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BULLETIN
1CIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DU FINISTÈRE
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SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU FINISTÈRE
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4877-1878
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IHPBIMBRIE CAEW. — A. JAOUBN, SUCC*.
1877-1878.
LISTE GÉNÉRALE
DBS
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MEMBHES DE LA SOCIETE ARCHEOLOGIQUE
DU FINISTÈRB, EN 1877.
Président: M. le Vicomte Th Hebsabt de là Ville -
marqué, membre del'lnstiiiu.
(M. l'abbé F. du Màbchallac'h, vicaire
général de Pévêché.
M. F. Audran, notaire à Quitnperlé.
MR. -F. Le Mbn .archiviste du Finistère,
directeur du Musée départemental
Secrétaires <„,.,.
d archéologie.
M. V. DE MONTIFAULT.
Trésorier : M. Créachcadic, Antoine, rue Saint- Fran-
çois, a Quimper.
MM.
L'abbé Abgrall, professeur au collège de Pont-Croix.
Affichabd, fils, propriétaire a Quimper.
ÀLàvoirre, Joseph, adjoint au maire de Quimper.
Alavoipœ, propriétaire à Quimper.
àsher, libraire, Mohrenstrasse, 53, h Berlin (Prusse).
àstob, maire de Quimper.
Ayràult, procureur de la République, à Lannion.
Bahezre db Lahliy, garde général des forêts à Landerneau.
Babbb, notaire à Moëlan.
L'abbé Bayec, aumônier de l'hospice de Morlaix.
— ft _
MU.
Bigot, architecte du département.
Bigot, architecte diocésain.
Binet, vétérinaire à Quimperlé.
M me De Blois, au château de Poulguinan, près Quimper.
De Blois, «Xavier.
Le Bolloc'h, juge suppléant à Morlaix.
Bolloré, Alexandre, négociant, rue des Reguaires, à
Quimper.
Bollobé, Eugène, négociant à Quimper.
Borelli, avocat, à Quimper. *
BoiiRRAssiii, membre de plusieurs sociétés savantes, à
Quimper.
Cte de Brénond d'Ars , au château de la Porte-Neuve,
commune de Biec.
De Brbmoy, directeur du télégraphe à Quimper.
Briot de la M allé rie, président de la Société d'Agricul-
ture de Quimper, à Penhars.
Caen dit Lion, imprimeur à Quimper.
Canvel, professeur, a Quimper.
De Carné, Edmond, à Quimper.
De Ghabre, avocat à Quimper.
De Chamaillard, fils, avocat à Quimper.
Cte de Ch au veau, propriétaire au château de Keriolet,
à Beuzec-Conq.
Clairet, imprimeur à Quimperlé.
Cloarec, greffier du tribunal civil de Quimper.
Le docteur Coffec, à Quimper.
Colomb, ancien conseiller de préfecture, à Quimper.
Cormier, avocat à Quimper.
De Courcy (Poi), à Saint-Pol-de-Léon.
— 7 —
MM.
C#zic, chef de division à la préfecture.
Dànguy des Déserts, notaire à Daoulas.
Le Déliou, ancien notaire, à Pont-l'Abbé.
De vaux, lieutenant au 1 18 e régiment d'infanterie de ligne,
àQuiniper.
Le Doze, propriétaire en CloharsCarnoët.
Dubois Saint -Sbvrin, commis de direction des postes.
Dufeigna, Jules, à Quimper.
Duval, conservateur des hypothèques à Morlaix.
Fatv, major en retraite, à Quimper.
Fautbel, pharmacien à Quimper.
Flagelle, expert-arpenteur, à Landerneau.
Fougeray, membre du conseil municipal, à Quimper.
FooLLioy, amiral, major général à Toulon
Fourier, commandant de gendarmerie, à Quimper.
Friele, propriétaire à Quimper,
Frochfn, fils, négociant à Quimper. >.
Frollo de Kerlivio, employé des contributions indirectes,
à Ghàteaulin.
H. Gaidoz, directeur do la Revue Celtique, à Paris.
Le Gal Lassalle, sous-préfet de Ghàteaulin.
Gaubert, membre du conseil général, à Carhaix.
Le Goarant de Tromelin, au château de Rossulien, com-
mune de Plomelin.
Gorvan, avoué à Quimper.
De Gorrort, Arthur, au château de Kerbernez, commune
de Plomelin.
Govin, François, rue des Reguaires, à Quimper.
De Go y, Stephen, avocat à Quimper.
Du Grand l acn a y, propriétaire à Vannes.
MM.
L'abbé Guéguénou, wcieûf de Saim-Marlîft de Morlàii
Ghebbeuk, avoué à Cbaieaalin.
L'abbé Guillard, à Quimper.
Le GuiLLou-PfifiiHfios, membre du conseil général, à
Doua menez
Le Guillou-Penatoios, juge à Brest.
Le Gwllou-Peïunbos, Gustave, négociant, à Concarneau.
Le Guillou-Pbbanros, Hippolyte, négociant, à Concarneau.
Guitot, négociant à Quimper, membre du Conseil Muni-
cipal.
Guyho, député à l'Assemblée nationale.
Le docteur Halléguen, à Chat eau lin.
Héhon, Louis, député à l'Assemblée nationale
Hémon, Prosper, à Quimper.
Hénon, notaire à Quimper.
De Jacqielot, Louis, à Quimper.
De Jacquelot, Joseph, à Quimper.
Jamet, propriétaire à Château! in.
L'abbé Jégou, vicaire général de l'évêché, a Quimper.
Jégou, juge de paix, à Lo tient.
Jôrt, négociant à Bordeaux.
II. De KfiHRET, au château de Quillien, commune de
Bras parts.
C. De Kerret, à Gouesnac'h.
De Kerjégu, Louis, maire de Saint-Goazec.
L'abbé Kbrlan, recteur de Plouzané.
L'abbé de Kernaéret, Université catholique de Lille.
Lacoste, membre du Conseil général, à Châteaulin.
Lamarquë, Robert, Champ de Bataille, à Brest.
De la Lande de Cala*, teafr e & TVégUftc, 6 Qfcitopè*.
— —
MM.
LAPLACE,avoar,rnedû Chapeau-Ronge, à Quiwpèr.
Do Laurens de la Barre, ancien officier de Aarma, a
Quitnper
Lavieille, professeur de rhétorique au collège de Quimper.
Dr L écluse, Amédée, conseiller général, à Àtidicrhe.
Lemaigre, directeur de la compagnie Lt Finistère, i
Quimper.
Livanbn, avoué à Quimperlé.
Loarbr, agent- voyer en chef des chemins vicinaux.
Lorans, avoué a Quimperlé.
Malen, professeur à Quimper.
Malherbe de la Boissièbe, à Er gué- Armel.
De Mauduit, membre du conseil général, à Riec.
Le Moalligou, docteur-médecin, à Quimperlé.
More au, Stanislas, à Quimper.
Le Moynb, rue de Rome, 52, à Paris.
Le Nir, ancien directeur des Domaines, à Quimper.
Le Noble, rue Saint-François, 2, à Quimper.
M* r Nouvel, evéque de Quimper et de Léon.
De Pascal, propriétaire à Plomeur.
Pastol, notaire à Quimper.
Pavot, sous-intendant militaire, à Quimper.
Du Perrat, propriétaire à Quimper.
Pbyrok, propriétaire à Quimperlé.
L'abbé Peyrou, secrétaire del'évéché.
Pocard-Kbrviler , ingénieur des pàms-et-ohatts&ées h
Saint-Nazaire.
L'abbé Postic, recteur de Plonévez-Porzay.
E. Puyo, maire deMorlaix.
Puyo, architecte à Morlaiz.
— 10 -
MM.
L'abbé Quémereur, curé de Sainte-Croix, à Quimperlé.
Quiktin de KercAdio, capitaine de gendarmerie à Quimper.
De Raismes, sénateur.
Richard, préfet honoraire du Finistère, à Quimper.
Richard, Amédée, receveur de l'enregistrement à Château lin.
Richard, juge de paix à Quimperlé.
Le Rodallec, juge de paix à Fouesnant.
De Rodellbc, au château du Perennou, commune de Plo-
melin.
S. Ropartz, avocat à la Cour d'appel de Rennes.
Rossi, propriétaire à Quimper.
Roussir, propriétaire à Plomelin.
Roumain de la Touche, ancien procureur impérial.
Le Roux, membre du Conseil général, à Landivisiau.
Le Rouxbau de Rosencoat, membre du Conseil général à
Elliant.
De S aïs y, Paul, à Plounévezel.
De Saint- Georges, propriétaire à Melgven.
Vte de Saint-Luc, au château du Guilguiffin, commune de
Landudec.
Serret, propriétaire k Quimper.
De Solminihac, propriétaire à Névez.
Sotidry, avoué à Quimper.
Surrault, inspecteur d'Académie honoraire, à Niort.
Henry de Tohquedec, quai deTréguier, à Morlaix.
Toullemont, négociant auGuilvinec, enPIomeur.
Trévédt, président du tribunal civil de Quimper.
De Trogoff, Charles, à Coatalio, en Fouesnant,
De Trohenec, capitaine au 30 e régiment d'artillerie, a
Poitiers.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHEOLOGIQUE DU FINISTÈRE
SÉANCE DU 28 AVRIL 1877.
Présidence de M. AUDRAN, Vice-Président.
Étaient présents : MM. Audran, Trévédy, Serret,
de Brémoy, de Chabre, Laurent, Pavot, Faty, deGoy
Malen, Créac'hcadic, et Le Men, secrétaire.
M. le Président informe rassemblée que M. de la
Villemarqué retenu par une indisposition, n'a pu se
rendre à la réunion. Il ajoute que notre honorable
président a entretenu récemment le Comité des tra"
vaux historiques de l'affaire Duchatellier, et qu'il fera
part lui-même de son entretien à la Société.
M, Le Men a la parole pour lire un travail sur
LE DOMAINE DUCAL DE MOBLAIX EN 1465.
Par son ordonnance du SI mai 1455, le duc de Bretagne
Pierre II prescrivit aux conseillers de sa Chambre des comptes,
de procéder sans retard à la réformation des domaines de son
duché. A celle On Morice de Kerloaguen, conseiller et l'un des
présidents des comptes, maître Guillaume Kergouet, conseiller
de la même Chambre et membre du parlement, et Henriet Le
Saux, secrétaire et auditeur des comptes, furent nommés com-
missaires pour les domaines ducaux situés dans les évêchés de
Tréguier, de Léon el de Cornouaille. Us commencèrent leurs
— 12 -
fonctions par le domaine de Morlaix, le 8 juin 1455, en pré-
sence de Tanguy de Kersulguen, bailli de Morlaix, Pierre Le
Maraot, receveur des mêmes lieux, et Jehan et Guillaume de
Kerloaguen, après s'être adjoint, corame experts, Olivier de la
Forest, Guillaume Guischoux et Jehan Nycoias. C'est du procès-
verbal qui fut dressé à celte occasion que j'extrais les rensei-
gnements qui vont suivre.
Le domaine de Morlaix auquel celui de Lanmeur avait été
annexé, longtemps avant ta réformai ion de 1455, se composait
dune partie rurale, dont je n'ai pas rinleution de m 'occuper ici,
et d'une partie urbaine qui comprenait la ville close de Morlaix
et ses faubourgs au nombre de trois, savoir : le faubourg de
Saint-Mahé ou Saint-Mathieu, le faubourg de Saint- Mélaine,
et le faubourg de Saint-Martin. Ces trois faubourgs corres-
pondaient aux trois paroisses de Morlaix, dont une, Saint Martin
était dans l'évêché de Léon, et les deux autres dans Vévêchë
de Tréguier.
Lès revenus que percevaient le§ ducs, dans cette vitoe,
étaient compris sons la dénomination de domaine non rmrabte,
composé de cfteirenles assises sur des maisons et des coûrtiîs,
ëtéhdottiaine muablè, qui consistait dans la perception dé
droits établis sur >e3 marchandises et les denrées exposées en
fente dans les foires et dans les marchés.
Voici rénumération, par quartiers, des rues dans lesquelles
se trouvaient des maisons sujettes & payer an duc une rede-
vance annuelle :
1° Dans ta ville close de Morlaix i
La rue de (a Cohue.— G'esl dans cette rue qu'était la halle
de Morlaix.
La rue des Fèvres, près la porte du Marcheix.
La rue de Bourret.— Elle se prolongeait hors de la ville
dose, dans le faubourg de saint Martin, par le pont deBourret.
Vue dé ëes maisons, située près la porte du même nom et h
tWêfre Gwfflet {QueffkHt) qui servait d* douta à la vilfcetosè,
~ l» -m.
appartenait à Jehan Forge L II devait de chefrente w 4«c, fe to
Circoncision, une paire d'éperons dorés, app^çiée 2S sous
monnaie.
Il y avait aussi, dans la ville close dç Morlaix, un cowtil
près « la Valye~au dessoubz le Chaste) dudit Mourlaix, entre le
« mur 4b ladite Valye, d'un çoslé et la dite Valye d'aultre t et
« férant d'ung bout sur la cour dudit chastel.»
Ce mot Valye ou Valye est assez souvent employé en breton,
pour désigner un lieu fortifié et son origine doit être l )q même
que celle du latin vallum.
Dans le faubourg de Saint-Martin :
La rue de Bo^rret. — C'était le prolongement de la précé-
dente. Cette rue établissait la communication entne l'é^êçhé
de Léon et celui de Tréguier, en passant par la vill$. clo$e ; de
Morlaix. On percevait, pour ce passage, comme on le versa
plus loin, certains droits sur les marchandises,
Dans le faubourg de Saint- Mathieu, plus souvent appelé
faubourg du Marcheix ou du vieux Marcheix :
La rue de Tnoulenn, aujourd'hui Traonlen.
La rue de Myloine,
La rue des Fèvres, qui se prolongeait dans Hnléri^ur de la
ville close.
La rue de Verderel, menant de la rue de Tnoulenn au Parc
du duc.
La rue on ruelle menant de la Croix au lait au vieux
Marcheix.
La rue menant de h Croix au lait à Tnoulenn.
La rue. de SaiuL'Mahé ou de Saint-Mathieu.
La rue menant de la rue des Fèvres au Marcheix.
La place du vieux Marcheix.
Une des portes de la ville close portait lç nom de porte du
Marchei^. Ce. faubourg s'étendait jusqu'au Parc au. duc qui,
comme les autres parcs ducaux, était entouré de murs, et dçnt»
la contenance, était, en 1455, de 1-0 qrpents en tgçre : chaude.,
— H —
de 66 arpents en terre susceptible d'être cultivée, de 2 arpents
m landes et bruyères, et de 412 arpents en bois exploitables
de dix -hait ans en dix-huit ans.
Dans la paroisse de Satnt-Melaine :
La rue de Saint-Melaine.
■»
La rue de Notre-Dame de la Fontaine, anciennement nom-
mée rue du vieil Hôpital.
La rue des Vignes. — Il s'y trouvait une fontaine à laquelle
on accédait par un escalier.
Lame de Ploujean. — L'hôpital y était situé. C'est dans
cette rue que demeurait Jean Lagadec, probablement l'un des
auteurs du Dictionnaire breton appelé le Calholicon, qui tut
imprimé à Tréguier en 1499.
La rue Berre.
Il y avait dans ce faubourg, une barrière appelée la barrière
de la porte de « la Rive de Mourlaix, près et jouxte le havre
« dudit lieu et le pont nommé Poni-an-Pichon. »
Le sire du Pont, à cause de sa femme, dame de Rostrenen
et du Pont, devait au duc, par an, 10 livres monnaie de cbef-
renle, à la Toussaint, sur les ruines de deux maisons el sur
une tour « faisant le coin du mur de la ville de Morlaix,près la
porte appelée la porte de la Rive, enire cette porte et la rivière
d'un côté, et la maison Jehan Goezbriand,^ donnant lesdites
deux maisons, d'un bout sur la rue menant du Pavé à ladite
porte de la Rive, et de l'autre bout sur ladite tour. »
- Outre les chefrentes mentionnées ci dessus, et qui se payaient
au 1 er janvier de chaque année, il était dû au duc, une autre
redevance annuelle appelée la censie ou demande d'août. Elle
s'élevait à 30 livres 1 8 sous, qui se payâientau receveur du duc, par
la main du sieur de Coetelez,voyer et sergent féodé deMorlaix,
qui en faisait la recette sur les habitants de la ville close et des
faubourgs de Saint-Mahé, Saint-Melaine et Saint-Martin, et sur
ceux de Tnoublouchou, tenant feu et lieu. Pour en établir le
rôle, le receveur du duc, iuvitait, le premier dimanche d'août,
— 15 —
les habitants à choisir entre eux des délégués pour faire l'égail
de cette imposition. Ce choix devait avoir lieu dans l'espace de
huit jours, après quoi les égailleurs faisaient la répartition de
la somme de 30 livres 18 sous, et en plus, de la huitième partie
de cette somme, pour le salaire du voyer, qui en faisait la
cueillette, et pour payer une indemnité raisonnable aux répar-
titeurs. Et lorsque quelqu'un porté au rôle ne voulait pas payer,
le receveur avait recours vers les paroissiens et égailleurs qui
étaient tenus de faire un égail bon et solvable.
Je viens de citer le nom du voyer de Morlaix. Lorsque quel-
qu'un était condamné par la justice de celte ville à souffrir
mort ou punition corporelle, il était aussitôt en la garde du
sieur Coclelez, prévôt et voyer, qui devait faire exécuter la sen-
tence à ses propres coûts el dépens «excepté que le duc devait
faire la mise de dreczer la juslicze patibulaire avec des
eschelles, gans fgons), chevestreset cordaiges. •
Tanguy de La Haye, et ses consorts, devaient sur les poids de
Morlaix « qui estoint leur propre héritage,» six sous de chefrente
au terme du 1 er janvier.
