railles de Jericho tombercnt par
terre, apres qu'on cut fait le tour
sept jours durant.
3i. C'est par la foi que Rahab,
auparavantcourtisane, ayant sauve
les espions de Josue qu'elle avoit
recus chez clle, ' ne fut point enve-
loppee dans la ruine des incredu-
les.'
32. Que dirai-je davantage ? Le
temps me manquera, si je veux
parler encore de Gedeon , de Ba-
rac, de Samson, de Jephte, de Da-
vid, de Samuel et des prophetes ,
33. Qui par la foi ont conquis les
Jos.M. 20.
Jos. II. 3.
Jac. II. a 5
Christi : aspicicbat eaim
in remunerationem.
27. FidereliquitiEgyp-
tum , non veritus animo-
• sitatem regis : invisibilem
enimtamquam videnssus-
tinuit.
28. FidecelebravitPas-
cha, et sanguinis effusio-
nem : ne qui vastabat
primitiva, tangeret eos.
29. Fide transicrunt
mare Rubrum tamquam
per aridam terra m : quod
expcrti ^gyptii devorati
sunt.
30. Fide muri Jericho
corruerunt, circuitu die-
rum septem.
3i. Fide Rahab merc-
trix non periit cum in-
credulis, excipiens explo-
ratores cum pace.
32. Et quid adhuc di-
cam ? Deficiet enim me
tempus enarrantetn de
Gedeon, Barac, Samson,
Jephte, David, Samuel et
prophetis:
33. Qui per fidem vi-
•^ 26. La recompense eternelle que recevroient ceux qui auroient le bon-
heur d'jr parliciper.
•f 27 . Lorsqu'il en fit sorlir tout le peuplcd'israel.
Ibid. Constant dans Tespdrance du bon succes de son entreprise.
Ibid. Qui devolt d^livrer son peuple.
T?- 28. Sur toutes les portes des maisons des Israelites. VoyezExod. xii.
11. 23.
•^ Zi. Litt. ayant recu pacifiquement les espions de Josue.
Ibid. C'est-a-dire des habilaus de Jericho , qui ne voulurent pas croire ,
eomine elle, que Dieu fut assez puissant pour livrer leur rille a son peuple.
CHAPITREXI. 849
ceruntregna, operatisunl royaumes , ' ont accompli les de-
justiliain, adepti sunt re- voirs de la justice,' ontrecu I'efTet
promissioncs, obturave- des promesses, ont ferine la gueule
runt ora leonum , des lions , '
54. Extinxerunt impe- 54. Ont arrete la violence du
turn ignis, effugerunt a- fen,' ont evite le tranchant des
ciem gladii, convalue- epees, ' ont elegucris de leurs ma-
runt de inGrmitate , for- ladies,' ont etc remplis de force et
de courage dans les combats, ont
mis en fuite les armees des ctran-
gers,'
35. Et ont rendu aux femmes
leurs enfans morls, les ayant res-
suscites. ' Les uns ont ete cruelle-
distenli sunt, non susci- ment lourmentes,' nevoulant point
pientes redemptionem, racheter leur vie presenle , aOn
d'en trouver une meilleure dans la
resurrection :
56. Les aulres ont souffert lea
moqneries et les fouets,' les chai-
nes et les prisons. '
tes facti sunt in bello,
castra verterunt extero-
rum :
55. Acceperunt mulie-
res de resurrectione mor-
tuos suos. Alii autem
ut meliorem inveuirent
resurrectionem :
56. Alii vero ludibria
et verbera experti, insu-
per et vincula et carce-
res:
57. Lapidati sunt, secti 57. lis ont ete lapides,' ils ont
sunt, teutati sunt, in oc- ete scies,' ils ont ele eprouves' en
cisione gladii mortui toute maniere, ils sont morls par
sunt : circuierunt in me- le tranchant de I'epee : ils eloient
lotis, in pellibus capri- errans, converts de peaux de bre-
nis, egentes, angustiati, bis et de peaux de ohcvres, elant
afllicti : abandonnes, affliges, persecutes;
y 33. Tels furent Josa^, Gedeon, etles aatres qu'il yient de nommer.
Ibid. De la \crtu.
Jbid. Cela regarde principalement Samson, David et Daniel.
y 34. Cela regarde les trois jeiines Helireux jetcs dans la fournauc.
Ibid. Cela peul reganler £lie, tlisee, Michee, etc.
Ibid. Cela pent regarder Job, Ezcchias, etc.
Ibid. Cela peut regarder principalement les Macliabeea.
y 35. Cela regarde Elie et Eli*ee.
Ibid. Le mot grec srjaTiavia^.jzv peut s'entendre particulierement de la
peine du tympanum : ce qui peut regarder le vieillard Eleazar. Vojez la Dis-
sertation sur les suppliccs, torn, in .
y 36. Cela peul regarder les sept freres Machabees, etc.
Ibid. Cela peut regarJer Jeremie, etc.
y 37 . Cela peut regarder Zacbarie fils de JoTada, etc.
Ibid. On croit quele prophete Isaie souffritcesapplice. Vojez la Disser-
tation sur les supplices.
Ibid. Quelques exemplaires grecs ne lisoient point le mot (intpaad)!«av,
exprimepar te/Uaa* ju/it; et quelques interpretcs croient qu'il a pu etre mi»
au lieu de sTTfiofrr.oav, qui signifie secti sunt.
36o EPITRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX
58. Ceux dont le monde n'etoit
pas digne erroient dans les deserts
et dans les montagnes, et se reti-
roient dans les antres et dans les
cavernes de la terre.
59. Cepeiidant toutes ces per-
sonnes, a qui I'Ecriturerend un te-
moignage' si avantageux a cause
de leur foi , n'ont point recu la re-
compense promise;
40. Dieu ayant voulu, par une
faveur singuliere qu'il nous a faite ,
qu'ils ne repussent qu'avec nous
raccomplissement de leur bon-
heur. '
58. Quibus dignus nort
erat mundus : in solitu-
dinibus errantes, in mon-
tibus et speluncis , et in
cavernis terrae.
59. Et hi omnes testi-
monium fidei probati ,
non acceperunt repromis-
sionem,
40. Deo pro nobis me-
lius aliquid providente,
ut non sine, nobis con-
summarentur.
fSg. C'est le sens du grec.
^40. Leur r&ompense fut dlff^ree jusqu'apres I'ascension de Jesus-Christ.
Ce delai de la beatitude, qui devoit 4tre la recompense de leur foi, ne I'a point
diminuee : ils ne I'ont pas attendue avec moins deconfiance; ils ne I'ont pas
cherchee avec moins d'ardeur : ils regardoient a la v^rite celte f^licite comme
^tant encore fort eloignee d'eux ; mais cette vue ne faisoit que les animer k
une plus grande patience, et qu'augmenter le m^rite de leur fot
• CHAPITRE XII.
L'apdtre se sert de tous ces exemples pour exhorter les Hebreux a courir avec
patience dans la carrierequi leur est ouverle. II leur propose I'exemple de
Jesus- Christ , etinsistesur un texte du livredes Proverbes. TAcherd'avoir
la paix avec lout le monde ; mais en m^me temps conserver la purete de
I'ame, Combien il seroit dangereux d'abj^ndonner I'alliance divine.
1. Puis done que nous sommes
environnes' d'une si grande nuee
^om. V1.4. ^^ temoins, ' degageons-nous de
Ephes. ly.^i. tout ce qui nous appesantit , et des
Col. III. 8. liens du peche qui nous serrent si
X. Petr. 11. I. etroitement,' et courons par la pa-
IV. 2.
1. Ideoque et nos tan-
tam habentes impositam
nubem testium , depo-
nentes omne pondus, et
circumstans nos pecca-
tum, per patientiam cur-
■jj^ 1 . C'est I'expression du grec TCepwsi(Aevcv.
Ibid. Qui nous ont precedes dans la voie de la foi , et qui y ont marchc
constamment nonobstant toutes les difficultes qu'ils y ont rencontr^es.
Ibid. Gr. autr. degageons-nous de tout le poids de la douleur que nous
causent les tribulations ; degageons-nous des piege.s que nous tendV'\n^-
delite de la multitude qui nous environne.
ramus ad proposituui no-
bis certaraen :
a. Aspicientes in auc-
torei'i fidei, et consum-
matorem Jesum , qui ,
proposito sibi gaudio ,
sustinuit crucem, confu-
sione contetupta, atque
in dextera sedis Dei se-
det.
5. Recogitate enim eum
qui talem sustinuit a pec-
catoribus adTersum se-
metlpsum contradictio-
neui : ut ne fatigemini ,
anirois vestrisdeficieotes.
4. Nondum enim us-
que ad sanguinem resti-
tislis, adversus pecratum
repugnantes.
5. Et obliti estis con-
solatioais , quae Tobis
tamquam filiis loquitur,
dicens : Fili mi, noli ne-
gligere disciplinam Do-
mini : neque fatigeris dum
ab eo argueris.
6. Quern enim diligit
Dominus, castigat : fla-
gellat aulem omnem fi-
lium quern recipit.
7 In disciplina perse-
verate : tanquam filiis vo-
bis offert se Deus ; quis
enim filiusquem oon cor-
lipit pater?
CHAPITREXII. 35f
tience dans ctte carriere ' qui nous
est ouverte ,
a. Jetant les yeux sur Jesus,
comme sur I'auteur et le consom-
mateur de la foi , qui, dans la vue
de la joie eternelle qui lui etoit pro-
posee,' a souflFert sur la croix, en
raeprisant la honte,' et qui est
maintenant assis a la droite da
trone de Dieu.
5. Pensez done en vous-mSme*
a celui qui a souffert une si grande
contradiction de la part des pe-
cheursqui se sont eleves contre lui,
afin que vous ne tous decouragiez
point, etque yous netombiex point
dans i'abattement.
4. Car tous n'arez pas encore
resiste jusqu'a repandre votre sang,
en combattant contre le pccbe. '
5. Et avez-Tous oublie cette ex-
hortation ' qui s'adresse a vous,
comme etantenfans de Dieu : Men Prw. m. it.
fils, ne negligez pas le chatiment ^A'o<^«ui- »9'
dont le Seigneur vous corrige; et
ne vous laissez pas abattre lorsqu'il
vous reprend?
6. Car le Seigneur chiitie celni
qu'il aime, et il frappe de verges
tous ceux qu'il recoit au aombre de
ses enfans. '
7. Ne vous lassez done point de
souffrir : ' Dieu vous traite en cela
comme ses enfans: car qui est I'en-
fant qui ne soil point chutie parson
pfere?
•f I . C'est le sens dn grec , oa la proposition ad ne se trouve pas.
V^ a. Quelques-uns traduisent ainsi le grec : qui au lieu de la Tie JranquiHe
et heureuse dont il pouvoit jouir, etc.
Ibid. L'ignominie atlacbee a ce suppiice.
f 4- Comme a fait Jesus-Cbrist , qui a sourfert la mort pout le drlmire en
vous.
f 5. C'est le sens du grec.
i 6. C'est le sens de la version des Septante.
f 7. Gr. yi vous recevez des chAiimens.
352
IpiTRE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
8. Et si vous n'etes point ch5- .
ties, tous les autres I'ayant ete,
vous etes done des batards, et non
pas de vrais enians.
9. Et de plus, si nous avons eu
du respect pour les peres de notre
corps, lorsqu'ils nous ont chalies,
coinbien plus devons-nous etre
soumis a celui qui est le pere des
esprits, afiu que nous virions ?
10. Car quant a nos peres, ils
nous chalioient comine il leur plai-
soit,'pai- rapport a une vie qui dure
si peu ; ' mais Dieu nous chutie au-
tant qu'il nous est utile, pour nous
rendre capables de participer" a sa
saintete.
1 1. Or, toutch3timent,lorsqu'on
Ic recoit semble elre un sujet de
trislesse et non de joie; mais en-
suite il fait recueillir dans une pro-
fonde paix le fruit de la justice a
ceux qui auront ete ainsi exerces.
12. Relevez done vos mains lan-
guissantes, et fortifiez vos genoux
affoiblis.
i3. Conduisez vos pas par des
voies droites, afin que, s'il y en a
quelqu'un qui soit chancelant,' il
ne s'ecarte point du veritable che-
min ,' mais plutot qu'il se redresse.'
Rom.xu. 18. i4. Recherchez la paix avec tout
le monde, et la saintete' sans la-
quelle nul ne verra Dieu.
8. Quod si extra disci-
plinam estis, eujusparti-
cipes facll sunt omnes :
ergo adulleri , et non filii
estis.
9. Deinde patres qui-
dem carnis nostrse, eru-
ditores habuimus , et re-
verebamureos: non mul-
to magisobtemperabimus
Palri spirituum , el vive-
mus?
10. Et illi quidem in
tempore paucorum die-
rum, secundum volunta-
tem suam erudiebant nos:
hie autem ad id quod uti-
le est in recipiendo sanc-
tificationem ejus.
ii.Omnis autem dis-
ciplina , in praesenti qui-
dem videtur non esse
gaudii , sed mceroris :
postea autem fructum pa-
calissimum exercilatisper
earn reddet justitiae.
12. Propter quod re-
missas manus et soluta
genua erigite,
1 3. Et gressus rectos
faeite pedibus vestris : ut
non claudicans quis er-
ret, magis autem sane-
tur.
\^. Pacem sequimiui
cum omnibus etsanctimo-
niam, sine qua nemo vi-
debit Deum :
■j^ ro. N'ayant quelquefois en cela d'autre regie que leur passion et leur
caprice.
Ibid. Pour nous former k la vie civile.
Ibid. Autr. pour nous rendre participans de sa saintete.
y 1 3. Mai affermi dans la foi.
Ibid. Gr. autr. il ne se laisse pas renverser.
Ibid. Qu'il s'affermisse de nouveau , y etant excite par voire exemple.
f i^.Le grec tov aftaau-bv pent signifier, la puret^, la cbastat^.
CHAPITRE Xll. 360
i5. Contemplantes ne i5. Prenez garde que personne
quis desit gratiae Dei : ne ne manque a la grace de Dieu , ' de
qua radix amaritudinis peur que ' quelque racine amere,
sursum germinans impe- poussant en haut ses rejelons , n'e-
diat , et per illaui inqui- toufle la bonne semence,' et ne
nentur niulli. souille I'ame de plusieurs. '
16. Ne quis fornicator, 16. Qu'il ne se trouve parmi
aut profanus ut E.«au, vous quelque fornicateur,' ou quel-
qui propter unam escam que profane, conime Esaii , qui Gc/i. xxt.33.
Tendidit primitiva sua. vendit son droit d'ainesse pour un
seul plat. '
17. Scitote enim quo- 17. Car vous savez qu'ayant de- Gen. xxvu.
niam et postea eupiens puis desire d'avoir, comrae premier 3S.
hereditare benedictio- heritier, la benediction deson perc,
nam, reprobatus est : non il futrejete; et il ne put lui faire
enim invenit poenitcntijB clianger de resolution, ' quoiqu'il
locum, quamquam cum Ten eQt conjure aYec larmes. '
lacrymis inquisisset earn :
18. 'Son enim accessis- 18. Car vous ne yous etes pas Exod xix.
tis ad tractabilem mon- approches ' d'une montagne mate- ^*- "• *'•
tern, et accensibilem ig- rielle , d'un feu brulant. d'un nuage
nem, et lurbinem, et ca- obscur et tenebreux, de tempeles
liginem , et procellam, et des eclairs ,
19. Et tubae sonum, et 19. Du son d'une trompette, et
Tocem verborum, quam du bruit d'une voix qui etolt telle,
y i5. N'abandonne la foi.
Ibid. Ou p]ul6t : Pi-enez garde tfue, etc.
Ibid. Quelques-uns conjeclurenl qu'au lieu du mot grec itcylr,, rendu par
hnpediat, il faudrait lire, it yO.i,, qui signifie infelle, selon I'eipression du
Deut. XXIX. iS. , d'oii cette parole paroit etre emprunlee : c'est-a-dire , que
quelque racine amere ne pousse en baut des rejetons de flel , et^we itnjide-
Ute, etc.
Ibid. En les entrainant par le mauTais exemple.
-f 16. Dans TEcriture , la fornitatlon signifie souTent Tinfidclite de Tame
qui s'attatbe aox creatures : il y a lieu de penser que I'ApAlre I'entend ici en
ce sens. Voyez I'aualyse.
Ibid. Qui prt'fera ainsi le plaisir de se rassasier pour un moment, a la be-
nediction de son pere qui deToit le reudre beureux pour toute sa vie.
y 1 7. Le porter a revoquer en sa faveur ce qu'il avoil fait pour Jacob.
Ibid. Prenez done garde qu'il ne se Irouve aussi parmi vous quelqu'un qui
soit assez malbeureux pour pr^ferer les plaisirs passagers et les biens peris-
sables de cc;te vie, aux benedictions ct'Iestes qui le regardenl comme enfant
de Dieu. de peur qu'aprcs avoir renonce a celte qualite pour consencr ces
avanlages lemnorels , il ne puisse plus recouvrer son droit, ni engager Dieu a
lui donner part a an bonbeur qu'il auroit si pen estime.
y^ 1 8. Comm* cent qiii re^arenl la loi anciCTine.
a5. -ih
354
KPMKE l)i: SAJiM I'AliL AUX HEBREllX.
Exod. xrx.
r3.
que ceux qui reutendireul supplie-
reut qu'on neleurparlat plus."
20. Car ils ne pouvoienl porter
ia rigiieur dc cette menace : Que si
. une bete meme touchoit ia monta-
gne , elle seroit lapidee. '
21. Et ce qui paroissoit etoit si
terril)le, que Moise dit lui-meme : '
Je suis treinblant et saisi d'etfroi.
22. Mais vous vous etes appro-
ches de la montagne de Sion , de la
vilie du Dieu vivant, de la Jerusa-
lem celeste, d'une troupe innom-
brable d'anges,
25. De I'assemblee et de I'Eglise
des premiers-nes ' qui sont ecrits
dans le ciel , de Dieu qui estle juge
de tous, des esprits des juslesqui
sont dans la gloire ;'
24. De Jesus qui est le mediateur
de la rtouvelle alliance, et de ce
sang' dont on a fait I'aspersion , '
qui parle plus avantageusement
que celui " d'Abel. '
25. Prenez garde de mepriser ce-
lui qui vous parle; car si ceux qui
ontmoprise celui qui leur parloit
qui audierunt, excusave-
runt se, ne eis fieret ver-
bum.
20. Non enim porta-
bant quod dicebatur : Et
si beslia teligerit moh-
tem, lapidabitur.
21. Et ita terribile erat
quod videbatur : Moyses
dixit : Exterritus sum, et
Iremebundus.
22. Sed accessistis ad
Sion montem. et civita-
lem Dei viventis, Jerusa-
lem coelestem , et multo-
rum millium angelorum
I'requentiam :
23. Et Ecclesiam pri-
mitivorum, qui conscrip-
ti sunt in ccelis, et judi-
cem omnium Deum, et
spiritus justorum perfec-
torum,
24. Et testamenti novi
mediatorem Jesum , et
sanguinis aspersionem
melius loquentem quam
Abel.
25. Videte ne recusetis
loquentem. Si enim illi
non effugerunt. recusan-
y 19. Mais que Dieu leur fil connoilrc ses volontes par Moise.
y 20. Lc grec imprime ajoute : ou percce d'un dard. Cela est dans le texle
dt; I'Exode , xix , i3.
•^ 2 r. On suppose que celte parole , qui ne se trouve point dans les livres de
Moise, avoit ete conservee par Iradilioa. Peut-^tre que saint Paul fail allusion
a ce quiest rapjprtedansleDeuteronome, ix. 19. , ou la Vulgate di t : Timiti
enim , et ou la version des Seplante dit comme iii : Extenitus sum.
y i3. C'est-a-dire des elus.
Ibid. A la lettre <;t selon le grec : qui sont consommes.
■jf^ 24. Le sang adorable qu'il a repandu sur la croix.
Ibid. Sur nous dans noire bapl^me. — ^C'est !a construction du grec : el
saiiquinem asjiersionis melius lotjuentem , etc.
Ibid. C'esl le sens du grec.
Ibid. Pulsqu'il demande i Dieu misericorde pour nous, au lieu que celui
d'Abel dcmandoil vengeance centre son frere.
CHAPITRE \II.
sur la terre ' n'oot
3.5o
leseuin qui super tenau) sur la terre n oot pu eviier la
loquebalur : uiuito magis peine, nous pourrons bien moins
nos, qui tie coeli? loquen- I'eviter, si nous rejetons celui qui
teui nobis avertiimis : nous parle du liel;
a6. Cujus vox moTit 26. Lui dont la voix alors ebran-
terram tunc: nuncautem la la terre, et qui maintenant de-
repromiltit, dicens : Ad- clare ce qu'il doit faire, en disanl :
htic seinel, ct ego move- J'agirai encore une iois,' et, non- Jgg. u. 7.
bo non solum terrain , seulement j'ebranlerai la terre ,
sed et coelum. mais le ciel meine,
27. Quod auteui, ad- 27. Or, en disant : encore une
hue semel , dicit : decia- fois, il declare qu'il fera cesser les
rat noobiliutn translalio- choses mobiles, corame etant faites
nein tanquain factorum, seulement pour un temps , afin que
ut maneant ea qua* sunt celles qui sont immol)iles demeu-
immobilia. rent pour toujours.
28. Itaque regnum im- 28. C'est pourquoi, commencant
mobile suscipientes, ha- deja a posseder' ce royaume qui
bemusgratiam :perquara n'est sujet it aucun changement,
serviamus placentes Deo, conservons' la grace, par laquelle
cum metu et reverentia. nous puissions rendre a Dieu un
culte qui lui soit agreable , etant
accompagne de respect et d'une
sainte frayeur ;'
39. Etenim Deus nos- 29. Car notre Dieu est un feu D««t iv. a4.
ter ignis consumens est. devorant. '
■^ 15. L'ange qui !eur parloit de la part de Dieu. — C'est le sens du grec :
qui leur parloit sur la terre de la part de Dieu.
ya6. C'est I'expression de la version des Septante , et ITi^breu y est con-
forme.
^^ aS.Parlafoi.
Ibid. C'est le sens du grec : habeamus gmiiam. La Vulgate lit : hal>emtu^
c'est-a-dire . nous avons la grace , etc.
Ibid. Gr. aulr. de puJeur et de res[>ect.
y 29. Qui nous consumera ctemellement, si nous ne lui sommes Bd^les, et
si nous n'observons exactement tout ce qu'il nous ordonne.
356
EPITHE DK SAINT PAUL kVX HEBREUX.
CHAPITRE XIII.
L'Ap6tre continiie de donner aux Hebreux quelques avis parliculiers. Il le»
console de la peine qu'ils avoient de se voir cliass('-s de la synagogue. II de-
mande aux Hebreux le secours de leurs prieres. Priere admirable qu'il fait
lui-ni^me pour eux. Conclusion de celte epitre.
1. CoNSERVEz toujours la charite
envers vos freres , '
^oTO.xn. i3. 2. Et ne negligez pas d'exercer
X. Pe/r.iv. 9. I'liospilalite ; car c' est en la prati-
Gen.x\'in. 3. quant que quelques-uns ont recu
XIX. a. pour botes des angos sans le sa-
voir/
3. Souvenez-vous aussi de ceux
qui sont dans les chaines , comma
si vouseliez vous-memes enchaines
aveceux; et de ceux qui sont af-
fliges, comme etant vous-memes
dans un corps mortel.'
4. Que le mariage soit traite de
tons avec honnetete ; et mie le lit
nuptial soit sanslache; car Dieu
condamnera les fornicateurs et les
adulteries.
5. Que votre vie soit exempte
d'dvarice : soyez contens de ce que
Jos. I. 5. vous avtz; puisqu'il dit: Je nevous
lai.sserai point, et je nc vous aban-
donnerai point,'
6. C'est pourquoi nous disons
Ps.ctviuB. avec confiance : Le Seigneur est
mon secours; je ne craindrai point
ce que les hommes pourront me
fa ire.
7. Souvenez-vous de vos con-
1. Cbauitas t'ratcrnita-
tis maneat in vobis :
2. Et bospilalitatem
nolite oblivisci t per banc
enim latuerunt quidam,
angelis bospitio receplis.
3. Mementote vincto-
rum , tanquam simul
vincti, et laborantium ,
tanquam et ipsi in corpo-
re morantes.
4. Honorabile connu-
bium in omnibus, et tbo-
rus immacuiatus : forni-
catoros enim et adulteros
judicabil Dens.
5. Suit mores sine ava-
ritia, contenli prajsenti-
bus : ipse enim dixit :
Non te dcseram, neque
derelinquani :
6. Ila ut confidenter
dicainus : Dominus mibi
adjutor: non timeboquid
taciat mibi bomo.
7. Mementote praepo-
y- r. C'est un des premiers preceptes de la loi.
•jf^ 2. Comme Lot, Manue etsa femme, etc.
-^ 3. Sujel aux m^mes peines et aux memes infirmit^s.
y^ 5. Ne vous defiez done point de la providence de Dieu.
CHAPITRE XIII. 867
titonim vestrorum, qui ducteurs,' qui vous ont preche la
vobis locuti sunt verhum parole de Dieu ; et considerant
quelle a ete la fin de leur vie , iini-
tez leur foi- '
Dei : quorum intuentes
exilum conversalioiiis ,
imilamiiii fi>lcni.
8. Je-sns Chri.xlus heri ,
el hodie: ipse et in secula.
9. Doctrinis variis et
peregriui? nolite abduci.
Opiiniuniest eniin gratia
stabilire cor, non escis :
ID. Habemus altare ,
de quo cdere non habent
8. Jesus-Cbrist etoithier, il est
aujourd'bni. et il sera le meme
dans tons les siedes.'
9. Ne vous lais.»ez point empor-
ter a une diversite d'opinions et a
des doctrines elrangeres;' car il
est bon d'afiFerinir son coeur par la
non profuerunt ambulan- grace, au lieu de s'appuyer sur des
tibus in eis. discernemens de viandes qui n'ont
point serTi a ceux qui les ont ob-
serves. '
10. Nous avons un autel'dont
ceux qui rendent encore un cult&
poteslalein , qui laberna- au tabernacle' n'ont paspouvoir de.
culo deserriunt. manger. Lev. xsu
11. Quorum enim ani- 11. Car les corps des animaux,
inalium infertur sanguis dont le sang eloit porle par le sou-
pro peccato in Sancta verain pontife dans le sancluaire
per ponlificem, borum pour I'expiation du peche , sont
corpora cremantur extra brules hors le camp.
castra.
12. Propter quod et 12. El c'est pour celte raison'
Jesus, ut santlificaret per que Jesus-Christ devant sanctifier
suuin sanguinem popu- le peuple par son propre sang , a
lum, extra porlam passus soufiert hors de la porte. '
est.
i3. Exeamus igitur ad i5. Sortons done hors du camp;'
T^ 7 . C'est I'expresslon du grec.
Ibid. Ne vous laisscz point ebranler non plus qu'eux par ia persecution et
par les lourmens.
^ 8. Toujours imtnuable dans ses qu.nlites, dans sa doctrine. — Gr. aulr.
Jesus-Clirist est aujourd'liuide memequ'il ctoit hier; el ilsera le memediaa
tous les si'xles. '
■j^ 9. DifFerenles decelies qa'on vous a annoncees de )a part de Jesus-Christ.
Ibid. El qui ne vous sersironl de rien non plus a vous pour voire sanclifi-
cation .
•f 10. Un autel sur leqiiel Je'sus-Chrisi ineme est offer% comme la vie-'
time qui peul seule nous sanciijier.
Ibid. Dans le lemple des juifs de Jerusalem.
•f 1 2 . Pour rempHr cetle fiuure.
Ibid. Hors de la ville de Jerusalem.
^ i3. Quittont la synagogue, loa temple . si-s facriiices.
"358
EPITKE DE SAINT PAUL AUX HEBREUX.
etallons a Jesus-Christ, enportant
rignominie de sa croIx '
Mich.u. 10. i4- Clar nous n'avons point ici dc
ville perraanente; mais nous cher-
chons celle oCi nous devons habiter
un jour. '
i5. Offrons done par lui sans
cesse c\ Dieu une liostie de louange,
c'est-a-dire le fruit des levrt-s" qui
rendent gloire a son nom.
16. Souvenez-vous d'exercer la
charite , et de faire part de vos
biens" aux autres; car c'est par de
semblables hosties qu'on se rend
Dieu favorable.
17. Obeissez a vos conducteurs ,'
et demeurez soumis a leurs ordres,
afin qu'ainsi qu'ils veillont pour le
bien de vos aines," comme devant
en rendre compte a Dieu, ils s'ac-
quiltent de ce devoir avec joie, et
non en gemissant; ce qui ne vous
seroit pas avanlageux.
18. Priez pour nous, car nous
croyons, selon le temoignage que
notre conscience nous rend, que
nous n'avons point d'aulre desir
que de nous conduire saintement
en toutes choses.
ig. Et je vous conjure de le faire
avec une nouveile instance, afin
que Dieu me rende plus lot a vous.
20. Que le Dieu de paix , qui a
euin extra castra, impro-
perium ejus portantes-
14. Non enimhabemiis
hie manentcm civitatein ,
sed futuram inquirimus.
i5. Per ipsum ergo of-
feramus hostiam laudis
semper Deo, id est, fruc-
lum labiorum confiten-
tium noniini ejus.
16. Beneficentiae autem
et eommunionis nolile
oblivisci : talibus enim
hostiis promeretur Deus.
17. Obedite proposilis
vestris, et subjacele eis :
ipsi enim pervigilant ,
quasi rationem pro ani-
mabus vestris reddituri :
ut cum gaudio hoc £ia-
ciant, et non gementes :
hoc enim non expedit vo-
bis.
18. Orate pro nobis :
confidimus enim quia bo-
nam conscientiam habe-
mus in omnibus bene
volentes conversari.
ig. Amplius autem de-
precor vos hoc facere ,
quo celerius restituar vo-
bis.
20. Deus autem pacis,
^ 1 3. La confusion d'adorer et de suivreun Dieu crucifie.
•^ 14. Cette Jerusalem celeste, dont la J«^riisalemd'ici-bas n'est quel'ombre
el la figure, et dans laquelle nous ne pouvonsentrer que par Jesus-Clirist et
avec Jesus-Christ.
■j- 1 5. Ceci peut s'entendre du sacrilice eucharislique. Voyezcequi en est
ditdansl'analys.e.
if 16. C'est le sens du grec.
>'^ 1 7. C'est I'expression du grec.
Ibid. C'est la construction du grec : Ipsi enim pervigilant pro animabus
vestris, quasi rationem reddituri. Autrement el i la lellrc: Car ils veil
lent , p!c. ; obeissez-letir done, afin qu'il? s'a<:quiu<iit. . .
qui eiluxit de uiorluispas-
torein magnum ovium.
in sanguine testamenti
jeterni , Dominum nos-
trum Jesum Christum,
21. Aptet vos in omni
bono, ut faciatis ejus vo-
luntatera : faciens in vo-
bis quod placeat coram se
per Jesum Christum : cui
est gloria in secula secu-
lorum. Amen.
aa. Rogo autem vos,
fratres , ut sufferatis ver-
bum solatii. Etenim per-
paucis scrips! vobis.
23. CognoscJte fratrem
nostrum Thimotheum di-
missum : cum quo ( si
celerius venerit ) videbo
vos.
24-$alutate omnes prae-
positos vestros, et omnes
sanctos. Salutant vos de
Italia fratres.
25. Gratia cum omni-
bus vobis. Amen.
lAPITRE XIII. 3.5;>
ressuscite d'enlre les morts Jesus-
Christ notre Seigneur, qui, par
le sang du testament eternel , est
devenu le grand Pasteur des bre-
bis ,
21. Vons rende disposes a loute
bonne ceuvre,' afin que vous fas-
siez sa volonte , lui-meme faisani
en vous ce qui lui est agreable
par Jesus - Christ , auquel soit '
gloire dans les si(;cles des siecles.
Amen.
22. Je vous supplie , mes fr^res,
d'agreer ce que je vous ai dit pour
vous consoler, ne vous ayant ecrit
qu'en peu de mots. '
20. Sachez que notre frere Ti-
mothee est en liberie; et s'il vient
bientot ici , j'irai vous voir avec
lui.
24- Saluez lous ceux qui vous
conduisent et tous les saints. ' Nos
freres d'ltalie vous saluent.
25. Que la grace suit avec vous
tous. Amen.'
y^ v> I . Le mot o/ieiv est exprim^ dans \e gree.
Ibid. C'est le sens du grec , qui porte simplement : cui gloria, etc.
■f 22 . Par rapport a la muhitude des choses que j'atois k tous dire, et a In
grandeur des mysteres quej'avois a trailer.
V 24 . Tous les cbreliens qui sonl parmi vous.
■jf 25. Les esemplaires grecs porlentici : Ek;rile d'ltalio aux Hebreux par
I'entremise de Timoih^e en -o> versets.
PREFACE GENERALE
SUR
LES EPITRES CA.NONIQUES.
Remarqucs Qj, appelle ipitres canoniqucs , ou calhohques, les sept ept-
surlenomde, ^ ■■ * ^ , ^ i -i i > ii j • ^
cescpitrcs. ^^^ ^"^ ^^ trouvent dans nos bibles apres celles de saint
Paul; savoir, I'epUre de saint Jacques le Mineur, les deux
de saint Pierre , les trois de saint Jean, et celle de saint
Jude. Le nom de canoniques^ , qu'on Icur donne , pourroit
marquer qu'ellcs conliennent ties regies imporlanles pour
laconduiie des mosurs, et des instructions sur les malieres
de la foi. Le mot grec y.avwv canon, d'ou derive celui de
' canonique, signifie proprement une regie. Mais peut-etre
n'ont-elles ele nommees canoniques que parce qu'elles sent
rcnfermees dans le canon des divines Ecritures.
On les appelle d^wssi cathoUques'^ , et ce nom leur estaf-
fecte plus communement parmi les anciens. C'est a pea
pres, dit Theodoret^ comme qui divo'ii epkres circulaires,
parce que, n'elantenvoyees a aucune egliseen parliculier,
elles sont communes a toutes celles qui professentla foi
de Jesus-Christ, ou du moins a celles qui etoienl compo-
sees de Juifs convertis au christianisme , et repandus alors
dans presque toutes les parties du monde ; a quoi fait al-
lusion le nom de calhoUque , qui signifie proprement uni-
Tersel. Les Orientaux appellent le livre qui contient ces
epitrcs, Catholicon ou CalhoUque ; et quand ils en citcnt
quelques-unes , ils disent, par exemple, Saint Pieire ^ dans
le Catholicon.
' Concil. Laodicen. can. 60. Cassiodor. de Institut. Diuin. Liu. cap. 8.
Hieron. sen alius Prolog, in cpist. cnnovicas. — ^ Ita P aires passim. • —
'' Prolog. Jlieodorct.. in epist. cnlholic. in edit. Roberti Sieph. KaO'JXwai
Xs-j'OVTai aiirat, iaovsl STX.ujc/.ict, ou -yap dcpopK7t/.svu; I'Qvei hi, r ttoXe'., wc 0 Oetc;
IlauXo?, oil/.a >ca6o'Xou toI; ■Tiiaroii viroi i&u^aioi; toI? ev rf ^ladiro-
fa, «; riETfcc, % -Af). 775(7'. Tot{{)7rb TTv ucOttiv TTiffTtv Xpt(motvbt{ TiXoHai.
PREFACE SLR LES EpixRES CA>0!IIQUES. 36 1
L'ordre que ces epitres tiennent enlre elles n'a pas ete Remapqaei
unifornie, parliculierement panni les Latins. L'auteur du surl'arrange-
prologue que Ion a sur les epilres canoniques, prologue ?^"^ ^***
que les imprinies et plusieurs manuscrits attribuent a saint
Jerome, ct que plusieurs savans' iui conteslent, pendant
que d'autres^ souliennent qu'il est delui; cet auteur, quel
qu'il soit, nous apprend que les Grecs catholiques et or-
thodoxes les rangeoient autrement que les Latins^, ll dit
que, duns la traduction qu'il en a faile sur le gr6c, il les a
retablies dans leur ordre naturel, et y a remis un passage
important, que les copistes latins en avoient mal a propos
relranche;c'estverset7. du chap.vde la premiere epitrede
saint. lean, verset qui regarde les trois tenioins qui rendent
temoignage dans le ciel : Tres sunt qui testimonium dant in
calo, Pater, J'erbum, ct Spiritus Sanctus ;et hi Ires unum sunt.
Les Grecs arrangeoient les sept epitres canoniques
comme nousles voyons aujourd'hui dans nos bibles, savoir :
1° celle de saint Jacques, 2° les deux de saint Pierre, 3° les
t: ois de saint Jean, et i" celle de saint Jude. C'est ce qu'on
remarque dans lesperes et dans les manuscrits grecs. Eu-
sebe*, saint Gregoire de Nazianze^, le concile de Laodi-
cee*^, saint Atlianase', saint Jean Damascene^, les mettent
toujours dans cct ordre. Mais les Latins les arrangeoient
autrement, comme on le voit dans saint Auguslin, qui met
d'abord les deux de saint Pierre, puis les trois de saint Jean,
et celle de saint Jude, et en6n celle de saint Jacques. Le
fameux manuscrit de Clermont les dispose de meme. Le
P. Martianay cite un manuscrit latin de la bibliotheque de
Colbert'', oil les sept epitres canoniques sont placees dans
cet ordre : les deux epitres de saint Pierre , celle de
saint Jacques, les trois de saint Jean , et celle de saint
•Jude. Le commentaire de saint Clement d'Alexandrie sur
les epitres canoniques, et que nous avons en latin dans
Cassiodore, met d'abord la premiere de saint Pierre, puis
• Mille, le P. Martianay. Roger, Simon. — - Erasme, Sukcniop, le Clerc,
Ketner, etc. — ^Prolog, in - episc. canonic. Non idem ordo est apud Grce-
cos qui iniegre sapitint etjidim rectam seclantur, epislolarum septem quce
canonicce nunciipantur, qui in laiinis codicibus iiwenitur. Quod quia
Pelrus primus est in numero apostolavum, primce sint eliam ejus epistolae,-
in ordiiie celerarum. — * Euseb. lib. n. cap. 23. Hist, eccles. — * Greg.
Naziaii. Carm. de Can. Script. — * Cone. Laodic. can. 60. — 'jithan. episc.
Festi. Idem, in Synopsi. — * Damascen. I. iv. de Fide cath, c. 18. — ' Mss.
Colbert, n. 245.
3^2 PREFACE
celle de saint Jude , puis la premiere de saint Jean, puis la
seconde. II ne parle ni de celle de saint Jacques, ni de la
seconde de saint Pierre, ni de la troisieme de saint Jean.
Le menie CassiodoreS donnant la division des sainles Ecri-
tures selon saint Jerome, distribue ainsi les epttres des ap6-
tres : i" les deux de saint Pierre, puis les quatorze de saint
Paul , puis les trois de saint Jean , celle de saint Jacques,
celle de saint Jude, les Actes des apotres , I'Apocalypse.
Innocent P', dans son epilre aExupere, metlcsepitres de
saint Jean les premieres, et celle de saint Jacques la der-
niere ; dans quelquesanciennes bibles latinesmanuscrites^,
on met les epitres canoniques entre les A.ctes des apotres
et les epitres de saint Paul. On les voit de m^me dans les
manuscrils syriaques , et dans la bible moscovite.
Le dernier des canons qui portent le nom des apotres*
metpremierementcellede saint Pierre, puis celles de saint
Jean, celle de saint Jacques, et celle de saint Jude. Saint
Augustin, au livre de laFoi et des OEuvres,chap. xiv, suit
le meme ordre ; mais dans le livre ii, chap.viii, de la Doc-
trine chretienne^ il met d'abord les deux epitres de saint
Pierre, les trois de saint Jean , celle de saint Jude , et enfin
celle de saint Jacques. Eusebe , dans un endroit de son
Histoire ecclesiaslique^, met immedialement apres les Epi-
tres de saint Paul la premiere de saint Jean , et ensuite la
premiere de saint Pierre , lesquels n'ont jamais ete contes-
tees ; mais ailleurs^ il dit expressement que I'epitre de saint
Jacques est la premiere des catholiques. Rufin dans I'expo-
sition dusymbole,leconcile de Carthage^ en 397, can. 47,
Junilius' eveque d'Afrique dans le sixieme siecle , et d'an-
ciens denombremens des versels des livres saints, rappor-
tes dans les notes de Cotelier sur saint Barnabe, mettent
I'epitre de saint Pierre a la tete des canoniques.
De tout cela on peut conclure qu'anciennement Tordre
que les epitres canoniques devoient tenir entre elles n'e-
' Cassiodor. de instit.dw. Script, c. 8. — ^ Biblia Mss. sancti Gennani a
pratis et PP. Prcepost. Pontimussa. — ' Can. apost. cap. lxxxiv. IIsTpou
^^TTiffToXat ^uo, Iwavvou Tpet?, laxMSou [Aia, t&ui^* [*''«• — * Euseb. lib. iii. c
XXV. Hisi. eccles. — *■ Euseb. lib. ii. cap. xxin. Hist, eccles. — * Ce concllr
met I'ppilre de sainl Jacques toule la derniere, el les deux de saint Pierre les
premieres. — ' .Junil. lib. i. de Pan. diwince leg. cap. v. Get auteur ne met
que cinq epUres canoniques, celle de saint Jude, et les deux derniercs de sainl
Jean. Mais immediatement anparavant il avoil mis la premiere de saint,
Pierre, et celle do saint Jean, aprrs celle ilc saint Paul aux Hohretix.
I
SLR LES EPiTRES CANOMIQUES. %6$
toil nuUement fixe ni chez les Grecs ni chez les Latins , et
que I'auteur du prologue siir ces epitres, attribue a saint
Jer6nie, a eu raison do dire que lesLatinsprincipalememt
mettoienl les epitres de saint Pierre a la lele des autres ,
parce qu'il eloil le chef des apotres : Quia Pelras primus
est in numero apoxtolorum, prima: sini etiam ejus epistola in
ordine celerarum. Les Grecs donneientplus communement
le premier rang a celle de saint Jacques , soit a cause qu'ils
ia croyoient plus ancienne que celle de saint Pierre , ou
parce que saint Jacques fut fixe a Jerusalem en qualito
d'eveque avant que les autres apotres eussent mis leurs
sieges dans aucune autre ville , ou enfin parce que son epi-
tre est plus catholique ou plus universelle que celle de saint
Pierre el que toutes celles des autres', comme ayanl ele
ecriles indefiniment aux douze iribus, qui eloienl dans la
dispersion. Quoi qu'il en soil, cet ordre et cet arrange-
ment esl assez arbiiraire : et quand les epitres de saint
Pierre ne seront point mises au premier rang, cela ne de-
roge point du tout a sa primaute.
Saint Gregoire de Nazianze^ remarque que les anciens Reiuarques
etoient partages surle norabre des epitres calholiques. Les surle r ombre
uns les recevoient toutes sept, et les autres seulement " ^'P'^'^*^
Irois; savoir, celiede saint Jacques, la premiere de saint
Jean , et la premiere de saint Pierre. On verra a la lete de
chacune de ces epitres les difficultes qu'ou a formees sur
leur canonicile. Les deux dernieres epitres de saint Jean ,
quoique ecriles a des particuliers; onl ele recues au nora-
bre des epitres calholiques, apparemment pourne pas les
separer de la premiere epilre du meme evangeliste, qui est
generate, et dont I'aulhenticite n'a jamais ete contestee.
II y a meme d'assez bonnes raisons de croire que la seconde
et la troisieme sont des especes de lettres de creance ou
de recommandation, ecriles a des eglises particulieres.
Le but general des epitres calholiques est, selon la re- Remarques
marque de saint Augustin ^, de refuler les heresies nais- *"' ''o^et de
santes de Simon le magicien, des nicolaltes, et autres sem- ^^ ^F'"^'-
^ Scholutsi. GrtBc. annontm. in Cod. Mss. Beg. it. -ub.' apud Mill,
p. 542. — * Nazianz. Carm. de Script, canon. Ka9c).ocd)v Ei7tcTc"/.wv
Xcrivii, Ji'/^ccOai rry lixeiocj u.iav,
M-av Je Ile'Tf C'J, TTV ~t ItdStWOU {Aiav.
— ' uiitfr. lib. de Fide et Operib. cap. xit.
364 PREFACE
blables hcretiques , qui, abusant de la liberie evangelique,
et prenant a con Ire-sens les paroles et les sentimens de
saint Paul, enseignoient que la foi sans les oeuvrcs etoit
suffisanle pour le salut, quoique I'Apotre se fut explique
assez clairement sur cela , en disant qu'il enlendoit la foi
agissante par la charite,: jP/V/i?^ qace per charilatem operalur^.
Et dans ses epitres il a allaque assez souvent les faux apo-
tres, qui Iroubloient I'Eglise ou par leurs dogmes nou-
vcaux , ou par leur fausse et dangereuse liberte , ou par
Tabus qu'ils faisoient de ses principes , pour corrompre
la morale de I'Evangile , ou pour en rendre les verites
nieprisables ou odieusqs.
Remarques L'epitre de saint Jacques est visiblement contre ceux
Bur le carac- qui nioient la necessile des bonnes CEUvres ; celles de saint
tere de ces pierre, contre les disciples de Simon, contre les faux (Joc-
^^' teurs, et contre les heretiques en general. La seconde de
saint Pierre et celle de saint Jude n'ont qu'un meme
objet; elles attaquent surtout les faux apotres, qui blas-
phemoienl contre les verites saintes, par I'abus qu'ijs en
faisoient , et par la pernicieuse doctrine qu'ils repandoient
dans TEglise. Celle de saint Jude emprunte meme plu-
sieurs expressions de la seconde de saint Pierre. La pre-
miere de saint Jean est aussi contre les memes bereliques
et les novateurs ; elle prouve I'obligalion des actions de
piete, et la necessite de pcrseverer dans la foi etdans la
patience.
Saint Jerome, dans I'ppitre a Paulin, donne le vrai ca-
raclere de ces epitres , en disant qu'elles sont aulant rera-
plies de mysteres qu'elles paroissent succinctes : elles sont
abregees dans les paroles, mais longues dans le grand sens
qu'elles renfermcnt : Tam mysticas, quam succinctas ; et
breves pariler , et longas : breves in verbis ; longas in senten-
liis. 11 y a peu de personnes qui ne soient eblouies en les
lisanl , et qui ne s'apercoivent que leurs lumieres sont trop
bornees pour en penetrer loute I'elendue et la profon-
deur : Ut rarus sit qui non in earum leclione cceculiat. Ceux
qui voudront comparer ce que saint Pierre , saint Jacques
et saint Jean etoient avant leur apostolat et avant la des-
oente du Saint-Esprit, avec I'esprit , la force, la grandeur,
, les sentimens qu'on remarque dans leurs lettres, ne pour-
ront s'empecher d'y admirer la main du Tres Haut, et le
' Galal. V.6.
SL'R LES KpItrES CANOMIQLES. 36.5
miracle de sa sagesse et de sa puissance. Mais nous laisse-
rons au lecteur la satisfaction d'en decouvrir lui-mtme
toutes les beautes. Nous craindiions d'abuser de sa pa-
tience, si nous nous elendions sur ces epiues autantque
sur celles qui precedent ; nous passerons done rapidenient
sur le texte de ces epitres, dans I'analyse que nous en don-
nerons. m
PREFACE
SUR
LEPITRE DE SAINT JACQUES.
Il y a beaucoup de diversite de sentimens sur I'auteur de Remarques
celte epiire. Les uns i'aiiribuent a saint Jacques le Majeur, surl'auteurde
fils de Zebedee , frere de Jean , qui fut decapile par Herodc
Agrippa * I'an 44 de I'cre chrel. vulg. , onze ans apres la
mort de Jesus-Christ. D'aulres la donnent a saint Jacques,
fils d'Alphee, surnomme le Mineur, et le frere du Sei-
gneur. Dautres en font auteur Jacques le Juste , eveque de
Jerusalem , dont parlent saint Clement d'Alexandrie, He-
gesippe et Euscbe ^. II est certain qu'Eusebe ^ et saint Je-
rome * , soil qu'ils parlent en leur nom et suivant leur
sentiment, soit qu'ils expriment le doule des autres, re-
marquent que plusieurs la croyoient supposee , sous le
nora de saint Jacques ; et ils en parlent comme doutant
eux-memes quelle fut de lui. Quelques nouveaux inter-
#
* ^cL XII. 2. Occidit aiitcm Jacobum fratrem Joannis gladio. — * Clem.
Jlei. et Hegesipp. aptid Eitseb. lib. ii. Hist. eccl. cap. xxiii. — ' Eitseb.
lib. II. cap. xx'ii. ioxeocCJ t, :73<arr, rtiv cvcaaJJaar/cov Ka8sXoMl>v Ett'.ctc/mv
eivai /i-j'srat. Imivi S'k i); vc6j'J£Tai aiv • cu ■ttsXXcI "jcCiv 7t>v rraXatov aorn;
etjLvracvjJciav. — * Hieron. de Script. Eccles. in Jacobo. Jacobus qui appel-
laturfraier Domini unam taniiim scripsit epislolam, quce de seplem caiho-
licis est : quce et ipsa ab alio quodam sub nomine ejus edita asseritur, licet
paulau'in tempore procedente obtinuerit auctcritfitem.
■h
366 PREFACE
pretes * les ont suivis , et se sont exprimes avec beaucoup
moins de retenue, dans un temps ou le consentement des
eglises, et la possession d'une si longue suite de siecles ,
auroient du la mettre a convert de leurs temeraires cen-
sures.
Ceux qui I'attribuent a saint Jacques , fils de Zebedee,
croient que ce saint apoti^e , ayant preche la foi aux Espa-
gnols , leur ecrivit cette lettre apres son retour a Jerusa-
lem ; I'auteur qui a mis les titres a la version Syriaque pu-
bliee par Vidmanstad croit que c'est la premiere ecriture
sacree du Nouveau-Teslament. La version arabique citee
par Cornelius a Lapide I'attribue de meme a saint Jacques,
fils de Zebedee : mais ni le syriaque ni I'arabe imprimes
dans les polyglottes de Paris et de Londres, ne portent
rien de semblable. L'ancienne version italique publiee par
le R. P. Martianay ^ lit a la fin de cette epltre ces mots :
Ea;plicit epistola Jacohi,Jilli Zebedcei.
Dans le catalogue des ecrivains ecclesiastiques de saint
Jerome, a la fin de I'article de saint Matthieu, on lit que
Jacques , fils de Zebedee , precha I'Evangile aux douze
tribus qui etoient dans la dispersion, ce qui insinue qu'il
leur ecrivit aussi cette epilre : mais cet endroit est une
addition faite au lexte de saint Jerome, laquelle ne merite
aucune croyance. Le faux Lucius Dexter dans sa chroni-
que , Isidore ^ auteur de la vie et de la mort des Saints, et
la liturgie des Mozarabes , appuient ce sentiment. On le
remarque aussi dans la fausse epttre de Sixte in, laquelle
se trouve dans la bibliotheque des peres. Gaspard San-
chez ^ rapporte toutes ces autoriles dans son Traite sur le
voyage de saint Jacques en Espagne , et il ne paroit pas
desapprouver ce sentiment.
Mais saint Jacques , fils de Zebedee , ayant ete mis a
mort par Herode onze ans apres I'ascension du Sauveur,
il est bien difficile que I'Evangile eut deja fait parmi les
Juifs disperses par tout le monde autant de progres qu'il
paroit par cette lettre qu'il en avoit fait. De plus les lettres
•de saint Paul aux Romains et aux Galates , auxquelles saint
Jacques fait visiblement allusion dans celle-ci , dans les
instructions qu'il donne aux chretiens hebraisans , et dans
* Luther. Hunnius, Centuriatores, Caj'et. Fide et Erasm. — * Fide Not.
MaHtan. in epist. Jacob, pag. igi. — ^ Jsidor. de Vila el Morte SS. cap.
Lxxiii. — * Sand, ifaclat. 3. de Pmfeclione sancii Jacobi in His]>an. c, 12.
SUR LES EPlTBEJi CANONIQUES. 36<j
les abus qu'il leur reproche; ces letlres tie saint Paul n'e-
•toienl pas encore ecrites lorsque saint Jacques, tils de Ze-
beclee, fut decapite. Enfin les auteurs qu'on nous cite ne
sont ni anciens, ni respectables par aucuu endroit; ce
sont desecrivains interesses a soutenir la mission de saint
Jacques en Espagne , et trop nouveaux pour meriter d'etre
crus sur un (ait de cette nature. Les inscriptions et sous-
criptions des epitres des apotres, que Ton trouve dans les
manuscrits, sont d'ordinaire tres incertaines, et leur auto-
rite seule n'est jamais decisive,
Ceux qui veulent distinguer Jacques le Juste, eveque
de Jerusalem , de saint Jacques le Majeur , et de saint
Jacques le Mineur ' , se londent sur le temoignage de
saint Clement d'Alexandrie et d'Hegesippe, qu'ils pre-
tendcnt eire tavorables a ce sentiment. Mais plus on exa-
mine leur texte , plus on est porte a penser qu'ils ont cru
que Jacques le Juste , et Jacques le frere du Seigneur , ne
sont qu'une m^me personne, et la preuve en est claire.
Ce saint Jacques le Juste, eveque de Jerusalem , est connu
par Josephe ^ cite dans Eusebe , comme frere de Jesus-
Christ. Or ce Jacques , frere de Jesus , etoit I'apdtre sur-
nomme le Mineur; et saint Paul meme ^ lui donne le nom
d'apotre : Aliiim auteni aposlolorum vidi neinincm , nisi Ja-
cobum , fralrem Domini. Jacques le Juste, et le frere du
Seigneur, ne sont done qu'une meme personne.
11 y a sur cela assez de diversite d'opinions parmi les an-
ciens. Les Grecs modemes * presque generalement les
distinguent. Saint Jean Chrysostome ", saint Gregoire de
Nysse*^,les Constitutions des apotres ', TAmbrosiaster **,
les anciens martyrologes , saint Epiphane -' , et quelques
autres semblent en faire deux personnes. Saint Jerome
a fort varie sur cela. Mais plusieurs autres les mettent
comme un meme homme. On pent voir la note i deTille-
mont sur saint Jacques le Mineur , ou il traite de cette dif-
ficulte avec son exactitude ordinaire. Or , si Jacques le
Juste, fils d'Alphee, different de Jacques frere du Seigneur,
n'a jamais existe , il est visible que I'epitre que nous exa-
minons ne peut 6tre de lui.
' Vide Grot, el Hamm. Laurent. Erasm. — ^ Joseph. Aiitiq. lib. xx. cap.
VIII. — ' Galat. I. 19. — * Coteler. Not. in Barnab. et alios Script. p. 1-5.
— * Chrysost. in Mauh. homil. 5. el in Actahomil. 33. — ^ Nyssen. torn. 3.
p. 4i3. — ' Constit. Apost . lib. ti. cap. in. — ' Ambrosiast. in Galat. i. 19.
— ' Epiphan. hieres. -g. cap. in.
368 PREPACK
EUe ne peutdonc etre quedc saint Jacques le Mineur,
frere du Seigneur ; et c'est le sentiment qui a ete le plus'
comniun parini les ancienS) et qui est encore le plus suivi
parmi les modernes. Elle est citee sous son nom par Ori-
gene ^ , par saint Aihanase ^ , par saint Hilaire ^ , par saint
Cyrillede Jerusalem'*, par saint Ambroise ^, par saint Epi-
phane ^ , par saint Basile ", par saint Jerome mcme en plus
d'un endroit ^ , par saint Auguslin^, et par plusieurs au-
tres. Sixte de Sienne dit que les plus anciens exemplaires
latins, et nieme quelqucs grecs , donnent le titre d'ap6lre
a saint Jacques an commencement de cette Icttre ; cequ'il
. ne faut pas entendre du texle de la lettre, ou le nom d'apo-
tre n'a jamais ele , mais du titre qui se lit ainsi dans la Vul-
gate : Epistola catholica beali Jacohiapostoli. On lit la meme
chose dans quelques exemplaires grecs. Mais Tancienne
Italique , et plusieurs exemplaires grecs et latins lui don-
nent simplementle nom d'^y?//r^r/(e.y«m^./a^^M^x. D'ailleurs
ces titres en eux-memes sout d'une assez foible autorile ,
surtout lorsqu'ils varient. Ainsi ou n'cn peut rien inferer
en faveur de saint Jacques I'apotre. Mais on a assez d'au-
tres preuves pour la iui attribuer.
Abrege de la Saint Jacqucs le Mineur etoit fils de Marie, sceur de la
viedesaint gainte Vierge , fille deCleophas, etepouse d'Alphee. Saint
ne*uT*ioui ' J^an TappcUe Marie de Cleophas^^ \ ce que les uns expli-
cettet^piireest quent en disant qu'elle etoit fille et d'autres qu'elle etoic
pluscominu- femme de Cleophas. Plusieurs anciens ^^ ont cru que saint
nementatiri- Jacques , surnomme le frere du Seigneur, etoit ne d'une
premiere lemme que samt Joseph avoit cue avant cl epou-
ser la sainle Vierge. Mais cc sentiment ne pout se soulenir,
puisque Marie de Cleophas , mere de saint Jacques , vivoit
encore au temps de la passion de notre Seigneur. Saint
Jacques avoit pour frcres Jose ou Joseph''^, et saint Jude'^.
et peut-etre saint Simon '*, qui est compris avec les deux
autres nommesyS-^r^^ du Seigneur, c'est-a-dire cousins ge
' Ori'gen. in Rom. v. i. torn. 2. pag. 52o. cl Homil. 3. in Exod. -,
* Athai.as. oral. 4- inJrianos, et de Nica'nis Decreti^, png.ibT.. — ^Hi'la
'- de Trinit. cap. iv. pag. 20. — * Cyrill. JerosoL Catccli. Mystag. 5. -
* Ambros. de Arbove inlerdicta. — * Epiphan hcet-es. 70. pag. 3. — ^ Bast
de Baplismo, lib. i. cap. 11. — ^ Hieron. in Helvid. cap. vii. el in Isai. xvi1rt|
el ep. io3. de ^ins lilusir. — » August, in Crescenl. lib. 11. cap. xx.xvir. et
epist. 29. pag. 42. — ^° Joan. xix. 25. — *' Hicivn. in Hehnd. Epiphan.
hceres. 28. cap. vii. efL\wii\.Euseb. lib. n. cap. i. Hist, ecclcs. — ^-Marc.
x-r.in. — " Jtid. y t. — ^* Marc. vi. 3.
J
SIR l'ePITHE DK saint JACQUES. 36q
mains de Jesus-Christ par leur mere ; ou simplement ses
proches parens, sui van t I'opinion des hommes, s'i! est vrai
qu'ils fussent fils de Cleophas , que plusieurs anciens font
frere de saint Joseph.
On ne sait pas precisement ce quia fait donner a saint
Jacques le nom de Mineur ; si ce n'est pour le distinguer
de Jacques , fils de Zebedee , qui pouvoit etre plus age
que lui ; ou peut-etre parce que le premier etoit d'une
taille plus avantageuse ; ou plutot parce que sa vocation
fut posterieure a cello de saint Jacques , surnomme le Ma-
jeur. II fut aussi nomme \e Juste , ct Ophlias , qu'on pre-
tend signifier rempart , soutien du peuple. Hegesippe
dit qu'il fut consacre a Dieu des le sein de sa mere , qu'il
garda toute sa vie les regies des Nazareens, et qu'il etoit
pr^tre '. II fut fait eveque de Jerusalem apres I'ascen-
sion du Sauveur; et quelques peres^ disent que Jesus-
Christ meme lui confia son trone sur la terre, et les enfans
qu'il avoit conTcrtisde la Synagogue. D'aulres croient que
les apotres le choisirent pour remplir cette place ^. C'est
apparemment pour marquer son episcopat, et sa qualite
de pretre du Tres-Haul , qu'il portoit une lame d'or sur le
front*. On remarque la meme chose de saint Jean I'evan-
geliste^etde saint Marc *". Sa vie etoit tres austere; car, ou-
tre I'abstinence du vin , qu'il pratiquoit en qualite dc
Nazareen , il n'usoit ni de bain, ni d'huile pour se frotter,
et ne mangeoit rien qui eut eu vie ; il ne portoit point de
sandalcs , ni d'habits de laine, mais seulement de lin ; il se
prosternoit si souvent en terre pour faire oraison , que
son front etses genoux s'etoient durcis comme lapeaud'uu
chameau.
Sa vertu lui acquit restime'universelle de tous les Juifs ;
aussi lui donne-t-on le nom de Juste^^v excellence. I! est
fort connu dans le Thalmud sous le nom de Jacques dis-
ciple de Jesus le charpentier. Josephc'rend un temoi-
gnage magnifique desa vertu ; et les ancienscitent, comme
de Josephe , que la guerre et tous les malheurs que les
■ fide Hegesipp. apud Euseb. lib. n. cap. xxiii. HisL eccl. — - Hienn.
in Galat Epiphan. hieres. -8. cap. vii. — ' Clem.jdlex. apud Euseb. lib. ii.
c. I. el lib. II. c. xxiii. Hist, eccles. Jlhan. in Sjrnopsi. Hieinnym. de Viris
illustr. Ambrosiast. in Galat. i. 19. — ^ Epiplutn. heeres. 7S. Nazai'enorum,
— ' Polycrat. Ephes. apud Euseb. lib. v. cap. xxiv. Hist, eccles. — * Hist.
Manuscr. MartrriiS. Marciapiid. f^ales. Not. in Eus. lib. v. cap.xiiw
pag. 104 . — 'Joseph. Antiq. lib. xx. cap.yxii.
a3. 54
'"^70 PREFACE
Juils souffrirent de la part des Remains , furent regardes
comine une puriition de la mort qu'ils avoient fait souffrir
a Jacques le Juste , frere de Jesus'. Ce fut Ananus , fils
dii celebre Ananus, ou Anne , dont il est parle dans I'E-
vangile , qui le fit mourir. On le fit monter sur un endroit
fort eleve du temple ^ , et on lui demanda ce qu'on devoit
croire de Jesus-Cbrist. 11 repondit qu'il etoit Fils de Dieu,
assis a la droite du Pere, d'ou il devoit venir juger les vi-
vans etles niorts. A ces mots plusieurs crurent en Jesus-
Christ; mais les docteurs et les pharisiens , irrites de ee
temoignage, monterenta l' endroit ou il etoit, et le preci-
piterent du haut du temple. Comme il etoit encore en Tie,
et qu'il prioit pourses persecuteurs , ils le lapiderent par
ordre d' Ananus. 11 fut enterre aupres du temple, au lieu
meme ou il avoit ete lapide.
Temps au- L'epitre que nous avons de lui fut ecrite apparemment
quel cettc assez peu de temps avant sa mort, que Ton place en I'an 62
ecriio Ouelle ^^'^ chret, vulgaire , la nuitieme ou neuvieme annee
en fut I'oua- ^e Neron. 11 paroit f^ire allusion dans cette epitre a ce que
sion,queIen saint Paul avoit ecrit aux Romains I'an 58 de I'ere chret.
estl'objet. vulg. J et aux Galates I'an 56 , aur I'abrogation de la loi , et
leite^'piire I'inutilitedes ceremonies legalespour lesalut. 11 semble que
Tapolre n'ait point eu d'autre dessein que de traiter, pour
I'instruction des fideles , principalement d'entre les Juifs,
divers points de la foi et de la morale chretienne, sans y
observer d'autre ordre que celui dans lequel ils se pre-
sentoient a son esprit. On peut neanmoins la reduire assez
naturellement a I'instruction, a la correction, et a la con-
solation. L'apotre commence par instruire les fideles dans
le chap. I , qui contient trois instructions importantes : la
premiere , touchant le bon usage des souffrances ^ ; la ,
seconde, touchant I'origine du bien et du mal '' ; la troi- J
sieme , touchant I'ordre qu'on devoit observer dans les as-
semblees, et le fruit qu'on devoit en tirer "*. Depuis le com-
mencement du chap. II, jusqu'au 1^7 du ch. v, il corrige
* Origen. contra Cels. lib. i.pag. 35. in Mali. pag. 22?. Ilieron. de^'i-
ris Illustr. Eiiseb. lib. 11. cap. xxui. pag. 65. O -ycuv I(0(tv,oc? cu)4 aizMXvr.ai
KOA TCiiTO d-j-ysacpw? sKtaap-rjpacrSai ^t' wv (Dr,ol Xs'^ewv. Taura S'k c'jfi.63'S-/!X£v
XstoTGU. Mais on ne trouve plus ces paroles dans Josephe. — ^ Euseb. lib. ix.
cap. xxm.Hist. eccles. Hieronym. de Viris illustr. Epiphan., etc. — ^ Cap.
1. y 2.-t2. — * V^ ri.-i8 — " -^ ig. adjinem.
SUR L'EpiTRE DE SAINT JACQUES. 37 1
les abus el les erreurs qui avoient commence a se glisser
dans I'Eglise, et qu'il prevoyoit devoir y augmenter dans
la suite des temps. II les reduit a quatre principaux. Le
premier est I'acception dos personnes enlre les fideles : et
quolques-uns croient que c'est ici ime espccc de parabole
sous le voile de laquelle rap(5tre attaque principalement
la simonie ou I'acception des personnes dans le choix des
ministres del'Eglise ' Le second abus est I'erreur de ceux
qui pretendoient que la foi seule, a Texclusion de lajcharite
et des bonnes oeuv res, suffisoitpour la justification et pour
le salut ^. Le troisieme est le schisme de la doctrine, soil
qu'il rompe aussi la communion exterieure, soit qu'il la
garde encore ^ . Le quatrieme est le dereglement des
niceurs, dans lequel il distingue I'amour des richesses * ,
I'aniour des plaisirs sensucls ^, le vice de la detraction ^,
I'infidelite a I'egard de la Providence " , le mauvais usage
des richesses ^. Enfin depuis le y 7 du chap, v, jusqu'a la
fin , il console et instruit les fideles persecutes : il les porte
a la patience par diverses considerations ^ ; il leur donne
divers avis , ou plutot diverses regies de conduite par rap-
port aux divers etats ou ils se trouvent '".
La maniere d'ecrire de saint Jacques est serree et sen- Bemarqoes
tentieuse. 11 nes'astreint point a suivre son sujet, et a lier surle style de
ses sentences les unes aux autres. 11 enseigne la morale "^'^^P*^^-
comme Salomon dans les Proverbes , et comme font les , °„^"^ ,f , .
(Jrientaux , c est-a-dire par maximes separees , et non pas «icrite. Ver-
par raisonnemens. II ne laisse pas d'appuyer ce qu'il ditsur sions latines
i'Ecriture et de I'orner par des similitudes et des allusions ^^ ceueepi-
aux paroles des livres saints. II cite quelques passages" ^'
qui ne se trouvent pas en termes expres dans I'Ecriture :
mais les auteurs sacres du Nouveau-Testament, surtout
lorsqu'ils parlent aux Hebreux qui savoient les Ecritures
et qui sentoient tout d'un coup les allusions qu'on v faisoit,
ne s'assujelissoient pas toujours a citer mot pour mot. Ils
se contentoient de rapporter le sens , etde suivre I'inten-
tion de I'ecrivain sacre '-.
On croit que saint Jacques ecrivit cette epilre en grec.
11 y t'ile I'Ecriture suivant les Septante : par exeraple, ce
• Cap. II. i i.-i3. — *it\. adfinem. — ' Q^p ,„ y , adjinem. —
*C<V». ". f 1.-3.— *y4.-io.— «^ ir,_i3._Ty ,j adfnem.—" Cap.v.
T>i.-6.—' y 7.-11. — *'^ i i-i.ad/inem — " Jacob, w. 5. — "Joan.wi. 34,
Ephes. V. I '», etc.
372 P KEF ACE
passage qui ne se trouve que dans leur version en ce sens :
Dieu resisle aux superhes , et donne sa grace aux humbles '.
Quoique les Juifs , auxqnels il ecrivoit principalement ,
conservassent, dans tous les lieux ou ils etoient disper-
ses, quelque usage de langue hebraique ou syriaque,ils
parloient neanmoins communement grec , qui etoit la
langue la plus universellement usitee dans tout I'Orient ,
depuis Tempire d'Alex?.ndre-le-Grand. La version latine
qu'on en a , et qui est aujourd'hui usitee dans TEglise la-
tine , a ete faite par saint Jerome. Le P. Martianay a fait
imprimer celle qui etoit en usage avant ce pere , et dont
I'auteur est inconnu.
Oanonlcit^ Nous avons deja remarque , apres Eusebe et saint Je-
de cetie epi- r6me, que quelques anciens avoient conteste I'aulhenticite
^'''^- et la canonicite de oette epitre. Quelques nouveaux la lui
disputent aussi. Mais elle est mise dans le catalogue des
saintes Ecritures par saint Anathase ^, par saint Cyrille de
Jerusalem ^ , par le soixantieme canon du concile de Lao-
dicee , par le quarante-septieme du concile de Carthage
en 397, par saint Gregoire de Nazianze *, par saint Amphi-
loque '', par Rufin *', par saint Augustin ", par Innocent i*"^ *,
et enfin par tous les peres dont nous avons parle ci-devant,
quil'attribuent a saintJacquesap6tre,etfreredu Seigneur.
Saint Jerome s'en sert souvent, aussi bienque saint Au-
gustin , comme d'une piece indubitable. Ainsi des lors elle
passoit pour incontestablement canonique. On avoue avec
Eusebe ^ que les anciens I'ont assez rarement alleguee :
mais Eusebe menie reconnoit qu'elle avoit acquis depuis
beaucoup d'autorite.
Ouvragcs On a attribue autrefois a saint Jacques quelques ecrits
faussenieiit qui n'ont jamais ete re^us dans le canon des Ecritures. Par
aitribu( s a exemple , le pape Gelase condamne un evangile de saint
iTMineur"'^^ Jacques , fils d'Alphee. Origene '" parle d'un livre de saint
Jacques, qu'il joint au faux evangile de saint Pierre. Les
ebionites,au rapport de saint Epiphane ", lui avoient sup-
pose divers ecrits. On lit dans la Synopse de saint Atha-
* Jacob. IV. 6. ex Pivv. m. 34. — * ^tfian, in Synopsi. — ° Cyi'ill. Hiero-
sol. Caiech.ti. — ■• Nazianz. t. "i.p. 98. — * Amphiloch. apud Gi-egor. Na-
•zianz. Wm. "i.p. 194- — ^ Rufin. Expo.sil. symboli. — ''Aug. lib. 11. de
Doct. Christ, cap^ vrii. — * Innoc. i. ep. hi. ad Exuper. can. 7. — ' Euseb.
Hist. eccL lib. 11. cap. xxrii. — '" Ot-igeii. in Matth. p. 2a3. Edil. Huei. —
" Epiphan. hates. 3o. cap. xxii'.
SCR L'EPilRE DE SAIMT JACQUES. 373
nase quil avoit traduit en grec I'evangile hebreu de saint
Matthieu. On lui attribue encore une liturgie que nous
avons sous son nom dans la bibliotheque des peres. Eile
est citee dans une oraison attribuee a saint Procle , arche-
v^que de Constantinople * , et dans le trente-deuxieme
canon du concile tenu dans la meme ville , dans le dome
du palais imperial, en 692. Mais les savans reconnoissent
que ceite liturgie est entierement supposee , ou quelle a
ete extr^mement alteree dans les siecles posterieurs. Les
anciens peres ne I'ont point connue ; et saint Basile ^ dit
que les ap6tres qui ont regie ce qui devoit s'observer dans
nos mysteres , leur ont conserve la reverence qui leur
etoit due , sans les publier. lis ne croyoient done pas que
les apotres eussent ecrit ou public des liturgies.
' Procl. onu. aa. pag. 58o. — 'Basil, de Spiritu Sancto, cap.xjav-
EPITRE CATHOLIQUE
DE SAINT JACQUES.
Bont.y. 3.
CHAPITRE PREMIER.
Jole dans les souffrances. Demander a Dieu la sagesse. Prier avec foi.
Pauvres eleves; riches abaisses. Souffrances heiireusps. Dieu ne lente
point. II est I'auleur de tout bien. ficouter volonliers; parler peu. Prali-
quer la veril6. Caractere de la vraie pietc.
1. Jacques, serviteur de Dieu et
de notre Seigneur Jesus-Chrisl ,
aux douze tribus' qui sonl disper-
sees ,' salut.
2. Mes freres, considerez comme
le sujet d'une extreme joie les di-
verses afflictions qui vous arrivent,
3. Sachant que I'epreuve de vo-
ire foi produit la patience. '
4- Or, la patience doit" etre par-
faite dans ses oeuvres ,' afin que
vous soyez parfaits et accomplis
en toute maniere, et qu'il ne vous
manque rien.'
5. Que si quelqu'un de vous
manque de sagesse, qu'il la deman-
de a Dieu, qui donne a tous libera-
1. Jacobus, Dei et Do-
mini nostri Jesu Christi
servus, duodecim tribu-
bus, quae sunt in disper-
sione , salutem.
2. Omne gaudiumexis-
limate, fratres mei, cum
in tentationes varias inci-
deritis:
3. Scientes quod pro-
batio fidei vestrae patien-
tlam operatur.
4. Patientiaautemopus
perfecium habet : ut sitis
perfecti etintegri, in nul-^
lo deficientes.
5. Si quls autem ves-
trum indiget sapientia ,
postulet a Deo , qui dat
^ I . Des Juif*.
Ibid. Repandues par toute la terre.
y- 3, Fait connoilre et rend pubiique cette verlu qui est en vous.
f 4. C'est lesens du grec, qui porte a la leltre : Que la patience soit par-
faitedans ses oeuvres : ep-^ov xs'Xaiov e^sTO). Opus perfecium liabcat.
Ibid. Elle doit etre accompagnee de fermete , de perseverance, de charitd,
et de toutes les autres vertus cliretiennes.
Ibid. Rien de tout ce qui est necessaire pour arrivcr a la gloirc qui doit
etre la recompense de votre patience.
umnibus a/Iluenler , el
non improperat : eJ dabi-
tur ei.
6 Postulet autein in
fide nihil hxsitaiis : qui
euitn hajsitat . similis est
fluctui maris, qui avento
uovetur et circuinfertur.
7- Non ergo sestimet
homo ille quod accipiat
aliquid a Domino.
8. Vir duplex animo ,
iticoDstanscst in omnibus
Tiissuis.
9. Glorietur autem fra-
ler humilis in exaltatione
sua :
10. Dives aulcm in hu-
militate sua, quoniaiu sic-
ut flos fenl traosibit.
1 1. Exortus est enim
sol cum ardore , et arefe-
cit fenum, et flos ejus lic-
cidit, et decor vultus ejus
deperiil : ita et dives in
itineribus suis inarcescet.
12. Beatus vir qui suf-
fert tentalioiiem : quo-
niam cum probatus fue-
rit, accipiet coronam vi-
tae, quam repromisit Deus
diligentibus »e.
i3. Nemo, cum tenla-
tur, dicat quoniam a Deo
tentatur : Deus enim in-
cuAPiTRE 1. 376
lement sans reprocher ses dons ; et
la sagesse lui sera sera accordee.
G. Mais qu'il la deniande avec -Wa«- *>'• :•
foi, sans defiance ; car celui qui est ^"- '*•
dans la defiance, ressemble au flot ^^"^^ *>• '*•
de la mer, qui est agite et eniporte "'^•*'- 9-
ca et la par la violence du veut. ^^^ ^3
7. II ne faut done pas que celui-
las'iinagine qu'il obtiendra quelque
chose du Seigneur.
8. L'homme qui a I'esprit parta-
ge est inconstant dans toutes ses
voies.
9. Que celui d'eotre nos freres
qui est d'une condition basse se
glorifie de sa veritable elevation ; '
10 Et que celui qui est riche se
glorifie de son abaissement, ' parce „ ..
que le nche passera comme la , . _
fleur de I'herbe. ^..Petr.\.^xt^.
11. Carau lever d'un soleil brii-
lant, I'herbe se seche, la fleur tom-
be, et perd loute sa beaute; ainsi
le riche sechera et sc fletrira dans
ses voies.
12. Heureux celui qui !soufl"re pa- J^jb.y. 17.
tiemment les tenlalions, 'parceque
lorsque sa vertu aura ete epiouvee,
il recevra la couronne de vie, que
Dieu a promise a ceux qui I'ai-
ment. '
i3. Que Mul ne disc, lursqu'il
est tente , que c'est Dieu qui le
tente : car Dieu est incapable de
y 8. Et iodigne d'etre ecoulede Dieu.
1^9. Cette elevation coDsistedan$.l'bonoeur qu'il a d'etre enfant de Dieu,
et membre de Jesus-Cbrist.
y lo. De I'etat d'buniiliatioo oil la religion chrrtieiine le f;iil paroilre aux
yeux des bommes ; qu'il se glorifie dans la bassesse apparenle de celle religion ,
et non pas dans la grandeur de ks ricbessc-squi n'oni rien de solide.
y \i. Les maux de cette vie, ids que la pauvri'te el les miseres.
Ibid. Qui souffrent pour Taniour delui.
376
tenter et de pousser personne au
mal. '
EPITRE CATHOHQUE DE SAINT JACQUES.
tentator malorum est :
ipse autem neminem len-
14. Mais chacun est tente par sa
propre concupiscence , qui I'em-
porte et qui I'atlire dans le peche ;
i5. Et ensuite, quand la concu-
piscence a concu," elle enfante le
peche;' et le peche etant accom-
pli," engendrela mort.'
16. Ne vous y trompez doncpas,
mes trfes chers freres. '
17. Toute grace excellenle-, et
tout don parfail vicnt d'en-haut ,
et descend du Pere des lumieres,
qui ne peut recevoir ni de change-
ment, ni d'ombre par aucune re-
volution.
18. Car c'est volontaireinent
qu'il nous a engendres par la pa-
role de la verite/ afin que nous fus-
sions comme les premices de ses
creatures. "
19. Yous le savez , mes tres
Pfov.wn.-x']. chers frores.' Que chacun de vous
soil pret a ecoutcr, lent a parler,
lent a se mcttre en colfere.
20. Car la colere de I'homme
n'accomplit point la justice deDieu.'
tat.
14. Unusquisque vero
tentatur a concupiscentia
sua abstractus, etillectus:
10, Deinde concupis-
centia cum conceperit ,
parit peccatum : peccatum
vero cum consummatum
fuerit, generat mortem.
16. Nolite itaque er-
rare , fratres mei dilectis-
simi.
17. Omne datum opti-
mum et omne donum
perfectum, desursum est,
descendens a Patre lumi-
num, apud quern non est
transmutatio, nee vicissi-
tudinis obumbratio.
18. Yoluntarie enini
genuit nos verbo veritatis,
ut simus initium aliquod
creaturae ejus.
19. Scitis, fratres mei
dilectissimi. Sit autem
omnis homo velox ad au-
diendum : tardus autem
ad loquendum , et tardus
ad iram.
20. Ira enim viri jus-
titiam Dei non operatur.
y- 1 3. Gr. autr. car comme Dieu ne peut Aire tent^ d'aucun mal , 11 ne tenle
aussi personne.
•^ 1 5. Par les mauvais dcsirs qu'elle inspire.
Ibid. Par le consentement qu'on y donne.
Ibid. Ou par le consentement de la volonte, ou par Paction m^me.
Ibid. Tue Tame.
•j^ 16. Ne regarde;; pas Dieu comme I'auteur des tentationsqui vous portent
au peche, lui qui cstle prlncipe et la source de toute grace et de toute sainlet^.
^18. Par le saint fivangile, parle bapt^me.
Ibid. Du nouveau raonde regenere en J.-C.
y 19. Gr. Ainsi, mes cbers freres, que chacun, etc.
f 9.0. Puisqu'ello jious fait tomber dans des excesconlraires a celle justue.
CUAPJlRt: I.
ai. Propter quod abji-
cientes omnem iniinun-
ditiain, et abundantiam
maiitix, in mansuetudine
suscipite insituin verbum,
(|uod potest salvare ani-
iiias Testras.
23. Estote auteru fac-
tores verbi, et non audi-
tores taDtum, fallentes
vosmetipsos.
25. Quia si quis audi-
tor est verbi , et non fac-
tor, hie comparabiturviro
(onsideranti vultum nati-
\itatis suae in speculo :
34. Consideravit enim
^e, et abiit, etstatim obli-
tus est qualis fuerit.
25. Qui auteni per-
377
31. C'est pourquoi rejetant tou-
tes les propositions impures et su-
perflues du peche , recevez avec
douceur et avec docilite la parole
qui a ete entee en vous, et qui pent
sauver vos ames.
32. Ayez soin de mettre cette ■*''^- '" **
parole en pratique ; et ne vous con- i^'
f . 1 I,' » Rom. II. 1 3.
tentez pas de 1 ecouter, en vous
trompant vous-memes;
20. Car celui qui ecoute la parole
de Dieu sans la pratiquer, est sem-
blable a un homme qui jetant les
yeux sur un miroir, y voit son vi-
sage naturel ;
24. Et qui a peine I'y a vu, qu'il
s'en va, et oublie a I'heure meme
quel iletoit.
25. Mais celui qui considere
spexerit in legem perfec- exactementlaloiparfaite'delaliber-
tamlibertatis, etperman- te, qui y demeure attache perseve-
serit in ea, non auditor ramment',celui-lane I'ecoutant pas
obliviosus factus, sed fac- seulement pour oublier aussitot ,
mais faisant ce qu'il ecoute, trou-
vera son bonheur dans ce qu'il fait.
26. Si quelqu'un d'entre vous'
croit avoir de la religion , et qu'il
ue retienne pas sa^ngue comme
avec un frein, mais que lui-meme
seduise son cceur,' sa religion est
vaine.
27. La piete' pure et sans tache
aux yeux de Dieu notre pere, con-
siste a visiter les orphelins et les
veuves dans leur affliction , et a se
in tribulatione eorum, et conserver pur de la corruption du
immaculatum se custo- siecle present,
dire ab hoc seculo.
tor operis : hie beatus in
facto suo erit
26. Si quis autem putat
se religiosum esse, non
refrenans linguam suam ,
sed seducens cor suum,
hujusvana est religio.
27. Religio munda et
immaculata apud Deum
et Patrem , haec est : Vi-
sitare pupillos et viduas
y 25. L'fevangilc.
y a6. Ces deux mots sont dans le grec v* «("■».
Ibid. En s'abandonDant a rindiscretion de sa langue.
y 27. Litl. la religion.
378
EPitHE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUES.
CHAPITRE II.
Acception des personnes condainnee. Estime pourles pauvres. Ne violer la loi
en aucun point. Faire misericorde pour I'obtenir. La foi sans les ceuvres est
inutile pour le salut. Abraham justifie par ses ceuvres jointes a sa foi.
XIV. 19.
Prou. XXIV
i3.
1. Mes freres, n'ayez point la foi
Le^^. XIX. i5. de la glojre de notre Seigneur Je-
Deut.i.i']. sus-Christ en acception des per-
sonnes.'
2. Car s'il entre dans votie as-
Eccli \Lii r s^^^'^'^e un homme qui ait un an-
' neau d'or et un habit magnifique,'
et qu'il y entre aussi quelque pau-
vre avec un niechant habit;
3. Et qu'arrStant votre vue sur
celui qui est magnifiquemcnt vctu,
vous lui disiez :" Asseyez-vous ici;
et que vous disiez au pauvre : Te-
nez-vous li debout, ou asseyez-
vous a mes pieds : '
4. N'est-ce pas la faire difference
en vous memes entre I'un et I'au-
Ire, et suivye des pensees injustes
dans le jugement que vous en fai-
tes?'
5. Ecoutez, mes trcs chers fre-
res : Dieu n'a-t-il pas choisi ceux
qui etoient pauvres dans ce monde
pour etre riches dans la foi, et he-
1. Fratres mei, nolile
in personarumacceptione
habere fidem Domini nos-
tri Jesu Christi gloriae.
2. Etenim si introierit
in conventum vestrum
vir aureum annulura ha-
bens in veste Candida ,
introierit aulem etpauper
in sordido habitu,
3. Et intendatis in eum
qui indutus est veste prae-
clara, etdixerit ei : Tu se-
de hie bene : pauperi aii-
tem dicatis : Tu sta illic,
aut sede sub scabello pe-
dum meorum :
4. Nonne judicatis apud
vosmetipsos, et facti es-
tis judices cogitationum
iniquarum ?
5. Audite , fratres mei
dilectissimi : nonne Deus
elegit pauperes in hoc
mundo , divites in fide
y I . Autrement : N'ajez point de respect buniain pour la condition des person-
nes lorsqu il s'agit de donner des minisLres a I'Eglise ; ou hrsqu'il s'agil des
places et du rang dans les assemblees de la religion {infr. -^1. e« 3.), vous
qui avez la foi de la gloire de noire Seigneur Jesus-Christ , et qui devez etre
insensibles a tout le faux eclal de la gloire humaine et charnelle.
^ ■?. . C'est le sens du grec Xaj^-irpa.
y 3. En lui assignant une place honorable.
Ibid. Litt. au bas demon marche-pied.
-f 4. Puisque vous n'avez egard ni a la verlu, niau merile, mais seulemcnt
a la pompc et aux richesses.
et hei-edes re^i « quod
repromisit Deus diligen-
lihus se ?
a. Vos autem exhono-
■ i.-tis pauperein. Nonne
divites per poteiitiaiu op-
primunt vos , et ipsi Ira-
hunt Tos ad judicia?
7. Nonne ipsi blasphe-
mant bonuui aoiiien ,
quod iiivocatum est super
TOS ?
8. Si tauien legem per-
ticilis regalem secundum
Scripturas : Diligesproxi-
mumtuuiiisicutteipsum :
bene facitis :
9. Si autem personas
accipitis, peccatum ope-
ramini, redarguti a lege
quasi trausgressores.
CUAFITKE II. 379
ritiers du royauuie qu'il a promis a
ceuxqui I'aimenl ?
6. Et V0U5, au contraire, vous
deshonoroz le pauvre.' Ne sont-ce
pas les rh'hes qui vous oppriuient
par leur puissance? ne sont-ce pas
eux qui vous Irainent devant les
tribunaux de la justice?'
7. Ne sont-ce paseux quidesho-
noreiit' le saint nom de Jesus-
Christ, dont rous avez tire le v6-
tre?'
8. Que si vousaccomplissez laloi
royale en suivant ce precepte de
I'Ecriture : Vous aimerez voire pro- Le^>. xjx. i8.
chain comme vous-meme,' vous Mauh.xxn.
faites bien : ^9-
q. Mais si vous avez egard a la ''jfaiv.xn.ii.
^ " nom. xiir. 9.
condition despersonnes, vous com- ^^^ ^ ^
mettez un peche, et vous etes con-
damnes par la loi comuie en etant
les violateurs; '
10. Car quiconque ayant garde Mau.y. 19,
toute la loi , la viole en un seul
point, est coupable comme I'ayant
toute violee;
1 1 . Puisque celui qui a dit : Ne
commetlez point d'adultere, a dit
Non occide. Quod si non, aussi : Ne tuez point. Si done vous
moechaberis, occides au- tuez, quoique vous ne commettiez
10. Quicumque uutem
totam legem servaverit,
offendat autem in uno,
faclus est omnium reus.
11. Qui enim dixit,
Non moechaberis, dixit et.
y 6. Enlui preferant le rithe, sans autre raison que ses richesses.
Ibid. PouFTousy faire condamner a leur payer ce qu'ils pretendenlque
vous leur devez.
•^ 7 . Fonl blasphemer par leurs violences el leurs injustices.
Ibid. Celui de Chretiens.
y 8. Sans distinction de riche ou de pauvre. L'apdtre appelle le oommande-
mentde la charite la loi royale, parce qu'il est I'abregede toute la loi deDieu.
Voje2 5. Matth. xxii. 3y.
y^ 8. el 9. Ou simplemenl : Si vous accomplissez la loi royale de la cfuirite,
en suivant ce precepte de TEcriture : Vous aimerez voire prochain comme vous-
meme ; et si c'est iordre de la charite qui regie les honneurs et les defe-
rences dans vos assemble'es, vous faites bien , et il n'j a rien en cela que de
louable ; mais si vous avez rgard seulemeru a la condition des personnes, si
c'est par iesiiine des seules richesses que vous distn'buez les rangs, rous
commetle/ un peche, etc.
38o
EPITRE CATHOLIQLE DE SAINT JACQUES.
point d'adultere, vous gtes viola-
teur de la loi.
12. Reglez done yds paroles et
YDS actions,' conanae dcYant etre
juges par la loi de la liberie. '
i3. Car celui qui n'aura point fait
raisericorde sera juge sans miseri-
corde : mais la misericorde s'ele-
vera au-dessus de la rigueur du ju-
gernent.
14. Mes fr^res , que serYira-t-il
a quelqu'un de dire qu'il a la foi ,
s'il n'a pas les ceuYres? La foi
pourra-t-elle le sauver?
I. Joan. in. i5. Que si un de yos freres ou
J 7" une de vos sceurs n'ont point de
quoi se Yfetir, et qu'ils nianquent de
ce qui leur est necessaire chaquc
jour pour YiYre;
16. Et que quelqu'un d'entre
vous leur dise : Allez en paix , je
vous souhaite de quoi vous couvrir
etdequoi manger, sans leur donner
neanmoins de quoi satisfaire aux
necessites de leur corps , a quoi
leur serviront vos souhaits?
17. Ainsi la foi qui n'est point ac-<
compagnee des oeuvres, est morte
en elle-meme.
18. On pourra done dire : ' Vous
avezla foi ^ et moi j'ai les oeuvres :
montrez-moi voire foi qui est sans
oeuvres ; et moi je vous montrerai
ma foi par mes oeuvres.
19. Vous croyez qu'il n'y a qu'un
Dieu, vous faites bien : mais les
demons le croienl aussi , et ils en
tremblenl.
tem, factus es transgres-
sor legis.
13. Sic loquimini et
sic facite, sicut per legem
libertatis incipientes judi-
cari.
i3. Judicium enim si-
ne misericordia illi qui
non fecit misericordiam :
superexaltat autem mise-
ricordia judicium.
14. Quid proderit fra-
Ires mei, si fidem quis di-
cat se habere, opera au-
tem non habeat? TSum-
quid poterit fides salvare
eum?
i5. Si autem frater et
soror nudi sint, et indi-
geant victu quotidiano ,
16. Dicat autem ali-
quis ex vobis illis : Ite in
pace, calefacimini et sa-
turamini : non dederitis
autem eis quae necessaria
sunt corpori, quid prode-
rit?
17. Sic et fides et, si
non habeat opera , mor-
tua est in semetipsa.
i8. Sed dicet quis : Tu
fidem habes , et ego ope-
ra habeo. Ostende mihi
fidem tuam sineoperibus :
et ego ostendam tibi ex
operibus fidem meam.
19. Tu credis quoniam
unus est Deus : bene fa-
cis : et daemones credunt,
el contremiscunt.
y^ 12. C'est le sens du grec.
Ibid. Cette loi qui aura egard , non a la condition des personnes , mais k
leur m^rite, et aux oeuvres de misericorde qu'ils auront faitei.
-f 18. A celui qui a ainsi la foi sans les oeuvres.
CMAPITRE II.
38l
ao Vis atitein scire , o 20, Mais voulez-rous savoir, 6
homo inanis, quoniam homme vain, que la foi sans les
fides sine operibus mor- oeuvres esl morte ? '
tuaest?
ai. Abraham paler nos- 21. Notre pere Abraham ne ful- Gen.xxn.9.
ter. nonne ex operibus il pas justific par les oeuvres, lors-
justificatus est, oflferens qu'il offrit son fils Isaac surl'autel?'
Isaac filium suum super
altare?
23. Vides quoniam fi- 22. Ne Toyez-vous pas que sa foi
des cooperabatur operi- etoit jointe A ses oeuvres, ' et que
bus illius : et ex operibus sa foi fut consoramee par ses oeu-
fides consummata est? vres?
25. Et suppleta est 23. Et qu'ainsi cette parole de
Scriptura, dicens : Credi- I'Ecriture fut accomplie : ' Abra- Gtf/i.xT.6.
dit Abraham Deo, et re- ham crut ce que Dieu lui avoit dit; ^om. iv. 3.
putatum est illi ad justi- et sa foi lui fut imputee a justice, Gal.m.6.
liam, et amicus Dei ap- et il fut appele ami de Dieu?
pellatus est.
24- Videtis quoniam ex 24-^'ous voyezdoncqueThomme
operibus justificatur ho- est justifie par les oeuvres, et non
mo, et non ex fide tan- pas seulementparia foi.
turn.
23. De meme Rahab, la courti-
sane, ne fut-elle pas justifiee par
les oeuvres en recevant chez elle
les espions' de Josue, et les ren-
voyant par un autre chemin ?
26. Car comme le corps est mort
lorsqu'il est sans ame , ainsi la foi
est morte lorsqu'elie est sans oeu-
vres.
25. Similiter et Rahab
meretrix, nonne ex ope-
ribus justificata est, sus-
cipiens nuntios, et alia
via ejiciens?
26. Sicut enim corpus
sine spiritu mortuum est,
ita et fides sine operibus
mortua est.
y 20. Inatile pour la justice.
y 2 1 . Qu'il fut pret a en faire un sacriBce a Dieu:
y 22. Litt. coop^roiti ses oeuvres.
y 23. C'est Je sens du grec, impleta est.
/ 25. Litt. lesenvoyes. Quelques exemplaires grecs lisent : les espions.
38j
EPITRE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUEa.
CHAPITRE III.
Craindre de devenir maitres. Langue source de maux ; difficuUe de la con-
tenir. Sagesse terrcstre amie des disputes. Caract^re de la sagessequi vienl
d'en-haut.
I. Mes frferes^ gardez-vous de
I'ambition, qui fait que plusieurs
Mati.Kwu a. veulent devenir maitres," sachant
que cette charge vous expose a un
jugement plus severe.
a. Car nous faisons tous beau-
coup (j[e fautes:" si quelqu'un ne
fait point de fautes en parlant, c'est
un hooime parfait; et il peut tenir
en bride tout le corps. '
3. Ne voyez-vous pas que' nous
mettons des mors dans la bouche
des chevaux, afin qu'ils nous obeis-
sent, et qu'ainsi nous gouvernons
tout leur corps ?
4. Ne voyez-vous pas aussi
qu'encore que les vaivsseaux soient
si grands, et qu'ils soient pousses
par des vents impetueux, ils sont
tournes neanmoins de tous cotes
avec un tres petit gouvernail, selon
la volonte du pilole qui les con-
duit?
5. Ainsi la langue n'est qu'une
petite parlie du corps : et cepen-
dant combien peut-elle se ranter'
1. NouTE plures ma-
gistri fieri , fratres mei ,
scientes quoniam majus
judicium sumitis.
a. In multis enim of-
fendimus omnes. Si quis
in verbo non offendit :
hie perfectus est vir. Po-
test etiam freno circum-
ducere totum corpus.
3. Si aulem equis frena
in ora mittimus ad con-
sentiendum nobis, et om-
ne corpus illorum cir-
cumferimus :
4. Ecce et naves, cum
magnae sint, et a ventis
validis mlnentur, circum-
feruntura modico guber-
naculo ubi impetus diri-
gentis voluerit :
5. Ita et lingua modi-
cum quidem membrum
est, et magna exaltat :
i- I. C'est-a-dire maitres pour enseigner. C'est ce que signifie I'expres-
siondu texte.
y 2. Et surtout par la langue : ainsi des emplois qui nous obligent a parler
et a inslruire nous mettent en danger de commettre un grand nombre Je
peches.
Ibid. Maitriser toules ses passions.
■^ 3. C'est le sens du grec : Ecce equis , etc.
y 5. C'est le sens du grec.
ecce qiiaiitu* ignis quam
inagnntn silvaminccndlt!
6. Et lingua ignis est,
universilas iniquitatis: lin-
ffua constituitnr in mera-
bris nostris, quae maculat
totum corpus, et inflam-
matrotain nalivitatis nos-
trae, inflammata a gehen-
na.
7. Omnis enim natura
bestiaruin, et volucrum,
et serpentium , et cetero-
rum, domantur, et domi-
ta sunt a natura humana •
8. Linguam autein nul-
lus hominum dotnare po-
test : inquietum malum,
plena veneno morlifero.
9. In ipsa benedicimus
Deum et Patrem : et in
ipsa maledicimus homi-
nes, qui ad similitudinem
Dei facti sunt.
10. Ex ipsa ore proce-
dit benedictio et male-
dictio. Non oportet, fra-
tres mei, haec ita fieri.
11. Numquid fons de
eodem foramine emanat
dulcem et amaram a-
CHAPITRE III.
de
383
faire de grandes choses! Ne
voyez-vous pas comment un petit'
feu est capable d'a II umer une grande
fordt?'
6. La langue aussi est un feu.
C'est un monde ' d'iniquite ; et n'e-
tant qu'un de nos membres, elle
infecte tout noire corps; elle en-
flimme tout le cercle et tout le
coursdenotre Tie, etest elle-meme
enflammee du feu de I'enfer.
7. Car la nature de I'homme est
capable de dompter et a dompte en
eftet toutes sortes d'animaux, les
betes de la terre, les oiseaux, les
reptiles ; '
8. Mais nulhommenepeut domp-
ter la langue : c'est un mal qu'on
ne peut contenir; elle est pleine
d'un renin mortel.
9. Par elle nous benissons Dieu
notre Pere ; et par elle nous mau-
dissons les hommes, qui sent crees
ii I'image de Dieu :
10. La benediction et la maledic-
tion partent de la meme bouche.
Ce n'est pas ainsi , mes freres,
qu'il faut agir.
11. Une fontaine jette-t-elle par
une meme ourerture de I'eau douce
« et de I'eau amere?
quam?
12. Numquid potest, 12. Mes freres, un figuier peul-il
fratres mei, ficus uvas porter des raisins ,' ou une vigne
facere, aut vitis ficus ? Sic des figues ? Ainsi une fontaine d'eau
f 5. C'est I'expression du grec.
Ibid. Grec: allume one matiere considerable.
y 6. C'est I'expression du grec.
y 7. Au lieude serpentium et cetemrum , le grec lit : reptilium et mari-
iiorum. Quelques-uns soupQonnent qu'on lisoit dans la Vulgale : serpentium
etcetorum.
7^ la. Gr. des o1 ires.
384
EPITRE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUES.
salee ne peut jeter de I'eau douce. '
i3. Y a-t-il quelqu'un parmi
nous qui soil sage et savant ? qu'il
fasse paroxtre ses oeuvres dans la
suite d'une bonne vie, avec une
sagesse pleine de douceur. '
14. Mais si vous avez dans le
coeur une jalousie pleine d'amer-
tume, et un esprit de contention,"
ne vous glorifiez point, et ne men-
tez point contre la verite. '
i5. Carce n'est pas la la sagesse
qui vient d'en-haut, mais c'est une
sagesse terrestre, animale et diabo-
lique;
16. Car oiy il y a de la jalousie et
un esprit de contention, il y a aussi
du trouble, et toute sorte de mal.
17. Mais la sagesse qui vient
d'en-haut estpremi^rement chaste,
puis amie de la paix , moderee,'
docile, susceptible de tout bien,'
pleine de misericorde et de fruits de
bonnes oeuvres : elle ne juge point,'
elle n'est point dissimulee.
18. Or, les fruits de la justice'
se sfement dans la paix, par ceux
qui font des oeuvres de paix.
neque salsa dulcem potest
facere aquam.
i3. Quis sapiens, et
disciplinatus inter vos?
Ostendat ex bona conver-
satione operationemsuam
in mansuetudine sapien-
tise.
14. Quod si zelum a-
marum habetis, et con-
tentiones sint in cordibus
vestris : nolite gloriari, et
mendaces esse adversus
veritatem.
i5. Non est enim ista
sapientia desursum des-
cendens, sedterrena, ani-
malis, diabolica.
16. Ubi enim zelus et
contentio : ibi inconstan-
tia, etomneopuspravum.
17. Quae aulem desur-
sum est sapientia, primum
quidem pudica est, deinde
pacifica, modesta, suadi-
bilis, bonis consentiens,
plena misericordia et fruc-
tibus bonis, non judicans,
sine simulatione.
18. Fructus autemjus-
titiae, in pace seminatur,
facienlibus pacem.
•j^ia. Le grec lit: Ainsi nulle fonlainene peut jeter de I'eau sal^e et de I'eau
douce. — Que la langue done aussi , qui est faite pour louer Dieu et le benir,
ne serve jamais a Toffenser.
f i3. Autr. qu'il fasse parol tre , par la suite d'une bonne vie, que ses
CEUvres sonl accompagnees d'une sagesse pleine de douceUr.
y^ 14. Le mot sint n'est pas dans dans le grec.
Ibid. En vous attribuant une vertu que vous n'avez pas.
y 1 7 . Le mot grec imtixrii r^unit les deux sens , de modere et d'^qui-
table.
Ibid. Ces mots bonis consentiens ne sont point dans le grec.
Ibid. Necondamne point lemerairement les autres.
y 18. Que produit cette sagesse.
CRAPITRB IT.
385
CHAPITRE IV.
Divisions produites pat les passions. On n'obtient pas , parce qu'on de-
mande mal. Amiti^ du monde ennemie de Dieu. Se soumettre i Dieu ; re-
sister au demon. S'affliger par ta penitence. Ne point medire; ne point juger.
Ne point s'appuyer sur I'incertidude de la vie.
1. Unde bella et litesin
vobis? Nonne hinc? ex
concupiscentiis vestris ,
quae militant in membris
vestris ?
2. Conciipiscitis , et
non habetis : occiditis et
zelatis , et non potestis
adipisci : litigalis et belli-
geratis, et non habetis,
propter quod non postu-
iatis.
3. Petitis, et non acci-
pitis : eo quod male pe-
tatis, ut in concupiscen-
tiis vestris insumatis.
4. Adulteri , ncscitis
quia amicitia hujus raundi
inimica est Dei? Quicum-
que ergo voluerit amicus
esse seculi hujus, inimi-
cus Dei constituitur.
5. An putatis quia in-
aniter Scriptura dicat :
1 . D'on viennent les guerres et
les proces entre vous? N'est-ce pas
de vos passions, qui combattent
dans votre chair?
2. Vous ^tes pleins de desirs, et
vous n'avez pas ce que vous desi-
rez : vous tuez,' et vous etes ja-
loux, et vous ne pouvez obtenir ce
que vous voulez : vous plaidez, et
vous failes la guerre les uns contra
les autres; et vous n'avez pas nean-
moins ce que vous tachez d'avoir,
parce que vous ne le demandez pas
a Dieu.
3. Vous demandez et vous ne
recevez point , parce que vous de-
mandez mal , demandant pour
avoir de quoi satisfaire a vos pas-
sions.
4. Ames adulteres ,' ne savez-
vous pas que I'amour de ce monde
est une inimitie contre Dieu, et
que par consequent quiconque vou-
dra etre ami de ce monde ' se rend
enneuii de Dieu?
5. Pensez-vous que I'Ecriture
dise en vain : L'esprit qui habite
i a. Quelques-uns 8oap<2onnent qa'on llsoit originairement : vous Ales en-
vicux et jaloux.
t
•f 4. Gjrrompues. — Gr. lilt, hommes adulteres et ferames adulteret.
Ibid. C'est I'expression du grec.
23. a5
386
EPixKE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUES.
en vous vous aime' d'un amour de
jalousie?'
6. Mais aussi il donne de plus
Prot' in 3/'. grandes graces.' G'est pourquol il
est dit : Dieu resiste aux superbes,
et donne sa grace aux humbles.'
7. Soyez done soumis a Dieu,
resistez au diable', et il s'enfuira de
vous.
8. Approchez-vous de Dieu, et il
s'approchera de vous : lavez vos
mains, pecheurs; et purifiez vos
coeurs, vous qui avez Tame dou-
ble.'
9. Affligez-vous vous-memes ; '
soyez dans le deuil et dans les lar-
mes;' que voire ris se change en
pleurs, et votre joie en tristesse.'
10. Humiliez-vous en la pre-
sence du Seigneur, et il vous ele-
vera.'
11. Mes freres, ne parlez point
mal les uns des autres. Celui qui
parle contre son frere, ou qui jugc
son frere, parle contre la loi ' et
Ad invidiam concupiscit
spiritus qui habitat in vo-
bis?
6. Majorem autem dat
graliam. Propter quod
dicit : Deus superbis re-
sistit, humilibus autem dat
gratia m.
7. Subditi ergo estote
Deo, resistite autem dia-
bolo, et fugiet a vobis.
8. Appropinquate Deo,
et appropinquabit vobis.
Emundate manus, pecca-
tores : et purificate corda,
duplices animo.
9. Miseri estote, et lu-
gete , et plorate : risus
vester in luctum conver-
tatur, et gaudium in moe-
rorem.
10. Humiliamini in
conspectu Domini, etex-
altabitvos.
11. Nolite detrahere
alterutrum , fratres. Qui
detrahit fratri, aut qui ju-
dicat fratrem suum , de-
y 5. L'esprit de Dieu. Selon le grec : L'esprit de Dieu qui habile en nous
nous aime d'un amour de jalousie. Ce passage ne se trouve pas en lernies ex-
pres dans I'Ecrilure : mais il peut avoir rapport a divers endroils de I'Ecri-
lure, ou Dieu se compare a un <5poux jaloux de la fidelilede son peuple.
ILid. II ne peul pas souffrir que vous vous altachiez impunement a d'autres
(ju'i lui.
i 6. Plus precieusesque tous les biens du monde. C'est pour celaqu'il ne
peut souffrir I'orgueil qui nous porte a la mepriser et a lui preferer les biens
el les lionneurs du siecle. ^
/^ 7c?.Ce passage est cil^ selon la version dcsSeplante. — L'Ecrilureveul nous
engager par-la a eviter cet orgueil qui dcplait si fort a Dieu, et i enlrer dans
les senlimens d'humilile el de sournission qui altirent sa grace en nous.
y 8. Partag^e enlreDieu el le monde.
y- 9. Par une veritable penitence.
Ibid. Pour laver vos peches.
Ibid. Les ris et les joies du monde.
y 10. Vous fera niisericorde el vous comblerade ses graces.
y 1 1 . Parce qu'il agll contre la defense de la loi.
trahit legi, et judical le-
gem. Si aulein judicas
legem, non est factor le-
gis, sed judex.
la. Unus est Legisla-
tor, et Judex, qui potest
perdere et liberare.
i3. Tu autem quis es,
qui judicas proximum?
Ecce nunc qui dicilis :
Hodieaut crastino ibimus
in illam civilatem , et
facicmus ibi quidem an-
num, et mercabiniur, et
lucrum faciemus :
14. Qui ignoratis quid
erit in crastino.
i5. Quae est enim Tita
vestra ? vapor est ad mo-
dicum parens, et dein-
ceps exterminabitur. Pro
eo ut dicalis : Si Domi-
nus voluerit, et : Si vixe-
rimus , faciemus hoc , aut
illud.
16. Nunc autem exul-
tatis in superbiis reslris.
Omnis exultatio talis ,
maligna est.
17. Scienti igitur bo-
uum facere , et non fa-
cienti, peccatum est illi.
CHAPITRE IV. 387
juge la loi : si vous jugci la loi , '
Tous n'en etes point observateur,
maid rous vous en rendez le juge.
13. II n'y a qu'un Legislateur et
qu'un Juge 'qui peut sauveret qui
peut perdre.
i5. Mais vous, qui etes-vous, /?om. xit. 4.
pour juger votre prochain ? Je m'a-
dresse maintenant a vous qui dites :
Nous irons aujourd'hui ou deraain
en une telle ville, nous demeure-
rons la un an, nous y traCquerons,
nous y gagnerons beaucoup ;
14. Quoique vous ne sachiez pas
meme ce qui arriverademain.'
i5. Car qu'est-ce que votre vie,
sinon une vapeur qui paroit pour
un peu de temps, et qui disparoit'
ensuite ? Au lieu de cela vous de-
vriez dire : S'il plait au Seigneur,
et si nous vivons, nous ferons telle
ou telle chose.
16. Et vous maintenant, vous
vous elevez' dans vos pensees pre-
somptiieuses. ' Toute celte pre-
somption est mauvaise.'
17. Cehii done qui sait le bien
qu'il doit faire, et qui ne le fait
pas, est coupable de peche.
■j^ X I . Que vous en meprisiez les ordonnances.
y 12. Ce mot €1 judex n'est pas dans le grec imprime ; mais il se Irouve
dans plusieurs manascrits grecs.
y i4. Si vous serez encore en vie.
-jl- i5. C'est I'expression du grec.
y 16. C'esl le sensdu grec.
Ibid. Vouscomplez sur I'avenir, comme s'il dependoit de vous.
Ibid. Elle esl d'autant plus criminelle chez vous, que vous savez trcs bien
qa'elledeplait k Dieu, qui veut que vous viviez dans une grande dependance
de sa Tolonte.
388
EPITRE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUES.
CHAPITRE V.
Riches avares severement punis. Patience dans las afflictions, soutenue par
I'attente de I'av^nement du Seigneur. Souffrances des prophetes el de
Job. Eviter le jurement. ExtrAme-onction. Confession des peches. Priere
du juste. Conversion du pecheur.
I. Maintenant a vous, riches;
pleurez, poussez des cris et des
hurlemens, dans la vue des misferes
qui doivent fondre sur vous/
a. La pourciture consume les ri-
chesses que vous gardez : les vers
mangent les vetemens que vous
avez en reserve :
3. La rouille gate Tor et I'argent
que vous cachez : et cette rouille
portera temoignage centre vous,'
et devorera votre chair comme un
feu : c'est le tresor de colere'que
vous vous amasse:i pour les der-
niers jours.
4. Sachez que le salaire que vous
faites perdre aux ouvriers qui ont
fait la recolte de vos champs, crie
contre vous ; et que leurs cris ' sont
montes jusqu'aux oreilles du Sei-
gneur des aririees.'
5. Vous avez vecu sur la terre
dans les delices et' dans le luxe;
1 . Agite nunc, divites,
plorate ululantes in mi-
seriis vestris , quae adve-
nient vobis.
2. Divitiae vestrae pu-
trefactae sunt : el vesti-
menta vestra a tineis co-
mesta sunt.
5. Aurum et argentum
vestrum aeruginavit, et
aerugo eornm in testimo-
nium vobis erit, et man-
ducabit carnes vestras
sicut ignis : thesaurisastis
vobis iram in novissimis
diebus.
4. Ecce merces opera-
riorum, qui messuerunt
regiones vestras , quae
fraudata est a vobis, cla-
mat : et clamor eorum in
aures Domini sabaoth in-
troivit.
5. Epulati estis super
terram , et in luxuriis
y I. Pour Tous punir de votre avarice.
■^ 3. Au jugement de Dieu.
Ibid. Get mot iram n'est pas dans le grec.
f 4- Selon le grec : et que les cris de ceux qui ontraoissonne vos teires sont
monies , etc. L'ancienne vulgate I'exprimoit ainsi : et voces eorum qui messi
suntt ad aures, etc.
Ibid. C'est ce que signifie le mot hebreu mXDJf , tsabaot, ici employe dans
le texte original et dans la Vulgate.
^ 5. Le grec joint ainsi ces deux reproches.
■
enutrbtis cordo vestra, in
die occisionis.
6. Addixistis, et occi-
distis justutn, et non re-
stitit vobis.
7 Patientes igitur es-
tote, fratres, usque ad ad-
Tentum Domini : ecce
agricola expectat pretio-
sum fructum terrae, pa-
tienter ferens donee ac-
cipiat temporaneum et
serotinum.
8. Patientes igitur es-
tote et vos, confirma\e
corda vestra : quoniam
adrentus Domini appro-
pinquavit.
9. Nolite ingemiscere ,
fratres, in allerutrum, ut
non judicemini. Ecce Ju-
dex ante januam assistit.
10. Exemplum accipi-
le, fratres , exitus mali ,
laboris, et patienliae, pro-
phetas qui locuti sunt in
nomine Domini.
11. Ecce beatificamus
eosqui sustinueruul. Sut-
ferentiam Job audi«tis, et
finem Domini vidistis ,
CHAPITRE v. 88^
vous V0U8 etes engraisses comme
des Tictimes preparees pour le jour
du sacrifice;
6. Yous avez condamn^ et tue le
juste, sans qu'il reus ait fait de re-
sistance : '
7. Mais vous, mes freres,' per-
severez dans la patience jusqu'a la
I'ayenement du Seigneur : vous
voyez qut le laboureur, dans I'es-
perance de recueillir le fruit pre-
cieux de la terre , attend patiera-
ment que Dieu envoie les pluies'
de la premiere et de I'arriere-sai-
son.
8. Soyez ainsi patiens , et affer-
missez vos coeurs^; car I'avenement
du Seigneur est proche. '
g. N'ayez point d'aigreur,' mes
freres, les uns contre les autres,
afin que vous ne soyez point con-
damnes. Yoila le Juge qui est a la
porte : '
10. Prenez, mes freres, pour
exemple de patience, dans les mau-
vais succes et dans les afflictions,
les prophetes qui ont parle au nom
du Seigneur.
11. Voila que nous les appelons
bienheureux de ce qu'ils ont taut
souffert:' vous avez appris aussi
quelle a ete la patience de Job; et
T 6. Cela s'eulend generalement des pauvres que les riches opprimaient
et faisaient condamner injuslemeat.
y^ 7- Vous qui souffrez ces oppressions et ces injustices.
Ibid. Le mot imbrem est exprimc dans le grec.
y 8. II •viendra dans peu vous delivrer de la misere et de I'accahlement ou
vous ^les.
y 9. Lilt, ne gemissez point , ne faites point de plaiiUes.
Ibid. L'aTenement du Seigneur qui »'approche.
y 10. C'est le sens du grec.
y 1 1 . Autremenlet a la lettre: Vous vojecque uout appelons bienheureux
ceuz qui *ouffr«i)t avec patience-
quoniam misericors Do-
minus est, et miserator.
890 EPITRE CATHOLIQUE DE SAINT JACQUES.
voiis avez vu la fin du Seigneur;'
car le Seigneur est plein de com-
passion et de misericorde.
iWaa. V. 24. 12. Mais avant toutes choses,
mes frferes, ne jurez ni par le ciel,
ni par la terre, ni par quelque au-
tre chose que ce soit; mais conlen-
tez-Yous de dire : Cela est; ou,
Cela n'est pas;afin que vous ne
soyez point condamnea.
12. Ante omnia autem,
fratres mei,nolite jurare,
neque per coelum, neque
per terram , neque aliud
quodcumque juramen-
tum. Sit autem sermo
Tester : Est, est : Non ,
non : ut non sub judicio
decidatis.
i3, Tristatur aliquis
vestrum ? oret. iEquo ani-
i3. Quelqu'un parmi vous est-il
dans la tristesse ? qu'il prie. Est-il
dans la joie ? qu'il chanie de saints mo est? psallat.
cantiques.
i4- Quelqu'un parmi vous est-il
malade? qu'il appelle les pretres
de I'Eglise, et qu'ils prient sur lui ,
en I'oignant d'hiiile au nom du Sei-
gneur.
1 5. Et la priere de la foi ' sauvera
le malade : le Seigneur le soula-
14. Infirmatur quis in
vobis ? inducat presbyte-
ros Ecclesiae, et orent su-
per eum, ungentes eum
oleo in nomine Domini :
i5. Et oratio fidei sal-
vabit infirmum , et alle-
f.uc.i\. 25.
gera; et s'il a' des peches, ils lui viabit eum Dominus : et
seront remis. '
16. .Confessez done* vos fautes
I'un k I'autre ; et priez I'un pour
I'autre, afin que vous soyez sauves;
car la priere perse verante du juste'
peut beaucoup. ^
17. Elie etait un homme sujet,
comme nous, a toutes les miseres
de la vie: et cependant, ayant prie
Dieu avec ferveiir qu'il ne plut
point, il cessa de pleuvoir sur la
terre xluraiit trois ans et demi ; "
si in peccatis sit , remit-
tentur ei.
16. Confitemini ergo
alterutrum peccata vestra,
et orate pro invicem, ut
salvemini : multum enim
valet deprecatio justi as-
sidua.
17. Elias homo erat si-
milis nobis, passibilis : et
oratione oravit ut non
plueret super terram , et
non pluit annos tres et
menses sex.
y^ II. La u'compense que le Seigneur accorda a la patience de Job. Fi/i.
dans le toxte liebreu jp:; , signide souvent recompense.
■^ i5. 3ointe a celte onctioh sainte.
Jhid. Gr. lilt, et s'il a commis des peches.
Ibid. S'il a recours a la confession que Jesus-Christ a etablie dans son
Eglise.
y i6. Cette parlicule n'est pas dans le grec.
Ibid. Grec : La priere fervenle du jusle, etc.
y 17. Cos trois ans et demi ne sont pas expresseraent marques dans les
»8. Et rursum orarit :
et ccelum dedit pluviam,
et terra dedit fructum
suum.
19. Fratres mei, si quis
exTobis erraverit a veri-
tate, et converterit quis
eum:
20. Scire debet, quo-
niam qui converti fecerit
peccatorem ab errore viae
suae , salvabit aniinam
ejus a niorte, et operict
'multitudinem peccato-
CHAPITBBY. . 391
18. Et ayant pri6 de nouveau, le
ciel donna de la pluie, et la teixe
produisit son fruit.
19. Mes freres, si I'un d'enlre
vous s'ecarte du chemin de la \e-
rite, et que quelqu'un I'y fasseren-
trer,
20. Qu'il sache que celui qui
conyerlira un pecheur, et le reti-
rera de son egarement, sauvera sa
propre ame de la naort, et cou-
vrira la multitude de ses propres
peches. '
livres de I'Ancien-Testament : mais la tradition pouvoit avoir conserr^ cetta
circonstance, et Jesus-Christ meme en parle dans I'Evangile, Xuc. iv. aS.
y 20. Gr. litt. sauvera una ame de la mort , et couvrira la multitude des
peches. Vulg. litt. sauvera de la mort Tame de ce pecheur, et couvrira la mul-
titude des peches. Quelques exemplaires latins lisent : suam...suorum: sau-
vera son ame de la mort , et couvrira la multitude de ses p&hes.
Les exemplaires grecs portent ici: L'Epitre de Jacques a ete ^rite cd a4a
TCrsets.
PREFACE
SUR LA PREMIERE EPITRE
DE SAINT PIERRE..
Abr^ge de la Pierre , autrement Simon , fils de Jean , ou de Jonas ,
vie de saint etoit de Bethsaide, autrement Juliade , vilie de Galilee , sU
Pierre depms ^^^^ au-dela du Jourdain , pres de rembouchure de ce
;„c:nn nn flcuve dahs le lac de Genesareth. II etoit frere de saint An-
temps ou il dre, etfutappele par lui a la suite de Jesus-Christ*. II etoit
ecrivitceite marie ^ et avoit sa maison a Capharnaiim ^; il y etoit oc-
epitre. cupe a la peche avec son frere Andre ^ , lorsque le Sauveur
les appelapour toujours ason service. Saint Pierre temoi-
gna dans toute occasion son zele pour son Maitre , et il
se distingua par-la au-dessus des autres apotres; aussi Je-
sus-Christ lui marqua toujours une bonte toute particu-
liere ; il voulut qu'il fut temoin de sa transfiguration*; et il
lui declara une autre fois qu'il etoit la pierre.sur laquelle il
vouloit batir son Eglise ^, contre laquelle les portes de I'en-
fer ne prevaudroient point.
Quoique saint Pierre eiit eu le malheur ou la foiblesse
de renoncer Jesus-Christ dans sa passion, le Sauveur ne
laissa pas , apres sa resurrection , de lui donner de nouvel-
les preuves de son ami tie *^; il lui conserva la primautc sur
les autres apotres , et le fit , d'une maniere expresse , le chef
visible de son Eglise, lorsque lui ayant dit par trois fois '^ :
Simon Jils de Jean , m'aimez-voas plus que ceux-ci? et saint
Pierre lui ayant repondu autant de fois qu'il Taimait, Jesus
lui dit : Paissez mes agneaux et mes brebis.
Apres la descente du Saint-Esprit sur les Apotres , saint
Pierre , corame chef de I'assemblee , monta au temple et fit
^ Joan. I. 42. — ^ Match . vm. 14. Luc. iv. 38. — ^ Luc. v. 8. — *Luc.
IX. 28. Malt. XVII. r. — * Matili. xvr. 18. — " Marc. x\i. 7. — ' Joan. xxt.
;5. 16. 17.
PREFACE sua LA l'" EpItRE DE SAINT PIERRE. SgS^
au peuple assemble un discours qui convertit trois mille
personnes*. Peu de jours apres, comnie il parloit encore
au peuple dans le temple, if futarrele et mis en prison par
le credit et la puissance des pretres et des saduceens*;
mais cela ne ralentit pas son ardeur, et n'abattit pas son
courage. Ayant ete oblige de comparoitre devant I'assem-
blee des principaux.de la nation, il leur precha hardiment
Jesus-Christ , et leur dit qu'il falloit plut6t obeir a Dieu
qu'aux homraes.
Nous ne nous arreterons point a raconter ici toutes les
actions de saint Pierre; nous nous contenterons de mar-
quer les principales, pour conduire le lecteur jusqu'au
temps ou il ecrivit cette epitre. Apres la mort de saint
Etienne, tous les fideles, excepte les Ap6tres, furent dis-
perses et se sauverent de Jerusalem^. Les Samaritains
ayant recu I'Evangile par la predication de saint Philippe
diacre , saint Pierre vint a Samarie pour leur donner le
Saint-Esprit : Simon le magicien voulut acheter a priv
d'argent le don de pouvoir aussi conferer le Saint-Esprit ;
mais saint Pierre le rejeta, et le chassa de I'Eglise de Jesus-
Christ.
Quelque temps apres, Dieu fit voir a saint Pierre qu'il
vouloit qu'on ouvrit la porte de I'Evangile aux gentils ;
c'est ce que cet ap6tre apprit par une vision qu'il eut a
Joppe, d'un linceul rempli de toutes sortes de reptiles
que Dieu lui dit de tuer et de manger*. II donna done le
bapteme a Corneille ^ , ne fit plus de difficulte de manger
et de converser avec les gentils, ou de leur precher. II
alia bientot apres a Antioche^, ou il etablit son premier
siege. Eiant de retour a Jerusalem, vers I'an 87 de I'ere
chretienne vulg. , saint Paul vint I'y trouver pour rendre
ce respect a sa dignite de premier ap6tre ; il y demeura
quinze jours aupres de lui, et ne vit aucun autre ap6tre
que lui et saint Jacques proche parent du Seigneur, les
autres elant alles precher I'Evangile dans divers autres
endroits.
Saint Luc ne nous dit plus rien de saint Pierre , jusqu'a
sa prison en I'an 44 de I'ere chret. vulg. : ainsi on pent
' Act. II. 14. ei setftf.— ^ Act. iv. i. et seqq. — ^ Act. via. i. el seqq. —
* Act. X. 9. 10. el seqq. — * Act. \. 47. 48. — ^ Hieronvm in Gal. tu
Chrysost. torn. 5. homil. 12. yide Concil. loni. f. p. i6c). ettom.S.p.
1169, etc.
39^ PREFACE
njettre entre I'an 87 et Tan 44 ce que I'Histoire de I'Eglise
nous apprend' de sa predication aux Juifs repandus dans
le Pont, dans la Galatie, dans la Bithynie, dans la Cappa-
doce et dans I'Asie ; apres quoi il alia a Rome pour y eta-
blir son siege.
Temps au- l\ etoit dans cette viile, lorsqu'il ecrivit sa premiere
trTfuT &rhe' epitre ; mais comme on croit qu'il y a fait plusieurs voya-
A qui elle fut S^^ ' ^"^ "^ P*^"*^ decider precisement si ce fut avant I'an 44,
adress^e. auquel il etoit surement a Jerusalem , a la fete de Paques,
et ou il fut mis en prison par Herode Agrippa^ ; ou si ce fut
dans un sepond voyage qu'il fit en cette ville.
Ce qui est certain , c'est i" qu'alors on donnoit commu-
nement le nom de Chretiens, dans les provinces, aux disci-
ples de Jesus-Christ^ ; ce qui commenca, selon saint Luo*,
par I'eglise d'Antioche, et que Ton ne peutmettre qu'en
I'an 43 de I'ere chret. vulg. 2° Saint Marc etoit aveclui,
et n'etoit point encore venu precher en Egypte, ce qu'on
croit qui n'arriva que vers I'an 49. 3" Les Eglises d'Asie ,
de Pont , de Galatie , de Bithynie , auxquelles il ecrit ,
etoient nombreuses et souffroient beaucoup de la part des
Juifs incredules et des gentils^. 4° Enfin saint Pierre dit ici
que le temps approche ou Dieu va comniencer son juge-
ment par sa propre maison^; ce qui parott marquer les
vengeances pretes a eclater sur la nation juive , et la ruine
prochaine de Jerusalem. Ainsi on peut mettre cette epitre
entre Tan 45 et I'an 5o de I'ere vulg., sans toutefois rien
decider absoluraent sur cela.
Comme il etoit I'apotre de la circoncision , de meme
que saint Paul I'etoit des gentiis, iladresse son epttre prin
cipalement aux Hebreux , qui avoient embrasse la foi dans
les provinces donl on vient de parler ; ce qui n'empeche
pas , selon saint Augustin " et quelqucs nouveaux com-
mentateurs^, qu'il ne parle aussi aux gentiis convertis qui
etoient raeles parmi eux : et on croit remarquer certains
traits et certains avis qui paroissent ne pouvoir regarder
que les gentiis qui avoient embrasse la foi; par exemple ,
ce qu'il dit^, qu' avant leur conversion ils etoient plonges
^Euseb.l. HI. c. I. p. 71. Hieron. de Viris Illustr. c. i. LeoMagn.
serm. 8. — * Act. xii. i. et seqq. — ' r. Petr. iv. 16. — ^ Act. xi. 26. —
* I. Petr. 1. 6. 7. et 11. 20. 21. et seqq. iv. 12. i3. et seqq. — ® i. Petr. iv.
17. 18. — ^ August, inpsnl. cxlvi. etin Faust, lib. xxii. cap. 8g. — ' Fide
Est. prcefat. D. Thorn. Reda, Gloss. Limn. etc. Theodoret. preefal. apud
Mill. pag. 55ji.— ' i. Petr. 11, 10. n. etiy. 3, 4. el i. 8.
8UR LA l" l^ptTRE DB SAINT PIERRE. Zt^S
dans toutes sortes de desordres et dans I'idolatrie ; qu'ils
aimoient Jesus-Christ, quoiqu'ilsne I'eussent point vu, etc.
Toutefoisnoiiscroyons,avec beaucoupd'autres*, qu'il n'y
a rien ici qu'on ne puisse aisement expliquer des seuls
Juifs convertis a Jesus-Christ.
Le but principal de I'Apotre estde confirraer dans la foi OLjet princj-
les fideles auxquels il ecrit , de les soutenir au milieu des f' ^^ ^^^^
afllictions et des persecutions qu'ils soufTroient, de leur j^P'^'^^ ^.^^^
faire voir qu'il etoit parfaitement d" accord avec saint Paul ^'pitre.
sur le fond de la doctrine , et dc refuter les erreurs de Si-
mon et des nicolaides, qui prelendoient que la foi seule
sans les oeuvres suffisoit pour nous sauver. Cette epitre
peut sc diviser en doctrine et en exhortation. La premiere
comprend les douze premiers versets; et eile se trouve
encore repandue dans plusieurs autres endroits , lorsqu'il
fonde ses preceptes sur des raisons tirees des mvsteres de
la foi. Saint Pierre y represente I'excellence incomparable
de i'heritage celeste auquel les fideles sont appeles , et les
raisons solides qu'ils ont d'esperer, comme la fin et le fruit
de.leur foi, cebonheurdont la possession leurest ouverte,
selon les prophetes, depuis I'aYeneraent du Seigneur*.
L'exhortation occupe tout le reste jusqu'a la fin. L'apotre
y parle d'abord en general a tous les chretiens, qu'il porte
a conserver avec soin la purete et I'innocence de leurs
ames, telle qu'ils I'ont recue dans le bapteme'; a mor-
tifier leurs passions , a edifier les infideles par de bons
exemples , a etre soumis aux puissances temporelles*. En-
suite il descend aux conditions particulieres, en commen-
^antpar cellesdesesclaves , pour les releverdel'opprobre
et du mepris qu'on en faisoit dans le monde : il marque
leurs devoirs^. Apres cela il expose les devoirs des femmes
et de leurs maris *". II vient aux devoirs communs a toutes
les conditions'. II s'adresse a tous ceux a qui il a ecrit; il
les console tous de la persecution qu'ils souffroient^. II
leur donne encore quelques avis generaux^. II y ajoute
quelques avis particuliers pour les martyrs*", pour les
* Euseb. lib. m. Hist. eccl. cap. iv. Hieron. Catalog. Scriptorum Eccl.
Vidjrmus, OEcumen. Cajet. Tilelman. Canus, lib. n. delocis, aliipUires.
— * Cap. 1. y i.-t2. — ^y 1 3. adjinem^ et cap. ii. ^ i.-io. — * -^^ 11.-17. —
*ixi.adfin.—^ Ca;>. III. ^1.-17.— V 8.-16.—" 4 f,. ad Jin.— ^ Cap.
IT. I. -I I. — " y I a. ad fin.
396 PREFACE
pasteurs*, pour les jeunes gens *, et pour tout le peuple'.
II termine sa lettre par des souhaits et des saluts*, dans les-
quels il leur marque que TEglise qui est a Babylone les
salue. Sous le nom de Babrjlone il design e Rome : et ceci
donnera lieu^a une Dissertation sur le voyage de cet ap6-
tre a Rome.
Remarques On remarque dans cette epttre diverses similitudes et
surle style de diverses expressions qui sont loutes pareilles a celles qui
En auell^'^^ ^^ voient dans saint Paul ; par exemple, sur la predestina-
langue elle fut ^^^^ de Jesus-Clirist, sur les effets de sa mort, sur le bap-
&rite. t^me : on y trouve les memes avis aux ev^ques , aux per-
sonnes mariees , et la meme attention a recommander aux
fideles I'esprit de douceur dans les souffrances , et I'obeis-
sance aux princes etaux magistrals. Grotius ^ y trouve une
force, une vehemence, une vigueur dignedu prince des
ap6tres ; Erasme et Estius^'reconnoissentqu'elleestpleine
d'une majeste apostolique, et renferme de grands sens en
peude mots.
Baronius a conjecture que cette premiere epitre avoit
ete ecrite en liebreu par saint Pierre , et traduite en grec
par saint Marc ; mais on croit communement qu'elle a ete
ecrite en grec , quoique adressee aux Hebreux convertis.
On parloit grec dans loutes les provinces ou ils etoient dis-
perses; et d'ailleurs saint Pierre y cite toujours TEcriture
selon la version des Seplante. Saint Jerome "^ remarque
entre les epttres de saint Pierre des differences de style,
de caractere , de melhode ; ce qui lui fait dire que saint
Pierre se servoit tantot d'un inlerprele, tantot d'un autre,
suivant les rencontres : on coraprend bien que cette diver-
site d'inlerpretes pouvoit emporter la difference du style.
Saint Marc etoit son interprete ordinaire ; et on sail qu'il
etoit alors a Rome avec lui , puisqu'il fait ses complimens
aux fideles a qui il ecrit, chapitre v, verset 1 3. Ces inter-
pretes n'etoient pas employes a traduire d'hebreu ou de
syriaque en grec ce que les apotres leur disoient, mais a
• Cap. V. ■^ I. -4- — * -^ 5. — 'y^ 5.-9. — * -^ 10. adfinem. — * Grot, prce-
fat. in hanc epist. Habethcea epistolary a(Oo$^m conveniens principi apo-
stolorum. — ® Erasm. et Estius, prcefat. in epist. i. Petri. Est autem epistola
profecto digna apostolorum principe, plena authoritatis et majestatis aposto-
lic ce : verbis parca, sententiis referta. — ■ '' Hieron. epist. r5o. qucest.u.
lib. lu. p. 1 39. Duoe epistolce quceferuniur Petri, stylo inter se, et caractere
differunt , slructuraque verborum, ex quo inielligimus pm necessitate tv-
ritin diversis eiim tisum inlerpretibus.
SUR LA l'' EPixRE DE SAINT PIERRE. 897
reduire en meilleur style ce qu'ils leur disoient en grec ,
ou en latin, suivanl qu'ils etoient inspires; en sorte que
le Sainl-Esprit, qui leur accordoit le don des langues, ne
leur en donnoit pas toute la perfection et toute la delica-
tesse , pour des raisons que nous ne pouvons penetrer.
Saint Jer6me en parlant de Tite dit qu'il faisoit cette
fonction aupres de saint Paul , parce que cet apotre ne
pouvoit avec son langage ordinaire parvenir a la raajeste
des choses divines qui lui etoient revelees : Qui divinorum
sensuum majestatem digno nonpolerat gracieloquii expUcare
sennone,
Tertullien ' et saint Cypprien ^ citent cette lettre sous . Denomina-
le nom d'epitre a ceux du Pont : Epistola ad Ponticos , ^ j,pg p^j.
parce que ces peuples sont les premiers uommes dans elle precedee
i'inscription. Erasme ', et apres lui Grotius *, ont cru dune autre?
que saint Pierre avant cette epitre en avoit ecrit une autre ^^ canonicite.
aux Juifs convertis , disperses dans les provinces d'Asie ; Dhes^sousle
ils se fondent sur ces mots du chapitre v, verset 12 : nom de saint
Je vous ai , ce me semble, ecrit bvievement par notre frere ^i^ne.
Sylvain. iMais ces paroles s'expliquent fort naturelle-
ment de cette epttre meme , que saint Pierre envoya par
Sylvain, et qui lui paroit etre courte , comrae elle Test
en effet, par rapport a la grandeur de la matiere qu'elle
contient.
Au reste, cette epitre a toujours passe pour canonique,
comme le remarquent Origene ^ , Eusebe ^ , saint Je-
r6me ' , et les autres anciens, qui la citent souvent. Pour
la seconde epitre du meme apotre , elle a ete long-
temps contestee , comrae on le verra dans la preface sur
cette epitre. On a attribue a saint Pierre quelques autres
ecrits apocryphes , comme une Apocalypse , un voyage
ou un itineraire , des Actes , un evangile , un livre in-
titule la Predication, et un autre, le Jugement de saint
Pierre.
* TertuU. Scorjtiac. cap. xii. — * Cyprian, lib. m. cap. xxti. Testim. —
^ Erasm.prcefat. — * Grot, ad i.Petr.v. 11. — * Origen. apudEnseb. lib.
n. cap.x-iy. et in Joan. pag. 88. — ^Euseb. Hist. lib. in. cap. in. — ^ Jfie-
ron. de Scriptorib. Eecl.
DISSERTATION
SUR
LE VOYAGE DE SAINT PIERRE
A ROME.
Accord des On avoit cru sans difficulte , jusqu'au seizi^me siecle de
anciens sur le I'Eglise , que saint Pierre avoit ete a Rome, qu'il y avoit
samfpf'rre ^^"'^ ^^ premiere et sa seconde epitre, qu'il en avoit
aRome.Cause fonde^ et gouveme I'Eglise , qu'il y etoit moi-t , que c'etoit
de la contra- cette ville qu'il avoit designee sous le nom de Babylone ,
diction de en disant : L'Eglise qui est dans Babylone vous salue^ .
derner^PIan ^ ^^^ ^"1' ^^^^ » ^'^ sur les promesses de Jesus-Christ faites
de cette Dis- ^ saint Pierre, qu'on avoit reconnu generalement dans
sertation. tout le monde Chretien que Rome etoit la premiere des
Eglises, le centre de I'unite; et que les souverains pon-
tifes, sUccesseurs de saint Pierre, etoient les chefs visibles
du troupeau de Jesus-Christ. Les plus grands adversaires
du saint-siege n'avoient ose con tester a Rome sa primaute ;
et les paiens memes , convaincus par la voix publique et
par le respect profond que tous les fideles lui portoient ,
la regardoient comme la capitale du monde chretien et
le siege de la premiere dignite et de la plus haute autorite
parmi ceux qui faisoient profession de croire en Jesus-
Christ. Tertullien , deja monlaniste ^ , appelle en raillant
le pape le souverain pontife , c'est-d-dire eveque des eveques ,
parce que les catholiques lui donnoient ces titres. Am-
mien Marcellin^, auteur paien , reconnoit que la princi-
pale autorite parmi les chretiens reside dans I'eveque de
Rome.
Ce n'est que depuis les dernieres heresies que Ton a
commence a contester a Rome ses prerogatives , au pape
* r. Petr.s. i3. — * TeHulL de pudicitia, cap. xiii. — ^ Ammian. Mar-
eell. li'b.xy. cap. vn.
DISSERT. SUR LE VOYAGE DE SAINT PIEKRE A ROME. 899
sa primaute ; et qu'on a revoque en doute le voyage de
saint Pierre, et I'etablisseraent de son siege a Rome.
L'eiigageinent ou Ton s'est trouve de soutenir ce que I'oa
avoit avance sur cela , a fait aussi qu'on a nie que le nora
de Babylone, marque dans la premiere epilre de saint
Pierre , fut un terrae figure qui signiGat la ville de Rome.
On a pretendu qu'il falloit I'entendre de la vraie Baby-
lone. Mais quelle est celte vraie Babylone? car il y a plus
d'une ville de ce nom. C'est sur quoi les auteurs protes-
tans se sont partages , et sur quoi ils ne s'accordent point
encore aujourd'hui. Les uns soutiennent que c'est la fa-
meuse , la grande Babylone , situee sur I'Euphrate , dans
la Chaldee ; dautres , que c'est Babylone d'Egypte , ou
ils prelendent que saint Pierre passa apres avoir fonde
I'Eglise d'Alexandrie. C'est ce que nous examinerons ci-
apres.
Pour trailer avec quelque ordre cette question, que
nos controversistes ont deja discutee en tant demanieres,
nous etablirons d'abord quelques principes; puis nous
en ferons I'application au fait dont il s'agit; apres cela
nous prouverons le voyage de saint Pierre a Rome par les
monuraens anciens qui nous restent; et enfin, nous
tacherons de satisfaire aux objections de ceux qui le
nient.
I. C'est Une regie de critique recue par tout le monde , Principes gd-^
qu'un fait historique rapporte par des auteurs contempo- n^|^«^ qui
• " '!■' 11 doivent servir
rams ou presque contemporains, eclaires et de bonne , . j ,
foi , et qui ne sont contredits par aucun auteur plus ancien I'examendela
ou plus instruit , doit passer pour indubitable. question dont
II. tn fait public , et qui inleresse toute I'Eglise, qui a '' ^'^oJ* >"•
ete cru et avoue par lous les fideles , et meme par les liere-
tiques et les schismatiques , pendant quinze siecles , doit
etre recu comme certain , quand meme on n'en auroit
point d'autre preuve ni d'aulre monument existant que
ce consentemcnt et cette tradition; surtout si Ion pent
montrer que Ion a perdu plusieurs livres , plusieurs mo-
numens et plusieurs histoires ou ce fait pouvoit etre ex-
prime formellement.
III. En maliere de fait et d'histoire , ce ne sont pas
seulement les livres et les ecrits qui font foi ; ce sont les
monumens publics, les tombeaux eriges, les eglises ba-
lies , les privileges, les biens, et les prerogatives accordes
el acquis a certains lieux , a certains peuples , a certaines
4oo
DISSERTATIOM
communautes. Ces sortes de choses sont des preuves aussi
indubitables que les histoires les plus authentiques.
IV. 11 est, pour ainsi dire , du droit des gens et de la
foi publique de se rapporter a chaque peuple , a chaque
pays , a chaque republique , a chaque ville , de ce qui
concerne sou histoire , ses droits, ses pretentions; car
qui peut mieux les savoir, et qui a plus d'interet de les con-
server ?
V. Enfin , pour detruire un fait avance par des histo-
riens contemporains ou presque contemporains , fonde
sur une possession paisible, et sur une tradition imme-
moriale de tant de siecles , sur une infinite de monumens
publics, des tombeaux , des batimens , des privileges,
etabli dans la croyance des peuples; pour detruire un
fait de cette nature, il faut des preuves plus que com-
munes 5 il faut , pour ainsi dire , des demonstrations histo-
riques.
Or le vogage de saint Pierre a Rome est de la nature de
ces faits dont nous venons de parler. 11 est avance par
Papias , disciple de saint Jean I'evangeliste , par saint
Clement d'Alexandrie, par Origene , par Tertullien , et
par une infinite d'autres auteurs du second et du troisieme
siecle et des siecles suivans; il estatteste par vingt monu-
mens tres anciens , qui ont subsiste et qui subsistent en-
core dans la ville de Rome. On y montroit des les pre-
miers siecles les tombeaux des apotres , le lieu de leur
martyre, et des eglises baties en leur honneur. Les pon-
tifes romains sont en possession , depuis saint Pierre et
saint Paul, de la primaute dans I'Eglise chretienne, et
des prerogatives attachees a cette primaute. C'est leur
heritage ; ils en conservent et en produisent les litres et
les preuves. On ne doit done pas attaquer ces faits et
contester ces droits , a moins qu'on ne produise des rai-
sons d'une solidite , d'une evidence et d'une certitude
qui I'emportent sur tout ce que Ton vient de dire.
Preuves du Nous pourrions avancer que le voyage de saint Pierre a
voyage de Rome est prouve par saint Pierre meme , qui marque ex-
Mint Pierre pj-essement qu'il a ecrit sa lettre de Baby lone , c'est-a-
^ Rome. Re-*:. in t t i • „
marques sur dire de Rome , comme nous 1 expliquons avec les anciens.
lenom deBa- Cette preuve seule suffiroit pour trancher la difficulte;
bylone d'oii mais comme elle est contestee , nous ne pouvons nous
saint Pierre ^^ prevaloir que nous n'ayons refute ce que nos adver-
miere iftWre. saires nous opposent contre ce passage. L apotre marque
SLR LE VOVAGE DE SAINT PIERRE A ROME. 4oi
cxpressemenl qu'il ecrit dc Babylone, disent-ils; pourquoi L'Apiirede-
prcndre ses expressions dans un sens fisrure? Est-ce I'usafire signe sousce
K ,11'. 1-1 I non> Rome
dans des lettres a un style simple et nalurel, comme est m^me. Au-
la sienne, d' employer ainsi des maniercsde parler allego- teuis proics-
riques et figurees , sans y avoir aiiparavant prepare I'es- tans qui re-
prit du Iccteiir? Ici pn ne voit rien qui conduisc a la figure, conno'ssent le
a I'allegorie. ... , sSpierre 4
On repond que saint Pierre pouvoit avoir plus d'une Rome,
raison d'en user ainsi : i° pour ne pas decouvrir le lieu ou
il eloit. Les apotresayant de loules parts une infinite d'en-
nemis, il etoit de leur prudence de ne 'pas s'exposer te-
merairement a la persecution.
2" II ecrivoit aux Hebreux convertis au christianisme,
accoutumes de jeunesse a ccrtaines expressions propheti-
ques et figurees. lis exprimoient, par cxemple, sous le
nom de Sodome, une ville corrompue; sous le nom d'^"-
gypte, un pays ennemi et abandonne a I'idolatrie; sous le
nom dc Chanaan, un peuple maudit; sous le nom de Ba-
bylone, une ville ennemie etplongee dans le desordre.
3° Babylone avoit cte le lieu de la captivile de leurs
peres , la capitale de I'empire des Chakleens, les plus
grands ennemis qu'aient eus les Juifs, et les destructeurs
de leur monarchie. Rome etoit de meme alors la maitresse
du monde; les empereurs romains avoient reduit la Judee
en province, et liii avoient ote ses plus beaux privileges;
les fideles etoient exposes a la haine des peuples et aux
persecutions des empereurs; saint Pierre se trouvoit a
Rome; il ecrivoit aux Juifs convertis dans le Pont, dans la
Galatie, dans la Bithynie, dans la Cappadoce, dans I'Asie;
il etoit naturel qu'il s'expiimat comme il a fait, et qu'il
leur designat Rome sous le nom de Babylone; nom que
les Juifs entre eux lui donnoient apppremment, puisqu'on
voit dans I'Apocalypse saint Jean qui la designe sous le
meme nom ^, de I'aveu meme de nds adversaires^, et du
consentement des anciens peres ^ .
i" Papias, disciple de saint Jean I'evangeliste, et qui
vivoit au second siecle *, nous dit expressement que saint
^Apoc. XIV. 8. XIV. 19. xvii. 5. xviii. 2. 10 21. — - Luther a ctrilun livre
de la captivile de Babylone , \ouIant marquer I'Eglise romaine. — ' l^erlull.
lib. HI. conttn Marcion. cap. i3. Andrceas et AfeOias in Apoc. xvii. Hie-
ronym. in Isai. xxiv. xlvii. Et lib. ii. contntJovin. August, etc. — * Pa-
pias apuclEuseb. Hislor. eccles. lib. 11. cap. 14. sen cap. i5. edit, [f^'ales.
23. a6
4o2 DISSERTATION
Pierre ecrivit de Rome sa premiere epttre, etque c'est cetle
ville qu'il a voulumarquer d'une maniere figuree, en disant :
L'Eglise qui est d Bahylone, et qui est elue de Dieu aussi bien
que votts, vous salue. Nous savons que Valois ' a rapporte
le nom dcPapias, cite parEusebe,nonau passage que nous
venons de rapporter, mais au precedent, qui porle, selon
lui, que Papias lemoigne que saint Pierre etanl venu a
Rome, et ayantcombaltu Simon le magicien, !es fideles de
cctle ville engagerent saint Marc a leur laisser par ecrit
I'Evangile que saint Pierre leur avoit preche. Mais quand
nous n'aurions pas le temoignage de Papias pour I'expli-
cation du passage particulier dc I'epitre de saint Pierre,
nous I'avons toujours pour son voyage de Rome, et pour
sa qualite d'apotre etd'evequedecette ville, qui est le point
essentiel donl il est question. De plus on ne peut au moins
nous conlester le temoignage d'Eusebe, qui ne parle que
selon le sentiment des anciens qui I'avoient precede, ou
meme de Papias, ou dc saint Clement, qu'il vient de ciier
immediatcment auparavant, qui entendoient comnie lui la
ville de Rome sous le nom de Bahylone.
Au reste, le meme Yalois ne peut s'empecher de temoi-
gner quelque indignation conlre ceux qui nient que saint
Pierre ait ete a Rome. II n'y a rien, dit-il, dans toule
I'Histoire ecclesiastique, de plus certain, deplus clair, de
plus autorise que ce voyage: Atqxii nihil in lota Historia
ecclesiastica illustrius^ nihil certius atquc testatius, quam ad-
ventus Petri apostoli in urhem Romam. Il estatteste par Pa-
pias, par saint Clement d'Alexandrie, par saint Denys,
eveque de Corinthe dans sa lettre au pape Soter, par le
pretreCaius dans sa dispute centre Procle, par sain tirencc,
par Origene, etpar tous ceux qui sont venus apres eux. II
ajoule : Ceux quiveulent sous le nom de Bahylone entendre
la capitale de I'empire des Assyrians (ou plutot des Chal-
deens), sont refutes par le temoignage de tous les anciens
peres. Quelle impudence n'est-ce pas de vouloir soutenir
ce qu'aucun des anciens n'a jamais avance? Qu'ils nous
Moxpc
6 uto? y.cu.
* Vales, not. in eitm Etisebiiloc. II marque que Rufin et Musculus I'ont
pris dans le sens que nous avons marqu^ ; et il est certain que la plupart d<
ceux qui I'ont cit6 I'ont prig de mime.
I
SLR LE VOYAGE DE SAINT PIERRE \ ROME. 4oS
produisent les (tisles tie I'Eglise tie Babylone; qu'iisnoas
fassenlvoir une suite tl'tjv^ques de ceMeville, commenoos
leur en inontrons une non inlerrompue ties eveques tic
Rome. Voila ce que dit Valois.
Saint Clement d'Alexandrie ', dans son sixiemc livre
des Hypotyposes, ou dcs Institutions, temoigne que le de-
mon ayant conduit Simon le magicien a Rome, la Provi-
dence y amena saint Pierre, qui detruisit lout ce que ce
setlucteur y avoit fait, et qui y fit briller la lumiere de la
veritt*. Saint Irc-nt-e ^, qui vivoit aussi au second siecle, et
qui avoit vu Ics disciples des apotres, reconnoit que I'E-
glise romaine a etc fondee par saint Pierre et saint Paul:
Maxima:, ct anliquisshna , et a gloriosissimis duo b us apos tolls
Petro el Paulo Romce fundatce et constilutce ecclesia.
. §aint Denys, eveque de Corinthe ', qui vivoit de meme
au second siecle, ecrivant aux Romains, Icur dit que les
apotres saint Pierre el saint Paul ont preche et a Corinthe
et a Rome; et qu'titant alles a Rome, ils y soulTrircnt le
martyreen meme temps. Caius , pretre de I'oglise romaine,
qui vivoit du temps du pape Zephirin *, ecrivant contre
Procule, montaniste, dit qu'il peut montrer a Rome les
Irophees des deux apotres saint Pierre et saint Paul, fon-
daleurs tie I'eglise romaine; que I'un repose au Vatican, ct
I'autre sur le chemin dOstie.
Origene ^ nous apprend que saint Pierre, apres avoir
preche I'Evangile dans le Pont, la Galatie, la Bithynie, la
Cappadoce et I'Asie, alia enfin a Rome, ou il fut crucifie
la tele en has, comme il I'avoit souhaile. TertuUien, en
plusieurs endroits, temoigne que saint Pierre aeteaRome,
qu'il y a ele martyrise, qu'il y a etabli son siege, qu'il y a
eu des successeurs *". Que les hereliqucs, dit-il, nous pro-
duisent la suite de leurs ("veques, venus jusqu'a eux par une
' Clem. Alex. apudEuseb. lib. ii. Histor. eccles. cap. xiv. et xt. K'j.r.-
tir,; ev i/t,~<a uiterj-jrwoswv TrxpaTsOsira'. rr.v imsiav. — * Iren. lib. in. contra
k/eres. — ^ Dionys. Corinth, apud Eiiseb. lib. n. Hist, eccles. cap. \x\\-,
seu XXV. Ta^ra. v.%\ ujajI; ^li rr; tgcx-jt/:; vcu^sato; rf.v a:7i XliTpi-j n.a}. Ilai-
tli 7T.V T.aiTspav KopwOov cyTt'jaavTt; Tjii^ , iixo'w; Si xa; ei; —iy tro/.tav
dfisfn (J'.^a|xvT£?, eu.aprj2T.ffav xa-ra riv ajriv xatpov. — * Apud. Euseb. ibi-
dem, ir^ Si Ta Tpiirata tuv a-rrcffrcAWv tyu Sv^ai. Eti -ya: bi/.rar^ ars/ScIv
im Tov BaT'Jiaviv, t, irr. rh c^sv tt.v (iGz'.nt, tOprflEt? ra rpi^ata twv raj-rry
i^pucaaivwv r»r» Exx).T.<Jtav . — *Origen. torn. 3. Erplan. in Genes. npudEu-
stb. I. m.e, I. Hist. ece».— ' TmuU. de Prcescripn. cap. xxxn.
4o4 DISSERTATION
succession non interrompue, depuis les ap6tres, ou les
homines apostoliques; car c'est ainsi que Rome nous rap-
porte Clement, comme ayanteteordonne par saint Pierre :
Edant or'igines ecclesiaram, el volvant ordinem episcoporum
suorum ita per successionem ab initio decurrentem , ut primus
ille episcopiis aliquem ex apostolis, vel aposlolicis viris, ha-
hueril auctorem el anlecessorem; hoc enim modo Romanorum
ecclesia Clemenlem a Petro ordinal am referl. Ailleurs ^ il re-
leve le bonbeur et la gloire de Rome, que les apotres saint
Pierre et saint Paul ont eclaireq par leur predication, et
qu'ils ont arrosee de leur sang: Islaquamfelix ecclesia, cui
tantam doctrinam aposlolicum sanguine sua prof ude runt; ubi
Petras passioni dominicce adcequatur!
Saint Cyprien ^ reconnoii que dans I'eglise romaine est
la cbaire de saint Pierre, la principale auloriie, le centre
de I'unitc saccrdotale: Ad Petri calhedram, atque ad eccle-
siam principalem, unde unitas sacerdotalis exorta est. Ar-
nobe ^, Hegesippe *, saint Ambroise ^, saint Jer6me^,
Eusebe ^, saint Augustin ^, Lactance -', Theodoret ^'', Paul
Orose ^•j Optat de Mileve *^, saint Epiphane, saint Jean
Chrysostome, saint Atbanase, les conciles; et qu'est-il be-
soin de les alleguer tons par leurs noms, puisqu'ilest cer-
tain que tous les anciens enseignent que saint Pierre a ete
a Rome, qu'il y a etabli son siege, et qu'il y a soulfert le
martyre, sans qu'aucun ait jamais dit le contraire?
Saint Clement d'Alexandrie '^, sur ces paroles de la
premiere eptlre de saint Pierre, Marc monjils vous salue,
dit que saint Pierre ayant precbe Jesus-Christ a Rome en
presence de quelques officiers de I'empereur, ces officiers
prierent saint Marc, qui etoit son disciple, de leur mettre
par ecrit ce que saint Pierre leur avoit annonce. Saint Je-
rome '* dit expressement que cet apotre a voulu marquer
* Tenull. de Pra'script. cap. xxxvi. Voyez aussi Scorbiac. cap. xv. et
lib. IV. contra Marcion. cap. \. et lib. de Bnpdsmo. — ^ Cyprian, ep. 55.
ad Cornel. Pap. — ^ Arnob. lib. ii. — ^Hegesipp. de Excid. Jerosol. cap. 3.
el cap. I. — ^ Ainbms. Serrn. deBasilicis hairetiiis non tradendis. — * Hier.
ep. 17. adMarcell. et 1. 11. contra Jovinian. et in Catalog. — ' Euseb. Hist.
I. II. cap xiti. XIV. XV. — * '^I'fj- de hwres. c. i. el alibi non seinel. —
^ Lactam. I. IV. cap. 11. — *o Theodoret. ep. 11 3. ad Leon. Magnum. —
^^Paul. Oros. Z. vii. cap.w. — '* Optal. Mile\>. 1. 11. contra Parnienian. —
*^ Clem. Alex, in Lalinis Cassioduri in r . Petr. v. Ma}vus Petri sectalor,
palamprcedicanle Petro Ewangelium liomce coram quibusdam Cassareanis
eqiiilibus, peiitns ab eis, scripsit de Ins cjuai a Petro dicta sunt Evange-
lium. — " Hieronjrm. Catalog. Fir. illusir, m Marco.
sua LE VOYAGE DE SAINT PIERRE A ROME. 4o5
Rome sous le nom de Babi^lone. Bede ^ le dit de meme,
aussi bien qu'OEcumenius, et generaleraent tous les an-
ciens comnientateurs de cette epilre.
Aussi nos ad veisaires ne nous opposentni le temoignage
des historiens ecclesiastiques, ni cclui des peres, mais
seulement le prelendu silence de I'Ecriture, et quelques
raisons de convenance, qui leur paroissentplus forles que
ce consentement unanime des anciens, donl eux-memes
cerlainement feroient un grand cas, s'il etoit favorable a
leur pretention.
Mais ne taisons pas 1' injustice de faire dire a tous les
protestans sans exception que saint Pierre n'a pas ete a
Rome. Pearson^ a prouve le contraire par toute I'auto-
rite de la tradition, et a fait voir qu'on n'a jamais doute
dans I'antiquite, ni qu'il eut fonde I'eglise romaine, ni
que les papes fussent ses successeurs. Grotius ^, et apres
lui Hammond, reconnoissent de bonne foi que les anciens
ont entendu Rome sous le nom de Bahylone dont parle
saint Pierre dans son epitre; et Grotius declare nettement
qu'il est en cela de leur avis, et qu'aucun chrelien n'a ja-
mais doute que saint Pierre n'eut ete dans cette fameuse
capitale de I'empire: De Bahylone dissident veteres ctnovi
interpretes. Veteres Romam inlerprclantur, iibi Petrumjuisse
nemoveriis christianus dubitabil; novi Babylonem in Chaldaa.
Ego veleribas assenlior.
Usserius * reconnoit aussi avec toute I'antiquite que
saint Pierre et saint Paul moururent a Rome sous iempire
de Neron. II dit qu'il ecrivit de la sa seconde lettre aux
Juifs convertis dans le Pont, la Galalie, la Bitbynie, la
Cappadoce; et il insinue que c'est aussi de la qu'il leur
ecrivit sa premiere epitre.
Cbamier^ avoue que le consentement des peres, qui
croient le voyage de saint Pierre a Rome, est trop respec-
table pourl'attaquerlegerement. Blondel^ dit partoutque
I'eglise romaine a ete fondee et etablie par saint Pierre et
saint Paul, Francois Junius, Scaliger, Casaubon, Pierre
du Moulin, Samuel Petit, Selden, Vedel, et tous ceux qui
ont travaille sur les epitres de saint Ignace, dans I'une des-
quelles, qui est celle aux Romains, le saint martyr dit:
^Beda in i. Petri y. i3. — ' Pearson. Opera posi/ium . pag. a;. 3r. 32.
43. — ^Grot-in i.Petriy. i3. — *Ussui: ad an. Christi6G.C>~. — 'Chaniier.
Pansirat. t. a. /. xni. cap. 4. — «Blondel, de la Primaule, etc. pag. 14,
19. etc.
4o6 DISSERTATIOM
Je ne vous ordonne pas comme onlfait Pierre el Paul^; lous
ces auteurs protestansreconnoissentque saint Pierre aete
a Rome. Patricius Junius, dans ses notes sur I'epilre de
saint Clement, dit que le marlyre de saint Pierre a Rome
est trop connu pour oser le revoquer en doute; et Ham-
mond "^ ne croit pas qu'apres le tenioignage de Caius, pretre
de I'eglise romaine, et de Denys, eveque de Corinlhe, on
puisse contester cette verite.
Louis Capelle^ conjecture qu'il faut entendre ici sous le
nom de Babylone la ville de Jerusalem, qui, depuis la mort
duSauveur, etoit devenuejal'egard de I'eglise chretienne,
comme une Babylone spiriluelle, par les violences qu'elle
exercoit contre les saints, et par la captivite ou elle dete-
noit les serviteurs de Jesus-Christ qui tomboient entre ses
mains. Cet auteur a bien senti tout I'inconvenient de I'opi-
nion qui prend ici Babylone dans son sens liiteral ct histo-
rique pour la capitale de la Chaldee, ou pour Babylone
d'Egypte pres du Grand-Caire; mais ne voulant pas en-
tierement abandonner le sentiment de son parti, il a cru
devoir chercher Babylone dans Jerusalem merae, quoique
alors cette ville futexempted'idolatrie, etqu'ellefutencore
le siege de la religion judaique, dont les apolres memes
pratiquoient les ceremonies, aussi bien que les Hebreux
convertis au cbristianisme.
Reponses Jules Scaliger surlachronique d'Euscbe, Saumaise dans
aux argumens son ouvrage sur la primaute dupape, Marca dans son livre
tie ceux qui de Concordia imperii el sacerdotii *, et Basnage dans sa con-
pr^iendent linuation de Josephe, soutiennent que Babylone marquee
d'oi saint°"*^ ^^"^ sdXnX. Pierre est la fameuse ville de Chaldee. Drusius
Pierre date sa ecrivant sur la seconde epitre de saint Pierre, chap, ii,
i«epiiren'est ^ i5 , croit meme remarquer quelques traces du langage
pas Rome, babylonien dans cette epitre, que Ton croit avoir ete
lone de Chal- ^crite du meme lieu que la premiere. Saint Pierre appelle
dee, ou Baby- Balaam y?/^ de Bosor, ou nalifde Bosor, au lieu de nalifde
loned'Egypie. Peihor, en changeant le /*<? D en Beth 2, et le Thaunen
Schin 'C ; owjilsde Bear, en changeant le Hain y en Schin.
Ces auteurs ne conviennent pas que Babylone fut alors
aussi deserte qii'on le pretend, ni que tons les Juifs en
1 Ignat.ep. ad Roman. Oux, m; IIjVpc; y.at na'JXoi; ^taTaa(jo(/.at ojilv. E/.sT-
vti Awo'aTC/.ot tnoou XptdTou, s-^tb 8i iXdyimzz. — ^ Hamniond. Dissert. 5. de
episcojns etpi'esliytet'is, etc. — ^Lud. Capell. HisUn: apostolorum. — ^ Marca
de Concord., parte ?, l.vi. c.i. n. 4,
SUR LE VOYAGE D£ 9AIIVT PIEHHS A ROME. 4o7
fussent sorlis apres raflfaire d'Anileus et Asineus, et dcs
auties Juifs qui fureut tallies en pieces par ceux de Seleu-
cie *. lis ajoutent qu'il u'y a aucune preuve que saint
Pierre ait ele en Egypte, ni qu'il ait fondc les eglises de
. Babylone d'Egypte et d'Alexandrie; mais qu'il est tres
naturel que d'Antioche ii soit passe en Orient, et qu'il ait
ete a Babylone , oii il y avoit plusieurs Juifs. De plus on
sait, a n'en pouvoir douter, que cet ap'6tre a preche dans
la Bithyuie, dans la Galatie, dans le Pont, dans la Cap-
padoce, provinces assez voisines de I'Euphrate, et quil
avoit pu parcourir, ou en allant a Babylone, ou en reve-
uant de cctte ville dans la Syrie. 11 parle aux .Tuifsde ces
provinces comme un perc a ses enfans, coiniue un apotre
a ses neophytes; il leur parle de leur lentation et de leur
joic, comme en etant bien informe, apparcmment par les
lettres qu'ils lui avoient ecrites, ou par le commerce qu'il
avoit eu avec eux. Dans sa lettre il s'adresse d'abord aux
provinces qui etoient pluagvoisines de Babylone, et finit
par les plus eloignees. Et if ne passa pas sculement a Ba-
bylone; il y demeura assez long-temps, puisque dans ses
lettres on s'apercoit qu'il a pris quelque chose du langage
de cette ville. Voila ce qu'on dit de plus plausible pour ce
sentiment.
Ceux qui tiennent pour Babylone d'Egypte exagerent
taut qu'ils peuvent la solitude et la desertion de Baby-
lone de Chaldee , d'ou les Juifs avoient ete chasses;et
comme ils veulent trouver une ville qui ait porle reel-
lement , et non-seulement en figure , le nom de Baby-
lone , ils n'en trouvent point d'autre que celle d'Egypte ,
oil ils supposent qu'il y avoit alors beaucoup de Juifs , et
que saint Pierre y alia apres avoir preche a Alexandrie.
Ainsi ce que les uns s'efforcent d'etablir est renverse
par les autres. Mais la verile tient le milieu; et, san^
se faliguer a chercher une Babylone reelle, elle sou-
tient qu'il ne s'agit que dune Babylone mystique et
figuree.
Certes dans le temps que saint Pierre ecrivoit aux Juifs
convertis , ils ne pouvoient entendre sous le nom de Ba-
bylone, ni celle de Chaldee , ni celle d'Egvpte. Cette der-
niere etoit Irop peu connne , el peut-etre ne reloii-elle
point du tout des Juifs convertis de Pont , de Galatie , de
* Vide Joseph. Atuiq. I. xtiii. cap. uk.
4o8 DISSERTATION
Bithynie, de Cappadoce et d'Asie , auxquels il adresse son
epttre, Babylone d'Egypte avoit ele fonde'e lorsque Cam-
byse se rendit maltre de I'Egypte '. Quelques Perses a qui
ce prince permit de s'etablir dans le pays , la batirent , et
y fixerent leur demcure. Du temps de Strabon ^, c'etoit
une forteresse importante ou les Remains entretenoient
une des trois legions qui etoient destinees a la garde de
I'Egypte. Nous ne trouvons en aucun endroit qu'il v ait
eu alors dans cetle ville aucuns chretiens , ni aueuns Juifs
et nul des anciens n'a dit que saint Pierre y ait ete , ni
qu'il y ait precbe; de plus on n'y voit point d'eveques
pendant plusieurs siecles. Le premier eveque de Babylone
d'Egypte que Ton connoisse est, selon Spanheini ^ ,
Cyrus , dont le nom se trouve dans le premier acte du
concile de Chalcedoine. Selon Baronius , c'est un uomme
Zozime, que Ton remarque dans Sophronius , sous Tem-
pire de Justin le jeune , empereur au cinquieme si^cle.
Est-il croyable qu'une eglisa. fondee par saint Pierre
fut demeuree si long-temps clans robscurite? Si saint
Pierre eut voulu marquer cette ville aux Juifs a qui il
ecrivoit,.il auroit du la designer par quelque epitbete,
ou par quelque terme qui la leur lit connoitre ; car natu-
rellement lorsqu'ils entendoient le nom de Babylone, ils
devoient porter leur attention sur la grande Babylone
de Chaldee , ville plus voisine de leur pays , plus connue
dans leur histoire , et trop celebre par les disgraces de
leur nation.
Or, celie celebre ville etoit alors dans un etat tel
que I'on ne pouvoit soupconner saint Pierre d'ecrire de
la aux fideles des provinces voisines. Elle n'etoit, pour
ainsi dire, qu'un grand amas de ruincs. Pline ^ dit que le
voisinage de Seleucie I'avoit en quelque sorte epuisee
et reduite en solitude : In soliludinem rediit exhausta vi-
cinilale Seleucice ob id conditio a Nicanore. Strabon dit
qii'elle etoit presque entierement deserte; et Diodore ,
qu'il n'y en avoit qu'une trcs petite partie qui fut habitee.
De plus les Juifs avoient ete obliges de sortir de Baby-
piov £pup.v6v, dTCOaravTcov evTauSa BaSuXwvi'wv Tivc"iv, dza. S'ia7:fa.^a.iJ.ivo}'t s'v-
TauSx xaxoi/ciav, etc. — ^ Spanhem. Dissert, de temere cvedila Petri in ui-bcin
flomain pj'ofectione, art. 4. — * Plin. lib.y\. cap. xxvi.
SUR LE VOYAGE DK SAINT PIERRE A ROME. 4og
lone , sous le regne meme de Calus, peu avanl I'empire de
Claude son successeui% sous lequel cctle epitre fut ecriie.
1 Josephe ' raconte assez au long cet evenement. 11 dit que
les Babvlonicns ayant fait main, basse sur Anileus , Juif
revoke , et sur sa Iroupe , ils attaquerent les Juifs de
Babylone , qui , ne se senlant pas assez forts pour leur.
tenir tetc , se retirerent de Babylone a Seleucie , ou ils
deraeurcrent pendant cinq ans assez en repos. Mais au
bout de ce terme, la ville de Babylone ayant ete frappee
de la peste , ce qui y restoit de Juifs fut oblige de se retirer
encore a Seleucie, oii il leur arriva le plus grand de tous
les malheurs; car les Svriens et les Grecs qui peuploient
cette ville, et qui jusqu'alors avoient toujours ete en
guerre , se reconcilierent ; et le gage de leur reconcilia-
tion fut la perte entiere des Juifs qui s'etoient refugies
dans leur ville , laquelle fut resolue et executea presque
en meme temps. II perit a Seleucie plus de cinquante mille
Juifs. Ceux de cette malheureuse nation qui purent se
sauver de Babylone et de Seleucie ( car ces deux villes
leur etoient egalement ennemies ) se retirerent a Neerda
et a Nisibe, oii ils se crurent plus en surele qu'ailleurs.
Ces circonstances ne sont certaineraent pas favorables
a ceux qui tiennent que saint Pierre etoit alors dans
Babylone , et qu'il y avoit la une eglise de chretiens assez
nombreuse.
D'aillcurs on n'a pas la moindre preuve que saint Pierre
ait jamais passe I'Euphrate, ni qu'il ait fait quelque resi-
dence a Babylone; ni I'Ecriture, ni les historiens eccle-
siasliques, n'en disent un mot. Pourquoi done assurer
un fait comme celui-la, sans aucune preuve , et pourquoi
abandonner le sentiment comraun des peres et des inter-
pretes , qui entendent sous le nom de Babylone la ville
de Rome? Les Juifs converlis a qui cet apotre ecrivoit,
ne pouvant I'entendre ni de Babylone de Chaldee ni de
celle d'Egypte , ainsi qu'on I'a montre, devoient naturel-
lement recourir au sens figure , et I'expliquer de la ville
de Rome , dans laquelle ils ne trouvoient que trop de ca-
racteres de conformilc avec Tancienne Babylone, ennemie
des saints , et siege de I'idolatrie ct de la corruption des
moeurs.
Le passage dont il s'agit ici n'est point du nonibre de
' Joseph. Antiq. lib. xtiu. c. ult.
4lO DISSERTATION
ceux dont le sens a pu denieurer vag^e et inconnu pen-
dant plusieurs siecles , comnie plusieurs autres qui ont
pour objet des choses speculatives , et peu interessantes
pour le commun des lecteurs. Gelui-ci frappoit d'abord
lout homme qui le lisoit, ou qui I'entendoit lire ; el ia c.u-
riosite nalurelle portoit a demander aussitot s'il falloit le
prendre a la letlre , ou dans un sens figure ; si saint Pierre
avoit ete reellement a Babylone , ou s'il avoit ecrit cette
epitre de Rome , et designe cette ville sous une expres-
' sion allegorique : e'etoit un de ces faits dont naturelle-
ment on aime a s'instruire , et dont reclaircissement est
aise et a la porlee des plus sirnples , el qu'il est impossible
d'oublier ,• quand une fois on les a sus. Or, nous remar-
quons que les anciens nous disent naturellement que Ba-
bylone en eel endroit signifie Rome^ sans lemoigner Ja
nioindre diversite de sentimens ni le moindre doute sur
cet article. Nous-memes, en lisant I'epitre, nous enlrons
d'abord comuie naturellement dans cetle pensee. On doit
done conclure que c'est uue tradition recue de I'apotre
meme et de ses disciples , et que les modcrnes ne sont
plus en droit de revenir conlre elle , n'ayant pour eux ni
raisonsni autorite. D'ailleurs rien ne fait mieux sentir I'in-
certitude de leur hypothese que le peu de concert qui est
entre eux, nous ne dirons pas dans quelques legeres cir-
constauces , mais dans le sujet principal de la dilficulte.
On a vu la diversite de leurs sentimens; encore aujour-
d'hui ils sont desunis sur cet article. Or, la verite est une,
et le plus sensible de ses caracteres est la reunion des
sentimens a la reconnoitre et a la soutenir. Tous les
peres el les commentaleurs depuis les premiers siecles
jusqu'a ces derniers teujps , ont cru et enseigne sans con-
tradition que Babylone marquee dans la premiere epitre
de saint Pierre etoit Rome. C'est done le seul vrai sens de
cet endroit.
Reponses aux I^ Gst superflu de nous objecter quelques ecrivains ca-
objeciions iholiques , comme Marca, dont on a deja parle, Jean-
quelesm^mesgapjiste Manlouan, Michel Cezenas, Marsile de Padoue ,
auteursfor- j^^^^ Avenlin , Jean Lelandus, Charles du Moulin, et
I'opinion peut-etre quelques autres , qui ont temoigne quelque
•ommune. doute sur cela. Ce sont des doutes produits au hasard ,
et fondes uniquement sur les raisons des protestans , que
nous venons d'examiner, et qui sont telles qu'elles n'ont
pu satisfaire les plus raisonnables de leur parti nidme.
SUR LE TOYAGE DE SAINT PIERRE A ROME. i t I
On forme encore contre nous quelques autres objec-
tions ; par exeniple , que les anciens ne sont pas unifor-
nies sur I'annee ou ils placenl I'arrivee de saint Pierre a
Rome. Ce fait ne leur eloit done pas connu distincte-
ment; c'etoit , dit-on , une tradition sans fondement, un
prejuge denue'de preuves. Lactance ' dit qu'il y alia sous
Neron; Eusebe *, saint Jerome ^, Adon , et plusieurs
autres , 1 y font aller la seconde annee de Claude ; Paul
Orose * , au commencement du regne du meme prince ;
quoiqu'on sache, a n'en pas douter, qu'il etoit a Jeru-
salem la seconde ou meme la quatrieme annee de Claude
a la fete de Paques ^, et que le roi Agrippa I'y fit mettre en
prison , d'ou il fut delivre par un ange.
De plus , plusieurs anciens *" le font demeurer eveque de
Rome pendant vingt-cinq ans; el toutefois ont sait certai-
nemenl qu'il etoit a Jerusalem au concile qui se tint en
cette ville la dixieme annee de Claude", et qu'un peu
apres le concile de Jerusalem il alia a Aniioche , oii il fut
repris par saint Paul^. Saint Paul , qui a ecrit plusieurs de
ses epitres de Rome^, ne fait en aucun endroit mention
de saint Pierre; ce qu'il n'auroit pas sans doute manque
de faire, si saint Pierre y eut ete , comme on le pretend.
L'Apotre ecrivit aux Remains I'an quatrieme de Neron.
Saint Pierre devoit etre alors a Rome , suivant Ihypo-
these de ceux qui I'y font sieger pendant vingt-cinq ans.
Saint Paul fait un grand denombrement des personnes qu'il
salue , et ne nomme pas meme saint Pierre. II n'etoit done
pas alors dans cette ville. Saint Luc dans les Actes ne dit
pas un mot qui insinue que saint Pierre ait jamais ete a
Rome.
Lorsque saint Paul y arriva I'an sixieme de Neron, 60 de
Jesus-Christ, les chretiens de cette ville allerent au-devant
de lui; mais saint Pierre ne paroit ni pour le recevoir, ni
apres son arrivee , pour le consoler et pour le defendre.
Les premiers de la synagogue des Juifs elant venus le
voir,le prierent de leurdi.'-e ce que c'etoit que le christia-
nisme : « Car nous savons, disent-ils, que cette secte est
« contredite et combattue de tous cotes : yam de secta hac
' Lactam, de morte persscuiorum. — - Euseb. in Chronico. — ' Hieron.
Catalogo in Pelro.^ Paul Oros. I. vir. c. ri. — * ^ct. \v. 3. 4. et seqq.
— * Ponti/icale Damasi, Beda. Isidor. Hispal. Ado. alii. — ^ Jet. xv. i . et
seqq. — « Galat. it. 11. — ' Les epttrea aux Colo«s. aux Philipp. aux Ephe-
sicn?, la seconde a Timothee.
4l2
DISSERTATION
« nolum est nobis quia ubique ei conlradicitur^ .
croyable qu'ils dussent parler ainsi de la religion chre-
tienne , si saint Pierre eut etc a Rome des le commence-
ment de I'empereur Claude , et s'il y eut etabli son siege ?
Enfin on nous dit que saint Pierre et saint Paul s'etoient
partage I'ouvrage de I'Evangile; en sorte que saint Pierre
ne devoit precher qu aux Juifs, et saint Paul aux gentils :
Cum vidissent quod crediUim est mihi Evangelium prapulii ,
sicul et Peiro circumcisionis , .... dexLras dederant mihi el Bar-
nabce societatis , ut nos in gentes , ipsi auleni in circumcisio-
nemP-. Saint Pierre n'a done pas du precher a Rome, qui
etoit une ville toute paienne; c'eloil un champ destine a
saint Paul. Ajoutez que Tempereur Claude avoit chasse les
Juif's de Rome la neuvieme annee de son regne , 49 de Je-
sus-Christ, ou quelques annees plus tard. Ainsi saint Pierre
n'a pu y dcmeurer apres ce temps; cela ne lui etoit plus'
pei'mis, et sa presence y etoit inutile, puisque les Chre-
tiens circoncis^qu'on ne distinguoit pasalors des Juifs, en
furent chasses comme eux.
Voila les objections qui me paroissent les plus fortes
contrele sentiment que nous avons soutenu jusqu'ici ; car
pour les autres dilficultes que Ton forme contre nous, elles
ne meritent pas la peine d'etre relevees. On peut done re-
pondre en general a celles qui regardent la chronologic ,
et les divers sentimens de nos auteurs et de nos historiens
sur I'annee de la -venue de saint Pierre a Rome, i"que I'E-
glise n'adopte aucune de ces epoques, ni aucun dc ces
sentimens en particulier, el quelle s'interessc uniquement
a soutenir la verite du fait du voyage de saint Pierre a
Rome. Qu'il y soit venu deux ou plusieurs fois, qu'il y soit
arrive la premiere, la seconde, la troisiemeoulaquatrieme
annee de Claude, ce sont des details qu'elle abandonne
aux recherches des chronologistes.
2^ II n'y a aucune opposition entre ceux qui font alier
saint Pierre a Rome la seconde annee de Claude , et ceux
qui disent qu'il y alia au commencement du regne dc ce
prince. La seconde annee n'est-elle pas le commencement
d'un regne qui a dure treize ans huit mois et vingt jours ?
11 pouvoit etre a Jerusalem a Paques de la seconde annee
de Claude, et arriver a Rome sur la fin de I'ele dc la meme
annee. II n'y a la aucune contradiction.
' Acl. xxvm. 22.— ' Galat, ii. 7. 9. Vide Salmas. de Pviinaiu Petri.
SUR LE VOYAGE DE SAINT PIERRE A ROME. 4l3
3" Quand on dit que saint Pierre a siege a Rome pendant
vingt-cinq ans, c'est deja une chose que I'on nc pretend
pas soutenir avec opiniatrete , et qui n'est point avouee do
tout le monde. Mais quand on voudroit la soutenir, ce n'est
pas qu'on pretende que pendant ces vingt-cinq ans il ait
toujours ete residant a Rome ; il a pu en sorlir souvent, et
enlreprendre durant cet intervalle divers voyages et en
Orient et en Occident, suivant les besoins de I'Eglise et
I'inspiration du Saint-Esprit. Ainsi rien n'empeche qu'il
li'ait ete a Jerusalem en la quatrieme annee de Claude, et
que sept ans apres il n'y ait preside le concile qui s'y tint
sur la necessite des ceremonies legales, sans touletois quit-
ter son siege de Rome ; non plus que les eveques ne sont
point censes quitter leurs sieges lorsque pour le besoinde
I'Eglise ils sont obliges de s'absenter pour assister a des
conciles. Or, depuis la seconde annee de Claude jusqu'a
la treizieme de Neron , qui est celle de la mort de saint
Pierre, il y a environ vingt-cinq ans.
4" Peut-etre aussi ne laut-il point lant insister sur ces
vingt-cinq annees : le P. Mabillon rapporte^ un catalogue
tres ancien des pontifes romains depuis saint Pierre jus-
qu'au pape Yigile , ou on lit : Petrus seditannos xx menses u
dies III. Selon ce calcul , saint Pierre ne scroit venu fixer
son siege a Rome que dans I'annee 47 de I'ere chret. vulg. ,
septieme du regne de Claude.
Quoi qu'il en soit, les diversites de sentimens qui se re-
marquent dans les anciens et dans les modernes au sujet
de I'annee de Tarrivee de saint Pierre a Rome , ne prouvent
rien pour nos adversaires. 11 y a dans cette dispute deux
choses a disiinguer, dont I'une est capilale, et I'autre ac-
cessoire. La premiere est que saint Pierre a veritablement
fait le voyage de Rome ; la seconde, qu'il la fait a telle ou
telle epoque , qu'il y est demeure plus ou moins d' annees ,
qu'il est passe par telle ou telle ville. Les anciens convien-
nent unanimement du premier fait; mais ils peuvent etre
partages sur le second, sans que I'arlicle essentiel en souffre
aucune atteinte. Doutera-t-on de la mort de Jesus-Christ ,
parce que les anciens ont varie sur I'annee en laquelle elle
est arrivee? Les varietes des circonstances qui supposent
le fait sont pluspropres a I'affermir qu'a le detruire.
De plus saint Pierre ayant ete une fois a Rome depuis le
^ Mabill. Analect. i-eter. Paris. i~ii,p. 21S.
4l4 DISSERTATION
regne de Caligula jusqu'a la fin du r^gne de Neron , sous
lequel il mourut, il y a moyen de concilier les sentimens
divers. II apu y aller au commencement de Claude, c'est-
a-dire en la seconde annee de son regne , suivant Eusebe ,
saint Jerome, et Orose ; etencoreladouziemeoulatreizieme
annee de JNeron , peu de temps avant qu'il y souffril le mar-
tyre. En effet plusieurs.anciens nous apprennent qu'il y
alia pour combaltre Simon le magicien, et qu'ayant ete
mis en prison avec saint Paul , ils furent enfm tous deux
couronnes du martyre Van 67 de Jesus-Christ, treizieme
du regne de Neron.
Que saint Paul , ecrivant aux Remains , n'ait fait aucune
mention de saint Pierre, non plus que dans Ics Icttres qu'il
ecrivit depuis etant a Rome , cela n'est nullement surpre-
nant , puisqu'il est ires possible que saint Pierre n'y fut pas
actuellement lorsqu'ii ecrivoit, ou qu'il fut dans un autre
quartier de cette grande ville , ou que ceux a qui I'Apotre
ecrivoit n'eussent aucune liaison particuliere avec saint
Pierre.