« Et prennent de debvoir à cause desdites balances sur
chacun cent MivresJ de fer, plomb, estain, suiff et aullres den-
rées et marchandises qui sont poysés èsdiles balances des de-
mourans en la ville et es bonnes (bornes;, dudit lieu de Mour-
laix, deux deniers par chacun cent, et au dessoubz de cent
livres à Tafferant obole à la livre. » (1)
Les revenus du domaine muable ou casuel, que le duc per-
cevait dans la ville et dans les faubourgs de Morlaix, étaient
nombreux et variés. En voici rénumération complète, que je
reproduis d'après une copie de la réformation de 14.15, faite à
Morlaix eh 1557, par Hervé Bellavenne. Comme la livre de
Bretagne, en 1455, représente environ 30 francs de notre mon*
naie, on pourra se rendre compte de la valeur des droits énu-
1) L'obole valait un demi denier.
ffiêréa ci-dessous» en multipliant 'par 30 le chiffre de cb* que
article. On trouvera ainsi qu'uoe'marehandise taxée à un denier
eo 1455, paierait aujourd'hui, dans les mêmes conditions,
12 centimes et demi, et qu'une denrée évaluée à un sou, vaudrait
maintenant 1 fr. 60 cent,
« Demaine muajmb en ladite recepk et ckastetenye de Mour-
lafa, wavair le* fermes et toute aultres choies qui se baillent
par ferme que croissent et diminuent et se payent par les quar-
tiers de Tan ainsi quilz esche en t. »
« Et premier : ensuivent les debvoirs et coustumes débits- au
due en ladite ville de Hnurlaix, à cause de cohuaige (I ;, quel
cohuaige est départy m cinq fermes particulières cy amprés
déclarez.
« BT PRBHŒa ; LA COUSTOMB JHJ *AHf ET DE LA CHAIR. »
« Le duc prent à cause de la coustume du pain et de la
chair, que ont accousturaé estre baillez eosemblement en une
ferme en ladite ville de Mourlaix, chacune seprçaine, sur tpuz
boullangiers et boulangères, et aultres personnes vandans et
exposans pain en vante en ladite cohue et es placées accous^
tumées à vendre pain en ladite ville, fauk bourgs ^t bounnes (2)
d'icelle, ung denier de (chaque) charge de pain que font et
cuyssent chacune sepmaine, en cas qu'il soyt vendu ; mais si
ainsi estoit que lesdits boullangiers ne pourroint vandre ledit
pain, dont ilz auront poyé le debvoir celle sepmaine, et qu'il
démouroyt jusques à raullre'sepmaine, ilz ne sont tenuz de
poyer en plus large que ung denier à cause dudit pain, véri-
fiant que la chose soyt vraye et sans fraulle ; mais ce nonobstant
si lesdits boulangiers fournéenj et Font pain froy frais), la
seconde sepmaine, et le vendent, ils en poyronl ledit debvoir,
T T . ' . T-
(1) Ce mot vient de cohue, qui signifie halle» Le droit de cohuage
était analogue au droit d'étalage moderne.
(2) Bornes, limites.
— 17 —
à cause dûdit pain froy, le meelant et exposant en vente en
ladite ville et faulx bourgs es lieulx et placzes accoustumez. *
« Et lés boulangers qui sont demourantz sur champs (1),
hors ladite ville et faulx bourgs, doybveut et poyenl au duc,
sur chacune charge de pain qu'ilz vendent en ladite ville e*
faulx bourgs d'icelle, ung denier par charge.
« Et touz bouchiers, soynl de ladite ville et bounnes d'icelle
ou dehors, qui exposent ou vendent chair en icelle ville doyvent
et poyent, à cause dudit debvoir de cohuaige, pour chacun
beuff ou vache, deux deniers par piecze. »
« Pour chacun porc despeczé (2) et vendu par destaill en
ladite ville et faulx bourgs d'icelle, ung denier. »
a Item touz bouchiers, raarchanlz ou adirés, qui vendent
lart en ladite ville, en gros, doyvent pour chacun porc, ou cas
qu'il sçyt entier, ungdenier ; et s'ilz ne vendent que ung costé,
ilz doybvent pareillement ung denier pour chacun costé, si les
costez ne sont d'ung mesme (porc) ; ou quel cas ils ne poyront
que ung denier pour lesdits deux coslez d'une mesme beste,
quant ils sont venduz d'une mesme personne, mais si deux
vendent deuz costez, combien qu'ilz soint d'ung mesraes porc,
il est deu au duc, pour chacun costé, ung denier. »
« Item touz bouchiers, ou aultres, vendans en ladite ville et
es faulx bourgs d'icelle, moulons par gros ou par détaill, doy-
vent à cause d'icelle ferme, que est des debvoirs et despan*
dants dudit cohuaige, une obole pour chacun moutoun (sic). •
« LA COUSTUME DE LA VEBGE. *
« A cause de la ferme et coustume de la verge, qui est du
debvoir dudit cohuaige, prent le duc sur touz drappiers, estalez
en ladite cohue dudit lieu de Mourlaix, ou sabmadi (le samedi),
(1 )» Dan» la cartipagne.
(ï) Dépecé Les lettres t% réunies avaient au XV - et au XVI e siècle,
le son de deux $s. La cédille n'est autre chose qu'uu petit *, placé au-
deswu* du e.
2
— 18 —
sur chacun, ung denier par sepmaine, poyable h chacun sab-
madi ; et sont tenuz lesdits drappiers, en cas qu'ilz veillent
exposer leurs draps en vente en ladite cohue es jours desfoyres
et marchez. » (1)
« Item esl debu (du) sur touz cieulx qui exposent toelle en
vente par délaill en ladite cohue ou ailleurs en ladite ville, d'où
ilz ont accousluiné placzer pour vendre toellez ( toiles j (2) f à
jour de sabmadi, ung denier, fors et excepté ceulx ou celles de
ladite ville qui détaillent ladite toelle en leurs maisons ou do-
micilies, que n'ont accouslumé auchune chose eu poyer de
ladite coustume. »
« Item sy auchune personne expose en vente une piecze de
toelle, audit jour du sabmadi, en ladite cohue, et ailleurs en
ladite ville, ou es faulx bourgs d'icelle, contenant au dessoubz
de trante seix aulnes et non plus large, ladite piecze de toelle
vendue, il ne doibl poyer *que ung denier, et si no vend que
ung aultre (3), il en poyra pareillement ung denier, et si ladite
piecze de toelle contient trante seix aulnes et audessouS, le
devoir est debu à la ferme de la coustume de toelle qu'est unne
aultre ferme dont est faict mention cy amprès. »
a Item touz merciers estalautz au jour de sabmadi en ladite
cohue ou ailleurs en icelle ville et faulx bourgs d'icelle, doyvent
chacun d'eulx, à chacun sabmady, ung denier, excepté les
merciers de mourantz en ladite ville, esialantz en ladite cohue.»
« Item touz ceulx qui vendent draps de bureau (bure), en
ladite cohue, ou ailleurs en ladite ville ou es faulx bourgs, à
jour de sabmadi, doivent uog denier chacun, excepté ceulx qui
font leurs maisons et résidence en ladite ville et es faulx
bourgs. »
(0 Cette phrase ne parait pas complète.
(a; Dans nos titres du XV« et du XVl« siècle, on emploie indifférem-
ment le z ou l'« à la Un des mots pour indiquer le pluriel, ce qui
prouve que le % avait à cette époque une prononciation différente de
celle qu'il a aujourd'hui.
(3; Il faut lire probablement « aulne. »
— 19 —
« Item tonz ceulx qui vendent figues et raysins en ladite
ville et es faulx bourgs d icelle, soyt à jour de sabmadi ou
auttre, doybvent par chacun cabacz (I), ung denier »
« Hem tonz ciuulz qui achaptent miel en ladite ville, par
ruschiers, doybvent, par chacune ruches, ung denier, soyt à
jour de sabmadi ou aultre. »
« Hem touz marchanlz que establent (étalent), pour vendre
harancs blancs en ladite cohue ou ailleurs en ladite ville ou
fauh bourgs d'icelle, hors leur maison, doibvent chacun ung
denier la sepmaine, et est ce debvoir comprins en la ferme du
pain et de la cbayr. »
• Item ceulx que establent harancs solet fsaurets), en ladite
cohue ou ailleurs en ladite ville ou faulx bourgs d'icelle, doyb-
vent chacun un denier, à chacun sabmady. »
« Item ceulx qui establent et vendent sepmances et graines,
comme de pirisill (persil), oignons, porréeet aultres sepmances
de courlill, en ladite ville, doybvent à chacun sabmady qu'ilz vau-
dront lesdites sepmances et estableront, chacun ung denier. »
« Item ceulx qui achaptent cyre en tourteau ou par pieczes
si la vente passe douze deniers, doybvent pour chacun achapt,
ung denier ; et s'il y avoyt dix ou douze pieczes, ou plus,
jucques au poys de cent livre?, et que tout fut vandu soubz
un ne vente, n'est debu que ung denier. »
« Item pour charge de paniers, à cause de placzaige, est
debu ung denier. *
« Item touz marchanlz vandans fuseaulx, cuilliers, tamisiers
(tamisj, verges et fustz (manches) des fléaulx, doybvent de plac-
zaige^pour chacune somme (2), ung denier ou k un fust de fléau.»
« LA FERME ET COUSTDME DU POISSON. »
« A cause de ladite ferme et cousturae du poisson, qui est
du debvoir dudit cohuaige, est debu au duc sur chacun pois-
*
(1) Paniers ronds en jonc ou en sparterie.
(2) Charge de cheval.
- s»-
sonier forain que vend poisson froys (frais), en ladite villa* four
chacun (jour), ung denier. »
« El par les poyssoniers demourantz en ladite ville ou es
faulx bourgs d'icelle, pour chacune sepniaine, ung denier. »
« El si lesdils poissoniers forains admènent poisson, à vendre
en ladite ville, en basleau ou vaisseau, ilz debvent payer, à
chacune foys, chacun deux deniers ; et si les poissoniers de
ladille ville amènent du poisson à vaudre eu basteau, ils deb-
vent payer, par 'leste, pour chacune sepruaine, ung denier et
non plus laige. »
« Et si ungpoyssonnieraporieroyt à vendre desdites barques,
deux ou trois pochées ou plusieurs, jusques à une charge, il
doibt poyer ung denier, et non plus &U s'il n'a. que une
pochée, il doibt poyer pareillement ung denier. »
• 1A COUSTUME ET FEBME MB LA TOELLE. »
• Il est debu à cause de In cous tu me et ferme de la toelle,
sur chacune piecze de toelle que est vendu, contenant Crante et
seix aulnes de toelle et au-dessus Jacques a ung cent, ung
denier que doibt le vendeur, et par fardeau contenant cinq
cenlz aulnes de loelle, cinq deniers; et si ledit fardeau contient
en plus large (I) sera poyé par chacune piecze, que aéra en
oullre, contenant Iraut" et seix aulnes et au dessus, jucques
à ung cent, ung denier par piecze, el si tesdites piecze9 autre-
ment contiennent moins de vingt seix verges, le debvoir en est
debu à celluy que a la couslume de la verge rapportée cy
devant, et sont tenuz, les vendeurs de poyer et contenter les
fermiers de ladite couslume dudit debvoir, le jour raesmes qu'il
auroit veudu lesdites toelles, sur paine de soixante soulz d'a-
mende. »
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( 1) Une plus grande quantité.
— Si —
« LA FERME ET COUSTUMB DU BLÉ. »
« A cause de la ferme et couslume du blé, qui est du debvoir
dudit cohuaige, est debu au duc par chacune charge de fro-
ment, seilte (seigle), orge, avoyne, febves. poys et aullres blez
venduz en ladite cohue,' ville etfaulx bourgs d'icelle, eslanlzen
nttne poche, ung denier, que Tachapteur doibl payer ; et sy n'y
a que ung quartier en un sac est debu une maille (I); en-
semblemenl, de demy quartier ou d'ung boesseau, est debu
une maille pour chacune pochée. »
• Il est debu sur checune personne qui vend grueau en la-
dite ville et es fauix bourgs dicelle, ung denier par chacune
sepmaine, soyut de ladite ville ou d'ailleurs, et est pour plac-
zaige, à cause du debvoir de ladite cohue. »
« LÀ FERME DE LÀ COUSTUME DES ESCUELLES DE BOYS. »
• La couslume des escuelles de boys, à cause de laquelle
touz marchanlz et opvriers (ouvriers) que exposent en vente
escuelles de boys en ladite ville et faulx bourgs d'icelle, doyb-
vent pour placzaige, à cause de ladite ferme, ung denier par
chacune charge, à chacun jour de foyre ou de marché. »
« Item touz ceulx qui achaptent, audit lieu de Mourlaix, au
jour de foyre ou de marché, auges de boys, dont la vente pas-
seroyt douze deniers par auge, debvent de coustume ung de-
nier par piecze, et de chacune auge ou coffre de boys, ung
denier par piecze. »
a Pour grantz rouez (roues) à charrettes, pour chacune
payre, deux deniers. »
« Pour chacune cyvière ruellesse (2) ung denier. »
(1) Cette monuaiequi était la même que l'obole, valait la moitié d'un
dénier.
(2) Ou « rolleresse ». C'est la brouette, dont oa. a attribué à tort
l'invention à Pascal.
— 22 —
« LA FERME ET COUSTUMB DES C0STERA1X. »
« Touz marchanlz qui chargent vin en costeraiz et le mènent
à cheval vendre hors ladite ville et es faulx bourgs d'icelle,
doybvent de coustume anciennement, ung denier. par pot con-
tenant deux quartiers de vin, mesure dudit lieu de Mourlaix,
mais, si lesdits marchanlz emportent ledit vin en barillez ou
barillz, il n'en debvent aulchuu debvoir. »
« LA COUSTUME DE LARDIGOU (1). »
« Ceulx qui achaptent beurre en polz ou baratez (barates),
dont la vente passe douze deniers, excepté beurre frays en es-
cuelle, debvent pour chacun achapt ung denier. »
« Et ceux qui achaptent suiff et oignt (2), quand la vante
passe doze deniers, doybvent pour chacun achapt ung denier,
si non es cas privillégez. »
« LA FERME DU CUYB. »
« A cause de la ferme du cuyr, le duc prent sur chacun tacre
de cuyr non tané, vandu oudit lieu de Mourlaix, ou en ses
faulx bourgs, ung denier, que Tachapteur doibt payer. »
« Et si le marchant achapte un cuyr tout tané jucques à
dix cuyrs, que font une tacre, il poyra pour chacun cuyr, ung
denier, en cas que ledit cuyr couste plus que douze deniers. »
«. Et est byen assavoir que les marchantz bouchers et aultres
de ladite ville de Mourlaix et ses faulx bourgs, estanlz en la
censye, et que poyenl la demande d'aougst oudit lieu de Mour-
laix (3;, ne poyent aucune coustume à cause des cuyrs qu'ilz
achaptent, dont la chayr des bestes que auront porté ledit cuyr
seroit vendue en ladite cohue ne audit lieu de Mourlaix, maix
(I) Ce mot breton est le pluriel de lardig, diminutif de tard, graisse.
(i) Graisse de porc.
(3) Voir page 14.
/
— 23 —
les ruarchantz forains et aultres, quelz ne sont soubz ladite
censye, achaplantz ledit cuyr de quelque personne que ce soyt
de ceulx de Mourlaix que d'ailleurs, poyront ladite coustume. •
« Touz cordoniers ou aultres, de quelque lieu qu'ilz soint,
eslablans en ladite cohue, debvent au duc à cause de ladite
ferme pour placzaige chacun sabmadi, ung denier. »
« LES QUATRE FOYRES. »
« La coustume des quatre foyres que est fondée sur le deb-
voir appelle « tolleau» (1), quel tolleau appartient à aucuns geu-
tilz hommes, bourgeoys et aultres de ladite ville de Mourlaix et
d'ailleurs, et, durant lesdiles quatre foyres, il revyent et cheoyl
en la main du duc, oultre l'ancienne coustume, que se poye
au duc en touz temps et durant lesdiles foyres. »
« Et est bien vray que le duc a quatre foyres Tan, en ladite
ville de Mourlaix ; scavoir : la première et la principalle des-
dites foyres, aujuudi prochain amprès la Pentecosle, qui s'ap-
pelle la foyre de Mourlaix ; et à celle foyre, houict jours avant
toutes les coustumes de ladite ville et faulx bourgs de Mour-
laix, tant à cause de paiu, de la chayr, sur les bestes vifFves,
cuyrs, gresses, ustensilles de boys, comme roues à chamelles,
potz de terre, et aultres denrées et marchandyses, poyent ledit
debvoir, appelle • tolleau, » durant ladite foyre de la Pente-
coste et les houiclaines d'icelle, devant et amprès, et aussi
durant les aultres troys foyres cy amprès déclairès; et pareil-
lement durant lesdiles quatre foyres o les houictaines, comme
devant est dict, le passage du pont de Bourret, qui appartient
au sir de Garzpern et ses consorlz, chel eu la main du duc, et
en recept (reçoit) le debvoir d'Icelluy le fermyer desdiles qua-
tre foyres. Et doublent iceulx debvoirs et coustumes sur touz
marchez» excepté sur les nobles et gens previlégez, pour la
pourvision de leurs maisons, et les bourgeoys et habitantz dudit
(1) Ce mot vient du latin « tollagium » {impôt).