Quant a ce que les Juifs de Rome qui vinrent voir saint
Paul dans son logis ou dans sa prison , lui dirent qu'ils
souhaitoient entendre son sentiment sur la secte des Chre-
tiens, et qu'ils savoient seulementqu'elle eloit contredite
en tout lieu, cela ne fait aucune difficulte. Ce sont des
Juifs non convert is qui parlent ; ilsne connoissent propre-
ment le christianisme que de nom; ils etoient remplis des
fausses idecs que les Juifs de Judee leur en avoient don-
nees par leurs lettres etpar leurs calomnies. Comme saint
Paul arrivoit de ce pays-la , et qu'on le connoissoit pour un
homme fort eclaire , ils etoient bien aises de I'cntendre, et
de savoir ce que c'etoit que les Chretiens , que toutes les
synagogues avoient on horreur. 11 y avoit a Rome beau-
coup de fideles convertis tant du judaisme que du paga-
nisme, comme il paroit par I'epilre que saint Paul leur
ecrivit peu auparavant : mais ces fideles ne s'assembloient
pas dans la synagogue des Juifs ; et il est tres probable que
la lettre (jue saint Paul leur avoit ecrite ne fut pas connue
des Juifs non convertis, et que ceux-ci n'etoient nulle-
ment informes des dispositions de saint Paul, ni du pro-
gres qu'il avoit fait dans le christianisme, ni des causes qui
I'amenoient a Rome , comme ils le declarent eux-memes :
Nos, neque lilteras accepimus de le a Judcca : neque adve.
SIR l.E VO\A(_,K DE SAINT PIERBE A ROME. 4l5
nietis aliqais /ralram nuntiavit , aut locutus est quid de U ma-
lam^.
Quand on partage la predication de I'Evangile entre
saint Pierre et saint Paul , en sorte que saint Pierre n^
devoit precher qu'aux Juifs, et saint Paul aux gentils, on
ignore les vrais senlimens et la pratique des deux apotres.
lis prechoicnt I'uu et I'autre aux Juis et aux genlils; et on
saitque I'un et I'autre en ont converli et baptise un grand
nombre. Saint Pierre ne baptisa-t-il pas Corneille et toule
sa maison^, et ne declara-t-il pas dans le concile de Je-
rusalem qu'il Y avoit long-temps que Dieu Tavoit choisi
pourannoncer aux gcntils la parole de I'Evangile, et pour
les amener a la foi ^ ? Et saint Paul , dans lous ses voyages ,
ne commencoit-il pas toujours par precher aux Juifs, lors-
qu'il en trouvoit? et apres cola il venoit aux gcntils, s'il
rencontroit parnii eux de I'ouverture a I'Evangile *. Saint
Pierre s'attachoit principalement aux Juifs, mais sans ne-
gligerles gentils; saint Paul au contraire donnoit ses prin-
cipaux soins a la conversion des gentils, mais sans aban-
donner les Juifs.
Mais suppose meme que saint Pierre se bornat aux seuls
Hebreux , il trouvoit dans Rome de quoi exercer son zele ,
puisqu'.il y avoit un tres grand nombre de Juifs. Apres la
raort du grand Herode , douze mille Juifs se joignirent
aux cinquanle deputes qu'on avoit envoyes de Jerusalem
pour demander que la Judee fut delivree de la domina-
tion des rois ^. Philon ^ temoigue que sous Caligula la plus
grande partie de la villa au-dela du Tibre etoit occupee
par les Juifs. Sous le rcgne de Claude, ils y ctoient en si
grand nombre, que ce prince n'osant les en chasser, de
peur de quelque tumulle, leur defendit simplement de
s'assembler '. Enfin il les chassa , a ce qu'on croit , la
neuvieme annee de son empire , a I'occasion des troubles
continuels qu'ils causoient dans la ville a cause du chris-
tianisme *.
Saint Pierre en sortit alors apparemmcnt avec les au-
tres : mais cela n'empeche pas qu il ny soit revcnu sous
* AcL xmii. 2 1. — ' Act. X. 47. 43. — ^Act. iv. 6. 7. 8. p. — * Act. xiii.
46. Vobis oportebat primitm loqui verbum Dei : sed quoniam repellitis
Ulud, et indignos vos judicads cetemie vita; , ecce converiimur ad gen-
tes, etc. — ' Joseph. Anliq. I. xvii. cap. 11. p. 6io. — * Philo. Legat. ad
Caum. — ' Dio, I. ix. Hist. — * Sueton. in Claudio. Judaos impulsort
Christo assidue tumtiltitantes Roma expub't.
4 1 6 DISSERTATION
I'empire de Neron. Ce prince ne fut pas contraire aux
Juifs , mais seulement aux chretiens. Lorsque saint Paul
arriva a Rome , la sixieme annee de Neron , il y trouva
un grand nombre de Juifs et de chretiens ^. Saint Pierre
et saint Paul y vinrent certainement pour la derniere
fois sur la fin du regne de cet empereur , et y furent cou-
ronnes du martyre , comme nous I'apprennent tous les
anciens.
Nons ne parlons pointdu silence de saint Luc dans les
Actes, dont on veut tirer une preuve contre le voyage
de saint Pierre a Rome ; comme si le saint evangeliste
s'etoit engage a nous faire I'histoire de saint Pierre, qu'il
paroit avoir entierement perdu de vue , pour ne s'alta-
cher qua saint Paul , depuis le seizierae chapitre des
Actes.
Spanheim ^ entre dans un long detail pour faire ob-
server que Ton a debite beaucoup de fables sur le voyage
de saint Pierre a Rome; que Ton montre dans cette ville ,
et dans diverses autres villes d'ltalie, grand nombre de
monumens , d'eglises , de lieux consacres par sa presence ;
qu'on honore plusieurs eveques de villes fameuses , que
Ton croit avoir ete compagnons de son voyage. 11 ras-
semble plusieurs circonstances de temps et de lieu , dou-
teuses ou fabuleuses , pour tacher de rendre suspecte ou
raeme de faire tomber entierement la croyance de ce
voyage. Mais on ne doute pas qu'il n'ait eu aussi assez
d'equite pour remarquer que nos savans n'adoptent ni ces
fables , ni ces circonstances douteuses , ni tout ce que la
tradition populaire enseigne sur ces sories de choses. On
n'auroit eu garde d'inventer ces particularites si peu di-
gnes de respect et de consideration, si le fait du voyage
n'eut passe pour indubitable. Si les mauvaises traditions
et les faussetes ajoutecs aux actions celebres de Jesus-
Christ et des apotres etoient des raisons suffisantes pour
nous faire abandonner les histoires authentiques , ou en
serions-nous aujourd'hui, au milieu de tant de fables
dont les siccles d'ignorance ont enveloppe les verites les
plus certaines et les faits les plus incontestables? Le ve-
ritable usage de la critique est , non pas de rejeter tout,
mais. de choisir , et de distingaer le vrai du faux , le certain
^ Act. xt.y ill. 17. i8. etc. — ^Spanheni.^ Dissert. de temere credita Petri
in urbem Romam pi'ofeclione, art. i. eti.
SLK LE VOYAGE DE SAIXT PIERRE A ROME. 4 I ■»
du douteux, les fails historiques indubitables , des cir-
tonstances peu sures dont on a -voulu les embellir ou les .
obscurcir. •
Pour nous rendre suspecte la venue de saint Pierre a
Home , et rinlerpretation que nous donnons au passage
qui fait le principal sujet de cette Dissertation , on taclie
d'afToiblir I'jutorite des premiers auteurs qui nous I'ont
fait connoitre. On fait voir que Papias etoit un petit
genie , un homme simple et credule ; on rapporte quel-
ques-unes de ses traditions, dont on releve I'incertitude.
On fait ce qu'on peut pour nous faire douter que le pas-
sage de saint Ignace le martyr, ev^que d'Anlioche, soit
vrai, et que I'epitre qu'il ecrivit de Smvrne aux Ilomains
soit de lui. On parle de saint Irenee et de saint Clement
d'Alexandrie , do Tertullien et d'Origcne , comme de
gens trop credules, peu exacts, qui sont tombes dans
differentes erreurs tant en matiere de fait qu'en matiere
de doctrine. On rassemble avec soin les fautes qu'ils ont
faites , et on en conclut qu'ils ont bien pu raanquer
d'exactilude , de critique , de lumiercs dans cet endroit
et sur cet article, comme dans tant d'autres qu'on leur
reproclie.
Mais, de bonne foi, quelle est cette metliode de re-
pondre a I'autorile des peres? Si les peres des trois
premiers siecles sont gens sans credit , sans autorite ,
gens credules , simples , et qui donnent dans des erreurs
manifestes, de qui apprendrons-nous notre religion? Les
prolestans qui voudroieut ne reconnoitre pour mailres
<pie les peres des trois premiers siecles , comment s'as-
surent-ils de leur lemoignage en matiere de dogme et de
doctrine , si ces peres sont si peu circonspects en matiere
de fait et d'histoire? Plusieurs dogmes de notre religion
ont tant de connexion avec les fails, qu'on ne peut les
en separer. Si les Ignace , les Clement d'Alexandrie, les
Origene et les Tertullien ne suffisent pas pour appuyer
un fait , s'ils ne sont pas de bons temoins , nous deman-
dons ou il faudra en aller chercher de meilleurs, de
plus graves , de plus eclaires , de plus saints , de meii-
leure foi.
Mais il est sur , dit-on , qu'ils sc sont trompes en bien
des choses. Us etoient hommes , nous I'avouons ; mais
qu'on me justifie , par des preuves reelles et de fait, qu'ils
se sont veritablement trompes ici , et qu'on ne se conlente
20. 37
•4 I 8 DISSERTATION, etc.
pas de ce mauvais raisonnement : lis ont pu se tromper
ici comiiie ailleurs , done ils se sont trompes. Qu'on nous
inontre et qu'on nous prouve Icur erreur ou leur inadver-
lance, etiious en conviendrons ; mais sans cela leur au-
torile est pour nous d'un Ires grand poids , surtout lors-
qu'il s'agit d'un fait public, connu, celebre, interessant,
simple el d'une tres grandc consequence poui la religion,
et pour la discipline de I'Eglise, pour savoir ou residera
la principale autorite, et quel siege sera considcre comme
le centre de I'unite ; enfin un fait dont ils conviennent
tous unanimement, quoiqu'ils varient peut-etre dans quel-
ques circonstanccs peu importantes, et qui ne changent
rien au fond.
Conclusion. j)g ^q^j- ^g q^g Pq,^ ^ j|t jusqu'ici , on peut conclure
que le voyage de saint Pierre a Home est un fait certain
el indubitable , fonde sur le temoignage de toute I'anti-
quite , et sur cclui de plusieurs savans critiques, meme
du nombre des prolestans; que le passage de la premiere
epitre de saint Pierre , qui porte qu'il I'ecrivit de Baby-
lone , ne doit s'entendre ni de Babylone de Cbaldee ,
ni de Babylone d'Egypte, ni de Jerusalem, mais de la
ville de Rome, ainsi que I'ont pris les anciens; et que
tout ce que Ton oppose a ce sentiment si ancien , si
general , si bien appuye , merite a peine que Ton y re-
ponde, puisqu'on ne lui objecte que des argumens ne-
gatifs , ou des varietes de circonstanccs, qui ne tou-
chant point le fait essentiel , le laissent toujours subsister
en entier.
PREMIERE EPITRE
DE SAINT PIERRE.
CH.VPITRE PREMIER.
SainlPierre rend graces a Dieudc ia rocalion des HJeles. Affliclions,pprcuvcs
de la foi. Salut aiinoncepar les prophetes, el objetdeleur alien Jion. Saiu-
lete de conduile. Estime du prix de nos ames. Charite pure et sincere. Re-
generation par la parole de lEvangile.
1. PETRI'S iipostolus
Jesu Clirisli, electis ad-
venis dispersionis Ponli,
Galatise , Cappadociae ,
Asiae, et Bithyniae,
2. Secundum prae-
scientiam Dei Patris, ia
sanclificationera Spiritus,
in obedientiaui, et asper-
sionem sanguinis Jesu
Chrisli : gratia vobis et
pax njultiplicetur.
5. Benediclus Deus et
Pater Domini nostri Je>u
Cluisti, qui secundum
misericordiam <uam ma-
gnam regeneravit nos in
spem vivam , per resur-
rectionem Jes^ Cbristi ex
mortuis,
1. Pierre, apotre de Jesus-
Christ , aux fideles qui sont etran-
gers et disperses dans les provinces
du Pont, de la Galatie , de la Cap-
padoce, de I'Asie, ' et de la Bilhy-
nie,
2. Qui sent elus, selon la pres-
cience de Dieu le Pere , pour rece-
voir lasantiOcation du Saint-Esprit,
pour obeir a la foi^ et etre arroses
du sang de Jesus-Cbrist :' que Dieu
Tous comble de plus en plus de sa
grace et de sa pais.
5. Beni soit le Dieu et le Pere'
de noire Seigneur Jesus-Christ, a. Cor. i. 3.
qui, selon la grandeur de sa mi- Ephes. i. i.
sericorde, nous a regeneres par
la resurrection de Jesus-Christ
d'entre les morts, pour nous don-
ner I'esperance de la vie, '
y I . L'Asie se prcnd ou pour Tune des quatre parlies du mor:dc , ou pour
I'Asie mincure , ou pour celle proyiiice de I'Asie ir.ineure donl Epliese eloit
lacapilale; il paroit quVII.- esl prise ici en ce dernier sens, puist|ue lePont,
la Galatie, la Cappadoce et la Bilhynie sent aussi comprises dans les pro-
Tjnces de I'Asie niineure.
y 2. Autr. pour obeir i Jcsus-Chrisl et itre arroses de son sang.
y 3. Autr. Beni soil Dieu Pere de noire Seigneur Jcsus-Clirisi.
Jbi'd. De la vie bienheureuse, commc il I'ezplique au y suivant.
42()
I" EpItRE DE saint PIERHE.
4- De cet heritage, oCi rien ne
pent ni se detruire , ni sc cor-
rompre , ni se fletrir, qui vous est
reserve dans les cieux, a vous
5. Que la vertu de Dieu garde par
la I'oi, pour vous faire jouir du salut
qui doit etre montre a decouvert a
la fin des lenips.
6. C'est ce qui doit vous trans-
porter de joie, iors uieme que pen-
dant cettc vie, qui est si courte ,
vous seriez affliges de plusieurs
maux/
7. Afin que votre foi ainsi eprou-
vee , etant beaucoup plus precieuse
que Tor , qui est eprouve par le feu,'
se trouve digue de louange, d'hon-
neur et de gloire , a I'avenement
glorieux ' de Jesus-Christ,
8. Que vous aimez, quoique
vous ne I'ayiez jamais vu, et en qui
vous croyez, quoique vous ne le
voyiez point encore maintenant;
ce qui vous fait tressaillir d'une
joie ineffable et pleine de gloire ,'
9. Et remporter le salut de vos
ames, pour recompense' de votre
foi :
10. Ce salut, dans la connais-
sance duquel les prophetes, qui
onl predit la grace que vous deviez
recevoir, ont desire de penetrer,
I'ayant recherche avec grand soin;
1 1. Etayant examine, dans cette
recherche, en quel temps et en
quelle conjoncture I'Esprit de Je-
4. In hereditatem in-
corruptibilem , et incon-
taminatam, et immarces-
cibilem, conservatam in
ccelis in vobis,
5. Qui in virtute Dei
custodimini per fidem in
salutem paratara reve-
lari in tempore novissi-
mo.
6. In quo exultabitis ,
modicum nunc si oportet
contristari in variis ten-
tationibus :
7. Ut probatio vestrie
fidei mullo pretiosior au-
ro (quod per ignem pro-
batur), inveniatur in lau-
dem , et gloriam,' et
honorcm, in revelalione
Jesu Christi :
8. Quem cum non vi-
deritis , diligilis : in quem
nuncquoque nonvidentes
creditis : credentes autem
exultabitis laetitia inenar-
rabili et glorificata :
g. Ueportantes finem
fidei vestrae, salutem ani-
marum.
10. De qua salute ex-
quisierunt , atque scrutati
sunt prophetse , qui de
futura in vobis gratia
prophetaverunt :
1 1. Scrutantes in quod
vel quale tempus signi-
ficaret in eis Spiritus
y^ 6. A la leltre selon le grcc : Jors rafime que , s'il le faut , pendant ceUc
vie qui est si courte . vous eles affliges de plusieurs maux.
•^ 7. Gr. qui , bicn que corruplible , est neanmoins eprouve par le feu.
Ibid. Litt. a la manil'estalioii de Jesus-Christ.
y^ 8 . Gr. et en qui , iriaintenant encore ne le voyant point , mais croyant en
lui , vous tressaiilez d'une joie , etc. , et vous remportez, etc.
•^•c). Litteral. comme fin de votre foi. f^oy. saint Jacques, v. 11.
\
\
Chrisli : praenmitians eas
quae in Chrislo sunt pas-
siones , et posteriores
glorias :
la. Quibus revelalura
est, quia non sibimetipsis,
Tobis autem miiiistrabant
ea qua3 duiic nuntiata
sunt vobis per eos qui
evangeliraverunt vobis ,
Spiritu Sanclo misso de
coelo, in quern dcsiderant
aogeli prospicerc.
i5. Propter quod suc-
cincli lumbos mentis ves-
trae, sobrii perfecte spe-
rate in earn , quae olTertur
Yobis , gratiani, in reve-
lationem Jesu Christi :
14. Quasi fdii obedien-
tiae, non configurali prio-
ribus ignorantiae vestrae
desLderiis :
i5. Sedsecunduineuui,
quivocavit vos. Sanctum :
et ipsi in omni conserva-
tione sancti silis :
16. Quoniam scriptum
est : Sancti erilis, quo-
niam ego sanctus sum.
1 7. Et si Patrem invo-
catis eum qui sine accep-
tione personarum judical
secundum uniuscujusque
opus, in timore incolatus
vestri tempore conversa-
mini :
CHAPITRE I. 421
sus-Christ, qui les instruisoit de
I'avenir, leurmarquoitquedevoient
arriver les souffrances de Jesus-
Christ, et la gloire qui devuit les
suivre ,
I a. II leur fut revele quo ce n'e-
toit pas pour eui-mSmcs, mais
pour vous, qu'ils etoient ministres
etdispensateursdeschoses queceux
qui vous ont pr^che I'Evangile , par
le Saint-Esprit envoye du ciel, vous
unt maintenant annoncees , et dans
le secret desquelles ' les anges
memes desirent de penetrer.
10. C'est pourquoi oeignant les
reins de voire ame,' et vivant dans
la temperance, attendez avec une
esperancc parfaite la grace qui vous
sera donnee a I'avenement' de
Jesus-Christ :
14. Evitant comme des enfans
d'obeissance. de devenir semblables
ii ce que vous eliez autrefois, lorsque,
dans votre ignorance, vous vous
abandonniez a vos passions;
ID. Mais soyez saints dans toute
laconduitede votre vie, comme ce-
lui qui vous a appeles est saint ,
16. Selon qu'il est ecrit : Soyez' Lev.xi. 44.
saints, parce que je suis saint. ^'^- ^' ^■^- :
17. El puisque vous in voquez Z>eHf. x. 17.
comme votre Pere celui qui , sans Rom. u. ii.
avoir egard a la difference des per- ^^- ^'- ^•
sonnes, juge chacun selon ses ceu-
vres, ayez soin de vivre dans la
crainte durant le temps que vous
demeurez comme etrangers sur la
terre.
■jf^ 1 2 . C'est le sens du grec , in quee.
y- I J. C'est-a-dire avanlunegrande vigilance. Noasavonsrencontre cetleex-
pression deja un grand nombre de fois. ElJe a rapport a I'nsagedesOrientaux,
qui se disposent a I'ouvragc en Tetroussant leurs veJcmens au moyen dc leur
ceinlure, a(in d'avoir lesmouTcmens pluslibrcs.
Jbid. Lilt, dans la manifestation.
y I f> . I^ erec s'evprimp ainsi .
-122
l" KPITRE DE SAIiM PIERRE.
I. Cor. VI. 20.
VII. 23.
Ilebr. IX. r4-
r . Joan .1.7.
udpoc.i. 5.
18. Sachant que ce n'est poinl
par deschoses corruptibles, coQiine
de Tor ou de I'argent, quevousavez
etc rachetes de la vaine superstition
oi"i vous avoit fait vivre la tradition
de vos pores ;
19. Mais par le precicux sang de
Jesus-Christ, coinme de I'agneau
sans tache et sans deiaut ,
20. Qui avoit ete predestine avant
la creation du monde, mais qui a
ete manifesto dans les derniers
leinps pour I'amour de vous.
21. Qui par iui croyez en Dieu ,
lequel I'a ressuscite d'entre les
morts, et I'a comble de gloire, afin
que vous missiez votie foi et votre
esperance en Dieu/
23. Rendez vos ames pures' par
une obeissance d'amour , et que
Taffection sincere que vous aurez
pour vos freres vous donne une
attention continuelle a vous temoi-
gner les uns aux autres une ten-
dresse qui naissedu fond du coeur.'
23. Ayant etc engendres de nou-
veau, non d'une semence corrup-
tible, mais incorruptible, par la
parole de Dieu qui vit et subsiste
eternellemcnt.'
Jsai. XL. 6. 24. Car toute chair est comme
Eccli.-i.\\.ii. I'herbe, et toute la gloire de Thomme
Jac. I. ro. ^.g^ comme la fleur de Therbe :
i'herbe seche , et la fleur tombe ;
18. Scientes quod non
corruptibilibus auro vel
argento redempti estis de
vana vestra conversatione
paternae Iradilionis :
19. Sed pretioso san-i
guine quasi agni imma-
culati Christi , et incon-
taminali :
20. Praecogniti quidem
ante mundi constitutio-
nem, manifestati autem
novissimis temporibus
propter vos,
21. Qui per ipsum fide-
les estis in Deo qui sus-
citavit eum a mortuis, et
dedit ei gloriam, ut fides
vestra et spes esset in
Deo :
22. Animas vestras cas-
tificantes in obedientia
charitatis, in fraternitatis
amore, simplici ex cordc
invicem diligiteattcntius :
23. Renati non ex se-
mine corruptibili, sed in-
corruptibili, per verbum
Dei vivi, et permanentis
in ajternum ,
24. Quia omfiis care ut
fenum , et omnis gloria
ejus tamquam flos feni :
cxaruit fenum , et flos
ejus decidit :
y 2 1 . Que vous atlendissiez de Iui la m^me grace.
•^ 22. Pour vous mettre en elat de recevoir celte gloire.
Ibid. Gr. Puis done que vousavezpurifievosamesenobeissant Alaverilepar
le Sa//if-Espril , aimez-vous ardeinment les uns les autres avec un coeur pur,
lonservant enlre vous une amitie fraternelle , exemple d'hypocrisie.
■j^ 2 3. El alnsi cette nouveile naissance , qui vous est commune a lous , doil
former enlre vous une union bicii plus stable et plus solideque cellc qu y tor-
rneroient la chair et le sang.
CHAPITRK I. isS
25. Verbuni autem Do- 25. Mais la parulu du Seigneur
mini manet in aeternum : demeure eternellement ; est c'est
hoc est autem Terbiim cette parole qui vous a ete annoncee
quod cvangelizatum est in par I'Evangile.
vos.
CHAJPITRE 11.
Croitreen Jesus-Christ. S'approcher de luicomme de la pierre angulairc. II
est una source d'honneur pour ceux qui croient, el une pierre d'acLoppe-
ment pour les incredules. Caracteres des Chretiens. S*abslenir Jes passioDs
cbarnolles. Etre soumis aux puissances. Gioire du Chretien , souffrir
comiue Jesus-Christ.
1. Deposertes igitur
omneni malitiam, et om-
neni dolum et simula-
tiones, et invidias et ora-
nes detractiones :
2. Sicut modo geniti
infantes, rationabile, sine
doio, lac concupiscite, ut
m eo crescatis in salutcm :
3. Si tamen gustastis
quoniam dulcis est Do-
minus.
4. Ad quern accedentes
lapidein vivuni, ah ho-
minibus quidem reproba-
tum, a Deo auloui elec-
tuin et honorificalum :
5. El ipsi tamquam la-
pides vivi superaediGca-
mini , domu:: spiritualis,
1. Yocs etant done depouilles de Rom. vi. &,.
toute sortede malice, de tromperie, Eph.iy. aa.
de dissimulation, d'envie et de me- Co/, iw. 8.
disance, Heli: su.
2. Comme des enfans aourclle-
ment nes, desirez ardemment le
lait spirituel et pur, ' afin qu'il tous
fasse croilre pour le salut ; '
3. Si toutefois' vous avez goOte
combien le Seigneur est doux.
4. Et TOUS approcfaant de liii
comme de la pierre vivante que les
hommes a la verite ont rejetee,
mais que Dieu a choisie et mise en
honneur,
5. Entrez vous-memes aussi dans
la structure de cet edifice, comme
elant des pierres Yivantes , pour
y 1. La parole de Dieu, et la tres sainte Eucharistie , qui ix>nlient Je
corps, le .<ing, et Taoie et la divinite de Jesus-Christ. — l-'est le sens du grec ,
oil Ton voit que le sine dolo se rapporte a lac.
Ibid. Ces deux mots in salw.em ne sent pas dans \e grec imprime, mais
ils soDt dans uu grand nombre de manuscrils.
T 3. Gr. autr. puisquc vous avez goiile, etc.
424
l" El'lTRE DE SAINT PIERRE.
Isai. xxviii.
tfi.
Rom. IX. 33
Psal. cxvii.
•2 2.
Isai. VIII. 24-
Matt, xxt.42.
^ct. IV. I r.
composer une maison spiritiielle et
un oidre de saints preties, afin d'ol-
tVlr a Dieu ties sacrifices spirituels
qui liii soient agreables par Jesus-
Christ. '
6. C'cst pourquoi il est (lit dans
I'Ecriture : Je vais meltre en Sion
la principale pierre de Tangle , la
pierrc choisic et precieiise; et qui-
conque aura t'oi en celte' pierre ne
sera point confondu. "
7. Ainsi cette pierre est une
source d'honneur pour vous qui
croyez; mais pour les incredules ,
la pierre que les architectes out re-
jetec,etqui neanmoins est deve-
nue la tete de Tangle ,
8. Leur est une pierre contre la-
quelle ils se heurtent, et une pierre
((ui les fait tomber, eux qui se
heurtent contre la parole,' par une
incredulite a laquelle ils ont ete
abandonnes.'
9. Mais quant a vous, vous etes
la race choisie, Tordre des pretres
rois, la nation sainte, le peuple
conquis, afin que vous publiiez les
grandeurs de celui qui vous a ap-
peles des tenebres k son admirable
lumiere ;
10. Vous qui vrtutrefrtis n'etiez
fiom. IX. 25. point son peuple, mais qui inainte-
nant etes le peuple de Dieu ; vous
qui autrefois n'aviezpoint obtenu"
Osee, II. 24-
sacerdotium sanctum, of-
ferre spirituales hostias ,
acceplabiles Deo per Je-
sum Christum.
6. Propter quod conti-
net Scriptura : Eccc pono
in Sion lapideni summuin
angularem, electum, pre-
liosum : et qui crediderit
in euin, non confundctur.
7. Vobis igitur honor
credentibus : non creden-
tibus autem, lapis quern
reprobaverunt asdifican-
tes, hie factus est in caput
anguii ,
8. Et lapi's offensionis,
et petra scandali his qui
offendunt verbo, nee cre-
dunt, inquoetpositisunt.
g. Vos autem genus
electum , regale sacerdo-
tium, gens sancta, popu-
lus acquisitionis : ut vir-
tutes annuntietis ejus qui
de tenebris vos vocavit in
admirabile lumen suum.
10. Qui aliquando non
populus, nunc autein po-
pulus Dei : qui non con-
secuti misericordiam ,
^ 5. Notre Seigneur J<5sus Christ est la principale pierre de cet edifice,
I'objet de notre foi, et le fondement de notre esperance.
f 6 . Croira en celui qui est figure par celte pierre, et y mettra sa confiance.
Ibid. C'est lesens des Septante: et cette Iccon peut etre fondce sur I'hebreu
meme.
■j^ 8. Contre TEvangile, en le rejeiarit.
■jf 7. et 8. Autr. mais pour les incredules , c'est la pierre que les archi-
tectes ont rejetee , ef ^wt neanmoins est devenue la tele de Tangle; c'est
une pierre d'achoppement et une pierre de scandale pour ceux qui se
heurtent , etc.
y 10. Autr. vous qui autrefois n'aviez point recu misericorde , mais qui
maintenant avez rec^^i misericorde.
CHAPITRE II.
i2a
niisericortle, uiai^ qui maiiUeaaat
avez obtenu' inisericorde.
II. Je voui? exhorte , mes bien- ^om.xm. U-
aimes , a vous abslenir, cotrime ^'''•'''' ^^"
etrangers et voyageurs,' des desirs
charnels qui combattent cootrc
nunc aulem misencor-
diam consecuti.
II. Charissimi, obse-
cro vos tanujuiiin advenas
et peregiinos abstinere
vos a carnalibus de^ide-
riis, qua' militant adver- Tame
aiis aniinam :
13. Converi^ationem la. Con duisez-vous parini les
veslrain inter gentes ba- gentilsd'une manierepureetsainte,
bentes bonam , ut in oo afin qu'au lieu qu'ils inedisent de
quod detractant de vobis vous, comme si vous etiez des me-
tauiquaiu de malefactori- chans, les bonnes oeuvresqu'il vous
verront faire les portent a rendie
gloire a Dieu, au jour ou il daignera
les visiter.'
i3. Soyez done soiinais, pour ^^*^'^'"
I'amour de Dieu , a tout hoinme,'
soil au roi comme au souverain ,
bus ex bonis operibus vos
considerantes, gloriGcent
Deum in die visitationis.
i3. Subjecti igilur es-
tote omni humanaj crea-
tura) propter Deuiu: sivc
regi , quasi praecellenti :
i4- Sive ducibus, tam-
quain ab eo missis ad
viadictam malefactorum,
laudem vero bonorum :
i4- Soit aux gouverneurs comme
a ceux qui sont envoyes de sa part,
pour punir ceux qui font mal, et
pour trailer favorablement ceux
qui font bien.
i5. Car la volonte de Dieu est
que, par votre bonne vie, vous
fermiez la boucbe aux hommes
1 5. Quia sic estvolnn-
i.is Dei ut bene facientes
obmutescere faciatis im-
prudentium hominum i- ignorans etinsenses ;
gnoraotiam :
16. Quasi liberi, et
non quasi velamen ba-
bentes malitiie liberta-
lem, sed sicut servi Dei.
17. Omnes honorate :
fraternitatem diligite :
Deum timete : regem bo-
noriflcate.
18. Servi, subditiestote
16. Etant libres , non pour vous
servir de votre liberte comme d'un
voile qui couvre vos mauvaises ac-
tions, mais pour agir en serviteurs
de Dieu.'
17. Rendez honneur a tous ; ai-
mez vos freres; craignez Dieu; ho- Rom. xii. 10.
norez le roi.
iS.Serviteurs, soyez soumis a vos Ephes. m. 5.
y II. Tels que vous &\es ea ce monde.
-^ 12. Leur accord er sa grace. — Litl. au jourde la visitc.
-. I 3. Qui a autorile surrous.
y It). C'esl a Dieu m^oie que nous obeissons quaad nyus rendons au\
ommcs cc que !a justire el la cbarite nou= prescrivent.
Col. 111. aa.
JlC. II, 9.
^26 1" EPITRE DE SAINT PIERRE
maitres avec toule sorte de res-
Jsai. LUi. g.
t. Joan. III. 5.
Jsai. Lin. 5.
pect,' non-seuleinent u ceux qui
sont boris et doux,' mais aussi a
ceux qui sont rudes et lucheux;
19. Car ce qui est agreable a
Dieu est que, dans la vue de lui
plaire, nous enduiions les peines
qu'on nous fait soufFrir avec injus-
tice.
20. Aussi quel eujet de gloire
aurez-vous, si c'est pour vos
fautes que vous endurez les mau-
vais traitemens?' Mais si, en fai-
fiant du bien, vous souffrez avec
patience, c'est la cequi estagreable
a Dieu,
21. Car c'est a quoi vous avezete
appeles,' puisque Jesus - Chrit
meme a souffert pour nous, vous
laissant ainsi un exemple, afin que
vous marchiez sur ses pas,
22. Lui qui n'avoit commis au-
cun peche, et de la bouche. duquel
nulle parole trompeuse n'est jainais
sortie.
23. Quand on I'a charge d'inju-
res', il n'a point repondu par des
injures : quand on I'a nialtraite, i!
n'a point fait de menace; mais il
s'est livre entre les mains de celui
qui le jugeoit injustement.'
24. C'est lui qui a porte nos pe-
ches en son corps sur la croix, afin
qu'etant morts au peche , nous vi-
vions pour la justice ; c'est par ses
in omni timore dominis ,
non tantuin bonis et mo-
deslis. sed etiam dvsco-
lis,
19. Haec est enim gra-
tia, si propter Dei con-
scientiam sustinet quis
tristitias, patiens injuste.
20. Qua' enim est glo-
ria, si peccantes, et cola-
phizati suffertis? sed si
Ijene facientes, patienter
suslinetis : haec est gratia
apud Deum.
21. In hoc enim vocati
estis : quia et Chrislus
passus est pro nobis , vo-
bis relinquens exemplum
ut sequauiini vestigia
ejus :
22. Qui peccatum non
fecit , nee inventus est
dolus in ore ejus :
25. Qui cum maledici-
tur , non male dicebat :
cum pateretur non com-
minabatur : Iradebat au-
tem judicanti se injuste :
24. Qui peccata nostra
ipse pertulit in corpore
suo super lignum : ut pec-
catis mortui , justitlae vi-
■jf 18. Lilt, decrainte.
Ibid. C'est le sens du grec.
•^ 20. Liu. les soufflets de vos raailres.
■j^ 2 r . Lorsque Jesus-Chrisl vous a mis au rang de ses disciples.
■^ a3. C'esl le sens du grec : mais il a rerais sa cause enlrc Ics mains de
celui qui ju£,eselon la justice. Quelques anciens peres latins Hsoienl aussi
dans la Yulgatey/^sJe aulieude injusic.
CMAPITRE n. 427
vnmus : cujuslirore Sana- meurtrissures' que veus avez etu
ti estis. gueris.'
25. Eratis enini sicut 25. Car vous etiez comme des
oves enantes : sed con- brebis egarees , rnais maintenant
versi eslis nunc ad pasto- rous etes retournes au pasteur et a
rem et episcopum ani- I'eveque' de vos ames.
tnarum vestraruuj.
y a4. Par ses plaics.
Ibid. Des plaies que le peche vous avoil faites , et des ^garemens ou il tous
avoil jetes.
y^ 2 5. Le nom Seveque vient da grec Ewtoscc'Tio;, et signifie celui qui a I'in-
ipectioa sur qaelque chose.
CHAPITRE III.
Devoirs des femmes envers leurs maris et des maris erivers leurs femmes.
Charite mutuelie. Benirceux qui maudissent. Seslimer heureux de souf-
frir pour la justice. Souffrances de Jesus-Christ. Eaux du deluge, figure des
eaux du bapteme.
1. SiMiMTER etmulieres
Bubditse sint viris suis : ut
et si qui non credunt
Terbo, permulieruincon-
versationem sine verbo
lucrificant,
2. Considerantes in ti-
more castam conversatio-
nem vestram.
5. Quarum non sit ex-
trinsecus capillatura, ant
circumdatio auri , aut in-
dumenti vestimentorum
cultus :
4. Sed qui abscondilus
est cordis homo, ^n in-
corruptibilitate quieti et
1. Vocs aussi , femmes, sojez Ephes.y.^i.
soumises a vos maris, afin que, s'il Col. in. 18.
y en a qui ne croient pas a la pa-
role ,' ils soient gagnes par la bonne
vie de leurs femmes , sans le se-
cours de la parole ;
2. Considerant la purele dans
laquelle vous vivez et le respect
que vous avez pour eux. '
5. Nc mettez point votre orne- i.Tim.u. 9.
ment a vous parer au dehors, par
la frisure des cheveux, les enrichis-
semens d'or et la beaute des ha-
bits;'
4. Mais a parer I'homme invisi-
ble cache dans le cceur, par la pu-
rete incorruptible d'un esprit plein
y I . A rEvangile.
•jr a. El elanl porlcs par-la a aimer une religion qui ins['ii'c ces senliraens.
■f 3. C'cst ?a construction du grec : quarum sit non exuinsecus capilLitn-
rce, aut circumdationis auri, aut indumenti vestimentorum cultus.
4a8
l" EPITRE DE SAIM PIERRE.
de douceur et de pais;" ce qui est
un riche et magnifique ornement'
aux yeux do Dieu.
5. Car c'estainsi qu'autrefois les
sainles femmes, qui esperoient en
Dieu, se paroienl, etantsoumises a
leurs maris;
<^e/j.xvm. 12'
6. Telle ctoit Sara , qui obeissoit
a Abraham, I'appelaiitson seigneur;
Sara, dont vous Otes devenues les
filles, en imitant sa bonne vie, et
ne vous laissant abattre par aucune
crainte.
I. Coiwii. 3. y, Et vous de inGme, maris , vi-
vez sagement' avec vos femmes,
les Iraitanl avec honneur et discre-
tion, comme le sexe le plus foible ,
et considerant qu'elles sent avec
vous heriti^res de la grace qui
donne la vie; afin' qu'il ne se
trouve en vous aucun empeche-
ment a la priere.'
8. Enfin, qu'il se trouve entre
vous tons une parfaite union de
senlimens, une bontc compatis-
sante, une amitie de frcres , une
charite indulgente," accompagnee
de douceur et d'humilito.'
/'rot'. XV 11. 1 3 9. Ne rcndez point mal pour
/iom. XII. 17. naal, ni outrage pour outrage : mais
i.J/ies.v.ij. ^^ contraire rcpondez par des be-
nedictions, sachant que c'est a cela
que vous avez ete appeles, afin de
recevoir , comme un heritage , la
benediction de Dieu.
modesti spiritus , qui est
in conspectu Dei locuples.
5. Sic cnim aliquando
et sanctse mulieres , spe-
rantes in Deo , ornabant
se , subjectaj propriis vi-
ris.
6. Sicut Sara obediebat
Abrahae , dominum eum
vocans : cujus eslis filiai
benefacientes, etnon per-
timeiltes ullam perturba-
tionem.
7. Viri similiter cohabi-
tantes secundum scien-
tiam, quasi infirmiori vas-
culo muliebri impartien-
tcs honorem , tamquam
et coheredibus gratiae vi-
tae : ut non impediantur
orationes vestrae.
8. In fine aulem , om-
nen unanimes compatien-
tes, fraternitatis amato-
res , misericordes , mo-
desti, humiles :
9. Non rcddentes ma-
lum pro malo, nee male-
dictum pro malediclo ,
sed e contrario benedi-
centes : quia in hoc voca-
ti estis , ut benedictio-
ncm hereditate possidea-
tis.
^4. C'est le sens du grec.
Ibid. G'esl le sens du grec : quod est in conspecLu Dei locuples.
y 7. Lilt, selon la science.
Ibid. Vivant dans la purele el la chastcte conjugale.
Ibid. Aux exerciccs de la religion.
■^ S. Gr. aulr. une affection pleine de tendresse.
Ibid. Ces deux mots modesti, humiles , repondenl h un mot qui se Iron v.'
dans les ancicns manuscrils grecs TaTTEtvoopovec. L'expression qui se trouve
dans le grec imprime peut se traduirc : une douceur qui tjagne les corurs.
CHAPITRE III.
429
10. Qui eniiTJ vult ti-
lain tlilij,'ere, el dies vi-
dere Uonos , coerceat
lin<;iiain suam a nialo, et
labia ejus ne loquantur
dolum.
11. Declinet a malo ,
et facial ijonuin : inquirat
pacein, el sequatur earn.
12. Quia oculi Domini
super justos, et aures ejus
in preces eoruin : vult us
auteni Domini super fa-
cientes mala.
1 5. Et quis est qui vo-
bis noceat, si boni aemu-
latores fueritis ?
14. Sed et si patimini
propter justitiam, beati.
Timorem auteni eorum
ne timueritis, et non con-
turbemini :
i5. Doniinum autem
Christum sanctificate in
cordibus vestris , parati
semper ad satisfactionem
omni poscenti vos ratio-
nem de ea, quae in vobis
est, spc !
16. Sed cum modestia
et timore conscientiam
habentes bonam, utineo,
quod detrahunt vobis ,
confundantur, qui calum-
niantur vestram bonam
in Christo conversatio-
nem.
17. Melius est enim
I o. Car si quelqu'un aime la vie,' /'i.xxtnt. 1 3 .
et desire d'avoir des jours heu-
reux, qu'il empeche sa langue de
se poller a la medisance, et que
se.s levres ne prononcent point de
paroles de tromperie.
1 1. Qu'il se detourne du mal, et ^^'"- *• '*"'-
qu'il fasse du bien ; qu'il recherche
la pais, et qu'il travaille pour I'ac-
querir.
12. Carle Seigneur a les yeux
ouverts sur les justcs, et les oreil-
les ^Utentives a leurs prieres; piais
il regarde les mechans avec colere.
i5. El qui sera capable de vous
nuire , si vous ne pensez qu'a
faire du bien?
14. Si neanmoins vous souSre.z Mfiu.r. 10.
pour la justice, vous serez lieu-
reux. jSe craigncz done point les
maux dont ils veulent vous faire
peur, et n'en soyez point troubles;
10. 3Iais ayez soin de sanctifier
dans vos coeurs le Seigneur Jesus-
Christ.' Soyez toujours prets a re-
pondre pour voire defense' a tons
ceux qui vous demanderont raison
de I'esperance que vous avez,
16. Le faisant toulefois avec '*''7"- "• *'-■
douceur et avec modestie,' et con-
servant votre conscience pure, aGn
que ceux qui decrient la vie sainte
que vous menez en Jesus-Christ
rougissent de vous diffamer.'
17. Car 11 vaut mieux Stre mal-
■^ 10. C'estcequesignifie i'expressiondapsauraexxxui.iS.selon I'liebreu,
les Septan te el la Vulgate : Qui vultvitam, et diligil dies videre bonos.
•j^ i5. Par la puret^ de votre foi, et par lasaintete de TOtre vie. — Legrec
imprime lit: Le Seigneur Dieu,
Ibid. C'est le sens du grec.
y- 16. C'esl le sens du grec.
Ibid, Le srec aioule : comnie les medians.
i3o
EPITKE Dli SAINT I'lERUF..
traites, si Dieu le veut ainsi, en fai-
sant bien, qu'en faisant mal ;
Horn. V. 6. 1 8. Puisque Jesus-Christ meme a
riebr. \x. aS. souffert une fois la mort pour nos
peches, le Juste pour les injustes,
afin qu'il pQt nous offrir' a Dieu ;
etant inort en sa chair;" niais etant
ressuscite par I'Esprit : '
19. Par Icquel nussi il alia pre-
cher aux espritsqui eloient retenus
en prison ,'
20. Qui' autrefois avoient ele iu-
credules, lorsqu'au temps deNocils
s'attendoient a la patience de Dieu '
pendant qu'on preparoit I'arcbc,
Gen.yn. 7. dans laquelle si peu de personnes,
Muu.xxw.Z-j savoir huit seulement, furent sau-
L,uc. xvn. 26. ' • ■!• J i»
vees au milieu de 1 eau.
21. Ce qui etoit la figure a la-
quelle rcpond maintenant le baptfi-
me, qui, ne consistant pas dans la
purification des souillures de la
chair, mais dans la promesse ' que
Ton fait a Dieu do garder une con-
science pure, vous sauve par la re-
surrection de Jesus-Christ,
22. Qui ayant detruit la mort,
afin que nous devinssions les heri-
tiers de la vie eternelle, ' est monte
benefacientes ( si volun-
tas Dei velit), pati, quam
malefacientcs :
18. Quia et Christus
semel pro pcccatis nos-
Iris mortuus est, Justus
pro injustis, ut nos offer-
ret Deo, mortificatusqui-
dem carne , vivificatus
autein Spiritu :
19. In quo et his, qui
in carcere erant, spirili-
bus, veniens praedicavit ,
20. Qui increduli fue-
rantaliquando,quando ex-
pectabant. Deipatieiitiam
in diebus Noe, cum fabri-
carcturarca: inquapauci,
id est octo animae salvse
I'actae sunt per aquam.
21. Quod et vos nunc
similis forinoe salvos facit
baptisma : non carnis
depositio sordium , sed
conscienliae bonae inler-
rogatio in Deum per re-
surrectionem Jesu Chris-
22. Qui est in dextera
Dei , deglutiens mortem
ut vitae aeterna; heredes
•^ 1%. Gr. aulr. qu'il nous amen&t.
Ibid. Pour nous fairc mourir au pcchc.
Ibid. Par I'Esprit de Dieu qui etoit en lui ; pour nous fairc vivre hi la grace
et a la justice parle m^me Esprit.
y^ 19. Dans lesenfers, ou son ame descendit pendant que son corps dtoit
dans le tombeau, atin d'y porter I'beureuse nouvcllc dc la redemption et de la
delivrance de ces memcs esprils.
•jr 20, Jesus-Christ alia prdcher aux espriis qui, etc.
Ibid. Grrc : la patience de Dieu les atlendoit a penitence. — On est par-
tape si Jcsus-Chrisl est descendu vers ceux de ces incredules qui s'etoient con-
vertis dans les derniers momens quand le deluge ne laissa plus de refuge , ou
s'il s'cslmonlre aux impenitens pour confondre leur increduliti^.
y 2 1 . C'est le sens du grec.
jJ aa. Ces mots, deglutiens mortem ut vita! ceternce heredes ejjlceremi
ac sont point daus le grec.
cuAPiTnE III. 43i
efficeremiir: profectns in au ciel , et est A la droite de Dieu ,
ccelum, subjcctis sibi an- les anges, les dominations et les
gelis, ct potestatibus, et puissanc£S lui etant assujetis.
virtutibus.
CHAPITRE IV.
Vivre, non selon les passions des homines, mais selon !a volonte de Dicu-
Veiller et prier. Praliquer la charite. Parler et agir par i'Esprit de Dieu-
Se rejouir dans les souffranccs. Dieu juge ici les siens, ct leur est lidele.
1. Christo igitnr passo
in carne , et vos eadcm
cogitatione armamini :
quia qui passus est in
carne , desiit a peccatis :
2. IJt jam non deside-
fUs hominum, sed volun-
tati Dei, quod reliquum
est in carne, vivat tem-
poris.
3. Sufficitenim praete-
ritum tempus ad volun-
tatem gentium consum-
mandam, his qui ambu-
laverunt in luxuriis ,
desideiiis , vinolentiis ,
comessationibus , pota-
tionibus, et illicitis ido-
loruni cultibus.
4. In quo admirantur
non concurrentibus vobis
in eamdeui luxurise con-
fusionem , blaspheman-
tes :
1. Puis done que Jesus-Chiist a
souffert ' en sa chair, annez-vous
de celte pensee, que tout homme
qui est mort a la concupiscence
charuelie ' a cesse de pecher ;
2. Ell sorle que, durant tout le Ephes. it.iS.
temps qui lui reste de cette \ie mor-
telle, il ne vive plus selon les pas-
sions des homines, mais selon la
volonle de Dieu.
5. Car c'est bien assez que dans
le temps de voire premiere 'YJ^,
vous' vous soyez abandonnes aux
memes passions que les paiens, vi-
vant dans les impudicites, dans les
mauvais desirs , dans les ivrogne-
ries, dans les banquets de dissolu-
tion et de debauche , dans les exces
du vin , et dans le culte sacrilege
des idoles.
4. lis trouvent maintenantetran-
ge' que vous ne couriez plus avec
eux, comme vous faisiez, a ces de-
bordemens de debauche et d'intem-
perance ; et ils prennent de la sujet
de vous charger d'execrations : '
y I. Le grec ajoute : pour nous.
Ibid. Lilt, celui qui a souffert dans sa chair par la mortification des pas-
sions.
•f 3. Le grec lit nous : la suite suppose p!ut6t tous.
y 4. Cost le sens du grec.
Ibid. C'est le sens du grec.
432
I" EPITRE DE SAINT PIERRE.
5. Mais ils reiidront compte i\
celui qui est pret a juger les vivans
et les morts.
6. Car c'est pour cela que I'Evan-
gile a aussi ete preche aux morts, '
aGn qu'ayant ete punis devant les
hommes selon la chair ; ' ils recus-
sent devant Dieu la vie de I'es-
prit.
7. Au reste, la fin de toutes
choses s'approche. Conduisez-vous
done avec sagesse, et soyez vigilans
dans la priere. '
8. Mais avant toutes chos'es, ayez
une charite perseverante les uns
Pvov. X. 12. pour les autres; car la charite cou-
vre beaucoup de peches.
Rom. XII. i3. 9. Exercez entre vous I'hospita-
Heb. xni. 2. lite sans munnurer,
Phil. w. Ik- 10. Que chacun de vous rende
Rom. XII. fi. service aux autres selon le don qu'il
a recu, conime etant de fidfelcs dis-
I. Cor. IV. 2. pensateurs des diiferentes graces de
Digu.
1 1. Si qnclqu'un parle , qu'il pa-
roisse que Dieu parle par sa bou-
che ; ' si quelqu'uu exerce quelqiie
ministere , qu'il le i'assc coitiiiie
n'agissant que par la vertu que
Dieu lui doniie; afin qu'en tout ce
que vous faites, Dieu soit glorifie '
par Jesus-Christ, a qui appartient
la gloire et I'einpire dans les sifecles
des siecles. Amen.
5. Qui reddent ratio-
nem ei qui paratus est
judicare vivos et mor-
tuos.
6. Propter hoc enim
et mortuis evangelizatum
est : ut judicentur quidem
secundum •homines in
carne, vivant autem se-
cundum Deum in spiritu.
7. Omnium autem finis
appropinquavit.Estoteita-
que prudentes , et vigilale
in orationibus.
8. Ante omnia autem ,
mutuam in vobismctipsis
charitatem continuam ha-
bentes : quia charitas ope-
rit multitudinem pecca-
torum.
g. Hospitales invicem
sine murmuratione.
10. Unusquisque, sicut
accepit gratiam, in alteru-
trum illam administran-
tes , sicut boni dispensa-
tores multiformis gratiae
Dei.
11. Si quis loquitur,
quasi sermones Dei : si
quis ministrat, tamquani
ex virtute quani adminis-
Irat Deus : ut in omnibus
honorificetur Deus per
Jesum Christum : cui est
gloria et imperium in se-
cula seculorum. Amen.
■jr 6. Que les idolatrcs ont ^te eclaires des lumieres tie la foi.
Ibid. Par les maux dont Dieu periiiet qu'ils soient affliges dans ce monde.
Ibid. On pourroil aussi entendre par ces mols ceux dont il a ete parle au
cliap. preced. -jr 19. el 20.
•^ 7. Gr. aulr. soyez done temp^rans el vigilans pour ctre mieux di.'tposes
a la priere.
>'- II, Liu. que ce soient comme des paroles de Dieu.
Ibid. C'est I'expression du gree.
II. Charissiini, nolile
]5cregrin;iii in fervore ,
qui ad tenlalionem vobi^
fil , qiinsi iiovi uliquiil vo-
bis coiitingat :
i5. Setl coimminiciintes
Chrisli passioiiibiis gaii-
dclc, ut ct in revclalione
gloria; ejus gaudealisexul-
lantes.
14. Si exprobramini in
nomine Clirisli, beali eii-
tis : quoniam quod est ho-
noris gloriie , et virlutis
Dei , et qui est ejus Spiri-
tus super vos requicscit.
1 5. Nemo aulem ves-^
Irum patiatur ul homi-
cida, aut fm-, aul male-
dic'us, aut alienorum ap-
petitor.
16. Si aulem ut Cliris-
tianus, non erubescat :
glorificet autera Oeum in
isto nomine.
17. Quoniam tempus
est ul incipiat judicium a
domo Dei : si aulem pri-
mum a nobis, quis finis
eorum qui non credunt
Dei Evangelic?
18. Et si Justus vix sal-
vabitur, impius et pec-
cator ubi parebunt?
CHAPITRE IT. 43S
12. Mcs tri-'S chers freres, ne
soyez point surpris ' lorsque Dieu
vous eprouve par le feu dcs afllic-
tious , comme si quclque chose
d'extraordinaire' vous anivoit :
id. Mais rejouissez-vous plulot
de ce que vous parlicipei aux sout*-
frances de Jesus-Christ, afin que
vous soyez aussi comblcs" de joie
dans la manifeslalion de sa gloire.
i4> Vous eles bienheureux si
vous so6ffrez des injures et des dif-
famalions pour le nom dc Jesus-
Christ; parce que I'honneur, la
gloirq, la verlu de Dicu', et son Es-
prit, repose survous.'
i5. tMaisqiie mil devous nesouf-
fre comme homicide , ou comme
larron, ou couime niediiant', ou
comme envious du bien d'autrui. '
16. S'il souffle comme Chretien,
qu'il n'cn ait point de lionte ; mais
qu'ii en ' glorilie Dieu.
17. Car voici le temps oii Dieu
doit commencer son jiigement par
sa propie maison ; et s'il commence
par nous , ' quelle sera la fin de
ceux qui rejeltent ' I'Evangile de-
Die u ?
18. Si le juste meme se sauve ' Piw. xi 3c,
avcc tant de peine, que deviendront
les impies et les pccheurs?
f 12. C'esl le sens du grec ixr, ^^•^lU'^'•, qui pcut sc traduire a la lettre :
ne trouvez point elrange. C'est la meme expression qu'au ^ 4.
Ibid. Gr. litt. d'etraiigc.
i 14. Gr. aulr. parccque Tcsprit de Dieu qui est I'espt ii de s,\oire repose
sur vous; cet Es/jritffuiest blaspheme par eux et glorifie par vous.
y^ i5. Gr. ou comme maifaiteur.
Ibid. Gr. autr. ou comme se mdlant d'affaires qui ne le regardent pas.
-jr 16. Vulg. lilt, en son nom. Plusieurs anciens manuscrits erecs lisent
ainsl. Le grec iinprime lit : en cette parlie.
y^ 17. Nous qui sommes ses serviteurs, et qui croyons en lui.
„/*'''■•, Vl;.''"- *J"' "^ "°'^"' I^'"'- ^''- bit.- qui noLrisscnt point a
rtvangile deDieu.
y 18. C'est ainsi que s'exprime le grec, saiuatur.
23. ,5
434
1™ EPITRE DE SAINT PIERRE.
ig. C'est pourquoi , que ceux
qui souffrent selon la volonte de
Dieu, perseverant dans les bonnes
oeuvres , remettent leurs aines cntre
les mains de celui qui en est le crea-
teur, et qui leur sera fidele.
19. Ilaque el hi qui pa-
tiuntur secundum volun-
tatem Dei, fideli Creatori
commendent animas suas
in benefaclis.
CHA^PITRE V.
Avis aux ministres de I'EgUse. Avis a tous les fideles. S'humilier devant
Dieu : se reposer en lui. Veiller sur soi ; rcsisler au demon. Benediction.
Salutation.
1. Je tous prie done, vous qui
etes pretres, ' elant pretre aussi
comme vous, et lemoiu des souf-
frances de Jesus-Christ, et devant
participcr ' a sa gloirc qui sera un
jour decouverte :
2. Paissez le troupeau de Dieu
qui vous est commis, veillant sur '
sa conduite, non par une necessite
forcee , mais par une affection vo-
lontaire qui soit selon Dieu ; ' non
par un honteux desir du gain, mais
par une charite desinleressee;
3. Non en dominant sur I'heri-
tage ' du Seigneur, mais en vous
rendanl les modeles du troupeau ,
par une vertu qui naisse du fond
du coeur. '
4. Et lorsque le prince des pas-
te urs 'paroitra, vous remporterez
1. Sesiobes ergo, qui
in vobis sunt, obsecro ;
consenior et testis Christi
passionum : qui et ejus ,
qua? in futuro revelanda
est, glorias communica-
tor :
2. Pascite qui in vo-
bis est gregem Dei, pro-
videntes non coacte ,
sed spontanee secundum
Deum : neque turpis
lucri gratia, sed volun-
tarie :
3. Neque utdominantes
in cleris, sed forma facti
gregis ex animo.
4. Et cum apparuerit
princeps pastorum, perci-
•^ I. C'est le sens du grec , ou plus litleralement : C'est a ceux d'entre
vous qui sont pretres c/ue je m'adresse ici , etant pretre comme eux et te-
inoin,etc. Sous le nom des pretres peuvent etre comprls ici meme leseveques.
Ibid. C'est le sens du grec.
^ 1. C'est le sens du grec.
Ibid. Ces deux mots secundum Deum ne sont pas dans le grec imprime.
y- 3. C'est ce que signifie I'expression in cleris, imitee du grec tuv xXrpwv.
Ibid. Ces deux mots ex animo ne sont pas dans le grec.
f 4. Jesus-Christ.
I
CHAPlTRB V.
435
pietis immarcescibilem une couronnede gloire qui nese fl6-
gloriae coronam. trira jamais.
5. Similiter, adolescen- 5. Vous aussi, jeunes gens, ' sou-
Ics, subditi estote senio- mettez-vous aiix prGtres. ' Tacliez
ribus. Omnes aiitem in- de vous inspirer tous I'humilite les ^o»i. xu. iS.
vicem humilitalem iusi- uus aux autre*,' parce que Dieu •^'^<^- 'v- 6.
resiste aux superbes, et donne sa
crace aux humbles. '
nuale,quia Deus superbis
rcsistit, humilibus autem
dat graliam.
6. Ilumiliamini igilur
sub potenii manu Dei, ut
vos exaltel in tempore vi-
sitationis :
7. Omnem sollicitudi-
nem vestram projicientes
in eum,quoniamipsi cura
est de vobis.
8. Sobrii estote, et Ti-
gilate , quia adversarius
vester diabolus tamquam
leo rugiens circuit, qujE-
rens quern devoret :
9. Cui resistite fortes
6. Humiliez-Yous done sous la/ac iv. 21.
puissante main de Dieu , a fin qu'il P^- "v- 3o,
Yoiis eieve dans Ic temps de sa vi-
site, '
7. Jetant dans son sein toutes vos Matt. vi. aS.
inquietudes et vos peines, parce Lmcxu. 22.
qu'il a soin de vous.
8. Soyez sobres, ' et veillez; car
le demon voire ennemi tourne au-
tour devous comme un lion rugis*-
sant, cherchant qui il pourra de-
vorer.
g. Resistez-Iui done, en demeu-
in fide : scientes eamdem rant fermes dans la foi , sachant que
passionem ei , quae in vos freies qui sont repandus dans
le monde souffrent les raeme? af-
flictions que vous souffrez.
10. 3Iais je prie le Dieu de toute
grace , qui nous a appeles en Jesus-
Christ a son eternelle gloire , qu'a-
in Christo Jesu, modicum pres que vous aurez souQert un peu
passos ipse perCciet, con- de temps, il vous perfectionne, il
iirmabit, solidabitque. vous forlifie , ' et vous affermisse
sur un solide fondemeut. '
II. Ipsi gloria el impe- 11. A lui scit la gloire et I'em-
mundo est, vestra; frater-
nitati fieri.
10. Deus autem omnis
gratia?, qui vocavit nos
in aeternam suam gloriam
y 5. Ou: qui ctcs jeunes. Quelques-uns croient que ceci s'adresse aux
ministres infcrieurs de I'Eglise.
Ibid. C'esl le sens du grec, ou le m^me nom sigaifie anciens etpreires.
Ibid. Autrement et scion le grec : Vous tous tous soumetlant les uns aux
autres , rev^tez-vous d'humilite ; parce que, etc. Ici saint Pierre s'adresse a
tous les lideles.
Ibid. Celle parole se trouve dans la version des Septante. Prct>. in. 34.
y 6. Le mot visitationis n est pas dans le grec.
•jl 8. Gr. autr. gardez-vous de I'enivrement du siecle.
y 10. Ce mot est dans legrec : il vous forlifie et vous elablisse sur lui
comme sur un solide fondement.
Ibid. Sur la pierre spirituelie. C'est-a-dire sur Jetos-Cbrist lui-Badme.
486 l" EPITRE DE SlIWT PIERRE. CHAPITRE V.
pire dans les siecles des siecles. Hum in seculaseculorum.
Amen. Amen.
12. Je vous ai ecrit, ce me scm- 12. Per Sllvanum fide-
ble , asscz brieveinent par noire 1cm fratrem vobis, ut ar-
frere Silvaiii , ' qiii est un lioinnie bitror, breviler scripsi :
fidele; vous dccl-jrant et vous pro- obsecrans et conleslans ,
lestaiit que la vriiie grace de Dieu ' banc esse veram gratlam
est celle dans laquelle vous demeu- Dei, in qua slatis.
rez fermes.
i5. L'Eglise qui est dans Baby- i3. Salutat vos Eccle-
lone, ' et qui est elue commc sia , quae est in Babylone
vous. et mon fib Marc, ' vous sa- coekcta , et Marcus filius
luent. mens.
14. Saluez-vouslcsunsbisaiilres j^. Salulate iuviocm in
par un saint baiser. ' Que la paix" osculo sancto. Gratia vo-
soit avec vous tons qui Gtes en Je- bis omnibus, qui estis in
sus-Chiist. Amen. ' Cbristo Jesu. Amen.
■i 12. On croit que c'estle m^me que Silas, dont il est parli dans les
Actes, XV. 3o. XVI. 19., el quiesl aussi notnme Silvain par saint Paul, a
Cor. 1. 19., I. lliess. 1. I.
loid. la foi pure.
f 1 3. C'esl-ii-dire RomcVoyez la Dissertation sur le voyage de saint
Pierre a Home., a la leto de celle epilre.
I^id. On ne doule point que ce ne soil saint Marc Tevangeliste, reconnu
pour disciple de sain I Pierre.
■^ 14. Le grec inipiimc lil : par un baiser de cliarile.
Ibid. CVst Texpression du grec. La Vulijale lit: la grace.
Ibid. Les exemplaires grecs portent ici : La premiere epitre de saint Pierre
A eteecrile en a36 versels.
PREFACE
SUR Lk SECONDE EPITRE
DE SAIM PIERRE..
Depvis que saint Pierre eut envoye sa premiere letlre Suiiedela
qu'il ecrivit de Rome, enlre Van 45 el I'an oo de I'ere ^ie de saint
chretieune vulsraire, comme nous I'avons montre dans la Pierre der»uis
preface sur celle cpilrc^ n retourna dans la Falestme. On y j, ^p^r^.f sa
tint en I'an -ii le concilede Jerusalem, ou saint Pierre sou- ,« cpjirejos-
tint qu'il ne falloit point imposer aux fidcles le joug de la qu'asamort.
loi; ct son sentiment ayani ete appuye par saint Jacques,
fut embrasse par toule Tassemblee, comme la decision du
Sainl-Esprit. Apres ce concile, ce prince des apoires alia
a Anliociie, ou il fut repris par saint Paul, comme il est
dit dans Tepiire aux Galates '. Depuis ce temps on ne sait
pas distinctement ce que fit saint Pierre, jusqu'a son der-
nier voyage de Rome. 11 y fut conduit par lo Saint-Esprit,
pour rendre temoignage a la verite devant Neron, et pour
y combattre Simon le. magicien, qui y seduisoit plusieurs
personnes par ses prestiges. Saint Paul s'y trouva dans le
meme temps, I'an 65 de Jesus-Christ, et ils se joignireut
ensemble pour s'opposer a cet ennemi de I'Evangilc ^.
Nous croyons que ce fut dans cclleville que saint Pierre
ecrivit cette seconde epltrc; et quoiqu'il u y paile ni dc sa
prison nl de ses liens, il y a toute apparence qu'i! !a cora-
posa apres une apparition qu'il eul de Jesus-Chrisl, comme
il sorloit de Rome pour se derober aux poursuiies de Ne-
ron. Noire Seigneur se montra a lui. comme il etoit deja
a la porle de la ville; et saint Pierre lui ayant demande ou
il alloit, le Sauveur repondit: Je liens a Rome pouryelre
' Gnlat. u. n. elseijq. — ' \ajez M. deTillemont, taint Pi€rr«, art. 33,
34.
438
PREFACE
criicijie de nouveau *. Ces paroles firent comprendre a
saint Pierre que bientot il devoit consommcr son martyre;
et c'est apparemment a cela qu'ii fait ici allusion, lorsqu'il
dit que le temps auquel la tenle de son corps doit etre
abattuc, est proche, comme noire Seigneur Jcsus-Christ le
liiiajait connoilre'^. En effet, peu de temps apres, il fut
arrete et mis en prison, ou il demeura, dit-on, pendant
neuf mois, et n'en sortit que pour aller au martyre, qu'il
souffrit Tan 67 de I'ere chret, Tulg. ^ i
Objetet ana- Cette epitre peut done etre consideree comme le testa-
lysedecetie nient spirituel de cet apotre : elle contient les derniers
^ ' avis qu'il donne aux fideles. Le premier regarde le soin
qu'ils doivent avoir de travailler a leur sanctitication et a
leur perfection ^. Le second concerne les perils qui nie-
nacent I'Eglise du cote des heretiques; il ne marque que
ceux qu'elle aura a essuyer dans son premier age et quelle
eprouvoit deja des lors ^, et ceux auxquels elle se verra
exposee dans son dernier age a la fin des siecles ^; ce qui
renferme une preuve invincible de sa perpeluite. Car
comme ces derniers perils doivent altaquer la meme
Eglise qui a deja cssuye les premiers, ainsi qu'il paroit par
toute la suite de cette epilre, ou TApolre parle loujours
aux memes fideles, c'est-a-direala meme societe,ala meme
Eglise, il en resultenecessairement que la meme Eglise qui
a essuye les premiers pejiis dont elle etoit menacee dans
son premier age, subsistera jusqu'a la fin des siecles, ou
elle doit encore eprouver de nouvcaux perils auxquels
succedera la paix parfaile dont elle jouira dans I'eternite
hienheureuse. Ce que saint Pierre dit ici dc la fin du monde
donnera lieu a une Dissertation sur ce grand evenement,
laquelle sera precedee d'une autre Dissertation sur le sys-
teme du monde.
R^ponses Saint Gregoire-le-Grand ^ dit que quelques-uns attri-
aux objections buoient cette epitre a Cephas, a qui saint Paul resista en
deceuxqui ^^^^ ^ Antioche, comme il est dit dans I'epitre aux Ga-
conleslenta , „ ,., > i • . a. i-cc \ j i' „«.
saint Pierre ^''^^es ^, et qu lis pretendoient etre diiterent de 1 apotre
ccite epitre. saint Pierre. Mais ce saint pape refute solidcment cette
* Jml/ros. serm. 68. Origen. G. L. in Joan. torn. 21. pag. xt8, eL 2;)'?.
Gregor. Meg. ser.vu. in/jsal. ci. — * 2. Petri, i. 14- — ^ Cette epoque
est conteslee. Yoyez Tillemonl , no'.e 40, sur sain: Pierre ; ell'^ri de vevi-
Jier les dales, setonde edition, page 238, oil I'on s'est determine pour Fan 66.
— * Cap. I. -^ I. adfinem. — ' Cup. n. f 1. adjinem. — ® Cap. in. i i-
ad finem. — ^ Gregor. in Ezech. humil. iS. — ' Galat,n. n.
SLR LA ll' EpJtHE DE saint PIERRE. iZ^
opinion. Grotius, entre les modernes, est celui qui a porte ^JJ"^":^^*'®
le plus loin le sentiment qui conteste cette epitre a saint Remai^uw'
Pierre. II veut attirer dans son parti ceux des anciens qui sur son siyle.
ne I'ont pas reconnue pour canonique; et en effet s'ils
I'eussent crue do ce saint ap6tre, il n'y a nulle apparence
qu'ils I'eussent rejetee du canon. II ajoute que le style est
assez different de celui de la premiere; et cette difference
est remarquee par Eusebe ' et par saint Jer6me ^. 11 dit de
plus qu'elle a ete ecrite apres la ruine de Jerusalem, et par
consequent qu'elle ne peut etre de saint Pierre, qui fut
martyrise sous Neron. La preuve qu'elle a ete ecrite apres
la ruine de Jerusalem, selon cet auteur, est quelle parle
du jugement dernier comme prochain; or, persoune n'a
jamais cru que le jugement dernier dut arriver avant la
ruine de Jerusalem. 11 croit qu'elle a ete ecrite sous I'em-
pire de Trajan, et qu'elle pourroit bien etre I'ouvrage de
Simeon, ou Simon, eveque de Jerusalem, successeur et
imitateur de saint Jacques-le-Mineur.Enfin, il suppose que
certains trails qui semblent demonslratifs pour I'attribuer
a I'apdtre saint Pierre, y ont ete ajoutes par ceux qui en-
treprirent de lui donner du credit, et de la faire passer
sous le nom de cet apotre.
11 faut convenir que plusieurs anciens I'ont eue pour
suspecte, et n'ont pas voulu I'admettre dans le canon des
livres sacres. Quelques-uns I'ont soupconnee de supposi-
tion; etDidyme^ I'a crue corrompue. Origene dit qu'elle
est douteuse * et contestee. Eusebe ^ avance que saint
Pierre n'a ecrit qu'une epitre certaine, connue et citee par
les anciens. Saint Amphiloque ^ remarque que de son temps
on douloit encore qu'elle fut de saint Pierre. Saint Jerome
temoigne le meme doute.
Mais elle porte avec elle les preuves de son authenticite
et de sa verite. Elle ne contient rien qui ne soit digne de
saint Pierre, rien de contraire a son esprit et a son carac-
• Nousne trouvons rien de ccla dans Eusebe . I. iii. c. 3. et 25. Hist, ce-
des.— - Hieron. de f-ins illuso: c. i . Scripsit duas epistolas , qua catho-
licce nomincnlur, (juarum secunda a pletis<iiie ejus esse negatur, propter
styli cum priore dissonantiain. — * Didym. Comment, in hanc epist. ad
Jinem. Nun estignonnidum piwsentem epistolam esse Jalsatam : {juce licet
publiceiur, non lamen in caiione est. — * Origen. in Joan. pag. 88. Mi*v
Ewj(m>.Tr< cu.cAO'j'iuai'vr.v xaToy.e'/.c'.iTc. EoTt) (J's xal ^euTs'sav iu.€acA>.£ra'. -yap.
— * Euseb. Hist. ecel. lib. \n. c. 8. et aS. — ^ Amphiloch. apud Greg. Na-
zianz. Carm. n.
44o PREFACE
tere, rien d'oppose aux circonstances du temps auqnel il
a vecu. Elle porte en tetc le nom de cet apolre '; elle est
d'un des trois apotresqui furent prcscns a la transfiguralion
de Notre Seigneur ^; elle rappelle la premiere epilre do
saint Pierre ^, commc ayanteie ecritepar le memo auteur:
Hanc ecce vobis seciindam scrlho epistolam. Aucun des pas-
sages qui ont parn douteux a Grolius ne manque dans les
anciens manuscrits. Origene'* la cite sans dilfieulte comme
de saint Pierre. Novatien ^ , qui vivoit du temps tie Ter-
tullien, saint Cyprien*", saint Justin meme le martyr ", ou
la citcnt, ou y font allusion. Saint Jutle, dans son epilre
catholique, allegue les propres paroles de eel le-ci, e ties cite
comme ayant ete dites par les apotres de Notre Seigneur
Jesus-Christ: Memores eslole verhoriim qiice prcedicla sunt ab
apostolis Domini Noslri Jesu Chrisli, qui dicebanl vobis,
qiioniam innovissimo tempore vcnient illusores, etc.^ ; ce qui
est en termes expres dans le troisieme chapilre de cette
seconde epilre de saint Pierre.
II est inutile de citer saint Cyrille de Jerusalem '^, saint
Alhanase*'*, saint Gregoire do Nazianze'*, saint Epiphane,
saint Hilaire'^, saint Augustin'^, saint Ambroise '^, saint
Jerome'^, Facuntlus, Salvicn, saint Macaire, Ic concile de
Laoclicee '^, le troisieme de Carthage*^, et tous ceux qui
sont venus depuis^ et qui nous ont donne des catalogues
des iivres saints, puisqu'iis sont tous d'accord sur ce sujet,
et qu'ils reconnoissent sans diffioulle cette epilre comme
canqnique. Or, si elle est canonique, elle est aussi certai-
nement de saintPierre; car si elle n'est pas de cet apotre,
cile est d'un insigne Iburbe. Si elle ne se trouve pas dans
quelques exempiaires syriaques, c'est qu'elle a ele autre-
fois contesice. Elle se lit dans d'autres exemplair«s des
Syriens. Saint Ephrem'^etsairit Jean de Damas qui etoient
Syriens, se sont servis de son temoignage; et saint Jean
* 2. Pelr.i. r. — ^ 2. Peir. i. rS. — ' 2. Pelr. in. i. — * Origen. in Josne
hoin/'l. 7. — ' Nouati'an. lib. de Tiinit. c. 3. — ^ CyjU'ian. ep. 73. — '^Justin.
Dicilngo cum Tiyphonc. OO /-.evoTj £iriaTE6Gaui.EV p-iJOctj, cutS"' avaTTC^stxroi;
//j'-j'ct;, aXAa u.i'orcti; TTvs'jy.XTc; dc-j-iou. — * Jiidce ■jf 17 Conjl-r. 2. Peir. in. 3,
cum Judce / iS. — ' Cyrdl. Caiech — '" Aihan. Synops. el oral. 2. contra
Arum, — " Nazianz. Car. 34. — ^^ Hilar, lib. i. de Trinil. — '^ Jiigus!.
lib. II. c. 8, de Doclr. Christ — '* Ambros. de Incnrn. cap. 8. — '* Hieron.
lib. I. cap. 24. contra Jovinian. — *^ Concil. Laodicen. cap. &o. — '^ Concil.
Carthag, "?. can. i"]. — '" Ephrem. serm. contra Impudic.
SL'R LA II* EPITRE DE 5AIM PIERRE. 44 I
Damascene ' la met exprcsstimcnt an nombre des livres
canoniques.
I.a diversile de style que saint Jerome a rcmarquee dans
celte epitre, et que Grolius apres lui fait valoir pour la
conlester a saint Pierre, n'a pas paru iorl sensible a plu-
sieurs habiles critiques-; et saint Jerome ^, qui est le seul
qui I'ait relevee, nous en decouvrc une raison qui paroit
lort probable : c'est que saint Pierre sc servant de dillerens
intcrpretes, tantot de Glaucias *, et tantot de saint Marc,
le style de ses leltres se sentoitnecessairement de la diver-
site de ses secretaires. Saint Marc, qui etoit avec lui lors-
quil ecrivit la premiere ^ , n'y etoit pas lorsquil dicta
ccllo-ci.
Ceque Grotius ajoute, qu'elle a ete ecrite apres le siege
et la ruine de Jerusalem, et quo Simon, eveque de Jeru-
salem, en est I'auteur, ne merite pas une refutation se-
rieuse, parce que cela n'est appuye sur aucune preuve
soiide. Les passages qui embarrassent Grotius, et sur les-
quels il auroit souliaile que quelqu'un consullatles anciens
manuscriis,se trouventdanstousceuxqu'a consultesMille,
qui y a fait une attention louie particuliere, comme il le
remarque sur tous ces endroils.
Nous croyons, avec le commun des commenlaleurs, Aquiceu*
qu'elle a ete ecrite aux memes chreiiens hebraisans a qui pp'ureest
saint Pierre envoya sa premiere epitre. 11 I'insinue assez^ ^*^^^'
lorscju'il dit: Void la seconde eptlre que js tous ecris ^. De
plus, il leur parle comme a gens insiruits dans les Ecri-
tures, et qui s'appliquoient fort sericuseu^.cnt a I'elude
des prophetes, qui etoicnt entre leurs mains ~. L'auleur
dulivredesPromesses,allribueasaint Prosper^, la nomme
r Epitre aux genlils; el I'auteur du Sermon de Cataclysmo,
ou du Deluge^ parmi les oeuvres de saint Auguslin^, lui
donne le nom de seconde Epitre de saint Pierre aux genlils.
Quelques commenlateurs '" croient qu'en eflel on pent la
regarder comme ecrite aux genlils converlis, aussi bien
qu'aux Juifs; et pour prouver leur sentiment, ils se servant
* Damnscen. I. iv. iS.de Jicle ortlvodoxa. — - 3Iagdeuurgcns. Gemar.
OerJinid. Cajet. Est. Comet, ati'i. — ^ Hieron. Duos episiolee qztce fcruniitr
Petri, siylo inter se et caractere (tiscrfpanl, stritcturatjtie veriorunt : ex
quo iiiieitigiinus pro necessitate rerum di^'ersis eum usum inlerpretibus. —
*Clem. Stwm. I. vii. p. 764. — * i. Pelr. v. i3. — ^2 p^^ ,,j j — 7 j
19. 20. — * Prosper, seu alius, Promission. I. iv. c. i. — ^f'ide apud Au-
gust, lorn. f> , not: edit. p. 606. — •<> Qriidam apud Est. hie.
442 PREFACE sua LA 11® EPITRE DE SAINT PIERRE.
de ces paroles du chapitre i" : Simon Pierre, apolre de Jesus-
Christ, dceux quiont recii la memefoiquc nous; paroles qu'on
pretend designer les gentils, appeles aussi bien que les
Juifs a la religion chretienne. Mais rien n'est plus nature!
que de les expliquer des Juifs fideles, qui, au milieu de tant
d'autres Juifs qui demeuroient dans rendurcissement,
avoient eu le bonheur de croire en Jesus-Christ.
DISSERTATION
SUR LE SYSTEME DU MONDE
SELON LES ANCIENS HliBREUX.
Difficulte de J L ^^^ surprenant que Ton connoisse si peu le monde.
connoitrele Depuis tan I de siecles que I'univers est livre aux re-
vrai sysieme cherches et aux disputes des hommes , Mundum IradidiC
u mon e. disputalionieorum % a peine sait-on la disposition et la struc-
ture de la terre que nous habitons ; et encore n'en con-
noit-on que la superficie, et la moindre partie. Sur la plus
grande partie de I'univers, on est reduit a faire des sys-
temes , el a batir de simples hypotheses , sans esperance
de parvenir jamais a une connoissance cxacte et demons-
trative des choses qu'on etudie. Presqiie tout ce que les
anciens avoient invente en ce genre , toutes les decou-
vertes qu'ils croyoient avoir faites , tous leurs systemes du
monde , ont ete ou renverses ou reformes dans ces der-
niers siecles. Et qui doute qu'a notre tour nous ne soyons
un jour refutes et abandonnes par ceux qui viendront apres
nous , du moins sur un grand nombre dc points? II y aura
toujours sur cette matiere des obscurites et des difficultes
' Eccl. ui, 1 1 .
DISSERTATION SLR LE SYSTUMF. DU MONDE. 443
insurmonlables. Il scmble que Dieu , jaloux, pour ainsi
dirc,de la beaule et de la magnificence de sou ouvraj^e ,
se soil reserve a Ini seul la parfaite connoissance de sa
structure , et le secret de ses mouvemens et de ses revo-
lutions. 11 nous en laisse assez voir pour nous obliger a
reconnoitre la sagesse , et pour nous faire admirer le pou-
voir infini de I'Ouvrier; mais non pas pour contenter
notre curiosite et notre inclination. L'etude du monde
et de ses parlies est une de ces occupations penibles que
le Seigneur a donnees aus. homraes , afin qu'ils s'y exer-
cassent : Hanc occupalionem pessimam dedil Deus Jiliis ho-
tninam, ut occuparenlur in ea ^ Un grand nombre de ses
oeuvres plus grandes que celles que nous voyons nous sont
cachees ; car nous n'en voyons qu'un petit nombre : Mnlla
ahscondila sunt majora his ; pauca enivi vidimus operum
ejus ^.
On n'a jamais exige ni pretendu que les ecrivains sa- Svsicmedu
cres s'expliquassent dans la rigueur pliilosophique , et monde selon
dans la precision que les professeurs des sciences hu- 'f^ anciens
• .11 T • 1 T 'T- •. c ■ » I lleureux fort
raaines exigent de leurs disciples. L Lsprit-aamt P^rle ^jj^j^^^.^^^, j^^
pour tout le monde ; il veut se faire comprendre aus n6tre. Mc-
ignorans comiue aux savans. Ceux-ci entendent les ex- prisedelaplu-
pressions populaircs , comme le peuple : niais le peuple ne F*"^ '^^ ^°^-
* •. . I I 11 1 • , 1 mcnlateurs
pourroit entendre les expressions philosopniques et rele- ^^^j, ^ .^^
vees. Ainsi il n'est pas indigne de la sagessc de Dicu de se pim deceue
proportionner aux simples dans ses manieres de parler , Dlsseriaiion.
surlout dans des livres ou Ion doit etudier ses devoirs et
non la physique ou I'astronomie. II peut laisser aux savans
le soin de penetrer dans la grandeur et la raajeste de ses
CEuvres.
Les commentateurs qui se sont charges de developpcr
les sens caches des livres saints et d'en expliquer les termes
obscurs , n'ont pas toujours fait assez d'atlention a ce prin-
cipe. Des qu'ils ont rencontre de ces endroits ou I'auteur
sacre s'exprime d'une maniere populaire , au lieu detu-
dier les sentimens qu'il supposoit dans I'esprit de ceux a
qui il parloit , ils se sont appliques a monlrer la verite de
ce qu'il vouloit dire , el a reformer ses expressions sur les
idees que la religion el la philosophic leur fournissoient.
Lors , par exemple , que I'Ecriture donne de lintelligence
^aux animaux , un corps a Dieu , une ame aux choses insen-
^Eccl. I. r3.—« fee/. XLiii. 36.'
444 DISSERTATION
sibles, les interpreles ne manquent pas d'avertir que cc
sont des inanieres de parler populaires : cela est bon ;
mais il faudroit aussi nous dire ce que le peuple pensoit
sur ccla, quelle etoit son idee vraie ou fausse , et ensuite
la refuler , si la chose en valoit la peine. Au lieu de cela ,
cbaque commenialeur a voulu rappeler I'auteur sacre a sa
propre opinion ; il lui a fait dire lout ce qu'il a voulu; on a
fait parler Moise ou Salomon comme auroient faitr*tolo-
mee , Galilee, Buffon, Lalande ou Cuvier. On a trouve
dans le premier cbapitre de la Genese, qui regarde la
creation du monde , lous les systemcs dont on etoit
rempli. Cela est si vrai , qu'on a imprime autrefois un
iivre intitule, Cartesius mosaTsans , ou Ton enlreprend de
montrer que le monde de Moise est le merae que celui de
Descartes.
Nous ne pretendons point ici imposer des lois aux au-
tres , ni fairc croire que nous ayons plus de lumieres que
ceux qui nous ont precede. Nous avouons mcme qu'asscz
souvent , dans noire commcnlaire , nous avons suivi le
torrent, et que, prevenu des opinions de I'ecole , nous
avons suppose que I'auteur sacre vouloit dire ce que nous
pensions. Mais, en comparant les diverses expressions de
rEcrilure sur la disposition des parties de I'univers , nous
avons remarque que le sysleme du monde scion les an-
ciens Hebreux etoit fort different du notre , ct que sou-
vent nous faisions inal a propos violence au tcxte, en vou-
lant rajuster a nos prejuges. Ce qui nous a le plus servi a
nous delromper , et a fixer nos doutes sur celte maliere, a
ele la lecture des anciens philosophes et des peres. l.es
premiers, soil par tradition ou autrement, cloient r» peu
pres dans les niemes opinions que les Israelites sur la
structure du monde ; les autres, penelres de respect pour
les divines Ecritures et nc se donnant pas si aisement la
liberie de les conformcr a Icurs opinions, mais les pre-
nant a la lettre et suivant la premiere idee qui se pre-
sente a I'esprit, s'en etoient forme un sysleme suivi, et
tout conforme a celui des anciens Hebreux. Apres avoir
propose les termcs des Ecrivains sacres, nous appuierons
leur hypoihcse par la ressemblance de celle des anciens
philosopbcs et des peres. C'esl la methode que nous nous
sommes proposee dans cette Dissertation.
SUR LE STST^ME Di; MONDE. ^^<
ARTICLE PREMIER.
Dc la creation du mondc.
RiE.N n'est plus simple que le recit que fait Molse de la RecitdcMoIso
creation de I'uriivers : Au commencement Dieu crea le ^''^^ c°"aiJo"'de
et la lerre. Or, la lerrc eloit informe el toule nue , et les le- I'univers.
nebres eloienl rcpamhies sur la face de I'abimc , ell'esprilde
Dieu eloil poTle sur les eaux. Alors Dieu, dil . Que la Inmiere
soil , el la lumiereful. El il separa la lumiere d'avcc les leni-
bres ; el il donna a la lumiere Ic nom de jour, et aux timbres
le nom de nuit '. C'est la rouvrage du premier jour. Apres
cela le Seigncurfit le firmament , el il separa les eaux in-
ferieures d'avec les eaux superieures , par le moycn de ce
firmament, auquel il donna le nomde del; c'est ce qui fut
fait le second jour. Le troisieme jour, Dieu ordonna que
toutes les eaux se retirassent en un lieu; que la terre
parfit, et quelle produisit toutes sortes d'herbes el d'ar-
bres : et cela fut fait ainsi. Le quatrieme, il fit les aslres
pour eclairer la lerre le jour et la nuit : il crea done un
grand corps lumineux pour presider au jour ; c'est ie so-
leil ; et un autre grand corps de lumiere pour presider a
la nuit, avec les etoiles ; ce second corps lumineux est la •
lune. Le cinquieme jour furent crees les poissons et les
oiseaus; le sixieme, les animaux terrestres , et I'homme.
Voila ce que Moise nous apprend.
II n'est pas fort etonnant qu'un recit aussi concis ait ete
susceptible de tant de sens divers , et que chaque philo-
sophe ait cru trouverson hypolhese dans Molse. Ce legis-
lateur nous represente le Seigneur comme un ouvrier
tout-puissant, qui ayant d'abord prepare toule la maliere
sur laquelle il veut travailler, la dispose , et I'arrangc dans
la suite d'un certain nombre de jours , apres lesquels il se
repose. II nous dit que Dieu crea la lumiere , et distingua
la nuit et le jour, avant la production du soleil et des au-
tres corps lumineux , ce qui n'etoit pas fort aise a conce-
Ctnes.
■"f9-
4i6 DISSERTATION
voir avant que les pbysiciens eussent considere la lumiere
€omme un fluide repandu dans Tespace , et dont I'exis-
tence ne depend pas necessairement de celle du soleil et
des autres corps lumineux.
Dlvorssyste- L'idee de la creation du monde s'etoit conservee chez
mes des an- presque tous les peuples ; et nous avons encore dans les
ciensiouchant gjjciens le systeme de la plupart. Par exemple , celui des
Egyptiens dans Diodore de Siciie ', celui des Pheniciens
dans Sanchoniaton ^, celui des Chaldeens dans divers
fragmens rassembles depuis quelques annees dans la phi-
losophic chaldeenne K Job * nous a donne celle des Idu-
meens, qui est la meme que celle des Hebreux. Les Grecs,
quoique moins attentifs a conserver les traditions an-
ciennes et moins exacts sur cela que les peuples barbares,
comme le Icur reproche I'oracle ^, avoient toutefois con-
serve cclte tradition; et on en trouve plus d'un systeme
dans leurs philosophes^. C'cst de la que I'avoient recue
les Latins , et d'ou Ovide I'a si bien exprimee dans ses Me-
tamorphoses. La plupart reconnoissoient que le monde
n'etoit point eternel ; mais ils ne convenoient pas de celui
qui I'avoit cree. Les uns en attribuoient la creation a I'Erre
souverain et tout-puissant; d'autres, a I'ame du monde;
d'autres, au mouvement; d'autres, a I'air; d'autres, a
I'amour, qui donna le mouvement et la fecondite au
chaos , et lui fit produire la terre et les animaux. Les epi-
curiens croyoient la matiere eternelle , et soutenoientque
le hasard seul avoit donne la forme aux etres que nous
voyons. Enfin, il n'y eut jamais rien dc bien fixe sur cela ;
et on ne crut pas la religion interessee a oter aux philoso-
phes la liberie, d'abonder en leur sens , et de proposer
leurs conjectures sur cette matiere.
Sjsiemc des l\ n'cn fut pas de meme parmi les Hebreux; et c'est ce
Hebreux lou- ^^^j donnc a leur systeme du monde un grand avanlage sur
tion° ' ' *°"^ ceux des anciens philosophes. Leurs sentimens furent
toujours uniformes sur ce fait important de la creation de
I'univers. lis furent toujours persuades que Dieu seul est
le crealeur des etres visibles et invisibles ; et ce point fut
toujours un des premiers articles de leur religion. lis tien-
^Di'odorus Si'cul. I. i. — ^ J^pud Euseb. prcepar. Evang. I. i.e. lo. — '
' Apud Stanley, Mist, philosoph. part. xrii. — * Job. xxxviii. 4. et seqq.
— ' Poiphyr. ex oraculo Deljjhico , apud Theodoret. seim, i. contra gen-
tcs. — * f ide jdristophan. et Euseb. lib. 1. prcepar. cap. •]• et i^. et Tail. lib.
II. Jcademic. Quosst.
sun LE SYST^MF. Dlj MONDE. iif
nent que rest par la parole toute-puissante du Seigneur
que le chaos et toutes les creatures sont sorties du neant * ;
({ue la production des choses ne lui a coule qu'un Fiat^;
que c'est par sa volonte que tout a ete cree et que tout
subsiste ^ ; que la meme puissance et la merae sagesse qui a
cree conserve aussi tous les etres ; qu'il pent les laisser
tomber dans le neant , comme il a pu les en faire sortir ;
que tout est egalement soumis a sa volonte, et gouverne
par sa providence. Voila la croyanee generale des He-
breux de tous les temps.
ARTICLE II.
De la leiT§.
La lerre nous est toujours representee dans I'Ecriture Expressions
comrae un corps tres vaste recouvert en partie par la mer de I'Ecriture
et suspendu dans le vide ou le neant materiel. CW /^ ^"""'^^ fonde^
Seipieur qui etend le septentrion sur le vide , dit Job , et qui "^"^
ticnt la terre suspend ue sur le neant *. Et Isaie : Qui est celui
qui renferme toutes les eaux dans le creux de sa main ; qui sur
sa main elendue pese les cieux ; qui soutient avec trois doigts la
masse de la lerre ^7 Ces expressions insinuent que la terre
est suspendue , et comme flottante dans I'espace ; et cette
opinion a et6 tres commune dans I'antiquite, comme on
le verra dans la suite.
C'est au fond des abimes , et au centre de la terre , que Sysiemedes
les Hebreux placoient I'enfer. C'est la que les geans genus- Hebreux, des
sent sous les eaux '^ , ct ou sont detenus' les tyrans , et ces P?'^"^^' j^^s
superbes dominateurs des peuples qui ont desole la terre f^Tt^onde*
el opprime les nations. C'est la que les prophctes ' nous I'enfer.
represenlent les rois d'Assyrie, de Babylone , d'Egyple ,
couches dans ces sombres et tenebreux cachots. C'est la
que Ton ne voit que les impies et les scelerats , qui s'y de-
^ Psalm, xxiii. 6. — * Psalm, ixxn. 9. cxlthi. 5. — ^ Auoc. iv. 11.