— 24 -
Mourlaix, lesquieulx ne poyent rien du debvoir dudit «tolleau»
se dudit passaige. '*
Et est bien à sf avoir que le sir du Garzpemn, Yvon Le*par-
leur, et Yvon de Lisle doybvent au duc à cause dudit passaige
et dudit debvoir.... (I)
Et prent le sire de Lesquelhouarn, que est prevost de Bour-
ret, la septiesme partie des debvoirs et couslumes de ladite foyre
de la Pentecoste, hpuicl fours devant et houict jours amprès,
et durant ledit temps, ledit sire de Lesquelhouarn a l'adminis-
tration et gouvernement de justicze dudit lieu de Mourlaix des
(causes) qui escherront de nouvel durant ledit temps, et en
sont les amandes au duc ; et, au boult desdits quinze jours,
ledit sire de Lesquelhouarn doibl randre la verge à la justicze
du duc audit lieu de Mourlaix ; et, aux prochains généraulx
plectz du duc ensuyvantz, il doibt rendre à la justicze, et rap-
porter par escript, signé de son séneschal et de son clerc,
les amandes escheuz es plectz durant ledit temps, et assigna-
tion valable desdites amandes ; et, à chacune foys que les
plectz généraux du duc audit lieu de Mourlaix se tiennent, ledit
sire de Lesquelhouarn, prévost surdit, doibt payer (parer?) la
chayre (chaise) du séneschal du duc d'ung langier et ung car*
reau (I), et luy bailler la verge en la main »
« La seconde foyre dudit lieu de Mourlaix se tient et doibt
tenir le jour de la feste sainct Augustin, ou moys d'aogst
(août). •
« La tierce au jour de la feste saincte Catherine, ou moys
de novembre. »
« La quarte foyre au jour de la feste sainct Mathias l'apostre;
et commenczent lesdites troys foyres h la sainct Augustin, saincte
Catherine et sainct Mathias, dempuis le vespre du jour d'avant,
et durent chacune d'elles dempuis ledict vespre jucques au
landemain au soyr. »
(t) La phrase est inachevée.
(2) Une housse et uj* cpuipHi.
_ j
— SHJ —
« Setisuyvent les debvoirs que se lèvent *ur Us denrées et
marchandises vandues et exploictées èsdiles quatre foyres et è$
houiclaines d'avant et amprès ladite foyre de la Pentecoste, à
cause dudit debvoir du • tolleau. »
« Touz bouchiers non demorantz soubz ladite demande
d'aougst dudit lieu de Mourlaix, doybvent sur chacun beuff on
vaiche qu*ilz vendent pour lediet debvoir de « tolleau », outre
l'encienne couslume, quatre deniers. »
« Touz boulangiers forains deœourans hors ladite villa et
faulx bourgs d'icf lie qui ne poyant demande d'agust (août)
doybvent et poyent par chacune charge de paiu qu'ilz vendent
duraul lesdites quatre foyres et les houictiesmes d'avant et am-
près ladite foyre de la pentecoste, à cause dudit debvoir de
€ tolleau », oultre l'ancyenne couslume qui se reczort en la
ferme du pain et de la cbayr, deux deniers par charge. »
« Sur chacun porc frès ou salle veudu en gros ou en détail!,
deux deniers ; et s'yl n'y a que ung eosté à uona mesme pet*,
sonne, il poyra semblablement deux deniers »
Toutz raarlfcanlz ou aultres qui achètent chevaulx ou aul-
tres bestes chevallines, excepté les petitz poullains quelz sont
après leurs mères, doybvent par piecze, houict deniers. »
• Par beuff, deux deniers. »
« Par vaiche ou (avec) veau ou non, deux deniers. •
« Par veau qui aura ung an passé, deux deniers. »
« Par porc, les roarchanlz forans, deux deniers. »
« Et ceulx de la ville et faulx bourgs, ung denier. »
c Les marchanlz forans qui achaptent chyeffures (chèvresj,
doybvent pour chacune, un denier. »
« Touz marchanlz achaptans cuyr de bestes chevallines
doybvent houict denier^ »
« Les marchanlz forans qui achaptent cuyr de beuff ou de
vaiche, doybvent pour chacun cuyr, deux deniers. »
« Et ceulx de la ville et faulx bourgs de Mourlaix, sMlz
achaptent des marchanlz forans, ung denier. »
€ Item touz marchanlz forans achaptans suyff on oigne
— 26 —
(graisse), pour chacun acbapt que passe douze deniers, au poy-
saol (poidsj de cent livres et au dessoubz, deux deniers ; et
aussi de chacun cent, soyt cru ou fondu, deux deniers. •
« Et ceulx de la dite ville et faulx bourgs achaptans suiff des
marchaulz foranz,par cent ou par piecze, que cousteroyl douze
deniers et au-dessus, doybvenl ung denier. »
« Et si lesdits babitanlz de Mourlaix achaptent ledit suiff
des bouchiers,ou aullres f demourantsen ladite ville et ses faulx
bourgs, îlz ne debvent aucun debvoir à cause de ladite coustu-
me des quatre foyres, appelle « tolleau. »
« Item touz roarchanlz forains establans, a vandre gruau
èsdites foyres, doybvent de placzaige chacun d'eulx, deux
deniers. »
« Item touz coutellyers et marchantz forains vendans coût-
teaulx sans guehyne3 (gaines; et aullre ferrure, fors acyer et à
oupvrer, que seront vendu pour soy, doibvent chacun pour
placzaige deux deniers. »
« OSTILLZ DE BOTS OU UTEIfSILLEZ (USTENSILES). »
« Pour chacune huge de boys, l'achapteur, soyt forain ou
aultre marchant, doibl deux deniers. »
« Item pour chacune auge qui cousteroyt douze deniers et
au dessus, deux deniers. »
« Pour chacune charge de batz non garniz, le vandeur doibt
pour placzaige, deux deniers. »
c Pour charge de bêches et de pâlies non garnyes, manches
de coignées et bastouers de boys, le vandeur doibt pour plac-
zaige, deux deniers et unne palle, unne manche de coignée ou
ungbalouer, et n'aurointilz que troys ostilz de chacune especze;
maix en cas qu'il y auroyt unne palle Serrée en la charge, elle
acquicteroyt le parensus de ladite charge du debvoir desdites
quatre (foyres). »
« Item pour chacune payre de grandes rouez (roues) à char-
rettes doibt l'achapteur quatre deniers. •
~ 27 -
« Et pour payffi de petites rouez h charrues deux deniers* »
« Pour une cyvière à roue, deux deniers. »
« Item pour chacune charge de platz, escuelles, sausiers de
boys etdecrubles, le vendeur doibt de placzaige deux deniers.*
« Pour chacune charge de polz de terre, le vandeur doibt
pareillement de placzaige deux deniers. »
« Item pour chacune charge, paneret ou pochée de pommes,
poyres, certes, prunes ou aultres fruilaiges, les marchants
forains vendantz doybvent pour placzaige, deux deniers. »
o Et ceulx de ladite ville de Mourlaix et ses faulx bourgs,
un denier. »
« Item louz marchantz forains qui prennent placze pour ven-
dre miel, oignon, doybvent chacnn pour placzaige deux de-
niers. »
« LE DEBVOIB DUDICT PASSAIGB DE BOURRBT. •
« Touz marchantz forains et aultres gens non privillégiez,
excepté cieulx de Mourlaix, achaptantz bestes chevallines, pas-
santz ou repassanlz par icelle ville et sesditz faulxbourgs, pour
aller en l'évescbé de Léon et de Tréguier, doibvent au duc
pour chacune beste durant lesdites quatre foires o (avec) les
houictiesmes avant et amprès, pour passaige, ung denier. »
« Et par bestes d'aumaille (telles) que pourceaulx, chief-
fres, moulons, brebis et poules, de trois bestes ung denier (1) »
« Item pour chacune payre de grantz roues à charnier, deux
deniers.
« Pour chacune charge de cyvières ruellesses (brouettes) ung
denier; et s'il n'y auroit qu'une seule cyvière ruellesse sur ung
cheval, il en est debu ung denier pour le debvoir dudit pas-
saige. »
(l) On fait venir de munualia (peeora) le mot « aumaille » sur la
signification duquel les lexicographes sont loin d'être d'accord 11 semble
résulter de cet article et de celui qui précède, qu'au XV« siècle, en
Bretagne, on appelait a bêtes d'aumaille », tous les animaux domesti-
ques a. l'exception des chevaux.
— 88 -
« Pour fardeau ou charge de draps, layneî. ioelles, fll, pain,
chair, potz, escueltes, panniers, crubles, tamersiers (tamis),
fruilaigcs (fruits), et aultres denrées et marchandises, excepté
paille d'airain et acyer, ung denier par fardeau ou charge. »
• Et par charge ou somme de mercerie, cuyrs tannes ou à
tanner, de quelconque sorte, soyent de peeuli de mouton,
veaulx, chevaulx ou aultres sortes, ung denier par charge. »
« Et touz roarcbantz forains qui achapteitt blé en l'évescbé
de Léon et t'admennenl en l'évesché de Tréguier du pays de
Léon, par ladite ville et es faulx bourgs, doibvent pour droict
de passaige, ung denier par charge, ou demye charge, si
ramène par cheval, aultnemeut non. »
« LA FBRMB DES SB AULX AUX COHTBACTZ ET ACTES DES COURT!
DE MOURIAIX ET DE LANKEUIL »
« $ellon aucunes coustumations (sic) faictes en parlement
de Brelaigne, Ton doibt prendre pour sceller ung rolle en par-
chemyn d'ung espan et troys doys de large, pour scellaige,
deux deniers. »
« Pour sceller ung conlractde meubles dedans (au dessous
de) cent soulz, chacune livre, deux deniers. »
« Pour ung contracl de meubles oultre la somme de cent
soulz, jucques à cent livres, pour chacune livre, ung denier. »
« Pour un contracl de meubles dempuis cent livres, pour
chacune livre, obole. »
« Item pour sceller un contract d'héritaige dedans vingt
soulz d'héritaige, deux soulz. •
« Et s'il passe vingt soulz, il sera poyé pour seau, cinq
soulz. »
« Pour le scellaige d'une procuration ou d'une coppie soulz
vingt soulz, s >ix deniers. »
« Pour scellaige d'ung testament, cinq soulz. »
« Pour scellaige d'une donnaison mutuelle de héritaige w
4a meubles qui n'es t que a vriaige (viager), deux soute. *
— «9 -
« Pour soeUaige d'une quittance soubz la grtfnt seau de
vingt livres et au-dessus, douze deniers et eu descendant^ stix
dealers. •
« BRYS ET PUNCZAY VENANT. » (1)
« Selon le compte de Jehan Le Braer, aultreflbte reeeptetor
de Mourlaix et d* Lanmeur, faict le 12 febvrier Vbn 139ê, et
le compte de Jehan Meryadec, pareilleraeitf rerepveut desdittt
lieu* faict le 22 febvrier Tan 1414, et aullres comptes ffneteos
Tusement et gouvernement desdiies chastellenyes de Mourlaix et
de La rime tir fe*t) que le duc preat esditz brys, en (ce) que Iuy
auroit saulvé, le tout. » (2)
« Mais quant il y a saulveurs, le duc prent les deux partz et
les saulveurs, le tiers* »
« Tnbk des debvoirs d'entrées et d'issues des porfz et havres
des chasttllenies (le Mtmrlnia: et de Lanmeur. »
« El premier, Entrées. »
« Le duc prent pour debvoir d'entrée de chacun tonneau de
vin d'Anjou, Touars, Aulnis, Nantes et d'ailleurs, de la crue
hors Brelaigne, 30 soulz par tonneau, et pour vin breton,
15 soulz. »
« Pour ancienne coustume les marchans fojrains doybvent
18 denieis par tonneau.»
(f) On sait q»ie le droit de bris livrait au seigneur les débris* du
vaisseau naufragé. Le mot breton punczay que Ton écrit aujourd'hui
pensé ou pence, est synonyme du mot bris II a aussi la signification de
naufrage. On lit dans le Dictionnaire francité-breton dit P. Giégoire
de Rostrenen, au mot bris : « Le» habitants de l'ile de Sein sur le
boni du Raa d'Audierne. qm sont assert pauvres, disent' qnatnf il y a
quelques bris à leur côte» que Dieu les visite. Veut eo. Dqub 4hor gueU"
Ut; deut eo gracx Doue dùveuomp »
(Ti La fin de* cette' phrase qui n'est pas très-claire signifie, je crois
que lorsque les débris d'un navire venaient d'eux- ne me» à la cuit, ils
appartenaient entièrement au duc. On voit par l'article suivant que
dans tour le» ea», h naufragé perdait ses droits aux débris dte sotr
vaisseau.
— 30 —
« Et de chacun rouy de sel venant de Guerrande ou de Rtiys
cinq soulz. »
« El si ledit sel vient d'ailleurs, on poye par chacun muy,
quinze soulz, s'il n'appiert avoir chargé oudil lieu de Guerrande
ou de Ruys. »
« Pour le poys de chacun tonneau de fer, vingt deux cents
pour tonneau, l'on prent d'entrée ung soulz, et en oultre sur
les marchans forains, le vingtième du fer. »
« Pour entrée de chacun tonneau de chaux, deux soulz. »
« Pour tartre (tacrej de cuir deux soulz, et le vingtième
d'aultres marchandises que l'on feroit entrer èsdytz portz et
havres. •
« issues (sorties) desditz havres. »
« Pour issue de chacun tonne.au de froment est deu d'an-
cienne couslume troys soulz quatre deniers, et pour trète
(traite,) de chacun tonneau de froment, trente soulz »
« Item pour tonneau gros blé, vingt soulz; »
« Pour tonneau de chayr, sutff et autres gresses, vingt
soulz. »
« Pour chacun tonneau vin mené par terre, s'il n'appiert
avoir poyé l'entrée en aucun havre de Bretaigue trante soulz. »
« De chacun tonneau de vin mené par terre, charroyé hors
la ville de Mourlaix, excepté les gens nobles et previllégiez
pour leur maison, cinq soulz et le vingtième d'aultres mar-
chandises, comme toelles et aultres denrées que l'on fait yssir
(sortir) desditz havres. »
Le duc percevait encore, le cas échéant, les droits de rachat,
de sous-rachat, d'épaves, de galoys ou gaiays, de déshérence
et de succession de bâtards. Il jouissait aussi, concurremment
avec le sire Moutafllant, et quelques autres seigneurs, ses vas-
saux, du droit de sécherie sur le littoral du domaine de Mor-
laix .et de Uumeur.
— 34 —
Il possédai! en outre dans ou près la ville de Môrlaix :
Un moulin fouleret, où à foulons, auquel les hommes re-
levant procbemenl de lui dans un rayon de cinq lieues,
élaient tenus de venir fouler leurs draps. Ils payaient pour
droit de foulage, un denier par aune de drap. Les vassaux des
seigneurs qui n'avaient pas de moulins à foulons, élaient sujets
au même devoir.
Un moulin à tan. Ceux qui y faisaient moudre leur tan,
payaient pour droit de « moullaige, » cinq deniers pour cha-
que a atigée » de tan ; Taugée devait contenir trois quartiers
de tan, mesure de Morlaix.
Un moulin à blé, situé devant la porte, près le havre de
cette ville. On payait pour droit de moule le seizième du blé
moulu.
Un four appelé le four du vicomte, auquel tous les habi-
tants de la ville close étaient tenus de faire cuire leur pain. Us
payaient pour droit de « foumaige, » le vingt-quatrième pain
en pâte.
Outre le four du duc, il y avait à Morlaix le four du prieur
de Saint-Mathieu, celui du prieur de Saint-Melaine, et celui
du sire de Lesquelhouarn, ses « pargonniers » (associés) et
consorts. Ce dernier était situé dans le faubourg de Bourret, en
la paroisse de Saint-Martin, évéché de Léon. Lorsque ces
trois fours, ou l'un d'eux, étaient « en défaut de servir ou ne
le pouvoinl faire, » le ressort en devait venir au four du duc #
Pour assurer la perception des nombreux droits énumérés
ci -dessus, il fallait nécessairement fixer d'une manière certaine
les limites de la ville de Morlaix. C'est ce que firent les com-
missaires de la Réformation de 1456, après uue enquête ou
furent entendus Hervé Coatgougar, âgé de 80 ans, Selvestre
Le Clerc, âgé de 84 ans, Henry Lonoré, âgé de 60 ans, et plu-
sieurs autres témoins.
Un procès-verbal très-détaillé de cette enquête fut ensuite
dressé, mais comme les terres n'y sont le plus souvent désignées
— 3Î —
que par le nom de ceui qui le9 possédaient alors, il serait
maintenant impossible de les reconnaître, et il n'y aurait
aucune utilité à reproduire celle pièce in-extenso. Je me bor-
nerai donc à mentionner les points principaux indiqués dans ce
procès-verbal de délimitation, et qu'il est possible de retrouver
aujourd'hui. Ces indications suffiront je pense à faire recon-
naître la différence existant entre retendue actuelle de la ville
de Morlaix, et celle de sou territoire en 1465.
Les commissaires commencèrent leur enquête à Test de la
ville, sur la rive gauche de la rivière Jarleau, et sur un point
de la route de Morlaix à Plougonven, appelé Tuoubloucbou (ce
serait aujourd'hui Traonblouchou, ou Troblouchou), où ils
établirent des bornes en pierre Ge lieu était situé à l'extrémité
du faubourg de Saint-Mulhieu, plus ordinairement appelé
faubourg du Marcheix. ^
Après avoir quitté la roule de Plougonven, la limite suivait
le grand chemin de Plourin, en longeant le mur du Parc-au-
Due, puis après avoir traversé ce parc et le ruisseau qui coulait
de sa fontaine, elle tombait dans un vieux chemin appelé Htnt-
Toull-an-Parc. Bile suivait encore le mur du même parc, et
arrivait par urv chemin à une croix située sur la route de Mor-
laix à Saint- Fiacre, et appelée la croix Map~an-Mâguerés (la
eroix du fUs de la nourrice).
De cette crois 4 la limite suivait une vieille route ewiie les
terres du sieur de Locnlaria et celles du sieur de Coeleiefr, et
après avoir traversé un autre grand chemin conduisant à Saiut-
Paul 4 elle se dirigeait vers un rocher appelée Lan*an-lto>choti, le
Ion® do pare du sieur de Locmaria, dépendait de 1 sou manoir
de Kerbfeien.
De ce rocher, elle rejoignait d'autres rochers, située vis-à-vis
du précédent, et descendait à la rivière Cuefflet (QueiQeni), ail
coin des moulins à foulons et à tan du duc, en laissant dans
1» ville* ces moulins, la rue des Brebis et le manoir de Bellisal.
Aftè* avoir traversé la rivière Queffleut, la limite suivait 11»
— 33 —
ruisseau dont la source était au village de Roudou-an-Esenn
(le Gué aux ânes, aujourd'hui le Roudour),et après avoir coupé
la route de Morlaix à Landivtziau, elle suivait le chemin de
Roudou-an-Esenn, au village do Kerjourdrain, entre une pièce
de terre appelée la Lande aux Malades, el les parcs de Coet-
coogar, dans la direction de la route de Morlaix à Pensez, et
hissant en dehors de la ville, le parc et le manoir de Ker-
jourdrain.
La limite suivait ensuite la route de Pensez à Morlaix, en
côtoyant le bois taillis de Goetcongar et la forêt de Cuburien,
qui appartenait au vicomte de Rohan,et ne faisait pas partie de
la ville ; puis après s'être dirigée vers la roche appelée Roche
Corolkrés (la danseuse),oii étaient situées les buttes pour tirer
de Tare et au papegaut,elle arrivait d'abord à la croix nommée
la Croix du bout delà Ville Neuve (probablement Penkernevez),
et ensuite au port de Morlaix.
Après avoir traversé la rivière, elle rencontrait le village de
Tnoudousten (aujourd'hui Troudoustin), suivait un ruisseau,
coupait un grand chemin menant de la chapelle de Saint-
Nicolas à la fontaine appelée an Barguet, et arrivait à une autre
fontaine nommée an Guern-Bihan.
De là, après avoir traversé le grand chemin de Morlaix à Lan-
meur, la limite suivait un chemin venant de Kerancleffien,
jusqu'au carrefour appelé Poul-Map-Even, d'où elle longeait
une autre route nommée chemin an Porz-Bihan, en côtoyant la
terre de la Maladerie, qui faisait partie de la ville (î).
Cette route de Porz-Biban, se terminait h un grand chemin
menant du moulin Ansquer à la maison de François de Coet-
quiz, nommée la Villeneuve. La limite après avoir suivi ce der-
nier chemin, en longeant les terres du manoir de Coetcongar,
qui étaient hors de la ville, coupait successivement les routes
do Morlaix à Lannion et à Plouégat-Guerrand, puis après avoir
(I) Voirie Bulletin d$ la Société arehèologigue du Finistère, t. IV,
page 138. — Il y avait en ce lieu une chapelle dédiée à la Madeleine.
3
j - 54 —
traversé la rivière Jarleau, regagnait le point de la roule de
Plougonveu, appelé Tnoublouchou, où les commissaires de la
Réformation, avaient fait établir des pierres bornâtes, et
commencé leur enquête.
A la suite de cette lecture, M. de Goy exprime
l'opinion que l'origine de l'expression « bêtes d'au-
maille » pourrait se trouver dans l'usage qui existe
dans certaines province de France et notamment en
Lorraine, de renfermer et de transporter les volailles
dans des filets.
M. Faty pense que c'est à tort que l'on a contesté à
Pascal l'invention de la brouette. L'instrument qu'elle
a remplacé, était ajoute-t-il, une petite voiture à deux
roues dont l'usage n'était pas inconnu aux Romains.
M. Le Men répond que l'opinion qui attribue cette
invention à Pascal, a eu ses partisans et ses contra-
dicteurs. On se servait au XV 6 siècle de deux sortes
de civières, la civière à deux bouts dépourvue de roues
et ayant deux bras à chacune de ses extrémités, et la
civière à rouelle ou civière rolleresse, munie de deux
bras à sa partie antérieure, et d'une ou peut-être de
deux roues à son extrémité opposée. Dans un titre
inédit de 1510, que cite M. Le Men, la civière rolleresse
est appelée « brouette » (1). La chose et le nom exis-
taient donc longtemps avant Pascal. Il a pu cependant
perfectionner cet instrument en substituant une seule
roue aux deux rouelles qu'il avait peut-être aupa-
ravant. Quoi qu'il en soit, les modifications dont la
brouette a pu être l'objet dépuis le moyen-âge, n'ont
(I) Monographie de la cathédrale de Quimper f par R.-F. Le Men,
page 341.
— 35 -
pas été bien importantes, car les paysans bretons
nomment encore aujourd'hui cet instrument, « civière
rolleresse » (cravaz rodellec).
Après ces observations, M. Audran donne lecture
de la note suivante :
LE PAPEGAUT DE QUIMPERLË.
Le pupegai, papeguay, papegaut ou papegault, vieux mot
français qui signifie perroquet est «un oiseau de carte ou de
bois que Ton met au bout d'une perche pour servir à ceux qui
tirent de Tare et de l'arquebuse qui donnent un prix à celui de
leur compagnie qui l'abat. » (1)
Le jeu du papegaut remonte au XIV* siècle (?) ; le vainqueur
prenait le titre de roi et avait droit à certaines exemptions. Dès
le XV siècle, nous trouvons ce jeu établi dans les principales
villes de Bretagne ; les rois l'encouragèrent dans le but d'en-
gager les bons citoyens à apprendre l'exercice de l'arbalète et
de l'arquebuse.
Des ordonnances rendues en 1407 et 1471 avaient accordé à
celui qui abattait une fois le papegaut à Nantes, l'affranchisse-
ment « des tailles, aides, dons, emprupts, qnets, arrière-quets,
gardes de portes et tous autres subsides personnels avec attri-
bution de noblesse héréditaire, place et rang aux États à celui
qui Tabaltait trois fois. » (3)
o Ce fut pendant la lieulenance de Marc de Carné, nous
apprend M. Le Vol, que Henri II, ne pouvant payer la garnison
de Brest, recourut à un expédient d'un fréquent usage dans ce
(1) Dictionnaire de Trévoux, Edit. de 1721. V r Papegai.
(2) I e plus ancien titre dans lequel il est fait mention du papegaut
de Quimperlé est un compte rendu par Guillaume du Quirisoet, rece-
veur ordinaire de Ouimperlé pour les années 1398, 1399. H est rapporté
par extrait aux pièces justificatives imprimées à la suite de l'Histoire
de l'abbaye de Sainte-Croiœ, de dom Placide Le Duc, publiée par
tt.-F. Le Men, page 625.
• (3) Magasin pittoresque, année 1842, p. 383.
— 5$ —
temps, la création d'un papegaut, io3titué parles lettres patfiih
tes du 3 mai 1549, enregistrées à 1» cour des comptes de
Nantes le 13 juin suivant» Ce papegaut, établi sous préleste
d'exercer les soldats au tir de Tare et de l'arquebuse, avait
pour but plus réel d'exonérer le trésor royal de la solde des
gens do guerre en leur conférant certains avantages. Ceux qui
furent accordés à la garnison de Brest pour atténuer sa fâ-
cheuse position étaient les suivants : Celui qui remportait le
prix de l'arquebuse avait le droit de vendre quarante tonneaux
de vins, sans être assujetti à aucune taxe : les plus adroits à
Tare et à Parbalète pouvaient vendre, le premier trente ton-
neaux, le second vingt, aussi en franchise de. tous droits. » (1)
Henri III, par ordonnance du mois d'avril 1675, accorda aux
habitants de Locperan, autrement dit Blavet (plus tard Port-
Louis), le privilège du papegaut. « Voulons et nous plaict, (est-
il dit dans cette ordonnance rapportée en entier par M.F. Jégou
dans son histoire de la fondation de Lorient), que ceux qui
s'apliqueroni audit jeu d'arquebuse, puissent tirer au dit pape-
gaut et que celui qui l'aura abatu puisse amener vandre ou
faire- vandre et distribuer par meneu détail, durant la dite an-
née qu'il l'aura abatu, le nombre et canlité de trente et six
tonneaux de vin de tel creu et pays qu'il avisera, franc, quitte
et exent de tous tributs, impôts et billots. »
Cet édit fut enregistré à la chambre des comptes de Nantes
le 27 juin 1675, avec une réduction considérable, contre la-
quelle les habitants de Port-Louis réclamèrent; mais en 1577
ils obtinrent de nouvelles lettres confirmant les précédentes (2).
Quimper et ïlorlaix ont eu également un papegaut. Un de
nos confrères nous fera sans doute l'historique de ces compa-
gnies. Je vous parlerai aujourd'hui de celle de Quimperlé. Je
n'ai pas retrouvé les lettres patentes qui créent ce privilège.
(f ) Histoire de la ville et du port de Brest, par NL P. 14 Vot, l w vol.,
p. 58.
(2) Histoire de la fondation dç kortmt* par F. JégW* Iwieal, WO.
— 37 —
Son existence m'est révélée par un procès-verbal en date du
1" mai 1681, et par lequel Charles de Rabeau, chevalier, sei-
gneur de Beauregard Chabri, maréchal des camps et armées
de Sa Majesté, commandant des villes et citadelles de Port-
Louis, Hennebont et Quimperlé, rapporte que, s'étant trans-
porté au bas du quai de Quimperlé, au lieu où Ton tire an pa-
pegaut, en compagnie de Jean Le Toulper, dernier roi du pa-
pegaut, du bailli, du procureur du roi, du syndic et de plu-
sieurs bourgeois et habitants, précédé de la compagnie des
archers du papegaut, et appel fait de ces derniers, il leur avait
représenté que le roi leur continuant la grâce de tirer au pa-
pegaut avec les mêmes privilèges et émoluments que par le
passé, son intention était que toutes les dépenses inutiles qui se
faisaient par rabatteur du papegaut, soient supprimées et em-
ployées au profit de l'hôpital général.
Cette proposition fut acceptée par les archers, qui, en consi-
dération du grand avantage qu'ils retiraient de l'établissement
de l'hôpital général, consentirent qu'à l'avenir « le dict hospilal
jouira annuellement de la somme de cent vingt livres des
deniers accordés par Sa Majesté au roi du dict papegaut,
laquelle somme de cent vingt livres sera payée par quartier
au trésorier dudit hospital,par le cabaretier que choisira l'aba-
teur du papegaut ou par le fermier de l'impôt et billot auquel
la quittance dudit trésorier servira de décharge. »
De plus, ils décidèrent que les trente sols que'cbaque archer
payait lors de son eorollement serait payés au trésorier du dit
hôpital, le greffier chargé de délivrer les billets d'enrollement
n'ayant plus pour ses gages que cent sols, outre son sol par
billet, et cinq sols par enrollement et réception d'archers.
Cette décision fut approuvée par le duc de Chaulnes, gou-
verneur de Bretagne, le 11 juin 1689.
Mais les bonnes dispositions des archers du papegaut ne pro-
fitèrent pas longtemps à l'hôpital, car le rentier qui fut dressé
en 1764, pour les revenus de l'établissement porte au folio 243 :
— 38 —
« Le droit au papegaut tiré dans la ville, de Quimperlé, accordé
à l'hôpital, consiste à percevoir la somme de cent vingt livres
chaque année par préférence sur le produit des devoirs de
trente pipes de vin, avec en outre trente sols par chaque récep.
tion d'archer. Au soutien de ce droit dont l'hôpital est frustré
depuis bien du temps, douze pièces auxquelles on aura recours
pour faire rentrer l'hôpital dans un droit aussi utile.»
Ces douze pièces que j'ai consultées aux archives de l'hos-
pice, comprennent , outre le procès-verbal ci-dessus analysé,
et l'approbation de M. le duc de Ghaulnes, des traités inter-
venus de 1681 h 1684 entre le trésorier de l'hôpital et les
abateurs du papegaut, qui subrogeaient un cabaretier dans le
droit de débiter en franchise trente pipes de vin, à la charge
de verser au trésorier cent vingt livres, l'abateur n'ayant droit
qu'au surplus.
Enfin, par arrêt du conseil du 7 mai 1770, et l'article 92 du
bail des Etats des années 1771 et 1772, le droit de papegaut
fut en entier accordé aux hôpitaux, et depuis cette époque jus-
qu'en 1791, l'hôpital de Quimperlé percevait chaque année,
des receveurs sédentaires des devoirs, une somme de six cents
livres, pour droit annuel sur trente pipes de vin.
Je termine par le nom de quelques rois du papegaut que
j'ai relevés sur les titres de l'hospice :
1680, Jean Le Toulper ;
1681, Mathieu Geffroy ;
1682, Alain-David f
1683, François Foucault ;
1684, Gilles Pressart ;
1753, Guillaume-Joseph Le Fèvre, qui, par acte du 3 mai
1753, cède son droit pour cent trente livres.
Après cette communication l'ordre du jour étant
épuisé, la séance est levée à 4 heures.
Le Secrétaire,
R.-F. LE MEN.
L
— 39 —
SEANCE DU 30 JUIN 1877
Présidence de M. le Vicomte Th. HERSART
DE LÀ VILLEMARQUÉ.
Étaient présents : MM. de la Villemarqné, Audran,
l'abbé Guillard, Trévédy, Fougeray, Moreau, Le No-
ble, de Brémoy, de Kercadio, Malen, Bourassin, de
Chabreet Le Men, secrétaire.
M. Audran demande la parole sur le procès-verbal
de la séance du 3 mars. Délégué par la Société pour la
représenter à la réunion générale des Sociétés savan-
tes à la Sorbonne, le 4 avril, il n'a pu remplir cette
honorable mission à cause de ses affaires, et il en a
les plus vifs regrets.
M. de la Villemarqué en éprouve aussi de n'avoir
pu, à cause de son séjour à Paris, assister à la séance
du 3 mars ; il eut répondu de vive voix aux observa-
tions de M. Ledoze sur l'inscription bretonne pedeûa-
lbdan. (Voir la séance du 19 août 1876). Aujourd'hui
il lui suffit de dire qu'il est heureux de se trouver
d'accord, ce qui est le point capital, avec son honora-
ble collègue sur le sens des mots ped « prier » . Quant
au sens de edaledan « en long et en large, » il n'a point à
justifier une périphrase qui manquerait de justesse
et serait d'assez mauvais goût, selon son contradic-
teur, mais à constater qu'on l'a employée au moyen
âge, ce qu'il a fait par deux citations. Il eût pu en
produire d'autres, notamment la strophe 247 e du
Buhez mab den, et la 275 e du même poëme ; dans la
première on lit : Plen ordrenet het ha le dan, et dans
— 40 —
l'autre : Map Doe Roet het ha ledan. (Revue de Bretagne %
février 1877, pages 136 et 148).
M. Le Men, qui n'assistait pas à la séance du
3 mars, confirme l'exactitude de l'interprétation de
M. de la Villemarqué, et demande la parole pour
ajouter une observation à la note sur les lépreux et
les cacous de la Basse-Bretagne, qu'il a communiquée
à la séance du mois de janvier dernier (1).
Il résulte de cette note que contrairement à l'opi-
nion de quelques personnes, la lèpre existait encore
au XV* siècle dans cette province. A l'appui de ce
fait il lit l'extrait suivant d'un compte de la fa-
brique de l'église de Saint-Mathieu de Morlaix, pour
l'année 1 550, qui ne laisse subsister aucun doute sur
cette question :
« Item pour tant que, à instance du procureur du
roy de ceste juridiction, nous auroict esté inthimé par
sergent, que luy estoict venu à nocticze que une
femme nommée Marie Kervennyou, que l'on disoict
estre suspeczonnée de leppre, se tenoict pour lors au
portai de ladicte église de sainct Mahé, et nous au-
roict esté peu après, comparissant en jugement à notre
terme, joinnectz (enjoint), à paine de 60 livres monnoie,
dedans trois jours de la faire visiter par médicins et
surgiantz, et ce aux despans de ladicte paroesse, afin
de la faire départie, si elle eust esté trouvée telle. Ce
que le lendemain fut faict, à notre pourchatz, par mais-
tre Pierres Le Roux, médicin, Jehan Quéré et Guil-
laume Le Fournis, barbiers et surgiens, En l'endroict
(I) Voir le Bulletin de la Société archéologique do Finistère, t. IV,
p. 138.
- 41 —
de tout quoy, y eust grosse mise tant pour les despens
et salairz, celluy jour, et pour avoyr d'eubt retiré
procès verbal pour Tapparoir en justicze, le tout calculé
avons mise 8 livres monnoiè. » (1).
M. le Président donne ensuite lecture de la notice
suivante :
JEAN DE L'EPINE ou MAP AN SPERNEN
CALLIGRAPHE ET POÈTE BRETON
(1408-1472)
>
Il y a bieo des années, H. de Wailly, Conservateur de la
bibliothèque de la rue Richelieu et membre de l'Institut, remar-
qua quelques vers bretons à la fin d'un bréviaire latin manus-
crit de cette bibliothèque et m'en adressa une copie en m'en
demandant la traduction ; j'ignore si elle fut bonne, mais elle
dut me laisser des doutes, car lui ayant écrit pour lui demander
des renseignements sur le manuscrit, l'illustre paléographe me
fit l'honneur de me répondre :
« Monsieur, le manuscrit pour lequel j'ai eu recours à votre
obligeance est un bréviaire h l'usage de l'église de Paris, copié
en 1472 par Jean de l'Epine, du diocèse de Cornouaille.
€ C'est au bas du folio 198 que se trouvent les quatre lignes
de bas-breton.
« Ce manuscrit est un in-8°; il porte le n° 1294 de l'ancien
fonds latin.
« Je suis trop heureux, Monsieur, de pouvoir vous donner
ces indications, et je vous prie d'agréer l'assurance de ma con-
sidération la plus distinguée.
« N. de Wailly. »
Ce 4 juin 1844.
(t> Archives du Finistère.
— 42 -
Muni de ces indications, je m'empressai de consulter le ma-
nuscrit lui-même*
On lit au folio 178 v% le nom Yspikb, et au-dessous : Ex-
plicit psalterium per me iohem Spine, corisopitens diocesis. Hic
liber e magri Guilli Goardet. « Ici finit le psautier par moi
Jean de l'Epine, du diocèse de Quimper. Ce livre appartient à
maître Guillaume Goardet. »
Au bas du folio 198 v°, sont les vers bretons signalés par
M de Wailly à mon attention.