— *Job. XXVI. :. — * Isai. xl. 12. — ^Job. xxvi. 5. Prov. it. iS. Jd in-
feros (Hebr. Jd gigantes).—'' Isai, xiv. 9. Ezech. xxxi. 18. etixtu. i8.
et seqq.
448 DISSKRTATION
sesperent sans esperance den sorlir ^ Enfin, c'est la ce
que les paiens appeloient le noir Tartare, et le royaume de
Pluton , ou d'yidcs. Les expressions des poetes grecs et
latins, qui eioient les theologiens du paganisme, s'accor-
dent parf'aitement sur ce point avec cellcs do rEcrilurc.
Les pcres uieilcnt I'enfer les uns sous la terre ^, les autres
au fond des abiines , et les autres hors de la terrc ^ et dans
CO qu'ils appellent les lenebres exlerieares ; ce qui etoit,
suivant I'idee de ceux. qui ne croyoient pas que le soleil
tournat aulour de la lerre, la meme chose que les anti-
podes, ou Ton ne voyoit, scion eux , jamais de lumiere.
Expressions La terre, ainsi fondee , dcmeure immobile et inebran-
dcrEcriiure lable. Une race passe , et line autre race vient , dit rEccle-
sur !a stahiliie sias»e ; mais la lerre demeure toujqurs Jerme'^ . Et le Psalraistc
a crre. ^|j^ . 11 a fonde la terre sur ses bases, et elle he sera jamais
ebrardee^ . Et ailleurs : Voiis avez njjermila lerre , et elle de-
meure immobile^'. Si la terre tremble quelquefois, c'est le
Seigneur qui la fait trcmfjler par sa colere. 11 la regartlc
dans sa fureur et elle s'etVraie; elle s'agite et elle se fond
en quelque sortc en sa presence'^. C'est ce que dit le Psal-
miste : La terre trembla a la vue du Seigneur , a la vue du
Dieu de Jacob. Et ailleurs : II regarde la lerre , et elle trem-
ble ^. Et encore : Que la terre soil emue en sa presence ; car il
I'a afjermie , en sorle quelle ne sera point ebranlee^. Et Jere-
mie : Oest le seigneur qui a affenni la lerre par sa sagesse ^'*.
Et le cantique de la mere de Samuel : C'est au Seigneur
quappartiemient les solides Jondemens de la ierre ; et il a mis
sur eux le monde^^ .
LesIIebreux Lcs Hebreux etant dans ces sentiinens n'avoicnt garde
considcroieni Je croire qu il y eiat des antipodes, ni que la terre fut
la terre roude , el (luc le soleil et la lune tournassent aulour d'ellc.
comme nne
"^ Prov.vk. iS. XXI. ifi. Isai. xxvi. i\. Morientes non fi^ant, giganies
non resurgaiit. (Hebr. Mortuinon invent, giganies non resurgent. ) Ps.
Lxxxvii. 1 1. Numquid nwrluis fades miiabiiia? aiit medici suscilabunl?
(Hebr. autgiganles resurgent?) — ^ f^'tde Aug. Beiract. Z. ii. c. 4- — ^ S.
Cluysosl. Homil. 3i. inEp. ad Rom. On'gen. tract. 33. in MntOi. — ^Eccl.
I. 4. Terra aulein in ailernum (Hebr. liu. in seculuin) stat. — ' Psalm, cm.
5. Qui fundasti teiTam super stabililalem suam : non inclinabitur in seen-
turn seculi. (Hebr. Quifundasaierram super bases suas : non dimo\'ebilur
in seculum el cevuin.) — '•Psalm, cxviri. go. — " Psalm, cxiir. 7. ud facie.
Domini, mota est (Hebr. contremuii) terra. — " Psalm, cm. 32. Quirespicit
terram, etfacit earn tremere. — [llahr. et tremii). — ^ t. Par. xvi. 3o. Ps.
vcv. 9. — ^°Jerem. x. 12. li. i5. — **i.Reg.n. 8. Domini enim suntcar-
dines lerrce. (Hebr. alitor, solidajimdamenta terra;.)
La terre, suivant leur systeme, ii'avait qu'une surface surface plate,
plate, a i'exception des monlagnes qui s'elevent d'espace p^endue sur
en espacc , et qui y causcnt quelque incijalite. Dans The- ""'''
hren, la terre n'cst jamais appclee du nora de boule, ni
d'aucun autre qui ait rapport a ceu.\ que les Latins em-
pWie.nt, Old is et globus. Le mot hebreu Vzn ihehel , qui est
ordinairement traduit par orbis , signific propremenl le
melange , ou I'assemblage des creatures terrcstres; et dans
I'original nous lisons en quelques endroifs que la terre est
elenduesur les eaux, commele metal qu'ou elend a coups
de marteau sur Tenclume; par exemple, Isaic dit : //
ete7t(i la terre avec lout ce quelle produit^. Et le Psalmiste :
// elend la terre sur les eaux^. Dans ces passages, c'est le
mot hebreu 'jn-\ d'oii derive celui de jj'pT qui est tra-
duit par le firmament ; (\e maniere que Ion pourroit dire
en quelque sens que la terre est a I'egard des eaux infe-
rieures ce qu'est le firmament a I'egard des eaux supe-
rieures. De meme que celui-ci sert comme de digue aux
eaux superieures, et les empeche de tomber sur la terre ;
de meme la terre empeche les eaux sur lesquelles clle nage
de se repandre , et de plonger I'univers dans I'ancieu
chaos. Nous aurous lieu de rapporter encore d'autres pas-
sages, qui justifient que e'etoit la I'idee des anciens He-
breux.
Nous ne remarquons rien de bieti distinct sur la figure Les Hebreus
de la terre. On ne voit pas bien s'ils la crovoient ronde ou croyoicnt-ils
carree. Quelquefois ils semblent dire qu'elle est carree : '^ terre ronde
Le Seigneur appellera ses elus des qualre vents ^ . Saint Jean
dit qu'il vit qualre anges aux quatre coins de la terre*, et
que Satan sortira de sa prison pour seduire les nations qui
sont aux quatre coins de la terre ^. Et David parlant de
Salomon figure du Messie , qui devoit eteudre sa domina-
tion sur toute la terre , s'exprime ainsi : Jl dcmiiura depuis
une vier jusqu'd V autre , et depuis lejleuve jusqu'aux exlremi-
les du viondc'^. lis concevoient la mer Mediterranee a I'oc-
cident, et la mer Caspienne ou le Pont-Euxin a I'orient;
voila les deux mers : I'Euphrate au nord,car TEcriture" le
met ordinairement de ce c6te-la, el rextremile du raonde
•/sai. XLu. 5. Firmans (Hebr. Expandens) terram, et qua germinant ex
ea. — - Psal. cxxxv. 6. QuiJirmavu[^t:hT. expandh) lemiin super aquas.
— ^Matth.wiv. 3i. — *^p0c. Tii. i. — ^ Apoc.s.'L. 7. — ^ Ps. lxxi. 3. —
^ Jcrem. i. i3, lu. la. 18. XLvn. 2. etpassim.
a3. utj
450 DISSERTATION
aux confins tie I'Arabie heureuse sur TOc^an. Tout cela in-
sinue que la terre eloit consideree comme presque carree;
mais nous allons voir d'aulres expressions qui pourront
nous donner un plus grand jour sur cela. II est certain que
les anciens geographes ' ont cru la lerre habitable beau-
coup plus longue que large; c'est-a-dire qu'ils croyoient
quelle s'etendoit beaucoup plus de I'orient a i'occident ,
que du septentrion au midi. lis en parloient suivant ce qui
leur en etoitconnu.
ARTICLE III.
Dc la mer, ct dc loutes les eaax qui sorlent de la terre.
«^ysi6mc dcs L.v mer envcloppoit la terre de toutes parts, de maniere
Hebreux lou- que celle-ci n'eloit que comme une ile tres vaste qui etoit
chant la siiua- jq^^ environnee et touts penetree d'eaux , qui flottoit sur
cet element, et y etoit arretee par la toute-puissance du
Seigneur. La mer avoit pourboniesd'un cote la terre que
nous habitons, et de I'autre une autre tevre sur laquelle le
ciel portoitpar ses extremite;:. Au moins, c'est ce qui pa-
roitpar quelques passages de I'Ecriture. Par exemple, la
Sagesse dil : J'efois avcc liii lorsqiiil metloit un cercle , ou
une ligne de circonvallalion, a I'abirnc'^. Et Job : II a mis
un cercle- autourcles eaux^ . II les a comme ^nfermees par
une ligne tirec au compas. Et ailleurs': C'est le Seigneur
qui a mis des barrieres a la mer, en lui disant : Vousvien-
drezjusqu'ici, c'est-a-dire jusqu'au rivage, elvous n'irezpas
plus avanl , cL Id vous briserez I'orgueil de vos Jlols^ ; ex-
pressions qui se trouvent repetees en plusieurs autres
endroits de TEcriture^. Voila done, ce semble, deux
limites oudeux termesdanslesquelles la mer est resserree :
' Slrabo, I. II. p. 79- Dionys. Periegei. Cicero, Soma. Scipionis. —
* Pro\'. viii. 27 . Qiiando ceHa lege etgjro vallabat abyssos. (Hebr. Quando
descrilebaL c ire iilum super fnciem abyssi.) — ^Job. xxvi. 10. Terminum
circunidedit acjuis. (Hebr. Descripsit circnlum super faciem acjuarum.)
— * Job. xxxYii'. 10. I r. — ' Pi,tt,l. xxxii. 7. Prov. viii. 29. Jerem. v.
3 2. etc.
SLR L£ SVSTEME DV MONDE. 45 I
1 un intcrieur, c'est la lerre que nous hdbitons; ct i'aulre
extericur, qui est une terre inconnue el inaccessible aux
niortels, ct clans laquelle Ics bieuheureux menent apres
leur niort unc vie plcine dc dclices. Nous parlous suivant
Topinion dcs e^scnicns, rapporlec par Josephe\ qui con-
firme en cela le sysleme que nous venous de proposer. C'est
I'idee que les anciens s'en ctoient formee, comme on Ic
voit dans Ic moine Cosnie I'Egyptien^. Les nonis de cercle,
de compas , de ligne , de circonvallalion , que TEcriture
emploie pour marquer les bornes de la mer, nous font
croire que les Hebreux crovoient la terre ronde , ou a peu
pres.
C'est par une suite de cette idee qu'ils disoient par hy-
perbole d'un prince dont Tcmpire devoit etre tres etendu,
qu'il domincroit d'une mer a I'autre : Dominabitiir cL mart
nsque ad mare^ -^ c'esl-a-dire par loute la terre, depuis un
bord de I'Ocean jusqu'a I'autre. De la vient aussi que les
exlrimiles de la. mer se mettent pour tout le plus loin oii un
homrae puisse allcr. Sije prends les ailes de laurorc , et qut
faille habiter a VcxirlmiU de la mer, ce sera votrs main qui
vi'ycotidiu'ra*. El pour marquer que les pluies et les nues
vienncnl de la mer, ils disent que le Seigneur elcve les nues
dt I'cxlremite de la lerre'", e'esL-a-dire qu'il les eleve de la
mer, qui borne de tous coles la terre. Moise^, decrivant
I'etat ou etoit la terre au commenceraentdu nionde, nous
dii que I'abime envcloppoit toule la icrre ; et le Psalmistc'j
que les eaux couvroienl toutc la terre. comme un man-
teau couvre I'homme. Lcrsquc le Seigneur voulut faire pa-
roilre I'element aride , il ordonna que les eaux qui etoient
repandues sur toule sa surface , a une tres grande hauteur,
se reiirassent dans les abiraes^; de maniere que la terre
parut tout dim coup, comme ces iles que I'on a vues
quelqucfois s'elever du fond de la mer, et se raontrer sur
I'eau.
Les Hebreux crovoient aussi que les fonlaines,lesfleuves, Srsit-meJes
elgenera!emenitoulesleseauxquisortenldelalcrre,ouqui ^''^""^"^ 'o«i-
1.11 , .'., , • * cliant les fon-
coulent dans les canaux des rivieres ou desruisseaux, ve- y^^^^ les
noient de la mer'* : Tousles fleuves cnlrent dans la mer, etelle flcuves, et
' Joseph, de Bella jitd. I. ii. c. ',.p. 7 S3. — - Cosmos Mg^ptius, I. i\.
p. 186. et ieq. — ^ Psalm, lxxi. 8. Fide Amoa^ viii. la. Mich. tii. la.
Zach. IX. 10. — * Psalin. cxxxviii. 9. Si sumjisero pennas meas diluculo
{Uehr. pennas auroree), ethahiUu'ero, etc. — ' Ps. cwi-w.";. Jerem x. i3.
— * Genes. 1. 2. — ' Ps. cm. 6. — * Genes. 1. 5. 10. — ' Ecde. 1. 7.
45a
DISSERTATION
loiiie* J<;s fic regofgepoml; lesrivUresreLournent aulieu d'oii elks sontsor-
nui qui so < - ^^^^ ^^c^ qu'elles CO ulenl de no uvea u . C'esl par un effel de la science
Jerro, ^^^ beigneur, dit Salomon , que les eaux de I abime se rom-
penl el viennent sourdre sur la terre. Jacob en donnnnt sa
(lernicre benediction a Joseph^jlui ?,o\x\idi\{.c les benedic-
fions du cicl d'en-haut , c'esl-a-dire les phiies et les rosees ;
el les bentdictions deVabtme qui est couche par-dessous , c'est-
a-dire I'abondance des eaux des sources , qui viennent
toules de la mer, sur laquelle la lerre surnage, comme
on I'a dit ci-dcvant. Moise repete les memos termes^ en
benissanl la Iribu de Joseph , peu avant sa niort. Lorsqu'il
decrit le deluge *, il dit que les calaracles du del s'ouvrirent,
el que toules les sources du grand abime se romp irenl, en sorle
que les eaux du ciel tombant avec une abondance prodi-
gieuse et celles de la mersortant avccinipetuosite du fond
dela terre, comme un fleuve qui rompt ses digues, on vit
bientot la terre habitable abimee sous les eaux. Lorsque
le deluge cessa ^ , Dieu ferma ses sources, et empecha
que les eaux de I'abime ne continuassent a briser leurs
digues.
Remarque Suivant cetle idee, on ne doit ])as s'elonner qu'aujour-
Ei\r la source d'hui on ne irouve plus les qualre fleuves du paradis ler-
desquatre reslre "^ au meme lieu, el sortant d'une meme source,
ileuves du pa- . i i 'i r^' . ^ » -i i ' '
radis terrcs- comme avant le deluge. L est que, dans ce terrible eve-
tre. nemcnt, les sources furent rompues, suivant I'expression
de Moise, les terres s^alCaisserenl, les eaux s'ouvrirent de
nouvelles routes, le cours des fleuves fut derange, leurs
csnaux remplis,, leurs sources changees. Et lorsqu'apres le
deluge le Seigneur iernia ces sources, et ne laissa plus
couler qu'autant d'eau qu'il en falloit pour humecter la
terre, les sources ancienncs ne se trouverent plus en la
meme place, mais dans une distance considerable de leur
anciernie issue. Nous n'examiuons point ici la verite ou la
faussele de I'hypolhese de Moise: mais il suffit, pour veri-
fier ce qu'il dit de la disposition primitive de ces quatre
fleuves, que depuis le deluge on remarque encore leurs
quatre sources dans le meme pays qu'autrefois, el dans
' I'^•o^'. IK. 20. Sapient/a illius crupetunt abyssi. (Hebr. Scienlia tilt us
scissi sunt abyssi). — * Genes, xlix. i5. Benedicdoiiibus abyssi jacentis
cfeori«/w. (Hebr. aliter, desubier.) — ^Deul. xxxiu. i3. Aicjue abysso subja-
cente [Hahr. jaceiiLe desubier.) — * Genes, vii. 11. — ' Geues.ym. 2. — * Ge-
nes. II. 10. et serj/e/.\oyez la Dissertation sur le paradis terrestre, torn. i"^.
I
BUK LE SYST^ME Dt MO>DE. 453
une distance qui n'cst pas fort grande, si Ton fait attention
al'extr^me renversement que cette inondationadu causer
dans toute la terre. Quand les eau\ no viendroient pas
immediatementdelaraer,commelecroYoientlesHebreux,
on ne pent nier, sans dementir Moise, qu'alors les sources
des rivieres et des fleuves ne se soient rompues; et la chose
ne pouvoit arriver aulreraent, apres tant de pluies qui
etoient tombees. Les souteriains, etant irop remplis, re-
gorgerent sans doute, s'ouvrirent de nouvelles issues, et
en supprimerenl beaucoup d'anciennes. C'en est autant
qu'il en faut pour juslifier ce que dit Moise, et pour accor-
der son recit, en parlant de ce qui etoit avant le deluge,
avec ce que nous voyons aujourd'hui.
Tous les pavs ou Ton ne pouvoit aller que par mer Ce que les
etoient compri's par les Hebreux sous le nom Allies a'^^ Hebreux en-
nations. lis regardoient la tcrre conime un tres vasle con- i^ nom d'ile*.
tinent , qui comprenoit divers fleuves et divers lacs, qu'ils
appeloient aussi mers. Mais dans la grande mer etoient re-
pandues differentes iles , separees de la terre de tout cote.
Ce que Ton dit communement, que dans leur langage le
nom diile se prend pour tous les pays marilimes, n'est
point vrai dans toute la rigueur. Us avoient la meme no
tion A'lle que nous : mais corame ils connoissoient fort
peu la geographic , et qu'ils ne voyageoient que tres rare-
ment par mer, il est arrive quelquefois qu'ils ont donne
le nom d'ile a des pays maritimes qu'ils croyoient separes
de leur continent , f)arce qu'ils n'y alloient que par mer.
Par exemple, ils disent que les descendans de Javan peu-
plerent les iles des nations ^ , c'cst-a-dire I'Asie mineure ,
les lies de I'Archipel , le Peloponese. Et ailleui's-, ils
donnent le nom A' He de Cethim a la Macedoine , et celui
da lie d^Elisa ^ a I'Elide dans le Peloponese. C'est une faute
qui leur est tres pardonnable; les anciens en ont fait de
pareilles et de bien plus grandes en maliere de geographic,
et cela dans des temps beaucoup plus eclaires que ne I'e-
toient ceux oii ecrivoient les auteurs sacres , et parmi des
peuples bien plus polls et plus instruits que ne pouvoient
etre les Hebreux. S'il y a de I'erreur dans ces expressions,
elle est toute sur Ic compte du people, et nullement sur
celui de I'ec'rivain, qui a du se proporlionner a son lecteur
et a son auditeur, pour se rendre inlcliigible.
' Gf/i«, X. 5. — ^Jerem. ii. lo. Isai, xxiir. i. la. — ' Ezech. xxtii. -.
k
4i4 I)ISSEUTATIO>
ARTICLE IV.
Dos cicus.
LesHebreux Les Hebreux reconnoissenl trois cieux divers, et d'unc
reconnois- elevation inegale. Le premier et le moins eleve estl'air, ou
soient trois yolcnt les oiseaux du cieP , et ou sont les nues , qui re-
cieux diTers. , , , ^. i^ r j
pandent les eaux sur la terre. C est la que sc torment les
vapeurs et la rosee , suivant leur opinion. Le second ciel,
superieur au premier, est le firmament, dans lequel sont
comme enchassees les etoiles , et ou ie soleil et la June ont
leur route marquee par les ordres du Tout-Puissant. Au-
dessusdu firmament sont les eaux superieures, dont on par-
lera dans la suite. Enfin, le troisieme ciel, et le plus eleve
de tous J est ^elui ou reside la majeste du Tres-Haut ^.
C'est la ou saint Paul fut ravi , et ou il enlendit des choses
qu'il n'est pas perrais a Thomme de pubiier ^
Solidlie du L'air est asse./CDnnu, et personne n'ignore que parmi
firmament se- ]q^ Hebi'eux iS ii'ait ^orte le ncra de ciel. Ouant au firma-
lon les an- .. n/r .. ' i a .- • d . '' i •
dens H(5- ment, Moise nous apprend * que Diea I ayant cree, lui
breux; donna le nom de ciel, et y placa le soleil, la lune et les
astres; et qu'il servit h separer les eaux inferieures d'avec
les eaux superieures. L'f.nliquile chrerienne a ele fort par-
tagee sur la nature et les qualiles du firmament, et encore
aujourd'h'ji les comaienlaleurs juifs et chretiens sont sur
ceia assez peu d'accord entre sux. Les uns ^ croient que
c'est comme une glace solide et Ires dure , qui soutient au-
dessus d'elle une prodigieuse quantite d'eaux; d'autres *•
I'ont forme d'une matiere de feu ; d'aulres ' , d'eau simple;
* Genes, i. 26. 28. n. 19. etpassim. — - Ps. cxiii. 24. — ^ 2. Cor. X11.2.
4- — * Genes. 1. 7. 8. — * Joseph. Antiq. I. 1. c. 2. Tov cupavcv toI; oXot;
e7nT;8y,(ii... y-puffraXXovTE TuioiTrr'^a; aurw, x-al vJ-sisv auTOv, zxt uiTw^r, , ex.
Sever. Gabal. Oral. 2. Cyr'dl. Jeros. Calech. 9. No^'al. lib. 11. de Trinit.
cap. 8. Ambi-os. lib. 11. cap. 4. Ilcxaemer. Uicronym. Ep. 82. ad Ocean.
Tlieodoret. c/.ii. in Genes. Mart, f^ict. lib. i, carm. in Genes. Cosm.
Mirypt. l.x. Beda Ilexaemer. Raban. in Genes, i. Honor. Aiiguslod. I.
II. de Imag. mundt. Procop. in Genes. — ^ Hildebert. J^uron. tract. Thtot.
cap. 23. Hugo Viclor. Hil. in Psal. cxxii. et alii. — ' Fide Damascen.
I. u. de Fide, c. 6.
SUR LE STST^ME VV XUNDE. 455
d'aulres ' , de vapeurs, d'air, ou de fumee; d'aulres enont
fail un compose des(juatreelemens; et d'aulres enfin veu-
leut que ce soit un cinquierae elemenl, different des qualre
autres.
Mais loutes les expressions de I'Ecrilure nous persuadent
que les anciens Hebreux croyoient le firmament un corps
Ires solide, et capable de supporter un ires grand poids,
tel qu'est celui des eaux superieurcs dont il est charge. On
pent se le reprecenter comme unc voute extremement vaste
el massive. C'est I'idee qu'en a eue Josephe ^ lorsqu'il dit
que Dicu a enveloppe le ciel de glace. Le mot hebreuv»p"i,
rakt'ah, que Ton a traduil parj^V/W2waj/«?», signifie pro-
prement une plaque de metal etcndueacoups de marteau.
Dans Job ^, les cieux sont compares a un miroir de bronze
batlu au marteau. JsaJc *, suivant la traduction des Sep-
tante, du syriaque et de I arabe, dit que le Seigneur itend
les cieux comme une voulr; et c'est de la que la plupart des
peres ont pris leur idee du firmament. Moise ^ nous dit que
lorsque Dieu voulut envoyer le deluge, il ouvrit les cala-
ractes du ciel, et fit tomberl'eau avec impetuosite; etlors-
qu'on demande que le Seigneur descende du ciel, on le
prie de le rompre : Utinam dirumpcres ccelos, et descenderes!^
Saint Matthicu " et saint Marc ^ disent qu'au bapleme de
Jesus-Christ, les cicux se fendirent sur lui, et qu'on vit
rEsprit-Saint descendre, et se reposer sur sa personne.
II est vrai qu'en quelques endroits on compare les cieux
a une lenle. Le Psalmiste dit : Voiis etendez les cieux comme
une coiirtine^. Et Isale : Void ce que dit le Seigneur, qui cree
les cieux, cl qui les etend^". Et ailleurs: Fous avez ouhlie le
Seigneur qui vous a cree, qui a efendu les cieux, etj'ondi la
terre^^. Et Jeremie: Celui quia cree la terre par sa puissance,
et qui I' a ajfermie par sa sages se, et qui a etendu les cieux par
sa prudence^^ . Et Isaie dit aussi que les cieux se rouleront
^ Baiil. Hi.mil. 3. in Hexaem. Ctrg. Nyss. in Hexaem. Euseb. ptcep.
I. XI. o. 1 6. .^ug. opere imperfecta in Genes, ad litter. Rupert, in Genes.
— * Joseph, lib. i. c. i . uintiq. — ^ Job. xxxvii. i 8. Tujhrtisan. cum eo
fahricatus es ccelos, qui solidissimi quasi cere fusi sunt. (HcLr. Ntimquid
expandisii (quasi malico) cw/w eo ccelos , valklos sicut speculum fusum.)
— * Isai. XL. aa. O otv;ox; w; xouapav nt cusaviv, xal (T'.xrE'va; w; (wr;vTv
xaTcixtlv. — * Genes. \a. ri. — * Isai. hit. i . — ' MaU. in. i6. —
• Marc. I. 10. — ^Psal. cm. 3. — *° Jsai. xm. 5. — *' Isai., hi. i"?. —
•' Jirem. li. i 5.
4oG DISSEKTATIOIS
comme un litre * , lorsque le Seigneur exercera ses ven-
geances. Enfin le passage que nousavons cite auparavant,
et que lesSeptante traduisentpar, // elendles cieux comme
une voute, porle selon I'hebreu^ : // etend les cieux comme
une/oilejine, ou une peau deliee. Mais dans ces passages on
veut simplement relever la puissance infinie du Seigneur,
qui a forme les cieux , ct qui leur a donne leur consistance
etleur elendue, avec aulant de facilile que s'il eut voulu
simplement etendre une tente, ou deplier un linge. Enfin,
lout ce que Ton vient de dire confirme admirablement
I'hypothese qui veut que le firmament soil au-dessus de la
terre en forjue de voute , en sorte que ses extremiles por-
tent sur cettc terre que Ton concevoit au-dela de I'Ocean.
„„^*^1"^ '*^' C'est en effet I'idee que I'Ecriture nous en donne; les
Hebreux en- ^ > •. • j • \ .. > t. .
tendoicnt par extrcmiles du ciel sont marquees comme une distance et
les extremiles uneloignement infini. Quandvous seriez repousses jusqu^ aux
du ciel, extremiles da ciel^je saurai vous enfaire revenir, dit le Sei-
gneur^. Et ailleurs "^j il menace Babylone de lui susciter
des enncmis de tons cotes, et de les appeler contre elle
des extremiles du ciel. Et le Psalmiste ^, decrivant la course
journaliere du soleil, ihl qu'il s'elance comme un geant; il
part d' une cxtremile du ciel, el sa course s'etendjusqu'd V autre
exlremile, et iln'y a personne quipuisse se cacher d sa chaleur.
Job dit : Les colonnes du ciel tremhlent, el sont saisies de
frayeur lorsque le Seigneur fait eclaler sa colere ^. Et I'auteur
de I'Ecclesiastique: Le ciel et le ciel des cieux, Vabime, la
terre, et tout ce qui y est compris, seront ehranles par ses re-
gards; les monlagnes , les coUines, el les fondemens de la !erre„
Ircmbleront de frayeur d son aspect "' . Toutes ces manieres
de parler nous donnent I'idee d'un edifice qui est ebranle
par ses fondemens, et dont I'agilation se repand partout,
et jusqu'aux toils. Le ciel est comme le toit de cet edifice
* /$a/. XXXIV. 4. Complicahimtur (Hebr. Fohe::tur) sicul liber cceli.
— ^ Isai. XL. 22. Qui cxiendit velut iiihilum {Hebr. vehtt conopoeum)
coelos. — ^ Detu. xxx. \. Si ad cardines cceli fiieris dissipatus. (llebr. Si
fuerit de.pulsio tun in exlremo cceloriim.' 1. Esdr. i. (j. Kiiainsi abducti
fucriiis ad exii-ema cceli. (Hebr. Si fuerit depuhio vesira in extrcmo cce-
loruin.) — ''/5a/. XIII. 5. A sumniitale cceli. (Hebr. Ab exlremo coelo-
rum.) — * Ps. xviii. 7. A sumino coelo ( Hebr. Ab exlremo ccehrum )
egressio ejus : el occursus ejus uscjue ad summum ejus. (Hebr. el rwolu-
tio ejus super exirema eorum.) — ^ Job. xxvi. 11. Columnce cceli contrc-
miscunt, eipavent ad nuium ejus. '^Hebr. ab increpalione ejus.) — ^Ercli.
XVI. 18. 19.
sun LE SYSxiMB DU MOMDE. 467
dont la terre porte les colonnes. On fera voir ci-apres que
ces notions n'etoient point particulieres aux Hebreux, et
que plusieurs philosophes les ont concues de meme.
La solidite et rimmobilite des cieux sont des suites des Immobiliio
principes que Ton vient de proposer. Si ce sont des "laces ^es cieux se-
K, *^ ' 1 1. I » • ''11-1 lonlesanciens
d une grandeur et d une durete impenetrable, ils ne peu- Hetreux.
vent etre que tres solides; s'ils sont fondessur la terre qui
est au-dela de I'Ocean, s'ils sont supportes sur des co-
lonnes etablies par la main de Dieu meme, ils ne peu vent
manquer d'etre immobiles et inebranlables. Le Seigneur
par sa prudence a ajfermiles cieux, dit Salomon '; et la Sa-
gesse declare quelle etoit presente lorsque le Tout-Puis-
sant rendoit les cieux fermes et stables ^. Lorsque I'Ecri-
ture veut raarquerunc chose stable, etd'une duree infinie,
elle dit qu'elle durera autant que le ciel. Le Psalmiste
parlant du regne du Messie, sous le symbole de celui de
Salomon, dit que son tro?ie subsistera autanl que le cieP. Et
Moise parlant aux Hebreux : Le Seigneur a promis avec ser-
vunt d vos peres de leur donner cette terre, pour la posseder
aussi long-lemps que le ciel sera aii-dessus de la terre *.
Les eaux superieures qui sont au-dessus du firmament Systemedes
ont beaucoup exerce les anciens et les nouveaux inter- ^*^'"'^"^ *<*""
, * , , , . . I chanties eaux
pretes; les uns ayant pretendu que ce n etoit autre chose superieures.
quelesnues;d'autres, de simples vapeurs^. Mais lesanciens
Hebreux I'entendoient tout simplcment et sans finesse; ils
croyoient qu'il y avoit la de veritablcs eaux, fluides, cou-
lantes, et de meme nature que les eaux sublunaires. Et c'est
eneffetridee qu'en donne I'Erriture, et celle qu'en onteue
la plupart des anciens peres *". Moise ' nous dit que c'est de
la que fondirent les eaux qui inonderent la terre au temps
du deluge, les cataractes du ciel s'etaut ouvertes, et Dieu
ayant rompu les digues de ces immenses reservoirs. Un
abimc appelle un autre ahinu, dit le Psalmiste * ; Tabime des
eaux superieures semble exciter I'abime des eaux infe-
ricures, au bruit des eaux quevous faites tomber. J'exaucerai
* Pfvi'. lit. 19. — ^ Pros', vin. 27. Quando proeparabat (Hebr. stabilie-
bat) coelos. — ' Psal. lxxiviii. 3o. — * Deut. xi. 21 . — * f'lde Aug. de
Genes, ad Liuer. I. 11. c. 5. — * Justin, seu alius, Qui ad Oithodar. qu.
93. Eustach. j4nlioch. in Ilexaem. Basil, liomil iii. in Hexaem. Nyssen.
ill Hexaein. Amlros. in Hexaeni. l.u. c. 3. Severi Gabal. orat. 11. de
creat. Theod qu. 11. in Gen. Pivcop. Beda, Raban. in Genes. Fide et
jdugustin. de Genes, ad lilt. lib. u. c. i. — ''Genes, vii. 1 1. — * Ps. ill 8.
■458 DISSERTATION
hscieux, dit le Seigneur ', el les cieiix exauceront la terre;
les cieux recevront de moi les eaux pour les repandre sur
la terre. J'elois avec lui, dil la Sagesse, lorsqii il ajjermissoil
le del eleve aa-dessus de la terre, et quilforlijioil les sources
de I'ahime ^, c'est-a-dire limmense reservoir des eaux su-
perieures. Ailleurs I'Ecrittfre ^ nous depeint les nues
comme des outres qui se reraplissent a mesure que le fir-
mament s'ouvre et laisse venir ces eaux dans leur capacite.
Lorsque le Seigneur menace con ^Deuple de lui envoyer la
steriiite, il dit qu'il termer? le :el, et que la pluie ne tom-
bera point *; que le ciel sera pour eux un ciel de fer ^. En
un mot, comme I'Ocean est la source de toutes les eaux
inferieures, le firmament est la source de toutes les eaux
superieures.
ATICLE V.
Des astres et des meteores.
Systemedes La vivacite du genie des Hebreux anime dans leurs dis-
Hebreux lou- cours loute la nature; et si Ton prenoit leurs expressions a
chant les as- jg ig^pg qjj diroit qu'ils consideroient le soleil et la lune
tres. 1 A ^. , . ,,. . ^1
comme des etres animes et inlelligens, qui annonccntla
grandeur de Dieu, et dont la voix se fait entendre par
toule la terre, et jusqu'aux extremites du monde*"; comme
des etres qui connoissent leur route, et le temps de leur
lever et de leur coucher ''; qui obeissent aux ordres du
Seigneur; quis'avancent, qui s'arretent, qui retrogradent,
des qu'il le leur ordonne *; qui ss couvrent de tenebres en
plein jour ^, et qui retirent leur lumisre au dedans d'eux-
*Osee, II. 21. — *jP7W. vrii. 27. Quando cethera fii-mabat sursiim,
ctlihrabatfontes cequarum. (Hebr. et roborabat fonies abyssi.) — ^'/o*.
xxxviti. 37. Quis enarrabu coelorum ralionem? el concentum cceli quis
dormiT-e faciei? {Hebr. ']uxta quosdam : Quis dinumerabit nitbes sapienlia?
et aires cceli quis dec umbere faciei?) — * 3. Reg. via. 35. —^ Le\'il.
XXVI. 19. — ^ Psal. XYiii. 5. — ' Ps. cm. 19. — ^ Jos. x. 12. i3.
Habac. 111. ir. 4. Reg. xx. y. to. 11. Isai. xxxviii. 8. — ' Jmot. Tin. 9,
Jerem. xv. 9. etc.
SLR LE SYSlfcMF. DL" MO.^DE. i5g
meines, aussil6tque le Tout-Puissant se met en colcre ';
cnfm CCS deux astres sont representes comme le roi et la
reine du ciel *, donl I'un preside au jour, el I'aulre a la
nuit, el excrccntleur domination sur ies aulres astres, ap-
yclvs dans le style des Hebreux I'armcc da cicP . Mais toules
ces expressions sont des metapliorcs donl on ne pcutrien
conclurc touchanl I'idee simple et naturelle que Ies He- ^
breux avoient de lous ces astres. lis ne Ies supposoient
point reellement animes; mais ils supposoient que le so-
leil et la lune etoient reellemeut Tun et I'autre dans un
mouvement continucl pour ailcr del'orient a I'occident,
et de roccident a Torient.
Nous ne trouvons pas dans I'Ecriture un systeme bien Sysiemedes
marque, pour la raaniere dent ie soleil relourne de I'occi- Hebreux tou-
dent a Torient: et Ies anciens ont eu sur cela des opinions ^'^° .. ,^
, . , . r _ course du so-
assez sm2;uheres, que nous exposerons ci-apres. \ oici ce igii.
que I'Ecriture nous en dit: Les cieux annoncent la gloire de
Dieu — Le jour porte I'ordre au jour; el la nuit le declare d
la nuit. Leiir voix se Jail entendre jasquaux exlremiles da
monde; il Ies fait servir dc lenle au soleil. Ccl aslre parott
corimc un epoux qui sort de sa chamhre nuptiale; il s'elance
plcin (Tardcur comme ungeantpourfournirsacarriere. II part
(fune extrcmiU du riel, .:l sa course s'elend jusqu'd I'autre
cxlrtniite; cl ilnij a percoTtne qui puissc se cachcr a sa cha-
Icur *. Le sage dans I'Ecclesiasle nous dit quelque chose
de plus expres : Le soleil se leve et se couche; et il relourne
lout es souffle a son lieu oil il se live: il ra vers Ic midi, el il
relourne vers le septenlrion ^. Salomon marque ici deux
cboses; la premiere, le mouvement diurne et quotidien du
soleil de I'orient a I'occident, et son retour de I'occident
a I'orient : Use leve el se couche; el il relourne loul essouf/le d
son lieu oil il se leve. La seconde est le mouvement annuel
du soleil d'un tropique a I'aulre, dans Ies differens signes
du zodiaque; c'est ce que Salomon exprime par ces mots:
// va au midi, et il lourne vers le scplailrion. \pres avoir
parcouru Ics signes qui sont au midi, il retournc vers ceux
• Joel. II. lo. m. i5. — * Genes i. i6. Ps. cxxxt. 8. i). — ^ 4. Reg. itii.
16. XXI. 3. 5. xxiii. 4. 5. 2. Par. xxxiii. 3. Isai. xxxix. 4. Jei-etn. viii. 2.
XIX. I 3. — * Psalm, xviii. 5. 6. In sole posuit tabemaculuni sttum. ^Hebr.
Soli posuit tabemaculuni in eis.) Et ipse tairujua'n sponsus, etc. — * Eccle.
1. 5. 6. Oritur sol et occidii , et ad Lcum suuni revertitur : ilitfite renas-
ceiis, gjrratper meridiem, etfleclitur ad aquilonem (Hcbr. Oriiur sol, ei
occidii sol, et ad locum suum anhelat uii oritur : vadit ad meridiem , et
Jleciiiur aquilonem.)
46o DlSSEHTATIOIt
qui sont au septentrion, et fait ce niouvemcnt par une cir-
culation continucUe. Le mouvement du soleil de rorient a
I'occident est sensible, de meme que son mouvement du
midi au septentrion; mais la difficulte consiste a expliquer
le retour de roccident a {'orient.
Les anciens avoient sur cela deux systemes ; le premier,
que le soleil, arrivant a I'occident, se plongeoit dans la
mer , et y reparoit, par la fratcheur et I'humidite de cet
element , I'epuisement qu'il avoit souffert durant tout le
jour '. De la il se rendoit au lieu de son lever, par des
routes inconnues aux hommes. Le second systeme etoit
que le soleil etant arrive a I'occident , y rencontroit du
cote du midi une tres haute montagne , de figure conique,
ou de pomme de pin , autour de laquelle il tournoit pen-
dant la nuit ; en sorte que les jours etoient plus ou moins
longs, suivant que le soleil tournoit autour de I'endroit
ou la montagne etoit plus ou moins epaisse ^. Nous ne
dirons point ce que pensoient les Hebreux sur cela ; peut-
etre meme Salomon vouloit dire que chaque nuit le soleil
parcourt alternativement les parties meridionales et sep-
tentrionales de la terre , pour les eclairer pendant la nuit ,
comme il nous eclaire pendant le jour.
SyBteme des II semble que les Israelites regardoient les eclipses, lant
Hebreux tou- (J^ soleil que de la lune , comme des effets miraculeux , et
chanties '-i i ■ ^ • . n i> *,. i '
Eclipses du so- ^^ ^^ croyoient aussi surnaturelles que 1 arret ou la re-
leileidela trogradation de ces deux astres. Dans Job ^ , Eliu semble
lune. dire que Teclipse est causee par I'interposition de la
main de Dieu enlre nous et I'astre eclipse : // cache avec ses
mains la lumiere. Et ailleurs Job lui-meme dit : Dieu ordonne
au soleil, et le soleil ne se leve point ; il enjerme les etoiles
comme sous le sccau *. Ezechiel ^ parle d'une maniere plus
populaire , lorsqu'il dit que le Seigneur couvre le soleil
d'un nuage , quand il veut nous en derober la vue par une
eclipse. A la mort de Pharaon, roi d'Egypte , toute la na-
ture sera en deuil : Je couvrirai le del, et j'obscurcirai les
etoiles ; je mettrai un nuage sur le soleil , et la lune ne re-
' Homer. Iliad. 0. x. 485.
Ev (5'' ETrea' (oxsavio Xau.7;pbv cpab? viaXtoio.
EXxov vuxTa [j.sXatvav.... etc.
Vide et Iliad. H. Et Strabon. 1. 1. Georg. — * Cosmas Egyplius, I. iv. Cas-
mograph . p . i^^.elseq — ^ Job.xxxn. 3a. — * Job. ix. 7. — ' Ezech.
xxxn. 7.
SUR I.ESYST^ME DU MONIIK. 46 1
pandra poml sa lumiere. Joel ' uuirque clairement en irois
enLlroiis robsciirdsscment du soleil ct dc la lunc , comme
une des plus grandes marques de la colere de Dieu contre
!cs lioninies.
Le tonneirc etoit aussi considere corame un pheuo- Systemedes
mene en quelque sorte surnaturel , et comme un elTet de chantT^tMi^"
la colere tie Dieu. Les Hebreus; lui donncnt toujours le nerre.
iiom de la voix du Seigneur ^. Mon cceur a etc saisi d' effroi ,
r.l s est elancc hors dc sa place , ditEliu dans le iivre de Job ^.
Ecoutcz avcc attention le son terrible de sa voix , et le rugisse-
ment qui sort de sa houthe. II en fait retentir le bruit sous
toule I' ct endue du cicl ; ct il en fait briller la lumiere jusqu aux
extremites de la terre. jlpres la lumiere vient le rugissement
de sa voix ; il tonne cTune voix majestueuse , et sa voix ne
tarde pas a se [aire entendre. II tonne d'unc voix qui remplit
d' admiration ; il fail de grandes choses que nous pouvons com-
prendre. On peut voir lout le psaume xxviii , qui est dans
le sens lilteral une description de la force et'des effets du
tonnerre. La voix du Seigneur sf- fait entendre sur les eaux ;
le Dieu de gloire a tonne : le Seigneur tonne sur les grandes
eaux J c'est-a-dire sur les nuees. La voix du Seigneur se fait
entendre avec force ; la voix du Seigneur se fait entendre avcc
majeste. La voix du Seigneur brise les cedres; le Seigneur
brise les cedres du Liban; il les fait sauter comme de jeunes
taureaux; il fait sauter les montagnes du Liban et de Sir ion
comme les petits des licomes. La voix du Seigneur partage les
flammes de feu; la voix du Seigneur fait trembler le desert ;
le Seigneur fail trembler le desert de Ccules. La voix du Sei-
gneur fait avorter les biches , et elle depouille lesforcts^.
Les eclairs sont desii^nes ordiuaircment sous le nom de Sysicmedes
traits enflammcs et Aefleches du Seigneur. Unfeu s'est allume "•^•^■^"^ *°"~
* Joel. II. lo. 3x.enii. i5. — ' Psal. xviti. t4. xxvni. 3. et seq. Exod.
IX. 23. XX. 1 8. — ' Job. xxxvn. i. et seqq. Hebr. Expavit cor meuin , et
iubsiliil de loco suo. Audite auditionem in terrore vocis ejus, et sonum de
ore illius procedeiuein. Suljtcr oinne coelum einitiet ilium; et lumen illius
super terminos tenw. Post itlud rugiet vox : tonabit z'oce magnficentice
sure, et non lardauit eos, ut audiaiur vox ejus. Tonabit Deus in voce sua
mirabiliter . qui facit magna quce nesciemus. — *Pi. xxviii. 3. et seqq.
(ox Domini super aquas , etc. El commlnuet eas tamquam I'itulum IJ-
hani, el dilectus quemadmodam filius unicornium. ( Hebr. Et subsilire
faciei eas tamquam vitulum; Libanum et Sirion sicutjilium unicornium.)
(ox Domini, etc. et commovebit (Hebr. et concutiet) Dominus, etc. Vox
Donii i pneparaniii cen'os , et revelabit condensa. ( Hebr. Vox Domini
parerej'aciel certas, et denudabit s/li>a3.)
•4^2 DISSERTATION
i'laL.'* ^^'^^ ma/urcur, dit le Seigneur , et il brAlera jusqu'au fond
de I'enjer, Je lirerai conlreeux Louies mesjleches^. Et David :
Le [Seigneur a lonne du haul da del , et le Tres-Haul a fait
entendre sa voix ; il a envoy e ses flcches contre mes ennemis ,
et il les a dissipes ; il a lance ses eclairs , et il a jele le trouble
pamii eux ^. Et en parlant aux pecheurs : Si vous ne vous
convertisscz , il va aiguiser son epee; il a dejd bande son arc ,
et I' a dresse ; il s' est prepare dcs insirumens de mort ; il s'est
fait des flcches contre ceux qui sontardens a me persecuter ^.
Et ailleurs : Seigneur , abaissez vos cieux , el descendez; tou-
chez les montagnes , etelles s'en iront enfamce. Faites eclater
vos eclaiis , et vom les dissiperez; envoyez vos ftiches, et vous
meftrez i< rrcuhle paxmi eux ^.
Systcraedes j^^j^ p'/aics , les Teuts , liv tempete , la ffrele , !'arc-en-
Hebrcux tou- . , ' v • ^ < >
chaniles ciel,nous sont orJniaireroent representes comma cnlre
pluies, les les mains ae Dieu , et ne pairoissent que par ses ordres , et
Tents, la tern- pour pun'ir ou pour secourir les hommes '. Les Hebreux
P le, agreie g'expriment toujours comine si ces phcnomenes, qui ont
ciel_ des causes purement nalurelles , etoicnt aes eltels divins
et roiracvi'eux. JJ eclat des ctoiles est la beaute da del ; d la
parole da Saint , elks se tiennent prdes pour execuler ses or-
dres ,' ei eiles sont infatigables dans Icurs veilles. Considerez
V arc-en-ciei ) et benissez celai qui I' a fail.. Le Seigneur ^ par
son commandcment , fait tout d'un coup parokre Ic neige , il
se hale de lancer ses eclairs pour I' exec alien de ses jugemens.
II ouvre ses Iresors , el ilfait voter les nuages ccmrne des
oiseaux. Par la grandeur de son pouvoir il epaissit les nuies ,
et en fait sortir la grele covfime des pierres. Par un de ses re-
gards il ebranle les montagnes , et par sa volonte ilfait souf-
fler le vent du midi, etc. ". La grele est done , suivant cette
idee , comme des morceaux detaches d'une immense mon-
tagne de glace , a peu pres comme les pierres que Ton ar-
rache de la carriere , ou celles que Ton detache , pour
lancer contre I'ennemi.
^Deu[.%x\it. 2s. 23. — ^ Psal. xvii. i'». i5. FulguTa mulLijAicavit.
[Kehr. jaculalus est.) — ^ Psal. vii. i3. 14. Nisi cotwersi fucralis , gla-
diutn suum vibrabit ( Heltr. acuel) arcuin suum leLendit, etc. — * Psal.
cxLTu. 5. 6. — '^ Fide Psal. cx.xxiv. 7. cxlvii, iG. etserj. Jerem. x. i3. 1,1.
16. — '^ Eccli. xLiii. iG. et secf.In magniludine sua posiiit (gr. voboravit)
nubes, etc
■
SUR LB STST^MBDU MONDE. 463
ARTICLE VI.
Conformity du sentimeDt d« anciens philosophes et des peres avcc le sysleme
des Hcbreux.
- , Svslerae des
Le sysleme du monde , tel que nous venons de le re- anciens sur le
presenter, etoit a peu pres le m^me chez les plus anciens premier prin-
peuples, et parmi les premiers philosophes de la Grcce. cipe des 6tres
Les Pheniciens si Ton s'en rapporte a Sanclioniaton , ou *^°*' *'"
plulot a Porphyre qui nous a produit eel auieur , recon-
noissoient pour principe ou pour premiere matiere des
eires sensibles , le chaos ', ou Ic melange confus des corps
Tun avee I'aulre. Les Indians , au rapport de Megasthene*,
faisoient Teau principe des choses ; mais il y a toute appa-
rence que chez eux, dememe que chez les anciens Grecs ,
I'eau et le chaos etoientle merae ; et cest ainsi que Ion
concilie Homere , Hesiode et Thales. Homere dit ^ que
rOcean est I'origine de toutes choses , et le pere des
dieus et des hommes. Hesiode * dit que le chaos est le
premier des ctres qui aient existe. Enfin Thales ^ a cru
que I'eau etoit !e premier principe materiel des creatures.
Mais Plutarque "' soutient que le chaos des anciens n'etoit
autre que I'eau ; et Moise fait voir clairement la meme
chose des le second verset de la Genese, ou il appelle le
chaos Vabime : Et Unebra erant super Jiaciem abyssi.
La lerre , suivant I'opinion de Thales ' et des stolciens , Systeraedi*
etoit portee sur les eaux comrae un grand vaisseau qui anciens sur
I Euseb. Prcepar. lib. i. c. lo. Ttt* Tt)v oXwv apy^rr* u-ff07:8sT5:i ic'sa ^r,-
'^to$r., xx: ■mvj'j.XTta^r, , x»l yasj 5o).ef 5V ioiZSift^. — ' Megasthen. apud
Strab. I. xv./>. 713. — * Iliad. 14. Oy.-vii-i-t bzLit liWiv xal urrcpa Tr.6uv.
El alibi : Q; -fsvsot; Ttxt-iam Hmxra.'.. Et Orpheus :
Qxtx-ili xoJ.s'u ?r»r£p' a^SioTO"* atUv 60vt*
— * Hesiod. TTieogon. nxvTwv [isv T;jti6i5Ta yac? -^-sveti. — ' Thales apud
Plutarch, deplachis Philosoph. 1. 1. c. 3."ea>.T^ 0 MtXrff'.cc i^yr.-i tuv svtwv
i-ri^KLT-., TO jiJcdp. — * PliiUtrch. lib. Aquane an i3,nis sit utiUor. Tci; sXei- *
(TTci; -j^si ovc(jLay.iv*t 3'cxeI ri 'jJwp rcoTiv riv rp^'niJ {nempe yi'-^) irapi -rh
•fr.<s\t. — ' Thales apud AHstot. I. de mundo, c. i3. Yf:t TrXfc>r»rv tivai aivij-
QWi »ff::ip ^uXev,irrc'. tcivjtcv mpcv. ndt et Metaphytic. I. i. c. 3.
4C4 DlSSERTAllON
les fondemciis flolte sur la nier : Terram lotam subjccto indicans [TudX^^ )
delaierre. hiimore porlari , cl innatare Hac unda sustinetur orhis ,
velul aliquod grande navigium , et grave ^ (lit Sencque ^.
Manilius dit de meme :
Ipsa natal tellus pelagi lustrala corona ,
CingcnLis medium li'^jfuidis nmplexibas oibem-.
Zenon% et apres lui les stoi'ciens, placoient la terre
ferme et immobile au cenlrc du monde , et I'eau oulour
d'elle , ayant avec la terre un centre commun; en sortc
que toute la terre etoit environnee de I'Ocean , et nageoit
sur les eaux. Apres les eaux etoit rair,.qui enveloppoit de
toutes parts ce grand corps. Horaere ^ croyoit de meme
la terre environnee de tous coles par I'Ocean; opinion qui
est adoptee par Strabon qui la rapporte. Seneque le tragi-
que exprime le meme sentiment dans ce vers :
Oceanus claitsitm dum Jluctibus ambie.t orbem. '
Les Perses *" disent que la terre nage dans I'eau ,
conuBC un melon d'eau , c'est-a-dire qu'elle y est enfon-
cee de toute la moitie de sa masse. Saint Pierre dit'' que
la terre est sortie du sein de I'eau, et quelle a sa consistance
au milieu des eaux^ Elle en est penetree , elle y est comma
plongee.
On pourroit rapporfer un nombre d'autoritesbeaucoup
plus grand sur cet article; mais en voiUi autant qu'il en
f'aul. Les Peres ont eu la meme idee de la situation de la
terre. Theodoret , sur ces paroles du psaume, Qui Jirmavit
terram super aquas'^ , tient expressement que la terre se
soulient sur les eaux; et saint Hilaire dit: Terra super
aquas pendulajirmit ale consistil^.
On a remai^que dans le systeme des Hebreux qu'ils don-
noient a la terre certains fondemens qui portoient dans les
eaux. On voit a pen pres la meme chose cliez les philoso-
phes. Xenopbane de Colophon^'', pour se sauver des
• Senec. nai. qucest. I. vi. c. 6. — * Manil. Astronomie. I. iv. — ' Laert.
in Zencne, I. 7. Tr.v -y^v axtv/iTOv cucav. . . . Etposl multa. Micr,^ ttv "ffn
Xi'vTDC'J Xo'f cv E77£xou(7av, ji.e6' iiv tc ufS'wp acpaipost(5'£;, iyjj-i to aurb Xcvrpcv -r,
"vri, oaxi Try -y"«v ev vi^att eivai p-era to ilJtop S^k ixi^a. ea^atpoac'vov. — ^Horner,
apud Strab. I. i. nptircv jasv tco wxsavw TVcpixXuiTTOv oxncz^ eaTiv aTctwryi-j
auTviv. — * Senec. OEdip. act. 2. — ^ Chardin , Voj'age de Perse , torn. 2 .
chap. XI. p. r53. — '2. Pelr. iii. 5. Kai "pi; ij^aTo;, xal ^t' U(5'aTOC ouvs-
OTuxia. — ^ Psal. cxxxv.C. — " Hilar, in I'sal. cxxxv. n. 11. 12. — '" Xeno-
plion apud Aristot. I. i.de ccelo, cap. i3. Auctocv to xaTci Tvi; "p; elvai g«-
■ atv e7v' aTTEtpov auTT,v tppt!J«a6ai Xs-^cvtej, warep Esvooiavr,; 0 KcXcifeovsc;.
I
sun LE SYSTEME Dt MONDE. if. '»
questions cmbarrassantes qu'on lui fornioit sur ce qui
pouvoitsoutenir la lerre sur les caux, disoit qu'elle etoit
posee sur des fondemens inebranlables , et d'unc profon-
deur infinic. AniYimene, Anaxagore el Deniocrite ' ne lui
donnoient point d'aulre fondement que Tairmeme, sur
lequel elle etoit portee.son extreme etendue empechant
quelle ne put cnfoncer. Thales et ses sectateurs en di-
soientde niemede la terreporlee surleseaux.Ils croyoient
que les treniblemens de terre ne venoient que de ce que
la masse de la terre , flottant comrae un vaisseau sur I'O-
cean, etoit de temps en temps ebranlee ou penchee par
I'agitaticn des eaux : Terrarum orhemaqua sustineri et vehi
more navigii , mobilitaleque ejus Jluctuare j (am cum dicitur
trcmere^.
Platon^, Aristote, Empedocle , Anaximandre , et ceux
que nous venons de citer, avec presque tous les anciens ,
croyoient la terre fixe et immobile , aussi bien que les He-
breux. Saint Basile*, et apres lui saint Anibroise^, ne
■voudroient pas que Ton format la question sur quoi la
terre est fondee et arretee : car, ajouient-ils , si vous diles
que e'est sur I'air, on vous demandera comment il se pent
faire que I'air, qui est un corps si mince el si fluide , puisse
soutenir une masse aussi lourde, aussi grande el aussi
massive que la lerre. Si vous dites qu'elle flotte sur I'eau,
on vous lera la meme difficulte. Enfin , si vous lui cberchez
quelque autre londcment plus solide , il faudra savoir quel
il est, ou il est, sur quoi lui-mc'me est appuye, et ainsi a
I'infini. II vaut done mieux mettre des bornes a sa curio-
site, el demeurer dans le silence sur cet article. Ces peres,
comme on le voit, ne douloicnt nullement que la terrene
fut immobile; et s'il eiit t'allu se determiner a lui donner
I'air ou I'eau pour fondement, la plupart^ eloienl pour
I'air preferablementa I'eau, et tous nioient absolument les
antipodes.
On regardoit cette opinion comme insoutenable , et Le systeme
comme dangereuse dans la religion. On peut voir Thaon <^^^ imtipodes
dans Plularquc ", Laclance*, saint Augnstin^, Vepltre du r°a„J^^/
' Apud Arisioi. loco cvaio. — - Scnec. Qittest. natural. I. iii. c. i3. —
^P.ato inTimceo. — ^ Basil, lioniil. i. iiiHeiaemer. — ^Ambros. iiiHexaemer.
jib 1. cap. 6. n. 22. — * ficle Basil, locociiato. JmLros. in Psalm, cxviii.
serm.i 2. Aug. I. xiu. dc Cit>it. c. 18. et I. xvi. c. 9. Beda, denatara re.rvm,
c. ijb. Bruno Si^niac lib. iv. sentent. c. 3. — Tlmarch. lib. de facie orbe
Luncr, p. <)24. — ■* Lactam. Instil, tin. c. i\. — '^Jt/prdecicit. I. xvi.c:y.
25. 3o
4GG DISSERTATION
commeinsou- pape Zacharic a saint Boniface, archeveque de Mayence*,
tenable ct Procope sur la Genese. Saint A.uguslin eroitque quand on
™ dange- avoueroitque la terre soit ronde, il seroit plus convena-
ble de dire que la partie qui est opposee a notre hemi-
sphere est couverte d'eaux, que propre a servir d'habitation
Ji des hommes et ades aniniaux. Quoi de plus ridicule que
le sentiment de ceux qui croient qu'il y a des antipodes?
dit Lactance. Y a-t-il des gens asscz fous pour croire qu'il
y ait des hommes dont la tele soit plus basse que les pieds,
et qu'il y ait un monde oii tout ce qui est droit chez nous
soit suspendu et renverse? Quidilli, qui esse contrarios ves-
ligiis nostris antipodes putanl , num aliquid loquuntur ? An
est Quisquam lam inepfus , qui credal esse homines , quorum
vestigia sint suj/eriora, quam capita? Aut ubi qua apud nos
jacent , inversa pendeant?
Ceux qui croyoient la terre plate, et qui nioient que le
ciel Tenveioppat par dessous, et que le soleil et les autres
aslres fissent le lour de la terre , etoient encore plus eloi-
ges d'admettre des antipodes. Or ce dernier sentiment a
ete fortcommun dans I'anliquite'. Cela se vbit aussi dans
la cosmographie du moinc Cosme% et dans les figures
qu'il a tracees de la terre , et qu'on nous a donnees dans
I'ediiion qu'en a faite le pere de Monlfaucon. lis tenoient
que le ciel et la terre etoient joints ensemble , et ne com-
posoientque comme une voute immense, dont la terre et
la mer etoient comme la base et le pave , et le ciel la voule
et la couverlure. Cette opinion a ete soutenue jusqu'au
quinzieme siecle ; en sorle que Toslat, eveque d'Avila'',
peu d'annees avant la dccouvertede I'Amerique, rejeloit
I'opinion de la rondeur de la terre , comme temeraire, et
comme d'une dangereuse consequence dans la foi. Et ce
* Zachar. Bonifacio, Ep. lo. anno 748. — ^ C/eome/zes KuxXixr? Oswpi'aj,
1. 1. Horat. I. 1. carm. Ode aa. Lucan. I. 9. Pharsal.
Terrarum primain Libyen, nam proxima coeto est ,
XJtprobat. ipse calor.
Sil.Ital.l. 3.
Adjinem coeli medio tenduntur ab orbe
Squalentes cawpi
PUn. I. ir. c. 78. Mihiopes vicini sideris colore torrentur. — ^ Cosmas Mo-
iiach. I. iv.pag. 186. et seqq. t. 2. no\>a collect. Grcecorum PP. f^ide nolas
D. Bern, de Monlfaucon in eundem libr. — * Tostat. in Genes, c. i.
SLR LE SYSTKME Dli MONDE. 4G7
qui est bicn reniarquable , c'est que les peres qui se sont
delerminesacc sentiment no I'ont fait que par respect pour
les divines Ecrilures , ou ils croyoi^nt ie voir clairenient
marque.
La source dcs fonlaines , des fleuves , et generalement Sentimen!
des eau.\ qui se voient sur la terre , est attribuee a I'Ocean ^ ?""["' •
par les anciens pbilosdphes , de menie que par les Hebreux. n\nc des fon-
Plalon* dit que la terre est percee en une infinite d'en- laines, des
droits comme une eponere, en sorte que les eaux sortent fleuves eide
, • 1 •. ^ . 1 i» . »•! toutesleseau;
par certains endroits et rentrent par daulres: qui! va „^„„,
* , .„.,,, y . P ' T ^ qui se voienl
sous la terre une innnite de reservoirs , qui enlerment des jm-ja terre.
eaux de diverscs sorles , les unes chaudes, et les aulres
froides, les unes pures , les autres boueuses. Au centre
de la terre est le Tartare ; c'est le receptacle comniun de
toutes les eaux. C'est la que se decbargent tons les fleuves ,
et c'est de la que leur viennent leurs eaux, comme d'un
reservoir commun. Et comme cet amasprodigieux d'eaux
n'a ni fond ni base sur laquelle il soit appuye , c'est ce qui
produit son mouvement et sa circulation continuelle dans
les Fontaines et dans les fleuves. Pline croit^que la terre,
aride comme elle est par sa nature, lie pourroit subsister
sans ce melange de I'bumide ; et que reciproquement I'eau
qui est un corps fluide et coulant, ne pourroit se soutenir
si elle n'etoit affermie par la terre. Ainsi ces deux elemens
s'embrassent et se souliennent mutuellement; et touie la
masse de la terre est entrecoupee d'une infinite de veines
et de conduits souterrains, par lesquels les eaux coulent a
peu pres comme le sang circule dans le corps humain.
Virgile a exprime la meme cbose par ccs vers :
Speluncisque lacus clauses, lacosque sonanles
Omnia sub maf^na labentia Jlumina terra,
Spectabat dwersa loci's '.
Servius remarque sur cet endroit que ce n'est point la
une fiction poetique , mais une opinion tres ancienne , qui
tiroit son origine de la tbeologie des Egyptiens, d'oii Tha-
' PL:to in Phcedone, p. 1 1 1 . H2. E:; -jip tj-jts (Taprapcj) rb y.awux (rjf-
fc'o'Jfl'.Tc iravTs; oj — oTaaol, ica.i £v to'Jtcj TraXw aavrs; r'.pi'-jar r, $k atTia Esrt
c'iJi fJxffiv TO u-fsovTcuTO. — -Plin. I. 11. c. 65. Cum terra arida et sicca con-
stare per se, et sine humore non posset, nee rursus stare aqua, sine susti-
nenie terra, mutuo complexu junguntur : lute sinus pandcnte, ilia vera per-
meante totam, intra, extra , infra, venis ut vinculis discurrentibus , atejue
ciiam in summis jugis erumpente. — ' Virgil. Georg. iv. v. 364.
468 DrssKm\Tio?(
les avoil pris soascMliincnt, epic TOceari <''foit le principe
de toutes ehoses. Enfhi Homere* s'exprime aussi claire-
meut, et presquc en memes termes que Salomon dans
rEcclesiaste, II cHt que rOcean est la^source tie tousles
fleuves, de toutes les mers, de toutes les^ Fontaines et de
tous les puits.
Sysieme des Quant au svsleme des cieux , nous remarquons dans les
aiiciens tou- \ " , . i « • i »
chant le ciel anciens presque routes les memes idees que nous avons
Yues dans les ecrivains sacres. lis les croyoient solides,
inebranlables , d'une forme de derai-cercle, qui couvroit
la terre par-dessus en maniere de voute.
Qiiceqiiefrelo cava cceruleo corUna recepiat *.
Ces opinions sont si communes dans I'anliquite , qu'on
ne regardoit qu'avec une espece d'insulte et de mepris
ceux qui etoient d'un sentiment contraire. Oil sont ceux
qui pretendcnt que les cieux sont mobiles , et que leur Jorme
est spherique et circulaire? dit saint Jean Chrysostome ;^.
Ce qui a engage quclques anciens dans I'erreur , dit Lac-
tance *, et ce qui leur a fait croire que les astres Caisoient
le tour de la terre, c'est qu'ils voyoient tous les jours le
soleil , la lune et les autres astres se lever et se coucher a
peu pres au meme endroit ; ils en ont infere que la terre
etoit comnie une boule, autour de laqueile ces corps lu-
mineux faisoient chaque jour un ccrcle, ou un tour parfait,
ignorant ia vraie route qu'ils tenoient pour parvenir de
I'occident a I'orient. C'est de la meine source que leur est
venue I'idee des antipodes , s'iinaginant que cette partie
de la terre qui est opposee a la notre etoit peuplee et ha-
bitee comnie celle-ci. Que dirai-je de ces sortes de gens ,
conclutLactance, sinon qu'ayantune fois de fauxprincipes,
ils s'egarent de plus en plus,-et dcfendent des opinions
fausses par de vains prejuges? Pour moi , je pourrois
montrer , par plusieurs raisons, qu'ii est impossible que
le ciel soit au-dessous de la terre : At ego mullis argu^
' Homer. Iliad, xxi.
Kat iraffat x.py;vai, zaA (ppstaxa p-axpoc vaoutji.
— * Ennius. — ' Chrysost. hoinil. 14. in Episl. ad Hebra;os, ethomil. 17. m
tandem. — ^ LacUtnt. Iiistit. I. ni. c. 24.
SUR LE Slbl tMb DU MO^iDE. ^Gq
nuTiLis probare possem , nulla viodo fieri posse ul ccelam terra
sit iit/erius.
L'auteur clu commenlaire sur les Psaumes , aitribue a
saint A.lhanase', n'estpas moins formel. Ecoutons , dit-il ,
ce que le prophete nous enscigne , pour fermer la bouchi*
a ces barbarcs qui , parlant sans preuve , avancenl que le
ciel s'elencl aussi par-cJessous la terre. Le prophete s'elevc
centre eux, lorsqu'il dit : Le Seigneur elcnd le ciel comme
unepeau ^, ou une courting. Qui dit une courtine de tente,
ne dit qu'un demi-cercle , et non une spliere parfaite.
IsaTe ne dit-il pas aussi que le ciel est comme une route , el
que le Seigneur I'e tend comme une tente oil I' on dcmeure^'^
Le ciel ne tourne pas, niais il demeure immobile , connne
dit le prophete : II a arrc'te et fixe le ciel. On peut voir
l'auteur des Questions aux orlhodoxes, sous le nom de
saint Justin *, Severicn de Gabale ^, saint Cesaire ^,
Procope ■' , Diodore de Tharse dans Photius ^ , et Theo-
dore de Mopsueste ^ dans Jean Philoponus , et une infi-
nite d'autres anciens , qui ont cru que les cieux sont en
demi-cercle et comme une voute , au-dcssus et non au- •
dessous de la terre. Eusebe , dans son comnientaire sur les
Psaumes , reconnoil que plusieurs soutiennenL que le
monde est spherique , et concoivent les cieux comme en-
veloppant la terre de toutes parts ; mais dans son com-
mentaire sur Isaie chap, xl, il etablit clairement I'opinion
conlraire. Saint Jerome, sur I'epitre aux Ephesiens "^ ,
traite de stuUiloquium I'opinion de ceux qui croient que
les cieux sont en forme de voute; mais sur le chap, in de
la meme epitre y 1 8, il semble tenir que le ciel n'a pas plus
d'etendue que la terre, quoiqu'il reconnoisse que quel-
ques-uns le croient spherique.
De lout ce qui a etc dit jusqu'a present , il paroit que le Jugement
systeme du monde selon les Hebreux , tel que nous I'avons que Ton doit
expose , a une tres grande conformite avec celui des an- Pp'"'e'^'*"sjs
ciens philosophes ; que cette hypothese est simple, aisee , cjens He-
intelligible , proporlionnec a la portce des peuples , breux, etdes
propre a leur douner une grande idee de la sagesse et du expressions
* Miliarias, in Psal. cm. 3. — * Psal. c.ii. 3. 70. E/.Tc:vtiv t:v :-;7. :-
ta(sv. (i'ifirt. — ' Isai. XI. 22. 70. O ffrraa; oj; xxuapiv to* cO^avov, xa: Sixrii-
va^ wj mcnrry xarcixclv. — * Juslin.qucEst. ad Orthodox, qitcest 93. y4. —
* Severian. Gabal. 01 at. 3. de Civatione. — ® Cesar. Diulo^. i. qucest. 67.
ftgS. — ' Prjcop. in Genes. — * Photius, cod. 223. — ' Philopon. I. iii.
d* mundi opiftcio, cap. 9. 10. — '** Hieron. in Ephes. v. 4. p. 38o. nov^edit.
470 DISSERTATION SVR LE SYSTEME DU MOINDE.
desauteurs pouvoir de Dieu, et a leur inspirer de grands sentimens
sacres confer- j^lg leur propre foiblesse et de leur entiere dependance.
temc. Cost done la plus utile dans le dessein du Saint-Esprit,
qui est de nous conduire a Dieu par la crainte et par
I'amour. C'est la la fin de toutes les Ecritures. Finem
loquendi par iter omnes audiamas : Deum time , ct mandata
ejus observa : hoc est enim omnis homo '. L'erreur dans ces
sortes de choses n'est d'aucune consequence pour I'eter-
nite : c'est pourquoi I'Esprit-Saint n'a pas voulu nous en
inslruire, comme le remarque saint Augustin ^, qui s' ex-
prime ainsi : II faut dire que nos auleurs sacres out su toute
la verite du systeme du monde; mais que I'Esprit-Saint ,
qui parloit par leur bouche , n'a pas juge a propos d'en
instruire les hommes , parce que ce sont des choses qui ne
font rien au salut , et qui n'influent pas a nous rendre plus
justes et meilleurs. Dicendam est hoc de Jigura cceli scisse
auctorcs nostros , quod Veritas habet , sed Spirit urn Dei qui
per ipsos loquebatur , noluisse ista docere homines , nulli sa~
luti profutura.
Et qu'on ne nous disc pas que ce qu'ils enseignent sur
cela etant contraire a la verite et a I'experience , on nc
peut faire aucuu fond sur le reste de leurs discours ; car
sur ces questions de physique, ils n'ont point assure que
les choses fussent telles qu'ils les ont dites ; ils les ont
simpleuient supposees ; ils ont expose , non leur propre
sentiment, mais I'opinion du peuple. II n'y a pas un seul
chapitre dans toute I'Ecriture destine a nous instruire pre-
cisement sur ces matieres, qui sont si indifferentes par
rapport :i notre derniere fin. Oblige-t-on les philosophes
et les theologiens , lorsqu'ils parlent au peuple, de se
servir des memes expressions que dans I'ecole , et dans les
livres composes expres pour expliquer les secrets de la
nature ou les mysleres de la religion? Et si Ton permet
tous les jours aux savans et aux philosophes de sc servir
des expressions conformes aux idees du peuple, pourquoi
ne le permettra-t-on pas a des auteurs qui vouloient se
rendre utiles a plusieurs , et s'exprimer d'une maniere qui
fut intelligible aux plus simples?
* Eccl. XII. t3. — ^ Aug. de Genes, ad litter, lit. 2. c. 9.
DISSEiriATION
SUR LA FIN DU MONDE,
ET SUR l'eTAT UU MONDE APRES LE DERNIER Jt'GEMEKT.
La philosophic a ete parta^ree sur la corruptibihte et la ^ar»ete de
1 . 1 "^ 1 » *^ ^ ••! '. i '» 1 • sentimcns des
duree du monde. Les uns out cru cfu ii etoit etemel , m- j^^g ^^
corruptible \ anipie^; qii'il etoit Dieii nieme \ D'aulres juifs etdes
I'ont cru cree , nouveau , corruptible , perissable *. Les Chreiiens sur
rabbins ^ se sont aussi divises sur celle question. Les caba- la dune du
!• . • . . I I ' • . ' .• monde. Objet
iistes croient tous que le monde perira , et sera aneanli; gj division de
les autrcs rabbins pensent qu'il ne finira jamais; la plu- ^eite Disseria-
part soutiennent qu'il ne finira que pour etre change en tion.
un etat meilleur et plus parfait.
La foi et la religion chrelienne fixent nos doutes et nos
sentimens sur ces grandes questions. Elles nous appren-
nent que le monde, c'est-a-dire la terre et ce qui I'envi-
ronne, Fair et les elemens, doivent un jour finir par le
feu. C'est ce terrible changement qui doit faire le sujet *
de cette Dissertation. Nous y examinerons i" la maniere,
et 2° le temps de la fin du monde; 3" si le monde sera
aneantijou seulement change; et 4", suppose qu'il soit
' fide Philon. I. iivum mundus sh incorrupt ibi'lis. Laert. lib. vn. U%-
vairc; 8i a^ftasTCv i-^o-vKt-'j t«v jciau-cv, xal K>.c'a.v6r,c , xat AvTiTraToo?. —
— - Zeno a pud Laert. I. vii. Ot'. Si/.r'. !Iucv s icaas;, xa.1 /.c-juc&v, xal iu,-
({(•jy//V, xat vccpbv, x*l XpuaiTrrro; croi, xxl A^rc/Ji.o'Jwsi; , xal IlsucwS'uvic;. —
^ Laert. lib. \ii. in Zenone : A3"yc'J(n S'k xcWcv rpt/^w;, aOriv ts thi ©cc'v.
Senec. Ep. 97. Totum hoc quo tenemur, et unum at, et Deus est. ManiL
lib. I.
Qua pateat nnindum divino Numine verti,
Jttque ipsum esse Deum.
— * Sloiciapud Laert. lib.\M. pag. 45 i. kzi<jy.v. Si aurcl;, xxi c6asT5v sivati
70V xc(jai-<, x-z -ftvvT.TOv Tb) ).o"]f<<> Twv Ji' aioSrlffito; vs'joc'vwv, O'jtc ri oipu
^OLZ-i =<rri, jcatt TO SXov, etc. — * fide Menasse-Ben-Israel de Resurrect,
mart. lib. in, c. 4.
472 DISSERTATION
seulenient change , quelle sera sa forme et son etat apres le
jugement dernier.
L'Ecriture nous parle ordinaireraent du monde, non
pas selon ce qu'il est en lui-meme , mais scion ce qu'il pa-
roit anos sens, et selon ce qu'il est a notre egard. La terre
que nous liabitons nous est representee oomme la plus
considerable partie de I'univers , et tout le reste comme
accessoire a la terre et a rhomme. Ainsi quand I'Ecrilure
nous dit que le monde finira , qu'il sera consume par le
leu , qu'il y aura de nouveaux cicux et une nouvelle terre ,
on peut fort bien , sans donner atteinte a. la verile des
livres saints , I'entendre seulement de la terre que nous
babitons, qui est tres souvent dans I'Ecriture, et meme
chcz les auteurs profanes, appelee du nom de monde,
quoique dans la rigueur elle ne fasse qu'une tres petite
partie de I'univers , et du] monde pris dans toule son
etendue '.
ARTICLE PREMIER.
Que le monde finira par le feu.
Texies de I-Es passages qui prouvent que le monde finira , et qu'i!
I'Ecrilure qui finira par le feu , ne sont ni obscurs ni en petit nombre.
prouvent que f^^g cieux se dissiperont comme lafumee , dit Isaie , et la terre
le monde fini- ^.^^ ^y^ ^^ poiissieve , comme un vetement use ^. Et ailleurs :
linira par le Toute la milice da cicl sechera de frayeur ; les cieux se roule-
feu. rant comme un- livre, et toute leur armce, toutes leurs etoiles,
tomheront , comme on voit tomber les feuilles du figuier et de
la vigne ^ Et le Psalmiste : Seigneur , les cieux periront ;
mais pour vous , vous demeurerez rils sont semblables d un
vetement qui s'use; mais pour vous , vous etes toujours le
meme '*. Saint Pierre dit que le jour du Seigneur viendra
comrne un voleur , et c{\xalors les cieux passer ont avec grande
impetuosite : les Siemens se dissoudront par I'ardeur de la
Jlamme; la terre avec tout ce quelle conlient sera consumee
par le feu ^.
* Jug. de Ci\'. Dei, lib. \x. cap. 24. — ^ Isai. li. 6. — ' Isai. xxxiv. 4.
-.—* I'saltn. CI. 37. 28. — * 2. Petri, ni. 10. et setjq.
SLR LA KIN DU MONDt. ilZ
Isaie parle clairement en deux endroits d'un ciel nou-
veau et d'une terra nouvelle : Je vat's crier de nouveaux
cieiix et une terrc nouvelle ; el on ne se souviendra plus des pre-
miers ; iln'en sera plus fail menlion '. C'est a quoi saint Jean
fait allusion dans 1' Apocalypse : Je vis de nouveaux cieux el
une terre nouvelle ; car les premiers cieux et la premiere terre
sont passes , et la mer nest plus ^. jNolre Sauveur parle sou-
vent dans I'Evangile de la consomniation des sitjcles et de
son second avenement ^ ; et saint Paul nous en decrit *
plusieurs circonstances dans ses deux epitres aux Thessa-
Joniciens *.
11 est superflu d'entasser ici des passages des auteurs Cette verity
juifs et Chretiens qui rendent temoignage a cctte verite. estreconnue
Elle fait un des nrincipaux articles de leur crovance et de P^"" '^^ P ;' °"
1 , , 1 -1 'i , ., " wi ' sophes me-
la nutre. Les phiiosophes memes I onl reconnue. Hera- njgg . mais
elite " croyoit que le monde seroit un jour embrase par cette revolu-
les flammes, et quensuite il renaitroit du milieu du feu. tionnesera
Les stoiciens soutinrent dans la suite le meme sentiment ; P,^'' "-o"""^
„. , ,, , , ., lis lepensent,
et Ciceron I a marque d une raaniere tres expresse dans „„ simple ef-
son second livre de la nature des dieux : Ex quo evenlurum fetnaturel.
u,t ad exlremum omnis mundus ignesceret , cum , humore con-
sump to , neque terra all posset, neque remearel aer , cujus
ortus , aqua omni exhausla , esse non posset : ita relinqui
niful prceter ignem ; a quo rursum animanle , ac Deo , re-
novatio mundi Jieret , etc. ^. Lucain "' I'a exprime de
meme, en apostrophant Jules Cesar : II est inutile, o
prince , de s'empresser a bruler ces corps : le temps
\iendra ou ils seront consumes par les flammes, avec le
resle de la terre.
Hos, Ccesar, populos si nunc non usserit ignis,
Uret cum terns, uiet cum gurgine ponti :
Communis mundo superesi rogus.
Et Lucrece^ fait remarquer a Menenius que le monde,
etant compose de trois eleraens aussi contraires que le
sontl'eau, la terre etle feu, sera un jour detruitetrenverse :
' Isai. i,xv. 17. Lxvi. 11. — ^ Jpocal. xxi. i. — '' Matt. x:n. 3(j. xxiv.
3. xxviii. 20. etc. — * r. Thessal. v. i. et seqq. 2. Thessal. 11. r. etseqq.
— -* Simplicius Comment, in Jristot. lib. de coelo, lib. i. c. 9. flpic/E'.Tc;
Si T.'.-i •xvi r.iiiTT^ifjOjl or.fSiTri xcaacv, Ticrk Si ix. — joi; 7.j9i; (rjv.crX'J^ac.i.
TawT/.; Js -rf.; S6jr.; ucrrsssv c'-j-c'vcvro c[ ircwoi.— « Tull. I. 11. de Nat. deo-
rum, n, 1 18.—' Lucan. l.vii. — ' Lucret. I. iy.
A^i DISSERTATION
Tria talia texta
Una dies daha exitio; mulloscjue per annos
Sustentata met moles, et machina mitndi.
Ovide ' parle de I'ancienne tradition des peuples qui
croyoient qu'un jour la terre , la mer et les cieux seroient
enibrases , et que toute la machine du monde seroit prete
a retourner dans son chaos :
Esse quoque in fads reminiscitur adfore tempus.
Quo mare, quo lellus, conrptaque regia coeli
^vdeat, el mundi moles operosa labofet.
Les physiciens et les aslronomes^ trouvent meme dans
la nature des preuves ou du moins des apparences de cette
terrible revolution dont I'univers est menace, lis reraar-
quent dans la terre des derangemens trcs notables ^ et des
preuves sensiblesdela vieillesseetdelacaducite du monde.
Scire dehes senuisse jam mundum , dil saint Cyprien ;72on
illis viribus stare , quibus steterat , nee vigore et robore eo va^
lere , quo ante prcevalebat. Hoc mundas ipse jam loquitur ^ et
occasum sui rerum labentium probalione testatur ^.
Copernic, Joachim Rheetius, Gemma Frisius"*, trouvent
quelesoleiiserapproche tropde la terre. S'il arrivoitsur la
terre desexces de chaleuraussi grands etaussi continusque
I'ont ete les exces du froid que nous avons ressenti dans
les hivers les plus vigoureux, tels que celui de cette annce
i83o , et que les Icux souterrains, que le froid et I'humi-
dite retiennent concentres sous la terre, s'echappassent
comme ils ont fait quelquefois par les monts Etna etVe-
suve, et que, joints auxfcux qui sont sur la terre, ils em-
brasassent les matieres inflammables qui sont repandues
au dehors et au dedans de cet element, bientot on verroit
les flammes dominer sur tout ce qui a vie , et sur tout ce
qui peut leur servir de pature. Omni Jlagranie materia ,.
una igne quidquid nunc ex disposito lucet , ardebit''.
Mais la fin du monde que nous atlendons n'est pas un
* Oiiid. Metamorph. i. — - Columel. lib. i.e. i . de Re rust. Multo jam
memorabiles auccores comperi persuasum habere longo Kvi situ qualitalem
cvcli, staUimque mtilari; eorumque consuhissimum aslrologice professorem
Hipparcum prodidisse iempus fore , quo cardines mundi loco mo^erentur ;
idque etiam noii spernendus auctor rei -rustical Saserna videtur accredi-
disse. — ^ Cyprian, ad Demeirianum. — * f^'ide apud Gint. not. in lib. i.de
Fericrelig. Christ, art. xtlu. pag. 120. — '^ Senec. ad Marciam, versus
/in.
SLU LA FIX Dli MONDE. 476
simple eflet naturel qui depende du concoars des causes
secondes ; c'esl la incrveille du pouvoir do Dieu , qui dans
les lamps marques par sa providence , et lorsque le nombre
de ses elus sera rempli , et que ses desseins sur le genre
hnmain seront accomplis, permetlra que les elemens, dont
riiarmonie et I'union conservent le nionde dans I'etat oil
nous le voyons , entrent en guerre, et causent le renverse-
nient de son propve ouvrage. Alors les crealures qui alien-
dent avec ardeur la manifestation des enjans de Dicu , parce
qu'elUs sont assiijelies malgre elks a la vanite , el n'y demea-
rent soumises qua cau^e de cclui qui les a assujelies, seront
heureusenunl deliirees de eel assujetissement , pour parliciper
d la liberie de la gloire des enjans de Dieu , comme le dit saint
Paul*.
Puis done que, selon saint Pierre , les cieux et la lerre Lembrase-
d^ d present sont reserves pour clre brides par le feu au jour du ment par le-
iu^ement , et deja mine des impies ^ , on demande si ce feu 1"^' '^ monde
•^.-1 • |. ',j • T .• Hnira, precc-
preccdera ou suivra le jugement dernier. Les sentmiens jera-i-il ou
des docteurs sont partages sur cela. Les uns soutiennent suivra-t-il le
qu'il le precedera, d'autres qu'il le suivra ; d'autres pren- jugement der-
nent un milieu , et prelendent qu'il commencera avant ie °"^'"-
jugement dernier, qu'il conlinuera pendant cet intervalle,
et qu'il achevera de consumer le niondc apres que Dieu
aura juge les vivans et les morts. C'estce qu'il faut mon-
trer plus au long.
Pour prouver que le feu precedera le jugement dernier,
on se sert de ce passage du psaume : Le feu marchera de-
lanl lui , el il embrasera de loutes parts ses ennemis. Ses
(clairs onl paru sur la lerre , la lerre les a vus , et en a ele
(branlee. Les nwnlapus se sont fondues comme la cire devant
Ic Seigneur. Les cieux onl annoncc sa justice , el tons les peu-
ples onl vu sa gloire ^. De plus saint Paul dit que le jour du
Seigneur fa-a voir quel est V ouvrage de chacun , parce qu'il
paroilra accompagne de feu, el que le fen mctlra a I'epreuve
V ouvrage de chacun , et fera voir quel il est *. Voila un feu
bien marque qui met a I'epreuve les ceuvres de chaque
personne avant qu'elle paroisse au jugement de Dieu.
Saint Thomas " cite encore ces paroles de I'epltre aux Ro-
mains : Les creatures atlendent avec grand desir la manifes-
tation des enfans de Dieu , parce qu'elles sont assujeties d la
* Jtooi.MU. 19. etseqq. — ^i.PcXtr. iii. -. — ^ Psalm, xori. 3. elseffq. —
* t. Cor. iij. r3. — ' D. Thorn, in 4. dist. \-. qucesl. a. an. 1.
47 G DISSERTATION
V unite , quoique malgre dies , el elks onl I'esperance d'etre
delivrees de eel asservissement a la corruption , pour participer
d la liberie de la gloire des enfans de Dieu *. Ce qui insinuc
que comme les corps des bienlieureux seront renouveles ,
les creatures seront aussi renouvelees ; et cela avant le juge-
ment dernier. Enfin on se sert de cet autre passage : Si
Vouvrage de quelqu'un est hrule , il en soufjrira laperle; toule-
fois il ne laissera pas d'etre sauve , mais cdmme en passant par
lefen'^. 11 faudra done que nosoeuvres soienl eprouvees et
purifiees par le feu, avant que nous puissions aller dans
les airs au-devant de Jesus-Christ, qui viendra pour juger
le monde. Saint Pierre dit que le ciel et la lerre d'aujour-
d'hui sont reserves pour etre emhrases au jour du jugement ,
et de la perle des impies ^. Et saint Paul , que le Seigneur
Jesus se manifestera du ciel avec les anges qui sont les minis-
Ires de sa puissance , lorsqu'il viendra au milieu des Jlammis
se venger de cenx quine connois sent point Dieu ^. De tous ces
passages on conclut que le feu precedera le jugement
dernier; et ce sentiment est suivi par saint Thomas ^,
par le Maltre des Sentences, par Paludanus, Durand,
Major, Richard, Gabriel , Sotus, et plusieurs autres^.
Toutefois saint Augustin a cru le contraire. 11 a pretendu
que le feu ne devoit paroitre qu'aprcs le jugement et la
resurrection des morts. On vcrra , dit-il , premieremenl
Elie, puis la conversion des Juifs, la persecution de I'An-
techrist, I'avenement de Jesus-Christ , la resurrection des
morts , la separation des bons et des mechans , et enfin
I'incendie et le renouvellement du monde ". Et ailleurs ^
il dit qu'apres le jugement le ciel et la terre que nous
voyons ne seront plus , et que Ton verra alors un ciel
nouveau et une terre nouvelle , suivant ces paroles da
saint Jean dans 1' Apocalypse : Je vis un grand trdne blanc ,
el quelqu'un qui y etoit ass is , devant la face duquel le ciel et
la lerre s'enfuirent ^. 11 marque cetle fuile du ciel et de la
terre comme une chose qui doit suivre le jugement :
Per ado quippe judicio , tunc esse desinet hoc ccelum et hcec
terra, quando esse incipiet caelum novum et terra nova. Et
' Rom. viii. ig.etseqq. — * i. Cor. in. i5. — •* 2. Pelr.wi. 7. — * 2.
Thess. I. 7. 8. — ' /). Tliom. in .'>. dist 47. — ® Fide Teiiain in epislol.
ad Hebr, cap. i. difficult. i3, sect. 6. eL Cornel, a Lapide in 2. Petr. ni.
7. — ' -^ug. de Cii'it. lib. xx. c. 3o. n. 5.—- ' Idem de Civit. lib. xx. c. 14.
— • Jpoc XX. It.
StR LA FIN DU MONDE. 477
dans un autre endroit il se lait celte objeclioa ' : Si le
mondc n'cst embrase qu'apres le jugement , et si ce feu
precede la production du ciel nouveau et de la terre nou-
veile , que deviendront, durant cet ineendie general , les
saints rcssuscites avec leurs corps? II repond qu'ils pour-
ronl se retirer dans les parties superieures de I'air, oii ce
feu n'arrivera pas, de nienie qu'au deluge les eaux ne mon-
terent pas plus de quinze coudees au-dessus des plus hautes
montagnes; car leurs corps seront dc telle nature, qu'ils
seront partout, ou ils voudront etre : et d'ailleurs ce feu
qui brulera le monde n'agira point sur des corps incor-
ruplibles et iinmortels : Talia quippe I'lli's inerunt corpora ,
ui illic sint , ubi esse volucrinl; sed nee ignem conjlagra'
lionis illius perlimescent , immortales alque incorruplibiles
facll.
Louis Tena - et Cornelius a Lapide -* , pour concilier
ces deux senlimens, croient que d'abord Dieu alluinera
le feu qui doit embraser le nionde , soit qu'il le fasse sortir
des enfers, selon quelques-uns , ou qu'il le fasse descendre
du ciel, comme autrefois sur Sodome et sur les autres
villes criniinelles, selon d'aulres ; ou enfm qu'il Tallume
sur la terre par le niinistcre des angcs , qui se serviront
des matieres combustibles qui s"y trouvent , comme le
croient communement les scolastiques *. Ce premier feu ,
qui embrasera d'abord toule la superficie dc la terre, et
qui fera raourir tons les honnnes et les animaux *, se re-
pandra par tout le mondc, et n'epargneraque celte partie
de la terre ou le Seigneur exercera son jugement , et qui
sera comme le theatre de sa justice. Apres le jugement,
les parties les plus subiiles de ce feu relournei'ont dans
leur lieu naturel , qui est , dit-on, au-dessus de I'air , dans
la region du feu; et la partie la plus grossiere suivra les
damnes dans I'enfer. Mais il est boa de se souvenir que
tout ce detail est dc I'inventiou des speculatifs et des sco-
lastiques; et il vaut certaincment beaucoup mieux se taire
sur une matiere aussi inconnue que celle-la , que d'en
parler temerairement et au hasard.
^ ' Aug. de Civil. Ii6.x\. cap. tS. — - Tena. insist, ad Hehr. c. i.
difficuh. i3. sect. 7. — * Cornel, in •>-. Pelr. \\\. 7. — ■* AcosUt, el sco-
lasticiapud Tenant, inepist. ad He It r. c. i. dif/icftU. i3. sect. 7. — ' D.
I Thorn, in^t.dist. ',7. vt Bonment. ihuhni. el Les.^. (k Di^-in. atuibul. lib.
x\u. cap. io. *
478 DISSERTATION
Qui son t Plusieurs anciens peres ont enseigne que le feu qui doit
ceux entre enflammer le monde sera rinstrument de la iuslice de
les hoinmes __ . , , •'
quipasseront i^icu sur tous les hommes. fous passeront par ce feu, et
par ce feu, et I'ouvrage de chacun d'eux y sera eprouve. Les justes s'y
comment r6- puritieront de toutes les souillures qui peuvent leur rester
prouveront- jj expicr; en sorte qu'aprcs le dernier jour, il n'y aura plus
de purgaloire. Ceux qui n'auront rien a expier sortiront
de ce feu pliis purs et plus glorieux , comme les metaux les
plus precieux passent par le creuset sans souifrir aucune
diminution ni alteration.