Les voici :
Gruet eu tom.heb chom an ceutu
Goude dilua au suzun gueu
Breman ez guellet guelet scier
Na gueu quet ter map an Speraen.
Premier vers : Gruet eu(factus est) n'offre pas de difficulté;
ce participe passé du verbe irrégulier ober s'écrit aujourd'hui
gréât, gret et groet, selon les dialectes armoricains ; en comi-
que gorris, en gallois gwnaet où Vn a remplacé IV, comme
dans l'irlandais gni. (Zeuss, Grammatica celtica, p. 551.) Eu
(est) répond à éo du dialecte de Léon, à e du dialecte de Van-
nes, à yu du gallois. Tom vient du latin tomus « tome », « vo-
lume. » Heb « sans • anciennement hep, en breton, en comi-
que et en gallois; en irlandais sech, latin $ectw.(WhUleyStokes.)
Chom, en Léon choum, en gaëlic, cum, a le sens de moratus
dans le Catholicon; M. Liltré croit y voir la racine du verbe
français chômer (manquer de. . .). Il semble avoir ici le sens de
« manque de », « omission.» An (pour a + n) « du » est l'ar-
ticle défini breton au génitif singulier. Sa plus ancienne forme
est inn (Cartulaire de Bedon , p. 34, 35, 148, 184). Sa forme
moyenne est enn. Coutu, abréviation de coutuer, n'est plus en
usage que dans le pluriel Kotuerou, « les Quatre-Temps •
(Troude) ; en latin Quatuor anni tempestatum jejunium, duquel
quatuor est venu le breton coutuer, en gaëlic keathair, en irlan-
dais cethar.
— 43 —
Deuxième vers : Goude « après », en vieux gallois, guetig,
en gallois moyen, gwedy (Zeuss, p. 652). Dilun « le lundi »,
en gallois dyddllun, en irlandais dialuain, en latin dies lunœ.
An (a + n) « de la ». Suzun « semaine », aujourd'hui sizun,
anciennement seidhun (Cartul. de Landévennec, fol 142) ; en
moyen comique seithum (Vocabulaire), plus tard sythyn (Nor-
ris) ; en gaélic et en irlandais seachduin. (Zeuss, p. 736). Guen
« blanche », en comique guyn, en gallois gwyn 9 en irlandais
fin (W. Stokes). On dit maintenant ar sizun ven. Ce nom de
semaine blanche est donné par le peuple à la semaine des Roga-
tions « à cause qu'il voit, dit le P. Grégoire, les ecclésiastiques
en surplis, aller processionnellement aux chapelles de paroisse. »
Troisième vers : Breman « à présent » anciennement pretman,
« en ce temps-ci » hoc tempore (Zeuss, p. 674), en gallois
pryd hwn «maintenant ». Ez guellet « vous pouvez» aujour-
d'hui e c'hellet (Troude^, du verbe gallout, pouvoir ; gallu en
comique et en gallois. Guelet « voir •, en gallois moderne
gweled, dont la racine est guil, en latin vigilia (Zeuss, p. 1105).
Scier « clairement », du vieux français esclair % composé de
l'adjectif clair précédé de es préfixe (Littré),dontla voyelle ini-
tiale est tombée en breton.
Quatrième vers : Na gueu quet pour nag eu quet, aujourd'hui
ha n'eo ket (Troude) « s'il n'est pas ». Le P. Grégoire écrit eoei
gueo^el pour le dialecte de Vannes gueù, comme il l'est ici,
(p. 865). M. Whitley Stokes trouve l'équivalent de notre quet
armoricain, dont on ignorait l'origine, dans le gallois cal qui
répond au vieux français, mie, goutte, brin, etc. Ter « vif »,
prompt « expéditif », aujourd'hui ter en Comouaille, en Léon
te*r, en gallois taer. Map « fils » dans tous les dialectes ,
excepté en irlandais et en gaëlic où le p se change en c et où
map devient mac, comme dans le nom celtique Mac-Mahon,
qu'on ne s'attendait guère à trouver ici à côté de Map an Spernen,
le fils de YYspine ou de l'Epine, Spine ou Spinœ. La traduc-
tion de notre quatrain serait donc, sauf erreur :
- 44 —
« Ce volume a été fait (oa achevé) sans omission des Qo«t!re-
Temps après le lundi de la semaine des Rogations (1).
c A présent vous pouvez bien voir si Map an Spernen (le fib
de l'Epine) est expéditif . »
J'ignorais quels étaient ces an Spernen, et j'attendais à le
savoir pour publier mon texte et sa traduction, quand une dé*
couverte toute récente de notre savant confrère M. Le lien, est
venue me réjouir et m 'instruire.
Voici la note qu'il a bien voulu me communiquer ; elle est
extraite de son intéressante Monographie de la Cathédrale de
Quimper, en cejnoment sous presse; on y lit page 3SO, sous la
rubrique hemeuhs :
« 1468. Domino Yvoni an Corn, presbytero, pro religando et
cooperiendo librum Hymnorum in medio chori posiium, 3 s.
4d.»
« Item domino Yvoni Corn, presbytero, et Y. an Sperhb»,
pro taxando religaciones librorum in presencia domini thesau-
rarii laxatas, pro commissione, 4 s, 4 d. »
Jean de l'Epine, le calligraphe quhnpérois, qui copia en 1472,
à Paris, le bréviaire à l'usage de l'église de cette ville, était donc
fils du relieur-expert du même nom, chargé à Quimper, en 1468,
par le trésorier de la Cathédrale de taxer les reliures de certains
livres dont il avait pu transcrire lui-même quelques-uns, avant
son départ pour la France.
Hais si le manuscrit parisien prouve qu'il excellait dans l'art
du copiste, les vers qu'on vient de lire ne témoignent pas moins
en sa faveur comme versificateur breton. 11 était poète, et même
de la bonne école de son temps ; son système rhythmique atteste
qu'il connaissait tous les secrets et qu'il bravait toutes les diffi-
cultés du genre : ses vers sont un modèle du quatrain octo-
syllabique, à rimes finales croisées et à rimes intérieures ; outre
coutuer et scier, guen et Spernen % rimant ensemble, au bout des
(t) Le volume du bréviaire finit effectivement avec les Quatro-Temps
de la Trinité.
— 45 —
Vers entrelacés, ou remarque dans l'intérieur, iom et cfwm, au
premier, dilun et suzun, au second, guellet et guelet, au troi-
sième, ter et sper (dans an Spernen),m quatrième. Les auteurs
de sainte iVtmne, du Grand Mystère de Jésus, du Trenienvan, du
Buhez mab den, etc., ne rimaient pas autrement, et certaine-
ment pas mieux que lui.
Je suis heureux d'avoir contribué à tirer son nom de l'oubli :
ne laissons perdre aucun de ceux qui honorent notre pays breton .
Sur l'invitation de M, le Président, M, Le Meu donne
lecture du travail suivant :
LA CONFRÉRIE DBS MAÎTRES-ÈS-ARTS DE L'ÉVÊGHE DE LÉON (1).
Enm*entretenant,il y a quelques jours, 'de notre art national,
arec MM. de la Villemarqué et Audran, je fus amené par le
sujet de notre conversation à leur lire le chapitre de la Mono-
graphie de la cathédrale de Quimper, dont je viens de terminer
l'impression, qui a pour titre : les Maîtres de Vœuvre, les Devis
et les Marchés. Dans ce chapitre je fais connaître l'existence,
ignorée jusqu'ici, d'une Confrérie des arts dans Pévêché de
Léon, au commencement du XVII e siècle. Frappés de l'impor-
tance de ce fait, MM. de la Villemarqué et Audran, ont pensé
qu'il ne serait pas sans intérêt d'en donner communication à la
Société dans notre prochaine réunion. C'est pour me conformer
& leur avis que je vais vous lire la partie de ce chapitre relative
h la Confrérie des arts :
« Un fait regrettable, mais qu'on ne saurait contester, c'est la
facilité avec laquelle les souvenirs qui se rattachaient k nos
grands monuments d'architecture religieuse, se sont effacés
ou altérés, et la tendance que Ton éprouve généralement, à
attribuer à ceux qui les ont construits, une origine étrangère.
im
(1) Cet article est en partie extrait de la Monographie de la cathâ*
drdle de Quimper, par R.-F Le Men ; un volume in-8° de 400 pages,
dont Piœpcwsion est terminée.
— 46 —
C'est ainsi que l'on entend dire souvent, que la cathédrale de
Quimper a été bâtie par les Anglais. La même tradition se
rattache à l'église de Notre-Dame du Creisker, à jSaint-
Pol de-Léon. D'autres vont plus loin, et prétendent que
toutes nos belles églises anciennes ont été bâties par des
étrangers, parce qu'il n'y avait pas en Bretagne, d'ouvriers
assez habiles pour les construire. Ces erreurs de l'opinion au
sujet de noire art national, proviennent de ce que les habitants
de notre pays, ont depuis longtemps perdu l'habitude de voir
élever auprès deux des monuments vraiment dignes de ce nom,
et exécuter sous leurs yeux, ces merveilles d'orfèvrerie, de
peinture et de sculpture, que produisaient, jadis la plupart de
nos villes, et que la centralisation a confisquées pour toujours,
au profit de quelques cités privilégiées. »
« On sait assez généralement à quelle époque furent construi-
tes nos grandes églises du moyen âge, et à l'initiative de quels
illustres personnages civils ou ecclésiastiques, on doit leur
construction ; mais les chroniques ou les histoires qui nons ont
transmis la connaissance de ces faits, ont complètement négligé
de nous renseigner sur les modestes ouvriers qui travaillèrent
à les bâtir ou à les orner. Ce n'est qu'à partir du XV e sjècle,
que de rares documents viennent jeter quelque jour sur ce
côté, jusque là bien obscur, de l'histoire de l'art en Bretagne,
et je m'empresse de le dire, les noms des mattres qui furent
chargés de diriger les travaux de nos églises, ou de contribuer
a leur décoration pendant le XV e et le XVI e siècle, sont, sauf
de rares exceptions, des noms qui appartiennent incontestable-
ment à la Bretagne. C'est seulement au XVII e siècle que l'on
voit apparaître dans ce pays, des ouvriers étrangers, mais
principalement parmi les facteurs d'orgues et les fondeurs, car
les travaux de construction restent encore à cette époque,
presque exclusivement dans les mains des ouvriers bretons. On
peut donc, jusqu'à preuve du contraire, attribuer à des maîtres
originaires du pays où elles ont été élevées, la construction de
nos églises du moyen âge, qui n'ont laissé aucune trace écrite
- 47 -
de leur histoire. En attendant que de nouvelles recherches
viennent confirmer cette conjecture (1), voici un fait demeuré,
si je ne me trompe, inconnu jusqu'ici, et qui démontre combien
sont injustes certains préjugés qui ont cours relativement au
degré d'éducation artistique des bretons du temps passé. »
« A une époque qu'il m'est impossible de préciser, une con-
frérie des maîtres- es- arts (magistrorum artium) fut fondée
dans l'évêché de Léon. Différente des confréries religieuses ou
des corporations si fréquentes t au moyen âge et jusqu'à la
Révolution, et qui se composaient de membres pris dans une
même paroisse ou dans une même ville, elle choisissait ses
éléments dans toutes les villes et les paroisses du diocèse, et
dans la portion la plus intelligente du clergé, de la noblesse et
des ouvriers, dont les travaux relevaient du domaine de l'art.
L'existence de cette association de savants et d'hommes de
goût, m'a été révélée par un cahier commencé avant l'année
1618, et qui se compose de la liste générale des maîtres des
arts faisant partie de la confrérie, d'actes de réception de nou-
veaux maîtres, et d'ordres du jour indiquant, avec l'époque et
le lieu où devaient se réunir les confrères, soit en assemblée
générale, soit pour assister aux services des membres décédés
dans Tannée, les noms des orateurs qui devaient prononcer des
discours dans ces réunions. »
« Le bureau de la confrérie des maîlres-ès-arts se composait
d'un président (abbas), d'un procureur* d'un secrétaire (scriba),
d'un greffier (bidellus) et d'un trésorier. Elle comprenait avant
1618, cent vingt-trois membres, dont soixanle-dix-neuf appar-
tenaient au clergé, vingt-sept â la noblesse, trois à la magistra-
ture et quatorze au tiers-état. De 1618 à 1623, cinquante-deux
(I) Au nombre des renseignements publiés par le Bulletin de l'Asso-
ciation bretonne, et qui viennent à 1 appui de 1 opinion que j'exprime ici,
je citerai dans le l« r vol. de ce Bulletin, pages 216 et 279, les recher-
ches, de M. A. de Barthélémy, sur des peintres verriers bretons. — Voir
aussi dans les Mélangée d'histoire et d'archéologie bretonnes, les très-
intéressants documents publiés par M» de là Borderie, sur les artistes
bretons.
- 48 —
nouveaux membres furent admis dans la société, sur la présen-
tation d'anciens confrères. »
« Et qu'on ne s'imagine pas qu'il y eût quelque rapport entre
la qualification de maîlre-ès-arts, que prenait chaque membre
de cette société, et le titre que Ton obtenait après avoir subi
avec succès des examens sur certaines parties de la philo-
sophie; car à côté de docteurs de Sorbonne, d'archidiacres et
de chanoines de Léon et du Folgoat, on voit figurer dans la
liste des membres, non-seulement les principaux représen-
tants de la noblesse de l'évéché de Léon, mais encore quatorze
artisans, parmi lesquels ressortent le nom du peintre-verrier
Alain Cap (Magister Alanus Cap), et celui d'un autre peintre
moins connu, Jean Bouricquen (Magister Johannes Bouricquen,
pictor). »
« Tous ceux qui se sont occupés de l'histoire de l'art en Breta-
gne, connaissent le nom d'Alain Cap.-C'était un peintre-verrier
d'un réel talent, et dont le mérite a été constaté par son
contemporain, le Père Cyrille Le Pennée (1). Il appartenait h
une famille de verriers, dont un membre, Charles Cap, travail-
lait à Morlaix un siècle avant Alain. »
« Jean Bouricquen qui.jsi je ne me trompe, n'a pas encore été
signalé, habitait Saint-Pol-de-Léon. Il y avait dans celte ville,
à la fin du XVI e siècle, trois peintres-verriers de ce nom : Jean
Bouricquen, le vieil, père d'autre Jan Bouricquen, dit le jeune,
et Hervé Bouricquen (2). De 1587 à 1650, ces peintres-
verriers exécutèrent différents travaux dans la cathédrale de
(1) Dans son Pèlerinage du Folgoat publié dans l'édit. des Vies des
saints de Bretagne, d'Albert le Grand, par M. de Kerdanet, page 10$.
k Alain Cap, né à Lesnevenle 11 novembre 1578, suivant M. Kerdanet,
mourut dans cette ville le 4 avril 1644. D'après cet écrivain, ce peintre
aurait « fait tous les vitraux des principales églises des diocèses de
Léon et de Coroouaille » 1) y a là une exagération qu'il est inutile de
réfuter. Avaut Alain Gap, il y avait dans toutes les villes de Bretagne,
des peintres- verriers, dont quelques uns étaient excellents.
(2) M. A. de Barthélémy a mentionné quelques peintres-verriers de
cette famille, dans le 1 er vol. du Bulletin de l'Association bretonne,
pages 225 et 280.
— 49 —
Saint-Pol. Celui qui faisait partie de la confrérie des arts, vers
1618, devait être Jean Bouricquen, le jeune. »
« Cette confrérie qui s'intitule elle-même, dans un de ses
actes, Aima Societas magistrorum in artibus, et qui prendrait
aujourd'hui le nom d'Académie des beaux-arts, avait des statuts
que je n'ai pu retrouver ; mais il ressort clairement du titre
qu'elle s'était donné, aussi bien que des éléments qui la corn*
posaient, que le but de sa création, était d'encourager et de
faire prospérer les arts libéraux dans la sphère d'action
qu'elle s'était tracée. »
• J'ai déjà dit que j'ignorais à quelle époque fut établie la con-
frérie des arts. Je suis très-porté à penser qu'elle existait
depuis une époque antérieure au XVII e siècle ; mais si cette
conjecture n'était pas fondée, il faudrait cependant considérer
son établissement comme une conséquence de traditions ar-
tistiques, encore vivantes, du moyen âge, car on admettra dif-
ficilement qu'une association semblable se fût formée tout
d'un coup, et presqu'au lendemain des misères et des hor-
reurs de la Ligue, si elle n'avait pas eu de profondes attaches
dans le passé.»
La liste des membres de celte confrérie trouve naturelle-
ment sa place à la suite des lignes qui précèdent. J'appelle
particulièrement votre attention sur ce fait que parmi les ecclé-
siastiques qui en faisaient partie, figurent huit scolastiques
(scholastici). On donne quelquefois à ce mot le sens de « maîtres
d'école. * Mais ici il ne saurait avoir cette signification, parce
jjue quelques-uns de ces scolastiques sont en même temps
recteurs de paroisses, et que l'un d'eux remplissait l'office
de procureur de la confrérie, office important et peu en rapport
avec les humbles fonctions de mat Ire d'école. On sait d'ailleurs
que dans les bons auteurs, le mot « scholasticus » n'a pas cette
signification, mais qu'il désigne un orateur, un déclamateur,
et d'après Pétronne un homme de lettres.
— 80 —
NOMIHA C06N0MIHA ET TITCH HOKOBIS MlGISTROBtm COHFRA-
TBBNITATIS IN ABTIBUS VITA FRUENTIUM ET PRiEDICTAM CON-
FRATERNITATEM FIDBLITER COLEHTIUM :
Et primo :
Venerabilis magister Yvo Gat, abbas hojus confraternités,
canonicus Leonensis et recthor de Ploumorn (Plouvorn.)
Venerabilis magister Yvo Bodenes, procurator dictae confra-
ternitatis et scholasticus de Landerneau.
Venerabilis magister Julianus Keranguen, canonicus Leonen-
sis, arcbydiaconus d'Acre et recthor de Plougar.
Venerabilis magister Johannes Pascouet, doctor Sorbonicos
et recthor de Goulfen.
Venerabilis magister Christoforus Floch, recthor de Drenec.
Venerabilis magister Alanus Penven, scholasticus de Guy-
nevez (Plounévez-Lochrist).
Venerabilis magister Benedictus Kervillo, doctor Sorbonicas
et Iheologalis Leonensis.
Venerabilis magister Franciscus Gladon, scriba hujus frater-
nilatis et recthor de Tregarantec.
Venerabilis magister Bobertus Ref floch, recthor de Lampaol-
Guytalmezo.
Venerabilis magister Yvo Soutre, subcuratus parrochiae de
Ploudider.
Venerabilis magister Johannes Sylguy, recthor de Plodider.
(Plouiderj.
Venerabilis magister Alanus Jezecal, recthor de Kersent.
Venerabilis magister Yvo Guen, scholasticus.
Venerabilis magister Franciscus Coueffeur, canonicus colle-
gii divae Annae de Lesneven.
Nobilis Franciscus de Lafille, dominus de la Pallue et pro-
praelor curiae regalis Evenopolensis (Lesneven).
Nobilis Johannes Duboys, dominus de la Pallue et propraetor
curiae regalis Evenopolensis.
— . SI —
Nobilis Jacobus Déportes, dominus de Pontrivy et procurator
regius curiae regalis Evenopolensis.
Venerabilis magister Francisco Correlea, rector de Treffou.
Venerabilis magisler Herveus Marchalant, canonicus eccle-
siae heatae Mariae de Folgot (sic).
Venerabilis magister Yvo Measanstourm, recthor de Ploue-
dern.
Venerabilis magister Johannes Cam, presbyter.
Venerabilis magister Hamo Stum, presbyter.
Venerabilis magister Guillermus Treguer, bacaloreus.
Nobilis Hamo Kergo, dominus de Pratanlan.
Nobilis Johannes Goazmoal, dominus dicti loci.
Venerabilis magister Franciscus Billon, subcuralus parochiae
de Ploumorn.
Venerabilis magister Desiderius Saitte.
Venerabilis magister Charolus Auffret, subcuratus parrochiae
de Kerlouen (Kerlouan).
Venerabilis magister Franciscus Meudec, subcuratus parro-
chiae de Plougar.
Venerabilis magisler Johannes Gourchant, subcuratus paro-
chiae de Plouneour-is-f reaz.
Venerabilis magister Alanus Lagadec, presbyter.
Venerabilis magister Yvo Abautret, recthor de Tremeneach.
Venerabilis magister Herveus Soret, presbyter.
Venerabilis Chrisloforus Bleas/ recthor du Guysezni.
Venerabilis magister Yvo Branellec, scholasticus de Guyte-
vede (Plouzévédé).
Venerabilis magister Oliverius Bras, scholasticus.
Nobilis Guillermus du Boys, dominus de Pratdon.
Nobilis Gabriel Gouriou, dominus deKerraaniou.
Nobilis Franciscus Gouriou, dominus de Kerisguirien.
Nobilis- Nicolaus Gouriou, dominus de Menmeur.
Nobilis Yvo Gousillon, dominus de Lescouuec,
Nobilis Nicolaus Graner, dominus de Keranbellec.
Nobilis Franciscus de Launay, dominus de Pentre.
— 52 —
Nobilis Petrus de Baudiez, dominus du Mouden,
Nobilis Jacobus Percevaux, dominus de Keranmeal.
Nobilis Jacobus Arneyer, dominus du Rosglas.
Nobilis Guiliermus Tribara, dominus de Mescaloun.
Venerabilis magister Tanguidus Merien, prcsbyter.
Venerabilis magister Michael Glazran, canonicus collegii
divae An use de Lesneven.
Venerabilis magister Guiliermus Usinée, reclor de Kernouez,
et gubernator ecclesiae bealae Mariae du Lesneven.
Venerabilis magister Johannes Floch, subeuratus parroebiae
de Kernilis.
Venerabilis magister Herveus Manacb, subeuratus Ireviae
sancti Tregaroci.
Venerabilis magister Bernardus Pap, subeuratus parroebiae
de Treffles.
Venerabilis jnagister Ludoficus (sic) Traon, scholasticus de
Trèfles.
Nobilis ac venerabilis magister Jacobus Manacb, dominus de
Kerelle et chanonicus {sic) collegii divae Annae de lesneven*
Nobilis Herveus Sylguy, dominus de Cazquerou.
Venerabilis magister Prigentius Boudeftr, presbyter et recto >
de Languengar.
Nobilis Vicenlius Moyne f dominus de Trevigner.
NobiIi3 Frauciscus Geffroy, dominus de Keraudry,
Magister Yvo Symon.
Nobilis Benedictus Keradanet, dominus de Beusit.
Nobilis Herveus Sylguy, dominus de Keradennec.
Nobilis Franciscus Guillou, dominus de Kerilly.
Venerabilis magister Guiliermus Kersangilly, rector de Saot-
Ouardon (Landerneau).
Venerabilis magister Christoforus Falcun, praesbiter.
Nobilis Yvo du Boys, dominus du Sclus.
Venerabilis magister Frauciscus Pochart, canonicus collegii
divae Annae oppidi de Lesneven.
Venerabilis magister Jacobus Roudault, rector et scholasticus
de Kerlouan.
- 83 -
Venerabilis magister Ludovicus Mercyer, canonicus collegii
divae Annae oppidi de Lesneven.
Venerabilis magister Franciscus Pinguilly, presbyter.
Venerabilis magister Franciscus Tanguy, subcuralus parro-
chiae de Plouenan.
Venerabilis magister Franciscus Mao, vicarius de Beuzit.
Magister Hichael Reys»
Magister Franciscus Lucas.
Magister Johaunes Coz.
Magister Alanus Le Bis, civis de Landerneau.
Magister Alanus Cap.
Venerabilis magister Yvo Bouguenec, presbyter.
Venerabilis magister Guillermus Dal!, rector parrochiae de
Langueugar.
Nobilis Guillermus Lesvern, dominus de Penantraon.
JHobilis Franciscus du Vall, dominus de Traoules.
Nobilis OUiverius Labbé, dominus de Coatguenec.
Magister Franciscus Hir.
Venerabilis magister Yvo Donval, presbyter et rector de
Ploudeniel.
Nobilis Guydo Roux, dominus du Reunyou.
Nobilis Yvo Guen.
Nobilis Guydo de Ternant, dominus dicti îoci.
Venerabilis magister Clodius Ceveur, presbyter.
Venerabilis magister Alanus Roux, rector de Guycourvest.
(Plougourvest).
Venerabilis magister Johan^es Cloarec, presbyter et scholas-
ticus.
Venerabilis magister Prigentius Frout, presbyler et subcu
ratus de Kerlouen.
Nobilis Yvo Mennyer,
Magister Sébastian us Born.
Venerabilis magister Johannes Evenou, rector parrochiae de
Forest.
— 54 —
Venerabilis m a gis ter Johannes Berthou, presbyter parrochiae
Sainctonan.
Venerabilis magister Christoforus Inisan, presbyter parrochiae
de Kersent.
Venerabilis magister Yvo Guezenec, presbyter parrochiae de
Kersent.
Venerabilis magister Yvo Rouraeur, presbyter parrochiae de
Kersent.
Venerabilis magister Guillermus Kerneiz, presbyter parrochiae
de Kersent.
Venerabilis magister Thomas Foll, presbyter parrochiae de
Santonan.
Venerabilis magister Guillermus Broudin, canpnicus eccleska
beatae Hariae de Folgot.
Venerabilis magister Johannes Oslis, presbyter et chorista
ecclesiae beatae Mariae de Folgot.
Venerabilis ac nobilis magister Franciscus Sylguy, presbyter
et dominus Cuezguelen (?}.
Venerabilis magister Franciscus Hellou, presbyter parrochiae
de Kernouez.
Magister Johannes Bouricquen, pictor.
Venerabilis magister Guengualoeus Marec, presbyter.
Venerabilis magister Prigentius Abalan, presbyter.
Honorabilis vir magister Petrus An Gall.
Magister Tanguidus Fiily.
Magister Guillermus Reffloch.
Franciscus Jezecal. •
Nobilis et venerabilis mfogister Christoforus Lesven, archy-
diaconus, canonicus Leonensis et reclor de Ploudiry.
Nobilis ac venerabilis magister Rollandus Poulpiquet, cano-
nicus Leonensis.
Venerabilis magister Johannes GUjillerm, doctor Sorbonicus et
rector de Guymillio.
Venerabilis magister Herveus Groguennec, presbyter.
— 55 —
Venerabilis magister Tanguydus Cueff, presbyter, rector de
Cleder.
Venerabilis magister Ollivier, presbyter,
Venerabilis magister Barlholomeus Stum, presbyter.
Venerabilis magister Henricus Cloarec, presbyter et rector de
Elecirec, (hod. Guiquelleau).
Venerabilis magister Lucas Pellan, presbyter.
Venerabilis magister Yvo Kerdelant, presbyter.
Matbeus Goff.
N
Liste de nouveaux maîtres avec la date de leur réception.
1618
28 Août. — Ecuyer, Guillaume Gouzillon, sieur du
Helles.
François Roudaut, prêtre.
Hervé Olivier, prêtre.
30 Août. — François Keroulas, sieur de Crebineç.
François Adan, prêtre.
Yves Tanguy, prêtre.
1619
5 Août. — HessireRené Barbier, chevalier de l'Ordre
du Roi, seigneur de Kerjean.
Noble homme, Jacques Barbier, seigneur de
Kernaou.
Ecuyer, François Keranguen, sieur de Tron-
gurun.
Yves Martin, vicaire de Lesneven et cha *
noine de Sainte-Anne.
6 Août. — Noble Loys Jacobin, prêtre, archidiacre de
Quiminidily, chanoine grand vicaire et
officiai de Léon, recteur de Ploudaniel.
_ 56 —
29 Août. — François Le Gall, recteur de Kepnilis.
Robert Quéré, sous- curé de Kernouez.
Jean Urvoatz, prêtre,
Christophe Riou> prêtre.
1620
4 Août. — Marc Bellec, prêtre.
Jean Kergoat.
Jacques Goret.
24 Août. — Alain Goazglas (il signe Goazlas), prêtre,
, gouverneur de Lochrist.
Pierre Ann Err, prêtre de la paroisse de
» Tréflez.
1 er Septembre. — Mathieu Marec, recteur de la paroisse du
Crucifix, de la ville de Saint-Paul.
Ecuyer Jean du Dresnay, sieur de Kergu-
varch.
Noble et puissant François Kergouant, sei-
gneur de Kercornadeach.
30 Septembre. — Jean Messager, prêtre.
Henri Iaouanc, sieur de Langroazes (il signe
Le Jeune).
Yves Le Bis, sieur de Penguelen.
Noble homme Hervé Lymynyc.
1621
2 Août . — François Rolland, recteur de Landeda._
3 Août. — Morice Tranouez/prêtre.
François Pellan, de Lesneven.
4 Août. — • Alain En, prêtre.
1 er Septembre. — Laurent Rannou, prêlre.
30 Septembre. — Yves Urvoatz, prêtre.
Nicolas Le Borigne, prêtre.
Ecuyer Guillaume Le Gac, sieur de Trev-
veur.
L:
r
— 57 —
1622
9 Août. — Noble homme François Kersaint-Gilly, sieur
de Kerenes.
Il Août. — Maître Hierosme Kerneis, notaire royal et
procureur de la Cour royale deLesneven.
21 Septembre. — Jacque Croguennëc, prêtre.
10 Août. — Ecuyer Jean du Châteaufur, sieur de Ker-
volant.
Ecuyer Auffroy Kerbic, sieur de Keraot.
Ecuyer Gabriel Keranguel, sieur de KergaH.
Noble homme Christophe Gadrouillac.
Noble homme maître Guy Turin.
Noble homme Guillaume Lochou.
Noble homme Pierre Aubin.
François Pennée, vicaire de Lesneven.
24 Août. — Noble homme Guillaume Poulpry, seigneur
de Lovengat.
Ecuyer Alain Geffroy, seigneur du Lety.
Yves L'Her, prêtre.
Yves Cadiou, prêtre.
1623
29 Août. — Noble homme Claude Parcevaux, seigneur
de Coatdrez.
Noble homme Jean Penfeuntenyou.
1625
4 Août. — Guillaume Grall, prêtre de Languengar.
On voit par cette dernière liste que les réunions des mem-
bres de la Confrérie avaient lieu au mois d'août et de septem-
bre, époque où Ton célébrait des services pour les maitres-ès*
arts décédés dans Tannée. C'était à la suite de ces services que
se traitaient les affaires de la Société. Les actes suivants mon-
— 58 -
treront de quelle manière se faisaient les couvocatious des con-
frères, et la réception des nouveaux maîtres-ès-arts.
I.
« Ce jour, segond de septembre (1619), le sieur abbé de la
Confrairie des Arts a ordonné que maître Berlelemy Le Stum
sera orateur à la généralité (réunion générale) h Lesneven. » —
Au-dessous est la signature de Barthélémy Le Stum.
II.
* « Le service de maître Jean Chalm sera célébré demain en
l'église de Monsieur sainct Miche). Le recteur de Treffgarantec
célébrera, et le procureur de ladite Confrérie sera orateur. Le
jour de la sainct Michel le service du sieur de Keranmeal, en
la paroisse de Kernouez ; le sieur de Plouider (officiant) ; le
sieur de Kerlouan (orateur ). Le lendemain, jour desainct Hié-
rosme, le service du feu recteur de Languengar sera célébré en
l'église de Monsieur sainct Goulfen ; le célébrant sera le recteur
de Guisezny ; orateur, le sieur recteur de Goulfen. Faicl le cin-
quiesme jour d'aoust 1619. Signé: T. Gat. »
III. /
« Le 28 e jour-d'aoust 1618, après midy, escuyer Guillaume
Gouzillon, sieur du Hellez, a esté receu h ladite confrairie aulx
Arts, par la permission du sieur abbé de ladite confrairie, et
ont respectivement signé ; ensemble ont esté pareillement receuz
MM. François Roudault et Hervé Ollivier prebtre, lesditz jour et
an. Signé: Guillaume Gouzillon ; F. Roudault; Y. Gat; Jan
Goz, bedeau. »
IV.
« Le 6 e jour d'aoust 1619, noble et vénérable personne mes-
sire Loys Jacobiu, prestre, archidiacre de Quiminidily, grand-
vicaire et officiai de Léon, a esté receu en la confrérie des mes-
très aux Artz, par le consentement des confrères d'icelle con-
frérie. »
- S9 —
V.
« Venerabiies magistri et presbyleri Marcus Bellec, Johannes
Quercoat, et Jacobus Goret in Almam Societatem magistrorura in
Arlibus recepti fuerunt consensu domini procuratoris et nonnul-
lorum confratrum predictœ Socielatis, die 4* mensis augusli
anno 1620. In cujus rei fidem predictus procurator et predicti-
tres presbyteri de novo recepti présentes consignant lilteras, et
se uno consensu astringunt functioni antiquorum fratrum, etiara
pro defunctis fratribus anno elapso, omnibusque officiis confra-
•
ternitati debitis. Signé: MiM. Bellec, J. Kergoet; J. Goret;
Y. Bodenes ; F. Gladon ; Boudeur ; Bleas ; Bras ; Pochart ;
Coueffer. »
VI.
« Ce 9 e jour d'aoust 1622, avons receu et recepvons présen-
tement noble hojmne Francoys Kersangilly, sieur de Kerennez,
lequel promest soubz son signe s'acquitter fidèlement selon les
statuz de ladite confrairie. Faict lesdits jour et an que dessus.
En tesmoing de quoy a ledit sieur signé o nos autres confrères,
de ladite confrairie. Signé: F. Kersainctgily ; Y. Donval ;
F. Pochart ; Y. Tanguy. »
Après cette lecture, M. Bourassin demande la parole
pour communiquer à l'assemblée les résultats de re-
cherches qu'il a faites sur les plantes employées par
les Gaulois et par les Bretons .
« M. le Président de la Société d'archéologie m'ayant prié,
dit M. Bourassin. de rechercher les plantes employées en méde-
cine et dans les cérémonies religieuses par les gaulois et les
celtes, je viens, Messieurs, vous donner le résultat de mon tra-
vail. J'ai dû rechercher d'abord, près de nos vieux bretons les
plantes qu'ils emploient de temps immémorial en médecine, et
j'en donne ici la nomenclature, j'ai aussi puisé dans les ouvra-
ges anciens des renseignements précieux, que j'ai surtout trou-
— 60 -
vés à Paris, à la bibliothèque nationale. Mais je suis loin, je
crois, d'avoir encore rencontré toutes les plantes employées
par les gaulois et les celtes. Voici une liste qui en renferme un
assez grand nombre.
1° La Verveine (Verbena officinaîis). — lette plante était
consacrée dans les cérémonies religieuses. On dit qu'en s'en
frottant le corps on obtient tout ce qu'on veut.
2° Le Guy (Viscum album). — Consacré également dans
les cérémonies religieuses, et croissant sur les chênes, les
pommiers et les peupliers.
3° Le Myrtille, ou Airelle Myrtille (Vaccinium myrtillus). —
Consacré dans les cérémonies. Le fruit de cette plante qui est
comestible est appelé Luss en breton.
4° La Bryoneou Vigne blanche (Bryoniadioica). —Employée
contre l'bydropisie, les rhumatismes et la paralysie.
5. Le Nénuphar blanc et le N. Jaune {Nymphœa alba et
Nuphar luteum).— Sa racine était employée comme tempérante.
6. La grande Chelidoine ou grande Eclaire ( Chelidonium
majus). — C'est, dil-on, avec cette plante que les hirondelles
guérissent les yeux de leurs petits. Elle était recherchée par les
anciens pour le même usage.
7. Halus. — Une plante désignée sous ce nom et qui avait '
les mêmes caractères que ceux du thym, était très-employée
pour les douleurs par les Gaulois.