Origene * cr oil qii aprcs la resurrection , nous aurons be-
soin d'un sacrement, pour nous purifier et pour nous laver ,
parce que personne ne ressuscitera sans defaut. Et quel est ce
bapteme qui nous purifiera dans I'autre vie , si ce n'est ce
feu par ou nous passe r on s ? C'est ainsi que I'entend saint
Ambroise ^ apres Origene : Omncs oportet per ignem pro-
bar i , quicumque ad paradisum redire desiderant;.... omnes
oportet trans ire per Jlammas , etc. ^. II croit que ce feu etoit
figure par Tange qui tenoit un glaive etincelant a Ten tree
du paradis terrestrc. On lit dans deux sermons attribues
autrefois a saint Augustin *, que tous les hommes passeront
par le feu apres le jugcment; mais que les flammes , en
quelque sorte raisonnables et eclairees, n'agiront sur nous
qu'autant que le demanderont nos peches : Quanta fuerit
peccati materia , tanta el per trans eundi mora ; quantum exe-
gerit culpa , tantum sibi ex homine vindicabit qucedam Jlam-
THce ralionalis disciplina. Le nieme auteur dit , en parlant
du patriarche Jacob , que Dieu I'a purifie en cc monde de
toutes ses taches , afin qu'en I'autre vie ce feu intelligent
ne trouvat rien a bruler dans lui : Ab ilia omnes maculas'
peccatorum abslersit, ut in eo ignis ille arbiter, quodexureret,
invenire non posset ^.
Saint Hilaire *" parlc en plus d'un endroit de ce feu que
* Origen. in Luc. homil. 14. Vide et homil. 3. in psa.l xxxvi. — -^n
bros. in psalm, xxxvi. num. 26. Vce mihi si opus meum arserit, et laboris
hit jus paliar detrimentum ! Et si saluos faciet Dominus seivos suos , salvi
erimus perjldem ; sic tamen salvi quasi per ignem, et si non exurimur, ta-
men uremur, etc. Vide et inpsalm. cxviu. serm. 3. niim. i4- Etetiam bap-
tisminn inparadisi vestibiilo .^quod antea noneratj sed posteaquam peccato''
exclusus est, coepit esse rhomphcea ignea quam posuit Deus. etc. — ' Am-
bros. in ps. cxMii. senn. 10. n. la. — ^August, serm. oliin.i6.cx homii.
5o. nunc 7.^1. in append, n. 3. — "Serm. olim. 82. detempore, nunc x5. in
append., torn. 5. noi', edit. n. 4. — * Hilar, inpsafm. cxvni. litt. 3. n. ra.
SL'R LA FIN DU MONDE. 470
tous les homines , et les justes meines , doivent subir apres
cetle vie. Qui osera desirer ce jour terrible auquel nous
serons obliges de rendre compte , meme de nos paroles
oiseuses, et auquel nous devons subir ce feu terrible qui
fxpiera nos peches? yin cum ex omni olioso verbo rationem
simus prastiluri , diem judicii concupiscemus , in quo nobis
est Hie indejessus ignis subeundus , etc. ? 11 donne a ce feu le
nom de baptcme *.
Saint Basile * fait aussi mention de ce baptdme de feu ,
qui nous neltoiera de nos simples souillures au jour du ju-
gement : et Lactance^ dit que les bons et les medians pas-
seront par le feu , mais avee cette difference que les bons
n'en souft'riront aucune incommodite ; le feu les epar-
jjnera , leur innocence les meltra a couvert de son ardeur :
Tanta enim virtus est innocenlite , ut ab ea ignis Hie rejugiat
innoxius , qui accepit a Deo hanc potestatem ut impios urat,
justis obtemperet. Les mechans au contraire en seront
brules , sans en etre consumes : le feu en les penetrant
leur rendra autant de leur substance qu'il en otera par
son activite; leur corps renaitra, pour ainsi dire, au mi-
lieu des flammes : Divinus ignis una, cademque vi , alque
potenlia , et cremabit impios , et recreabit : et quantum e cor-
poribus absumet , tantum reponet ; ac sibi ipse at ernum pa-
bulum subministrabit ; quod poeta in vulturcm. Tilyi transtu-
lerunt.
Saint Thomas * , saint Bonaventure ^ , Lessius ^ , et plu-
sieurs aulres, croient que le feu qui preccdera le juge-
ment dernier fera mourir tous les iiommes qui se trouve-
ront alors en vie , lant les bons que les mechans , et qu'il
causera aux uns et aux aulres des douleurs proportionnees
a ce qu'il trouvera en eux de mal et d'imperfections. Les
justes, en qui il n'y aura rien a purifier, n'en sentiront
aucune douleur : les autres en souffriront chacun suivant
ses demerites. En ce sens, rien n'empeche qu'on n'ad-
mette avant le jour du Seigneur un feu qui eprouve et les
personnes et les oeuvres de tous les hommes qui se trouve-
^ In psalm. cx.\\n.luteraZ.i!. !^. — 'Basil, inlsai. n. pag. 124. Tpei?
timv al eirivotai tcu ^a:TTi<7{A*TC;;, wits tcj furrou xaOasKrao;, %%: r. ^li tcG
wveuaaTc; ivafcvvTiOi;, )4a.l t, ev Tt> ■irjfi TJi? xjiosco? |i«ffxvo;, etc. — ^ Lartant.
lib. \\i. de vero Sap. cap. 21. — * D. Thorn, in 4, distinct. 47. — ' Bona-
vent. inl^. distinct. 47. — * Lessius, lib. xiii de divin. atU'ilut. cap. 20.
Videet Cornel, in 2. Petri m. to., et Tenam, in epist. cd Hebr. c. i. dif-
ficult. i3. sect. 7.
sur la duree
du monde.
48o DISSERTATION
ront alors en vie , et meme ceux qui se Iroiiveront dans
le purgatoire. Mais la foi de I'Eglise ne nous permet point
d'y assujetir les bienheureux qui jouissent depuis long-
temps de la beatitude , ni les justcs dont I'innocence est
cntiere.
ARTICLE II. .
Quand le monde finira-l-il?
Opinions des C'est une question que Ton a souvent faite , et que Ton
philosoplies yj'a jamais resolue. Les Egyptiens ' croyoient qu'apres une
revolution d'annees , qu'ils fixoient a trente-six mille cinq
cent vingt-cinq , tous les astres se rencontreroient au
meme point, et qu'alors le monde se renouvelleroit, ou
par un deluge , ou par un embrasement general ; en sortc
que le deluge repondoit en quelque maniere a I'liiver, et
I'embrasement a I'ete de nos. annees ordinaires ^, lis se
figuroient que le monde avoitdeja ete renouveleplus d'unc
fois de cette sorle, et qu'il devoit encore se renouvcler
dans la suite des siecles.
Les stoiciens ^, et avant eux Heraclite d'Ephese, avoient
embrasse ces sentimens. Aristarque, cite dans Censorin,
croyoit que cette revolution etoit de deux mille qualre cent
quatre-vingt-quatre arts; Aretes de Dyrrachium , de cinq
mille cinq cent cinquante-deux ans; Heraclite et Linus , de
mille huit cents, ou de dix-huit mille ans; Dion, de dix
mille huit cent quatre-vingt-qaatre ; Orphee, de cent mille
vingt ans ; Cassandre , de trois millions six cent mille ans.
D'autres enfin ont preiendu que ce retour du ciel et des
astres au meme point etoit infini et impossible. Josephe^
' f'i'Jc, si fjlacet. MeiTsham. Cano?i. /Egjpii, nooz-araaxsuiri, p^g' ^^- ^^■
■ — - jdr-isLot. MeLeor. lib. i. cap. i5. Censorin. de die natali , cap. i8. Est
jircelei-ea annus, quern AHstoteles maximum potius quam magnum appel-
lai, quern solis el lunoi, vagaruinque quinque stcllarum, orbes conjiciunl,
cum ad idem signum, ubi quondam simulfuerunt, u)ia referuntur ; cujus
anni hyems summa eif za.Ta/.).'Jaab;, quam jiostri dilmnum vacant; a'sias
auiem exT^uftiati;, quod est mundi incei,dium. — '^ Or! gen. contra Cels. lib.
V. *a(jl 8'i o\ aTTo zTi; area;, >caTa TT£pto<5'cv, s/tTT'jfWff'.v tcu ttoivtc; "yevEaOat,
/.at i^Tti au-.vi <5'ta!'.o<j[^.r,(jiv Tt&ivx' aTrapaW.a'xT' f/waM. — '"Joieph. aniiq. lib. i
cap. 3. npor,py,>co'70? AiJaacu acanaaov roiv &Xwv e'dsofiaf rev ;.•.£•/ 'xar' lay^ti
TTupi;, Tov Eiepov Si xara fitav xat ttXxOo; 'j(5'aTc;.
SUH LA FIJI DL MOMDE. iSl
semble altribuer a Adam la decouverte dc ces revolu-
tions. II tlit que ce premier homtne ayant pfedit que Ic
nionde periruit deu\ tois, Tuue par I'eau, ct I'autre par
le feu, Ics enlaus de Sulh, pour prevcuir ce malheur,
Hrent graver leurs observations asironomiques et leurs
decouvertes suv deux colonnes, I'unc de briques pour
resister au feu , et I'autre de pierres pour resister a I'eau.
Mais eel autcur ne donne ala grande anncie que six cents ans.
Saint Augustin ' renianjue que Platon et toute son
ecole , aussi bien quOrigenc, etoieut dans cette faussc
persuasion , que divers uiondes sc succederoient les uns
aux aulres. It les refute , en montrant que si le monde , les
homnies, et !es animaux., perissoicnt tons par le feu ou
par lo dtjiuge , il scroit impossible qu'il en revint d'autres ,
a nioins dune creation toute nouvellc, que les philoso-
phes n'auront garde d'admettre dans la nature. Et en effet,
pourquoi delruire toute I'espece des homnics , si elle doit
etre reparee peu de temps apres? Cette revolution conti-
nucUe de divers mondes qui perisssnt, et qui reparoissent
de nouveau, ne nous donne-t-elle pas une certaine idee
d'inconslauce qui ne convient pas a la Divinite? Origene^
empioyoit, pour prouver le sentiment de Ja pluraliie et de
la succession des mondes, ces paroles de I'Ecclesiaste :
Qu'esl-ce qui a ele ? ce qui sera. El quest-ce qui a Ue fait? ce
qui sera Jait. Rien n est noiiveaii sous le soleil. Qui peut dire :
Foici qui est nouveau? Cela a dejd etc dans les siecles qui ont
(teai ant nous ^.
Le rabbin Barhyhia. * dit que les pliilosophes convieu-
nent assez que le monde perira ou sera renouvele apres
un certain nombre d'annecs; mais qu'ils ne sont pas
d'accord sur leur nombre precis; les uns raetlent quatre
millions trois cent vingl mille ans, a la fin desquc's chaquc
cbose doit retourner au premier point de sa creation.
D'autres donnoient au nionde cinquaute-six mille ans,
juaqu'au retour de tous les astres au meme point ou ils
eloient a leur creation. D'autres croyoient que le monde
dureroit irois cent soixantc mille ans; d'autres quarante-
neuf mdie ans; d'autres sept mille ans; anres quoi le
monde relomberoit dans le chaos , puis se retabliroit , et
' -^ug. lib. xn. de Civit. cap. ii et 12. — - Ori^en. Ilipl ipx^v, lib. m.
cap. '2 5. — ^ Eccl. i. 9. — * Bab. jlbrah. BaH>jhiu ; in lib. Megilat. Ha-
megila, npud Menasse-Ben-Israel, de Resurrect, mart. Lb. n. cap. i.
482 DISSERTATION
se retrouveroit au meme etat qu'aiiparavant. ,Ce rabbin
remarque fort bien qu'apparernment ces philosophes
avoient recu de leurs peres quelqne tradition de la fin du
monde, mais que mal a propos ils en rapportoient la cause
au coursdes planetes et dcs astres, dontl'aspectetlemou-
vement n'ont aucune influence sur la duree ni sur la na-
ture des choses d'ici-bas.
En effet, selon les philosophes, le monde devoit clre
renouvele par des causes pureoient nalurelles; comme,
dans nos annees ordinaires , I'ele et I'hiver, le jour et la
nuit , sc succedent naturellement Tun a I'autre. Mais les
Ecritures nous donnent une autre idee de la fm du monde.
Elles nous la reprcsentent comme le moment de la ven-
geance du Seigneur, et comme un jour qui sera precede
et accompagne de toutes les marques de sa colere; jour
inconnu aux hommcs et aux anges memes \ et qui viendra
nous surprendre comme un voleur pendant la nuil ^.
r.es disciples ayant un jour demande a Jesus- Christ quand
arrivcroit la fm du monde , il leur ditque les anges memes
dans le ciel n'en savoient ni le jour ni I'heure; que lui-
meme comme homme I'ignoroit ; nulle creature , quelque
parfaite qu'elle fut , ne pouvant par elle-meme penetrer
dans ce profond mystere , dont le Pere eternel s'est re-
serve la connoissance : De die autem illo vel hora nemo scit,
neque angeli in ccelo , neque Filius , nisi Pater^ .
Tradition ju- Mais ces declarations precises ne regardent proprement
<laique sur la ^^g j^ j^^j. ^^ I'heure de cet evenement : De die illo vel hora
duree du * -^ ^ i • . ,
monde. 'nemo scit ; et plus'.eurs anciens ont pense que, sans con-
tredire a cette parole de Jesus-Christ, on pouvoit con-
jecturer que la duree du monde se trouvei'oit fixee a six
mille ans : savoir , deux mille ans sous I'etat de la simple
nature, deux mille ans sous la loi , et deux mille ans sous
le Messie. Cette opinion est fondee principalement sur
une tradition judaique assez ancienne "* et attribuee a Elie,
non le grand prophete de ce nom , mais un autr« , qui a
vecu cent cinquante-quatre ans apres le retablissemcnt du
temple et le retour de la captivite babylonienne. On lit
dans le Thai mud ^ que le monde durera six mille ans , et qu'il
sera detriiit dans.im; ce que plusieurs rabbins ^ expliquent
' Maiv.xw. 32. — 2 2 Petri lu. lo. Utfur (Gr. addit', in node)—
^ Marc. xin. 2i. — * Gcmar Abod. Zarce ., cap. i. Vide MaU-end. de Jnii-
christo, I. I. cap. 28. agef 3o. — ' Thalmud. trailc Sanhedrinfol. 97 Jvcto.
— * f-^ide Menasse-Benlsracl, l. in. de Besurr. moHiior.j cap ^. p. 371.
SI n L\ FIN DC MONDE. 483
d'un scptieme millenaire , durant lequel le monde retom*
bera dans son ancicn chaos. Apres cela on verra un nou-
veau monde , lequel , apres pareil nombre de six niille an-
nces, rclournera encore dans le chaos; et qu'ainsi , par
une revolution continuelle, on verra plusieurs niondes
paroilre et disparollre, jusqu'apres quarante-neuf mille
ans ; qu'alors ic cicl el la terre, et tout ce qu'ils contien-
nent, seronireduitsauneant. lis tachent de prouver cette
opinion par IKcrilure ; car telle est la melhode des rab-
bins : ils n'avancent rien sans I'appuyer de quelque texte,
bien ou mal allegue. Ils disent done que de meme que le
monde a ele cree en six jours, ainsi le monde durera six
raille ans, parce que, devant Dieu, mille ans ne sont que
commc un jour'. De plus la letlre Akph , qui se prerid
pour niille , se trouve six, ibis dans le premier verset de la
Gencse. Enfin le Seigneur ordonne dans sa loi ^ de cul-
tiver la terre pendant six ans , et de la laisser reposer pen-
dant un an; et qu'au bout de sept semaines d'annees,
c'est-a-dire a la cinquanticme annee , on celebre le jubile.
Les six ans marqucnt les six mille de la duree du monde;
et I'annec du jubile, la dernicre revolution, el I'entier
deperissement de I'miivers. Mais comme le Messie , selon
leur tradition et leur supputation, devoit paroitre ou au
commencement ou enfin dans le cours des deux derniers
millenaires , et que le sixieme est aujourd'hui fort avance,
sans qu'ils voient aucun changement dans leur condi-
tion , ni aucune appaience qu'elle doive devenir meil-
leure dans la suite , les cabalistes en sont venus a rejeter
absolument I'opinion qui ne doune au monde que six
mille ans , et qui croit qu'il finira au bout de ce terme ^.
Quelques peres ont appuye I'opinion qui veut que le Anclenspe-
monde nq dure que six mille ans; et elle a ete renouvelee rcsetnou-
par quelques savans du dernier siecle. Saint Cyprien * , ^^a^auj^""
Lactance ^, saint Arabroise *', saint Jerome ', et saiut c"ae"opinion.
Augustin *, ont suivi ce sentiment , aussi bien que saint
Irenee ^, saint Hilaire ***, saint Gaudence de Bresse '%
' Psalm. Lxxxix. ;.— * Excd. .xxiii. ii. — ^ fide R. 3Ios. de Leon, in
Sepker Harimischal, et alios apud Menasse-Ben- Israel , dc Ptesuir. niurt.
I. III. c. 4- — * Cyprian, ad Fununat. de exhort, ad mnrlj riutn . — ' Lr:ctaiU.
I. VII. c. 14. — * jimbros. in Luc. lib. vit. c. 7. — ' Hieron, ej). ad Cyprian.
— * August, de Civit. I. XX. c. 7. — ' Irenee. lib. r. cap. ult. — *" Hilar.
Canon. 17. in Matth sen cap. 17.^. 693. noi'. edit, f^ide notas CouUuitU
ibidem. — " Gaudent. Brixiens. tract, ro.
484 DISSERTATION
Tautcur des Questions aux orthodoxes , sous le nom de
saint Justin le martyr ' , Victorin sur I'Apocalypse ^ ,
Piaban Maur sur le Dcuteronomi; ^ , Germain archev^que
de Constantinople, Julius Hilarion, saint Isidore et un
tres grand nombre de nouveaux auteurs , cites par Cor-
nelius a Lapidc sur I'Apocalypse, chap, xx, '^. 5. Et cet
autcur soutient que ce sentiment est ties probable,
pourvu touti'fois que Ton ne prenne pas les six mille ans
dans unc precision rigoureuse et malhematiquc, mais
simp'ement dans une acception morale; en sorte que le
monde ne passcra pas le seplieme miilenaire, et n'ira
guere au-deia du sixieme. Bcllarmin *, Genebrard ^,
Feu-ardent *" , et plusieurs autres, paroissent assez favora-
bles a cctle opinion ; du moins ils n'osent ouvertemcnt se
declarer conlrc.
Refutation ]i est vrai que saint Augustin , que Ton cite pour I'opi-
e ams que jjJq,^ aCfirmativc qui lient que le nionde iinira au bout de
res oni fail de '^^^ mule ans , s cxpuque aiUeurs ' assez lortement conlre
cette opinion, la tcmerite de ceux qui ont ose assurer que le monde ne
dureroit que six milic ans , quoiqu'ils sussent que le Sau-
veur a prononce dans I'Evangile que le Pere .seul s'est re-
serve la connoissance de ce dernier jour ^. II craignoit
qu'on n'abusat de cette opiriion, dont en effet les mille-
naires ont abuse. Aretas de Crete, ecrivant sur 1' Apoca-
lypse °, rapporte le sentiment des millenaires , qui
croyoient qu'au bout de six niiUe ans arriveroit la pre-
miere resurrection des seulsjustes; et qu'apres un inter-
valle de raille ans, pendant lequel Jesus-Christ regneroit
avec les saints sur la terre , et les y feroit jouir dun parfait
repos , on verroit la seconde resurrection , qui seroit. la
resurrection generale. Mais Aretas rejette ce sentiment ,
commc n'ayant eie ni rccu ni autorise par I'Eglise. Bcde
en plus d'un endroit le rejette de meme , et le traite de
vaine et frivole opinion ; et il est suivi en cela par un assez
bon nombre de nouveaux auteurs , dont les uns aban-
donnent cette opinion comme denuee de preuves et dau-
torile '", et d'auires la meprisent et la rejettent comme
' Justin, qiicest. "j i . — ^ yictorin. in J/joc. xx. '>. — ^ Raban in Deut.
I. 1. cap. 11. — ■'' Bellarm. I. m. de liomano Pcniif. c. 3. — " Genebr. lib. i.
Chronographicn, pag. 2. — ^ Feu-ardent, notis in S. livnccum. — ' August,
in psalm, lxxxix. — ^ Mauh. xxiv. 36. Act. i. 7. — ^ Andiceas et Aretas in
Apoc. XX. — "* Suarez, torn. 2. disput. 53. sect. 4. dist. 43. f/ucest. 3.
art. 2,
1
SUH LA FIN UL MONDE. 485
absoluiuenl fausse el iusoulenable '. QueUjues-uns sus-
pendent lour jusjement, ct croient qu'on doit allendre de
i'evenement iiieme la decision de cette cjuesiion'. Mais
disons plulot que Ion doit sen tenir a cctle parole de
Jesus-Chrisl : Lc Umps viendra oil tons ccux qui sont dans
les sipulcres erUendronl la voix da Fits de Vhonime ; et alors
ceivv qui aurontfait de bonnes auvrcs sortiront pour ressas-
citer d la vie ; el ceax qui auront fail de mauvaises ceutres sor-
lironl pour ressusciter a Icur condamnalion ^. Cettc parole
prouve invinciblenient que les justes et les medians res-
suscileront tous ensemble ; et qu'ainsi la resurreclion des
Justes, dent Jcsus-Chrlst parle ailleurs ^ , marque seule-
ment rimmorialile glorieuse dont les justes seront alors
revetns , et qui seule distingucra la resurreclion des justes
d'avec la resurreclion des mechans. Si Ton veut lire seu-
lement avec attention et sans prejuge ce que sainl Jean dit
de la premiere resurreclion dans TApocalypse " , on y verra
qu'il ce parie que des anics des saints , animeis; et qu'ainsi
la premiere resurrection dont il parle n'est autre que la
Tie bienbeureuse dans laqucile sont admises les ames des
saints avant la resurrection generale. Le regne de mille ans
dont saint Jean fait mention a pour epoque I enchainement
du dragon '^ ; rencbainenient du dragon a pour cpoquela des-
truction de son regne ct la fin de ses corabals ; la fin de ses
combatset la destruction de son regne ont pour epoque la
deruiere ruine de I'idolairie par la clefaile de Licinius , der-
nier empereurpaien ; le regne de mille ans a done pour epo-
que le regne menie de Constaritin , premier empereur dire-
lien; le regne de mille ans est done le regne tcmporcl de Je-
sus-Cbristsur la lerre en la personne des princes chreliens
depuis Constantin qui fut le premier, il est vrai que ces
mille ans sont revolus ; et le regne de Jesus-Christ subsiste
encore dans la personne des princes chreliens. ^lais il en
resulle seulemeni que cc nombre de mille ans est un nom-
bre complet pour un nombre incomplet; il peut exclure
un second millenaire sans esclure un nombre incomplet
pris entre le premier el le second millenaire. Et il estre-
uiarquable que ce nest qu'apres I'expiration de ces mille
' Malvendii. I. i. dc Aiiiichrisio. c. 3). Pioculdubh asseHio estfalsissi-
ma ei intolerabilis , gnu'iorem ceiisitram, ttl par est, sacro Ecclestce tri-
iur.ali veseivantes. — * Galalin. I. iv. c. 20. Finus , lib. v. c. 11. Sixt.
Sen. Bibliot. lib. v. uinnot. 190. — ■• Joan. y. 28. 29. — * Luc. xiv. »4. —
* jdpoc. XX. 4. el ieqq. — ^ Apoc. xx. i. et seqtj.
486
DISSERTATION
ans que Tempire anllchretien dc Mahomet a eu le pouvoir
d'enlamer H'empire des princes chretiens en subjuguant
I'enipire d'Oricnt. Enfin. !e sahhat ou le repos que saint
Paul dit elre reserve au peiiple de Dieii ^ , est explique au
nieme endroit par sanit Paul meme : cet apolre dit bicn
expressement qutt ce rcpos est le repos de Dieu , ou le re-
pos oil Dieu est entre aprcs la crcalion , en un mot le repos
de reternitc bienheureuse. Le peuple dc Dieu n'a point
d'autrc rcpos a atlendre. Et si Ton pent dire avec les an-
ciens que ce repos est figure par celui du sabbat, et qu'il
succedera aux six mille ans de la duree du monde, il efi
resultera une nouvelle preuve contre les millenaires, qui
seront alors obliges de recoinioitre qu'apres les six mille
ans de la duree du monde, le repos qui succedera sera
celui de Teternite bienheureuse.
Vainescon- Apollinaire de Laodicee, cite par saint Jerome^, pre-
jec ures sur j.gj^(jQij- q^g q jgire cent trente-quatre ans apres la hui-
lepoqueuela ., » i i, r^i i i i - r-i- •
fin du monde. tieme annee de 1 empereur Claude, le propliete Ehe vien-
droit , et que Ton verroit rebatir le temple et la ville de
Jerusalem dans I'espace de trois ans et demi ; et qu'enfm
TAntechrist paroitrcit. D'autres, dont parle saint Phi-
lastre ^, croyoient que le monde ne dureroit que trois
cent soixante-cinq ans depuis I'incarnation du Sauveur.
D'autres , cites dans saint Auguslin * , ne mettoient que
quatre ou cinq cents ans depuis I'ascension de Jesus-
Christ jusqu'a la fin des siecles. D'autres y mettoient
mille ans.
Saint Vincent Ferricr ^ dit qu'il y avoit certaines gens
qui donnoient au monde, depuis la naissance de Jesus-
Christ jusqu'a la consommation des siecles, autant d'an-
nees qu'il y a de versets dans le psautier. ( H y en a environ
deux mille cinq cent trente-sept. ) D'autres '^pretendoient
que le monde dureroit autant depuis Jesus-Christ jusqu'au
dernier jugement, qu'il avoit dure depuis le commence-
ment du monde jusqu'au deluge ; c'est-a-dire environ seize
cent cinquante-six ans. Enfin il y en avoit d'autres qui lui
donnoient une bien plus grande duree, puisqu'ils croyoient
que depuis la venue de Jesus-Christ jusqu'a la fin rlu monde,
il y auroit autant d'annees que depuis la creation du
I * Ililbr. IV. 9. Voyez I'analyse de lepilre aux Hcbreux, inseree dans la
preface sur ceUe epilre. — - jipolUnar. Laodicen. apiid Uietonym. in Dan.
u. — "" Vhilast. de hceres. — * .dug. de Ci\>it. I. xviii. cap. 55. — * Vincent,
fairer, ep. ad Benedictum xiii, — ^ Jpud Perer. in Genes, lib. i. adjinem.
II
SUR LA, KIN DV MOHDE. ^87
inonde jusqu'a la venue ilu Messie , c'est-a dire an nioin^
quatre niille aiis : ils se fondoient sur ces paroles d'Ha-
bacuc : Seii^nicur , to us manifeslerez voire ouvrage an 7nilieu
(Us aniiees '. Chretien Drutmare ^ , nioine de Corbie , qui
vivoit au neuvieine siecle , rapporte une tradition , qu'il
disoit avoir ete laissee j ar ecrit par les ancicns, qui est
que le monde avoit ele cree le huilienie jour d'avanl les
calendes d'avril , c'esl-a-dire le 25 dc mars; que noire
Sauveur s'etjit incarne et etoit mort le meme jour; et
qu'enfin le monde finiroit aussi le 25 de mars. Mais il est
inutile de s'arreler a eombattre serieusement des conjec-
tures aussi frivoles que celles-la.
Plusieurs anciens ont avance que le monde finiroit la Le monde
nuit, etque Jesus-Christ viendroit \\x"pr les vivans et les f'""^^*'lj'^^°*
„ ^ I , , 1 • 1 ■ la nuilr cela
raorts lorsqu on s y attcndroil le moms , comme un vo- ^^j inceriain.
leur qui vient percer la muraille pendant la nuit. Ils se Finira-t-il en
fondcnt sur ces paioles de saint Pierre, Le jour da Set- un momeni?
gneur viendra comme un volcur pendant la nuit ^ ; et sur ces '^^l^ ^^ ^^^^^
autres de I'Evangile, Au milieu de la nuit, on enlendit un
grand cri: F'oici I'epoux qui vient ; allez au-devant de lui^.
Sur quoi saint Jerome remarque que c'est une tradition
apostolique, que le Seigneur viendra la nuit; de la vient
qu'a la nuit de Paqucs , que Ton passoit dans I'eglise ,
I'ev^que ne oongedioit le peuple pour retourner dans sa
maison qu'apres minuit, parce qu'on croit que le Sau-
veur doit venir en ce meme temps, auqucl autrefois il
frappa les premiers-nes de I'Egypte. Lactance ^ dit aussi
que Jesus-Christ paroitra au milieu de la nuit , que le ciel
s'ouvnra , et que le Sauveur descendra precede d'une
grande clarte ; Tunc ccclum inlempesta node patejiet , et
descendet Chrislus in virtule magna, et anleccdet cum cla-
ritas ignea. Saint Jean Chrysostome ^ , Theophylacte ,
Eulhyme , rendent temoignage a la meme tradition ; et on
la Yoit aussi dans d'anciens vers attribues a une sibylle ".
D'autres pretendent que le Sauveur viendra au point
du jour, comme on le voit dans ces vers de Prudence ^ :
' Habac. m. 2. — - Christian. Dmtmar. in MattJi. xvi. — ° ■?.. Petr. iii.
10. ^dvenietdies Domini ut fur {Gt. addit, in node.) — ^ MaoJi. xxv. 6.
— * Lactam. Instit. Epiiom. et I. vii. de difin. prcem. c. 39. — * Chris, in
Matt. XIV. — ' Sibylla apud. Lactam. I. vii. c. ag.
OinrsV av ikH
• Pnident. hym. Cathemer.
488 DISSERTATION
Et mane illud ultimum
Quodprcestolaniurcernui,
In luce nobis ejjfliiat ,
Dum lioc canore concivpat.
C'esl-a-dire , que le dernier matin que nous atlendons avec
frayeur nous trouve occupes a chanter vos louanges. Saint
Thomas', Tostat^, Suarez% croientque le jugementse fera
en plein jour; et c'est de quoi il n'est pas permis de dou-
ter, puisque la luniiere , le i'eu , la majestc qui accoinpagne-
ront le souverain Juge , rendront la nuit meme aussi ecla-
tante que le jour.
Quelques-uns croient que le monde nc finira pas tout
d'un coup, mais dans la suite d'un raiJlier d'annees ; c'est
ce que nous avons vu dans le Thalmud*. Mais quelques
docteurs juifs ^ soutiennent qu'il fmira en UJi jour, et
menie en un moment; et c'est ainsi qu'ils expliquent ce
mot en un. Mais ce que nous savons certainement , c'est
que le monde fmira par le feu*"; que le Seigneur viendra
lorsqu'on s'y attendra le moins'^; que dans un moment,
dans un din d'oeil les morts ressusciteront, et seront
changes^; que le jour et le moment precis de la fin du
monde , et du second avenement de Jesus-Christ, sonten-
tierement inconnus aux hommes^; et qu'il est superflu
et temeraire de vouloir en marquer le temps et la manicre,
puisque Dieu n'a point voulu nous le reveler"^. Et tamen
aiisi sunt homines prcEsiimere scienliam iemporum , quod scire
cupienlibus discipulis Dominus ait : Nan est vesiruin scire
lempora quce Paler posu.it in sua poleslale.
' D. Thorn. 3, parte in sitpplemenlo , qucest. 77. a7^t. 3. — ^ Toitat. in
Matth. 25. — ^ Suarez. i.pari. loin. 2. disptit. 5-. Fide Cornel, a Lapide
in 2. Peir. in. c. 10. — * Tlialmiid. traite Sanhedrin. fol. 97. recio. —
* Rab. Isaac. Loria Cabalisla insignis , apud Mcnasse-Bcn-Israel, de Re-
suiTect. moH. lib. in. c. \. — * Psalm, xcvi. 3. i. Cor. in. I'i eti. Petriui.
7. is>. — '' Matlh.xxiv. 36. 42. 44. 2. Petri lu. 10. — " i. Cor. xv. St..
- — ^ Marc.xui. 32. — "* Fide S. August, in psalm, lxxxiv. 4.
SUH LA ¥iy DU MO?«DE. 48g
ARTICLE III.
Le cbaugement qui arrivera au monde a la 6n des siecles sera t-ll subslanliel ,
oa accidenlel? Le uiond.' scra-t-il ancanli , ou sculenient change?
JusQu'ici celle queslloii est denieuree problemalique. Testes qui
Quelquefois Ics auleurs sacres parlcnt cle la fin c'u monde semMcot au-
comme dun aneanlisscment reel ; par exemple , Isaic dit : "°'?*^^'". '^"
... t r I ' • an«"3nlisse-
Lcs cieux se dissiperon* comrne lajumec , el la lerre s en ira n,p„i r,'.j.|,
tn poiissure comme un viteme.nl use^ . El saint Jean dans I'A- Temoignagcs
pocalypse : L'angt jura par celui qui vil dans lous les sie- ^^\ anciens
Ics, et qui a criele cicl el la lerre ^ qu'il n'lj aar oil plus de ^!^\^^'^*^^
mps'^. On salt que le temps est la mesure des ehoses jjuainsi.
creees; des qu'il n'y a plus dc temps, il n'y a plus de crea-
tures scnsibles, plus dc succession, plus de mouvement
local. Je vis , dit saint Jean dans un autre endroit,yV vis un
iiouveaa ciel el une nouvelie lerre; car le premier del el la pre-
miere lerre etoienl passes, el la mern'eloil piiis^. El Jesus- "
Christ dans sairit Malliieu : Le ciel el la Icnepa^'sercnl, mais
mes paroles ne passeronl pas*', expression qui se trouve en
lusieurs endroiisdu Aouveau-Teslament.
Dans les psaumes', il est dit expressement que les cieux
periront, Ipsi peribunl , mais que le Seigneur subsistera
eternellement. L'opposiliouque Ton met entrele Seigneur
qui subsiste eterneilement et ie.s cieux qui doivenl perir,
insinuc un aneaiitissement reel de ceux-ci. Saint Pierre*^
dit clairemenl qu'au dernier jour lous les Hemens elant em-
hrases par le feu , se dissoudronl , se fondronl , el que la lerre
aiec ce quelle conlienl sera consumee par lejeu. Et dans Isaie",
le Seigneur dit qu'il crcede noiiieaux cieux el une lerre ;2oa-
?^//e, comme pour les subslituer^iux anciens cieux et a I'an-
cienne terre , qui ne subsisleront plus , mais qui seront ab-
solument deiruits et aneaniis.
Les cabalistes parmi les Hebreux croient tons laneanlis-
sement fulur du nionde^. Porphyre''se railloit desChre-
• Isai. LI. 6. — - Apoc. x. G. — ^ Jpcc. xxi. i. — * Mauh. xsiv. 35. —
^ Psalm. CI. 27. — ' 2. Peiri III. 10. 12. — ' Jsai. vxv. 17. — * Jpud
Menasse-Ben-Israel de Resurrect, mort. I. in.'c. 4. — ' Jipud Aug. de
Ch'h. t. ',. I. XX, c. 2 i .
^ 490 DISSERTATION
liens qui soutenoient que le monde seroit detruit : Por-
phyrins Chrislianos oh hoc arguit maximc sLxdlilm , quod is-
lam mundumdi cunt esse perkurum. Si les Chretiens n'eus-
sent pretendu autre chose sinon que le monde devoil
prendre une nouvelle forme, ils n'auroient rien dit que
les philosophes n'enseignassent publiquement. Les Chre-
tiens soutf;noient done que le monde periroit reellement ;
et e'est en effet I'opinion des plus anciens peres.
L'auteur du livre des Recognitions ' fait dire a saint
Pierre qu'il y a deux sortes de cieux : les uns sont invi-
sibles , et c'est le lieu de la demeure des bienheureux ; ces
cieux sont eternels et immuables : les autres sont exposes
a Motrevue, nous y voyons brilJer les astres; ces cieux
visibles sont sujets a la corruption, et ils seront en effet
corrompus et detruits, lorsque les hommes , pour les-
quels ils ont ete crees, ne seront plus sur la terrc. Et dans
le livre suivant, on fait ainsi raisonner saint Pierre : De
meme que la coque de I'ceuf , toute propre qu'elle paroit ,
doit toutefois etre rompue afin que le poulet qui y est en-
ferme puisse en sortir, puisqu'elle n'est faite que pour cc
poulet ; ainsi le monde qui subsite aujourd'hui doit dispa-
roitre , afin que le bonheur du royaume des cieux soil ma-
nifesle.
Saint Basile^ refute ceux qui vouloient inferer que le
monde etoit eternel , et qu'il ne finiroit jamais , de ce qu'il
a une figure ronde ou spherique : il montre que le monde
ayant eu un commencement , doit avoir aussi une fin ; et il
le prouve par I'Ecriture , qui dit que la figure de ce monde
passe , et que Ic del el la terre pas seront. Saint Ambroise ^ a
imite la meme pensee de saint Basile : Quce autem initimn
habenl , et Jinem habent ; et quib us finis dalus , initium datum
constat. 11 ajoute que les parties du monde etant corrupti-
bles et perissables , on ne pent douter que le monde meme
dans son tout ne soil aussi sujet a la corruption : Cujus
partes corruptioni ct mutabilitati subjacent , hujus necesse est
univcrsitatem, iisdem passionibus subjacere. Saint Gregoire
de Nysse * emploie les memes raisons que saint Basile son
frere pour prouvcr que le monde doit perir.
^ Recognuionum I. 11. — 2 Basil, homil. i. in Hexamer. Ta airb /.pivou
aY) ajAcpiSaXXTi; Tiapl tou teXo'j;. — ^ Ambix>s. in Hexamer. I. i. c. 3. — * Gfcg.
rfyssen, de creau'one hominis, c. -ili.
SUR LA Fir» DU MO.tDE. i^l
Saint Justin le martyr', ou rauicur que Ton cite sous
son noni, clans les Questions aux orihodoxes, dit que le
cicl et la terre qui seront apres la resurrection seront fort
dilTerens de ceux d'aujourd'hui; qu'on verra alora la faus-
scte deTopinion des philosopbes qui croient les cicux in-
crees et incorruplibles; les cieux d'alors seront d'aulres
cieux, unc autre lerre, d'autres elemens. Ce sentiment se
trouve dans plus d'un auteur catlioliqne^, eldansplusieurs
auteurs proteslans, coinnic Luther, Melanclon , Brentius,
Buccr, Beroalde, Vorstius, Gerliardus, etc.
Le senlment qui soutient que le monde ne sera pas Texics qui
aneanti, mais seulementperfeclionneet change en mieux, ^."°o"^*^"' ""
est bicu plus autorise dans les peres et dans les theologiens. „cnHnt. Te-
L'Ecriture meme lui est fort favorable. Elle dit , par exem- moigna-es des
pie, dans lAncien et dans le Nouveau Testament^, que ie ['ercsquH'ont
Seis^neur fcradcnouieaux cieux el line nouvelle lerre. Elle ne p^'enduainsi.
dv , ■ . I . . -I Cesllesenti-
it pas aaulres cieux et aautres lerres , mais de nouveaax ^^^^ |^. [^g
cieux el unc nouvelle lerre , pour marquer leur renouvelle- autorise.
ment. Non dixit : alios cq^Ios el aliarn lerram videbimas , dit
saint Jerome, sed. veleres et anliquos in melius commutalos ^.
Lorsqu'un enfant devient jeune homme, que de jeune ,
bomme il devient homme fait , et que d'homme fait il de-
vient vieillard , on ne dit point qu'il perit a chaque fois que
son age se change : c'est toujours le meme homme ^ mais
accru, et passe d'un etat a un autre, II en est de meme
lorsqu'un architecte , dune ancienne maison en fait une
nouvelle; ou lorsque le laboureur defriche un terrain in-
culte et abandonne, et le rend par ses soins fertile et
riant.
Quand le Psalmiste^ parle de la destruction des cieux ,
il la marque sous I'idee d'un velement qui s'use et qui se
change ; mais cela est fort different de ce qui est reduit au
neant : Ipsi perihunt, el omnes sicul vestimenlum veterascenl ,
et sicul operlorium mutabis cos. Isaie"^, decrivant I'etat du
ffJV
da
pc'.oda-. TO <TT£f;eMp.a, w- ay_iy,<rrcv ov, etc. — - Catharin. Sabneron , Sera-
riiis, Ilieivn. Magius, Franc. Vallesius, Lud. Molina, etalii cpudConi.
a Lapide in Isai. sxxit. 4- ei a. Petri lu. lo. — « IsatLvt. 17. lxvi. 22.
Jpoc. XII. I. — * Hieronjm. in Isai. u et lit. — * Ps. u. 27. — * Isai.
XXX. 26.
Kev^
^9^ l>lSSEKr\110N
moiule apr^sla resurrection , dit que le soleil el la lune s'y
vcrront coinme auparavaiit, mais dans un eclat, infiuimeiit
plus grand : La lune , dit-il , brillera coinme le soleil , et le so-
led aura sept fois plus de clarle qu'il n'en a aujourd' hui.
Saint FauP dil que toutes les creatures se voient avec
doulcur souniises a la vanite ; qu'clles gemissenl dans I'at-
tente de leur dciivrance; qu'clles cspirenl elre delivrees
de celte corruption , et avoir part a la gloire des enl'ans de
Dieu. Elles souhailent done leur renouvellemcnt et leiir
alfranchissement, mais non pas leur aneanti.ssement, ni
leur destruction quant a la suljstance. Le Sauveur nous dit
dans rEvangile^^J?c lecielctla lerrepasseronl; ctrApolre"*,
que la figure ou I'apparence de ce monde passe : Pritteritji.gura
liujus mundi. lis ne disent pas que le monde perira (pianta
sa su])slancc, ni que les cieu\ etla terre retourncrontdans
leur ncant ; mais simplement qu'ils passcront de I'elat ou
nous les voyons dans im autre plus parfait et plus beau.
SaintPierre'*, dans I'endroit le plus formel que nous ayons
sur ce sujet , dit simplement que le jour du Seigneur viendra
comme un volcur; qu'alors les cienx passeront avec beaucoup
de bruit et d'impeluosite ; que les eltmcns seroni dis sous par
la chaleuT ; que la terre sera bruUe avec ce qui est en elle. Or
rien de tout cela ne prouveraneantissement.
Dicu nous a revele la creation de I'univers ; il nous a dit
qu'il I'avoit tire du neant; mais il ne nous a declare en au-
cun endroit qu'il dut reduire son ouvrage an ncant. Nous
avouons qu'il pent I'un comme il a pu I'autrc ; mais nous
ne voyons point dajis ses Ecritures que ce soit la son des-
sein. L'aneantissement meme est v>ne chose que nous ne
comprenons pas.
Salomon^ nous assure qu'il a appris que tout ce que le
Seigneur a fait doit demeurer eternellcment : Didici quod
omnia opera quee fecit Deus , perseverent in perpeluum. C'est
ce que saint Gregoire-le-Grand^ explique fort bien , en
conciliant I'Eeriture avec elle-meme, lorsqu'elle dil d'un
cote que la terre demeure eternellemcnt, et de I'aulre que
les cieux. et la terre passeront : ils passeront quant a leur
figure , mais non quant a leur essence : Per earn quam riunc
habent imagincm transeunt , sed lamen per essentiavi sine fine
" Horn. VIII. ly. a scci<j. — 2 j\Jauh. xxiv. 35. el v. 18. — ' i. Cor. vii.
3i. — * 2. Petri iii. 10. — « fJccL iir. 14. — * Givgor. Mag- lib. x.a'ij.
moral, in Job. c. 5.
I
sua LA Fl.-S Dl- MO DK. 4;)3
JM/'^^v/«/i/.b)lquand^Ec^ilurepar!edenollveanxcieu^eld«
tcrrcnouvcUe,cl!en'entend pasqueDieucn crcera denou-
veaux, niais qu'il rcnouvellera les anciens : JVon alia con-
(icnda sunt , sed hicc ipsa renovantur. Le menie saint Gre-
goirc compare ce cliajigeinent a celui (jue nous voyons
arriver loiis les ans dans !a revolution des saisons : I'hiver
succede a I'eie, et le prinieinps a i'hiver : la tcrrc change
do face dans ces difierentes saisons , mais elle est loiiiours
la meme ('uanl asa substance.
L'autcur de Icpitre de sainl Earnabe ' ne dit pas que
Dieu detruira, mais c\\\'il c/iani^'era le soleil, la iune et les
aslrcs. Philon , ou I'ancien auleur que Ion a sous son nbni,
dans le livre qui a pour titre Si le monde est conaptihle ,
monlre Ibrl au long que le monde ne pent etre corrompu
ou detruit , mais seulenient cliange dans queiques-unes de
ses parties.
Saint Irenee , et tous les anciens qui ont soutenu I'opi-
nion des niilltnaires , supposoient qu'apres la premiere- re-
surrection , !e r.ionde subsisteroit, et que la terre seroit la
meme , a cela pres qu'elle seroit plus let onde , et que Ton
n'y vcrroit plus ces changemens et ces vicissitudes qui y
causent aujourd'hui tant de derangemens. Saint Justin le
martyr^, que nous avons cite ci-devant comme einnt pour
Tenticre destruction du monde, ne veut autre chose que
refuter I'opinion des philosophcs qui soutenoient que le
monde eloit clernelet incorruptible. Pour lui, ii reconnoit
de nouveaux cieux et une nouvellc terre, ou les bonset les
medians, aprcs la resurrection, rccevront la recompense
ou la peine qui leur sont dues. II dit avcc I'Ecriture que ie
ciel et la terre passeronl, mais non pas qu'ils seront anean-
tis. Saint Basiic de meme prouve fort bien que le monde
finira; mais il ne pretend pas qu'il sera reduitau neant. II
dit que ces paroles de TEcriiure : La figure de ce vwnde
passe , el ceiles-ci , Le ciel et la terre passeronl, prouvent
ej^alement ces deux verites , et la consommation du monde,
etson chaniicmcnt en mieux'.
* Epist. Barnab. pag. 55 PO^.iXi: zb-i r>.tiv, x,%: ty.v cz'j.r:ir.t, y.xl tou;
TTs'px;. — * Jusiin. seu alius, qucest. gS. ad Orihodox. Et y.n-k tov kma-
p. 4. Ilaf a'-vei ■»■«; -'r, a^rxi.7. Tsvi /.C(7u.c-j rcurc-j- xr.'; i c'j:avb; xal % •^ T»pe>.!U-
ig'i D1SSERTATI07*
Mais personne ne s'cst cxplique sur cette mati^fe d'llnc
facon plus expresse et plus claire que saint Auguslin ' ; il
dit que le feu qui brulera le monde au dernier jour chan-
gera les qualiles des elemens corruplibles , et que ce qui
convenoit a nos corps sujels a la corruption sera change
en d'autres qualites qui conviendront a nos corps incor-
ruptibles ; en sorte que le monde ainsi renouvele sera
proportionne a la nature des hommes ressuscites : Ut
scilicet mundtts in melius innovatus , apte accommodelur ho-
minibus etiam carne in melius innovalis. 11 dit dans un autre
endroit ^ que le ciel et la terre seront renouveles apres le
jugement; qu'ils passcront, mais qu'ils ne periront pas.
Mulalione namque rerum , non omnimodo inlerilu , Iransihit
hie mundiis — Figura ergo praterit , non nalura. II compare
le feu qui doit embraser le monde a la fin des siccles aux
eaux du deluge ^ ; et il fait le parallele des expressions
dont se sert I'Ecriture pour exprimer I'un et I'autre de
ces deux grands evenemens. Dans le premier il est dit que
le monde peril * , de meme que Ton dit qu'il perira dans le
second. Mais comme on sait que par ce motperir I'Ecriture
n'a voulu marqucr qu'un changement extraordinaire ,
ainsi dans la consommation des siccles , lorsqu'elle dit
que le monde perira, ccla veut dire qu'il sera seulement
change quant a ses qualites , mais qu'il subsistera quant a
sa substance.
Saint Epiphane ^ cite Proclus et Methodius, qui soute-
noient qu'il n'y auroit dans le monde qu'un changement
accidentcl, ctunmouvemenldeschosessublunaires. OEcu-
menius*^ prouve au long le meme sentiment. 11 dit que la
terre ct les elemens seront detruits; que de meme que
nous faisons passer les metaux par le feu pour les rendrc
plus purs et plus precieux , de meme lorsque Dieu menace
de detruirc le monde par le feu , il n'a nulle envie de I'a-
neanlir. 11 detruira simplemcnt les choses qui ne servent
qu'a I'usage de cette vie mortelle et perissable , les ani-
maux, les planles, les arbrcs, et tout ce qui n'a aucun
. rapport a i'etat d'imraortalite et d'incorruption ou nous
oovTOOf wpoavatpoiv/iat; to>v irspl cr'JvTeXeiac (5'o-/ij,aTWv, xal Tvapl xr,i tou xo'sjj.o'j
fASTaTvciTioecd;, etc — * ^«^- ^'^- xx. de Ciyit. c. i6. — - ^i/g. lil>- xi. de
Civit. cap. i4. — ' Idem, ibidem, cap. i8. — * a. Petri m. 6. Cceli crant
prius, el terra , de aqua eiper aquain consistens Dei vcrbo: per qjue ( gr.
alit. per quos) Hie tunc mundus aqua inundatus periit.- — ' Epiplian.
hares. 64. — ' OEcumen. in 1. Petri in.
SIR LA FIN DU MONDE. AgB
serons apres la resurrection ties corps ; mais il conservera
tout le reste clans un ciat plus parfait et plus heureux ,
pour Tornement ct la beaute de ce ciel nouveau ct de cette
terre nouvelle qui nous sont promis , et pour contribuer
a la beatitude des justcs qui vivront aiors. De meme ,
dit-il , que celui qui batit une maison ncuve ne la balit pas
dc rien ; ainsi Dieu formera les cieux uouveaux etJa terre
nouvelle aprcs Ic jugement, de la maliere des cieux et de la
lerre qui subs-stent aujourd'hui, niais qu'il changera en
un etat plus parfait *.
On dispute si les elemens qui subsistent aujourd'hui , et Les cpiaire
qui composent tous les etres corporels, subsisteront de^'^mensqui
meme apres la resurrection? Saint Pierre ^ nous dit que f"^*'*!^"!^""
1 M > 1- r I III • jourd huisuD-
Jes elemens seront dissous et londus par la chaleur ; et samt sisteront-'ils
Jean dans 1' Apocalypse ^ , que la mer ne sera plus : Marc apres cechan-
Jam nonest. En effet , de quoi serviroit la mer, puisqu'il s^™^"*' }^
n'y aura plus de poissons, plus de pluies, plus de naviga- n>er subsisie-
tions? Bede-le-Venerable sur eel endroit de l' Apocalypse ,
et encore sur la seconde epitre de saint Pierre , chap, iii,
dit nettement que la mer nc subsistera point apres le ju-
gement dernier. Andre de Crete , et Aretas , semblent
croire la meme chose , aussi bien qu'Haimon , Rupert , et
saint Anselme, ou I'auleur du commentaire qui lui est
atlribue sur I'Apocalypse. Saint Augustinen parle d'une
maniere plus douteuse : Utrum maximo illo ardore sicce-
tiir , an cl ipsum verlalur in melius , non facile dixerim*.
Saint Thomas '•' , traitant cette question , dit qu'il v a sur
cela deux sentimens. Les uns croient que tous les qualre
elemens subsisteront quant a la substance , mais non pas
quant aleursqualites naturelles. D'aulres soutiennent qu'il
n'y aura que le feu et I'eau qui periront , et que I'air et la
terre subsisteront, mais dans un etat plus parfait. Saint
Thomas n'adoptc aucun de ces deux sentimens. 11 pretend
qu'il n'y a pas de raison d'avancer que le feu et I'eau seront
plus tcjt delruits que lair et la terre : puisque les quatre ele-
mens sont egalement necessaires pour la perfection" et le
complement de I'univers. 11 ne croit pas non plus que les
qualre elemens soient alors prives de leurs qualites natu-
relles, ni qu'ils subsistent simplement quant a lenr sub-
* Ude et CyriU. I. \v^ in Isai. cap. li, — * a, Petr. ni. lo. t2. —
* JfMC. XXI. I . — * Aug. I. XL. de Civft, c. i6. — * D. TTK-m. in ^.distuict.
47. tjiicpst, a. art. t.
49C DlSSEnXATlON
Stance. L'Ecriture nc le dit en aucun endioit; et il n'y a
aucune raison de croire que les elres que Dieu a crecs au
commencement , cl qu'il a tires du chaos , doivent etre
depouilles de leurs qualitcs simples et essentielles. De
plus , il dit que le feu qui consumera ce qui est sur la
lerre ne parviendra pas jusqu'a la region du feu, qui est
au-dessusde i'air; etque par consequent le feu elemcntaire
)ie soutfrira rien de cet inccndie qui brulera le monde.
Saint Auii^ustin * , comme on a pu le remarquer en pas-
sant , un peu plus haut , croit en effel , et c'est aussi le sen-
timent des plushabiles ihcologiens^, que quand il est dit^
que les cieux passeront avec impeluosile, et avec roideur, ou
avec grand bruit, cela ne doit s'entendre que des cieux
qui sont autour de la terre , des cieux aeriens, de I'air,
qui est souvent appele del , comme quand on dit Ics oiseaiix
du del. Mais la raison que la plupart des ecrivains en
donnent ne paroit pas convaincante. lis disent , 1° que de
mcmc que les eauv du deluge ne s'eleverent que de quinze
coudees au-dessus des plus hautes montagnes , ainsi le
feu qui brulera le monde ne se fera pas senlir plus haut
que cela; 2° que les cieux superieurs , le fumament , le
ciel on sont les astrcs , etant incorruptibles et inallerables ,
selon Aristole * , ils ne scront done point endommages par
le feu; 3° que les cieux superieurs, dont on vient de parler,
n'ayant point eu de part a la corruption des hommes ,
a leurs crimes , a I'abus qu'ils ont fait des creatures , ils ne
doivent done pas passer par le feu.
On peut repondre a cela , i" que Ton n'a aucune preuve
que le feu qui doit consumer le monde ne doive pas pas-
ser au-dela de quinze couilees par-dessus le sommetdes
plus hautes montagnes. Si celaetoit, I'atmosphere meme
ne seroit pas purifiee par les flammes ; ce qui est contre
I'hypothese de ceux qui croicnt que les cieux aeriens pas-
serontparle feu. 2° 11 est encore plus douteux que les cieux
superieurs soient inalterables : les nouveaux philosophes
croicnt avoir des preuves demonslralives du contraire.
3' Si Tabus que les hommes ont fait des creatures, des
elemens, des metaux, etoit un motif pour croire qu'au
' Aug. de Ci\'h. lib. xx. cap. 14. I6. i9<. 9,4. — ^ l^'idc Gvegor. Mai^.
lib. XVII. Moral, cap. i5. Damascen. lib. 11. de fide , cap. 0. Schulasiici
in k. Sentent. dist. 4.7. 48. Tena, in cap. i. ad Uebr. Inierpr- ad 2. Peiri
m. 10. — ^ 2. P(?.7'im. 10. Coeli magna iiiipelii'igr. '^uZrM^) iransienL, —
^ An'sto:. I. J.de generatione.
St R LA FIX OU MONDK. i )~
dernier jour ils cloivenl etre purifies par !e feu, n'cn peut-on
pas dire autant des astres , du soleil , de la lune , du ciel ,
du firmament , dont les hommes ont si etrangement abuse,
en leur rendant les honneurs divins?
11 est vrai que les preuves que Ion apporte de I'Dpinion
contraire , qui veut que les cieux superieurs , que les astres
doivent elrealors purifies paries flammes, ne sontpasmeil-
leures que celles que nous venons de refuter. Aussi ne pre-
tendons-nous pas Tadopter ni la defendre corame une chose
certaine. L'autorile des philosophes qui I'ont.soutenue ne
nous louche que peu ; la matiere dont il s'agit ici ne doit
pas se decider par Icur suffrage. L'autorile des peres est
phis digne de respect ; mats il y en a peu qui aient soulenu
ce sentiment : il n'a jamais etc decide dans I'Eglise ; et le
partage seul des opinions suffit pour nous dispenser de les
suivre sans examen. Ils n'oiit propose sur cela que de sim-
ples conjectures. Le systeme du monde qu'ils suivoient
passe aujourd'hui pour fauxchezlaplupart des philosophes.
On ne croil plus les cieux solides et massifs, capables de
se fondre comme une glace , ou de resister au feu , comme
feroit une voule de bronze.
Pour expliquer done les expressions de TEcriture, et
pour satisfaire aox difQcultes , il nous suffit de dire que la
terre, et tout ce qu'elle contient, passera par le feu ; qu'elle
sera changee en un etat plus pur et plus parfait qu'elle n'est
aujourd'hui; que les cieux, c'cst-a-dire I'air , ou Tatrao-
sphere, seront embrases comme Ic resle ; qu'apres la re-
surrection , ni la terre ni I'air ne seront plus sujets aux.
alterations et aux changemcns que nous y reniarquons, el
qui ne conviennent qua I'ctat de corruption et de mor-
talite ou nos corps sonl aujourd'hui : Ut mundus in 7nelius
innovatus , apte accomviodelur hominibus etiam came in melias
innovatis ^ .
' August, de Cn>it. lib. \\. cap. i6.
.'(C)8 DISSEIITATIOX
ARTICLE IV.
Quel sera I'etal de la terre apres la resurrection ?
Seniimcnt Cette question ne regarde que ceux qui croient qu'a-
<le saint Tho- pres la resurrection la terre sera simpjement changee se-
inas et auires JQjj ses qualites, et non selon sa nature. Saint Thomas '
inoc ernes sur ^j^^jj. qu'aJors I'eau sera comme le cristal, I'air aussi pur
1 elatdela i • i • r> • i -n i * i
lerrc apres la 4^16 le ciel , ct le teu aussi briilant que les astres et que Je
resurrection, soleil; que la terre dans sa superficie sera aussi claire et
aussi transparente que le verre. li ne ditpas ce qu'elle sera
dans sa profondeur : mais d'autres scolastiques soutien-
nent qu'elle sera toute claire et transparente dans loute sa
profondeur , a I'exception du lieu ou sera I'enfer , qui de-
meurera opaque et tenebreux , pour le tourment des dam-
nes. Paludanus ^ et Suarez ■* veulent que la transparence
de la terre s'elende jusqu'aux limbes, ou sont les enfans
morts sans bapteme. Autrement , di«ent-ils , leur condition
seroit Irop dure , s'ils devoient demeurer eternellement
dans les tenebres.
Les mcmes ecrivains croient que les cieux ne seront
plus en raouvement comme aujourd'hui ; que Ton ne
verra plus cette vicissitude de saisons , de nuit et de jour.
Les cieux et les elemens demeureront dans un etat fixe et
invariable, suivant ces paroles d'lsaie : Le soleil ne vous
eclairera plus diirant le jour , ni la lane durant la nuit; mais
le Seigneur vicnie sera voire lumiere pendant loute Velemite.
Voire soleil ne se couchera plus , et voire lune ne souffrirn
plus de diminution, parce que le Seigneur vous eclairera eler-
nellement *. Et saint Jean dans I'Apocalypse : La nouvelle
Jerusalem n'a hesoin ni da soleil ni de la lune pour I'eclairer,
parce que c'est la gloire de Dieu qui I' cclaire , et que V Agneau
en est la lumiere ^ , Et encore : // n'y aura plus de nuit, et
Von n aura plus hesoin de la lumiere de la lampe ou de celle du
soleil , parce que le Seigneur meme les eclairera, etc. ^. Toute-
' D. Thorn, in 4. distinct. 48. rjitcest. a. ant. 4. — - Paludan, in 4. dis-
tinct. 48. — "' Suurez. 2. torn. 3. pai-l. disp. 56. sect. 1. — * Isai. lx. 19.
20. — * Apoc. XXI. a3. — '■ Apoc. xxir. 5.
Sl'R LA FIN Dli MONDE. -ioQ
fois Isaie dil dans un aulre cndroit c\uaIors la lumiire de
la lane sera comnu celle dii soUil , et que celle du soleil sera
sept Jois plus grande quelle nest a present '. A.insi la terre
sera loujours egalement eclairee , ct dans une tempcraiure
loojours egale; les astres et les elemens toujours senibla-
bles en eux-memes et a notre egard , sans aucune des im-
perfections que nous y remarquons a present. Saint Je-
rdme ^ croit que le soleil ne sera plus sujet aux eclipses ,
aux obscurcissemens et aux Ticissitudes auxquelles il est
souniis aujourd'hui.
Le sentiment qui veut qu'apres la resurrection le sole;!
ne se couchera pas , et ne fera plus comme aujourd'hui
sOu tour autour de la Icrre, pouvoit peut-etre paroitre
plausible a ceux qui nioient les antipodes , ou a ceu\ qui
ne croyoient pas que le soleil fit reellement le tour de la
terre; raais ce sentiment ne peut plus se soutenir aujour-
d'hui, puisqu'il s'ensuivroit que les hommes qui sont aux
antipodes, et qui doivent ressusciter comme nous , ne
jouiroient jamais de la lumiere du soleil , et que ces vastes
regions seroient condamnees a demeurer dans des tene-
bres eternelles.
On ne met point au nombre des imperfections des ele-
mens leur epaisseur ou leur rarete, leur pesanteur on
leur legerete, puisqu'enfin il faudra qu'iis gardent entre
cux quelque ordre dans I'univers. lis conscrveront aussi
leurs qualites actives, comme la chaleur et le froid , I'liu-
midite et la secheresse ; car sans cela ils ne seroient plus
elemens. Mais ces qualites ne produiront plus leurs effeis
sur les corps comme auparavant, parcc qu'alors il n'v
aura ni generation ni corruption , Dieu suspendant leur
aclivite par un miracle qui devicndra en ce temps-la,
comme naturel , a cause de I'etat ou sera le monde. C'est
ainsi que du temps de Josue le soleil et la lune demeure-
rent sans mouvement , et que I'activite du feu de la four-
naise de Babylone futsuspendue pendant quelques heurcs
en faveur des trois jeunes Hebreux.
Quoique la terre doive etre depouillee de ses plantes et
de ses auimaux , et de tous les corps mixtes , qui en font
aujourd'hui la beaute et lornement, comme le dit saint
Pierre , Terra, et qua in ipsa sunt opera , exurentur^ , on ne
pourra pas dire toutefois qu'elle soit imparfaite , sans
' hat. xix. :»6. — ' Hieronym. mHabac. iii. — ' a. Pein'tn. lo.
OOO DISSERTATIOJI
bcaute et sans ornement, puisqu'elle aura alors tout ce
qui peut contribuer a sa perfection dans I'etat de stabilite
et d'incorruption ou elle sera, quoiqu'elle n'ait plus eer-
taines beautes qui lui convenoient dans son premier etat
d'imperfection. Les ornemens qui convenoient a la maison
d'un particulicr ne lui conviennent plus des qu'on en
a fait le palais d'un grand prince. Les saints ne gouteront
plus le plaisir du boire et du manger ; mais ils n'en se-
ront pas pour cela moins heureux. Ce plaisir, qui est
une suite dc notre besoin et dc notre foiblesse , sera
bien compense par d'autres delices plus pures et plus re-
levees.
Seniimeni Les millenaircs croyoient que les justes ressusciteroient
des iHilIenai- avant le jugement dernier; que' ces justes ressuscites, et
r^s sill* I t^idt * * 1 * ' ' * 1
, , , ceux qui seroient alors vivans , regneroient sur la terre
tic ia icrrc c*— * . ,
ores la rcsiir- <^vec Jesus-Christ descendu du ciel , pendant mille an-
noiioM. nees, dans une nouvelle ville de Jerusalem; que pendant
tout ce icuips , ils jouiroient de tons les plaisirs permis
du boire, du manger, et de I'usage du mariage ; que la
nouvelle Jerusalem seroit un sejour agreable ; que la
terre fourniroit abondamment toutes sortes de fruits;
que les animaux vivroient ensemble dans une entiere
union , et parfaitcment soumis aux hommes. Saint Ire-
nee * rapporte une circonstance qu'il pretendoit avoir
apprise des disciples de saint Jean, d'uue multiplication
de grains et de fruits , que la terre devoit produire avec
une abondance incroyable. Terluliien ^ s'est imagin(;
que la nouvelle Jerusalem devoit descendre du ciel
toute batie et tout ornee; il raconte que Ton en avoit vu
de son temps pendant quarante jours un modele suspend u
on i'air.
On voit par-la que ces anciens peres avoient une. idee
de la terre apres la resurrection , bien differente de celle
de nos scolastiques, que nous avons rapportee ci-devant.
Mais aussi ils ne croyoient pas que la terre dont ils par-
lent, et dont ils nous donnent la description , eut encore
passe par le feu. Toutefois Lactance ^ , qui pretendoit que
la resurrection des morts , et le jugement dernier , et Tin-
cendie du monde , precederoient le regne de mille ans sur
la terre, n'a pas laisse de faire une description de la terre
* Ifen. I. V. c. Sa. — * Tenull. I. v. 24. coiiLra Marvion. — ^ Lactam,
de Pramio , lib. vii. cap. 24. collalum cum epitome , cap. i r .
SLR L\ KIN DU MONDE. 5oi
a peu pres pareillc a celle que nous venons de voir. ]1 dit
(jue Ton baiira une vi!le pour la demeure des saints au
luilieu de la terre, ou Dieu regnera avec ses serviteurs ,
qui vivront dans I'innocence et dans la justice, et dans
I'usage dc toules series de plaisirs. lis auront meme des
enlans. Le feu qui se rcpandra sur la terre sera un feu
rairaculeux qui n'endonimagera point les plantes : Sine
vdlo virescentium corporum delrimento , adiiret tantum , ac
sensH doloris afjiciel '. Alors Ic monde sera delivre de
toutes sortes de maux et de disgraces ; plus de nuit ni de
lenebres : la June sera aussi brillante que le soleil, et ne
souffrira plus aucuue diminution ; le soleil sera sepl fois
plus brillant qu'il ne lest aujourd'hui ; la terre prodiiira
toute s(>rte de fruits ; le miel decoulera des rochers ; le
vin coulera dans les ruisseaux ; les fleuves an lieu d'eau
donneront du lait : les betes farouches quilteront leur
ferocite ; le lion et le veau mangeront dans la meme cre-
che ; les enfans se joueront avec les aspics : enfin on verra
alors ce que les poetes nous ont appris de I'age d'or sous
le regne de Saturne. Comme nos prof#ietes ont coutume
de parler des choses futures comme ^ ellcs etoient pas-
sees , les poetes, qui ignoroient ce 'angage, ont pris,
dit-il , leurs expressions comme si elles regardoient un
temps passe.
Cela arrivera, dit Laclance , six mille ans apres la
creation du monde, et ce regne heureux durera mille
ans entiers. Apres ce lerme , le prince des demons sera
delie, et il fera la guerre aux saints. Ceu\-ci se cache-
ront sous la terre pendant trois jours ,et Diea fera eclater
sa vengeance par une infinite de prodiges contre les en-
nemis de son nom. Puis la terre s'ouvrira, et les mon-
tagnes s'affaisseronl de tous cotes; les corps seronl ras-
sembles dans une profonde vallee, ou Dieu les ressuscitera.
11 renouvellera le monde; le ciel sera p!ie comme uu
rouleau que Ton enveloppe ; la terre sera changee , et
Dieu transformera les hommes en anges : ils seront aussi
blancs que la neige : ils demeureront eternellement en
la presence du Seigneur, lui offriront des sacrifices, et
le serviront durant toute leternite. Alors se fera la se-
conde resurrection , dans laquelle les mechaus memes
ressusciteront pour etre eternellement tourmenles dans
* LaclancL de divino Prtemio, lih. tit. rajt • i
503 DISSERTATION
les enfers. Voila ce que Lactance donne comme la foi des
Chretiens.
Reinarques Mais il ne faut pas s'imaffiner que toutes ces particu-
.„»„., i«<= larites aient jamais ete crues universellement et unifor-
milI6naiies. memeiit dans 1 tglise. On y croit la fin du monde , la
venue de Jesus-Christ , le jugement dernier , la resurrec-
tion des morts , la recompense ou le regne des jusles ,
et le supplice des medians, le renouvellement du
monde ; mais le temps , la manicre , les circonstances
de la plupart de ces choses , nous sont certainement tres
inconnues.
Celui qui a donne plus de credit au systems des mille-
naires est Papias , disciple de saint Jean I'evangeliste , et
compagnon de saint Polycarpe ; il pretendoit avoir recti
des apotres et de leurs disciples I'opinion du regne de
Jesus-Christ sur la terre pendant mille ans ^ C'est ce qui
a engage saint Irenee ', saint Justin le martyr ^, Ter-
tullien "*, Victorin dans son commentaire sur I'Apoca-
lypse ^ , Lactance ^ , et quelques autres, c'est ce qui les
a engages dans c€ sentiment, qui a ete combaltu par di-
vers auteurs des ks premiers siecles de I'Eglise. Et certcs
la remarque que fait Eusebe sur le caraclere de I'esprit
de Papias doit suffire pour faire tomber son autorite sur
cet article. C'etoit un homme d'un genie fort mediocre ,
qui, n'ayant pas su comprendre ce que les apotres lui
disoient, a pris dans un sens litteral ce qui devoit s'en-
tendre dans un sens niysterieux". Saint Denys d'Alexan-
drie^, dans le troisieme siecle, refuta expressement un
nomme Nepos qui avoit compose un livre pour soulenir
le sentiment des millenaires, Caius '-^ , prelre de Teglise
romaine, qui vivoit au second siecle, le traite de fable
inventee par Cerinthe. Origene le rejette en plus d'un
endroit de ses ouvrages *°. Et on peut conclure avec un -
habile homme '^ , qui a traile a fond cette matiere , que
ie sentiment des millenaires est contraire, et a I'Evan-
* Euseb. lib. iii. Nisi. eccl. cap. 3i). — - Iren. lib. v. c. 33. et apiid
Euseb. lib. iii. cap. 39. — ^ Justin. Maviyr. Dial, cum Tryph. — * Teriull.
lib. m. contra Marcion., cap. 24. — ^ f^ictorin. apud Hieronym. in Ezech.
XXXVI. — ^Lactam, lib. vii. cap, 24. — ' Euseb. lib. in. cap. 39. Hist. eccl.
— " Dionys. Alex, apud Euseb. lib. vii. c. 24. Hist, eccles. — -^ Caius
apud Euseb. lib. iii. cap. 28. — Hist. eccl. — *** Origen. lib. nde Princ.
cap. 1.. el in Mallh. — '' M. du Pin , sur les millenaires , Dissert, ix , qui est
la neuvieine de ses Dissert, sur 1 'Apocalypse.
Stn L\ H.N DU MONDE. 5o3
gile, et a la docirioe de saint Paul, et nullement fonde
clans I'Apocalypse. Ce syslerae doit sa naissancc a la su-
perstition judaique , son introduction dans le christia-
nisme a la milice de Cerinthe, son elablissement parmi
les Chretiens a la credulite de Papias , son accroissement
a la facilite des auteurs, qui, sans examiner si Papias
etoit un temoin digne de foi , se sont laisse entrainer par
I'autorite que lui donnoil la qualite de disciple de saint
Jean, et enfin sa vraisemblance apparente aux mauvaises
explications de I'Apocalypse. Ainsi, quelque ancien qu'il
soit dans I'Eglise , et quelque grande que soit I'autorite de
ceux qui I'ont soutenu , seduits par le faux sens que Papias
a donne aux discours des apolres, il est absolument insou-
lenable.
Pour conclure cctte Dissertation, il est bon de faire Conclnsion
trois reniarques : Premierement , que plusieurs des pas- "*^ '"^V*^
sages que Ton a cites , conime contenant la description de
ce qui arrivera a la fin du monde , sont des descriptions
figurees de I'etat des Juifs apres leur retour de Babylone ,
et de I'elat de I'Eglise depuis la venue dc Jcsus-Christ , el
qu'ainsi on ne doit point insister a les prendre a la Iclire.
Secondement , qu'on ne pent sans temerite fixer le temps, •
la maniere , ni les autres circonstances de la fin du monde,
a I'exception de celles qui sont marquees dans I'Ecriture
clairement, sans equivoques et sans figures; et celles-lu
sont en tres petit nombre , la plupart des autres qui y sont
exprimees etant marquees sous des expressions figurees,
dont on ne pent exaciement fixer le vrai sens et la juste
etendue. Troisieraement , que la foi ne nous oblige de
croire sur cela que ces trois articles : le premier , que le
monde finira; le second, qu'il finira par le feu; Ic troi-
sieme , que le monde ne sera pas aneanli , niais seulemcnt
change et perfectionne : et par consequent tout ce que Ion
dit sur la duree du monde , sur la nature et les qualiles du
feu qui doit bruler le monde , s'il precedera ou s'il suivra
le jugement, sur la forme et les autres qualites de la terre
et des elemens apres le jugement , tout cela est problema-
tique et douteux. Or, on doit compter pour beaucoup de
savoir douter a propos.
DEUXIEME EPJTRE
DE SAINT PIERRE.
CHAPITRE PREMIER.
Dons de Dieu accordes aux fideles. Encliainement de verlus qui commencent
par la foi , ct qui se terminent par la charity. Affermir son election par les
bonnes ceuvres. Transfiguralion de Jcsus-Christ. Usage des prophcties.
1. Simon Pierre, serviteur et apo-
tre de Jesus-Christ, a ceux qui sont
comnie nous participaiis du pre-
cieux" don de la ioi par b justice
de notre Dieu et Sauveur Jesus-
Chrit : '
2. Que la grace et la paix croisse
en vous de plus en plus, par la con- '
noissance de Dieu et de Jesus-
Christ notre Seigneur.
3. Comme sa puissance divine
nous a donne' toutes les choses qui
regardent la \ie et la piete, en nous
faisant connoitre celiii qui nous a
appeles par sa propre gloire et par
sa propre vertu ,
4 Et nous a ainsi communique
les grandes et precieuses graces
qu'il avoit promises, pour vous
rendre par ces memes graces parti-
cipans de la nature divine, si vous
I'uyez la corruption de la concupis-
cence qui regne dans le siecle par
le dereglement des passions ;
!. Simon Petrus, servns
et apostolus Jesu Christi ,
iis qui cosequalem nobis-
cum sortiti sunt fidenn in
justitia Dei nostri, et Sal-
vatoris Jesu Christi :
2.. Gratia vobis et pax
adimpleatur in cognitione
Dei, et Christi Jesu Do-
mini nostri :
5. Quomodoonmia no-
bis dlvinae virtutis suae ,
quae ad vilam et pietateui
donata sunt , per cogni-
tionem ejus qui vocavit
nos propria gloria et vir-
tute,
4- Per quom maxima
et pretiosa nobis promissa
donavit : ut per hsec effi-
ciamini divinae consortes
naturae , fugientes ejus ,
quae in mundo est, cpn-
cupiscentiae corruptio-
nem.
V 1. Cest le sens da grec laoTtaov.
Ibid. Ou plutol et selou le grec: (jui nous est cominuniquce par la grace
de Jesus-Christ noire Dieu el noire Sauveur.
y ;». C'esl le sens du grec.
5. Yos autem curani
uinnein subinferentes ,
niinislrale in fide vestra
virtiitem , in Ti'itute au-
t' ni soientiam,
G. In scientia autein
ul)>itinen(iain, in abtincn-
tia autem patientiam, in
patientia anteni pielatem.
7. In pietate autem
amorem fraternitati?, in
amore autem fraternitatis
charitatem.
8. Haec enim si vobis-
cum adsint, et superent :
non vacuos , nee sine
fructu YOS constituent in
Domini nostri Jesn Chri>-
ti cognitione.
9. Cui enim non praes-
to sunt haec, csecus est.
et manii tenlans, oblivio-
nem accipiens purgationis
veterum suorum delicto-
lum.
10. Quapropter, fra-
tres, magis satagile, ut
per bona opera certam
vestram vocationem el
electionem facialis : haec
enim facientes, non pec-
cabilis aliquando.
11. Sic enim abundan-
ter ministrabitur vobis
introitus in jeternum re-
gnum Domini nostri et
Salvatoris Jesu Christi.
cm HI lut 1. 5o5
5. Apportez aussi de voire part
tout votre soin pour joindre a votre
toi, la \erlu; a la vertu, la science;
G. A la science, la temperance; '
a la temperiince, la patience ; a la
patience, la pictc ;
7. A. la piete I'amour de vos fre-
res ; eta Tamour de vos freres, la
charite. '
8. Car si ces graces se trouvent
en vous, et qu'clles y croissent de
plus en plus, elles feront que la
connoissance que vous avez de no-
tre Seigneur Jesus-Christ ne sera
point sterile et infructueuse.
9. 3lais celui en qui elles ne sont
point,' est un aveugle' qui marche
a tatons : il ne se souvicnt pas de
qjielle sorte il a ete purifie des pe-
ches de sa tie passee.'
ID. Efforcez-vous done de plus
en plus, mes freres, d'affermir vo-
ire vocation et voire election par
les bonnes oeuvres; car agissant de
cetle sorte, vous ne pecherez' ja-
mais;
11. El par ce moyen Dieu vous
donnera une entree favorable au
royaume elernel de notre Seigneur
et Sauveur Jesus-Christ.'
■jr 6. C'esl le sens du grec.
y^ 7. C'est-a-dire I'amour du prochain en Tue de Dieu.
y 9. Quelque pclairc qu'il soil des lumieres de la foi.
Ibid. Gr. est un aveugle qui Toil a peine te qui est Jout proche de scs
yeux ivjb^—x^bfi .
Ibid. De quelle oianierc il s'est oblige par son bapteme a vivre dans la
piele el la justice clirclienne , el d ne desirer que les clioses du ciel.
y 10. Gr. lilt, vous ne toraberez jamais.
y ir. Autr. Dieu vous fera enlrer dans le rovaume elernel de noire Sei-
gneur el Sauveur en vous comblaiud' ane ricbc abondanco de scs graces.
5oG
II* lU'lTKE I)E SAI?<T PIERRE.
Joan. XXI.
1 3.
12. C'est pourquoi j'aiirai tou-
jours soin' de vous faire reSvSouve-
venir de ces choses, quoique vous
soyez deja inslruits et confirmcs
dans la verite dont je vous parle,
i3. Croyarit qu'il est bien juste
que , pendant que je suis dans
celte lenle,' je vous reveille, en
vous en renouvelant le souvenir.
14. Car je sais que dans pen de
temps je dois quitter cette tenle,
comme notre Seigneur Jesus-
Christ me I'a fait connoitre.'
i5. Mais j'aurai soin que, meme
apres ma mort,' vous puissiez tou-
joiirs vous remeltre ces choses en
memoire.
i.Cor.i. 17. 16. Au reste, ce n'est point en
suivant des fables et des fictions
jngenieuses que nous vous avons
fait connoitre la puissance etl'ave-
nement de notre Seigneur Jesus-
Christ; mais c'est apres avoir ete
nous-memes les spectateurs de sa
majestt';.
17. Car il recut de Dieu le Pere
unglorieux temoignage d'honneur,
lorsque , de cette nuee ou la gloire
de Dieu paraissait avec tantd'eclat/
Matt. xvii. 5. on entendit cette voix : Voici mon
Fils bien-aime, dans lequel j'ai mis
toute mon affection, ecoutez-le.'
18. Et nous entcndimes nous-
memes cette voix, qui venoit du
ciel, lorsque nous etions avec lui
sur la sainte montagne.'
12. Propter quod inci-
piam vos semper commo-
nere de his : et quidem
scientes et confirmatos
vos in praesenti veritate.
i5. Justum autem ar-
bitror, quumdiu sum in
hoc tabernaculo , susci-
tarevosin commonitione:
i4- (^ertus quod velox
est depositio tabernaculi
mei, secundum quod et
Dominus noster Jesus
Christus significavit niihi.
i5. Dabo autem ope-
ram et frequenter habere
vos post obitum meum,
ut horum memoriam fa-
ciatis.
16. Non enim uoctas J
fabulas secuti , notam fe- \
.... -^
ciraus vobis Domini nos-
tri Jesu Christi virtutem
et praesentiam : sed spe- ,1
culatores facti illius mag- I
nitudinis.
17. Accipiens enim a
Deo Patre honorcm et
gloriam, voce delapsa ad
eum hujuscemodi a mag-
gnifica gloria : Hie est Fi-
lius mens dilectus, in quo
mihi complacui : ipsum
audite.
18. Et banc vocem nos
audivimus de ccelo alla-
tam, cum essemus cum
ipso in monte sancto.
■jr 11. G'esl le sens du grec.
y- i3. Dans ce corps mortel.
■jf 14. Voyez la preface.
)?• i5. Gr. litt. apres mon depart de cette vie.
y 17. Sur le Thabor.
Ibid. Ces deux mots , ijisum aiidite , ne sont pa» ici dans le grec j inais on
Irs trouve dans I'li^vangile : Matt. xvii. 5. etc.
y 18. Le Thabor.
i6.
CHAPITRE I. .■)07
19, Et habeiuiis firmio- 19. Mais nous avoiis les oracleS
rem propheticuin sermo- des prophete<, dont la certitude est
nem : cui benefacitis at- plus affermie,' auxquels vous faites
tendentes , quasi lucernaj bien de vous arreter, conune a une
lurenti in calig^inoso loco, lampe qui luit dans un lieu obscur,
donee dies elucescat, et jusqu'a ce que le jour' commence
luciferoriatur in cordibus a paroitre ct que I'etoiie du matia
restris : se It^ve dans vos coeurs/
21. Hoc primum intel- 20. Etant persuades avant loutes «- Tint. 111.
ligentes, quodomnis pro- choses que nulle prophetic de FE-
phttia Scripturae propria criture ne s'explique par une inter-
iuterprelalionc non fit. pretation particulit-re.
31. Non enim volunta- 21. Car ce n'est point par la vo-
te huraana allata est ali- lonte des hommes que ies prophe-
quando prophetia : sed ties nous ont cte anciennement
Spiritu Sancto inspirati, apportees , mais c'est par le mou-
locuti sunt sancli Dei ho- vement du Saint-Esprit que les
mines. saints hommes de Dieu ont parle.'
y . 19. La cerliludedes oracles sorlis de la bouclie des prophetts eloit plus
aftermie dans I'esprit des Juifs, qui avoienl loujours era au ti'moignage des
proplieles, mais qui avoient peine a croire au U'moignage des apolres, et a
qui les apolres etoien I obliges de dire , comine on le veil ici : Ce ne sont point
eles fables que nous vous prechons; mais nous vous disons ce que nous avons
vu de nos yeux , et ce que les propheles ra6mes vous ont annonce.
Jbid. Une foi plus vive.
Ibid. C'est-a-dire que cette foi, qui est coinme IVtoile du matia, vous
donne une connoissance parfaile de Jesus-Cbrist. — Autr. jusqu'a ce que le
grand joar de ie'ternile paroisse , et que Jesus-Christ qui est I'etoiie du
matin ( Jpoc. xxii. i6.) se leve dans noscoeurs en sc manifestanta nous dans
la gloire.
y 21. C'est aussi par le mume esprit et par I'Eslise qa'il eclaire et qu'il
conduit , que nous devons recevoir I'interprclalion de ces divines jwroles.
CHAPITRE II.
Faux docteurs ; cbiliment qui leur est resene. Exemples de la justice de Dieu
sur les demons , sur le moode par le deluge , sur Sodome et Gomorrbe. Fau^
docteurs caraclerises. Recbule pire que le prtinier 6tat.
1. FuERUNT vero ct 1. Or, coninie il y a eu de faux
pscudoprophetae in po- prophfetes parmi le peuple, il y
pulo, sicut et in vobis aura aussi parmi vous de faux doc-
5o8
11" EpItRE DE saint PIERRE.
teurs qui introduiiont' de perni-
cieuses heresies,' et qui, renoncaiit
au Seigneur qui les a rachetes, at-
lireront sur eux-memes une sou-
daine ruine.
2. Et plusieurs les sulvront dans
leurs debauches ; et a cause d'eux
on blaspheinera la vuie de la \e-
.rite :
3. Et qui, vous seduisanl par
des paroles arlificieuses, trafique-
ront de vos ames pour salisl'aire
leur avarice : mais la condamnation
qui les menace depuis long-temps
s'avance i grands pa:i ; et la main
qui doit les perdre n'est pas endor-
mie.
Job. IV. i8. 4- Car si Dieu n'a point pardonne
Jud. 6. aux anges qui ont pechc, mais le's
a prccipites dans I'abime," on les
tenebres' sont leurs chaines , pour
etre tourmentes,' et icnus coirnne
en reserve, jusqu'au jugeraent;'
5. S'il n'a pas epargnc I'ancien
monde, mais n'a sauve que sept
f.en. vn. i. personnes avec Noe predicateur de
la justice, en faisant tbndre les
eaux du deluge sur le monde des
mechans ;
^e«. XIX. 25 6. S'il a puni les villes de So-
dome et de Gomorrhe, en les rui-
nant de fond en conible, et les re-
duisant en cendres, et en a fait un
exemple pour ceux qui vivroient
dans I'impiete; '
erunt magistri mendaces,
(jui introducent sectas
perditionis , et eum qui
emit eos , Doniinum ne-
gant , superducentes sibi
celerem perditionera.
2. Et mulli sequentur
eoruin luxurias, per quos
via veritatis blasphema-
bitur :
3. Et in avaritia flctis
verbis de vobis negotia-
buntur: quibus judicium
jam oiim non ccssat,et
perditio eorum non dor-
mitat.
4. Si enim Deus ange-
lis peccantibus non pe-
percit . sed rudentibiis
infcrni detractos in tarta-
rum tradidit cruciandos,
in judicium reservari :
5. Et originali mundo
non pepercit, sed octa-
vum Noejuslitiae praeco-
nem custodivit, diluvium
mundo impiorum indu-
cens.
6. El civitales Sodo-
morum et Gomorrhaeo-
rum in cinerem redigens,
eversione damnavit:ex-
emplum eorum qui iin^
pie acturi sunt, ponens :
'^ I. Grec: IntroJuiront en secret.
Ibid. G'est I'expression du grec.
^ 4 . Voyez la Dissertation sur les Ions et les manuals anges , loin. xix.
Ibid. C'est le sens du grec.
Ibid. Le mot cruciandos n'csl pas dans le grec , qui lit simplement : poui
etre lenus comme en reserve, etc.
Ibid. Qui en sera fait a la fin du monde , oil leur maliiC sera esposce a H
vue de toutes les creatures, el oii Dieu , apres les avoir depouilles du pouvoi^
qu'ils ont de nuire aux liommes, les cnfermera pour toujours dans le puiM
tie I'abime.
CUAPITllE il. OU^
7. Ll juslum Lol op- ^. Et s'il a ilciiMe le jiisle Lot,
pressum a ncrandoruui que ces abominal)les affligeoienl et
injuria ac Inxuriosa con- persecutoient par leur vie inl'ame,
\ I'l satioiie eripuit :
8. Aspectu eninj et an- 8. Ce juste qui ' Jenieuroit parmi
tJitu juslu* erat : liabi- eux, etant lous les juurs tourniente
tans apud eo? qui de die ill dans son ame juste par leurs ac-
dieiu aniuiani justam ini- tions detestables, qui offensoient
quis operibus cruciabant. ses yeux et ses oreilles:
9. !Novit Dominus pios 9. Le Seigneur sail delivrer ceux
lie teutalione eripeie : qui le craignent, des uiaux par les-
iniquos vero in diem ju- quels ils sont eprouves, et reserver
dicii reservare crucian- les pecheurs au jour du jugetnent,
ilos :
10. Magis aulem cos
qui post carnem iu con-
cupiscentia iinuiunditia?
ambulant : dominalio-
iieinque conteuinunt, au-
daces , sibi placentes ,
sectas nou luetuunt iii-
troducere bkspheinan-
tes :
J I . Lbi angeli fortitu-
dine et rirtute cum sint
uiajores, non portant ad-
\crsuin se execrabile ju-
dicium.
la. iJi vero velut irra-
tionabilia pecora , natii-
I'.ililer iu caplioneni et in
perniciem , in his qu;c
ignorant blasphemant^is,
ill corriiptionc sua pcri-
lumt.
pour etre punis :
I o. Et principalement ceux qui ,
pour satijiaire leurs "ilesirs impurs,
suivent les mouvemens de la chair;
qui meprisent les puissances; qui
sont audacieux; qui sont amoureux
d'eux-memes; et qui blasphemant
la saine doclriiic , ne craignent
point d'inlroduire des secies n«>n-
velles ; '
1 1. Au lieu que les anges , quoi-
qn'ils soienl plus grands en force et
en puissance . ne se condamnent
point les uns les autres, avec des
paroles d' execration et de maledic-
tion. '
19.. Mais ceux-ci, comme des
animaux sans raison , qui ne sui-
vent que le mouveuient de la na-
ture , et qui sunt nes ' pour eifie la
proie des hommes qui les font perir.
attaquant par leurs blasphemes ce
qu'ils ignorenl, ' periront dans les
infamies ou ils se plongent,
X S. Cesl la construction Ju grec.
y 10. Grec : at qui ne craignenl poinl de mauJirc ceux qui se sont elevcs
.1 digniie.
y II. Voki comment quelques-uns expliquent le grec: au lieu que les
angcs , fjuoiqu'ils soient plus grands en force et en puissance , ne les condam-
nent poinl avec des paroles de maI«!diclion :\ cause de VautorUe du Seiciieiir
dont lis sont revetus.
y 12. Ce mot est expriiue dans Ic grec: nala in captiotieni , etc.
Ibid. Dechirant par leurs medisances el lears calomnics ce qa'il j a de
plus respeclalile.
n EI'lTUE DE SAIM PIEKRE.
6 1 ()
i3. Recevant la rocompeiiso quo
inerite leur iniquile. lis meUenl la
felicitc a passer chaque jour dans
los dcliccs; ils s'y abandounent de
telle soite, qu'ils ne sont qu'or-
dure et inlamie , et quo ce n'est
qu'exces dans Ics festins dc charile
qn'ils font avec vons.
i4- Il'j ont les yeuxplcins d'adul-
tere, et d'un pcche qui ne cesse ja-
mais : ils attirent a eux , par des
amorces trompeuses, les ames le-
gcres et inconstantes : ils ont dans
le cocur tonics les adresses qne I'a-
varice pent suggerer; ce sont des
enfans'de malediction.
J 1 J ^ 1 5. lis ont quitte Ic droit chemin,
et se sont egares, en suivant la voic
de Balaam ills de Bosor, ' qui aima
la recompense de son iniqnite,
i6. Mais qui fut repris de son in-
juste " dessein; une rmesse inuctle,
Nu/n.x\n. qui parla d'une voixhumaine, ayant
22. reprime la tblie de ce prophete.