8. L'Épi d'eau (Potamogeton natans). — Employé en méde-
cine comme astringent.
9. La Statice (Statice armeria). — Plante médicinale.
10. La Passe-pierre, ou Casse-pierre (Crithmum maritimum).
— Les Venètes, d'après Pline, employaient cette plante comme
aliment.
11. Les Cheveux de Vénus (Adianthum capillus Veneris). —
On employait cette plante en infusion contre la gravelle.
12. L'Orchis pourpre ( Orchis purpureaj. — Les tubercules
de cette plante passaient pour être aphrodisiaques.
i
! %
— 61 -
13. L'Absinthe (Artemisia absinthium). — Employée par les
Gaulois dans les cérémonies religieuses ; elle initiait aux mys-
tères d'Isis.
14. Le pied d'oiseau (Ornithopus perpusillus). — Employé
par la magie.
15. La Gmàe (Reseda lutcola) . — En employant cette plante
on devait dire trois fois : sais-tu, sais-tu qui fa fait mal?
16. La Belladonne (Atropa belladonna). — Cette plante
était trés-connue des anciens bretons. On l'emploie encore
aujourd'hui dans certaines occasions, par exemple lors des
grands repas de campagnes, pour enivrer plus promptement
les convives.
17. L'Osraonde royale (Osmunda regalis). — Cette belle
fougère était consacrée dans les cérémonies druidiques.
18. La Molène (Verbascum). — Employée comme diuréti-
que par les Vénètes et les autres Gaulois.
19. La Verge d'or (Solidago Virga aurea). — Très-connue
des anciens bretons comme vulnéraire. Je crois qu'on s'en
servait aussi comme ornement dans les cérémonies religieuses.
20. Le Pied de veau {Arum maculatum). — Employé en
médecine.
21. Le Lycopode (Lycopodium clavatum). — Très-vénéré
des anciens.
22. L'Iris fétide ( Iris fœtidissima). — Employé en médecine.
23. Le Chêne (Quercus). — Vénéré par les Celtes et les
Gaulois selon Pline.
24. Le Plantain d'eau {Alisma plantago). — Cette fiante
connue des Gaulois était employée contre la rage.
25. Le Concombre piquant^ Momordica elaterium) — Concom-
bre moins gros que le concombre cultivé, employé pour guérir
les douleurs et les ulcères. Il était connu des gaulois.
% 26. La Menthe (Mentha tomentosa). — Plante médicinale ;
elle causait la mort des fœtus et s'opposait à la génération
en coagulant la semence.
— 62 —
27. La Morelle noire (Solanumnigrum). — Employée contre
les scrophules.
28. L'Euphorbe (Euphorbia peplis). — Cette plante mâchée
raffermit les dents.
29. Le Lierre (Hedera hélix). — On en faisait des couronnes
que l'on portait dans les cérémonies religieuses.
30. L'Asphodèle (Asphodellus albus). — Cette plante con-
sacrée par les druides, était classée parmi les plantes les
plus célèbres.
3*1. Le Souchet (Cyperus). — Les tiges d'une espèce de ce
genre étaient employées par les gaulois pour faire certains
ouvrages.
32. La Digitale pourprée (Digitalis purpurea). — Plante
très-connue des anciens.
32. L'Enanthe (OEnanthé). — Plante médicinale qui res-
semble un peu à la cigûe.
33. Le Pastel (Isatis tinctoria). — D'après Pline les fem-
mes et les filles des Gaulois se teignaient le corps avec celte
plante.
34. La Vigne (Vitis vinifeta). — Pour arrêter les vomisse-
ments, les Gaulois pilaient des vrilles de vigne et en buvaient
le jus avec de l'eau.
35. Le Peuplier blanc (Populus alba). — Employé par les
Gaulois pour les maux d'oreilles.
36. Le Sureau (Sambucus). — Plante employée en méde-
cine par les Gaulois.
37. Xe Saule (Salix). — Le saule était égalemeut employé
comme remède ; les feuilles pilées guérissaient les dartres.
38. Le Samole (Samoltts valerandi). Il éj.ait employé par les
druides dans les cérémouies religieuses; il fallait le cueillir de
la main gauche et à jeun.
39. Le Mûrier sauvage (Rubus). — Il était employé comme
remède par les anciens Bretons.
40. Le Millefeuilles (Achillœa mille folium). — Employé par
les druides comme remède.
— 63 —
41. La Scolopendre( Scolopendrium officinale).— Cette fougère
aussi appelée langue de cerf était très-connue des Gaulois.
42. Le Caillelait (Galium). — Une couronne de cette plante
calmait les maux de tête. Elle est encore employée par les
Bretons.
L'Orobanche, la Scrophulaire, le Trèfle à quatre ou à cinq
feuilles étaient aussi chez les anciens des plantes médicinales
ou employées dans la magie.
M. le Président remercie M. Bourassin de son inté-
ressante communication, et regrette qu'il n'ait pas
ajouté aux noms français et latin des plantes, leur
nom breton.
M. Bourassin répond que la connaissance impar-
faite qu'il a de cette langue, ne lui a pas permis de
faire cette addition.
M. Le Men ajoute que lorsqu'il s'occupait de bota-
nique il a recueilli un assez grand nombre de noms
bretons de plantes, mais que ces noms varient sou-
vent suivant les cantons, et que le même nom est
quelquefois donné à plusieurs espèces n'appartenant
ni à un même genre ni à une même famille.
A la suite de ces observations MM. Lavieille, pro-
fesseur de rhétorique au collège de Quimper, Le Mai-
gre, directeur de la Compagnie d'assurances, le Finis-
tère, présentés par MM. de la Villemarqué et Le Men,'
et M. Livanen, clerc d'avoué, présenté par MM. Au-
dran et Le Moalligou, sont admis à l'unanimité mem-
bres de la Société archéologique du Finistère.
La séance est 4evée à quatre heures et demie.
Le Secrétaire,
R.-F. LE MEN.
- 64 —
Dons offerts au Musée départemental d'Archéologie.
M. BEZARD, directeur de l'Enregistrement à Quim-
per.
Un grand bronze d'Antonin le Pieux,
Une monnaie de billon et un petit bronze de Pos-
thume.
Un petit bronze*de Gallien.
Quatre monnaies françaises en bronze.
Un monneron de 5 sous de la République.
Une pièce en cuivre de Philippe tV, roi d'Espagne,
portant la date de 1621.
Onze monnaies étrangères.
Un jeton en bronze du XV e siècle, portant d'un
côté : Vive le roi ! vive le roi ! et de l'autre : Vive blan
pain ! Vive !
Deux poids en bronze, l'un de 21 gros 8 grains,
l'autre de 10 gros 12 grains.
M. BUREL, horloger à Landivisiau.
Un denier d'argent de la famille Junia.
•^."■^■w"
M. FROCHEN, membre de la Société.
Un jeton en bronze de Louis XIV.
M. PROUHET, notaire à Trégunc.
Un quart d'écu de Henri III.
M. le comte DE BRÉMOND D'ARS, membre de la
Société.
Un double tournois de Charles de Gonzague, comte
de Rethel.
- 65 —
M. MANCEAUX, chirurgien de l re classe de la
marine.
Un vêtement de chef des Iles Marquises, avec divers
ornements en cheveux, en os et en nacre.
Un hameçon en nacre, de l'Océanie
Une grande pagaie en bois de rose, des Iles Mar-
quises .
Un modèle de pirogue de Ceylan.
Un fuseau avec son peson, provenant d'un cimetière
du Pérou.
M. JACOB, libraire à Quimper.
Une coupe en terre rouge couverte à l'intérieur
d'un vernis métallique, trouvé en Sicile dans un tom-
beau sarrazin du IX e siècle.
Un modèle de double pirogue de la Nouvelle-Calé-
donie.
Un hameçon en nacre, de l'Océanie.
M. Louis LACK, à Quimper,
Une monnaie de l'Inde anglaise.
SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1877.
Présidence de M. F. AUDRAN, Vice-Président.
Étaient présents : MM. Audran, Lorans, de Kerca-
dio, Faty, Fougeray, Le Noble, Creac'hadic et Le Men*
secrétaire.
M. le Président donne lecture d'une dépêche reçue
ce matin par M. Le Men, et par laquelle M. de la
Villemarqué l'informe qu'il a été subitement empêché
au moment de partir pour se rendre à la réunion.
M. le Président fait ensuite connaître à l'assem-
blée qu'un jugement du Tribunal correctionnel de
Quimper, a débouté M. Duchatellier de ses prétentions
relativement à l'insertion dans notre Bulletin, de sa
lettre lue à la réunion de la Société archéologique du
1& janvier 4877, et Ta condamné aux dépens.
Sur la présentation de MM. Audran et Le Men,
M. Arthur de La Borderie est nommé à l'unanimité,
membre de la Société archéologique du Finistère.
La parole est ensuite donnée à M. Le Men, pour lire
un travail porté à l'ordre du jour de la séance, et qui
a pour titre :
LB LIVRE DE COMPTE DU SIEUR DE LA HATE.
Le 30 septembre 1569, noble homme Yves de Lanuzouarn,
sieur dudit lieu en la paroisse de Plouenan près Saint-Pol-de-
Léon, mourut, laissant de son mariage avec demoiselle Jeanne
de Gouzillon, quatre filles et un fils. Ce dernier était mineur
ainsi que trois de ses sœurs. Sa veuve se remaria en 1571 avec
Louis Barbier, seigneur de Kerjan, veuf lui-môme de Fran-
çoise de Horizur. Louis Barbier habitait en la paroisse de Saint-
Vougay, le château de Kerjan, qu'il avait fait bâtir avec le
concours de sonjoncle le chanoine Hamon Barbier,et qui passait
pour être la plus >belle maison de Bretagne. C'est à lui que
le roi de France Henri III écrivait en 1586 :
« Monsieur de Querjan de Léon, désirant recouvrir prompte-
— 67 —
ment certaine quantité de chiens, comme lévriers et levrières
des plus beaulx, grands et forts, qui se puissent trouver en vos.
quartiers, j'ay commandé à ce porteur, Barbe, l'un de çeulx
qui ont charge des grands lévriers de ma chambre, de
s'acheminer présentement vers vous» p ouï vous faire entendre,
combien j'auray agréable, que parmy ceuls que vous avez à,
présent, vous faciez esleclion d'un lévrier et levrière des.
meilleurs que vous avez, pour m'en faire partsoubs la condqitte
de cedit porteur, surtout que vous aimiez mon plaisir et,
contentement, priant Dieu qu'il vons ayt, Monsieur de
Querjan de Mon, en sa sainte garde. De Paris le XXII e jour
de may 158Ç. Signé Henri. *. (1)
La terre de Kerjau fut érigée en marquisat en 1618,
Après le ; iKtfriage de Jeanne de. Gouzillon avec Louis Barbier,
Nicolas de la Haye, écuyen, sieur de Kerlaudy, fut chargé de,
la tutelle des mineurs de Lanuzouarn. Le compte qu'il rendit.
4e sa gestion commencée au mois de mai 1571 et finie au
mois d'octobre 1578, forme un registre do 149 feuillets,
auquel j'emprunte les détails et les extraits suivants, où Ton.
trouvera de curieuses indications sur la vie privée des,
gentilshommes bretons au XVI e siècle.
A la mort d'Yves de Lanuzouarn, sa fille ainée, dont le
préuoiA n'est pas mentionné dans le compte de Nicolas de la,
Hayes était déjà entrée eu titre d& « danaoiselle »,dans la riche
ipaisoa de Kermavan t2). A cette époque* à l'imitation de la,
cou*, les dames bretonnes degrande maison.,, avaient près d'elles,
une ou pîlusienjcâ demoiselles d'hanneur, et de même que les
jeunes, garçons entraient comme pages, au service des seigneurs,
qui les élevaient et les, njojirrisaisent, les jeunes filles nobles*,
après avoir apçris dans .un couvent, à lire, à écrire et à coudre,
complétaient leur éducation dans, la compagnie d'une grande
(I) Notice sur le château de Kerjan, par M. de Kerdanet, page 27.
Cette brochure publiée eu Iâ34, est devenue extrêmement rare.
<j3) En toi fwoisa de Keunilis, évècbé de Léon. Cette t^rre. fiât érigée
en marquisat eu 16 1 2 en faveur des Maillé.
— 68 -
dame, qu'elles servaient en qualité]de demoiselles d'honneur, et
quelles ne quittaient [ordinairement que pour se marier.
J'ouvre ici une parenthèse à propos du mot « damoiselle «
que je viens de prononcer. J'ai lu dans des livres très-sérieux
que ce nom se donnait autrefois aux filles des dames nobles, et à
des femmes mariées qui n'appartenaient qu'à la noblesse infé-
rieure. Il y a dans cette assertion une erreur certaine. Le titre
de « damoiselle » se donnait à la fin du XVI 6 siècle en Breta-
gne, à des dames mariées d'une très-haute noblesse,et la preuve
en est que les dames de Kermavan,de Kerjan, et bien d'autres,
sont toujours appelées damoiselles dans le compte que j'analyse.
Les trois filles puînées de Lanuzouarn étaient Jeanne, dame
de Kernaou, Catherine, dame de Keranmunou et Françoise,
dame de Roshamon. Elles sont presque toujours désignées par
leur surnom nobiliaire dans le compte de leur tuteur. En 167!
il fut décidé par le conseil de famille qu'elles entreraient cette
année comme élèves, l'aînée au couvent de Saint-Georges, et
les deux autres au couvent de Saint-Sulpice de Bennes. On
trouvera, dans les extraits suivants de leur compte de tutelle,
tous les détails de leur voyage de Lanuzouarn à Bennes et de
Bennes à Lanuzouarn. Elles demeurèrent deux ans au couvent,
où se trouvait en même temps qu'elles, leur cousine « made-
moiselle de Mezle, » petite-fille de Catherine de Lanuzouarn,
dame de Keroulas, et fille de Marie « l'Héritière de Keroulas »
qui ne mourut pas de chagrin deux mois après avoir épousé le
marquis de Mezle, quoi qu'en dise la ballade bretonne. Quant
à Catherine de Lanuzouarn, qui, suivant la même ballade, se-
rait entrée dans un couvent après la mort de sa fille, elle con-
tinua à vivre paisiblement au manoir de Keroulas, où ses nièces
de Lanuzouarn lui rendaient de temps en temps visite.
Le prix de la pension à l'abbaye de Saint-Georges, où se fit
l'éducation de Jeanne de Lanuzouarn, était de 90 livres 13 sous
4 deniers par an, dont la valeur en monnaie actuelle et au pou-
voir actuel de l'argent, serait d'un peu plus de 600 francs. La
— 69 -
pension à Saint-Sulpice était bien moins chère, car les deux
sœurs de Jeanne, qui recevaient leur instruction dans cette ab-
baye, payaient ensemble 13ô livres par an, soit 472 francs pour
chacune, en monnaie actuelle.
Après leur retour du couvent les trois « damoiselles » de-
meurèrent quelques mois à Kerjan, à Lanuzouarh, à Keroulas,
à Trébabu et dans d'autres manoirs où elles avaient des pa-
rents. L'aînée des quatre filles épousa le sieur de Froutguen,
nom que Nicolas de La Haye, remplace souvent par la traduc-
tion quelque peu fantaisiste delà Fontaine-Blanche. Le compte
de tutelle donne le détail de sa toilette de noce. Quant à ses
trois sœurs, elles entrèrent comme demoiselles de compa-
gnie, Jeanne de Kernaou, chez « madamoiselle de Liscoet »,
Catherine de Keranmunou, chez « madamoiselle deLocmaria»
et Françoise deRoshamon, chez « madamoiselle de Coatmeur».
Yves de Lanuzouarn, le plus jeune des enfants, reçut les
premiers éléments d'instruction, d'un clerc qui fut attaché à sa
personne, et qui l'accompagna plus tard à Paris dans un collège
fréquenté par des écoliers de la a nation bretonne. » 11 y de-
meura environ deux ans, et mourut au mois d'octobre 1578.
Voici les extraits du compte de tutelle dont j'ai parlé plus haut :
Dépenses concernant les trois Ailes puînées de
Lanuzouarn (f).
1571.
Le 3 septembre 1571, à Hamon Pappe sellier demeurant à
Sainct Paul, pour accoustrer troys selles à usajge de femme et
une à usaige d'homme, pour rendre lesd. damoiselles à Ren-
nes, 35 s.
Le 7 septembre, en deux aulnes et demye de serge d'Ascot
pour faire ung mantheau à l'ugne desd. damoiselles, à raison de
30 s. l'aulne, 75 s.
(I). On aura la valeur des sommes mentionnées dans ce compte, en
monnaie actuelle et au pouvoir actuel de l'argent, en multipliant ces
sommes par sept.
- 70 —
Pour deux aulnes de bougaran noir pour garnir trois raan-
tbeaulx pour lesd. damoiselles, et pour faire ung bissac pour
porter partie des hardes desd. damoiselles, à raison de 6 s.
l'aulne, 12 s.
En deux aulnes et deraye de drap de demy Londres rouge,
pour faire des gardes-robe «usd. damoiselles, â 20 s. l'aulne,50 s.
Pour troys paires de solliers pour lesd. damoiselles, 30 s.
Au maréchal de Ponteon pour ferrer de neuff cincq chevaulx
pour aller à Rennes, 40 s.
À ung tailleur de Mourlaix pour la faczon de troys roan-
theaux longs pour lesd. damoiselles, 30 s.
Au pelleltier de Mourlaix pour la peine de fourrer led. man-
theau de cherge d'Ascot, et la faczon de fourrer deux aultres
manteaulx, 6 1.
Pour passement à faire des ceintures ausd. damoiselles, 5 s.
Le 14 septembre, en poisson, encontre la venue de messieurs
de Pirimill, Kerjean, madamoiselle de Kerjean, qui étoint
venus aud.lieu de Lanuzouarn conduire les troys filles puisnées
de Lanuzouarn et pren'dre congé d'avecq les filles qui partirent
le lendemain 15 dud. moys pour aller à Rennes, 15 s.