Jiid. 12. 17. Ce sont des fontaines sans
eau, des nuees qui sont agitees par
des tourbillons; de noires et pro-
fondes tenebres leur sont reser-
' vees.'
18. Car tenant des discours d'in-
solence et de iblie, ils amorcent,
par les passions de la chair ot les
Yoluplcs sensuellcs ' ceux qui peu
de temps anparavant ' s'etoient re-
tires des personnes infectees d'er-
reur ;
19. Leur promettant 1-a libcrte,
i3. Percipienles mer-
cedem injustitioc, volup-
latem exislimanles diei
delicias : coinquinatioiies
et maculae, deliciis af-
fluentcs, in oonviviis suis
luxuriantes vobiscum,
1^. Oculos hahentes
plenos adulterii , et in-
cessal)i!is delicti : pelli-
cientes animas instabiles,
cor exercitatum avaritia
habenles, inalediclinnis
Glii :
i5. Derelinquentesrec-
tam viani erraverunt, se-
cuti viam Balaam ex Bo-
sor, qui mercedem ini-
quitatis amavit :
16. Correptionem vero
habuitsuac vesaniae: sub-
jugale mutum animal,
hominis voce loquens,
prohibuit prophetae insi-
pientiam.
17. Hi sunt fontes sine
aqua, et nebulae turbini-
bus exagitalae , qnibus
caligo tenebrarum reser-
vatur.
18. Superba cnim va-i
nitatis loquentes, pelli-|
ciunt in desideriis carnisi
luxuriae eos qnipaululuinj
effugiunt, qui in errorc
conversantur :
19. Libertatem illis
^ i5. Quelques manuscrits grccs lisent : Bi'or; et c'esl ainfi qu'il est]
nomme au livre des Norabres, xxn. 5. xxiv. 3.
•5?- 16. C'est le sens du grec.
■jJ^ 17. Le grec ajoule : pour relcniile, ei; aiwva.
■^18. Auxquclles ils permclU nl dc s'abandonncr.
Ibid. C'esl le sens du grec.
CHAP I IRE II.
5ll
promittentes , ciiin ipsi quoiqu'eux-in6uies soieni esclaves
servi sint corruptionis : a de la corruption, parce que qui- •/o^t/i.tim. 3.;.
quo enim quis superatus conque est vaincu , est esclave de ^om. yi. i6.
est , hujus et servus est. celui qui I'a vaiacu , ' ^•••
20. Si enim refugicn- 20. Parce que, si, apres s etre Matih.xu.
tes coiiiquinationes mun- retires des corruptions du monde ^5
di in cognitione Domini par la connoissance de Jesus-Clirist
nostri, et Salvatoris Je!?u notre Seigneur et Sauveur, ils se
Christi, his rursus im- laissent vaincre , en s'y engageant //eir. n. 4.
plicati superantur : facta de nouveau, Icur dernier elat est -'/"'M". 45
sunt eis posteriora date- pire que le premier ;
riora prioribus.
21. Melius enim erat 21. Car il eOt micux valu pour
illis non cognoscere viaiu eux n'avoir point connu Ja voie de
justitiae, quam post agni- la justice, que de retourner eu ar-
ricre apres I'avoir connue , et d'a-
bandonner la loi sainte qui leur
avoit ete prescribe
tionera , retrorsum con-
vert! ab eo, quod illis tra-
ditum est, sancto man-
dalo.
22. Contigit enim eis
illud veri proverbii : Ca-
nis reversus ad suum vo-
initum : et, Sus lota in
volutabroluti.
22. Mais ce qu'on dit ordinaire-
ment, par un proverbe veritable,
leur est arrive : Le cLien est re-
tourne a ce qu'il avoit lui-meme
vomi : et le pourceau, apres avoir
ete lave, s'est vautre de nouveau
dans la houc.
y 1 9. Ainsi ils les engagent dans une servituJe plas cruelle que celle oii ils
eloient autrefois.
> 20. Quelquesexemplairesgrecs lisenl: Car ceux qui apres, etc.
CHAPITRE III.
Imposleurs qui mepriseronl la promesse du second avenement de J^sus-Christ.
Enjbrasement du monde. Patience de Dieu. Avenement de Jesus-Clirisl.
Monde renouvele. Saint Paul loue; diflicidte de ses epilrcs. Croitre en
sjrace et en science.
1. Ha5c ecce vobis,
cliaii'simi , secundam
scribo cpistolam, in qui-
bus ve?tram excito in
commonitioMe sinceram
mentem :
I. Mes bien-aimes, voici la se-
conde lettre que je vons ecris : ct
dans loutes les deux je tache de rc-
veiller vos ames simples et sincere*
par mcs averlisseniens , ■
6l 2
11" EPITRE DE SAINT
I. Tim. IV
5>.. Tim. 111.
J lid. 1 8.
2. Afin que vous vouS souveniez
(les paroles des saints propheles
dont j'ai deja parle, ' et des pre-
teptes de noire Seigneur et Sau-
vein- que vous avez recus de nous, '
qui soilimes vos aputres.
3. Sachez, avant toutes choses,
qu'aux derniers temps il viendra
des scducteurs ' pleins d'arliflce
qui suivront leurs propres pas-
sions,'
Ezech. xn. 4- E*^ 1"i diront : ' Qu'est devenue
7- la promesse de son second avene-
ment?' car depuis que nos peres
sont dans le somineil , ' toutes cho-
ses demcureni; au ineaie etat oti
elles ctoient au commencement du
monde.
5. Mais c'est par une ignorance
Yolontaire qu'ils ne considerent pas
que les cieux furent faits d'abord
par la parole de Dieu , aussi bien
que la terre qui parnt hors de
I'eau , et qui subsiste au milieu de
I'eau ;
6. Kt que le monde d'alors perit,
etant submerge par le deluge des
eaux. '
7. Aussi les cieux et la teri-e d'u
present sont gardes par la meme
PIEURE.
2. Ut meinores si I is
eorum, qutc praedixi ^
verborum a Sanctis pro-
phetis , et apostolorum
vestrorum, praeccptoium
Doiriini et Salvatoris.
3. Hoc primum scien-
tes, quod venient in no-
vissimis diebus in decep-
tione illusores , juxta
proprias concupiscentias
ambulantes ,
4. Dicentes : Ubi est
promissio, aut adventus
ejus ? ex quo enim paties
dormierunt , omnia sic
perseverant ab initio
creaturse.
5. Latet enim eos hoc
volenles, quod cceli erant
prius, et terra, de aqua
et per aquam consistens
Dei vcrbo :
6. Per quae, ille tunc
mundus aqua inundalus
periit.
7. Coeliautem qui nunc
et sunt, et terra, eoilem
■^ 2. Gr. auU-. des paroles qui out ele autrefois prononcees par les saints
j)rophelcs.
Ibid. C'l'Sl le sens du grec.
•y 3. Lilt, des moqueurs.
•jr 4. Pour pecher avec muins de reiiiords , el etouffcr on eux-m6raes el
dans les aulres la crainle des jugeinens de Dieu.
Ibid. De Jesus-Clirisl ; avenemenl cu I'on disoil qu'il devoil vcnir changer
loutes choses? Nous ne voyons, diront-ils, aucune appnrence h ce change-
nient; el cet embrasement universel , dont on nous nieuaooit, n'est qu'une
purechimere.
Ibid. Sont morls.
•y 6. Plusieurs expliquenl ainsi le grec : SC wv, par lesquels ; jiar les ciciix
qui laisserenl loniber sur la lerre les eaux du deluge. Quelques-uns I'expli-
quent \>ar f^er (/ncc , au sens d'/aVo : Et cela elanl ainsi , le inoiide d'aiors
peril, elanl submerge par le deluge des eaux. IMais ks cieux el la lerre d"a
present , elc.
\erbo repositi sunt, igni
reservati in diem judicii ,
et pcrditionis impiorum
hominum.
8. Lnum vero hoc non
laleal vos , charissinii,
quia unus dies apud Do-
ininum sicut uiille aani,
et niille anni sicut dies
unus;
9. Nontardat Dominus
promissionem <uain, si-
cut quidam existimant :
sed patienler agit propter
vo«, nolens aliquos pe-
rire, sed onines ad poeni-
tentiam reverli.
10. Adveniet autem
dies Domini ut fur, in
quo cceli magno impetu
transient, elementa vero
calore solventur , terra
autem, et quae in ipsa
sunt opera, exurentur.
11. Cum igilur haec
omnia dissolvenda sint,
quales oportet vos esse
in Sanctis conversalioni-
bus et pietatibus,
1 2. Expectantes et pro-
perantes in adventum
diei Domini, per quern
cceli ardentes solventur,
et elementa ignis ardore
tabescent.
i5. Novos vero ccelos
et novam terram secun-
CHAPITRE III. " 5i3
parole, ' et sont reserves pour etre
briilcs par le feu , au jour du juge-
ment et de la mine des hommes
mc'chans et impies. '
8. Mais il y a une chose que vous
ne devtz pas iguorer, mes bien-
aimes, qui est qu'aux yeux du
Seigneur un jour est comrae mille
ans, et mille ans corame un jour.
9. Ainsi le Seigneur n'a point re-
tarde Taccomplissement de sa pro-
messe, conime quelques-uns se
I'imaginent; mais il vous ' attend
avec patience , ne voulant pas
qu'aucun perisse , mais que tous
rctournent a bii par la penitence.
10. Car le jour du Seigneur vien- i. Thess.y.*,
dra comme un voleur : ' et alors, Jpoc. wi.Z.
dans le bruit d'une effroyable tem- ^'*'- ^^'
pete, ies cieux passeront, les ele-
mens embrases se dissoudront, et
la terre, avec tout ce qu'elle con-
tient, sera consumee par le feu. '
11. Puis done que toutes ces
choses doivent perir, quels devez-
vous etre , et quelle doit etre la sain-
tele de votre vie et la piete do vos
raceurs ? '
1 3. Attendant et hatant ' par vos
desirs I'avenement du jour du Sei-
gneur, ou I'ardeur du feu dissoudra
les cieux, et fera fondre les e!c-
mens.
i5. Car nous attendons, selon sa isai.i.\\. 17.
promesse, de uouveaux cieux et lxvi. -22.
y - . C'esl le sens du grec : gardes par la mdmc parole comme dans le tre-
sor de Dieu , elc.
Ibid. Voyez la Dissertation sur la Jin du monde , a la Idle de celte epUrf-.
y y. Le grec lit : nous. ^
y 10. Grec: durant la nuit.
Ibid. Aulr. sera brulee. Voyez la Dissertation sur lajin du monde , a l.i
tAte de cette epitre.
y X I. Vous devez yiTte dans nn grand d^tachenient de toutes les choses de
la terre.
■f 1 a. C'est le sens du grec.
20. 33
5i4
IV EPITKK r)C SAIN 1 PIERRE.
Jpoc.wi. I. une nouvelle terre, dans lesqiiels
habitera la justice.
14. C'est pourquoi, mes bien-
aimes, vivant clans I'attente de ces
choses, faites en sorte que Ic Sei-
gneur vous trouve dans la paix, et
que vous soyez purs el irreprehen-
sibles a ses yeux ;
Horn, II. 4. i5. Kt croyez que la longue pa-
tience dont use notre Seigneur est
pour votre bien , " et c'est aussi ce
que Paul, noire Ires cher frere , '
vous a eorit," selon la sagesse qui
lui a ete donnee ;
16. Comnie il fait aussi en tou-
tes ses lettres, oi'l il parle de ces
meines choses; dans lesquelles it y
a quelques endroils difficiles u en-
tendre, que des homines ignorans
et legers , " detournent en de mau-
vais sens aussi hicn que les autres
Ecritures, dont ils abusent a leur
propre mine.
17. Yousdonc, mes frires, ' qui
connoissez toutes ces choses, pre-
nez garde a /ous ; dc peur que, vous
laissant emporter aux egarcniens dc
ces hoinmes insenses, ' vous ne
tombiez de I'elat solide oi"i vous
etes etabiis.
18. Mais croisscz de plus en plus
dans la grace el dans la connois-
sance de notre Seigneur et Sauveur
Jesus-Christ. A lui soil gloire, el
main!enant , et jusqu'au jour de
I'eternite. Amen.
dum promissa ipsius ex-
pectamus, in quibus jus-
titia habit-it.
14. Propter quod, cha-
rissimi, hoec expectantes,
satagite iunnaculati' et
inviolati ei invcniri in
pace :
1 5. Et Domini noslri
longanimitatem salutem
arbitremini : sicut et cha-
rissimus frater nosier
Paulus se(;undum datam
sibi sapientiam scripsit
vobis ,
16. Sicut etin omnibus
epislolis, loquens in eis
de his , in quibus sunt
qua^dam difficilia intel-
lectu, qua? indocti et in-
stabiles depravant, sicut
ot ceteras Scripturas, ad
suam ipsorum perditio-
nem.
17. Vos igitur , I'ratres,
praescientes custodite : ne
insipientium errore tra-
ducti excidatis a propria
finnitate.
18. Crescite vero in
gratia el in cognitione
Domini noslri et Salva-
toris Jesu Christi. Ipsi
gloria el imnc, et in diem
ailernitalis. Amen.
•f i5. Ne difforanl son second avenement que pour vous donner le temps
de vous convcrlir. — Liu. pour voire salut.
Idid. Gr. lilt, noire frere bien-aime.
I/ji'd. U paroil que cela regarde I'epitreaux HcLreux. Voycz \^pirf(ice stir
cetle ipilre.
■^ 16. Ou peu affermis dans la foi. — C'esl le sens du grec: ignorans et
peu affermis.
T^ 17. Gr. lilt, mes bien-aimes.
Ibid. C'est le sens du grec.
PREFACE
SliR LA PREMIER E EPITRE
DE SAIM JEAN.
L\ premiere epilre de saint Jean a toujours passe pour Aquicette
canoniquedansl'Eglise. Onignore le temps, le lieu ou die pp'tre est a-
a ele ecrite, etles personnes auxqueiles elle a ete adressee ; "'^*^'*
mais on propose sur ceia diverses conjectures. Saint Au-
gustin ' et quelques autres^ la citent sous le nom d .£y>//r<'
a'jj: Parthes : et Grotius croit que sous ce nom on doit
entendre tons les Juifs convertis, qui etoient, non sous
I'enipire des Romains, mais sous celui des Parthes, qui
contesloient alors aux Romains I'enipire d'Orient; et sur-
lout les Chretiens hebraisans, qui etoient au-dela de I'Eu-
phratc , a Nearda , a Nisibe . et autres lieux.
De cette inscription A' Epilre aux Parthes , Baronius a
infere que saint Jean avoit preche aux Parthes^; etlesmis-
sionnaires deslndesracontent que les Indiens tiennentpar
tradition qui! a preche dans leur pays; mais la chose n'est
nulleroent certaine. On nc voit drms I'antiquild aucune
trace que saint Jean ait jamais ele dansce pays-la. Etquand
il seroit vrai que son epitre auroit ete adressee aux Parthes,
il ne s'ensuivroit pas qu'il evit ete chez eux. Saint Paul
ecrivit aux Romains qu'il n'avoit jamais vus. 11 ne paroit pas
non plus qp'il ait jamais preche aux Colossiens, auxqaels
il ecrivit.
Liijhtfooi* a propose une autre conjecture sur I'egiise a
laquelle cette epilre est adressee. Saint Jean dit dans sa
troisieme epilre ecrite a Gaius ', qu'il a eUjd ecrit d I'egiise.
' -^"S- Queest. Evangel lib. ii. c. I9. — * Posfdins Indicul. oper. S.
Aug. Idac. Clar. contra f^afimad. jfihanas. apud Bed. Prolog, in epist.
Canonic. Vide et psetido-IIygin. ep. 1. c i. el Joan. i'. ad ralcriiim. — '
' Baron, ad an. i^. § 3o. — * Ligktfoot horte Uebr. in 1. Ccr. ''■ 14- —
* 3. Joan, y 9. Scripsissem forsitan Ecclesice ; sfd is qui nnial primatum
gerereeis, DioCrephes, nonrecipiinos. Grcec. t:-zxlx rf tw.'/.r,a'.7..
5l6 PREFACE
A quelle eglise , sinon a celle dont Gaius etoit mcmbre?
Saint Paul* nous apprend qu'il n'a baptise a Corinthe que
Crispus et Caius, ou Gaius; c'est done a I'eglise de Corin-
the que saint Jean a ecrit. Et quelle autre epitre peut-il leur
avoir ecritc que la premiere dont nous parlons ici? II vaut
mieux sans doute le croire ainsi , que de dire que cette pre-
miere epitre dc saint Jean a l' Eglise d'ou etoit Caius , est
perdue. C'est le raisonnement de Lightfoot, qu'il laisse au
jugementdes savans. Nous doutons qu'il trouve beaucoup
d'approbatours. Le fondement de sa conjecture est rui-
neux. On doule avec raison que Caius ou Gaius , auquel
saint Jean ecrit sa troisieme epitre, soit de Corinthe; il
etoit pluiot d'Asie.
On doute aussi si la premiere epitre de saint Jean est
ecrite aux genlils ou aux Juifs convertis. Laplupart croient
qu'il I'ecrivit aux Juifs convertis; et nous ne voyons rien
dans toule la tcrre qui ne revienne a ce systeme. Barthe-
lemi Pierre , qui a continue I'ouvrage qu'Eslius avoit com-
mence et presque acheve sur cette epitre, infere qu'il I'a-
voit aussi ecrite aux gentih, de ce que sur la fin de sa
lettre il les exhorte a eviter le culte des idoles : Custodile
vos a simulacris. Mais ne peul-on pas donner cet avis a des
Juifs convertis qui, vivant loin de leur pays, au milieu des
gentils et des idolatres, etoient tous les jours exposes a
I'idolatrie?
Saint Jean L'auteur ne met son nom ni au commencement, ni a la
estl auteurde gj^ gj jjg parle pas de sa personne dans tout le corps de la
celte epitre. • „ ■, ' ^ -^ -^ . \ r • at •
* lettre , d une maniere qui puisse le laire remarquer. Mais
son style etsa maniere de raisonner, ses principes, la cha-
rite dont il etoit picin, et qui eclale de toute part dans
cetle epitre, le font assez connoilre. On y sent I'esprit de
I'apotrc bien-aime. 11 la commence comme son evangile ,
par : In principio. II se sert du mot Acyo;^, pour designer
le Fils de Dieu; et du verbe grec io'^zdoi^, qui signifiepro-
prement inlerroger, ipour prier. S'il n'a pas mis son nom a
la tete de cet ouvrage , comme il a fait a I'Apocalypse,
c'est, dit Grotius, qu'il I'envoyoit par des marchands
d'Ephese, dans des pays qui etoient en guerre avec les
Remains, et que ceux-ci auroient pu prendre ombrage
de cet innocent commerce de lettres , et en auroient
* I, Cor. I. 14. — - r. Joan. v. 7. — ^ i. Joan. v. 16. Ou itspt exttvvj;
Xe'-^u v/a. epwTTiari.
SUR LA 1" EpItRE DE SAINT JEAN, 5l7
fait porler la peine aux chreliens. Baronius croit que le
titre en est perdu , et qu'elle etoit intilulee : Epilre aux
Parlkes.
Grotius veut qu'elle ait ete ecrite de I'ile dePalmos, Quel est le
peu de temps avant la ruine de Jerusalem. II senible en temps et le
elTet qu'au chap, ii >'' i8 il parle de la ruine prochaine de ','®" ""rv'^'j*
Jerusalem . lorsqu'il dit que la dernirre heure est venue : ^^{^^
Filioli , novisslma hora est. Mais Grotius, qui la faitecrire
de rile de Patmos, ne se souvient pas que saint Jean ne
fut relegue dans celie ile que par I'empercur Domitien',
plusieurs annees apres la guerre des Juifs et la destruc-
tion de Jerusalem.
D'autres^ croient qu'elle i'ut ecrilc long-temps apres
son retour de I'exil de Patmos. Mais s'il est vrai qu'elle ait
ete ecrite contre les disciples de Simon et de Cerinthe, et
autres heretiques de ce temps-la , qui nioient la divinite de
Jesus-Christ, etqui soulenoient qu'il n'avoit paru dans le
monde qu'en apparence ; si done elle est ecrite contre ccs
heretiques, comme on ne pent guerc en douler si on la lit
avec attention, et comme saint Clement d'Alexandrie,
saint Epihane , saint Jerome, et plusieurs autres le temoi-
gnent, on pourra la mettre quelque temps avant la guerre
des Romains contre les Juifs, et long-temps avant que saint
Jean ecrivit son evangile ; car Cerinthe et Simon vivoient
du temps meme de saint Paul , comme on le voit par les
Epilres de cet apotrc^, et comme le lemoigne saint Epi-
phane'*. En sorte que suivant cettc idee , on peul regarder
cette epilre comme une espece de preface ou de prelude
de I'Evangile de saint Jean.
Quelques souscriptions portent qu'elle fut ecrite d'E-
phese. 11 est assez croyable qu'il 1 ecrivit de I'Asie mi-
neure^, ou les anciens nous apprennent qu'il demeura
assez long-temps. Mais personne jusqu'ici n'en a pu fixer
I'annee precise. Si elle est anterieure a la destruction de
Jerusalem , il faut la mettre avant I'an 70 de I'ere chr. vulg.
* TertuU. Prcescript. pag. 345. JuJi. Qua'st. in f el. el N. T. inter
opera Jugitst. qncest. 72. torn. 3. Append, p. 71. Sulpit. Sever. I. 11.
Primas. et Viclorin. in Apocal. alii. — -Baron, ad an. Christ. 99. art.
-. 8. — 5 Vovez le commentaire de D. Calmet sur les cpilrcs aux Galates ,
auxThessaloniciens, elc. — * Eplphan. hceres. a8. Voyez M. de Tillemont,
torn. a. art. des Cerinthiens. — • II pul venir en Asic vers I'an 66 on 67 de
I'ere chret. vulg., c'esl-4-dire en I'annee du marlyre de saint Pierre et de
saint Paul .
6 1 8 PREFACE
Saint Jean pouvoit alors etre en Asie, age d'environ 70
ou 74 ans. S'il I'ecrivit apres son retour dc I'ile de Patmos,
et apres son Evangile , il faudra la meltre I'an 96 de I'ere
chr. vulg., saint Jean etant age de pres de cent ans.
Dtssein et Quant au dessein de cette epitrc , il est aise de voir que
analyse decet- •.t 1 'r» o •••..1 '
tedpitre saint Jean a voulu y reluter, 1" ceu?; qui nioient la neces-
sitedes bonnes ceuvres ; 2" ceux qui divisoient Jesus-Christ,
et qui soutenoient que Jesus n'etoit pas le Christ; 3" ceMx
qui croyoient que Jesus-Christ n'etoit venu qu'en appa-
rence. Yoila ies principales erreurs qu'il se propose de
combaltre. Elles etoient enscignees par Simon le magicicn
et par Cerinlhe , et par leurs emissaires, qui causoient de
grands ravages dans I'Eglise. 11 propose d'abord I'abrege
de I'Evangile , en annoncant I'incarnation du Verbe : il
expose Ies motifs de credibilite qui doivent porter Ies fi-
deles a recevoir I'Evangile , et ies motifs de charite qui le
portent a leur annoncer Jesus-Christ'. 11 leur explique
Ies lois et Ies conditions sur lesquelles est fondee la sociele
chretienne^. 11 en tire Ies consequences qui sont Ics fon-
demens du chrislianisme ; et ceci lui donne lieu d'exposer
Ies avantages propres aux justes^. II leur enseigne Ies
moyens de conserver ces avantages, ct dc defendre leur
innocence contre Ies avantages du dehors , (|ui viennent
de la corruption du monde * et de la seduction des here-
tjques^, ct contre Ies perils du dedans qui viennent prin-
cipalement de I'inconstance et de la foiblesse de notre
volonle''. 11 leur montre le caractcre et la necessite de
I'amour du prochain, qui est encore une condition essen-
tielle pour conserver et fairc croitre la vie spirituelle de la
grace'^. II Ies avertit de ne pas croire a tout esprit, et il
etablit Ies regies du discernement dont i!s doivent user^.
II revient encore aTamour du prochain , et il en etablit Ies
motifs^, De la il passe a ce qui regarde I'amour de Dieu'".
II etablit la foi dc la divinite de Jesus-Christ et du mystere
de I'incarnation '^ 11 ajoute trois maximes importantes
qu'il assure avec loutc la divinite apostolique pour la con-
solation des fideles, qu'elles relevent infiniuient au-dessus
des idolatres'^ ; et il finit en Ies exhortant tous a se garder
de prendre part au culte des idoles'^. Dans ce qu'il dit de
* Cap. 1. f I. -4. — * -j 5. adfinem. — ° Cap. ii. -j^ r.-i4. ■ — * i i5.-
17. — * "^ 18 ad finem. — * Cap. in. ^ i.-to.— ' ^ 10 ad fin. —
* Cap. IV. y I. -6. — ^ -i T.-ie. — *<• ^ 17 adfinem. - " Cap. \. i «.-
17. — '^ ■}} 1 8.-20. ---*■' -jj 21. et lilt.
SUR LA l" EPITBE DE SAI.M JKA>. 6 I if
la divinite de Jesus-Christ il y a un texte celebre donl on a
contesie rauthenlicile ; ce lexte va faire le sujel d'une dis-
seriation.
DiSSI-RTATION
SUR
LE FAMEIX PASSAGE
DE LA PREMIERE EPITRE DE SAIM JEAN.
CHAPITRE V, ^ 7 ,
lies ?unl qui testimonium dant in ccelo. Pater. Verbum, et
Spiritus Sanctus : et hi tres unum sunt. // j en a trois qui
retident temoignage dans le del , le P^re , te Verbe , et le Saint-
Esprit; et ces trois ne sont qu' un.
II n'estpas rare de voir des varietes de lecons^ns les Varicie de
livres sacres de i'Ancicn et du Nouveau Testamei^: mais lecons ici plus
il n'est pas commun d'en voir d'aussi importanles que importante
celles que Ton remarque dans le cinquienie chapiire de la ^V' ^"J^j-^
premiere epilre de saint Jean. Laplupart des autres diver- pinions sur
sites de lecons ne resfardent que certains mots mis en la I'auibcniiciie
place d'aulres mots, certains termes omis ou ajoules; ra- <J" paf^^age
rement ces diversites interessenl la reli5;ion et resrardent 1°".' ! *^S"-
,,.-,....,,.,, ' • 1 •. • Division de
la loi. iMais ici n s agit d une penode ejiUere , qui manque ct^^ Disser-
dans un tres grand nombre d exemplaires, et donl I'orais- laiion.
sion est d'une tres grandc consequence , puisque les enne-
mis de notre foi s'en prevalent pour aliaquer la croyance
de I'Eglise sur la Trinite , et pour appuyer leurs sentiniens
errones contre la divinite du Fils el du Saint-Esprit, et
contre I'egalite et ia consubstantialite des personnes di-
vines.
520 DISSERTATION
Ce ne sont pas seulement les ennemis de la Trinite qui
orit pretendu que ce passage n'etoit point authentique et
legitime ; plusieurs memesde ceux quicroient comme nous
a la Trinite, I'ont attaque , soil que le grand nombre des
exemplaires ou il ne sc lisoit pas anciennement eut fait
impression sur leur esprit, soit que Tenvie de se distin-
guer, etla demangeaison de critiquer les eussent emportes,
il est certain qu'ils n'ont pas parle sur cc sujet avec tou.te la
circonspection qui seroit a souhaiter. Erasme , par exem-
ple , a supprime ce passage dans les premieres editions du
Nouveau-Testament en grec et en latin qu'il a donnees*.
Luther de memo ne I'a point mis dans sa traduction alle-
mande. Ce passage ne paroit pas dans un bon nombre
d'impressions^ faites par des catholiques, que Ton ne doit
pas soupconncr d'avoir voulu donner atteinte a la foi de
I'Eglise sur la Trinite.
Richard Simon % connu par son histoire critique du
Yieux et du Nouveau-Testament, a soulenu expressement
et au long , que ce passage eloit ajoute dans nos exemplai-
res de la Bible, et que saint Jean ne I'avoit jamais ccrit.
Christophe Sandius , socinien , a rassemble avec grand
soin tout ce qui pent rendre ce passage suspect. Quelques-
uns ont pretendu que les ariens I'avaient supprime : d'au-
Ires ont cru que les catholiques I'avaient insere dans le
texte ; et Grotius a soupconne les ariens memes de I'avoir
mis dans le texte de saint Jean.
Mais la plupart des plus judicieux et des plus savans cri-
tiques iftant catholiques que protestans, I'onireconnu pour
authentique. Stunica^leP. Alexandre^ xMille*^, le P. Bu-
kcntop', Ketner^, Selden^, le P. Martianay '", Schmith,
et en dernier lieu Roger'', ont ecrit expressement pour la
defense du passage en question. Je ne parle pas des com-
' ^n i5i6 et i5i9. Basilece. — -Edit. Aldi, Venel. ryrS. Volfii , jii--
gentor. an. iSa^. Colincel , Paris, an. i534. f'ide etedilionein Lcwaniens.
Liigd. an. iSCa. — ^ Simon, Histoire crilique du Nouveau-Testament, el
dans sa Dissertation a la fin de celte critique. — '' Stunica ad^ersus Finsmiuu
in r. Joan. v. 7. Compluli , rSig. — ^ Natal. Alex, in Nov. Test. torn. i.
an. de epistolis canonicis. — ^ Millius Dissert, in i. Joan. y. 7. adcalcem.
vat: led. in epist. i. Joan. — ' Buhenlop, Lux de luce, lib. w.p. '06. — •
" Kctner. Defensione hujus loci , Dissert, singulari. — ^ Selden. lib. 11. de
Synedriis, cap. iv. p. i33 et seq. — ^^ Marti an ce Not. in Pivlog. epist.
catholic, pag. 1669. 1670. torn. i. ncv. edit. S. Hiemnymi. — " Roger,
Dissert, critico-theolog. in hinic loc. Paris. 171 3.
SUR LE FAMELX PASSAGE UE SAINT JEAN. 52 1
menlateurs, qui presque tous ont souicnu son anthcnlicite
ct sa verile.
Pour instruire pleinenient !c lecteur sur celte question ,
il est bon de rapporter ici les raisons que Ton produit
pour et contre, afin de le mettre en etat d'en tirer de
justes consequences, avec une entiere connoissance de
I a use.
ARTICLE PREMIER.
Preuves alleguees par ceux qui contestcnt i'anlhenlicite du -jf - du cliapitre v
de la premiere epilre de saint Jean.
O.N peut partager les exemplaires tant iraprimes que Varit-ie de
nianuscrits, en trois classes. Les unsomettent enlierenient ^^loos sur le
I 1 II- texle do^t il
ce passage ; les autres le portent comme nous le iisons au- ^ .^
jourd'hui dans la Vulgate; et les autres varicnt. De ces
derniers piusieurs le lisent a la marge : d'autres le portent
dans le corps du texte, mais avec celte difference que quel-
quefois le f 8 est mis avant le y 7, de celte sorle : Ires
sunt qui lesUmonium dant ( ou dicunt ) in terra , spiritus , aqua
ft sanguis : et hitres unum sunt. Et tres sunt qui testimonium
dicunt in calo , Pater, Fcrbum , ct Spiritus : et hi ires unum
sunt^. D'autres exemplaires ne mettentque ces mots : Tres
sunt qui testimonium dant in calo, Pater, Verbum , ct Spiri-
tus : et tres unum sunt'^ ; et omettent ce qui suit : Tres sunt
qui testimonium dant in terra , etc, D'autres lisent au "j^ 8 ' :
Et tres sunt qui testimonium dant in terra ^ spiritus , aqua el
sanguis; et omettent : Et hi tres unum sunt. Et saint TLo-
liias* souticnt que ces derniers mots ne se lisoient pas dans
les vrais exemplaires. Lorin , Luc de Bruges et Hessel re-
connoissent qu'il y a piusieurs exemplaires latins oil ils ne
se trouvent point. On ne les lit ni dans le grec ni dans le
latin de la bible polyglottc de Complute , ni dans le manu-
* / ide Cod. Corbei. n. 2.1. apitd Maru'ance. pag. 1G7J. I la el E 11 gen.
Cai-ihng. lib. de Cadwl. Fide (-'ide el Idacium advcrs. f'^arimand. et I'lil-
gsnliuin Besp. contra Arianos. El miiha Fitlgatce exemphria. finger.
P- 128. — * I la Cod. dua Muibac. el iintis Compend. a me visi. El alii
quidam. — ' Omiuit Complut. ei Cod. Britannic. Codd. Lat. Lovan. i5.—
* D. Thorn, opuscul. 24.
DISSKRTAIIOIN
scrit alexaudrin , ni cliins celui d'Anglelerre dont parle
Erasme^ni daus deux, nnuiusciits do Saint-Gcrniain-des-
Prcs, 11°' 43 el 44. D'autrcs ajoulenl ' : Ei hi Ires unumsunl
in Christo Jesu; comma \io\iv eloigner Tidee que Ton au-
roit que I'esprit, I'eau el le sang sent un , de la meme ma-
niere que Ic Pcre , le Veibe el le Saiul-Esprit. Les exem-
plairesgrecs au lieu de : Et Lres unum sunt , du iJ^ 8 , porlent:
Et Ires in miiim sunt. Vigile de Tapse, el I'auteur de la
fausse epitre de Hygin , lisent : Innohis sunt.
Deuxargu- Le premier argument de ceux qui nient I'aulhenLicite
mens de ccux Je ce passage , esl qu'il ne se trouve point dans les anciens
qui coRicstent j^janugcrits grecs , qui sonl les originaux ; ni dans la ver-
1 aulhtnticile . . ^ • i i • i
decc passage, sion syriaque , qui est la plus ancienne des versions orien-
Premier argu- tales; ni dans I'arabe , ni dans I'ethiopienne , nidansplu-
ment lire de sieurs anciens exemplaircs latin : le second argument et
omission e j^, pj^^^, fort, est que ce passage n'esi pas cite dans les au-
las exemplai- ciens peres grecs et lalins qui ont ecrit conlre les erreurs
res nianu- d'Arius , ni par les conciles qui se sont tenus contre cot
scrits. heresiarque , quoique ce passage fut un des plus forts et
des plus expres que Ton put allegner conlre lui : ce qui ne
peut veiiir que de ce que eel endroit leur etoit inconnu.
Or , si dans la plus profonde antiquile , et dans les siecles
les plus eclaires de I'Eglise , on n'a pas coniiu ce passage ,
c'est une marque qu'il n'etoit pas dans les premiers origi-
naux, el qu'il ne s'est glisse dans les exemplaires de saint
Jean que plusieurs siecles apres lui.
On cite le manusci it alexandrin , et celui du Vatican,
qui passent pour ires anciens, et qui sont peut-^tre les plus
vieuxqui soient dans le monde; on y lit simplemenl : II y
en a Lrois qui rendent lemoignage , V esprit , V eau el le sang :
et ces trois nesont qu'un; et tout le reste y est omis. On
voit la meme omission dans quinze ou seize manuscrits
grecs qui sonl cires par Mille. Rich. Simon en cite en-
core cinq de la bibliotiieque du roi, et six de la biblio-
theque de Colbert , ou Ton voit la meme chose. Brunei ,
eveque de Salisbury , en a vu deux de meme dans la bi-
bliotiieque de Bale , et un de Venise. Un autre manuscrit
de la bibliolheque de I'empereur , un de la bibliotheque
de Leiceslre, el quantite d'autres omettcnt ces mots: In
* Ila Clciii. Alex, in latinis Cassiodori Jinbros. lib. v. cap. ii. de Spiiiiu
Sanclo. F'igil. Taps, sen alius lib. de Fide ad Thcophil. lib. de i/nica,
Deiinte Trinilnds.
I
SLR LE FAMEUX TASSAGE »E SAINT JEAN. 628
iiclo, Palely Verbum el Spirilus Sane I us : el hi Ires unum
sioil; el Ires sunt qui Icstimonium dunl in terra.
L'edition grecque d'Alde faiie a Venise Tan 1 5 18 , celles
de Bale par Erasnic en i5i6 et i5i9, cclle d'Haguenau
en 1021 , celle de Strasbourg en i524 , celle de Paris par
Simon Coline en i63i, les ometient de nieme. Robert
Etienue dans sa belle edition grecque du Nouveau-Testa-
nient en i55o, a mis dans le lextc tout Ic passage de la
mauiere qu'on le lit aujourd'hui dans la Vulgate , ot dans
les exemplaires grecs imprimes depuis lui: mais ilremarque
en marge qu'il n'a Irouvecetle lecon que dans la seule edi-
tion de Complute; en sorte que de sept e.\emplaires grecs
manusorits qu'il avoil pour tes epilres canoni({ues , il n'y
en avoit pas un seul ' qui lut ce passage comme nous
I'avons dans nos bibles.
Al'egard delediiion de Complute, que Robert Etienne
jugea a propos de suivre dans cet endroit , on fait voir
que I'autorile nen est pas grande. Le cardinal Ximenes ,
qui procura l'edition de la poiyglottc de Complute, n'avoit
de manuscrit grec que celui de Rhodes , et quelques au-
tres de Rome , qui lui avoieut ete envoyes par le pape
Leon X. Or, on sait qu'aucun de ces manuscrits ne li-
soit le passage en question. Jacques Lopes Stiuiica, qui
avoit vu les exemplaires grecs dont on s'etoit servi a
Complute, ne put, dans la dispute qu'il eut sur ce sujel
avec Erasme, citer aucun exeniplaire qui renferinatce pas-
sage. Et lorsquc , sous le pape Ijrbain YIIl , on voulut Ira-
vailler a une nouvelte edition grecque du Nouvean-Testa-
ment , et qu'on eut pour cela rassemble avec grand soin
tout ce qu'il y avait de manuscrits a Kouie , tant dans la
i)ibliotbeque du Vatican que dans celle des Barberins , on
ii'en trouva queliuitquiconlinssentlcsepitres canoniques,
ct aucun des ces liuit n'avoit le passage qui fait le sujel de
celte dissertation ^.
Le manuscrit que Seidel a apporle de I'Orient a Berlin,
et dont parle Kuster dans sa nouvelle edition du Nouveau-
Teslamcntde Mille en i7io,omet ie verset dont il s'agit
ici. Rich. Simon assure qu'il n'en a vu aucun dans la bi-
bliothequc du roi qui eut ce passage , quoiqu'il v en ait
' /Vf/t; Ilogeri DisseH. § 3, pag. «) el sec[ Ces sept manuscrits son I Ics 4 ,
5, : ' 9 . 10 , r I , li. — * y ide prcefat. Joannis MatOicei Carjophylli ad
c.Tlcem Cnien. Grcec. edit. Pelri Possini in Marc, fiomce, 1^73.
524 DISSERTATION
consulte au raoiiis huit ; et entre ces manuscrits grecs , il
y en a plusieurs de tresnouveaux; cc qui fait juger que les
Grecs modernes, non plus que les anciens , ne le recon-
noissent pas pour autiienlique. Roger en cite encore trois
autres de la meme bibiiotheque du roi * , lesquels y ont
ete donnes par Letellier , archeveque de Reims , et qui
sont lout semblables aux autres, quant a I'omission du
passage.
Les manuscrits latins sont plus conformcs a la Vulgate.
11 s'en trouve toutefois un Ibrt grand nombre qui ne lisent
pas rendroit.en question., L'auteur du prologue sur les
epitres canoniques , lequel porte le nom de saint Jerome,
et dont on parlera ci-apres plus au long , cet auteur se
plaint de ce que les traducteurs n'ont pas mis exactement
ce passage dans leurs exemplaircs ; d'ou Ton infcre qu'il
y en avoit alors un bon nombre qui ne le lisoient pas. Ce
prologue ne paroit pas etre de saint Jer6me; mais il est
au plus tard du huitieme siecle. On le trouve dans des
manuscrits d'une grande anliquite^.
Erasme cite deux exemplaires latiiis de la bibiiotheque
de saint Donatien de Bruges, qui nc lisoient pas ce pas-
sage. Miile en cite deux apres Gilbert Burnet; I'un de la
bibiiotheque de Bale , et I'autre de Zurich , qu'il croit de
plus de huit cents ans d'anliquile; et il en cite deux au-
tres de Strasbourg , de meme age, ou encore plus rieux.
Cinq manuscrits cites par les docteurs de Louvain a la
marge de leur bible , un ancien manuscrit de la bibiio-
theque de Bodley, trois manuscrits de Saint-Germain-
des-Pres , un de Saint - Aubin d'Angers , ot un autre de
Saint-Serge de la meme ville , tous deux venerables par
Icur antiquite; la belle bible de Louis-lc-Debonnaire dans
la bibiiotheque de Colbert; un manuscrit de Saint-Martin-'
des-Champs ecrit du temps de Charlcs-le-Chauve; rancieii
Gorrectoire de la bible cite par Luc de Bruges ; enfin
quaniite d'autres latins omettent entierement les paroles
dont il est ici question.
D'autres latins les omettent dans le corps de I'ouvrage
ou du texte; mais ils les lisent a la marge , comme le ma-
* Codd. ■>.•}.'.<,')-, 2S67, 342,*), — ^ On le voit dans les dcnx bibles ma-
nuscrilesdc Saint-Aubin, et de Saint-Serge d'Angers, dont la premiere a
neuf cents et I'aulre au moins huit cents ans d'antiquilc; on le voilaussi^
dans d'autres anciennes bibles ecrites du temps de Charles-Ie-CIiauve.
I
SLR LE FAMELX PASSAGE DE SAI>T JEA5. 525
nuscrit des Cordeliers d'.Vnvers cite par Erasme , celui de
la bibliolheque du roi, cole 3o84 , dont parle Rich. Si-
jnon , qui ajoule a la marge ces mots : In calo , Paler , Ver-
biivx , el Spiritus; el Ires sunt qui feslimoTu'um dant in terra ;
el hi tres unurn sunt; et un autre de la bibliolheque de Col-
bert, n" i58, a la marge duquel vis-a-vis ces mots : Tres
sunt qui testimonium dant, on lit : In calo , Paler, Verbum^ el .
Spiritus ; el Ires sunt qui testimonium dant in terra , sanguis,
aqua, el r.aro. Dans la bibliolheque de Saint-Germain-
des-Pres, il y a un ancien manuscrit, a la marge duquel
le y 7 est ecrit lout au long , et ce!a de la meme main qui a
ecrit Ic resle du manuscrit. II y a divers autres manuscrits
tant grecs que latins, ou Ton Irouve ainsi a la marge des
additions qui ne sont pas toujours uniformes quant aux
termes , mais qui reviennent a peu pres au meme quant
au sens.
Nous avons deja remarque en passant, qu'il y a des
manuscrits latins oil le y 8 est mis avant le y 7 ; mais cctte
diversite n'est pas contraire a la lecon recue aujourdhui
dansTEglise. Quant aux versions orienlales, ellesomettent
toules ce passage, a i'exceplion de I'armenienne , qui le
porle. Le svriaque , I'arabe , I'ethiopien , le russe , le
cophte, lisent simplenient le ^ 8 : II y a trois temoins ,
V esprit , I'eau , et le sang : et ces trois nefonl quun , sans lire
dans la terre , qui est dans le grec et dans la Vulgate. Tre-
mcllius supplea le l^ 7 dans son edition de la version sy-
riaque en 1069 ; mais il n'osa le mettre dans le teste ; ii sy
< ontenla de le [>lacer a la marge. Gutbirius a ete plus
hardi; il I'a insere dans le lexle. Il est pourlant certain
qu'i! ne se irouve ni dans les manuscrits , ni dans la pre-
miere edition du Nouveau-Testament en syriaque par Vid-
manstad en 1062.
Les anciens peres , tant grecs que latins , n'onl point lu Second ar-
pour la plupart le y 7 en question; du moins ils ne le g'^ment tire
Client pas dans les lieux ou la raatiere qu'ils traitoient, et J" silence des
, I I • 1 ■ .., y , , . anciens peres
ou le besom de la cause qu ils soulenoienl, demandoient „„; n'o„t
qu'ils le citassenl. Saint Irenee ' , voulanl prouver la divi- point paHede
nile de Jesus-Christ, cite souvent cette epiire do saint <^e *^^'^' .'o"^
Jean, et meme ce chapitre v, sans loutefois laire aucune ™^^^*^ 1"''*
1 V c • . T-k ' « i> A I I • ' • avoienll occa-
menlion du y 7. hamt Denys , eveque d Alexandne , ecri- sion den par-
vant a Paul de Samosatc , emploie en plus dun endroit le ler.
* /ran, Ub. iii. c. i3. num. 16, in nov. edit.
•)2b DISSEKTATIO.N
■^ 8 du chap, v de celte cpkre , sans toucher le i/ 7, qui
etoit decisis poul" la divinite de Jesus-Christ, et pour la
Trinitij qu'il defeiidoit,
Millc ne croil pas qu'aucun des peres grecs qui ont
vecu avant le concile de Nices ait jamais cite le passage
dont i! s'agit. Saint Athanase , qui a ete pendant toute sa
vie occupe a combattre i'arianisme et les erreUrs qui y
ont da rapport, ne I'a jamais etnploye , quoiqu'il ncn ne-
glige aucun de ceux qu'il croit propres a la defense de la
cause. On peut en dire antant de saint Epiphane , des
peres du concile de Sardique, de saint Basile-lc-Grand ,
de saint Alexandre eveque d'Alexandrie, de saint Gregoire
de Nyssc , de saint Gregoire de Nazianze, de Didyme , de
saint Jean Chrysostome , de saint Cyrille d'Alexandrie , et
de grand nonibre d'autres , qu'il est inutile de citer ici ,
qui se sont trouves engages dans des disputes contre les
ennemis de la divinite de Jesus-Christ ou du Saint-Esprit ,
et dans I'obligalion de soutenir la foi de I'Eglise sur la
Trinite et la consubstantialite , sans qu'ils aient jamais mis
en oeuvre un passage si precis , si formel , si decisif pour
la cause qu'ils soutenaient. On peut done conclure qu'as-
surenient ils ne !e lisoient point dans leurs exemplaires ;
car pour pen qu'on sache quelle etoit leur methode , on
comprendra qu'ils n'auroientpas neglige I'avantage certain
et indubitable quils auroient tire de cetendroit,
L6s peres latins ne paroissent pas I'avoir beaucoup plus
connu que les Grecs. L'auteur du Traite du bapteme des'
hei'eliqucs , parmi ies CBuvres de saint Cypricn , et dont
personne ne conteste I'antiquite, joint ensemble les ves-
sels 6 et 8 de ce chapitre v , et omet le 7 qui est celui dont
il s'agit ici. Novatien , dans son livre de la Trinile , entasse^
grand nombre de passages pour prouver la divinite dn
Verbe , et ne dit pas un mot de celui-ci , qui suffisoit pour!
decider la question. Saint Hilaire , qui a tant ecrit sur la
Trinite et sur la consubstantialite , en a use de meme.
Lucifer de Cagliari ne le cite point non plus dans son
Traite qu'il ne faut point avoir de commerce avec les hereti-
qiies; ni dans ses autres traites, ou il avoit si belle occasion
de le faire.
Saint Ambroise ^ non-seulement ne le cite point , mais'
il joint les versets fi et 8 et omet le verset 7 , de cettd
* Ambios. I. III. de Spiritii Sancto, c. 11.
• VMEUX PASStCE DE SAIM JKV.N. 027
lam eC 'Spin'tinn veiiit Christiis Jesus. Xon
n , sed per aqnam , tt sanguinem ; el spirilus,
'li , quoniam spin'tus est verilatis. Quia Ires sunt
r'tus , aqna , et savgnis : et hi Ires unum sunl in
hristo Jesu. Saint Phebade , eveque d'Agen , et Fauslin,
III cm ecrit lous deux sur la Trinile et conire les ariens ,
c fcHit tiiille mention du passage en question. Saint Je-
rome ue r;i5U'giic jamais, non plus que saint .\uguslin. Ce
tlernier insiiiiie memo assez quil n'eloit pas dans ses c\em-
plaires ', puis<:[ue , aprcs avoir cite ces mots , // y en a Irois
qui rendcnl lemoignase , V esprit , le <;aTig, el I'eau , il ajoute
que c*s trois choses niarquenl le Pere, le Fi!s , et le Sainl-
' Esprit; etil leprouve pardesendroits del'Ecriture amenes
d'ailleui's avec assez de violence. Si son le'-te cut porte ,
Ily en a trois qui rendenl temoigtiage dans le del , le Pere , le
rerOe,et U Saint-Espril , auroit-il oublie de s'en servir
dans cette rencontre , et dans toutcs les autres, ou i! vcul
prouver la divinitc du Fils et du Saiiit-Esprit , et leur con-
substaniialite avec le Pere?
Le grand saint Leon , qui a eu occasion d en parler dans
son epilre a Flavien , n'en dit pas un mot. Facundus, eve-
que d'Hermiane ^ , apres avoir cite le versel 8 I'explique,
en disant que V Esprit marque le Pere , suivant cette pa-
role , Dieu est Esprit ^ ; que lean marque le Saint-Esprit ,
dont il est ecrit, Celui qui recetra le Sainl-Esprit produira
nnjleave dean live * ; que le sang designe Jesus-Christ , qui
s'est revetu de notre chair : explication qu'il avoit tiree de
saint Augustiii , ct qui est devenue assez commune dans ia
suite. Auroit-il ele chercher ces detours, s'il eut vu le
versel 7 dans ses exempinires? Cerealis , dans son ouvrage
contre .Maximin , ou il s'eHorce de prouver I'unite du Pere,
du Fils, et du Saint-Esprit, ne rapporte pas ce passage,
quoiquo in6niiricnt plus favorable a sa cause que les autres
qu'il cite en grand nombre.
Enfm le venerable Bede , et les autres qui ont ecrit ex-
pres ou par occasion sur cette epitre de saint Jean , n'ont
pas parle de ce fameux vei*set. II faut done qu'i! n'ait pas
ete dans leurs exemplaires. -Si Didyme , ni saint Clement
d'Alexandrie , ni OEcumenius dans leurs commentaires,
ni sixchainesgrecques nianuscrites que Rich Simon a con-
' August. I. 11. contra Maximin. . peg. 726. — - Faciind. I. 1 .
J- — ^ Joan, w . -i'y . — */(vj/i.v..
028 DISSERTATION
sultees expres sur ce passage , ne portent point le verset 7
Saint Euclier, dans ses Questions sur le Nouveau-Tesia-
ment, cxplique ces mots , // ?/ e7i a Irois qui rendent temoi-
gnage^ Veau, le sang , el V esprit , en disanl que I'eau designe
le Pere , le sang Jesus-Christ, et I'esprit le Saint-Esprit,
de meme que saint Auguslin et Facundus I'ont explique ;
au lieu de ciler le verset 7 qui auroit du etre immediate-
ment avant celui qu'ils citoient, et qui auroit ete si precis
et si decisif pour leur sentiment.
De tout ce qu'on vient de dire , il paroit que jusqu'aux
septieme et huiiicme siccles on ne lisoit ce verset, ni dans
les eglises d'Orient , comme on I'a vu par les peres grecs,
et les manuscrits ecrils en cette langue, ni dans I'eglise
syrienne , ni dans les autres eglises qui ne parlent point
grec, dont les bibles ne le portent pas encore aujour-
d'hui ; ni dans I'eglise romaine , comme on i'inl'ere de ce
que nous avons dit de saint Leon et de Novatien ; ni dans
Tcglise d'Afrique , connne il paroit par saint Augustin ,
Cerealis, Junilius, et Facundus; ni dans celle de Milan ,
comme on I'infere du silence de saint Ambroise ; ni dans
celle de France , comme on le conclut de ce que saint Hi-
laire , saint Phebade , saint Eucher ne I'ont point cite, et
de ce qu'il ne paroit point dans I'ancien Lectionnaire qui
etoit autrefois a I'usage de cette eglise, etqui a ete donne
par le P. Mabillon. Enfin Lucifer de Cagliari est temoin
pour I'eglise de Sardaigne , et le venerable ftede pour
celle de la Grande-Bretagne , que ce passage n'etoil point
dans leurs bibles. II y a done toute sorle d'apparence 1
qu'il a d'abord etc ajoute par forme de glosc a la marge
de quelques exemplaires, d'ou il est ensuile passe dans le
texte.
Coniectures Cette consequcncc est fondee sur une preuve de fait
que Ton a pre- indubitable , qui est que le passage en question se trouve
tendu tirei de a la marge d'un bon nombre de manuscrits latins assez
cesdeuxargu- ajjciens. Et comme on a I'experience que plusieurs autres
choses sont ainsi passecs dcs marges des livres dans le
texte , on a droit de conclure que la meme chose s'est pu
faire ici. Quelques catholiques zeles voyant I'avanlage
que Ton pouvoit tirer de ce passage contre les ariens ,
les macedoniens , et les autres ennemis de la Trinite , et
le trouvant sur la marge de leur excmplaire , I'ont appa-
remment insere dans le texte. Cela ne s'est point fait dans
* le fort des disputes ; les ariens s'en seroient apercus , et
3UR LE FAMEUX PASSAGE DE SAINT JEAN. 629
se seroient recries centre la corraplion. Mais cela s'est fait
vers le neuvieme ou dixierae siecle , ou Ton commence de
voir ce passage passer insensiblement dans le texle.
On ne peut pas raisonnablement soupconner les ariens
de i'avoir relranche; les cathoiiques n'auroient pas man-
que de s'en plaindre , et de crier a la mauvaise foi. De plus,
les ariens n'etoient pas maitres des exemplaires qui se
conservoienl dans les grandes et principales eglises d'O-
rieut ct d'Occidenl; et ils h'auroient pu, avec tout leur
credit, supprimer un seul mot que Ton auroit era etre du
texte de saint Jean.
Grolius les a soupconnes d'avoir , non re tranche , mais
ajoute ce verset 7, pour favoriser leur heresie , et pour
niontrer que Tunion du Pere, du Fils , et du Saint-Esprit
n'est point une unite de substance ou d'essence , mais
une conformite de temoignage , telle qu'elle est entre
I'esprit, I'eau , et le sang, marques ici au verset 8. Mais
cette conjecture n'a aucun fondement; le passage dont
il s'agit est says coraparaison plus contraire aux ariens
qu'il ne leur est favorable. A.ucun ancien n'a forme contre
ces heretiques le soupcon dont Grotius les charge. Les
ariens n'ont jamais employe cc passage en faveur de leur
dogme ; et les peres memes qui ont ecrit contre eux
se servent du v.erset 8 , ou il est parle du temoignage
de I'esprit, de I'eau, et du sang, pour prouver I'unite
d'essence tlans la Trinite. A plus forte raison auroient-ils
employe pour cela I'autre passage , qui est si positif et si
formel.
On cite un fameux passage attribue a saint Jer6me, Valeur du
dans lequel il est dit que ics interpretes qui ont traduit lemoignagcde
Tepitre de saint Jean du grec en latin , ont commis une '^"*^'"" <^" .
grande infidelile, en omettaut le temoignage du Pere , P™?°"^^. y
o 1 r- • • • .'^ '-' ^ ' bueasainlJe-
du Verbe , et du Samt-Esprit, qui est si avantageux a la r6me, oii Po-
foi catholique, et qui etablit d'une maniere si forte la con- niission de ce
substantialite el la divinite du Pere , du Fils , et du Saint- Passage est at-
Esprit : In qua ah injidelibus Iranslatoribus multum erratum t"(i"^te^^
esse Jidei verilate comperimus : triiim tantum locabula, hoc
est aqua , sanguinis , et spiritus in sua edilione ponentes; el
Palris , Verbique , ac Spiritus testimonium omittentes. In
quo maxime etjides catholica ivboralur , et Patris , et Filii ,
ac Spiritus Sancti , una divinilatis substantia comprohatur *.
' yide Prolog, f^ulgalum D. Bieivnjrmi in epistolas canonicas.
23. 34
53o DISSERTATION
Si ce passage ctoit vraiment de saint Jerome, il nous
tlonneroit une grande ouverture pour juger des pre-
miers auteurs de la variel(5 qu'on remarque dans les ma-
nuscrits. II faudroit la mettre sur le compte des copistes
negligens , ou des interpretes peu exacts , qui auroient
omis ce qu'il y a de plus essentiel et de plus important
dans ce chapilre.
Mais de fort habiles critiques croient que ce prologue
n'est point de saint Jerome.' Erasme I'avoit deja soup-
conne de faux, puisqu'i,! dit ' que Ton ignore lauleur des
prologues des livres qui sont apreS I'Evangile. Richard
Simon a pretendu aussi que ce prologue portoit a faux
le nom de saint Jerome ; ct le P. Martianay, dans sa nou-
velle edition de ce pere ^, a appuye ce sentiment sur cinq
raisons.
i^ L'auteur du prologue appelle les sept epitres , Cano-
niqiies ; et saint Jerome les nomme toujours CathoUques.
2° 11 dit que I'ordre de ces epitres n'cst pas le meme chez
les Grecs orthodoxes que chez les Latins \Non idem ordo
est apud Grcecos qui inlegre sapiunt , ct Jidcm reclam sec-
tanlur, epistolarum septcm quce canonicce nunciipantur, qui
in lalinis codicibus invenitur; ce qui est , dit-on , une er-
reur dont saint Jerome n'etoit pas capable , puisque le
concile de Laodicee^, Eusebe*, saint Cyriile de Jerusa-
lem^, saint Alhanase'', saint Gregoire de Nazianze', saint
Jean Damascene^, les manuscrits grecs, les rangent dans
le memo ordre que nous. Mais ce n'estpas la ce que lau-j
teur du prologue veut dire ; il veut marquer que les exem«
plaires latins de son temps differoient des grecs dans I'ar-
rangement de ces epitres, et que pour lui il a reforme cet
abus, eta remis les choses dansleur ordre naturel, a I'imita-
tion des Grecs. Le fait qu'il avance est indubitable; et nous
avons montre dans la preface sur les epitres canoniques,
que saint Augustin, et d'autres apres lui et apres saint Je-
rome, suivoicnt I'ancienne maniere d' arranger les epitres
canoniques, fort differente de celle dont les Grecs et les
Latins les arrangent aujourd'hui.
3" Cet auteur se vante comrae d'une importante restitu-
^ Erasm. Censu?: prcefal. in Joan. — - Tom. 3. Epist. Hieronym. —
^ Concil. Laodic. can. 6o. — •• Euseb. lib. iir. Hist, cap. 25. — * Cyrill.
Jerosolym. Caiech. 4.. — •■ Ailianas. Epistol. Festi\>a , et in Synopsi. —
^ Gregor. Nazianz. Ctivm. de Geniii. Script. — ' Damascen. lib. iv. de
Fide orthodox, c, i<S.
sun LE FAMELX PASSAGE Dt SAINT JEAX. 53 I
lion, davoir rcmis les sept epilres canoniqiies dans leur
ordrc aiicien et primitif. C'est, dit-on , une chose dc si
petite importance, que saint Jerome n'auroit pas voulu
en tirer vanile. 4° On reniarque dans ce prologue quelque
difference de style, compare aux vrais ouvrages de saint
Jerome. 5° On dit que saint Jerome meme n'arrangeoit
pas les epilres canoniques conime elles le sont dans les
manuscrits, puisque Cassiodore ' donnant le catalogue
des livres saints suivant saint Jerome , met d'abord les
deux epilres de saint Pierre, puis les quatorze de saint
Paul, ensuiteles irois de saint Jean ,celle de saint Jacques, '
ct enfin ceile de saint Jude. Toutes ces raisonsne sont pas
egalement fortes; mais, reunies ensemble, elles suffisent
pour faire au moins douter de la verite du prologue en
question. Et ce qui le rend encore plus suspect , c'est que
saint Jerome, dans ses ouvrages indubitables, ne cile ja-
mais le passage conteste de la premiere epitre de saint
Jean.
Mais Erasme^, et apres lui Socin, Le Clerc^, Ketner*,
et le P. de Bukenlop^, soulicnnent que le prologue dont
dont on vient dc parler est vraimenl de sainl Jerome ; et
rils en tirent chacun des consequences conformes a leur
dessein et a leur interet, quoique tres diflerentes entre
elles. Erasme, Socin, et Le Clerc accusent ou soupcon-
nent saint Jerome de mauvaisc foi , d'avoir avance que les
anciens exemplaires grecs portoient le passage des Irois
temoins, tel que nous I'avons dans nos bibles, quoiqu'il
dut savoir le contraire'^ Reiner et le P. Bukentop en con-
cluent que des le temps de saint Jerome , les bons et sin-
ceres manuscrits grecs lisoientccmme nous le vcrset 7 du
V diap. de repilre de saint Jean , quoiqu'il y cut un grand
nombre d'esemplaires d'oii les copistes negligens et infi-
deles I'avoient relranche.
Quant a nous, nous aimons niieux rejeter le prologue Conclusion
conime une piece sans autorite , que d'admellre Tune ou-*''^.,'^^"*^ P."^"
I'autre de ces consequences. Saint Jerome etoit certaine- """^"^P^
ment trop habile pour ignorer ce que portoient les manu-
* Cassildor. lib. de Insu'tutione Difin. Lit. cap. 18. — ; - Erasm. Censur.
vrcpfal. in Joan. — ^ Biblioih. wiwers. an. 1689 , pag. 453. et in Quces-
tionii. Hieronym. — * Dissert, in hunc Inc. — * Bukentop. Liix dc luce ,
lib. u.pai;. 3<i6. — • I^oclerc, dans son Art critique, a reconnu qucce pro-
logue n'ctoit point de saint Jerome. J. Clerici. An. Crit. Part. lu. sect. t.
cap. XIV, n. I J. p. 243, tnm. ii. Jmstel. 1700.
552 DISSERTATION
scrits de son temps ; il etoit trop sincere pour nousdebiter
un mensonge ; il etoit trop sage et trop humble pour se
vanter d'une chose qu'il n'auroit pas faite. Ainsi nous nous
en tenons a ce que nous avous conclu d'abord, et qui est
indubitable ; savoir, que le plus grand nombre des anciens
manuscrits grecs el latins, et les versions orientales , ne
lisent point le passage que nous cxaminons; quelaplupart
des peres tant de I'Orient que de I'Occident, ne I'ont pas
connu ; qu'on ne pent convaincre ni meme raisonnablemen t
soupconner les ariens de I'avoir ajoute ou relranche .; qu'on
ne pent non plus en rejeter la faute sur les catholiques.
Mais avant d'en tirerune conclusion absolue, favorable ou
contraire a I'authenticite et a la verite du passage, nous al-
iens examiner ce que Von produit en sa faveur, comme
nous avons rapporte ce qui lui est oppose.
ARTICLE II.
Preuves qui si iveiU a olaLlir raullienticile du passage donl il s'agil ici.
Deux argu- Pol r prouver que le passage dont il s'agit est canonique,
mens en fa- et qu'il a ele des le commencement dans le texte de saint
veur de 1 au- jg^j^ qjj gg ggj-j- jg I'autorite dcs manuscrits , des versions,
Ihenlicite de , , ^ , i ^ • ■ .. i • i
o rinccnw des peres , et des conciles ; a quoi on a oute des raisons de
ce passdac. i ^i ■> ^ ^ r • >
Premier argu- convenance ctde vraisembiance, appuyos sur les tails qu on
meat tire du a exposes. Les manuscrils anciens oule passage ne se trouve
temoignage p^g gQj^ j ^^ p^^g pr^-jind nombre que ceux ou il se rencontre ;
des anciens "^ . ., i i • i .^ ■
e\cmnlaires ^^^^^^ il y en a de ces derniers de tres anciens , et un assez
bon nombre qui le lisent, ou dans !e texte ou a la marge.
Erasme, qui d'abord I'avoit ote des deux premieres editions
du Nouveau-Teslament grec et lalin qu'il donna, le reta-
blit dans la Iroisicme sur la foi du manuscrit de la Grande-
Brelagne'.
Les theologiens employes par Ic cardinal Ximenes a J'e-
' iV. T. edit. 3. an iSaa. Sic liabet. 5ti rpsl; ebiv ol [jiapTupouvTe? ev -&>
cupavfa), llaTTip , Ao'-foc , y.at IIveiijAa , jcat curct ct rpsl; sv sttjiv. Kal Tpei? ciciv
(jLaprupouvTE; sv rri fvi, Trveuaa , OtJ'wp, >cai aifxa. Et Ty,v aocprupiav xwv avOpw-
■TTuv, etc-
SLU I.E FAMEL'X PASSAGE DE SAIM JEAN. 533
dilion de Complule, le mirent aussi dans leiir lexle, fondes
sans doutc sur rautbrile tie quelques bonsmanuscrils; car
(111 ne doit pas les soupronncr de I' avoir mis dc leur chef,
d'apres ce qu'ils discut dans leur preface, qu'ils ont suivi
(Kins leur edition des manuscrils tres anciens , auxquels il
n'etoit paspermis de ne pas croire : Exemplaria and'quis-
sima , quibas Jid^m abrogare tie/as videbatur.
Robert Etiennc le mil aussi dans son edition de i55o ,
qu'il n'eqtreprii qu'apres avoir raniasse des anciens nianus-
crits ires venerables, anUquissivia , et vetnslalis speck pent
adoramta^ de diflerentes bibliothcques , particulierement
de cclle du Roi. Les savans ont ete parlages sur ie nombre
des manuscrits qu'il avoil suivis dans les epilres canoni-
ques. Plusieurs ont iru que la lecon dont il s'agit. ici s'e-
toit trouvee dans lous les sept qu'il avoit en main. Mais Ro-
ger' a, ce semble , demonire qu'il navoit suiyi que la
seule edition de Complule dans cet endroit^.
On pent ajouier a ces editions celles de Froben a Bale
en 1 54 1 , celle d'Hervage ; et en un mot toules les editions
grecqucsduNouveau-Tesiament. Al'exceptiondequelques-
unes dont on a parle auparavant, loutes les autres ont mis
dans leur texte le verset en question. II semble que c'est
Erasme qui a autorise les autres a I'omettre par ses deux
editions dc 1 5 1 G et de 1619. Celle d'Alde-Manuce de 1018
I'a aussi omis; car celle d'Haguenaufaite en 102 1, celle de
Strabourg en 1021, et celle de Paris par Colineen i534,
ne paroisscnt pas avoir ete faites sur les manuscrits. 11 n'en
est point parle par les imprimeurs ou editeurs qui les ont
procurees. Ce sont de simples reimpressions des premieres
editions.
11 est done inutile d'en citer d'autres, qui ont ete prises
dans la suite sur cellesla, comme a fait Christophe San-
dius. Ces derniercs ne doivent passer que pour une seule,
puisqu'elles sont de simples copies des premieres dErasme
ou de Manuce. Or , on a deja remarque qu'Erasme meme
avoit enfin rendu hommage a la verite , en faisant imprimer
le passage entier dans sa troisieme edition faite en 1622 ,
et dans celles qui I'ont suivie ; quoique dans la suite il n'ait
* Roger, Dissert, § 3. pag, g. et seq. — ' Complut. an. i5i5. sic legit:
6ti TfEt; eioiv cl |i.ap■n>pcu'<T^ it tu cipavu, 5 nxTTip, xai 0 Ao'-jfc;, yt-aX to A-jtov
nveu{i.x. K»l c'l TfEi; ei; rb fv eiaw. Kal Tf &i; eioiv 01 [taprufcuvre^ izi: vfn pit,
TO 7r#eu{A», xal to u^wp, xai to aipia. Ei ttv (tajTUpiav, ^.
534 UlSSERTATlOiN
pas assez marque de Constance dans son sentiment, puis-
qu'Jl s'est efforce de miner, ou du moins d'affoiblir, I'au-
torite du manuscrit d'Angleterre qu'il avoit d'abord suivi
avec tant de respect.
Richard Simon', toutcontraire qu'il est au verset7 dont
nous parlons, avoue que les manuscrits ou il ne se trouve
point du tout , sont au-dessous de six cents ans d'antiquite;
que dans plusieurs anciens le passage se lit en marge. A
regard de i'eglise grecque d'aujourd'hui, ce qui.est deci-
sifsur I'approbation qu'elle donne a ce passage, c' est que
leur Lectionnaire , ou le recueil des epitres qu'ils lisent
dans I'eglise , et qu'ils appellent I'Apotre, AposLolos , im-
prime a Venise en 1602, porte le passage entier; etlaRu-
brique ordonne qu'on lelira le jeudi de la trente-cinquieme
semaine d'apres Paques; et dans la derniere confession de
foi qu'ils ont envoyee, ils declarent que leur croyance est
que toutes les trois personnes de la Trinite n'ont qu'une
meme essence; ce qu'ils prouvent par le passage en ques-
tion , qu'ils y alleguent expressement.
Nous ne parlons pas des manuscrits du marquis de
Velez ; il y a toute apparence qu'ils ont ete reformes sur
la Vulgate. Ainsi ils ne peuvent nous servir a etablir la
maniere de lire dont nous disputons. On trouve aussi ce
passage dans un manuscrit grec assez nouveau, dont parle
le P. le Long de I'Oratoire ^, et dans un fragment grec
du concile de Latran , tenu sous Innocent in, fragment
qui est une traduction d'une decision ou instruction dc ce
concile ou Ton sait que les Grecs assisterent. La version
armenienne ^ lit aussi notre passage, comme nous I'a-
vons deja remarque , de meme que la traduction italienne
de Brultioli, faite sur le grec, et imprimee a Venise en
i532.
A I'egard des manuscrits latins , la lecon que nous
examinons y est plus commune que dans les grecs. Erasme
cite deux manuscrits latins de Constance , et encore un
autre manuscrit de Bale, oii elle etoit. Jean Gerard et
Ketner parlent de deux manuscrits de I'academie d'lena ;
et Luc de Bruges d'un autre manuscrit de saint Andre,
ou elle se trouvoit de meme. Elle est dans un fort beau
1 Simon, Dissert. cHiic. de Mss. N. T. — ^ Bibliol. sacrce , torn. i.
fjag. 672. ("ideet Roger. Dissert, in hiinc loc.pag. 120. 121. — ^ Mill, ex
Guillelmo Cisio.
SUR LE FAMEL'X PASSAGE DE SAINT JEA.1. 635
ntanuscrit du grand couvent des peres doniintcains de
Paris , et que Ion dit avoir ele ecrit en i 234 par I'ordre
de Jourdaiu , general de I'ordre de Saint-Dominique.
Elle se voit aussi dans un ancien correctoire de Sor-
bonne ecrit au dixieme siecle , comme le croit Richard
Simon.
Luc de Bruges qui , par ordre des theologiens de Lou-
vain, avoit collationne I'edition Vulgate sur trente-trois
manuscrits, n'en marque que cinq ou ce verset manquat.
U est vrai qu'il pouvoit y avoir un assez bon nombre de
ces exemplaires qui ne contenoient point les epiires cano-
niques ; mais il etoit malaise qu'il n'y en eut pas plus de
cinq qui les continssent.
On lit notre passage, mais avec quelques petites va-
rietes ' , dans un ancien manuscrit de I'abbaye de Saint-
Germain-des-Pres , ecrit en I'an 809. On le Irouve a la
marge de plusieurs autres anciens manuscrits de la bi-
bliotheque du Roi , et de Colbert. On le reraarque aussi
dans plusieurs anciens missels, au rapport d'Hesselius;
et on le chantoit autrefois comme on le chante encore
aujourd'hui pour dernier repons de matines dans les
dimanches depuis la Trinite jusqu'a I'avent -. Enfin on
le lit dans plusieurs exemplaires de la Vulgate, tant im-
primes que manuscrits ^ ; mais dans quelques-uns les ver-
sets 7 et 8 sont deranges ; c'est-a-dire que le verset 8 s'y
lit avant le y 7 , de cette sorte {if S): Trcs sunt qui tes-
timonium dant in terra , spiritus , aqua , et sanguis ; et hi
tres unum sunt (y 1 ) : Et Ires sunt qui testimonium dant in
ccelo , Pater , Ferbum, el Spiritus Sanctus ; et hi Ires unum
sunt.
' Voici ce que porte ce manuseril : Sunt tres qui testiinonium dant, spi-
ritus , aqua , et sanguis , tl tres unum surU; et tres sum qui de ccelo lesti-
ficantur. Pater, f^erbum, et Spii-ilus , et ires unum sunt. On y a ajoule
au-dessus de la ligne ces mots , In terra , apres testimonium dant. — * Dans
un breviaire romain manuscrit dequatre cents ans, le verset en question ne
se lit dans aucun des neuf repons de matines du jour de la Trinite , non plus
que dans les dimanches suivans, ou il est marque qu'on rcpetera ces repons au
iroisieme nocturne. Mais au jour de la Trinite, le capitule de tierce est : Spi-
ritus est qui testijicaiur, quoniam Chrislus est Veritas : quia tres sunt qui
testimonium dant in ccelo, Paler, f'crbum , el SpiriWs Sanctus, et hi tres
unum sunt. — ^ Cod. S. Aiulrece a Luc. Brug. citatus Codd. 2. Constan-
tiens. ab Erasmo laudati. Cod. Dominicanorum Paris. Codd 5. Bibl.
Bodleiance. Cod. S. German, ann. 809. Codex ArgenloraU Cod. f^enet. eC
Cod. FlorenL visia Gilberto Bunieto. Idacius conti-a f'ariinand. Et atii..
536 DISSEUTATION
Quoique Lulher, comme on I'a cleja dit, ait supprime
le verset 7 dans sa traduction allemande , fonde appa-
remment sur quelques-unes des editions grecques d'alors,
qui ne le lisoient point , conimc celle d'Haguenau de
i52i , ou celle d'Alde de i5i8; toutefois les lutheriens
ses sectateurs Tont retabli dans la suite dans leurs bi-
bles; et ils n'ont point fait difficuljLe de reconnoitre '
que Luther menie , s'il eut vecu encore quelque temps,
et qu'il eut vu I'edilion de Robert Etienne , n'auroit
Second ar- pas manque de le remettre dans le texte, lant il avoit
guraenitire de Consideration et de deference pour cet imprimeur
des^ancicns celebre.
Les calvinistes n'ont point varie sur ce verset ; ils
Tent toujours constamment conserve dans leurs bibles.
Theodore de Beze , qui n'ignoroit pas qu'il etoit omis
dans plusieurs exemplaires grecs , soutient toutefois qu'il
n'y faut rien changer. Et Diodali , dans sa traduction
italienne , I'a conserve comme il est dans noire Vulgate.
Venons a present au temoignage des peres. Avant
toutes choses, il est bon de faire ici , apres Bossuet^,
une remarque generale sur leur autorite , qui est qu'elle
est beaucoup plus forte et plus expresse que celle des
manuscrits, pour deux raisons : la premiere, parce que
les peres sont presque tous plus anciens que les manus-
crits les plus vieux qui soient parvenus jusqu'a nous; car
ou est le manuscrit, par exemple, qui soit du temps de
TertuUien , ou de saint Cyprien? La seconde, c'est que
le temoignage des peres est lie avec I'hisloire de leur siecle
et de leur personne , et avec le temoignage de I'Eglise de
leur temps , ce qui leur donne un nouveau degre de force
et de superiorite. Si saint Cyprien et TertuUien citent ce
passage , i! etoit done dans les exemplaires de leur temps
et de leur pays; il contenoit la doctrine et la foi de leur
Eglise. Car enfm ce passage n'est point sur une mati^re
indiffercnte et commune ; il regarde un des points les plus
importans de notre croyance. Il n'etoit point aise de le
retrancher des exemplaires s'il y etoit , ni de I'y ajouter
s'il n'y etoit pas.
TertuUien ^ fait allusion a ce passage dans ce qu'il dit
' Tubingens. Lutherani contra Sherrerum et Scherrer. ipse apud Serrar.
qiicest. 1. in cap. 6. Libri Jucliih, et Comment, in i. Joan. t. 7. Fide Roger
Dissert, pag. iSa. i38. — 2 Censure conlre le N.-Testamenl de M. Simon
— ' Ter^ull. contra Praxeam, cap. 2 5.
SLR LE FAMEL'X PASSAGE DE SAINT JEAN. 53'
centre Praxeas , que Tunion du P^re dans le Fils , et du
Fils dans le Saint-Esprit , fail que ces trois personnes ainsi
reunies , ne font qu'une substance en trois personnes , et
non pas une seulc personne. I la connexus Patris in Filio
el Filii in Paraclilo , Ires cfficil cohccrenUs aUerum ex allero,
qui Ires unum sunt , non unus : qnomodo dictum est , Ego el
Pater unum sumus : ad subs tan lice unilatem, non ad numeri
singularitaUm.
Saint Cypricn ' voulant prouver que le bapleine de
certains heretiques etoit nul , raisonne de cette sorte :
S'il a pii recevoir validement le baptenie chez les here-
tiques , il a pu anssi y recevoir le pardon de ses peches.
S'il y a recu le pardon de ses peches , il a recu la grace
sanctifiante, el est devenu le temple de Dieu. El de
quel Dieu? est-ce du Createur? et comment cela , s'il nc
croit point en lui? Esl-ce de .lesiis-Christ ? et comment
])eut-il devenir son temple, s'il nie que Jesus-Christ soil
Dieu? Est-ce du Saint-Esprit? Puisque les trois personnes
ne sont qu'une substance, comment le Saint-Esprit peut-il
liabiterdans celuiquiest ennemiduPere etduFils? Si Spi-
rit us Sane li? Cum Ires unum sint , quomodo Spiritus Sanctus
placatus esse ei potest , qui au! Palris aut Filii inimicus est?
Dans son livre de I'Lnite de I'Eglise , ouvragc que per-
sonne ne lui coniestc, il est plus expres , puisqu'il dit
formellement que I'Ecriture porte que le Pere , le Fils ,
et le Saint-Esprit ne sont qu'une meme substance : Dicit
Dominus : Ego et Paler unum sumus ; et iterum de Patre , el
Filio , et Spirit u Sancto , scriptum est : Et hi Ires unum sunt.
Richard Simon ^ se sentant embarrasse de ce passage
si expres de saint Cyprien , a pretendu que ce saint
martyr avoit voulu citer , non le versel 7 en question,
qui comprcnd le temoignage que le Pere , le Verbe , et le
Saint-Esprit rendent dans le ciel, mais le versel 8 qui
porte : // y en a trois qui rendent lemoignage sur la terre,
I' esprit , I'enu et le sang ; et ces trois ne sont qu'un. II croit
qu'il entendoit le Pere sous le nom di' esprit , le Fils sous
le nom de sang, et le Saint-Esprit sous le nom de I'eaa.
II fonde sa conjecture sur le lemoignage de Facundus ^,
eveque d'Hermiane , ville de la province Byzacene en
Afrique, qui ecrivoit au sixieme siecle, qui apres avoir
* S. Cyprian, ept'st. adJubaiam. — * Simon, Hist. crit. du N.-T. ch. 18.
— ^ Facund. I. i. c. 3. Je iriLus CapiutUs.
^38 UISSEKIATION
cite le verset 8 el lui avoir donne 1' explication dont
nous venons de parler , confirme son sentiment par I'au-
torite de Saint Cyprien , qu'il pretend I'avoir entendu
comme lui.
Mais sans recourir aux differentes solutions qu'on a
essaye de donner a cette difficulte , nous pensons qu'on
peut s'en tenir a celle-ci. Facundus ne lisoit point
dans son exemplaire de Tepiirc de saint Jean le verset 7
qui fait la difficulte de ce passage, mais le verset 8 que
personne ne contesle. Et comme il voyoit que saint
Cyprien , pour prouver I'unite d'essence des trois per-
sonnes de la Trinite, avoit emplove ces mots, El hi Ires
unurn sunt, qu'il ne trouvoit en aucun autre endroit de
I'Ecriture, qu'au verset 8 du chap v de la premiere
epitre de saint Jean , il emprunta de saint Augustin une
explication figuree de ce verset 8, ou accommodee a la
sainte Trinite, et crut lui donner un grand poids, en I'ap-
puyant du nom de saint Cyprien.
Saint Augustin ? et Facundus etoient, quant au fond,
dans la meme croyance que saint Cyprien sur la Trinite :
et comme i!s ne connoissoient pas le passage dont saint
Cyprien s'etoit servi pou.'- prouver son sentiment , lis
en prirent un autre qu'ils adapterent au meme mys-
lere. Mais il y a bien de la difference entre la force .
I'energie et la precision des termes de saint Cyprien, el
celle de Texplication de saint Augustin et de Facundus.
Saint Cyprien prouve son sentiment en un mot, parce
que son texte est formel. Les autres appuient leur expli-
cation par divers autres passages ramasses, parce que le
texte qu'ils citent n'est point formel, et que les explica-
tions figui'ees ou accommodees ne decident point en raa-
liere de foi.
Si Ton vent des temoins de la ra^me eglise d' Afrique ,
et plus anciens et en plus grand nombre que ceux que
nous venons de citer , on peut produire saint Fulgence
eveque de Ruspe , Eugene eveque de Carthage , Vigile de
Tapse, et quatre cents eveques catholiques de la meme
eglise, qui citenl le >v^ 7 en question pour prouver leur
croyance sur la Trinite. Lequel est plus digne de loi, ou
Facundus qui ecrit a Constantinople , si loin de son pays,
son Traite contre ies trois chapitres , et qui fait parler
• Augustin. coiilru Maximin. lib. ii. cap, 22.
Stn LE FAMEUX PASSAGE DE SAINT JEA>f. 53<)
aim Cvprien contre son usage; car on sail que ce saint
cveque est tres reserve a rapporter ties explications alle-"
i,oriques et figurees; ou saint Fnlgence, Eugene, et Vi-
gile , et quatre cents eveques qui ecrivent au milieu do
I'AlVique d'une maniere simple, naturelle et sans figure?
Ces quatre cents eveques parlent ainsi, non dans un ou-
vrage obscur et sans aveu , mais dans une profession de
loi qu'ils presenterent I'an 484 a Huneric roi des Van-
dales. Voici leurs paroles, comme elles sont rapportees
par Victor de Vite : Et ut adhiic luce clarius unius divini-
tatis esse cumPatre, et Filio , Spirilum Sanctum doceavms ,
Joannis evangelistce testinionio coviprobatur : ait namque ,
Tres sunt qui testimonium perhibent in ccelo , Pater, Ver-
bum, et Spiritus Sanctus ; et hi tres unam sunt '. Ce passage
etoit done dans les exeinplaires des Ecritures de I'eglisf
d'Afrique ; il etoit reconnu pour authentique par tous les
eveques qui souscrivirent a la profession de loi dressee par
Eugene dc Carthage. Non-seulement les catholiques, mais
les ariens memes, sujets d'Huneric, devoient le trouver
dans leur exemplaire , et le reconnoitre pour canonique.
Aulrement , a quoi se seroicnt exposes les eveques deten-
seurs de la foi de I'Eglise , sous uu prince arien , et obsede
d'eveques de sa communion?
Saint Fulgence ne le cite pas seulement une fois et en
passant, mais il le cite dans trois dilferens ouvrages contre
les ariens ^ ; et il assure dans I'un des trois , que le saint
martyr Cyprien I'a cite avant lui , et dans le meme sens.
Vigile de Tapse » qui vivoit au sixieme siecle dans I'Afri-
que , allegue le meme passage , aussi bien que I'auteurdes
fausses decretales attribuees a Hygin et au papc Jean ii.
Le fabricateur de ces fausses pieces vivoit apparemmeni
au liuitieme siecle.
Nous ne repetons point ce que nous avons dit ci-devant
• f^ictor yitens. lib. iii. de Perseciuione f^aiidal. — * Fulgent, lib. de
Trinit. cap. 4. Ego, inquit, et Pater, iinum sumus ; unitin ad naturani
refeire nos decet, sumus, ad personas : similiter et illud: Tres sunt qui
leslimonium dicunt in ccelo , Pater, f^^erbuui , et Spiritus , et Id ires unuin
sunt. Idem in dejensione Jidei adversus Pintam. Item in lib. Hesponsionum
contra Arianos , llesp. lo . Beatus enim Joannes apostolus testalur dicens :
Tres sunt qui testimonium peHiibent in ccelo , Pater, Verbum , et Spiritus,
ft Ires unum sunt. Quod eliain beaiissimus maHjrr Cjprianus in epistola de
u/iiiaie EcclcsicE conjiietur dicens Dicit Dominus : Ego et Paler unuin
sumus; et iienim de Pane , et Filio ^ etSpiritu Sane to scnplum est : Et tres
unum sunt.
54o DISSERTAriON
touchant le passage de I'auteur dc la preface sous le nom
de saint Jerome , sur les epilrcs canoniques. Get auLeur
vivoit il y a plus de neuf cents ans, puisqu'on trouve ce
prologue dans dcs manuscrits qui ont cet age. On trouve
en termes exprcs le \ei-set 7 dont nous parlons , dansl'ou-
vrage d'Idacius ' contre Yirimandus; soit que cet ouvrage
soil de Vigile de Tapse, qui ecrivoit au sixieme siecle ,
comme I'ont cru divers savans , soit qu'on I'attribue a
Idace , Espagnol , et eveque dans la province de Galice,
qui vivoit vers le milieu du cinquieme siecle , comme I'a
montre le P. de Montfaucon ^. Vigile de Tapse , dans
un ouvrage qui ne lui est point conteste ^, et qui a etc
autrefois attribue a saint Atlianase , cite encore sans
difficulte le passage qui fait le sujet de cette dispute.
Voila asscz de temoins de I'eglisc laline ; venons a I'eglise
grecque.
L'auteur de la dispute contre les ariens , soutenue au
concile de Nicee , et attribuee a saint Athanase , cite ces
paroles comme de saint Jean, pour prouver I'unito de
nature des trois personnes de la Trinite : Et ces Lrois nc
sont qa'im ^. On sait que I'ecrivain de celte piece n'esl
pas saint Athanase; mais on convient qu'il est ancien.
L'auteur du Traite de unica Deitate Trinilalis , parmi les
oeuvres du meme saint Athanase, cite le passage entier de
cette sorte : Dicente Joanne evangelista in epislola sua : Tres
sunt qui testimonium dicunt in ccelo , Paler, Verbum , et
Spiritus Sane t us.
Les percs du concile de Latran sous Innocent iii, ouse
trouverent en personne les patriarches de Constantinople
et de Jerusalem, et, par leurs legats, ceux d'Alexandrie et
d'Antioche , avec quantite d'eveqnes de Grece leurs suf-
fragans, dresserent une instruction , dans laquelle ce pa -
sage est cite ^ comme reconnu par les deux eglises, et
employe pour confirmer un dogme de leur foi. Dans ce
* Idatius, I. I.e. 5. contm Varimand. — ~ D. Bernard, de Montfau-
con. jddmonii. in libb. de Trinit. Adianasio supposkos. — ' f^igit. ther-
eat, ad^ersus Arium^ Sabellium , et Phodnum , lib. \i. n. 45. — * Author.
Disput. in concil. Ntca^no, inter opera Athanas. npb; Sk tcutoi; iraai iMavvvi
cpacjCEi, y.aX ot Tpel; to ^^ etatv. — * Fragment, concil. Lateran. iv. in edit,
concil. Labbwana. Ov rpo— cv ev ty) ;tavovi)ffi to Iwavvou ErnGToXri ava'c'vcooxe-
Tat, OTt Tpst; eidiv cl p.apTupouvTe? ev oupavw , o IlaTVip, A.o'"j'OC, axI nvsD[J.a
A-yiov. Ka"; ouTOt oiTpet; ev eiat. EuGu; Te TTpcoTiOnat )ca6w; ev Ttat Mo^i^it eupioxe-
TKl.
SLR LE I VMEUX PASSAGE DE SAINT JEAN. 64 I
mernc endroil * ii est dit que ces mots : Et Us Irois ne sonl
qu'un , sc trouvoieut dans quelqncs cxemplaires apres le >^ 8 .
Ce que ces pcres, aussi bien qu'Innoceut in et saint Tho-
mas d'Aquin n'approuvoientpas, etne croyoient pasqu'on
diit le lire dans les bons exemplaires de cette epitre. Ma-
nuel Calecas' , dans son livre des principes de la foi ca-
tholique , cite ce meme passage comme canonique. Il vi-
voit an Srcizieme siecle , ct assista.au concile de Lyon.
Apres tout ce qu'on vient de dire contre laulhenticite , Conclusion
t r r •«»•..* '^de cetle Dis-
de ce lameux passage , et en sa taveur , il s agit a present sg^^jjo^
d'en lirer les consequences, et de se determiner ale recon- Double au-
noitrc pour canonique , ou a le rejeter comme faux et sup- iheniicitede
pose. Mais pour lever ici toule equivoque , il faut observer ce passage.
qu'il y a par rapport aux divines Ecritures deux series po^i^^Q
d'authenticite. II y a une authenticile intrinseque, par rap- prise de I'o-
port aux originaux des livres saints : cette authenticite se mission des
tire de I'inspiration du Saint-Esprit qui les a dicies : et les manuscnts ei
d- • • u • 1 • du silence des
J e ces origmaux, aussi bien que leurs vei"sions, par- ,^^
ticipent a cette authenticite lorsqu'elles sont conformes a
ces originaux. Mais en meme temps il est une authenticile
extrinsequo par rapport aux copies ct au\ versions de ces
originaux : et cetle aulhenlicite se tire de I'autorite de TE-
glise qui les declare authentiques en les adoptant comme
fideles, exacles , ou ne contenant rien de contraire a la foi
ni aux bonnes moeurs,
Ainsi , quant au passage dont il s'agit, si par I'authen-
ticite de ce passage on entend lauthenlicile intrinseque ,
c'esl alors qu'il est vrai de dire que le tout consiste a savoir
si ce passage etoit originairement dans I'epitre de saint
Jean ; parce que s'il n y eloitpoint, nuUe autorile ne pour-
roil le faire reconnoitre pour authenlique , de cette au-
thenticite qui se tire de i'inspiration. L'Eglise peut bien
' Dans retlition des ConcIIes, apres lib-j; -i ^rfcfrrO/.c;, il y a un inlervalle
comme s'il manquoit la quelque chose ; apres quoi il met : Kx9c>; ev rtal xo-
^i;iv vj-Arsy.tiT.'.. Le P. C^ssarl a cm que tout le -f 8. du chap. t. de la pre-
miere de saint Jean, c'toit omis eii cet endroil, et il I'a supplee a la marge.
Mais Rich. Simon ayanl tonsulte I'ori^ina! grec, qui est dans la bibliolbeque
du Koi , n'y a remarque aucun infervalle vide ; et il prouTe fori bien que Ton
a seulement voulu marquer que ces mots : Et hi tres utium sunt , otoient dans
quelques manuscrils au huitieme verset. II appuie son sentiment snr un pas-
sage dune decrclale d'Innocent in a Teveque de Ferrare; el sur saint Thomas
contre Fabbe Joaclum. Voye.z Simon , Dissert, criu'q. des MSS. du N. T. —
- Manuel. Caleas, lib. de Pnncip.Jidei calhol. apud Combejis Aucluar.
pag. 5 19.
A/.
DISSEJITATIO'
nous declarer quelles sont Ics Ecritures sacrees ; mais ellc
lie pent pas les former , ni rendre autheiuique a cet egard
ce qui ne Test point.
Au contraire I'Eglisc peut donner. I'aullienticite extrin-
seque qui se tire de sa propre aulorite ; et a cet egard , le
tout consistc a savoir non pas si ce passage cloit originai-
reinent dans I'epttre de saint. Jean , mais si I'Eglise I'a de-
clare authenlique en I'adoptant. Et c'est ici que Ton peut
apporter en preuve la decision du concile deTrente. Ce
concile * a declare sacres et canoniques tous les livres
tant de I'Ancien que du INouveau-Testament, avex loules
leurs parlies , de la manii're que VEglise calholique les lit
dans I'edilion laline de la Viilgaie. Or, ce passage fait
panic du chap, v. de la i""*" cpitre de saint Jean dans les
exemplaires de la Vulgate. II faut done le recevoir comme
le reste pour authentique. Sur quoi il y a deux choses a
observer: ce concile nous oblige a recevoir la i"^* epitre
de saint Jean comme Ecriture sacrce et canonique , c'est-
a-dire comme au then tique,decetteauthenticiteinlrinseque
qui se tire de Tinspiration du Saint- Esprit; mais de plus il
nous oblige a recevoir la version Vulgale de cette epitre
pomme sacree et canonique, c'est-a-dire comme authen-
tique de cette authenticile exlrinseque tiree de I'autorite
de I'Eglise, quidiscerneetadopte les copies et les versions
des Ecritures sacrees , comme fideles , exactes et ne con-
tenant rien de contraire a la foi ni aux bonnes mcBurs. Car,
selon le lemoignage de Salmeron, qui avoit assisle au con-
cile de Trente^^ ['intention de ce concile, en declarant
la Vulgale authentique, futseulement de decider qu'entre
les versions latines des divines Ecritures , cette version
etoit la seule que I'Eglise adoptat, comme ctant la meil-
leure et la plus sure , et comme ne con tenant rien de
contraire ni a la foi ni aux bonnes moeurs.
Ainsi quand rauthenticite intrinseque du passage dont il
s'agit pourroit etre douteuse , son authenticile extrinseque
Tien seroit pas moins certaine; elle est assuree par la de-
cision du concile deTrente. Mais I'authenticite intrinseque
meme de ce passage est reconnue par la plupart des ecri-
vains catholiqucs , qui admettent ce passage comme elant
' Concil. Ti^denl. sess. 4. Si fpji's autp.m libros ipsos intcgrns ci/tn cni-
nibiis suis pnrtihits , prorit in Ecclesia cntltoh'cn legi cnn.irtet'ri-i/nl , ft in
veteri vulgain ediiione liahentnr, pro sncris ct cnnonicis uon suscepcrit...
anathema sil. — * Salniero. Pinlefsnm. 3.
SLR LE FAMBl'X PASSAGR DE SAINT JEAN. 543
originairement de I'epitrc de saint Jean, fondes sur ce que
pliisieurs ancicns petes Font cite commc de saint Jean ;
que toute I'eglise d'Afrique I'a adopte comme tel dans iin
lie solennel et public, presenle a un roi aricn an cin-
ijuienic siecle ; et qu'eufin il se trouve dans un bon nombre
d'anciensexeniplaires i^recs et latins.
Les protestans , tant lulheriens que calvinistes , I'admct-
lent comme nous , iondes uniquement sur Tautorite des
ancicns monumens , des percs el des exemplaires ou on le
trouve cite. Les sociniens, et ceux qui a leur exempie en
contestent la verite , soutiennent que ce passage nc fut ja-
mais dans I'original grec de saint Jean. Mais d'oii vient
qu'il est cite par Terlullicn , par saint Cyprien , par saint
Fulgence, par Vigile de Tapse , par Eugene de Carthage ,
par toute I'eglise d'Afrique ecrivant contre les ariens, qui
avoient tant d'interet de le contester, et qui n'ont jamais
cse s'incrire en faux contre lui? Comment s'est-il glisse
dans I'ancien manuscrit d'Angleterre, et dans tant d'autres
'alius d'une si respectable antiquite? D'ou vient qu'on I'a
-iipplee anx mar£:es de ceux ou il ne se trouvoit point?
Onavoue qu'exceple Tegiise d'Afrique, iesanciensperes
grecs et latins ne paroissent pas I'avoir connu , ni lu dans
leurs exemplaires, et que jusqu'aux seplieme el huitieme
siecles , il est rare de le trouver dans les peres et dans les
manuscrits : mais c'est apparemmerit que quelques-uns des
premiers exemplaires copies sur I'origina!, s'etant trouves
(lefectueux par la negligence ou la precipitation des co-
pistes, la plupart des copies qu'on en lira, et ensuite les
traductions que Ton fit sur ces copies imparfailes, se re-
pandirent partout ; le respect qu'on avoit pour I'antiquite
etl'impuissance oul'on etoitde confronlcrles exemplaires
nvec les originaux, firent qu'on se defia meme des exem-
plaires les plus corrects ou il etoit : en sorte que plusieurs
siecles s'ecouleren t avanl que I'on put reconnoitre le defaut
et I'erreur. On ne les reconnut qu'a la longue , d'ou vient
ijue plusieurs ne les mirent encore que sur la marge de
leurs exemplaires. Enfin la verite cclata peu a peu ; et de-
puis plus de six cent quinze ans ' les deux eglises , grec-
que etlatine sont enliereraent d'accord sur cet article.
* A dater du iv concilede Latran en i2i5, dont noas avons alleguc plus
haul le temoignage, on peul compter aujourd'hui , en iS3o , six cent qainze
ans.
544 DISSERT, sun le fameux passage de saint jean.
Ce que nous supposons tie la corruption fortuite de plu
sieurs des premieres copies , n'est ni incroyable ni extraoi*-
dinairc. On a dans rEcrilurc nieme de rAncien-Testament
des fautes de copistes qui y subsistent depuis plusieurs
siecles, et qui ne viennent que de I'ignorance, ou de la ne-
gligence , ou de la meprise des copistes *. Cela arrive
encore lous les jours , surtout lorsqu'il s'agit de copier
des textes ou le meme mot se trouve plus d'une fois; a
moins d'une attention extraordinaire , ou d'une revision
triis exacte , on est tres expose a se tromper. Dans cet en-
droit I'ecrivain ayant trouve deux fois ces mots : Tres sunt
qui tesUmonium dant , a saute du premier au second ; et
comme cela n'interrompoit point le sens, on ne s'est apercu
de la meprise que tres long-temps aprcs , lorsqu'on a com-
pare les anciennes copies les unes avec les autres.
Aureste, on ne doit pas s'imaginer que dans les pre-
miers siecles les copies des epitres canoniques fussent fort
communes. Encore aujourd'hui , elles sont assez rares
dans les anciens manuscrits. Les premiers temps du chris-
tianisme furent fortagites par Icsperseculions. Ces epitres
n'etoient point si necessaires , si publiques, nisi generates
que les autres, dont la plupart avoient etc ecrites a de
grandes eglises. La premiere de saint Jean en particulier
a ete envoyee aux Parthes , scion les anciens , c'est-a-dire
aux Juifs convertis d'au-dela de I'Euphrate. Or , il n'etoit
pas aise d'en tirer des copies de ces pays si eloignes, et si
ennemis de I'empire romain,
* Vojez le P. Martianay, notes sur le prologue de saint Jerome sur les cpi-
Ues canoniques ; et Roger, Dissertation sur ce passage , § 3o. p. 171.
PREMIERE EPITRR
DE SAINT JEAN.
CHAPITRE PREMIER.
Jesus-Christ vie elernelle apparue aux bommes. Soclete entre Dieu et nous.
Marcher Jans la lumiere pour avoir soci^te avec Dieu. Se dire sans peche,
c'est mentir, et accuser Dieu meme de mensonge.
I. QioD fuit ab initi«)
quod audivimus , quod
vidimus oculi^ nostris,
quod perspeximus , et
manus nostrae cotitrecta-
verunt de verbo vilaj :
2. Et vita manifestata
est, et vidimus, et te>ta-
mur, et annunliamus vo-
bis vitam a;ternam, quae
erat apud Patrem, el ap-
paruit nobi> :
5. Quod vidimus et au-
divimus, anauntiamusvo-
bis , ut et vos societatem
habeatis nobiscum, et so-
cietas nostra sit cum Pa-
tie, et cum Filio ejus Jesu
Christo.
4. Et haec scribimus vo-
bis ut gaudeatis, et gau-
diuin vestrum sit ple-
num.
1. Nous vous annoncons Ja pa-
role de vie qui etoit des le commen-
cement, que nousavons entendue,
que nous avons vue de nos yeux,
que nous avons regardee avec at-
tention, et que nous avons tou-
cbee de nos mains;
2. Car la vie meme ' s'est ren-
due visible ; nous I'avons vue ; nous
en rendons lemoignage; et nous
vous I'annoncons, celte vie eter-
nelle, qui etoit dans le Pere, et qui
est venue se montrer a nous.
5. Nous vous annoncons ce que
nous avons vu, et ce que nous
avons entendu , afin que vous en-
triez vous-memes en societe avec
rious, et que notre sociele soit avec
le Pere, et avec son fds Jesus-
Cbrist. '
4. Et nous vous ecrivons ceci afin
que vous en ayezde la joie ;' el que
voire joie soit complete. '
y 2. Le Verbe Je Dieu. t'oy. s. Jean. 1. 4.
■^ 3. Par la foi que nous aurons tous en lui , et par la charite dontelle sera
suivie.
y 4. Le mot gaiideatis n'est pas dans le grec, qui lit simplement : afin que
Totre joie , etc.
Ibid. Dans la vue des graces que Diea vous fait , et des biens qu'il vous
destine.
a3. 35
>46
EPITRE DE SAIST JEAN.
p, 5. Or, ce que nous avoiis appris
de Jesus-Clirist ' et ce que nous
Joan.vm. 12. vous enseignons , est que Dieu esl
la luniiere meme, et qu'il n'y a
point (le tenehres en lui :
6. De soi'te que si nous disons
que nous avons sociele avec lui,
et que nous marchions dans Ics te-
nebres_,'' nous mentons, et nous ne
pratiquons pas la verile.
n. Mais si nous marclions dans
la lumierc, coaime 11 est lui-meine
Hebr. ix i4- ^^j^g j.j luiniere, nous avons en-
1. Fet. 1. 19. ggj-jji^ig ^^J^Q societe niutuelle ; el le
sang de Jesus- Christ son Fils nous
purifie de tout peche.
3. lieg.-vm,
46.
2. Part. VI. 36
Prou. XX. 9.
/tec/. VI r. 21. point en nous
8. Si nous disons qne nous som-
mes sans peche, nous nous sedui-
sons nous-inemes, et laVcrite n'csl
g. Mais si nous confessons no5
peches, il est fidele et juste pour
nous les remettre, et pour nous
purifier de toute iuiquite.
to. Que si nou.** disons que nous
n'avons point peche, nous le fai-
sons menteur, et sa parole n'cst
point en nous. °
5. Et haec est annun-
tiatio , quam audivimus
ab CO, et annuntiamus
vobis : Quoniam Deus lux
est, et tenebrte in eo non
sunt uH?c.
6. Si dixerinius quo-
niam socielatemhabemus
cum eo , et in lenebrls
ambulanius , mentimur ,
et veritateni non faci-
inus.
7. Si autein in luce am-
bulamus , sicul et ipse est
in luce , societalem habe-
nius ad invicem, et san-
guis Jesu Christi , Filii
ejus, eniundat nos ab
omni pcccato.
8. Si dixeriinus quo-
niam peccalum non habe-
nius, ipsi nos seducimus,
et -Veritas in nobis non
est.
g. Si confiteaniur pec-
cata nostra, fidelis est, et
Justus, ut remittat nobis
pcccata nostra , et emun-
det nos ab omni iniqui-
tate.
10. Si dixerimus quo-
iiiam non peccavimus :
mendacein facinius eum,
et verbum ejus non est in
nobis.
y 5. Qui est cette parole de vie et ce Vcrbe eternel.
^ 6. Dans I'erreur el le peche.
■jl^ 10. Puisqu'elle nous enseigne parloul que nous sommes lous pecheurs,
el que nous avons un besoin conlinucl de sa mis^ricorde.
CHAPITRE II.
0*7
CHA.PITUE II.
Jesus-Chrisi viclime de propilialion pour les p<xhes de tout le monde. Qui
demeure en iui , doit marcher conirnc lui. Qui bait son frere , est dans les
tenebres. Qui aime le monde, n'aime point Dieu. Triple concupiscence.
Plusiciirs ar'techrists. L'onclion divine ensei:;ne tout.
1. Fition mt'i , haBc
scribo vobis, ul noii pec-
cetis. Sed et si quis pec-
caverit, advocalum habe-
mus apud Patrem Jesum
Christum justum :
2. Et ipse est propitia-
tio pro peccatis nostris,
non pro nostris autem
tantiiin , sed etiam pro
lotius mundi.
5. Et in hoc sciraus
quoniatn cognovimus
cum , si mandata ejus
observemus.
4- Qui dicit se nosse
euia, et uiandata ejus
non custodit, mendax est,
et in hoc yeritas non est.
5. Qui autem servat
verbum ejus, vere in hoc
charitas Dei perfecta est :
et in hoc scimus quoniam
in ipso sumus.
6. Qui dicit se in ipso
manere , debet , «icut ille
ambulavit, et ipse ambu-
lare.
1. Me» petits enfans , je vous
ecris ceci, afin que vousne pechiez
•point. Si neanmoins quelqu'un pi-
che, nous avons pour avocat en-
vers le Pere, Jesus-Christ qui est
juste. '
2. Car c'est lui qui est la vic-
time de propitiation, ' pour nos
peches ; et non-seulement pour les
notres, mais aussi pour ceux de
tout le monde. '
3. Or ce qui nous fait connoitre
que nous le connoissons veritablc-
ment, ' est si nous gardens ses
commandemens.
4. Celui qui dit qu'il le coniioit,
et ne garde pas ses commandemens,
est un menteur; ct la verite n'est
point en lui.
5. Mais si quelqu'un garde sa
parole, ' I'amour de Dieu est vrai-
ment parfait en lui : c'est par-la
que nous connoissons que nous
sommes en lui. '
6. Celui qui dit qu'il demeure en
Jesus-Christ , doit marcher lui-
meme comme Jesus-Christ a mar-
cher.
•^ I. Saint.
j 2. Qui s'est offert comme viclime , et qui s'offre encore lous les jours.
li/id. De sorte que lous ceux qui ont recours a lui. dans les senlimens
d'unewritablepenilence. trouventenluietparlaila remission dcleurspcihes.
y 3. Que aotre foi est sincere et verilable.
y 5. Fait cequ'elleordonne.
Ibid. C'est-A dire en Jesus-Cbrist.
548
l" EPITIIE DE SAINT JEAN.
7. Mes bieii-aimes , ' jc ne vous
ecris point un coiiunandement nou-
veau , uiais le commandcment an-
cien que vous avez recti dcs le
commencement; et ce commande-
meP.t ancien est la parole qne vous
avez entcndue. '
Joan. xiii. 8, ya ncanmoins je vous dis que
.. i.xv. 1-2. jg commandcment dont je vous
parle est Jiouvcau : ce qui est vrai
en Jesus-Christ, et en vous,"parce
que les tenebres " sont passecs, et,
que la vraie Inmiere * commence
deja a luire. '
9. Celiii qui pretend elre dans la
lumicre," et qui ne.lnmoins hait
son frere , est encore dans les tene-
bres. '
Infr. iir. i/|. 10. Celui qui aime son fr^re,
demeure dans la lumi^re ; et le
scandale n'est point en lui. '
1 1. Mais celui qui hail son frere
est daiis les tenebres, il marche
dans les tenebres , et il ne salt oi'i
il va, parce que les tenebres I'ont
aveugle.
12. ,le vous ecris, mes pelits
en Fans , parce que vos peches
vous sont remis au nom de Jesus-
Christ. '
7. Charissimi , nori
mandatum novum scriba
vobis, sed mandatum ve-
tus, quod habuistis ab
initio : mandatum vetus
est verbum quod audis-
tis.
8. Iterum mandatum
novum scribo vobis, quod
verum est et in ipso, et in
vobis : quia tenebrae trans-
icrunt, el verum lumen
jam lucet.
9. Qui dicit se in luce
esse, et fratrem suum
odit, in tenebris est usque
adhuc.
10. Qui diligit fratrem
suum, in lumine manet,
el scandalum in eo non est.
1 1. Qui aulem odit fra-
trem suum , in tenebris
est, et in tenebris ambu-
lat, et nescit quo eat :
quia tenebrjE^ olDcaecave-
runt oculos ejus.
12. Scribo vobis, fillo-
li, quoniam remittuntur
vobis peccata propter no-
men ejus.
•^ 7. Gr. lilt, mes frercs.
Ibid. Gri'c : que vous avez entcndu dcs lo commencement.
y 8. En Jcsus-Clirist , parce qu'il a pralique la cliarile d'une raanlere
loulc nouvclle , ayant porle I'cxces de sa cliarite jusqu'a mourir pour ses cn-
nemis ; el en vous qui avez recu ce preceple et le praliqucz a I'excmple de ce
divin modele d'une maniere toule nouvelie. — Voyez daws I'evangile de saint
Jean , xiir, 34.
Ibid. L'ignorancc ou "sous etiez a I'egard de I'clendue de ce prcceptc.
Ibid. A la foi.
Ibid. A ('clairer vos toeuis , el a vous apprendre que voire cbarit6 doit al-
ler jusqu'a aimer vos ennemis.
y 9. De la grace et (!e la verite.
Ibid. De I'erreur el du peche.
•f 10. Parce que sa charite fait qu'it ne clierche point ses propres inlerets
aux depens de ses freres, et qu'il ne prend point de leurs fautes une occasion
de pecher.
^12. Et je souliaile que vous ne vous y cngagiez pas de nouveau.
i3. Scribo vobis, pa-
dres, quoniam cognovis-
lis eum qui ab initio est.
Scribo vobis, adolescen-
tcs, qiioniaui vicislis iiia-
ligniiui.
14. Scribo vobis , in-
fantes . quoniam cogno-
vistis patrem. Scrii)0 vo-
CHAPITRE II. 549
1 5. Jo Tousecris, peres, ' pa roe
que vous avez connu celui qui est
di'S le cominencemeut. ' Je vous
ecris, jeunes gens, parce que vous
avez vaiocu le lualiu esprit.'
14. Je vous ecris, petits enfaas,'
parce que vous avez connu le
Pere. ' Je vous ecris,' jeuaes gens,
bis, juvenes, quoniam parce que vous eles forts, que ia
fortes eslis, el verbuui Dei parole de Dieu demeure en vous,
manet in vobis, el vicistis et que vous avez vaincu le maUa
malignum. esprit.
i5. Nolitc diligere i5. N'aimez point le monde j, ni
mundum, ncque ea qua? cequie'rt dans le monde. Si quel-
in mundo sunt. Si quis qu'un aiuie ie monde, I'amour du
diligit mundum, oon est Pere n'est point en lui.
cbaritas Patris in eo :
16. Quoniam orane 16. Car tout ce qtii est dans le
quod est in mundo, con- monde est, ou concupiscence de la
cupiscentia carnis est, et chair, ou concupiscence des yeux,
concupiscentiaoculorum, ou orgueil de la vie; ce qui ne
vient point du Pere ^ raais du
monde.'
et superbia vita; : quae non
estex Patre,sed ex mundo
est.
17. Et mundus transit,
et concupiscentia ejus.
17. Or, le monde passe ainsi
que la concupiscence;' mais celui
Qui uutem facit volunta- qui fait la volonte de Dieu,demeure
tern Dei, manet in aeter- eternellement.'
nuucL.
y- r3. 11 appelle ainsi ou Ics horamesa-vancesen Age, ou les juifis nouTeaox
convertis, mais anciens dans h connoissance du vrai Dieu. 0
Ibid. Et je desire que cette connoissance ne soil pas sterile en vous.
Ibid. Et je veux que yous conserviez le fruit de celte victoire.
y 14. II appclle ainsi tous les fideles en general. Comme ci-dessus y 12.
Ibid. Et jc souiiaile que vous profiliez de cette connoissance , et que tous
demeuriez attaches a un Pere si tcndre et si bon.
Ibid. Le grec repele ici ces mots : Je vous ecris, peres, parce que vooa
avez connu celui qui est dcs le commencement. Ou plutot scion !c grec A la
letlre : Je vous ai ecrit, peres... Je vous ai ecrit, jeunes gen? , eic.
y 1 6. Le monde nous porte ct I'amour des plaisirs , au desir des richesses
et a ia recherche des bonueurs , comme au\ seals biens qoe Ic monJe coonoit,
elqu'ilestime.
y 17. Tout ce que la coacupiscence troure d'aimablc dans les choees du
monde, passe avec lui.
Ibid. Altachons-nous done k raccomplissementde celte divine volont^ , ct
fuyons le monde avec tous ses enchantemens. Rien n'est plus propre a nous en
degouter que leor instabilite, et le peu de temps que nous aurionsA les poss^er.
36o
I" EPITKE DE SAINT JEAN.
18. Mes petits enfans, c'est ici
la derniere heiire : el, coinnie vous
avez entendu dire que rAntechrist
doit venir, " il y a des maintenant
meme plusieurs anlechrisls ; ce qui
nous fait connoitre que nous som-
mes dans la derniere heure. '
19. lis' sont sortis d'avec nous, '
mais ils n'etoient pas des notres;
car, s'ils eussent ete des nolres, ils
fussent demeures avec nous; mais
ils en sont sortis, afin qu'on recon-
nul clairemenl que tons ne sont pas
des notres.
20. Pour vous, ' vous avez ret'u
ronclion du Saint, ' et vous con-
noissez toutes choses. "
21. Je ne vous ai pas ecritcom-
me a des personnes qui ne connus-
sent pas la verile , mais comme a
ceux qui la connoissent, et qui sa-
vent que nul mensonge ne vient
de la verite.
23. Qui est mcnteur, si ce n'est
celui qui nie que Jesus soit le
Christ ? " Celui-la est un Ante-
christ, qui nie le Pore et le Fils. "
25. Quiconque nie le Fils, ne
reconnoit point le Pere ; et quicon-
que confesse le Fils, reconnoit
aussi le P^re.
24- Faites done en sorte que ce
que vous avez appris des le com-
i8- Filioli, novissiraa
hora est : et sicut audistis
quia Antichristus venit,
et nunc antichristi multi
lacti sunt : unde scimus
quia novissima hora est.
19. Ex nobis prodie-
runt , sed non eiant ex
nobis : nam si fuissent
ex nobis : permansissent
ulique nobiscum : sed ut
manifesti sint, quoniam
non sunt omnes ex no-
bis :
20. S<;d vos unctionem
habetis a Sancto, et nos-
tis omnia.
21. Non scripsi vobis
quasi ignorantibus verita-
tem , sed (juasi scientibus
earn : et quoniam omne
mendacium ex veritate
non est,
22. Quis est mendax,
nisi is qui negat quoniam
Jesus est Chiistus? Hie
est Antichristus, qui negat
Patrein et Filium.
'lb. Omnis qui negat
Filium, nee Patrem ha-
bet : qui confitetur Filium,
et Patrem habet.
24. Yos quod audistis
ab initio, in vobis per-
•jf i8. Voyez dans ce volume la Disserlation de V aniechrist , a la tete de
la seconue epilre aux Thessaloniciens.
Ibid. Le dernier Age du monde.
>'■ 19. Ges anlechrisls.
Ibid. Us n'on J jamais ete de vrais et solides chreliens.
■f ao. Vous , vrais fideles.
Ibid. C'est-i-dire de Jesus-Christ qui est le Saint des saints. Voyez
au -^ 27-
Ibi^. De sorte que vous ne sercz pas trompes par ces s^ducteurs.
■jj^ 22. C'est-a-dire I'OintdeDieu.
Ibid. En niant la filiation eternelle de Jesus-Christ.
maneat. Si in vobis per-
inanserit quod audistis ab
initio, et vos in Filio et
Patre nianebiti^.
25. El haec est repro-
inisiiio, quam ip;;e polli-
citus est nobis, vitam
aelernam.
36. Haec scripsi vobis
de his qui seducunt vos.
27. Et vo< unctionem
quam accepislis ab eo ,
maneat in vobis. Et non
necesse habelis ut aliquis
doceat vos : sedsicutunc-
lio ejus docet vos de onn-
nibus, el verum est, et
non est menduciuui : et
sicut docui.t vos, nianele
in eo.
28. Et nunc, filioli,
manete in eo : ut cum ap-
parueril , habeamus fidu-
ciam, 5t non confimda-
mur ab eo in adventu
ejus.
•jg. Si scitis quoniam
Justus est, scitote quo-
niam el oranis qui facit
justitiam, ex ipso natus
est.
CHAPITREII. 5$t
mencement ' demeure tonjours en
vous. Si ce que vous avez appris
d^s le commencoment demeure
toujours en vous, vous deraeurerei
aussi dans le Fils et daus le Pire.
25. Et ^-'est ce que lui-meme
nous a promis, en nous promet-
tant la vie eternelle. '
26. Voila ce que j'ai cru devoir
vous ecrire touchant ceux qui vous
seduisent.
27. Mais pour vous, que I'onc-
tion que vous avez recue du Fils de
Dieu , demeure en vous; ' et vous
n'aurez pas hesoin qu'aucun vous
enseigne ; mais comme cette nieme
ooclion ' vous enseigne loutes
choses, el qu'elle est la verite
exemple de tout mensonge, de-
meurez dans ce qu'elle vous en-
seigne.
28. iMaintenant done, mespetits
enfans, demeurez dans le Fils de
Dieu,aGn que, lorsqu'il paroitra ,
nous soyons pleins de confiance ,
et que nous ne soyons pas confon-
dus par sa presence.
29. Si vous savcz que Dieu est
juste, sachez aussi que tout hom-
me qui vit selon la justice, est ne
de lui. '
724. Touchant J^us-Christ qui est le fib de Dieu, et toucbaot toute la
doctrine du christianisme.
'^ i5. Qui consiste dans cetie unioa avec le Fere et avec le Fils.
y 27. Grec : L'onclioo.... demeure, u.svei.
ibid. C'est le sens du grec : 7b airi /,f ioaa.
y aS. O'est le sens du srec. Aulr. selon la Vulgale, dans son av^nement.
y- 39. Est du nombre de ses enTans.
562
l" EPITUE DE SAINT JE/xN.
CHAPITRE 111.
Chretiens enfans de Dieu. Qui commet le peche, est enfant du diable. Qui est
ne de Dieu , ne peche point. Qui n'aime point son frere , demeure dans la
mort. Aimer non de parole mais en verite. Dieu demeure en nous par son
esprit.
1. CoNSiDERKz quel amour lePere
nous a tenioigne, de vouloir que
nous soyons appeles, et que nous
soyons en effet ' enfans de Dieu.
Cast pour cela que le monde ne
nous counoit pas, " parce qu'il ne
connoil pas Dieu. '
2. Mesbien-aimes, nous sommes
dejii enfans de Dieu; raais ce que
nous serons un jour, ne paroit pas
encore. Nous savons que lorsque
Jesus- Christ se montrera dans sa
gloire, nous serons sexnblables a
lui,' parce que nous le verrons tel
quMl est. '
3. El quiconque a cette esperanc«?
en lui, se sanctifie, coinme ii est
saint lui - n>eme.'
4. Tout honime qui coniinet un
peche fait une iniquite ' ; car le peche
est une iniquite. '
1. ViDETE qualem cha-
rilatein dedit nobis Pater,
ut filii Dei noininemur et
simus. Propter hoc mun-
dus non novit nos : quia
non novit eum.
2. Charissimi , nunc
filii Dei sumus : et non-
dum apparuit quid eri-
mus. Scimus quoniam
cum apparuerit, similes
ei erimus : quoniam vide-
bimus eum sicuti est.
3. Et omnis qui habet
banc spem in eo, sancti-
ficat se, sicut et ille sanc-
tus est.
4. Omnis qui facil pec-
calum , et iniquitatem
facit : et peccatum est inir
quitas.
•^ 1 . Ces mots, et simus , ne sont pas dans le i,'rec : mais nous ne sommes
appeles tels que parce que nous le sommes en effel, conime saint Jean le dil
au -j- suivant.
Ibid. Qu'il nous meprise.
Ibid. Qui est notre pere.
■j^ 2. Cette vue nous transformera en son image et a sa ressemblance. —
Aulr. Nous savons que lorsque ce que nous devons ^!re paroitra . nous serons
semblables a Dieu ; parce que , e'c.
■^ 3. Car il n'y a que ceux qui participent a sa sainlete , qui puissent avoir
part a sa gloire.
■jr 4- Commet aussi un violement de laloi de Dieu.
Ibid. Eslle violement de la loideDieu: et ainsi tout homme qui peche,
est bien eloigne de participer a la sainlete de Jesus-Christ , qui a toujours fait
la volonte de son pere.
CHAPITRE III.
553
5. Et scUis quia ille ap-
paruit ut peccata nostra
lolleret : et peccatuin in
eo lion est.
6. Omnis qui in eo ma-
il et, non peccat : et om-
nis qui peccat, non vidit
eum, nee cognovit eum.
7. Filioli , neino vos
-educat. Qui facit justi-
tiam , Justus est : sicut et
ille Justus est.
8. Qui facit peccatum ,
ex diabolo est : quoniam
ab initio diabohis peccat.
Inhocapparult Filius Dei,
utdissolvat opera diaboli.
9. Omnis qui natus est
ex Deo, peccatum non fa-
cit : quoniam semen ipsius
in eo manet, et non potest
peccare , quoniam ex Deo
natus est.
10. In hoc manifest!
sunt Glii Dei, et filii dia-
boli. Omnis qui non est
Justus, non est ex Deo, et
qui non diligit fratrem
suum :
5. Vous savez qu'il s'est rendu
visible pour se charger ' de nos pe-
ches, et qu'il n'y a point de peche Isai. lui. 9.
en lui. i.Pelr.w. aa.
6. Quiconque deineure en lui ',
ne peche point : et quiconque peche,
ne I'a point vu, et ne I'a point con-
nu. '
7. Mes petits enfans, que per-
sonne ne ?ous seduise. ' Celui qui
fait les ceuvres de justice , c'est lui
seul qui est juste comme Jesus
Christ est juste.
8. Celui qui commet le peche est Joan. vm.
enfant du diabie. parce quelediable "5 '»•
peche des le commencement;' et
c'est pour detruire les (euvres du
diabie que le Fils de Dieu est venn
au monde.
g. Quiconque est ne de Dieu,'ne
commet point de peche, parce que
la semence de Dieu ' dcmeure en
lui ; et il ne pent pecher, parce qu'il
est ne de Dieu.
10. C'est en cela que Ton connoit
ceux qui soiit enfans de Dieu , et ^
ceux qui sont enfansdii diabie. Tout
homme qui ne fait point les oeuvres
de justice,' n'est point enfant de
Dieu, non plus que celui qui n'aime
point son frere.
•f 5. Gr. aulr. pour 6ler et ahoUr nos pethes.
T? G. Par une foi vive , une esperancc ferme , el una charile ardente.
Hid. Puisquesa connoissance n'a point produit en lui !cs fruits de justice
ijd'elle devoit y produire , et qui devoieut le rendre semblable d Jesus-Cbrist
autant qu'ua liommc peut I'^lre.
}f •;. En vous persuadant qu'il sufGt de croire ea Jesus-Christ pour 6lre
juste comme Jesus-Christ.
•^ S. II est le pere cl le clief de lous les pecheurs.
y 9. Kst vrairaenJ enfant de Dieu.
Ibid. Sa grace sanctiliante que le Sainl-Esprii repand dans son ame.
Hid. Que Tesprit de I'adoption divine dont il est anim^, lui inspire une
3i-den:echarite pour Dieu, et une horreur extreme du peche. Auchap. i. -f 8,
I'Apo'.re dit que nul n'est exempt de peche , c'esl-a-dire dc fautes legeres j
mais ici il est parte du peche mortel et d'une funeste perseverance dans le
peche.
^ 10. C'est I'eipression du grec. ^txa'.o<rjV7r<.
1" EPllUK DE SAINT JEAN.
Joan.xm.'Hy
XV. 12.
Gen. IV. 8.
Lev. XIX. 17
Supr. II. II.
Joan. XV. I -J
Luc. III. II.
/flC. 11. i5.
554
1 1. Car oeqiii voiisa t'lc annoiice,
ct que vous avez entenchi cles le
commencement, est que vous vous
aimiez les uns les auhes :
12. Ne faisant pas comme Cain,
qui etoit enfant du malin esprit, et
qui tua ?on frere. El pourquoi le
lua-t-il? Parce que ses actions
etoient mauvaises, ct que ccUes ile
son frtre etoient justes.
10. Ne vous etonnez pas, mes
freres , si le monde vous hait. '
14. Nous reconnoissons, a I'a-
mour que nous avons pour nos fre-
res , que nous sommes passes de la
mort " a la vie. ' Celui qui n'aime
point son frere ,' demeu re dans la
mort.
i5. Toutiiomme qui hait son fre-
re est homicide. Or, vous savez que
nul homicide n'a la vie clerneile re-
sidente en lui".
16. Nous avons reconnu I'amour
de Di^ju envers nous, en ce qu'il a
donn«i sa vie pour nous; nous de-
vons aussi donner notre vie pour
nos freres '.
17. Si doncquelqu'un a des biens
de ce monde, et que, voyant son
frere en necessite, il lui ferme son
11. Quoniam hajc est
annunliiitio, quam audis-
tis ab initio, ut diligalis
alterutrum :
12, Non sicut Gain, qui
ex maligno erat, et occi-
dit fratremsuum. Etprop-
terquid occiditeum?Quo-
niam opera ejus maligna
erant : fratris autem ejus,
jus la.
i5. Nolite mirarl, fra-
tres, si odil vos mundus.
i4' Nos scimus quo-
niam Iranslati sumus de
morte ad vitam, quoniam
diligimus fratres. Qui non
diligit, manet in morte.
1 5. Omnis qui odit fra-
trem suum, homicida est,
Et scilis (pioniam omnis
homicida non habet vitam
seternam insemetipsoma-
nentein.
16. In hoc cognovimus
charitatem Dei, quoniam
ille animam suam pro no-
bis posuit : et nos debe-
mus pro fratribus animas
ponere.
17. Qui habuerit sub-
stantiani hiijus mundi, et
viderit fratrem suum ne-
■^ la. Parce qu'il ne. pul supporter !a vue de sa sainlele, qui condamnoit
la corruption de son coeur.
■jr i.'i. Le monde esl plein de corruption et de malice , et il ne peul souffrir
voire piete et voire saintete.
f i\. Du peclie.
Jbid. A la grace.
Ibid. Ce mot est dans legrec. rbv a^sXcpov.
•^ i5. Et par consequent, celui qui hait sou frere est mort aus yeux de
Dicu. Craignons done de tomlerdans celte liaine de nos freres , et excitons-
nous a avoir pour eux une cliarite sincere. C'est par les oeuvres que nous con-
noitrons que nous !es aimons veritableinenl comme il I'explique dans le verset ;
suivant.
-^ i(3.- Du moins ^lie dans la dis^posilion de le fairo , si ccla eloil necessairel
pour leur salut.
CUAPITRE III.
565
cessilatem habere, et clnu-
serit viscera sua ab eo :
quoniodo charitas Dei ma-
net in eo?
1 8. Filioli mei, non dili-
ganius verbo, ncque lin-
gua, scdopere et veritale.
19. In hoc cognoscimus
quoniam ex verilate su-
inus : et in conspeclu ejus
suadebimus corda nostra.
20. Quoniam si repre-
henderit nos cor nostrum :
coeur,' comment I'amour de Dieu
demeureroit- il en lui ?
18. Me? petits enfans, n'aimons
pa:? de parole et dc la langue, raais
par CEUvres et en verite.
ig. C'est par-la que nous con-
noissons que nous sommes enfans
dc laAerite, etque nous en periua-
derons notre coeur en la presence
de Dieu.
20.Si notre coeur nouscondamne,'
que ne fera point Dieu , qui est plus
major est Deus corde nos- grand que notre coeur, et qui con-
tro, et novit omnia. noit toutes choses?
21. Chari.-ijimi , si cor 21. Mesbien-aimes, si noire coeur
nostrum non reprehende- ne nouscondamne point,nousavons
rit nos, flduciam habemus I'assurance ' devant Dieu ;
ad Deum :
22. Et quidquid pelieri- 2a. Et quoi que ce soil que nous
mus, accipiemus ab eo : lui demandions , nous le recevrons
quoniam manda'a ejus delui; paixe que nous gardens Mau. xxi.
custodimus , et ea quae ses commandemens,' et que nous 22.
sunt placila coram eo fa- faisons ce qui lui est agreable.
cimus.
2J. Et hoc est manda- 20. Et le commandement qu'il Joan. vr. 29.
tum ejus, ut credamus in nous a fiiit, est decroireau nom de ivu. 3.
nomine Filii ejus Jesu son Fils Jesus -Christ, et de nous Joan. xiu.
Chrislijetdiligamus alter- aimer les uns lesautres, comme il ^^' *^'' '^"
utrum sicutdedit manda- nous Ta cominande.
tum nobis.
24. Et qui servat man- 24. Or, celui qui garde les corn-
data ejus, iii illo manet, et mandemens de Dieu, demeure en
ipse in eo : et in hoc sci- Dieu, ei Dieu en lui; et c'est par
mus quoniam manet in . I'esprit qu'il nous a donnc , ' que
nobis, de spiritu quern de- nous connoissons qu'il demeure en
dit nobis. nous.
#
Y 17. Lilt, ses enlrailles.
y 20. Nous rt'proclie notre durele.
y 21. Lttl. dc la coniiaDce.
722. Ainsi qu'il paroit par ce l>jn tc'inoigna^'e de notre conscieucc.
y 2 5 . Qui est I'esprit de cbarite , ou piulol qui est la cbarite in^me.
»5G
EPllHE Di: S.VINT JEAN.
CHAPITRE IV.
Discerncinenl des csprils. S'aimer les u!!S les aulres. Amour dc Dieu envers
nous, luodeic de TaiKour que nous devo.'is a nos frercs. Qui denieure dans
ramour, doiiicure en Dieu. Conllance qu'inspire la cliarite. Qui hail son
frere, n'aiiue poinl Dieu.
1 . MEsbicn-aiines, ne ciojez pas
a tout esprit; niais epionvcz si Ics
tisprits soiit de Dieu ; car plusieurs
fgux propbetes se sont tilevos dans
le monde.
a. Voieiaquoion reconnoil qu'un
esprit est de Dieu : Tout esprit qui
coni'esse que Jesus-Christ est venu
avec une chair veritable, est de Dieu ;
3. Ettout esprit qui detruit Jesus-
Christ,' cclui-h'i n'estpointde Dieu,
et e'est h\ I'esprit de I'Anlechrist ,
dont vous avez entendu dire qu'il
doit venir ; et il est deja veiiu dans
le monde. '
4. Mcs pelits enlans, vous I'avez
vaincu ' vous qui etes de Dieu, par-
ce que cciui qui est en vous, est
plus grand que celui qui est dans
le monde.
5. lis sont du inonde: c'est pour-
quoi lis parlcnt le langage du mon-
de ; et le monde les ecoute.
6. Mais pour nous, nous sommes
de Dieu ; et celui qui connoit Dieu,
1. Charissimi , nolile
omni spiritui credere, sed
probate spiritus si ex Deo
sint : quoniam multi pseu-
doprophcla3 exierunt in
mundum.
2. In hoc cognoscitur
Spiritus Dei: Omnis spi-
ritus qui confitetur Jesum
C bristum in carne venisse,
ex Deo est :
5. Et omnis spiritus, qui
solvit Jes'jm, ex Deo non
est, ethic est Anlichristus,
de quo audislis quoniam
venit : et nunc jam in
mundo est.
4. Vox ex Deo eslis, fi-
lioli: et vicislis eum, quo-
niam major est qui in vo-
bis est, quam qui in mun^
do.
5. Ipsi de mundo sunt :
ideode mundo loquuntur,
et mundus eos audit.
6. Nos ex Deo sumns :
qui novit Deum , auditj
y 3. En nianl la verile de son ii-^arnation, ou de sa filiation divine. —
Aulr. qui di vise Josus-C/z/"i5/, qniiiie que Jesus soil le Chrisl. [Supr. it. 22.)
Le giec lit : Et tout esprit qui ne confesse pas que .lesus-Ghrisl soit venu dans
une chair veritable , n'est point de Dieu. Cette lecon se Irouve dans quelques
peres, parliculieremenl dans saint Polycarpe, disciple de saint Jean. Plusieurs
lisenl comme porte la Vulgate. Quelques-uns cilent Tune et I'autrc le9on.
f 4. Gel antechrlst. Le Grec lit : vous les avez vaincns , ces faux piv-.
phetes , ces antechr-ists.
no<: qui non est ex Dt-o,
lion audit no?* : in lioc cog-
nosciimis Spiritum veri-
tatis, el spiritum erroris.
7. Charissimi , diliga-
MiusnosinTiccm:quiacha-
ritaset Deo est : el omnis
(|ui diligil. ex Deo naliis
isl , et cognoyfit Deum.
8. Qui non diiigit, non
novit Deuin : quoniam
Dens charitas esl.
g. In hoc apparuil cha-
ritas Dei in nobis , quo-
niam Fiiimn suum unige-
nitum misit Deus in mnn-
dum, ut vivamuspereimi.
10. In hoc est charitas :
non quasi nos dilexerimus
Deum, sed quoniam ipse
prior dilcxil no? , el misit
Filium suum propitiatio-
nem pro peccalis nostris.
1 1. Cliarissimi , si sic
Dcus dilexit nos: et nos
debemus allerutruih dili-
gere.
12. Deum nemo vidil
unquam. Si ditigamus iu-
vicem, Deus iu nobis ma-
nel , et charitas ejus in
nobis perfecta est.
i5. In hoc cognoscimus
quoniam in eo manemus,
el ipse in nobis : quoniam
de Spirilu suo dedil nobis.
14. Et nos vidimus , et
testiCcamur, quoniam Pa-
ciiAriTUE IV. 007
nous ecoute : celui qui n'est point
de Dieu, ne nous ccoulc point ; c'est
par-la que nousconnoissonsl'espiil
de vcrite et I'esprit d'erreur. '
7. Mes bien-aimes, aimons-nous
les ims les an ires : car I'amour ' est
de Dieu; el tout homme qui aime,'
est ne de Dieu, ct ii connoit Dieu.
8. Celui qui n'aime point, ne
connoit point Dieu , car Dieu esl
amour;
9. C'est en cela que Dieu a fait
paroilre son amour envers nous, en
ce qu'il a envoye son Fils unique
danslemonde, afin que nousvivions
par lui.
10. Et cet amour consiste en ce
que f-e n'est pas nous qui avons aime
Dteu, mais que c'est lui qui nous a
aimes le premier, et qui a envoye
son Fils afin qu'il fut la victime de
propitiation pour nospeches.
11. Mes bien-aimes, si Dieu nous
a aimes do cette sorte , nous devons
aussi nous aimer les uns les autres.'
12. Nul homme n'a j'amais vu
Dieu. Si neanmoins nous nousai-
uions les uns les autres, Dieu de- Joan. i. 18.
nieure en nous, et son amour est i.T'/wi.ti. 16.
parfait en nous.
i5. Ce qui nous fait connoitre
que nous demeurons en lui, et lui
en nous , c'est qu'il nous a rcndus
parlicipans de son Esprit ;
14. Et nous avons vu ' et nous
rendons lemoignage' que le Pere a
J C. Ceax qui sont animes de I'Esprit de Tcrite, el ceus qui sont pousses
par I'espri I d'erreur.
■j^ 7. La charile.
Ibid. Qui est ciiarilable.
T^ 8. La connoissance de Dieu nous portc a I'i nailer dans sa charile et son
amour, en aimant nos frorcs , comme il nous a aimes.
T^ 1 1 . Pour nous rendre Ics imitaleurs de noire Pere celeste.
■f t4. Par la lumieredecel Esprin divin.
Jlfid. Pjt la force qu'il nous Joiine, et par les miracles qu'il nous fait faire.
L
i58
EPITRE DE SAINT JEAN.
envoye son Fils pour SlreSauveiir
dumonde. '
i5. Quiconque done aura con-
fepse que Jesus est Ic Fils de Dieu ,
Dieudemcurcen lui,etluien Dieu.'
16. El nous avons connu et cru'
Pamourque Dieu apournous Dieu
est amotu' : et ainsi quiconquo de-
ineure dans I'amour, denieure en
Dieu , et Dieu demeure en lui.
17. Or, c'est en cela que consiste
la perfection de noire amour envers
Dieu , si nous somnics tcls en ce
monde que Jesus- Christ y a ele ,
afin que nous ayons confiaiice an
jour du jugement. '
18. La crainte n'est point avec la
charite ; mais la charite parfaite
chasse lacrainle, parce que la crainte
esl accompagnee dc peine: et celui
qui craint n'est point parfait dans
la charite.'
19. Aimons done Dieu, puisqu'il
nous a aimes le premier.'
•20. Si quelqu'un dit, J'aimeDieu,
et qu'il haisse son frere , c'est un
ter misit Filium suum Sal-
vatorem mundi.
ID. Quisquis confessus
itieril quoniaui Jesus est
Filius Dei , Deus in eo
manet, et ipse in Deo.
16. Etnos cognovimus,
et credidimus charitati ,
quam hahet Deus in nobis.
Deus charitas est: et qui
manet incharilate, in Deo
manet, et Deus in eo.
17. In hoc perfecla est
charilas Dei nohiscum, ut
fidnciam haheamus in die
judicii : quia sicut ille est,
et nos sumus in hoc mun-
do.
18. Timor non esl in
charitate : sed perfecla
charitas foras miltit tinio-
rem: quoniam limor poe-
nam habet : qui aulem ti-
met, non est perfectus in
charitate.
19. No? ergo diligamus
Deum , quoniam Deus
prior dilexit nos.
20. Siquisdixerit,Quo-
niam diligo Deum, et fra-
y 14. Aulr. el nous avons vu de vos yeux, le Verbe de vie ifiii a peril
dans le monde [.lupr. i. 1. 0..), et nous rendons trmoignage que Dieu Ic
I'ere , etc.
y i5. Pour\u que ceUe coiifessioo soil acconipagnce de reconnoissance et
d'amour.
y^ 16. Par la foi.
■j^ 17. Elanlprdts a donner noire vie pour nos frcres, comme il a donne la
sienne pour nous. — Gr. autr. C'esl encelaqueconsislela perfection de notre
amour, si nous sommes en ce monde tcls que Dieu est envers nous , nous
aimanl les uns les autres , comme Dieu nous a aimes , afin que , etc. Le mot
Dei n'est pas dans le grec.
Idid. Que nous raltendions sans crainte.
■^18. La cliarile qui inspire la confiance , la joie el la paix. — Lacrainle
que saint Jean a dessein d'cxclure est la cralnle servile, celle du jugemenl,
qu'il veut que nous altendlons avec plus de confiance que de frayeur.
-jV 19. Tcmoignons-lui notre amour par I'amour que nous aureus pour nos
freres. C'est la preuvede celui que nous avons pour Dieu.
CHAPITRE IV. 069
tremsnumo(Ierit,uiendax menleur ; car comment celui qui
est. Qui iniin non dilifjit u'aimc pas son fieic qu'il voil, pent-
IVatrem siiiim qucm videt. ii aiiiuT Dien qu'il ne voii pa« ?
Deuin, qucm non videl,
quomodo polest diligere ?
ai. I't hoc inandaluin ai. Et c'esl de Dieu meme que Joan.xm.
habenius a Deo. ul qui nousavonsrccu cecommandement, ^"
diligit Deiini . diligal et que celui qui aime Dieu, aimc aus*i ^_^"\ „
fi-atrem suiiDi. confrere.
y -2 1 . En sorU' que celui qui n'obsene pas ce coramandement iif peut dire
qu'il aime Dieu, piii?que ramourdc Dicu ccn?istc dans I'oLiservation de ses
com 1 audemcn?.
CHAPITRE V.
Amour de Dieu el du pro-hain. Commanderaens de Dieu non peniblcs. Foi
victorieuse du monde. Tomoins qui deposenl \X)ut Jesus-Christ. Qui ne
croil pas CD Jesus Ciirist , fail Dieu menleur, el n"a point la vie. Demandes
eiaucees. Pi'cbeqiii conduil a la niorl. Jesus-Christ vrai Dieu. .
1. Omsis qui credit quo- i. Qciconqbe croil que Jesus est
niam Jesus est Chtistus, le Christ, ' est ne de Dieu : et qui-
ex Deo natus est. El oni- conque aiine ceiui qui a cngendre,
nis qui dih"git eum qui ge- aime anssi ceiui qui en a ete engen-
nuit , diligit et eum qui dre:
natus est ex eo.
2. In hoc cognoscimus 2. Nous connoissons que nous ai-
quoniam diligiujus natos mens les enfan- dc Dieu, quand
Dei, cum Deum diiiga- nous aimons Dieu, et que nous gar-
ni us , et maudata ejus la- dons ses commandemens,
ciamus.
5. Haec est enim chaii- 5. Farce queTamourde Dieu cou-
tas Dei , ut mandata ejus siste a garder ses commandemens;
custodiamus : et mandata et ses commandemen;5 ne sont point
ejus gravia non sunt. penibles.
4. Quoniamomnequod 4- Carious ceux qui sont n{i> de
y I. Le Sauveur que Dieu a oinl de la divinitc mime, par I'union de la
nature divine ct de la nature humaine en sa personne.
Ibid. En sorle que quiconque aime Dieu , qui esl le pere des fideles par la
foi qu'il leur inspire , aime aussi les fideles qui re^ivent cette foi , ct qui de-
vicnnent par-la les cafans de Dieu.
•^6o l" liPlinE DE SAINT JEAN.
Dieu sont Tictorieux du inonde ; ' et natum est ex Deo , vincit
oelle victoire par laquelle le inonde mundum : et haec est vic-
estvaincu, est Fcftel de notre foi. loria, quae vincit inun-
diini, fides nostra.
5. Qui est celuiqui est victorieux 5. Quis est qui vincit
I. Cor. XV. du monde, sinon celuiqui croit que inundum , nisi qui credit
~- Jesus est le Fils de Dieu?" quoniain Jesus est Filius
Dei ?
6. C'est ce mcme Jesus-Christ (). Hie est qui venitper
qui est venu avec I'eau et avec le aquam et sanguinem, Je-
sang : non-seulcnieut avec I'eau,' sus Chistus : non in aqua
mais avec I'eau et avec le sang, solum, sed in aqua et san-
Etc'estl'Esprit'quiiendlemoignage guiiie. Et Spiritusest, qui
que Jesus-Christ est la verite. ' testificatur qsioniam Chri-
stus est Veritas.
7. Caril y en a Irois Iqui rendent 7. Quoniain tres sunt,
temoiguage dans le ciel, " le Pere, qui testimonium dant in
le Yerbe, et le Saint - Esprit ; et ses coelo : Pater , Verbum , et
trois sont une meme chose. ' Spiritus Sanctus : et hi
tres unum sunt.
8. Et il y en a trois qui rcndent 8. Et tres sunt, qui tes-
' temoignagc dans la terre," i'esprit,' limoniuni dant in terra:
I'eau , ' et le sang : " et ces trois sont spirilus , et aqua , et san-
une meme chose.' guis : ethitres unumsunt.
■^ 4. Le monde s'oppose par ses cncbantemens a cette observation des com-
mandemens de Dieu, el tache de la rendre diflicile.
■^ 5. Celui qui met en lui toulc sa confiance, comme en celui qui, ayant
^aincu le nionde par sa croix, nous a aussi merile la grace de le vaincrc
nous mdmes.
•)!' 6. Conime Jean-Dapllste.
I/jt'd. Qui sorlirent de ^on f6le sur I'arbre dc ia croix, el qui sonl fes
preuvcs inconlestables de la verilede son incarnation.
I/ji'd. L'espril qu'il rcmil cnlreles mainsde son pere au inomenlde sa mort.
Ibid. C'esl-a-dire qu'il esl verili'.bicment homme, ainsi qu'il I'a assure.
^ Scion le grec: et c'esl FEsprit-Sainl repandn sur les liommes qui en rend
lenioignage; parce que I'Espril-Saint est la verite.
y 7. Ce lexte se trouve mot a mot dans la cclebre confession de foi de
loute I'eglise d'Afrique au roi Huneric. Dcsle Iroisieme siecle, saint Cyprien
I'avoil cit6 dans deux de ses ecrits. ■ — Voyez la Dissertation sur ce texte a la
tele de cette epitre.
Ibid. A la divinit(5 de Jcsus-Christ. ^
Ibid. IN'ayant qu'une meme natuie et une meme essence,
y S. A rhumanile de Jesus-Chrlst.
Ibid. Qu'il rendit sur la croix.
Ibid. Qui sorlit de son cole.
Ibid. Qui coula de ses plaies.
Ibid. C'est-a-dire, ainsi que le grec rexprime: et ces (rois temoins sont
your altesternne meme chose, savoir, que Jesus-Christ esl vraimentliomme,
Comme nous ne pouvons douter qu'il ne soil vraimcnt Dieu.
CHAPITRE V. 5^ I
<). Si testimonium ho- 9. SinGus^ecevonslelt:moignage
Ininum accipimus, testi- tics hommes, celui de Dieu est plus
uionium Dei majus est : grand; or., c'est Dieu memc qjii a
rendu ee grand temoignage eii fa-
veur de son Fils.'
10. Celui qui croil au Fils de •'oon. in. 36,
Dieu, a dans lui-meme le temoigna-
ge de Dieu ;' celui qui n'y croit pas
fail Dieu menteur,' parce qu'il ne
croit pas au temoignage que Dieu a
rendu de son Fils.
quoniaui hoc est testimo-
nium Dei, quod majus est,
quoniam testificatus estde
Filio suo.
10. Qui credit in Fi-
lium Dei , habet testimo-
nium Dei in se : qui non
credit Filio , mendacem
facit eum : quia non cre-
dit in testimonium quod
testificatus est Deus de Fi-
lio sue.
1 1. Et hoc est testimo- 1 1. Etcetemoignage est que Dieu
niuni , qnowiam vitam ae- nous a donne la vie cternelle, etquc
teriiauj dedit nobis Deus: c'est dans son Fils, ' que se trouve
et hasc vita in Filio ejus cette vie.
est.
1 2. Qui habet Filium , 1 2. Celui qui a le Fils ', a la vie ;
habet vitam: qui non ha- et celui qui n'a point le Fils ' n'a
bet Filium , vitam non point la vie.
habet.
i5. Haec scribo vobis ,
ut sciatis quoniam vitam
habetis aeternam, qui cre-
ditis in nomine Filii Dei.
14. Et haec est fiducia,
quam habemus ad eum :
quia quodcumque petieri-
raus secundum volunta-
tem ejus, audit nos.
1 5. Je vous ecris ces choses afin
que vous sachiez que vous avez la
vie eternelle, vous qui croyez an
nom do Fils de Dieu.'
14. Et ce qui nous donoe de la
conlianre en Dieu,' c'est qu'il nou«;
exauce' dans tout ce que nous lui
demandons, qui est conforme a sa
volonte.
y 9. De J«^us-Christ , et qui a dtvlare si positirement qu'il cloit son fils
par la voix quMI fit entendre sur Ie« bords du Jourdain et sur le Thabor. —
Gr. autr. et ce lemoignage de Dieu est celui qu'il a rendu de son Fils. C'esl-
a-dire, qu'on n'y troure pas, quod majus est, qui au fond ne fait que re-
peler ce qui vient d'etre dit.
y 10. Le mot Dc/n'est pas dans le grec.
Ibid. Gr. celui qui ne croit pas a Dieu, le fail menteur.
T tr. Jesus-Christ notre Seigneur.
■f 12. Par sa foi en Jesus-Christ.
Ibid. Le Fils de Dieu. — Qui ne croit point en lui.
y i3. Par I'espefance que Totre foi vous donne de Tobtenir un jour par sa
grace et par ses merites.
r 14. Ce qui nous fait esperer de receroir de lui cette vie glorieuse.
Ibid. Litt. qu'il nous ecoute.
a3. 56
i62
1" EPITRE DE SAINT JiiAJN.
i5. Et nous Savons qu'il nous
exauce dans tout ce que nous lui
demandoils, parce que nous avons
deja recu I'effet des dcmandes que
nous lui avons faites. '
16. Si quelqu'un voit son I'rerc
commettre un peche qui ne va pas
a la naort, qu'il prie; et Dieu don-
nera " la vie a ce pecheur, si son
peche ne va point a la mort, Mais
il y a un peche qui va u la mort "
et ce n'est pas pource peche-la que
je vous dis que vous priiez.
17. Toule iniquite ' est peche;
mais il est un peche qui va a la mort."
18. Nous savons que quiconque
est ne de Dieu, ne peche point : "
inais la naissance qu'il a recue de
Dieu ' le conserve pur, et le malin
Esprit ne le touche point. '
19. Nous savons que nous som-
mes nes de Dieu , et que tout le
monde est sous I'einpire du malin.'
20. Et nous savons encore que le
i5. Et scimus quia au-
dit nos quidquid pelieri-
mus: scimus quoniam ha-
bemuspetitiones quaspo-
stulamus ab eo.
16. Qui scit fratrera
suum peccare peccatum
non ad mortem, petat, et
dabitur ei vita peccanti
non ad mortem. Est pec-
catum ad mortem : non
pro illo dico utroget quis.
1 7.0mnis iniquilas pec-
catum est: et est pecca-
tum ad mortem.
18. Scimus quia omnis
qui natus est ex Deo, non
peccat : sed gcneratio Dei
conservat eum, et malig-
nus non tangit eum.
19. Scimus quoniam ex
Deosumus: etmundusto-
tus in inaligno positus est.
20. Et scimus quoniam
4 1 5. Autremcnl et seloa le grec: Etcomme nous savons qu'il nous ecoute
dans tout ce que nous lui demandons, nous savons aussi que nous recevrons
I'effet des demandes que nous lui avons faites.
■f 16. C'est le sens du grec, qui porle a la lettre: il donnera.
Ibid. Un peche qui est du nombre de ces peches contre le Saint-Esprit ,
qui conduisent a I'impenitence finale.
Ibid. C'est-a-dire je ne dois pas vous donner la conliance d'oblenir la gue-
rison de celui qui le coramet.
y 1 7 . Tout violement de la loi de Dieu.
Ibid. Elant un pech^ de pure malice , ou I'effet d'une passion qu'on alme
et qu'on serolt faclie de quitter. — Selon le grec : 11 est vrai que toute ini-
quile et tout violement de la loi de Dieu, est un peche ; mais il y a un peche
qui neva point a la mort, qui ne conduit pas de lui-meme a l impenitence.
Selon plusieurs graves commenlaleurs, I'Apotre distingue ici entre le peche
morlel el le pech^ veniel.
■5^ 18. Ne tombe pas aiseraent dans le peche.
Ibid. Dans le bapleme ; et I'Esprit de I'adoption divine, qui lui a etc
communique par ce sacrement.
Ibid. Gr. inais celui qui est ne de Dieu S8 conserve pur par V esprit de
Vadopdon divine qui lui a e'te communique , et le maliu e.ipT'it ne le touche
point.
■5^ 19. C'esl-a-ilire du demon.
CHAPITBE V.
563
Filius Dei venit , et dedit
nobis sensum iit cognos-
canius venun Deum , et
simus in vero Fiiio ejus.
Hie est rerus Deus, et vi-
ta acterna.
2 1 . Filioli, custodite vos
a simulacris. Amen.
Fils de Dieu est venu,' et qu'il nous Luc,xxi\,\5.
a donne I'intelligence ,' afin que
nous connoissions Ic vrai Dieu, et
que nous soyons en son vrai Fils. '
C'est lui qui est Je vrai Dieu et la
vie eternelle.
21. Mes petits enfans, ' gardez-
vous du culte des idoles. Amen.'
-/ ao.fn est vena dans le monde parson incarnation.
■f ao. Par la foi qu'il nous a inspiree.
Ibid. En Jesus-Christ notre Seigneur, comme ^tant ses freres et ses cohe-
rltiers. — Selon le grec: et nous sommes eu ce vrai Dieu , e'tant en Jesus-
Christ son Fils ; car il est lui-meme comme son Pen , le vrai Dien, etc.
y 2 r . Demeurez forlement attaches a ces v^ril^s.
Ibid. Plusieurs exemplaires grecs ne lisent point Amen.
Lcs exemplaires gre»'s portent ici : La premiere epitre catholique de Jean a
et^ ecrite en 278 versets.
PREFACE
SUR LA DEUXIEME EPITRE
DE SAIINT JEAN.
cien.
Ouelestrau- Cette secondc epitre et la suivante ont souvent ele
teur de ceiie contestees u saint Jeanl'apotre^ On Jes a donnecs a un
rpitre et de la autre Jean, surnommerAncien,dontparle Papias, Eiisebe
suivante. Re- g^ saint Jerome, et dont on montroille tombeau a Ephese.
filiation de ^ ,. . • . . , , , ,• . , , /
1 opinion de ^^^ disputes qui ont partake les eguses jusqu apres le qua-
cenx qui les trieme siecle, ont ete renouvelees de nos jours par quel-
coniestenta ques nouvcaux critiques^, qui se sont inscrits en laux
saint Jean, el ^,Qj^j(^j,g ^^^ epitres , pretendant qu'elles n'etoient point
qui les attn- ,, i • ^ t i' ' 'i- I i-. • • i
I'uentaunau- ^ ouvrage de saint Jean 1 evangeliste. Lt voici les prenves
tie Jean sur- dont ils se servent pour appuyer leur opinion, i" L'auteur
nomme I'An- de cette epitre ne prend pas ie noni d'apotre, mais celui
depretre , ou de vieillard. 2" Ces deux dernieres epitres fu-
rent long-temps rejetees par les eglises, et ne furent tra-
duites en leur langue qu'assez tard. 3 'II n est nullement
croyable qu'un chretien ait eu I'insolence de s'opposer a
un apotre, comme ici dans la troisieme epitre , f (). Dio-
trephes ne veut point rccevoir celui qui est au teur de cette
lettre.
Mais on repond que les apotres ne mettent pas toujours
leur nom ni leur qualite d'apotre a la tete de leurslettres.
Saint Paul n'a mis ni I'un ni I'autre a la tete de I'epitre
aux Hebreux ; ni saint Jean a la tete de sa premiere epitre,
que jusqu'icipersonne iielui a contestee, Etquinousempe-
cbede dire ici ce que Grotius a dit en pariant de cette pre-
* Origen. apud Eiiseb. lib. vi. cap. 26. Hist, eccles. iumrr.i xaralsAci-
Tcev y.at EnusToXry.... E'^'w rTi y.xl ^euTspav, x.al TfiTr.v, etteI cj iravTj; oy.ai frr,-
(Tic'j; Eivai. Eiiseb. lib. iii. cap. 24. AvTiXs'i'wvTai Si aj. XcTral Siio. Hiei-onym.
de Fin's Illnstfib. c. o. Reliquce dure epislolce JoannispresbyLeri asseriin-
tur, cujiis et hodie aUerum sepiilchrum apud Ephesum osienditur. fide
Papiam apud eumd. cap. 18. Nazianz. car. i5i. Triv 7' iwavvou piav. Tive;
Si TKSTpel;. — 2 Grot. Ita ceiiset Erasmus. Dubiiat Cajetan.
PREFACE SUU LA U* EPITRE DE SAI.>(1 JEAN. oG3
miere epiire, quece qui a oblige saint Jean an'y pas melire
son nom , a ete la pcur qu'elle nc tombat enire Ics mains
lies inficleles , et qu'on ne I'interpretat dans un mauvais
sens'? 11 faut convenir que ces deux deruicres epiiresfu-
renl assez long-temps sans elre recues universellement
dans Ic canon des Ecritures ; mais on ne peut pas dire
qu'elles aient jamais etc absolunient rejetees. Nous mon-
trerons ci-apres que depuis le premier siecle jusqu'aux
quatrieme et cinquieme , auxquels elles ont ele reconnues
unanimement pour cauoniques, elles ont souvent ete ci-
tees par piusieursperes comme Ecrilure sacree.
On avance sans preuve qu'elles n'ont ete traduiles dans
les autres langues qu'assez lard. Nous les voyons dans tous
les recueils des Latins , des Syriens et des autres Orien-
laux ; et on ne peut nous montrer aucun temps auquel elles
aient ete rejetees par ces peuples. Le doute de quelques
eglises, et la circonspection de quelques peres ne sont
point une preuve centre leur aulhenticite. L'insolence de
Diotrephes, etlemepris qu'il faisoit del'apotre saint Jean,
sont de foibles preuvescontre I'aulorile de cetapotre. De
quoi n'est pas capable unambitieux, un superbe ? Saint
Paul meme n'a-t-il pas ete expose an mepris^? Les disci-
ples de Simon et de Cerinthe, et les autres precurseurs de
I'Anlechrist, centre lesquels saint Pierre, saint Paul,
saint Jacques et saint Jean s'elevent avec tant de force ,
portoient le noni de chretiens, et n'avoient toutefois au-
cun respect ni pour la personne ni pour la doctrine des
apotres.
Ce Jean I'Ancien que Papias^ reconnoit pour son mai-
tre , et que Ton a pretendu etre I'auteur de ces deux der-
nieres epitres , n'est pas bien connu; et saint Jerome"*,
qui dit que Ton monlroit son tombeau a Ephese avec ce-
lui de saint Jean I'evangeliste , dit aussi que plusieurs
croyoientque ce second tombeau etoit un autre monument
du meme saint Jean I'Evangeliste. Ceux qui out conjecture
que I'auteur de ces deux pieces pouvoit elre Jean-Marc^ ,
connu dans les Actes des apotres*^, n'apportent aucuue
bonne preuve de leur opinion. Ainsi, puisque le style , les
' Voycz Leclerc, note sur cet endroit. — -2. Cor. x. 10. — ' ^puJ.
Eased, lib. 111. cap. 3r). Hist, eceles. — * Hieivii/ni. de Firis Illustrib.
c. 9. NonnuUi putaiU dttas memorias ejusdem Joaiinis ei'imgelisUe esse. —
' Dodvel, Dissert, i. in Ircn. — * Act. xii. 2 5.
566 PREFACE
scnliniens , les raisonnemens , et toutes les autres cir-
conslances, et, par-dessus tout, la possession de tant do
siccles, nous determinent a I'attribuer a saint Jean I'e-
vangeliste , et que les raisons qu'on apporte pour les lui
ravir sont si peu solides , nous ne croyons pas pouvoir
toucher aux bornes que nos ancetres ont posees, et nous
rangeons ces deux lettres au nombre des veritables ecrits
de cet apotre.
Canoniciic Sur ce principe , nous sommes aussi obliges de les re-
dcceiteepitre connoitre pour canoniques, et nous avons pour garansles
prouyeepar e ^Qj^gjigg g^ jgg peres , qui les ont citees corame ouvraeres
tcinoignage . ./i«-.-w-'t i'* • t
des peres et inspu'cs du Saint-Espnt. La seconde epitre de samt Jean
desconciles. est citee comme de cet apotre par un eveque du grand
concile de Carthage sous saint Cyprien*. Saint Cyrille
de Jerusalem la met dans son catalogue des livres canoni-
ques^, aussi bien que saint Gregoire de Nazianze^, le ca-
non Go du concile de Laodicee , le troisieme concile de
Cartage del'an 897, canon 47, et saint Clement d' Alexan-
dria dans ses Hypotyposes'*. Saint Jerome , qui ne lui pa-
roit pas favorable dans son livre des Hommes illustres, la
cite en d'autres endroits avec eloge : La trompelte du Jils
du tonnerre , que le Seigneur aima particulierement , et qui
puisa dans le sein du Sauveur les fleuves de la doctrine , sefait
entendre avec eclat , en disant : Lepretre a la dame Eiecle, et a
ses Jils que j'aime en verite , etc. ^. Saint Irenee ^ la cite aussi
sous le nom de Jean disciple de Jesus-Christ; Alexandre
eveque d'Alexandrie'', et saint Athanase , sous le nom du
bienheurcux Jean. Le meme saint Athanase , dans son epi-
tre pascale, et dans sa Synopse, la reconnott aussi pour
canonique. Enfin Rufin^, saint Augustin^, le pape Inno-
cent I" ^''j et ceux qui sont venus depuis , ne font nulle dif-
ficulte sur cela.
A qui cciie Rcste a examiner qui etoit cette Electe , a qui saint Jean
ipitre est a- adressa cette seconde epitre. Le sentiment commun est
drcsscc. quelle etoit une personne de qualite, demeurant aux envi-
rons d'Ephese, a qui saint Jean ecrivoit, et a sa famille,
pour les precautionner contre les heretiques qui atta-
quoient la divinite du Fils de Dieu , et qui nioient la verite
^ Jpud Cyprian, pag. 4o3. — * Cyn'll. Catech. 4- — ' Gregor. Na-
zianz. car. 24. — * Jpud Euseb. lib. vi. cap. 14. — * Hieronym. ep. S5.
— ^ Irenee , lilf . I . cap. 12. i3. lib. ni. cap. i8. — ' Alex, apud Socrat.
lib. I. c. 1 6. — " Ruf. Expos. Symb. iipud Cypr.pag. 553. — • ^ August,
de Doct. Chi-ist. lib. \t,cap. 8. — '<> Innocent, i epist. 3. cap. 7.
SUR LA 11" EPITRE DE SAINT JE\N. 567
de SOU incarnation. Mais ce sentiment souffre de grandes
difficultes. Saint Athanase* croitquolenonide celle dame
est Kyria , ou Domiiia , ct que Electa est ime epithele ou
un litre d'lionneur que saint Jean lui donne : v/ Kyn'a ,
choisie dcDieu. D'autres^ soutiennentque ie nom de la per-
sonne a qui saint Jean ecrit n'est pas exprime dans cette
ep tre, et que Electa et Kyria sontdes noms d'honneur et
de civilite; saint Jean ayant juge a propos , pour des rai-
sons particulieres , de n'y mettre ni son nom ni celui de
cette dame. Le porteurdela leltre, Ie caractere dont elle
etoitecrile, etle style, la faisoient assez connoitre. II en
use a peu pres de meme dans lepilre suivante, ou ii ne se
designe que souslc nom d'Ancien ; et celui auquel il ecrit ,
que sous celui de Gai'us , ou Cuius, qui etoit un prenom ,
ct non pas un nom propre.
Quelques aulres ^ ont pretendu que cette epitre etoit
ecrite , non a une personne , raais a une eglise entiere. J I
la uomme Electa et Kyria , Elue et Dame , par un langage
figure et euigmatique. 11 lui donne des enfans; il lui parle
ensuile en pluriel, en la considerant comme ne faisant
qu'un avec ses enfans. II la salue a la fin de la lettre de la
part iX Electe sa sanr, et de ses Jils; c'est-a-dire , discnt ces
auteurs, de la part de I'eglise d'Epliese, et des fideles qui
la composoient. Dans la premiere epitre de saint Pierre, a
la fin du chapilre v, on lit Ie salutxie I'eglise de Babyloue
sous le nom de Ecclesia qacB est in Babylone coekcta: I'Eglise
choisie qui est a Babyloue , c'est-a-dire a Rome, Les Chre-
tiens sont souvent appeles elus dans lesecrits des apotres*.
Si la dame Elue signifie une eglise , et si sa saur Elue avec
ses enfans signifie une autre eglise , c'est certainement un
langage assez extraordinaire. Mais il y a des temps et des
circonstancesquiobligent d'employer des termes figures ,
pour cacher ce que Ton ne yeut pas que tout le monde
sache. Saint Pierre dans son epilre^, et saint Jean dans
rApocalypse**, appellent Pionie ^a/^y/oH^r •• saint Paul ap-
appelle iSeron le Lion' . Les prophetes sont pleins de pa-
reilles manieres de parler. On ne doit done pas mepriser
le sentiment qui croitqu'il s'agit icinon d'une dame, mais
* Allianas. in Synopsi. — ' Bartliol. Petr. El Leclerc. — ' Quidam.
npiid OEcumen. hie. Mauduil, Dissert. 23. Qornel. a Lapide Serar. ad
V 1 3. Bukeniop. Luxde Luce, lib. i. p. 124. jdmmond. — * Coloss. in. 12.
/I'.iw. xTi. i3. I. Petri, i. i. — * 1. Petri s. i3. — * Jpoc. \.y\\. 5. xviit.
■i. 10. 2 I . — " 2 . Timot. IV. 17.
•VeS PREFACE SUR LA II' KpItRE DE SAINT JEAN.
(I'unc eglise. La foi n'est nullement interessee dans celle-
question. Saint Clement d'Alexandrie , dans soncommen-
taire sur celte epilrc, traduit en latin par les soins de Cas-
siodore, dit que jE'/^f^^etoit une danic de Babylone a qui
saint Jean ecrivoit.
Quel est le On ignore le temps precis auquelcettelettre a eteecrite.
temps et le Qj, p^^^^ j^ mettre vers le merae temps que la precedente.
^pitre a ete ^^'^^ attaque les memes personnes et les memes erreurs ;
ecriie. c'cst-a-dire celles de Simon , de Cerinthe , et des gnosti-
ques. Ily aquelque apparence qu'elleaete ecriie d'Ephese,
lorsque rAp6tre gouvernoit cette eglise et toutes les au-
tres de I'Asie. 11 proniet a Electe d'aller la voir incessara-
ment.
Analyse de Cette epilre dans sa brievete pent se diviser en deux
ceue^pitre. parties. La premiere est une congratulation a celle qu'il
nomme Electe ; il la felicite de la foi et de la vertu qu'il
avoit trouvees dans quelques-uns de ses enfans. II les ex-
horte eux et leur mere a se confirmer de plus en plus dans
la charite , comme etant le commandement essentiel et
fondamental du christianisme , et dont la marque indubi-
table est I'observation desautres commandemens'. La se-
conde partie les previent contreles heretiques basilidiens,
qui n'attribuoient a Jesus-Christ qu'une chair apparente
et fantastique : il leur ordonne de les eviter, et il leur pres-
crit de quelle maniere ils doivent se conduire avec ces se-
ducteurs^.
* i i.-(j. — - -^ 7. acljtnem.
DEUXIEME EPITRE
DE SAINT JEAN.
CHAPITRE UNIQUE.
Saint Jean exhorte Electe et ses fils a Jemcurer fermes dans la cbarile et dans
la foi , d ^yiler Ics heretiques , et a n'avoir poinl de commerce avec eux
i. Senior Electae do-
ininae, et natis ejus, quos
ego diligo in vcritate, et
non ego solus, sed et om-
nes qui cognoverunt veri-
tatem,
2. Propter veritatem
quae permanel in nobis,
et nobiscuin erit in leter-
num.
3. Sit vobiscum gratia,
misericordia, pax a Deo
Patre, et a Christo Jesu
Filio Patris, in veritate et
charitate.
4. Gavisus sura valde,
quoniam inveni de fiiiis
tuis ambulantes in verita-
te, sicut mandatuui acce-
piinus a Patre.
5. Et nunc rogo te ,
dornina, non tainquain
mandatum novum scri-
bens tibi, sed quod ha-
i. Le pretre,' a la dame Electe,'
et a ses enfans, que j'aime dans lit
verite, et qui ne sont pas ainies de
moi seul , mais que tous ceux qui
conooissent la verite aiment comme
moi ,
2. Pour I'amour de celle verite
qui demeure en nous, et qui sera
en nous eternelleuient.
3. Que Dieu le Pere, et Jesus-
Christ,' Fils du Pere, vous donnent
la grace, la misericorde et la paix ,
dans la verite et dans la charitc.
4. J'ai eu bien de la joie de voir
quelques-uns de vos enfans mar-
cher dans la verite,' selon le com-
mandement que nous en avons
recu du Pere.
5. Et je vous prie maintenant,
madame , non comme vous ecri-
vant un commandement nouveau,
mais celui-la meme que nous avons
y I. C'est le sens du grec. i irpeoCurepo^, que la Vulgate Iraduit litlerak-
ment.
Ibid. Voyez la preface.
y 3. Grec : Je Seigneur Jesus-Christ.
y 4. Daus la purele de I'fivangile.
Ibid. Autr. de ce qu'ayant tu quelques-uns de vos entans, j'ai Irouve qu'il»
inarchent, elc.
11" EPITRE DE SAINT JEAN.
recu (16s le commencement, que
nous ayons une charite mutuclle
les uns pour les autres.
6. Or, la charilc consiste a mar-
cher selon les commandemens de
Dieu. 'C'est la le conimandement
que vous avez recu d'abord, afin
que vous I'observiez.
buimus ah Initio, ut dili-
gamusalterutrum.
6. Et hacc est charitas,
ut ambulemus secundum
mandala ejus. Hoc est
enjm mandatuin, utquem-
admodum audislis ab ini-
tio, in eo ambnletis :
7. Quoniam uiulli sc-
ductores exierunt in mun-
7. Car il s'est eleve dansle monde
plusieurs hiiposteurs qui ne conl'es-
sent point que Jesus -Christ est diim, qui non confitentur
venu dans une chair' veritable. Ce- Jesum Christum venisse
lui qui ne le confesse point est un in carnem : hie est seduc-
seducteur et un Antechrist. tor, et Antichristus.
8. Prenez garde a vous , afin que 8. Videte vosmetipsos,
vous ne perdiez pas les bonnes oeu-
vres que vous avez laites; mais que
vous en receviez unepleine recom-
pense.'
9. Quiconque ne demeure point
dans la doctrine de Jesus-Christ ,
mais s'en eloigne,' no possede point trina Christi , Ueum non
Dieu; et quiconque demeure dans habet : qui permanet in
sa doctrine , ' possede le Pere et le doctrina, hie et Patrem
Fils.
10. Siquelqu'unvient vers vous,
ne fait pas profession de cette doc-
trine, ne le recevez pas dans votre
maison, et ne le saluez point.
ne perdatis quae operati
esiis : sed ut mercedem
plenam accipiatis.
g. Omnis qui recedit,
et non permanet in doc-
u. Car celui qui le salue parti-
cipe a ses mauvaises actions. '
}2. Quoique j'eusse plusieurs
et Filium habet.
10. Si quis venit ad vos,
el banc doctrinam non
affert, nolite recipere cum
in domum , nee Ave ei
dixeritis.
11. Qui enim dicit illi
Ave , communicat operi-
bus ejus malignis.
12. Plura habens vobis
autres choses a vous ecrire, je n'ai scribere, nolui per char-
i^ 6. Non-seulement a aimer le prochain , mais aussi a faire les choses qu'il
nous ordonne , et a croire toules les \eritcs qu'il nous enseigne.
i- 7. On lit ici dans la Vulgate i/i carnem pour in came , conime on le lit
dans la prt'cedente epilre, iv. 2. etdans le grec ici ev crapxi.
■j- 8 . Rtcompense qui ne sera accordce qu'a ceux qui auront conserve la pu-
rele de la I'oi. ,
^ 9. Gr. aulr. mais sort des bornes de la verile.
Ibid. Grec : dans la doctrine do Je'sus-ChnsU — Croyant tout cc qu'elle
enseigne, et faisant tout ce qu'elle ordonne.
■)f ir. II paroit, par cette -ivilite qu'il lui rend, n'avoi'" pas assezd'horreur
de ses desordrcs.
tarn et atramentura : spe-
roenim me futurumapud
vos, et 03 ad os loqui : ut
^audium Testrum plenum
i5. Salulant te filii so-
roris tua; Electae.
CH4P1TRK UNIQUE. 671
pas voulu Ic falre sur du papier, et
avec de I'encre,' esperant aller vous
voir, et vous entretenir de vive
voix, afin que votre joie soil com-
pile.
i3. Les enfans de votre soeur
Electe ' vous saluent.
^ I a . Voyez la Dissertation sur la madere et la forme des ln>res anciens,
torn. XI.
■^ \S. Voyez la preface.
Les exemplaires grecs portent icl : la seconde ^pilre de Jean a et^ ecrite
cri 3o versels.
PREFACE
SUR LA TROISIEME EPITRE
DE SAINT JEAN.
Canonicite A la tete de la seconde epitre de saint Jean , nous avons
de ceiie epi- paj-je Jg I'aulhenticile ct de la canonicite de cclle-ci. Nous
tre. Uuel en , , . , , ,
estl'auteur. ^ avons remarquc que quelques anciens avoient doute
qu'elle fut de saint Jean I'apotre , et I'avoient attribuec a
un autre Jean surnomme i'Ancien , dont Papias parle
comme de son maitre. Mais , et les caracteres de veritc
qui se remarquent dans celle-ci, et le style , et les aulres
circonstances , et enfin I'autorite unanime des eglises de-
puis le quatrieme siecle , ne permcttent pas de douter
qu'elle ne soit I'ouvrage de I'apotre saint Jean, et qu'elle
ne soit Ecriture sacree et canonique.
A qui cette Caius , a qui cette epitre est adressee , est apparemment
epitre est a- pjjj^ jgg deux disciples de saint Paul qui portoient ce nom.
dressee. hn j ir t • ^ ^^ • a t • - n t
quel lieu el en ^^^ P'"^ lameux est celui de Cornithe , chez qui samt Paul
quel temps logeoit etant dans cette ville , et auquel il donne cet eloge
elle a ei^ e- ecrivant aux Romains ^ , qu'il est non-seulement son hole ,
^"^®" mais encore celui de toute V Eglise. II avoit ete converti
et baptise par saint Paul ^. Bede ^ , I'Ambrosiaster ^ ,
Adon , et apres eux Lightfoot ^ et la plupart des commen-
tateurs , croient que c'est a lui que saint Jean a ecrit cette
iroisieme epitre. D'autres ^ veulent avec plus de vrai-
semblance que ce soit Caius de Derbe , connu dans les
Actes ''. II parolt certain que Caius , dont il s'agit ici ,
vivoit en Asie plutot qu'a Corinthe. Saint Luc parle aussi
d'un jCaius , Macedonien * , disciple de saint Paul , qui
etoit venu'avec lui a Ephese, et qui y fut en danger dans
' lioni. XVI. 2 3. Caius hospes meus et iinwersa Ecclesia. Grcec. Fctio?
0 ^jvo? [jLou , xai rJii; E)4)cXY)ff(a; oXy);. — * i . Cor. i. 1 4- — ^ Beda in 3. Joan,
pag. 754. — * Ainbrosiasier. ad Rom. xvi. — ® Lightfoot. Chronogr. pag.
iSi. Hugo, Ghssa, Liran. Men. Tit. — ^ Tiliemont, torn. t. Saint Paul ,
.irl, a3. el not. 29. — ' Act. xx. 4. — '^ Act. xix. 29.
PREFACE DE LA III*' EPITRE DE SAINT JEAN. ^iS
la sedition de Deraelrius. Grolius * veut que ce dernier
Caius soil Ic m^me que celui de Derbe : il eloit , dit-ii , ori-
^inaire de Derbe en Lycaonie , et ne aTiiessalonique. Mais
il faut avouer que nous n'avons rien de certain sur cela.
Cc que nous savons certainement de Cains , dont il est
parleici. est qu'il eloit fort cheri de saint Jean ^ et qu'il
exercoit I'hospitalite avec beaucoup de zele et de genero-
site , nialgre les dureles et les mauvaises manieres de Dio-
trcphes , qui paroit avoir ele eveque du lieu ou demeuroit
Caius , el qui ne vouloit pas qn'on cxercat I'liospitalite en-
vers les freres qui cloient couvertis du judaisme. ■Non-seu-
lement il ne les recevoit point, mais il ne vouloit pas que
les autres les rccussenl; et il excorainunioit ceux qui les
rccevoient. Tous les freres, et saint Jean nieme, rcndoient
uii teuioignage avanlagcux a la picte et a la vertu de Caius.
Saint Jean lui ])roinct d'aller le voir bienlot, et de repri-
mcr I'ori^ucil de Diolrephes. Grolius croit que Cains eloit
habitant de Tune des sept eglises dont il est .parle dans
I'Apocalypse^. Ligblfoot veut qu'il aitdemeyre a Corinthe.
]Mais nous supposons que saint Jean ecrivit cette epitrc a
Ephese , et qu'il I'envoya dans quelque ville voisine. Pour
iaune^: en laciueilc elle a ete ecrite , il est inutile de la re-
chercher, puisqu'on n'a aucune voie pour la connoitre avec
certitude. Baronius, et plusieurs ecrivains apres lui, niet-
tent les trois epitres de saint Jean vers la quatre-vingt-dix-
septienie annee dc saint Jean ; mais d'aulres les placent
avanl son evangile et son Apocalvpse.
II y a beoMcoup d'apparence que cette letire fut portee OLjet cecei-
par des Juifs converlis, qui voyageoient pour precher I'E- te epltre. Con-
vangile , et qui se faisoient une religion de ne point enlrer '^*'"' ^^^ "P^
chez. lescrenliis, el dene rien recevoir d'eux. On peul con- \''^^'^'''"* "^"^
siderer celle epitre comme une letire de recommandation
en faveur de ces bommes aposioliques. Voycz les ver-
sels 6,6,7,8,9, 10. II paroit par celte cpitre que les
^entils converlis n'eloient pas tonjours d'accord avec les
Chretiens hebraisans , et qu'il i'allut beaucoup travailler
pour lever rantipathie mutuelle qui eloit cntre les deux
peuples , meme apres leur conversion. On remarqne dans
les epitres de sainl Paul les niemes semences de division
cntre les juifs et les gentils converlis, el ce fut un des
premiers soins de TA-potre, de reprimer d'uue part dans
' Grot, in ^cta. -~- - Jjtnc. t. .'j. el sefjq.
574 PREFACE SUR LA HI* EPITRE DE SAINT JEAN.
les Juifs Ics sentimens de vanite et de suffisance qui fai-
soienl qu'ils se preferoient beaucoup aux gentils; ct dans
les gentils une autre sorfce d'orgueil, qui leur faisoit me-
priser les Juils. On pcut voir toute I'epitre aux Remains.
Ailleurs il modere la hardiesse des gentils convertis , et les
empeche de donner du scandale aux Juifs , en se prevalant
imprudemment de la liberie ou les met I'Evangile d'user
indifferemment de toute sorte de nourrlture. Voyez les
epttres aux Corinthiens. Enfin , partout il tient tete aux
Hebreux convertis , qui vouloient imposer aux gentils le
joug de la loi. Voyez principalement I'epitre aux Galates ,
et celle aux Philippiens. Tout cela marque le concert ad-
mirable des apotres entre eux sur les points de foi et de dis-
cipline.
Analyse do Qn peut dislinguer dans cette leltre deux parties. Dans
celle epiire. ^^ premiere , I'apotre congratule Caius sur ses bonnes oeu-
vres , et lui recommande quelques predicateurs de I'Evan-
gile qui devoient lui rendre cette lettre en passant par le
lieu de sa depieure ^ Dans la seconde, il se plaint de
Diotrephes , qui affectoit I'independance , et il propose a
Caius I'exemple de Demetrius , fidele disciple de Jesus-
Christ ^
* 3 I.- 8. — " >^ 9. adjincm.
TROISIEME EPITRE
DE SAINT JEAN.
CHAPITRE UNIQUE.
Affection de saint Jean pour Cams, dont il loue la piete. Diolrephes ne revolt
point saint Jean. T(5moignage de la vertu de Demetrius. Saint Jean espere
alier voir Calus.
1. Semor Gaio charis-
simo, qiiem ego diligo in
veritate.
2. Charissime , de om-
nibus oratlonetn facio
prospefe te ingredl , et
valere, sicut prospereagit
aniina tua.
5. Gavisus sum valde
venientibus fratribus, et
testimonium perhibenti-
bus Teritali tua3, sicut tu
in veritate ambulas.
4. Majoremhorum non
habeo gratiam , quam ut
audiam filios meos in ve-
ritate ambulare.
5. Charissime, fideliter
facis quidquid operaris in
fratres, et hoc in peregri-
nos,
6. Qui testimonium
1. Le pretre', a mon cherCaius,'
que j'aime dans la verite.
2. Mon bien-aime , je prie Dieu
que tout soit chez vous en aussi bon
etut, pour ce qui regarde vos affai-
res et votre sante, que je sais qu'il
y est pour ce qui regarde votre
ame.
5. Car je me suis fort rejoui,
lorsque les freres qui sont venus
ici, ont rendu temoignage a votre
piete sincere et a la vie que vous
menez selon la verite.
4. Je n'ai point, de plus grande
joie ' que d'apprendre que mes en-
fans' marchent dans !a verity.'
5. Mon bien-aime , vous faites
une bonne oeuvre d'avoir un soin
charitable pour les freres, et parti-
culierement pour les etrangers,
6. Qui ont rendu temoignage a
^ I. C'est le sens du grec: 0 wpEcrcuTepo;, que la Vulgate rend lilteralement.
Ibid. La Vulgate le norame Gains, conformement au grec; on le nomine
plus communement Cuius : c'est le radme nom diversement prononce. Voyea
la pr(^face.
y 4. C'est le sens du grec.
Il>id. Ceux que j'ai engendrus en Jesus-Cbrist.
Ibid. La sainteledel'fivangile.
Iir EI'lTRE DE SAfNT JEAN.
^76
votre charite, cu presence de I'E-
glise. Et voiis ferez hien de les
laire conduire et assister dans leurs
voyages' d'une manicre digno de
Dieu.'
7. Car c'est pour la gloire de sou
nom' qu'ils sont parlis sans rece-
voir aucune assistance des gentils."
8. Nous sommes done obliges de
trailer favorablenient ces sortes de
pcrsonnes, pour travailler avec elles
al'avancement de la verity."
g. J'aurois ecrit a I'Eglise'; mais
Diolrephes/ qui aime ay tenir le
premier rang, ne veut point nous
recevoir.
10. C'est pourquoi, si je viens
jamais chez vous, je lui represente-
rai le mal qu'ii commet, en seiuant
contre nous des medisances mali-
gnes; ct no se contentant point de
cela, non-sculcment il ne recoit
point les Ireres', mais il empeche
menie ceux qui voudroieot les re-
cevoir, et il leschasse de I'Eglise.
11. Mon bien-aime, n'imitez
point CO qui est mauvais, mais cc
qui est ben. Celui qui fait bien, est
de Dieu; mais celui qui fait mal,
ne connoit point Dieu.
12. Tout le m'onde rend un te-
xnoignageavantageuxa Demetrius,'
et la verite meme le lui rend. Nous
le lui rendons aussi nous-memes ,
reddiderunt charitati tuae
in conspectu Ecclcsia; :
quos, benefaciens, dedu-
ces digne Deo.
7. Pro nomine eniin
ejus profocli sunt, nihil
accipientes a genlibus.
8. Nos ergo debeinus
suscipere hujusmodi, ut
cooperatores simus veri-
tatis.
9^ Scripsisscm forsitan
Ecclesiae : sed is qui amat
primatum gerere in eis ,
Diotrephes , non rKci[)it
nos.
10. Propter hoc si ve-
nero , comnionebo ejus
opera, quajfacit, verbis
maliguis garriens in nos :
et quasi non ei isla suffi-
ci;mt : nequc ipse suscipit
fratres, ut eos qui susci-
piunt, prohibet, et de Ec-
clesia ejicit.
11. Charissime, noli
imitari malum, sed quod
bonum est. Qui benefa-
cit, ex Deo est : qui male-
facit, non viditDeum.
12. Demetrio testimo-
nium redditur ab omni-
bus, et ab ipsa veritate,
sed et nos testimonium.
^6. Mainlenant qu'ils vont repasser chez vous.
Ibid. Doiit ils sont les fideles ministres.
y 7. PourretablissementderEvangile.
Ibid. Des Genlils qu'ils ont convertis a la foi , voulant leur 6tcr tout lieu
de croire qu'ils leur eussent preche I'Evangile par interet.
■^ 8. Pour participer a leur grace et i leur merite. — Gr. lilt, afin que
nous soyons cooperateurs awec elles pour la vdrlle.
3>^ 9. A cello qui est daus votre ville, pour lui recommander ces etrangers.
Ibid. Voyez la preface.
y 10. Les fideles etrangers.
■^11. Ce Demetrius exer^ait I'hospitalit^ envers les fideles etrangers, ainsi
que les aulres vertus chretiennes.
CHAPITRE CrilQUE.
perhibcinus :et nostiquo-
iiiam tesllinoniuin nos-
trum Teriim est.
i3. Multa habui tihi
scribere : sed nolui per
atramentuiii et calaiimin
scribere tibi.
14. Spero autem pro-
tinus tc videre, et os ad
OS loquemur. Pax tibi.
Salulant te amici. Saliila
amicus nominatim.
et vous save/, que notre temoi-
gnage est veritable.
i3. J'aurois encore plusieurs
choses a vous dire, mais je ne veux
point le faire par ecrit ,'
i4' Parce que j'cspere vous voir
bieniot, etque nous'nous entretien-
drons I'un i'adtre de vive voix. La
paix soil avec vous. Saluez de ma
part nos amis chacun en particu-
iier. ' .
V 1 3. Litl. avec une plume et de I'encre.
T 14. Les etemplaires grecs portent ici : La troisieme epitre de Jeaii
de 3i versel*.
07
PREFACE
LRP3TRE DE SA.TNT JUDE.
Quelesirai- Jijde , aulrement Thaddee , ou F^ebbee, ct surnomme U
/nu're etda \^^^^ > seloii Origene^, saint Jean Chrysostomc ^, saint Je-
elleesladres- r6me ^, Ic pape Gelase *, et quelques autres , est aussi
seo. quelquefois nomme yr^r<? dii Seigneur ^, parce qu'il etoit
fils de Marie soeur de la sainle Viergc et frere t^p saint
Jacques-le-Mineur , apotre et eveque de Jerusalem*^. 11
fut marie et eut des cnfans, puisque Hegesippe '' parle de
deux martyrs scs petits-fils. L'epttre que nous avons sous
son nom , et qui est la derniere des epitres catholiques,
n'cst adressee a aucune eglise particulierc , niais en ge-
nera! a tous Ics fideles , qui sont aimcs du Perc et ap-
peles par le Fils notre Seigneur. II paroit par le verset
17, oil il cite la seconde epitre de saint Pierre, et par tout
ie corps de la lettre , ou il imite les expressions du merae
ap(kre, comnie deja connues a ceux a qui il parle, que
son dessein a ete d'ecrirc aux Juifs convertis, et repandus
dans les diverses provinces d'Orient. Toute la suite de
son discours s'y rapporte fort naturellement.
Analyse de i{ tle(.lare d'abord que depuis lonff-temps il avoit des-
son <le leur ecrire , mais qu 11 s y eloit ennn trouve en-
gage par la necessite dc combattre certains mauvais doc-
teurs, qui corrompoient la saine doctrine, jetoient le
trouble clans I'Eglise, etla scandalisoient par les deregle-
njehs de leurs moeurs. On croit ** qu'il avoit en vue prin-
^ Or! gen. in Mallh. torn. 35. p. lyf). — ^ Cluysost. torn. 5. oral. 32.
pag. 409. — '^ Ilieronym. in Galat. iv. et In Ilehid. cap. 7. — * fide Flo-
rent. MaHyrolog. pag. 170. — * Matlh. xiii. 55. — ^ Voyez Tillemont ,
torn. I. pag. 682. not. 2. sur saint Jude. — "^ Hegcsip. apiid Eiiseb. Hislor.
eccles. lib. 111. cap. 20. — ' Epiphan. Itanes. 26. OEciirnen. hie ad i i.
Athanas. in Syiiopsi, Aliivecenlioi'es pleriquc .
PREFACE sun t'EPilRE DE SAINT JLDL. 679
cipalemenl les simoniens , les nicolalles , et les autres
hereti(jues d'alors , qui sont connus dans I'hisioire sous le
nom lie gnostiques , et dont les opinions exlravagantes et
les desordres honteux et criminels nous sont decrits par
saint Epipbane , par saint Irenee , et par les autres aneiens
peres. Saint Jude en fait ici une peinture qui n'cst nuUe-
ment flatlee ; mais on nc pouvoit parler avec Irop dc force
centre des ennemis aussi dangereux que ceux-la. C'est
contre eux qu'il parle dans la premiere pariie de sa
lettre *. Dans la seconde pariie, il paroit avoir principa-
Icment en vue ceux qui doivent s'elever a la tin des
temps : et il exhorte les fideles qui vivront alors a de-
meurcr fermes dans la foi qu'ils ont recue, s'appliquant
a la priere, perseverant dans la charitc , et attendant la
misericorde de notre Seigneur Jesus-Christ , et la vie
elcrnelle cju'il leur a promise. Il les conjure de ne pas
negliger Ic salut de leurs freres qui pourroient s'etre
laisse seduire , et de tirer comme du milieu du feu ceux
qui auroient eu le malheur de suivre les egaremens de
ces heretiques^. Aiusi on peut dire de cette epitre ce que
nous avons dit de la seconde de saint Pierre , a laquelle
elle a beaucoup de rapport : saint Jude , en s'elevant
comme saint Pierre contre les premieres et dernieres
heresies , a etabli invinciblement la perpeluite de I'Eglise
calholiquo.
On ne sail pas dislinctement eu quel temps cette lettre En quel
a ete ecrite. On sail seulement qu'elle n'est que depuis la ',^™rs cetie
naissance de^i nicolaitcs et des gnostiques , sortis de I'e- ';P'^''^
cole de Simon , et que saint Jude y parle des apotres
comme de personnes deja raortes depuis quelque temps '.
II se sert des paroles de la seconde epitre de saint Pierre ,
el semble faire allusion a celles de la seconde de saint
Paul a Timothee * ; et par consequent elle ne peut avoir
ete ecrite qu'apres I'an 66 ou 67 de Jesus-Christ , qui
est le temps de la raort de saint Pierre et de saint Paul.
Ce fut done apparemment aprcs le regne de Neron ,
et peut-etre apres la mine de Jerusalem, que saint Jude
I'ecrivit.
Ceite epitre n'a pas toujours ete recue dans le canon . Canonkiie
des Ecritures par toutes les cglises. Plusieurs aneiens ont ^^ "^^^'^ *^P'"
tre. Ileionses
' V I. 16. — * -^ i^. adjinem. — ^yi;. — * Comi>arez Jitd.j iS.ay^
1. Timolh. in. i. et i. Pet. ui. 3.
.^8o I'liEl'ACE
.•tu\ objections do ule de SOU authenticite. Eusebe ', saint Jerome ^,
duceuxquisy j.,jj^(^ Amphiloque ^, temoignent que quelques-uns con-
resloient sa canonicite. Lusebe cut de plus * que peu
d'anclens I'avoient citee. Mais il remarque en meme
ten^ps qu'on la Itsoit publiquement dans plusicurs eglises.
Cc qui la fait rejeter par plusieurs, c'est i*^ que I'auteur
y cite un temoignage d'Henoch , qui paroit ^tre lire
d'un pi'etendu livre d'Henoch reconnu pour apocryphe;
2° qu'il y cite aussi, touchant le corps de Moisc, un fait
qui ne se trouve point dans I'Ecrilure de rA.ncien-Testa-
uient, et qu'on croit avoir etc tire d un aiUre livro apo-
cryphe, intitule : I'Assomplion de Mo'ise.
Mais on repond ^ a ccla que quand saint Jude auroit
effectivement cite ccs deux ouvragcs apocryphes , il a pu^
comme piophete , discerner dans ces ouvrages ce qui
etoit vrai de ce qui etoit faux, il y avoit dans ces ecrits
plusieurs verites que saint Jude pouvoit avoir apprises
d'ailleurs. Cc qui regarde le livre d'Henoch va lairc le
sujet d'une Dissertation particaliere ; et a I'egard de PAs-
somplion de Mo'ise , et du combat de saint Michel contre le
dejnon a ''occasion du corps de Moisc , nous en avons
parle dans une Dissertation placce a la tele du Deulero-
nonie, tome iv. Saint Jerome *" ne trouve pas plus d'in-
convenienC a dire que saint Jude ait cite un livre apo-
cryphe , qu'il y en a a dire que saint Paul a cite des poctes
profanes. Mais la difference est grande , en ce que saint
Paul cite les profanes comme profanes, et que saint Jude
cite Henoch comme etant prophete ".
Grotius s'est imagine que cette cpitre etoit I'ouvragc
de Judas , quinzieme eveque de Jerusalem , qui vivoit
sous Adrien , un peu avant que Barcochebas parut. 11
croit que ces mots qu'on lit a la tete dc I'epitre, Fratcr
aiitem Jacohi, y out ete ajoutes par les copistes, inte-
resses a la faire passer pour I'ouvrage d'un apotre. il dit
de plus que Judas , ou Jude , lie se qualifie point apotre ,
mais seulement5^rr«V<?«rfl?5 Jesus-Chrisl : ce qui est contre
I'usage dcs vrais apotres, qui ont grand soin de meltrc
leur qualite a la tele de leurs epitres pour leur concilier
* Etiseh. lib. III. cap. '^.i. Hist. EccL — - Hieivn. de (-^irls liluslr. c. l\-
— ^ Ampldloch. Caini. ad Scleiic. Nazianz. cairn. i7.5. — * Euseb. lib. ti.
crtp.i'^ — * f^i'de Jiigitsl. lib. xv. de Civ. cap. 23. el lib. xviii. cap. 38.
BarOiol. Petri, hie et alios. — " llieron. in Til. c. i . • — ' Jiidce f. t ',. Pro-
pJiela.'it, dchis scpliinits ah Ad-tm Henoch.
SIR l'ePITRE DE S\1M JLDE. 58 I
plus d'autorite. Enfin il ajoutc que si on I'dit crue Jc
saint Judc ap6tre, aucune eglise ne I'auroit rejetee, ci
que toutes se seroient empressees a la iraduirc en lour
languc des les commencemens ; ce qu'il ne paroit pas que
Ton ait fait '. Luther, les centuriateurs, les anabaptistes ,
et Kcmnitius, la rejettent aussi comme douteuse, sans en
donncr aucune bonne preuve; car celles qu'on vient dc
proposer sont Louies des plus foibles.
On n'a pas la nioindre preuve que ces mots, Fraler
nutcm Jacobi, aicnt ete ajoutes par les copistes; ils sc
trouvent dans les plus anciens exemplaircs , comme dans
tous les nouveaux. La suppression de la qualitc A'npolre
a !a tele de cette epilre ne fait ricn contre I'apostolat de
saint .Uide, q«ii est si connu d'ailleurs par I'Evangile.
Saint Paul ne se qualifie point apotre a la lele de I'epitre
aux Ephesiens, ni dans les deux aux Thessaloniciens, ni
dans cellc a Philemon , ni dims cellc aux Hebreux , ni saint
Jean dans aucune de ccs trois ephrcs, ni snint Jacques a
la tete de la sienne. Le doute de queiques eglises sur la
cnnonicile de Tcpitre de saint Jude ne doit pas faire plus
de tort a son auteur qu'uu doute pareil que Ton a forme
sur la seconde epilre de saint Pierre , sur les deux der-
nieres de saint Jean, et sur celle de saint Paul aux He-
breux , n'en fait aux apolres qui en sonl les vrais autcurs.
11 n'y a rien dans cette epitre qui ne convienne a la per-
sonne , au temps, et aux autres circonslances que nous
connoissons de la vie de I'apotre saint Jude. Les hereti-
ques qu'il y combat, les erreurs qu'il y attaque , etoient
en vigueur de son temps. II y cite , sans la nommer , la
seconde epitre de saint Pierre , et parle des apotres
comme etant raorts depuis quelque temps. Rien de tout
cela n'est contraire au temps on a vecu saint Judc; car
il y a lieu de croire qu'il a survecua la prise de Jerusalem.
\ucun des anciens qui ont cite cette epitre n'a lemoigne
de doute sur son auteur. lis I'attribuent unanimement a
saint Jude apotre. Personne avant Grotius n'a songe a la
donncr a Jude , quiuKieme evrque de Jerusalem , dont on
ne connoit proprement que le nom.
A I'egard du doute de queiques auteur o , on peut leur
' On I'a en syriaqui- , en aral>e et en elhiopien dan? la po'.yglotic d'Angle-
lerre : elle est en syriaquc et en arabe dans la polygloUedf Le Jay. et aillears.
\ oyc* Cornel, a Lajnde , preface sur celle epilre.
58a PHEFACE SLR e'eI'ItKE UE SAIN T JTjDE.
opposer Origene', qui fait I'elog^e de cette epitre, en
disant que saint Jude a ecril une lettre qui , dans le peu de
lignes qu'elle contient, renferme dos discours plcins de
la force et de la grace du ciel. Saint Epiphane ^ dit qu'il
croit que le Saint-Esprit a inspire a saint Jude le dessein
d'ecrire contre les gnosiiques dans I'epitre que nous avons
de lui. Saint Clement d'Alexandrie , dans son commen-
taire sur cette epitre , traduit par les soins de Cassiodore,
dit que ce saint apotre n'a pas voulu par modeslie se qua-
lifier frere du Seigneur , mais seulement serviteur de Jesus-
Christ , et frlre de Jacques. Le mcnie saint Clement d'A-
lexandrie dans ses Stromates , et dans son Pedagogue ^ ,
et Tertullien dans son livre des Parures des femmes * ,
la citent comme Ecriture canonique , et comme de saint
Jude.
Elle est inseree dans les anciens caialogues des Hvres
sacres , comme dans celui du concile de Laodicee ^ , dans
celui du troisieme concile ae Carthage ^ , dans I'epitre
pascale de saint Alhanase , et dans sa Synopse ; dans
saint Cyrille de Jerusalem \ dans saint Gregoire de Na-
zianze ^ , dans Rufin ^ , dans saint Augustin '", dans Inno-
cent !*•■ ", et dans ceux qui sont venus dopuis. Elle est
citee par les peres que Ton vient de nommer , et par Lu-
cifer de Cagliari '^, par saint Ambroise ^^, par saint Je-
r6me '*, et par beaucoup d'autres : de maniere qu'on ne
peut aujourd'hui raisonnablement douter qu'elle ne soil
reconnue par toule I'Eglise ; et elle Test incontestable-
ment depuis le quatrieme siecle.
' Origen. in MaUh.p. aaS. Icu(5'*; v^^aAfii EuKjToXr.v 6XfYc'<jriy_ov u,£v, tts-
TrXmpwaj'vTv ^s rwv rr; o-jpavtcj j^apiTo; afpwfj-svMv Xo'-j-wv, i'art; svtw TTopcciatM
Etpwsv U\jSa.%, etc. l^'ide et homil. 7. in Joan. — - Epiplmn. hares. 26.
Kat T.y/i TOUTtdv (twv TvocTaSiv), cip-at, i>t.nr.6-fi 70 A")'tcv nvEu[J.a s'v tm ATTOa-
To'Xw Iou(5'a , Xs'-^w Sk i•^ -ri utt' auroO "^ooLwdari /iaOo/.txrj eTriaToXr. — ^ Clem,
^lex. Pcedagog. lib. iii. et Strornat. lib. ni. — * Tertull. de Cullii femin.
cap. 4. — * Laodicen. Can. 60. — ^ Carthag. Can. 47. — ^ Cyrill. Jerosol.
Catech. 4. — * Nazianz. Cam. 34. — ' liiijin. Exposit. in Symbol, apud
Cyprian, p. 55'i. — '° August, de Doctrin. Christ, lib. 11. cap. 8. —
" Innocent, i. epist. 3. cap. 7. — ** Calariian. Tract. De non com-eniendo
cum huireiic. — " Ambros. in hue. vrii. -^ 28. — " Hieron. in Jerem.
XXIX. 8. etin Ezech. xxxr.
DISSERTATION
SUR LE LIVRE D'HENOGH
II est surprenani que les deuil^premiers siecles de I'E- Trois soris
i^lise, qui onl cte les plus illustres par la saintelt' cies fide- d'ennemis
les , et par le nombic. des martvrs, par les miracles el par q^elareligion
la doctrine des apolrcs et de leurs disciples , ajent aussi ete ^^^^ j^^^ j^^
les plus souilles par les heresies au dedans , et les plus atla- pnrniers sio-
ques au dehors par des cnneniis dangereux qui repandi- des: les
rent centre la religion chrelienne une infinite de calora- pa'cns.leslic-
nies, pour tacher de la decrier et de la deshonorer. De la i^s'^y, /^j^
lant de faux evangiles, de faux Actes des Apotres , de Combien I.-s
fausses Apocalypses ou revelations , de faux recils de la IWres apocrj--
vie et de la niorl des plus illustres personnages de I'Eglise ; P''?* falx' -
de la les sectes aborainables des simoniens , des nicolaites , f^^^ ^|g ^"
des gnosliques , des carpocratiens , des basilidiens , des toient capa-
menandriens , et tant d'autres, donl chacune avoit ses l>les de nusre
evangiles , et ses autres livrcs , differens de ceux de I'Eglise, ^ '* religion,
forges expres pour soulenir leurs erreurs, el pour tendre
des pieges a I'ignorance des simples.
On vit aussi paroilre dans le nieme temps une autre
horles d'enncmis, qui, avec des intentions moinsnoires, ne
iaisscrcnt pas de faire un tre§ grand tort a la religion, et
furcnl les auteurs de certains livres apocryphes , composes
sous le nom des plus grands hommes de la Synagogue ,
de I'Eglise, ou m^me du paganisme, pour atlirer a la reli-
gion chrelienne les Juils el les paiens, en vouiant leur
persuader que leurs plus celebres personnages avoient
predit Jesus -Christ d'une maniere pleine de clarte et
d'evidcnce. C'esl ce qui a prf»duit les (jeuvrts de Trisme-
giste et des sibylies , le livre d'Henoch , le quairieme
d'Esdras , le Testament des douze patriarches , el quelques
autres ouvrages de cetle nature, qui onl quelqucfois engage
dans des meprises de tres anciensperes de I'Eglise. lesquels
ne se precaulionnoient pas assez conlrc Timposture , et a
qui un grand nom imprimoit du respect.
)84
DISSERTATION
nocli .
Get artifice etoit d'autant plus dangercux , que I'effet en
paroissoit infaiUible ; car , ou ces mauvais livres devoient
etre re^us comme vrais et comme composes par les au-
teurs dont ils portoient les noms , et alors les erreurs qui
y etoient melees, passant pour des vcrites respectables,
infectoient tous les esprits , et la fourberie avoit tout son
effet ; ou ces livres etoient rejetes et leur faussele recon-
nue, et alors les vrais ouvrages des apotrcs et de leurs dis-
ciples en souffroient, en devenanl par-la douteux a plu-
sieurs fideles et a tous les etrangers qui ne pouvoient ou ne
vouloient pas prendre llf peine de faire le dicernement des
pieces authentiques et veritables, d'avec les pieces apo-
cryphes et supposecs : or, c'eloit loujours un grand mal
de reussir a decrier ou a affoiblir I'autoriie des saintes
Ecritures dans I'esprit des infideles ou des fideles.
Divers juge- Lg livre d'Henoch, dont nous entreprenons de parler
mens que es -^j ^-^^ j,^^^^ assez diversement dans I'Eoflise. A-U commen-
poru's sur le Cement , il y tut estime par piusieurs iideles ; et le temoi-
livred'Hc- gnage que I'apotre saint Jude paroissoit lui avoir rendu
dans son epttre , le fit regarder comme canoniquc , ou du
nioins comme un ouvrage qui ne contenoit rien de con-
traire a la religion ; ce fut ainsi qu'il fut recu par un assez
bon nombre d'ancieus percs , tandis que d'autres plus al-
tentifs et plus circonspects s'en deficrent et le rejeterent.
Les premiers y puiserent un sentiment insoulenablc , et
qui n'a pas laisse d'avoir grand cours dans I'antiquite ;
c'est cju'une troupe d'anges prevaricateurs , ayant concu
an amour impur pour !cs filles des homnies, s'etoientsou-
leves contre Dieu, avoient epouse ces femmes et en avoient
eu des enfans , qui furent ce^ hommes connus dans I'anti-
quile sous le nom de Geans , celebres par leur taille pro-
digie.use et par leurs crimes.
Saint Jude est le premier qui ait parle d'une prophetic
d'Henocb. Apres cela on voit le bvrc d'Henoch cite dans
le Testament des douze patriarches , qui est certainement
aneien. puisque Origcne en fait mention ^ C'est dans
ce livre que saint Justin le martyr^, saint Clement
d'Alexandrie \ saint hence"*, TertuUien ^., Athena-
» Origen. Hornil. xv. in Josiie. — ^ Justin, mavlyv. Jpolog. i. pag.
44 el Jpolog. u. pag. 55. — ^ Clem. Alex. lib. iii. el v. Sirom. et lib. n.
Pcedag. c. i. — * Ircn. lib. i\. cap. So. sen cap- i6. nov. edil. el cap. 70.
num. 36. — * Tcrtull. lib. de Jdololat. cap. 9. dc Cullu miiUer c. 10. de
peland. in'rgin. c ?•
I
SLR LE LIVr.E D'nL."<OCn. o8-J
i;oi e ' , saint Cyprieii * , Laot.-snie * , Sulpice-Sevcrc * , !Mi-
niitius Felix ^ , saint Ambroisc ®, Prorlus et Psellus .
philosophes chretiens , out piiise leur sentiment sur le
mariaeje des anijcs avec !es filles des honimes : erreur que
laulcur du livre d'Henoch avoit apparcmment tjrec de
quelques excniplaires de la version des Septante , oii on li-
soit : Lss tinges de Dieii ' voyant que les JiUes des homines
etoient belles , prirenl d'enlre elles pour Jemmes loutcs
ecllcs qii'ils atoicnt choisies , au lien que les aiitres excni-
plaires porleni eonforniemenl a I'hebreo et a la Vulgate :
Les enjans de Diea voyant que le<; Jilles des hcmmes , etc.
Cest sur ce texte ma! entendu que I'autcur doni nous par-
Ions a compose son histoire de la revoke des angcs et de
leur prelendu manage.
Cetouvrao;e nesubsiste plus dans son enlier, niais on en ' i. ;-."<.ii>
trouve divers fraemens , qui sonl assez considerables pour ''"' "«u^ r<^
nogs en uonner une juste Kiee. Plusieurs croient que sanil j'H'.!:(x1i.
Jude cite ce livre , lorsqu'il dit : Henoch, qui est le seplieme
depuis Adam , a prophrtise , el a dit en parlant de ces per-
sonnes ( des heretiques qni corrompirent la docti'ine de
Jesus-Christ, auxquels saint Jude attribue ce qui est dit
des impies qui vivoient avant le deluge ) : Voicile Seigneur
qm vient avcc ses milliers de saints pour juger fous les
hoinmes , et pour convaincre to us les impies de lonles les im-
pietes qa'ils orU commises , et de toutes les paroles insolenles
que les pecheurs et les impies onl proferces conlre lui **.
L'auteur du Testament des douze patriarchcs en cite aussi
plusieurs passages doni nous rapporlerons les nrinci-
paux ci-apres. Saint Irenee^ dil c^a'Heiiock , quoiqn'il ne
flit qu'un simple homme , fat envoye dc la part dc Dim
comvie amhassndeur vers les anges rebellcs. Saint Juslin ,
ot plusieurs autres que nous avons noinmes ci-devant ,
parlentde Tamour impur que les anges concurent pour
les filles des horames. Tertullien ^^ fail le denombre-
mcnt dos inventions que le livre d'llenocli aitr.bue a ces
anges rebelles. Saint Hilaire '* dil qu'ils s'engagerenl par
* AJteiiag. legul. pi-o ChrUliaiiis . — * Cjpu'an. de dfsciil. et llabiiu
vifg. .1. 54. — 5 l,actanL. lib. 11. cap. 14. ^ * Sulph. SenT: hist. sacr.
I. I. — * Minutius in GcUn'io. — * Jmiros. lib. de Noe . e: Area, c. 4.
nlib. I. de t irginih. — ' On I il encore aiiisi dans If MS. alex. Gen. w.
1. O; AY]f2>.£t Tty QiiO, :t/.. — * Judce. ep. canon. < i\. \5. — ' It-eit.
lib. IT. c. 3o. — «" Icnull. dp Culitt femin. li,'. <• Hit,.r. in
pifdm. ili. y 3.
o86 DISSERTATION
d'horrlbles analhemes a'la revoke conlre Dieu , sur une
montagne qui depuis ce teinps-la fiit riomuit-o Hermon ^
c'est-a-dire Analhcme.
Mais le plus important de ccs fVagmcns est celui qui nous
aete conserve par Georges Syncelle dans sa Clironique ' ,
ct qui a ete donne au public pour la premiere fois par Jo-
seph Scaliger '^, On y lit qua les veillans , en grec iyorcjoool
( c'est ainsi que le livre d'Henoch appelle Ics anges , a
rimilation de Daniel ^ _, (jui leur donne Ic nienie nom) ,
etantepris de Tamour des fernmes , s'exhortercni les uns
lesautresa prendre pour epouses toutes celles qui leur plai-
roient davantage. Le prince des veillans , nomme Semiexas
ou Samsa'i , les ayant assembles au nombre de ^ deux
cents sur une haute montagne , leur dit : « Je crains que
vons ne refusiez d'executer le projet que nous venons de
I'ormer, et que me trouvanlscul engage danscette resolu-
tion , et convaincu de celte revoke , Dieu n'en fasse re^om-
ber sur moi seul toute la peine ; ainsi confirnions-la par
serment, et engageons-nous par des anathemes a accom-
plir ce dont nous sommes convenus. » Alors ils lirenl des
sermens et des imprecations horribles contre ceux qui s'en
dcpartiroient ; el de la est vcnu le nom <\'Hermon p'Dnn ,
c'est-a<lire AnaLhcme , donne a la montagne oii ils jurcrent
ce complot. Or, voici les noms des principaux chefs de
ces anges rebelles. Le premier, Semiexas; le second,
Alareuph ; le troisieme , Araciel; le quatriemc, Cohabiel ;
le cinquieme , Horammame ; le sixieme , Ramiel ; le sep-
tieme , Sampsich; le huilienie, Zacicl; le neuvieme , Bal-
ciel\ le dixieme, Azabzel; le onzicme, Pharmarus ; le dou-
zieme , Amaricl; le treizieme , ylnagcmus ; le (jualorzieme ,
Thaiisail; le quinziem > , Samicl ; le seizieme , Sannaa ; le
dix-septieme, Eumiel; le dix-huitieme , Tyriel ; le dix-neu-
vieme , Juiniel; le vingtieme , Sariel.
Ce fut, dit I'auteur , I'an du monde 1170 "^ , que
TP^
* Syncelli Chroiiog7-ajjh. pag. 1 1. ef 24- — ^ Joseph. Scaliger, adGn
Euseb.p. 4o3. — ^ Dan. iv. to. r4. 20. Hebr. "VJ Hir. Jqii. Sym-t^^ .
ppo?, l^'Jgil- — * Quelques-uns ne lisenl que cent. Origcne contre Celse,
\. V, pag. 267, poi-le iju'ils descenclireni au nomhre Je 60 011 70. — * Syn-
celle^ pag. 16, dit que les veillans descendlrent du ciel Fan du monde io58.
Dans la suite 11 dit qu'Hcnoch rc^ut la revelalion du deluge fulur I'an du
monde i42j ; qu'il fut transporle au paradis Tan du monde 148S 5 que Dieu
prononca la sentence contre les veillans I'an du monde 2 1 2 r , et que le deluge
arriva I'an du monde 224.1 : en sorte que depuis la descenle des veillans j
qu'au deluge, il y a 118 3 ans.
SLR LE LIVRE d'hkNOCH. 687
angesoules veillansprircntdcsCemmes, ctilsles j;ardercm
jusqu'au deluge. Ces femmes leur produisirent Irois races
d'enlaiis : savoir, des fils nommes Enakini ; dcs petits-
(ils , nouwwc^, Xephilim ; et dcs arricTe-pelits-fils, appcles
Elidiiun. Les Euakim , ou les geans , enseignerent a leurs
egaux et a leurs femmes les cnchantemens, el I'usage du
poison. Ab/azcl, ou Azabzel , qui est le dixierac d'cntrc
les chefs de ces raauvais anges , monlra aux liomines la
chiriiie , la maiiiere do fondre el de preparer les melaux ,
dc forger dcs anncs etdcs instrumens de guerre, de polir
et de mettre en oeuvrc les pierres precieuses, ct d'employer
lesparurcspouraugmenterlabcaute des femmes. Semiexas,
le chef de tous , leur inspira la hahie, la vengcance^el la
maniere de faire perir les hommes par le sue veneritux des
herbes. Pharmarus ' , le onzieme de ces princes , decou-
vril les arts curieux de la magie , des sortileges. Balciel
apprit aux hommes Ic coui's des aslres; Cobabiel leur mon-
tra I'astrologie ; Zaclel leur expliqua les signes de I'air ;
Araciel , ceux de la terre ; Sampsich , ceux du solcil ; Sa-
riel , ceux de la lune , pour en tirer des presages de I'a-
venir.
Or, les gcans s'etani mis ase nourrir de chair humaine,
le nombre des hommes diminua notablement , en sorte
que ceux qui resterent, voyant leur espece presque anean-
lie , eleverent leurs voix vers le ciel, et priereut Dieu de
sesouvenir d'eux. Alors les quatre premiers anges, Michel,
Uriel, Raphael et Gabriel s'adresserent au Seigneur, et
lui represenlerent les maux infinis que les anges apostats
avoient fails sur la lerre ', ct ceux que les geans y commet-
toient tous les jours ; ils lui remoalrerent que les esprils
des ames de ceux qui avoicnl ete mis d morl~ , soupiroient
jusqu'au ciel, et nc pouvoicnt sortir de la terre a cause
des crimes qui s'y commettoient , et dont elle etoit toute
souillee.
Le Tout-Puissani dii a Uriel : Allez vers Noe .. fils de
Lamech , el diles-Iui de ma part que je dois bieulot en-
voyer le deluge sur la tcrrc ; qu'il annouce aux hommes
leur malheur prochain , ct qu'il se dispose a eviter ce dan-
ger, afin qu'il puisse reparer la perte de toutes lesplantes,
' Quelques-uns lisent Phaitnacus, ou Phanneceus , qui signifie un em~
poieonneur. — • Voyez la Dissertation suf la nature de lame »elon les Ht-
irettr , torn. xi.
588 DISSKHTATIO^
el qu'il rcproduise sur la tcrrc une race nouvclK' qu; sub-
sis!cra jusqn'a la fin des siecles.
Dieu dit aussi a Rapha(il de prendre le mauvais ange
A.zael , de ie charger de chaincs , de le jeler dansles tene-
brea, d'ouvrir le fond du desert de Dudael, d'y jeler cet
ange revoke dans uneprofonde obscurile ,sur desrochcrs
durs ct poinlus de guerir la terre de toutes ses iniquiles ,
et de dresser un etat de tous les crimes qui s'y etoient
eommis.
11 dit ensuite a Gabriel : AUez trouver les geans , ces
superbes fils des veillans , meltez entre eux. une telle di-
vision , qu'ils se fassenl la guerre ct se delruisent i'un
raiH|;e.
Enfi'n le Seigneur dit a saint Michel : Allez prendre Se-
miexas, le chef des anges rebellcs ; et apres qu'il aura etc
leniyjn dcla mort de ses fils les geans. conduisez-le a I'ex-
treraitjj de la terre, afin qu'il y dcmeure pendant soixante-
dix generations , jusqu'au jonr du jiigenient. Alors il sera
precipite dans le chaos du feu ctcrnel , et resserre dans les
liens d'une elernelle prison, ou ildemeurcra avcc ceux qui
scronldamnesavec lui. Ilajouta: Quant aux geans qui sent
sorlis de la conjonction des veillans avec les filles des
homines, lis seront sur la terre commc de mauvais csprits,
qui y causcront toutes sorfes de desordres, des meurtres ,
des ravages; ils possederont leshommes, les jetteront par
terre; ils y vivront sans nourriture , feront paroitre des
spectres , seront affliges de lasoif , attaqueront les hommcs,
et lourmenleront les onfans; ^|cela depuis le moment de
leur mort jusqu'au dernier jour du jugement a la fin des
siecles. A I'egard de la montagne sur laquelie ils se sont
' engages au crime et a !a rcvo'.te par des scrmens et des
execrations^ elle demcureramaudiic, etlivree aux neiges,
aux (Voids et au>: frimas jusqu'aTi jour du jugement; alors
elle sera fondue, et consumee par les flammes.
On lisoit dans le meme ouvrage que Fan d'Henoch i66,
du monde i 286, 1'ange Uriel, qui est le prince des astres,
fut envoye de Dieu a Henoch pour lui reveler ce que c'est
que lemois, I'annee, et le solstice. Voila le precis de ce
que contient !e fragment du livre d'Henoch, qui a ete con-
serve par Synccile. Cet ouvrage avoit au moins deux li-
vres, puisque Syncelle cite le premier livre.
OninronsJi- ^^^ J>as5age d'Henoch cite par I'apotre saint Jude ne
verses sur le sc Irouvc pas dans les fragmens qui nous en restent , et it
V a dcs ecrivains qui doulcnt qu'il y ait jamais ete. l.cs uns tomoignage
oroient que saint Jude ravoil appris par la tradition , et ne d Henoch ciio
I'avoit lu dans aucuu livre ; d'aulrcs, que le Sain l-Esprit ^^"^
lui avoii revele immediateuient qu'Henoch avoit autrefois
prophetise cc qu'il en cite : d'autrcs' out soupconne que
I'auteur du livre d'Henoch n'avoit ecritson ouvragequa-
pres coup, et qu'il avoit pris loccisiondu passage cite par
j^aint Jude pour le composer, voulant lui procurer ducre-
it, en faisant croire que cet apolre Tavoit connu et cite
ilans son epilre.
Mais Ics peres qui conuoissoienl le livre d'Henoch , cL
<}ui I'avoicnt en main , semblent avoir reconnu que le
passage qui est cite par saint Jude s'y Irouvoit en termer
\pres ; et saint Jerdme^ dit que la raison pour laquelle
piusieurs rejetoient I'epitre de saint Jude, etoit qu'il y ci-
loit le livre d'Henoch. Tertullien^ , au contraiie , inferoit
lauthenticite et la divinite de ce livre de ce que saint
Jude Pavoit cite. Enfiu, de quelle autorite auroit ete cellc
prophetic citee par saint Jude aux fideles nouvellemeni
converiis, si elle n'eut jamais exisle , ou qu'elle ne leur
e6t pas ete connue? Un auteur inspire peul queiquetois
citer un poete paien en parlant a des gcntils , pour Ics con-
vaincre par leurs propres auleurs , oul'alleguer aux fideles
pour monlrer que les verites qu'il annonce onl ete con-
nues meme des profanes. Mais il ne s'avisera pas d'alle-
guer une prophetic inconnue et sans aveu, ayant lui-meme
toute I'autorite neccssaire pour se faire croire , sans avoir
besoin de produire d'autres temoins ni d'autres garan?. 11
faut done conclure que la prophetic d'Henoch etoit a'ors
ecrite, ou du moins qu'elle etoit connue des fideles prr !a
tradition.
Car il faut'reconnoitre qu'il y avoit parmi les Juii.s Ji- Traditions
verses traditions non ecrites , et qui ne se conscrvoient ion ecriies
que dans la memoire du peuple : par cxemple, ce que dit cliez Ics Juifs.
»IoTse de Jannes et Mambres^ qui s'opposerent a Moise en^ce'rar" le
dans !a cour de Pharaon, et ce que raconte saint Jude ' de tcmoignage
la contestation cntrc saint Michel eilc demon loiichant le d'Henoch ciie
parS. Jude?
' / i:ie Herman. I itsii. Meleiem. Leideiis. p. ooi. et Heideggcv. Hisc.
pntriarcharum. — '. Uitronjrm. in catalogo script. Eccles. c. .',. Quia de
liOi-h Henoch, qui apocrrphiis est , in ea ( epistola ) assumit ies imonium, a
pierisque rejicitiir. Fide et in caput i. ep. ad Tiitim. — ^ J'cilull. lib. \.
V. 3. dc CuUuJ'einin. Accedlt quod Henoch ad Judam aposiolum testimo-
nium perhibet. — * 2. Timofh. HI. S. — * Jtida epist. j- 9.
•■'Qf* DISSEUTATION
corps de rvloise : IraJition qui semble avoir dorine lieu a
nil livre que nous avons encore aujourd'hui sous le litre dc
nWD m''J3 PelimUi Mosche , ou Mort de xMoise, qui a ete
ecrit depuis Jesus-Christ , puisqu'il parle de la ruine du
second temple, et qui est different de celui que les anciens
ont citesous le nom (X yissomplionde Mo'ise , puisque ce qu'iis
en citent ne s'y lit pas. Enfin les particularites de la vie
de ce legislateur qu'on lit dans .Tosephe', et qui ne se
irouvent pas dans I'Ecrilure , sont encore apparemment
de ces anciennes traditions qui s'etoient conscrvees dans
la memoire des peuplcs, et qui ne s'ccrivirent qu'assez
tard.
La prophetic d'Henoch pouvoit etre de la meme sorte ,
et elle a pu fournir la matiere du livre qui a ete compose
sousle nom de ce patriarche. Nousn'osons decider sic'est
avant ou apres saint Jude qu'il a ete ecrit, parce que nous
ne Savons pas preciscment la dale dc I'epitre de cet apotre.
Maisil est certain qu'il n'a ete compose que depuis la ruine
du temple de Jerusalem par les Romains, puisque I'auteur
parle de cet evenementdans ce qu'on en trouve cite dans
le Testament de Levi. II n'estpas impossible que saint Jude
ait survecu assez long-tems a la destruction du temple , qu'il
ait pu voir le meme livre d'Henoch que les peres ont vu et
cite, et qu'il en ait tire le passage en question, dont il de-
melala verite parmi les fables qui s'y trouvent repandues,
soil que la verite de ce passage lui fut connue par une re-
velation particulicre, soit que d'ailleurs il la connut par la
tradition de son peuple. Mais onne pent rien decider avec
assurance sur ce sujet.
Seiui:neni Grotius^ croitquc cet ouvrageetait originairement assez
de Groiiiis et (^om't^ mais que dans la suite on y fit plusieurs additions ,
de saini Au- •!..•' ^ i i ^ i • -v ' ,. ..
" r « r I'o- comme li est arrive a la plupart de ces cents secrets etapo-
riglne et sur cryphcs. Lcs Juifs ont grand nombre de ces traditions
la valour du qu'ils attribuciita leurspatriarches^, sousle nom desquels
livre d'Hc- leurs docteurs allegoriques et cabalistes ont dans la suite
^ ' compose differens ouvrages remplis de fables et d'imperti-
nences , et oil , sans se mettre en peine de ce qui est, ils ne
se sont appliques qua ecrire ce qui leur paroissoit plus
propre a reveiller la curiosite des lecteurs. Georges Syn-
celle * croit que I'ecrit d'Henoch a ete corrompu dans la
• Joseph, cintiq. I. ii. c. 5. — - Grot, m epist. Juda , ^ 14, — 'Rich.
Simon, Hist. cri(iq. 1. lu. c. ai. — * S^ncell. pag. o.j.
SLR LE MVRK D HK.NOCH. .jgi
suite par Ics Juit's et les heretiques. Mais ces conjectures
sont avancees sans prcuves ; il iaudroit marquer oil sent
ces additions . Ic temps auquel elles ont ete faitcs , ct qui en
sont lesauleurs.
Saint Augustin' ne doutoit pas qu' Henoch n'eut com-
pose quelque Ecrilure sacree, puisque saint Jude I'a cite :
Scripsisse notmulUi divina Henoch, ilium seplimum ah Adam,
negate non possumns , cum hcc in epislola canonica Judas
apostolus dical. Mais, ajoutc-t-il , la synagogue a eu de
bonnes raisons pour ne pas admettre ces ecrils dans le
canon des livres saints qu'elle conservoit precieusenient
dans le temple, et apparemment I'extreme antiquite de
I'autear a fait douter de I'authenlicite et de la vcrite de
I'ouvrage : Ob antiquitatem suspecloe Jid^i judicata sunt.
D'ailleurs, continue-t-il , on volt dans ie livre qui porte le
nora d'Henoch , des Tables qui sont manifestement faites a
plaisir, comme ce qu'il dit des geans qui ont des anges pour
peres : ce qui fait juger aux plus sages que ce livre estune
production des imposteurs ou des heretiques, qui ont forge
plusieurs autres ouvrages de celte nature , sous les uoms
des prophetes et des grands honimes , et que I'eglise a ran-
ges parnii les apocrvphes.
Ce saint docteur croyoit done que saint Jude avoit cite
un livre d'Henoch , ce qui ne paroit pas clairement par
I'endroit ou cet apotrc allegue le temoignage d'Henoch. II
n'y dit pas qu'Henoch ait ecrit, ni qu'on lise dans Henoch,
mais siniplemenl c\\x Henoch a prophelise ; ce qu'il pouvoit
savoir par la tradition , ainsi qu'on I'a dit. Mais quand il
auroit ecrit quelque chose, saint Angustin montre fort
bien que ce ne peut etre le livre que nous avons,pour
deux raisons : la premiere, parcc les Juifs ne font pas recu
dans le canon des Ecrilures ; et la seconde, parce qu'il
contient des choses conlraires a la foi et a la verile.
Joseph Scajiger- croitle livre d'Henoch tres ancien. II Sentiment
veul que les Juifs iaient ecrit en hebreu, pour imposer aux de Joseph Sca-
simples par le grand nom d'Henoch, Mais il ne s'explique ii^^jf' ^^
pasassez sur son antiquite, pournShs faire connoitre s'il I'amiqtiitrdu
le croyoit anlerieur ou posterieur a Jesus-Christ ; car il ne livre d'He-
laisseroit pas d'etre fort ancien, quand il ne seroit que du ^'^■
second siecle de I'Eglise. Quant a ce qu'il avance qu'il a
* ^//^. lib. \\. (k Cifil. cap. 23. el lib. xviir. cap. 3S. — « Joseph.
Scalig. not. fid Giteca Euseb.pag. ^o5.
.592 DISSEUTATION
d'abordele ecrit en hehreu, il est difficile d'en convenir :
onn'envoitaucuncprouve dans I'ouvrage.Ilestvrai qu'il\
a des hebraismes ; inais on en trouve dans presque tons les
ouvrages composes en grec par des heUenistes, par eseni-
ple, dans les auleurs du Nouveau-Testament, et dans les
Maehabees. Hollinger croit memo trouver dans le noni de
Pkarmariis , on, comrae il lit, Pharmacus , le onzieme des
princes des veiilans , line preuve que Tauteur etoit grec :
Pharmaceus en grec signifie empoisonneur.
Grabbe ' pretend que I'auteur du livre d'Henoeh est un
Juif qui vivoit assez long-temps avant Jesus-Christ ; etil
prouve son sentiment par des raisons : la premiere, parce
qu' Alexandre Polyhistor, cite dans Eusebe^, dit qu'Eupo-
leme avoit ecrit qu'Henoch etoit inventeur de I'astrologie^
dont les profanes attribuoient I'invention a Atlas, et que
I'Atlas des Grecs etoit le meme quel' Henoch des Hebreux.
La seconde , que le livre Zohar, que I'on dit avoir ete ecrit
peu de temps apres la ruine du temple de Jerusalem par
Titus, cite deja le livre d'Henoeh , aussi bien que le rabbin
Manahem , qui vivoit au treizieme siecle.
A ces raisons on peut repondre , 1° que ni Eupol^me, ni
Polyhistor, ni Eusebe , ne disent qu'Henoch ait rien ecrit
sur I'astrologie. Eupoleme ne fait que rapporter ce que la
tradition des Juifs attribuoii a Henoch. C'est un simple te-
moin de I'opinion ou de la tradition des Hebreux. Ces tra-
ditions ont ete long-temps dans la bouche et dans la me-
moire des peuples avant d'etre redigees par ecrit. 2*^ Quand
Eupoleme auroit dit expressement qu'Henoch auroit le
premier compose des livres d'astrologie, nous ne serions
pas obliges de Ten croire sur sa parole. 3'^ Les Juifs et les
Arabes lui attribuent beaucoup d'ouvrages sur cette ma-
tiere ; niais personne ne les croit temoins suffisans pour
nous en persuader. Les Arabes'' disent qu'Edris, ou Idris,
qui est le meme qu'Henoch , fut le premiej* homme qui
s'appliqua a I'astronomie ; que Dieu lui en envoya trente
volumes; qu'illes enferma avec les livres de Seth, dans le
cercueil d'Adam; qu'«Draham ayant ouvert ce cercueil, y
trouval'ouvrage d'Henoeh, etc.
L'auteur hebreu du livre luchasim^ dit aussi qu'Henoch
* Ernest. Grabb.not. inSpicileg. PP. t. 2. p. 345. —^Euseb. Prtepar.
I. XIX. c. 17. — ' Ebnacin. apud Hottingev. lib. i. cap. 3. Hist. Orient-
Aben. Neph. apud Kircher. torn. i. QEdip. pag. 67. etc. — * Author. Ju-
chasim.fol. i43. Vide August. PJefeir. exercit. de Henoch, cap. 4.
SUR I.E LIVRF. d'hENOCII. SgS
fut le premier qui composa des livres d'aslronomie. Les
rabbins Salomon Solem ' ou Sullam , et Schem-Tob'*, ci-
tent CCS livres qui trailent des cieux , des astres , et de la
magie. Tout cela prouve I'antiquite de la tradition qui a
voulu faire d'Hcnoch un fameux astroloj^ue; mais il ne
s'ensuit pas qu'Henoch ait jamais rien ecrit, ni que ses
livres soient venus jusqu'a nous, ni que ceux que client
les Arabes et les rabbins, suppose qu'ils existent, soient
anciens, ni cnfm que ce soit le livrc d'Henocli qui fait le
sujet de cette Dissertation , et qui n'cst pas assurement un
livre d'astronomie, quoiqu'il y ait quelque petite chose qui
pent y avoir du rapport.
A la seconde raison de Grabbe, on peut repondre que
le livre d'Henochcite dans I'ouvragede Simeon Joachides,
intitule Zohar^ et dans le rabbin Manahem^ de Recanali,
est different de celui que les peres de I'Eglise ont eu et
cite,parce que les passages qucces rabbins en rapportent
ne se trouvent point dans les fragmens qui nous resfent du
livre d'Henoch, et qu'il n'est nullement vraisemblable
que des autcurs juifs veuilleiit adopter un ecrit qui parle
aussi clairement dc Jesus-Cbristque fait le livre d'Henoch,
dont nous traitons ici. Enfin quand on supposeroit que ce
seroit le meme ouvragc qui est cite par saint Jude , et par
le livre Zohar, et quand on accorderoit au livre Zohar
toutc I'antiquite que lui donnent les Juifs cabalistes, on
ne pourroit pas en conclure que le livrc d'Henoch soit
fort ancien : il a pu etre compose immcdiatement apres la
ruine du temple par Titus, et ensuite etre cite par saint
Jude, et par Simeon Joachides , quatre ou cinq ans apres.
On voit dans Josephe une bonne par tie des scntimens les
plus absurdes qui se liscnt dans le livre d'Henoch : par
exempie , que les anges devinrent amoureux des femmes^;
que les ames des medians obsedent et tourment les
hommes'*. 11 parle du secret que gardoient les esseniens
sur les noms des anges". Le livre d'Henoch n'a fait appa-
remment que mettre en evidence ce que la tradition et les
livres secrets des Juifs renfermoient et tcnoient cache de-
puis long-temps.
' Rab. Salorn. Solem addiiam. ad lib. luchasim. pag. 1 34. — - Schem-
Tob. ill. lib. Emunodi. parte 3. cap. 4- — ^ Vide Fabric. Apocryph. V. T.
pog. 2oS. aog. not. — * Fide Drus. lib. de Henoch, et Grab. Spicileg.
pp. I. 2, p. 355. not. — ' jintiq. I. i. cap. ^. pag, 8. — ^ De belln Jiid.
lib. Tii. cap. 25. pag. 981. — ' De bello lib. :i. cap. in.ff^. 786. g.
a5. 38
SqA dissertation
Sentiment La plupart des aiicicns percs , doiit on a ci-devant rap-
<^es anciens , pQ^j^ jgg noms , persuades que saint Jude avoit cite le livre
rement de d'Hcnoch , n'ont pas fait diificulle de le reconnoitre pour
TeriuUicn sur authentique : sans cela auroient-ils embrasse un sentiment
rautheniicite aussi absurde que celui qu'ils ontsoutenu rclativenient au
<]u hvred'He- p^^tendu amour des angespour les feninies , a la naissance
""^ ■ desgeansproduitspariesangesrebelles,etc. ?Si saintJude
I'a cite, disoient-ils, il le croyoit done vrai? Un apolre
rempli de i'Esprit de Dieu auroil-il voulu de propos deli-
bere se servir du temoignagc d'un imposteur, et engager
par-la toule I'Eglise dans I'erreur et dans TillusionPou au-
roit-il ete lui-meme surpris !e premier par le nom d'un
prophele et d'un patriarche mis a la tete d'un livre rempli
de faussetes?
II faut toutefois avouer que partout ces memes peres
supposent qu'il n'est ni dans le canon des Hebrcux, ni
dans celui des Chretiens. TertuUien , qui est un des plus
zeles partisans de ce livre, reconnoit que les Juifs ne le
recoivent point dans leur bibliollieque sacree : Scio scrlp-
Inram Henoch non recipi a qiiibiisdam , quia nee in armaria
Judceoram admitdtur ^ . Origene , qui le cite assez sou-
vent, et qui semble en adopter la doctrine en certains
points, avoue qu'il n'est point reconnu pour divin dans
I'Eglise : NeuUquam pro divinis in Ecclesia habentur ^. Et
ailleurs, qu'il ne passe pas pour authentique chez les
Hebreu\ : Non tidenliir apud Hebrceos in aucloritate ha-
heri ■*. lit apres avoir cite ce livre , il ajoute : Si cui placet
admitlere librum ut sanctum ^. Mais s'il ne passoit pas pour
canonique , ils en rejetoient la faute ou sur les heretiques
qui I'avoient corr-ompu , ou sur son excessive antiquite
qui le rcndoit douteux, ou sur d'autres circonstances qui
ne touchoient pas le fond de I'ouvrage.
TertuUien ^ est de tous les anciens celui qui en a parle
avec plus d'estime. II est persuade que I'ouvrage est du
prophcte Henoch, et qu'il I'a ccrit par I'inspiration du
S^\n\.-}^?,'^v\l : Hcec prcevidens Spiritus Sanctus... prcecinit
per anliquissimum prophetam Henoch^. II croit que ce qui
a empeche les Chretiens de le recevoir pour canonique ,
* Terlull. de Ciiliufemm. I. i. cap. 3. — ^ Origen. lib. v. contra Cel-
sum. — ' Idem, in Nunier. xxxiv . homil. 28 . — * In Joan. torn. 8. pag. 1 3*.
edit. Huet. — " Terlull. lib. n. cap. 10. De CuUufemin. — * Terlull. I. i.
c. 3. de Cuhu femin.
SIR LE LITRE D HENOCH. Sc)!)
c'est que les Juifs ne I'avoient pas recu ; et que ce qui I'a
fait exclure du canon des Juifs , c'est qu'ils n'ont pas cru
qu'un livre ecrit avant le deluge eut pu echapper a ce
malheur qui enveloppa tous ceux qui n'eloient point dans
I'arche : Opinor, noii putavernnt illam ( Script uram ) ante
calaclysmum. editam , post eum casum orbis omnium reram
abolilorem , salvain esse potuisse. Comrpe si Noe, qui etoit
arriere-petit-fils d'Henoch, ct qui survecut au deluge , qui
avoit tant d'interet a conserver la memoire et la reputa-
tion de son bisaieul , qui lui avoit succede dans Temploi
de predicateur de la penitence, eut -voulu negliger un
ouvrage si important, et si uiile a la religion? Et quand
meme ic livre d'Henoch eut j^le detruitpar le deluge, Noe
n*auroit-il pas ete , dit-il , aussi en elat de le reparer ,
qu'Esdras le (ut pour retablir, apres la captivite de Baby-
lone, les Ecritures de i'Ancien-Testament, qui avolent ete
ou perdues par les guerres , ou detruites par les Babylo-
niens a la prise de Jerusalem? Noe poluit earn ( Scriptaram )
abolefactam, violentia cataclysmi in Spirilii rursiis re/brmare ;
quemadmodum el Jcrosolymis babylonia expugnalione dt-
lelis , omne inslrumentum judaicce UUeraturce per Esdram
constat reslilalum.
11 ajoute que le livre d'Henoch etant si avantageux a
notre religion , ct parlant si clairement de JesusChrist ,
nous devons le rccevoir comme un monument qui nous
apparlient : Ciivi Henoch cadem Scriptnra etiam de Domino
prcedicaverit , a nobis quidem nihil omnino rejicicndum est
quod perlineat ad nos ; d'autant plus que nous lisons que
toute Ecriiure propre a edifier est inspiree du Saint-Esprit.
Si les Juifs ont rcjele celle-ci , c'est peut-elre parce qu'elle
parle trop clairement de Jesus-Christ. Enfin saint Jude
ayant rendu temoignage a cet ouvrage , c'est un tres grand
prcjuge en sa faveur.
Voila ce que TertuUien dit pour prouver rauthenlicile
et I'inspiraiion du livre d'Henoch. II n'y a personne qui
ne voie la foiblesse de ses prcuves, et le faux de son rai-
sonnement. Henoch a pu ecrirc un ouvrage avant le
dehige ; Aoe a pu le conserver : qui en doute? 11 a pu le
relablir et le refaire de nouveau . s'il eut ete perdu ,
comme Esdras a repare les livres de rAncien-Teslament :
quel raisonnement 1 Le livre d'Henoch parle de Jesus-
Christ ; il nous est favorable: il est meme, si Ton vcut,
edifiant : done il est inspire et divin ; quelle conse-
SgG DISSERTATION
quencc ! Saint .liicle lui rend lemoignage : c'cst de quoi
il s'agit. II rend temoignage a la prophetic qu'il cite ,
mais non pas au resle du livre qu'il n'a peul-6tre ja-
mais vu.
Seniiment Le P. Boulduc , capucin ^ va en quelque sorle encore
singulierdu plus loin que Terlullien. 11 entreprend de retabiir I'au-
P.Boulduc torile du livre d'Henoch , et de le lirer de dessous le
sur 1 autorite 1 • i ' .. i i j i- ti h
ci le sens du ^o'^seau pour ie remeltre sur ie chandelier. II appelle
livre d'He- ^ SOU secours tous les anciens peres qui I'ont cite avee
nocli. honneur, et qui ont, dit-il , si mal pris sa pensee. II dc-
mande pardon a saint Jerome et a saint Augustin, qui
Font cru suppose, ou corrompu , ou suranne. 11 pretend
que tout le livre d'Henoch n'est qu'une narration allcgo-
rique , ou I'auteur a caciie sous des termes figures une
histoire tres simple et ires bien marquee tians Moise. Les
veiilans, ou los anges desccndus du ciel, epris de Tamour
des femmes, revokes conlre Dieu, peres des geans, in-
venleurs des malefices , de la mngie , des vaines parures
des femmes , du fard , des arines, de Tor, de I'argent, ces
veiilans no sont aulres que ceux que I'Ecriturc appcMe ^
les enfans de Dieu , les descendans de Seth et d Enos , qui
ayant acquis une profonde science des secrets de la na-
ture, en abuserent pour seduire les fillcs des honimes,
c'est-a-dire les filles des descendans de Cain.
Ces enfans de Dieu, ces anges du ciel, ayant fait pro-
fession de la vie religieuse dans I'ordre d'Enos ct de
Cainan , et elanl par-la egales aux anges memes , aposta-
sierent, renoncerent a leur etat, et epouserent des fem-
mes dont les moeurs etoient toutes corrompues. lis en
eurent les geans , ces enfans de la lerrc , c'est-a-dire ces
hommes superbes , qui egalerent ou meme qui surpasse-
rentleurs peres en mechancete et en cruautc. Les princes
des veiilans sont des chefs de monasteres, tant de I'ordre
des cineens que de I'ordre des enosiens , qui engage-
rent dans I'apostasie et dans le crime ceux qui leur etoient
soumis.
Voila le sens de Ihisloire allegorique composee par le
patriarche Henoch , et conservee dans I'arche par Noe ,
son arriere-petit-fils, avec les os du premier pere Adam.
Henoch n'a peut-etre pas ecrit tout ce qui est dans le livre
qwi porte son nom , surtout les choses qui ne sont arrivees
* Boulduc, de Ecclesia ante legem , Z. i. c. 14. — * Genes, vi. a.
SLR LB UVRS d'hENOCH. 697
que Jepuis son enlevement ; mais Noe , ou quehjue autre
renipli clu menie esprit , a pu I'ajouter pour I'inslruclion
cle la posterite.
On ne peut pas nier que Boulduc ne fasse paroitre assez
tl'esprit (Jans riinagiuation cle son sysleme , et dans le
lour qu'il donne a celte histoire : mais il n'est pas ques-
tion de payer ici d'csprit; il faul du solide el des preuves
de fail.
Si le livre d'Henocb eAl ete reconnu pour authentique ObjecUoa
par les Juifs, quel respect n'auroient-lls pas eu pour |ui?'°"''"f .*'f,"~
les auleurs sacres ne Tauroient-ils pas cite? auroit-il ete ,.'^"^\^u^.' "
incooQU a Josephe ot a Philon; (Quelle recherche n auroit- noch.
on pas faite sur le caractere et la langue dans laquelle il
auroit d'abord ete ecrit? Comment , par quel canal est-il
venu jusqu'a nous? Origene, Eusebe , et saint Jerome , si
curieux de decouvrir les textes originaux des livres saints,
ont-ils jamais parle du lexle d'Henocb? L'Eglise, si rem-
plie de respect pour Henoch et pour saint Jude qui I'a cite,
i'auroit-ellc laisse dans le mepris et dans I'obscurile^ si elle
I'eiit juge digne du nom qu'il porle? Ceriainement c'est
faire injure au Saint-Esprit que de lui impuler un ouvrage
aussi rempli de pauvretcs, d'absurdites et d'erreurs que
celul-la.
H n'est pas de la bonne foi de se prevaloir de rautorite
et du nom de saint Jude , qui a cite Henoch et qui en a
rapporte une sentence. Saint Paul a bicn ciie des poetes
paiens; et selon quelques-uns, il a cite meme des livres
apocryphes : a-l-il voulu pour cela les approuver et les
canoniser? 11 cite Aralus ', Menandre^, Callimaque ou
Epimenide ^. 11 cite dans Tepitre aux Ephesiens ces mots :
Levez-vous , vous qui dormez , ei ressortez dentre les morts ,
et Jesas-Christ vous eclairera *, ce que quelques-uns croient
etre tire d'un livre apocrypbe attribue a Jeremie. S'en-
suit-i! qu'il ait regarde ces auleurs conime inspires? L'Es-
prit-Saint, qui parloit en lui, le dirigeoit , et lui faisoil
distinguer , d'uue maniere infaillible , ce qu'il y avoit de
vrai dans ces ouvrages de ce qu'il y avoit de faux; et rien
ne nous oblige a recevoir ce qu'il n'a ni cite ni reconnu
pour authentique : Qui putant totum tibrum debere sequi
earn qui libri parte usus sit , videntur niihi et apocrypkum
Henochi , de quo Judas in epistola sua testimonium posuit ,
* Act. xvu. a8 , — * I . Cor. xv. 33. — '^ Tit. i. 12. — * EpJics. r. i\/
5y8 DISSERTATION
inter Ecclesm Scripturas recipere , et mulla alia quce Jpos-
tolas de reconditis est locutus , dit saint Jerome '.
ru'j)onses a §[ quelques anciens peres, surpris par le nom vene-
rirgument i^abi^ d'Flenoch et par le temoignage de saint Jude , ont
piis clu temoi- . , . . ^ . , " i, »
Kiirite tic quel- ^'^^ ct suivi cet ouvrage ; si quelques autres ont paru 1 e-
qucs anciens galer aux Eeritures canoniques, c'est une meprise qu'on
pcrts qui ont doit pardonner a lour bonne foi, Le respect religieux
ciU"teiouvra-j.jj'-|g ayoient pour les noms de saint Jude et d'Henoch
ec. Les plus / a i > n i i v i t
T'dain's d en- '^^ ^ empeches d employer les regies de critique pour
trc Ics anciens jugcr de la vcrile de ce livre. Leur erreur est pluiot une
ot d'onire les errcur de fait que de sentiment; elle ne doit pas etre liree
luo'lerness ac- ^ consequence. Nous ne crovons pas qu'iJ v ait personne
ieier cet ou- a^jourd'hui qui s'interesse a soutenir que ce livre est
viage. d'Henoch; et s'il n est point d'Henoch , il est d'un impos-
leur, et ne merite par lui-meme aucune croyance , a
nioins qu'un auteur inspire ne vienne nous y demcler le
vrai du faux,
Au reste, il s'en faut bien que toute I'anliquite ait ete
prevenue en faveur de ce Uvre. Les plus eclaires d'enlre
les peres en ont parle avec beaucoup de mepris et d'indif-
ference. Nous avons dejarapporte le sentiment d'Origene,
qui dit qu'il n'est recu ni par I'Eglise , ni par la synagogue.
Saint Hilaire'^ ne daigne pas lui donner le nom de livre
d'Henoch : iV<£;.yc/o c?//M^ liber extat. Un livre de je ne sais
quel ecrivain. L'auteur du commentairc sur les Psaumes
sous le nom de saint Jerome , I'appelle un certain livre apo-
cryphe assez connu^. Il s'excuse en quelquc sortede I'avoir
cite , et il dit qu'il I'afait, non pour en tirer de I'autorite,
niais simplementpour rapporter ce qu'il dit : Non inauc-
toritatem, sed in commemoralioneTn^ 11 reprend Origene qm
• se sert de ce livre apocryphe pour appuyer son heresie.
Saint Jerome ^ dit que plusieurs fideles rejetoient I'epitre
de saint Jude , parce qu'il y cite le livre apocryphe d'He-
noch : Quiade libido Henoch, qui apocryphus est, in eaassu-
mil testimonium , a plerisque rejicilur. On a vu ci-devant le
sentiment de saint Auguslin sur cet ouvrage. 11 en parle
avec sa sagesse et sa moderation ordinaire; et il croit que
la principale raison qui a porte les Juifs etles Chretiens a
le rejeler, est la crainte d'autoriser le faux , au lieu du vrai,
dans un ecrit si ancien , et par-la si suspect : Quorum
' IliPivnym. in ep. ad Tit. c. \. — - Uilai: in psalm, cxxxxil. -f- 3. —
' HieJ-on/m. inpsalm. cxxxu. 3. — * Hieron^m. incatalog. sciipt. EccLc. 4.
SUR LK LIVRE d'uENOCH. 699
scripla utapudJudaos ct apiulnos in auctoritalt nori essent ,
nimia fecit velustas , propter quam videbanlur habenda esse
suspecta , ne proferrentur falsa pro veris\ Les plus eclaires
d'entre les critiques modernes ne lui sont pas plus favo-
rables que les peres que nous venons de citer.
Si Ton nous dcmandc qui est done I'auleurdulivre dont Aquiceiou-
nous parlons , nous repondrons que nous ne pouvons vm^e peui-il
croire que ce soit ni Henoch, ni Noe, ni aucun ecrivain <'''"^'_^^'''"i-
inspire , ni un Juifqui I'ait ecrit en hebreu long-temps
avant .lesus-Christ. Nous croyons que c'est un Chretien
converti du judaisme, qui I'ecrivit en grec, suivant les
traditions de son peuple , et qui y niela divers passages
concernant Jesus-Christ ,dans le dessein apparemmerit de
converlir les Juifs ses freres. Tertullien v avoit remarque
un si grand nonibre de ces traits qui regardent le Sauveur,
qu'il avoit soupconne les Juifs de le rejeter principalemcnt
a cause de cela : ^/ Judccis potest jam videri propterea
rejecta ( ista scrip tura ) , sicut et cater a quce Christum so-
nant ^.
En effet , dans le testament des douze patriarches , il y a
plusieurs endroits qui ne peuvent avoir ele ecrils que par
un Chretien. Par exempie, dans le Testament de Levi : lis
mettront la main sur le Seigneur en toute malice ; vos freres
seront charges de confusion a cause de to us , ct vous serez ex-
poses a la risce de tontes les nations. Et un pen plus has :
Vous irailerez de seducteur celui qui vient renouveler la loi , et
cL la fin vous croirez le faire mourir, ne sachant pas qu'il res-
suscitera, et que son sang innocent relombera sur vos tetes : ce
qui sera cause que votre temple sera reduit en solitude et pro-
fane, et que vous serez un sujet de malediction parmi tous les
peuples. f^ous serez reduits au desespoir jusqu d ce qu'il vous
visile de nouveau , et qu'il vous recoive dans sa misericorde par
lefeu etpar I'eau. Et dans le Testament de Nephthali : f^'os
descendans tomberont dans I'impiete , et le Seigneur les disper-
serasur toute la surface de la terre, jusqu au temps de la mise-
ricorde du Seigneur , jusqu a la venue de I'homme qui fait mi-
sericorde et justice enters tous, tant envers ceux qui sont eloignes
qu'envers ceux qui sontpres. Et dans le Testament de Benja-
min : Toutes les nations s' as semblerontau temple du Seigneur,
qui sera ball dans votre partage; le Seigneur y repiera; el
toutes les Iribus et les nations s'y qssernbleront , jusqu'd ce que
* Aug. de Cu'it. lib. xviii. c. 38. — * Tcrtuli dc Cultufemin. I. i.e. 3.
6oO DISSERTATION
le Seigneur envoieson salut par la visile de son Fils unique. II
enlrera dans le premier lemple ( peut-etre dans la premiere
partie du lemple), et le Seigneur y sera outrage el meprise ,
el Sieve snr le hois ; et le voile du temple sera rompu , el l' Es-
prit du Seigneur descendra sur les nations en forme de feu; il
sorlira des enfers , ilmontera de la terre au del, et Use sou-
viendra de l' humiliation oil il a ete sur la terre , el de la gloire
qu'il possede au ciel.
La seule lecture de ces passages demontre que I'auteur
faisoit profession du christianisme ; I'affeclalion que fait
paroitre I'auteur du Testament des douze patriarches a
citer tres frequemment , etsans aucune necessite, le livre
d'Henoch, donne lieu de soupconner qu'il pourroitbien en
etre I'auteur. Le style en est fort semblablc; on sent dans
I'un et dans I'autre de ces deux ouvrages la barbaric etja
rudesse du style d'unhelleniste, et les frequens hebraismes
dont les ecrivains juifs ne se defont que tres difficilement;
on y voit des traditions et des sentimens propres a la sy-
nagogue ; Jesus-Christ, sa venue , sa passion , sa mort, sa
resurrection , son ascension, la descente du Saint-Esprit ,
la ruine du lemple de Jerusalem, la dispersion des Juifs ,
I'opprobre dont ils sont charges par tout le monde depuis
la mort duSauveur, tout cela y est marque d'unemaniere
plulot historique que prophetique. Or, cela ne peut avoir
ete ecrit qu'aprcs coup , et par un Chretien qui avoit du
zele, mais non pas selon la science; notre religion n'a pas
besoin de fraudes pieuses pour se faire aimer et recevoir ;
ce n'est point la methodc que les apotres ont employee
en prechant I'Evangile; ils ont preche sans crainte Jesus-
Christ, et JGsus-Christ crucifie^, qui est un scandale aux
Juifs, et une folic aux gentils, mais qui est la verlu et
la sagesse dc Dieu pour ceux a qui Dieu a donne le don
de la foi. Si done saint Jude a verilablemenl vu le livre
d'Henoch , il faut qu'il I'ait vu assez peu aprfes qu'il fut
compose ; car nous ne pouvons meltre ce livre qu'apres la
ruine du lemple par les Romains , et Tepilre de saint Jude
ne peut pas avoir eie ecrile long-temp apres cet evene-
ment.
Autreouvra- Outre le livre d'Henoch, qui fait le principal sujet de
gi; auribue a cette Disscriation, et les trente volumcspretcndus envoyes
^^'■?'^.'!,^ .^?~ de Dieu a Edris, et les autres livres d'astronomie, atlribues
portedLtluo-
* I, Cor. I. 2 3. 2',.
sun LE LivRE d'he;<ocm. 6oi
a Henoch par les Juifs, et dont nous avons deja parle , les pieenEgypte,
Kthiopiens en ont un sous le nom de ce patriarche , dont ^'^ prance!
nous ne pouvons nous dispenser de dire ici un mot , afin
de n'ometlre aucun des ouvrages qui lui sont attribues.
Gasscndi, dans la vie de Pciresk, raconte que ce grand
homme ayant appris par le P. Gilles de Loches, capucin ,
qui avoit etc plusieurs annees en Egypte , qu'il y avoit en
ce pays-la un livre d'Henoch en caractere ethiopien, en-
tierementinconnu en Europe, n'epargna ni peine ni de-
pense pour le faire venir. Apres sa mort, ce manuscrit
passa dans la bibliotheque du cardinal Mazarin , et de la
dans celledu roi , ou il se conserve encore aujourd'hui fort
precieusement.
Ludolfelant venu a Paris en i683*, y vli ce manuscrit,
dont il avoit souvent entendu parler; et il trouva que
I'auteur qui I'a compose s'appelle Bakaila Michael; que
ce manuscrit n'est autre chose qu'un recueil de diverses
reveries , pareillesa celles qui se lisent dans le livre d'He-
noch , cite dans Syncelle, livre que I'auteur paroit avoir eu
en main , et sur lequel il a encore encheri. 11 y met, par
excmple, une bien plus grande liste des inventions perni-
cieuses qu'il pretend que les mauvais anges ont enseignees
aux honnnes. On y trouve aussi un traite particulier de la
naissance d' Henoch. L'auteur est un visionnaire qui y intro-
duit un ange parlant du mystere de la Trinite, et I'expli-
quant comme feroit un theologien; il explique aussi quel-
ques passages de TEcriture qui ont rapport a ce mystere;
ce qui prouve evidemment que celui qui I'a ecrit etoit
Chretien. Apres cela il raconte une guerre enlre saint Mi-
chel et le prince des demons, qu'il nomme Selnael. La
description des deux generaux et de leurs troupes est quel-
que chose de si grotesque et de si ridicule qu'on ne peut
s'empecher d'en rire. II dit, par exemple , que Setnael est
liaut de cent mille sept cents coudees angeliques; que sa
bouche est de quarante coudees, son visage de la longueur
d'une journee de chemin ; la distance de ses deux sourcils,
de deux journees; sa tele est comme uneprodigieusemon-
lagne ; il lui faut sept jours pour tourner un de ses yeux ,
taut lis sont enormes par Icur grandeur; quand il crache,
il jelte comme un fleuve d'eau. Voila un echantillon de cc
' Ludolf. Comment, in Hist. .EOiiop.p. 34;.
6o2 DISSERTATION SUK I.E LIVKE d'hKNOCH.
fameux livre d'Henoch, que Pelresk fit venir d'Egypte a si
grands frais.
Conclusion De tout ce que nous avons dit jusqu'ici , on peut con-
de ceiie Dis- clure : i"qu'Henoch n'ecrivit appareniment jamais aucun
sertaijon. Jiyre , du moins que tous ceux que I'on nous cite sous son
noni ne sont certainement pas de lui. 2" Qu'il n'est pas
certain si saint Jude a tire le passage qu'il cite sous le nom
d'Henoch du livre dont nous avons des fragmens , ou si
Tauteur de ce livre apris occasion du passage cite par saint
Jude de composer son ouvrage. 3° Que ce livre n'a ete
ecrit que depuis la ruine du temple de Jerusalem par les
Romains, etapres I'an 70 dei'erc chret. vulg. 4° Quel'au-
teur etoit un Chretien converti du Judaisme , qui pourroit
hien etre le meme qui a compose le Testament des douze
patriarches. 5" Que cet ouvrage n'a jamais ele reconnu
pour canonique , ni par les Juifs , ni par les Chretiens.
G° Qu'il ne paroit pas meme bien assure que les Juifs Taient
connu , car leslivres d'Henoch, qui sont allcgues dans les
livres Zohar ex. lachasim , etdans quelques rabbins, parois-
sent assez differens de celui que les peres grecs et latins
ont cite. 7° Qu'il y a une tradition tres ancienne parmi les
Orientaux qu'Henoch est le premier auteur des livres d'as-
tronomie , et que c'est sur cela qu'on lui a attribue tant de
livres composes depuis sur celte matiere. 8° Enfin que le
livre d'Henoch apporte d'Ethiopie en Egypte est nouveau,
et ne merite qu'un souverain mepris.
EPITRE CATHOLIQUE
DE SAINT JUDE.
CHAPITRE UNIQUE.
Gombaltre pour la foi et pour la tradition. Exemples de la justice de Diea.
Faux docteurs caractcrises. Coatestalioa touchant le corps de MoTse. Pro-
phelied'Henocb. Foi, priere, confiance, amour de Dieu, hainede la chair.
1. JcDAS, Jesu Christi
servus, frater autem Ja-
cob! , his qui sunt in Deo
Patre dileclis , et Christo
Jesu conservatis, et voca-
tis :
2. Misericordia vobis,
et pax , et charitas adiin-
pleatur.
5. Charissimi , omnem
sollicitudinein faciens
scribendi vobis de com-
muni vestra salute , ne-
c^sse habui scribere vo-
bis: deprecans supercer-
tari semel traditae Sanctis
fidei.
4. Subinlroierunt enirn
quidam homines (qui olim
praescripti sunt in hoc ju-
dicium impii, Dei nostri
1. JcDE, serviteur de Jesus-
Christ, et frere de Jacques , a ceux
que Dieu le Fere a aimes, et que
Jesus-Christ a conserves par sa vo-
cation : '
2. Que la misericorde, la paixet
lacharile s'augmentent' en vous de
plus en plus.
5. Mes bien - aimes , ayant tou-
jours souhaite avec une grande ar-
deur de vous ccrire touchant le sa-
lut qui nous est commun ,' je m'y
trouve maintenant oblige parneces-
site, pour vous exhorter ' a combat-
tre pour la foi , qui a ete une foi
laissee par tradition aux saints.
4. Car il s'est glisse parmi vous
oertaines gens dont il avoit ete pre-
dit il y a long-temps qu'ils tombe-
roient dans ce jugement : ' gens im-
Y I . Pour les rendre las enfans adoptifs de Dieu , et participans de sa
gloire. — Ou plutot et selon le grec : a ceux qui ont ete appcles d lajbi/que
Dieu le Pere a sarictilies , el que Jesus-Christ a conserves.
y 2. C'est le sens du grec.
y 3. Litt. touchant voire commun salut. Quelques exemplaires grecs li-
sent: touchant notrc commun salut.
Ibid. C'est le sens du grec.
1^ 4- D'dtre abandonnes en ce monda aux egarcmens de leur esprit et de
leur cceur, et livrea dans I'autre aux flammei eternelles.
6o4
EPITRE DE SAIMT JUDE.
pies, qui changent la grace de notre
Dieu ' en une licence de dissolution,
et qui renoncent Jesus-Christ notre
unique maitre, notre Dieu,'et notre
Seigneur.
5. Or, je veux vous faire souve'
nir de ce qu'autrefois sans doute
vous aurez appris,' qu'aprfes que le
Seigneur Jesus ' eut sauve le peuple
d'lsracl, en le retirant de I'Egypte,
Num. XIV. il fit perir ensuite ceux qui furent
^1- incredules.
6. Et qu'il retient lies de chaines
eternelles dans de profondes tene-
bres , et qu'il reserve pour le juge-
ment du grand jour ' les anges qui
n'ont pas conserve leur premiere
dignite , uiajs qui ont quitte leur
propre demcure:
Ge/t. XIX.24. r>. Et que de meme Sodome et
Gomorrhe, et les villes voisines qui
s'ctoient debordees commes elles
dans les cxces d'impurele , et s'e-
toient portees a abuser d'une chair
etrangere,' sont devenues un exem-
pledu feu eternelpar la peine qu'el-
les ont souITerte. "
8. Apres cela neanmoins,ces hom-
mes' souillent la chair par de senibla-
bles corruptions, et ils meprisent la
domination, etinaudissent ceux qui
sont eleves en dignite. '
gratiam transferentes in
luxuriam , et solum Do-
minatorem et Dominum
nostrum Jesum Christum
negantes.
5. Commonerc autem
vos volo , scientes semel
omnia , quoniam Jesus
populum de terra iEgypti
salvans , secundo eos qui
non crediderunt, perdidit:
6. Angelos vero , qui
non servaverunt siium
principatum, sed derelin-
querunt suum domici-
lium, in judicium magni
diei, vinculis ajternis sub
caligine reservavit :
7. Sicut Sodoma , et
Gomorrha, et finitimaeci-
vitates simili modo exfor-
nicalaj, et abeuntes post
carnem alteram , factae
sunt exemplum ignis ae-
terni, poenam sustinentes.
8. Similiter et hi car-
nem quidem uiaculant ,
dominationem autem
spernunt, majestatem au-
tem blaspheniant.
2 , etc. Br
■5^ 4. La liberie de son Evaogile.
Ibid. Ce niol esl Jans le grec: 6eov.
y 5. C'esl le sens du grec.
Ibid. Le grec lit simplement: qu'apres que le Seigneur eut sauve ,
nom de Jesus mis ici dans la Vulgate , signilie Sauveur, et peut ici s'entcndre
du Verbe , qui depuis son incarnation a pris le nom de Jesus.
■jr 6. Voyez la Dissertation sur les bons et mauwais anges , torn. xix.
Ibid. En se revoltant centre Dieu.
j^ 7. Par un crime abominable dent parle saint Paul , Piom. i. 27.
Ibid. Ayant ete consumees par une pluie de feu et de soufre que Dieu fit
lomber du ciel , et souffrironl eternellement dans le feu exterieur, c'est-a dire
de I'enfer.
y- 8. Grec : se l^issant aller a leurs reveries.
Ibid. C'est le sens du grec. Lilt, blasphement la majeste: selon les uns,
les aatoriles de la terre ; selon d'aulres , la majesty dc N. S. J.-C.
(HA
9. Cum Michael archan-
' lus cum diabolo dispu-
..ins altercarelur de Moysi
t orpore, non est aususju-
dicium inferre blasphe-
mia? : sed dixit : Imperet
tibi Dominus.
10. Hiautera,quaecuin-
que quidem ignorant, bias-
phemant : quaecumque au-
tein naluraliter, taraquara
muta animalia, norunt, in
his corrumpuntur.
1 1 . Vae illis, quia in via
Cain abierunt , et crrore
Balaam mercede effusi
sunt, et in contradictione
Core perierunt.
13. Hi sunt in epulis
suis maculae, convivantes
sine timore, semeiipsos
pascentes, nubes sine a-
qua, quae a ventis circum-
feruntur, arbores autum-
nales , infructuosae , bis
mortuae, eradicatae,
i3. Fluctus feri maris,
despumantes suas confu-
siones, sidera errantia :
PITRE IMQLE. 6o5
g. Cependanl i'archan^e Michel, Zach. m. 2.
dans la contestation qu'il eut arec
le diable, touchant le corps deMoIse,'
n'osa le condamner avec execration ;
mais ' il se contenta de dire : Que
le Seigneur te reprime. '
10. Au lieu que ceux-ci condam-
nent avec execration tout ce qu'ils
ignorent, et se corrompent en tout
ce qu'ils connoisscnt naturelle-
ment,'comme les betes irraisonna-
bles.
1 1. Malheur sur eux, parce qu'ils ^^"- ^- ^■
suivent la voie de Cain,' et qu'etant
trompes comme Balaam, et empor-
tes par le desir du gain,' ils s'aban-
donnentauderefflement, et qu'imi- ,.
tant la rebellion de Core , ils pen-,
ront comme lui.
12. Ces liommes-la sont le des-
honneur des festins de charite , '
lorsqu'ils y mangent avec vous sans
aucune retenue: ils n'ont soin que
de se nourrir eux-memes ; ce sont
des nuecs sans eau, que le vent em- a- Pet.n. 17-
porte ca et la ; ce sont des arbres
qui ne fleurissent qu'en antomne, '
des arbres steriles , doublement
morts et deracines.
i5. Ce sont des vagues furicuses
de la mer, d'ou sortent, comme une
ecume sale, leurs infamies : ce sont
Num. xTii.
23.
■f 9. Quecetespril de malice vouloitdccouvrir aupeuple juif pour le porler
il lui rendre des honneurs divins, — Voye2 la Di'sseruttiou suj- la inert et In
sepulture de Molse , torn. it.
Ibrd. Respeclant en lui raulorite dont il avoit ^le revetu.
Ibid, C'esl le sens du grec : ii:'.~iu.r,<sxi.
y 10. Suivant les mouvemens de leurs passions.
•^ n. Qu'ils rimilent dans son envie.
Ibid. Comme ce faux prophete.
Ibid. Par leur rcrolle con Ire Dieu et contre son t^iise.
Ibid. Scront de m^me enserelis dam les enfers.
J la. Grec : de vos festins.
Ibid. Aulr. des arbres d'automne , y«i n'ont que desjeuilles.
EPITRE DE SAINT JUDE.
606
des etoilcs errantes/auxquelles une
tempete noire et tenibreusc est re-
servee pour I'eternite.
Apoc. I. 7. 14. C'est d'eux qu'Henoch, qui a
6te le septieme depuis Adam, apro-
phetise en ces lerrncs : ' Voila le
Seif;neurqui va veniravec unemul-
tilude innombrable de ses sainls,
i5. Pour exercer son jugement
sur tous les liommes , et pour con-
vaincre tous les iinpies " de toutes
les actions d'impiete qu'ils ont com-
niises, et de toutes les paroles in-
jurieuses que ces pecheurs impies
ont proferees contre lui.
16. Ce sent des murmurateurs
qui se plaignent sans cesse, qui sui-
Ps. XVI. 10. vent leurs passions , dont les dis-
cours sontpleins de f'aste et de va-
nile, et qui se rendent admiraleurs
des personnes , selon qu'il est utile
pour leur inieret.
17. Mais pour vous^ mes biens-
x.Tim.w.i. aimes, souvenez-vous ' de ce qui
a. Tim. ni. i. a ele predit par les apotres de notre
^.Pei. III. 3. Seigneur Jesus-Christ,
18. Qui vous disoientqu'aux der-
niers temps il s'eleveroit des im-
posteurs , qui suivroient leurs pas-
sions dereglees etpleines d'impie-
tes.
ig. Ce sont des hommes qui se
separent eux-memes, 'hommes sen-
suels'qui n'ont point I'Esprit de
Dieu.
quibus procella tcnebra-
rum serVala ei<t in octer-
num.
\[\. Prophetavit autem
et de hisseptimusab Adam
Henoch, dicens: Ecce ve-
nit Dominus in sanclis
millibus suis.
i5. Facere judicium
contra omnes , et arguere
omnesimpios de omnibus
operibus impielas ecrum,
quibus impie egerunt , et
de omnibus duris, quae lo-
cuti sunt contra Deum
peccatores impii.
16. Hi sunt murnuira-
t ores querulosi, secundum
desidei ia sua ambnianles,
et OS eorum loquitur su-
perba, mirantes personas
quaeslus causa.
ir, Yos autem, charis-
simi, memores estote vcr-
borum quae praedicta sunt
abapostolis Domini noslri
Jesu Christi,
18. Qui dicebant vobis,
quoniam in novissimo
tempore venienlillusores,
secundum desideria sua
ambulanles in impietali-
bus.
19. Hi sunt, qui segre-
gant semelipsos , anima-
les, Spirilum non haben-
tes.
•j^ 1 3 . Cela peut s'enlendre de ces meteores enflammcs qui apres avoir paru
quelque temps dans I'air, se dissipent.
•jj- 1 4. Yoyez la X>«'s5< nation sur le li\>re d' Henoch, a la t^te de celle^pitrc.
y^ i5. Grec: tous leurs impies, c'et-a-cire tous les medians d'enlre eux.
>^ 1 7. Si vous eles surpris de voir des horami'S si corrompus sorlir du sem
derfiglise.
y 19. lis se separent du corps de Jesus- Christ parle schisme qu'ils for-
ment dans I'Eglise.
Ibid. Lilt, des hommes d'une vie animale.
CHAPITRE UNIQUE. 607
20. Vosaulem, charis- 20. Mais vous , mes bien-aimes,
siini , superaeilificantes vous elevant vous-mfimes coinme
vosinetip.sos sanclissimae un edifice spiriluelsurle fondement
veslrae fidei , in Spiritu de voire tres sainte foi,et piiant par
saiiclo oranlcs, le Saint-Esprit,
21. Vosmelipsos in di- 21. Conserver-vous en i'anttour
leclione Dei servate, ex- de Dieu , attendant la misericorde
pectanles misericordiam de notre Seigneur Jesus - Christ,
Domini nosti i Jesu Christi pour avoir la vie eternelle.
in vitam aelernam.
22. Et hos quidem ar- 22. Reprenez ceux - ci apres les
guite jiidicatos : avoir convainous ;
20. Illos vero salvate, 20. Sauvez ceux-Ia , en les ti-
de igne rapientes. Aliis rant du feu.' Ayez compassion des
autera miseremini in ti- autres , ' en craignant pour vous-
more : odientes el earn, memes:' et haissez comme un vele-
quae carnalis est, macula- ment souiile tout cc qui tient de la
tarn tunicam. corruption de la chair.
24. Ei aulem quipotens 24. A celui qui est puissant pour
est vos conservare sine vous conserver sans peche, e't pour
peccato , et constiluere vous faire comparoilre devant le
ante conspectum gloriae trone de sa gloire purs et sans ta-
suae immaculatos in exul- che, et dans un ravisseraent de joie,
talione in adventu Domini a Tavenement de noire Seigneur Je-
noslri Jesu Christi; sus-Christ;'
25. Soli Deo Salvatori 25. A Dieu seul notre Sauveur
nostro per Jesum Chris- par notre Seigneur. Jesus - Christ,
turn Dominuni nostrum , gloire et magnificence , empire et
gloria et magnificenlia , force, avanttous lessiecles etmain-
imperium et potestas ante tenant, et dans tous les slecles des
omne seculum, et nunc et siecles. Amen.'
in omnia secula seculo-
rum. Amen.
y a3. Des flainiues de I'enfer ou ils semblent ^Ire dcja par leur endurcisse-
ment et leur malice.
Ibid. Qui sonl dans raveuglement el dans I'erreur.
y aa. et23. Le grec lit : Ayez pilie des uns, usanl de discememenl^our
les ramener avec douceur; sauvez les autres en leur iuspiraiu de la crainle .
el les tirant^coinme du feu : el haissez, etc.
•i 24. Ces mols , 7/1 adventu Domini nostri Jesu Christi, ne sont pas dans
le grec, ni meme dans quelques exemplaires latins ; ils paroissent pris de la
i" ep. aux Tbess. 111. i3.
y^ q5. Le grec lit simplement : A Dieu notre Sauveur, qui est le seul sage,
soil gloire et magnificence , force et empire , maintenant et dans tous les sie-
ves. Amen.
Les exemplaires grecs portent ici : I'epitre catholique de Jude de 7 1 verseU.
FIN DD VINGT-TROISIEME VOLUME.
TABLE DES MATIERES
CONTENUES DANS CE VOLUME.
Preface sur la premiere epitre de saint Paul auxThessa-
loniciens i
Premiere epitre de saint Pacl Atx Thessaloniciens 1 1
Preface sur la deuxieme epilre aux Thessaloniciens 25
Dissertation sur I'Antechrist 4'
Decxieme epitre de saint Paul aux Thessaloniciens io5
Preface sur la premiere epitre a Timolhee 1 13
PREMliiRE epitre DE SAINT PauL A TiMOTHEE 122
Preface sur la deuxieme epitre a Thimothee i4i
Deuxieme epitre de saint Paul a Timothee i47
Preface sur Tepitre a Tite 161
Epitre de saint Paul a Tite 17$
Preface sur I'epitre a Philemon i83
Epitre de saint Paul a Philemon 194
Preface sur I'epitre aux Hebreux 198
Epitre de saint Paul aux Hebreux 5o6
Preface generale sur les epitres canoniques 56o
Preface sur I'epitre de saint Jacques ^ 365
Epitre de saint Jacques , ^74
Prefiice sur la premiere epitre de saint Pierre 5g2
Dissertation sur le voyage de saint Pierre a Rome SgS
Premiere EPiTRF, de saint Pierre 4i9
Preface sur la deuxieme epitre de saint Pierre 4^7
Dissertation sur le systeme du monde selon les anciens
Hebreux 44^
Dissertation sur la fin du monde 47*
Deuxieme epItre de saint Pierre 5o4
Preface sur la premiere Epitre de saint Jean 5i5
Dissertation sur le fameux passage de la premiere epitre de
ssixnt Jean : Tres sunt qui testimonium dant, etc 5 19
TABLE DES MATI&RES. 6 I I
PhEHIEBE ipiTRB DE SAIIIT JbAIT 545
Preface sur la deuxi^me ^pttre de saint Jean 564
DeVXIEME EPITRE OB SAIITT JbAN 569
Preface sur la troisi^me epitre de saint Jean. ....... 5^3
TbOISIEME EPITBB DBSAlITr Jban 575
Preface sur I'epitre de saint Jude 5^8
Dissertation sur le lirre d'Henoch 583
Epithb de saint Jude 6o5
FIK DE LA TABLE DES HATIEBES.
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