Le 15 septembre pour un coussinet et ung long courreau de
cuyr pour attacher la malle, 10 s.
Pour la collacion à Mourlaix aud. damoiselles et à leur
eompaignie, et la repue des chevaulx, 30 s.
Le 16 septembre jour de dimanche, à Kernerzic, à ung
prebtré pour dire sa messe aud. lieu, en l'intention des damoi-
àellôs, fut poyé une reaile, 3 s. 9 d.
Aux chambrières à Kernerzic pour leurs espingles, 3 s. 10 d.
Aux valletz dud. lieu, 20 d.
Pour le soupper, la chouchée (sic) du sieur de Kerbannalec (1),
les troys damoiselles, quatre hommes et le deffroi de cinq che-
vaulx à Guingamp, 70 s.
(I) Le gentilhomme chargé de conduire à Rennes les filles de Lanu-
zouarn, est tantôt désigné sous le nom de Kerbannalec, tantôt sous
celui de Goulaines.
— 7i -
Aux vallets de restable, 10 d.
Aux chambrières, 10 d.
Le 17 septembre, pour leur disner à Sainct Brieuc, 60 s.
Pour la couchée des damoiselles, dud. sieur du Gôullenne,
desd. quatre hommes et cincq chevaulx, fut poyô à Saiiict
Melaine, 4 1. 10 s.
Aux valet et servantes, 20 d.
En vin pour mectre dedans la corne, 4 d.
Le 18 septembre, à Bjon, pour la disnée desd. damoiselles
et le deffroy des chevaulx, 51 s.
Pour ung relevé h l'ung desd. chevaulx, 12 d. et maille (!)•
Pour un licol, 15.
Pour du vin pour mectre dedans la corne, 4 s.
A Montauban pour la couchée de lad. compaignie, 4 L 15 s.
Le 19 septembre, led. sieurdu Gôullenne et lesd. damoiselles
se logèrent à la Harpe, et le sabmady ensuyvant lëd. sieur du
Goultenne print congé d'avecq lesd. damoiselles, vint coucher à
Montauban, et fut poyé pour les despans faict aud. lieii de la
Harpe, 15 1.
Pour ung relevé à l'ung des chevaulx â Rennes, 15 d.
Le 21 septembre, led. sieur du Goulenne rendit mes damoi-
selles deKeranmunou et Roshamon à madame de Sainct Sulpice
à laquelle 1 je avancé, à valloir en leur pension, la somme de
30 escuz d'or soleil, 4 escuz d'or soleil pour bailler à la mat-
tresse desd. damoiseltes, et 7 livres pour subvenir aux affaires
desd. damoiselles, faisantz en tout, 86 1. 13 s. 4 d.
A la chambrière de lad. dame de Sainct Suplice (sic) fut
mille 15 s.
Pour la repue à Sainct Suplice, 20 s.
(1) 12 deniers et demi.
~ 72 —
A ung messaiger de Rennes pour aller leur monslror le
chemin à Sainct Suplice, 7 s. 6. d.
En une paire de sollicrs pour lad. Keranmunou, tO s.
Pour troys milliers d'espingles pour lesd. damoiselles, 15 s.
Pour sepl aulnes et demye de cherge de Beauvoys pour
faire des robbes ausd. damoiselles fut poyé, à raison de 102 s.
6. d. l'aulne, la somme de 38 1. 8 s. 9 d.
Pour une aulne et demye d'estamet bleu, pour faire à chacune
desd. troys damoiselles, deux paires de chausses(l), l'aulne à,41.
15 s. montantz à la somme de 7 1. 2 s. 6 d.
Pour neuf aulnes de cherge d'Ascof pour faire des robbes
ausd. troys damoiselles, à raison de 46 s. l'aulne, la somme
de 20 1. 14 s.
Pour troys unces et demy quart de fil de soye noire,46 s. 6 d.
Pour une aulne troys quartz de tafetas bleu pour mectre aux
manches desd. robbes, 4 1. 5 s.
Pour quatre aulnes de treilleix noir pour doubler et garnir
lesd. robes, 48 s.
Pour quatre aulnes de toilte pour doubler lesd. robbes, 40 s.
Pour drap pour faire des semelles aux chausses desd. damoi-
selles, 8 s.
Pour la faczon desd. robes, ung collillon et six paires de
chausses, 10 I.
A madame dePleibihan (2) futpoyé à valloir en lapansion de
damoiselle Jeanne de Lanuzouarn, la somme de 17 escuz et
demy d'escu d'or soleil lors vallantz en monnoie, 40 1. 16 s. 8 d.
Plus fut délivré lors h lad. dame de Plebihan, 3 escuz en réal-
les, pour acbepter h lad. damoiselle ce que eust heu nécessai-
rement à faire, et 70 s. pour achepter ung coffre, faisantz en
tout, 101. 8 s. 4 d. 4
(1) Deux paires de bas, qu'on appelait aussi des bas de chausses par
opposition aux hauts de chausses. L'étoffe appelé « esta m et », était me
serge drapée qui servait à faire des bas et des jupons.
(I) Abbesse de Saint Georges, de Rennes.
— 73 -
Plus fut paie à la servante de lad. dame de Plebihan,ungescu
d'or soleil vallant lors, 46 s. 8 d.
Le 22 septembre à Montaubao, pour la couchée de cincq hom-
mes el cincq chevaulx retournant de Rennes, 60 s.
Le dimanche, 23 septembre, à Bron pour la disnée desd.
cincq hommes et cincq chevaulx, 35 s.
A Sainct Melaine (2), pour la collation et bailler la mesure
d'avoine ausd. chevaulx, 15 s.
" A Sainct Brieuc, pour la couchée desd. cincq hommes et
cincq chevaulx, 65 s.
Le lundy à Guingamp pour le disner, 40 s.
Pour la couchée à Louargat, 55 s.
Le mardy, pour la disnée à Mourlaix desd. cincq hommes et
cincq chevaulx, 38 s.
A quatre hommes pour sallaire d'avoir esté à Rennes à aider
à rendre lesd. damoiselles en la compaignie du sieur de Kerba-
laznec, à chacun la somme de 40 s. faisant en tout, 8 1. (3).
Le dernier jour de septembre audit an 1571, pour poisson et
chair pour bailler leurs reffeclions à messieurs les parents de
feu sieur de Lanuzouarn, qui estoint expressément venuz pour
assister au service au boull de deux ans aud. feu sieur de Lanu-
zouarn, scavoir messieurs de Pirmill, Kerbabu, Keranroux, Le
Merdy, Kereuelle, Lomogan, Treoudal et plusieurs autres, 50 s.
1572.
Le 14 avril fut délivré au sieur de Kerveny, par led. tutteur
la somme de 16 pistolletz d'or et 4 escuz d'or soleil,"pour bailler
à mad. dame de Sainct George, pour la pansion de damoiselle
(4) Saint Meloir.
(i) De ces quatre hommes qui faisaient le voyage à pied, trois con-
duisaient par ia bride les chevaux des jeunes fillds, et le quatrième
conduisait le cheval chargé de la malle et du bis sac, et qu'on appelé
le V mallier. » La « chevauchée » se composait de huit personnes et
de cinq chevaux.
— 74 -
Jëbanhë de Latitazouarn daine de Kernaoù, lors valantz, 45 1.
6 s. 8 d.
Plus led. lutteur bâilla aud. sieur de fcerveny, pour bailler à
ma dame de Sainct Suplice, pour la pansion de damoiselles
Katherine et Françoise de Lanuzouarn, les éspeczes que ensuy-
vent, scavoir : cincq impériales et deroy, houict mille rais, en
réelles \Oi solz, faisantz en tout la somme de, 68 1. 3 s. 8 d.
Plus led. lutteur bailla aud. sieur de Kervèuy, pour bailler
ausd. deux damoiselles pour achepter leurs petiltes hardes, la
somme de 6 escuz en réailes, lors valantz, 13 1. 10 s.
Le 16 septembre led. lutteur paya à madame de Plebihan,
pour la pansion de damoiselle Jeanne de Lanuzouarn estante
à Sainci George, la somme de trante ung escuz d'or soleil,
lors valantz 81 1. 13 s. 4 d.
Plus fut poyé à lad. damme, par led. lutteur, six escuz d'Es-
paigne pour être employez es affaire de lad. damoiselle,
valantz, 14 1. 10 s.
Plus led. tulteur feist tenir à lad. damoiselle, quatre escuz
d'alliance vallantz 9 1. 4 s. 4 d.
Plus led. comptable poya à lad. damme de Sainct Suplice,
pont la pension desd. deux damoiselles Katherine et Françoise
de Lanuzouarn, pour le terme de la Sainct Michel oud. an 1572,
trante pistolletz d'or, lors valantz 67 1. 10 s.
1573.
Le 13 mars, estant lors à Rennes, ledict comptable bailla à
lad. damoiselle Jeanne de Lanuzouarn, sic pistolletz d'or val-
lantz 13 1. 10 s.
Led. jour, il paya à madame de Sainct Supplice, pour la
pansion de damoiselle Katherine et Françoise de Lanuzouarn,
la somme de trente-quatre pistolletz d'or, et, pour leur achepter
des accoutretnentz sellon leur estât, fut délivré à lad. dame
dix-houict pistolletz d'or, lors vallantz 117 1.
— 15 —
i
Plus fut délivré ausd. damoiselles, estant atid. Sainct Suplice,
la somme de hoûict pistolletz d'or, lors valanlz 18 1.
A ma damme de Sainct Sauveur, leur maistresse, à raison
du travail! et peine qu'elle prenoict à leur aprendre h lire et
escgpre, ung escu. valant 46 s. 8 d.
Plus, à la requestre desd. damoiselles, fut baillée à la cham-
brière 15 s.
Et à la portière 7 s. 6 d.
Le 5 juillet, led. tutteur bailla à Jan Jac, messaigier, pour
aller à Rennes et „à Sainct Suplice voir mesdamoiselles de
Kernaou, Keranmunou et Roshamon, lesquelles étoint malades,
la somme de deux escuz, pour ce que les vivres estoinl chères
41. 10 s.
Aud. Jean Jac, pour aller à Kerjan porter les lettres des
dames de Sainct George et Sainct Suplice à madamoiselle de
Kerjan, et les lettres de mesdamoiselles ses filles, et de
Kerjan à Keroulas, led. tutteur paya, 15 s.
Le 6 septembre â Keroulas, auquel lieu led. comptable estoit
allé pour demander l'advis de "madamoiselle de Keroulas, à
scavoir si mesdamoiselles ses niepces qui esloint l'une à Sainct
George les aultres à Sainct Suplice, fussent *veuuez au pays,
pour lors, et oud. cas prendre assignation pour aller les quérir
ensemble avecq leur cousine madamoiselle de Mezle, led.
tutteur bailla entre les servitteurs une réalle, 3 s. 9 d.
Aud. lieu de Keroulas, aux chambrières pour leurs espingles
et décrotter les accoustrementz dud. tutteur,3 s. 9 d.
Le 27 septembre, pour ferrer deux chevaulx de neuff pour
aller à Rennes quérir lesd. troys filles de Lanuzouarn, scavoir
Janne, Katherine et Françoise de Lanuzouarn, 15 s.
Le dernier jour de septembre, pour quatre ferre [néûffs et
houict relevés à troys chevaulx, pour] aller aud. voiaigé de
Rennes, 11 s. 4d.
«
Le 4 octobre à Rennes, pour le disner et soupper de quatre
- 76 —
hommes, et le soupper de damoiselle Janne de Lanuzouam et
la journée enlhière de cinq cbevaulx, 118 s. 6 d.
Le 5 octobre, pour ladisnée et soupper desd. quatre hommes
et aussi le disner de lad. damoiselle et le soupper tlesd. troys
damoiselles Janne, Katherine et Françoise de Lanuzouarn, et
la couchée desd cinq chevaulx, 7 1. 3 s. 4 d.
A Sainct Suplice à la maistresse de mesdemoiselles de Ke-
ranmunou et Roshamon, scavoir à celle qui leur monstroict
à lire et escripre et couldre, 15 s.
Plus led. tutteur bailla ausd. damoiselles pour distribuer
entre les chambrières, cuisinier et pâtissier, 30 s.
-A madame de Sainct Suplice, pour ce que lesd. damoiselles
avoint demeuré au couvent quinze jours oultre les deux ans,
pour leurs despens fut poié, 116 s. 8 d
A ung apothicquaire de Rennes pour avoir esté à Sainct
Suplice bailler médicine k madamoiselle de Roshamon,
112 s. 6d.
Le mardy 6 octobre, pour troys chappeaulx de taffetas pignés
garniz de passement d'or, 10 s.
Pour troys plumes pour attacher ausd. chappeaulx, 20 s.
Pour troys escriploires avecq les covers pour lesd. damoi-
selles, 10 s.
Pour troys paires de cousteaux pour lesd. damoiselles, 30 s.
Pour troys paires de gantz auxd. damoiselles, 12 s. 6 d. ~
Pour quatre milliers et demy d'espingles ausd. damoisel-
les, 32 s.
Pour la disnée, le soupper desd. damoiselles et desd. quatre
hommes, et le deffroy pour toutte la journée desd. cincq
chevaulx, 7 1. 15 s.
A madame de Sainct George pour quinze jours que Kernaou
avoit demeuré au couvent après les deux ans, 67 s. 6 d.
Plus fut poyé, par le commandement de raadite dame de
Sainct George, acheter pour une robe que mad. dame avoit
faict lever ches sire Bourgoignerïe pour lad. Kernaou, 10 I. I s.
— 77 —
Pour bailler aux chambrières à Sainct George, fut baillé à
lad. damoiselle de Kernaou, 15 s*
Le 7 dud. raoys, pour la dmée à Rennes et le deffroy des
chevaulx, 70 s.
Aux chambrières et valeclz, 6 s»
A Monlfort pour la couchée desd. troys damoiselles et
quatre hommes et desd. cincq chevaulx et le déjeusner le
lendemain, 4 1. 6. s.
Aux vallecfz et chambrières, 20 d,
Jeudy 8 octobre à Maure, pour le disner, 60 s. 10 d.
Aux chambrières, 10 d.
A la Trinitlé pour la couchée, 4 I. 10 s.
Aux chambrières, 20 d.
Vendredy 9 dud. moys, pour la disnée à Pontyvy, 65 s.
fit pour Iroys relevez, 2 s. 6 d.
Pour la couchée à Rostrenen, 4 1. 10 s.
Aux chambrières, 10 d.
Sabmedy 10 octobre à Kerahès, pour le disner et soupper
par ce que la fîebvre se print à l'ugne desd. damoiselles
tellement que la compaignie fut contraincte de demeurer
audict Kerahès pour ce jour, 7 1. 5 s.
Aux chambrières, 10 d.
Dimanche 11 dud. moys, à ungpreblre pour la messe de
bon matin, 2 s. 6 d.
Pour le desjeuner aud. Kerahès, 20 s.
Led. jour au Squiryou pour la repue, 30 s.
Led.jour à Mourlaix pour collation et deffroy desd. chevaulx,
2b s.
A troys hommes pour salaire d'avoir faict led.voiaige fut poyé
à chacun 40 s. faisantz en tout 6 1.
Le 13 octobre, pour sept aulnes et demie de toille blanche à
faire des chemises ausd. damoiselles, â raison de 10 s. l'aulne,
75 s.
— 78 —
Pour houic^ aulnes et demye de toille rousse, l'aulne à 9 s.,
76 s.
A deux coi^sturjers, paur six journées à. faire lesd. chemises
et des mouchoueurs pour lesd. damoiselles, 15 s.
Le 17 dud. moys, pour cincq aulnes de drap de canelle, pour
faire des robes à Keranmunou et Roshamon, l'aulne à 4 1.15s.,
faisant la somme de 22 1. 15 s.
Pour quatre onczes et demye de passement de soye valante
4 1. 10 s.
Pour une oncze de fil de soye, 1 5 s.
Pour une aulne et demye de cherge d'Aseot rouge pour lesd.
damoiselles, 45 s.
Pour cincq aulnes de revêche rouge, 61. 5 s.
Pour troys paires d'Heures pour lesd. damoiselles, 50 s.
A ungn homme pour son sallaire de rendre deux coffres ba»
husde Lanuzouarn à Kerjan, pour lesd. damoiselles, 10 s.
Pour les despens d'ung tailleur et dud. comptable allant à
Mourlaix pour achepter les draps mentionnés cy devant, et le
deffroy de son cheval, 15 s.
Pour troys paires de sollierspour lcsd.troys damoiselles, 35 s.
Le 3 novembre fut levé (acheté) à Kerahès par noble Jacques
Demay les choses que ensuy vent :
Pour deux aulnes et demye de cherge (serge) de Florence,
l'aulne à 6 1. monnoie, montant h somme de 45 1. kwLcherge
pour faire des robes ausd. damoiselles, 45 1.
Pour quatre aulnes et demye de passement d'argent et soye
noire, l'once à 42 s. 6 d., en tout 9 1. 10 s. $ d.
Pour une aulne de taffetas noir pour des altiffas (t). ausd.
damoiselles. 70 s.
Pour une once et demye de passement d'or large paur gar-
nir lesd. attiffés, 4 1. 3 s. 4 d.
t^m^m
(I) Sorte de bonnet semblable à celui avec lequel on représente ordi»
naireraent Marie Stuart et Catherine de Médicis.
• *
— 79 -
Pour peut aulnes de toille de Quintin pour Iesd. darooisçUes,
à 12 s. 6d. l'aulne, 112 s. 6 d.
Pour troys aulnes de toille d'Olande, à 34 s. 2 d. L'aulne,
102 s. 6 d.
Pour sept aulnes de drap de craraoisy brun, autrement dicl
couleur de sang de beuff, pour faira des mantheaulx et garde-
robes ausd. damoiselles, à raison de 6 1. monnoie l'aulne, 421.
Pour cincq onces de passement d'or pour garnir les man-
teaulx et garde-robes, à raison de 55 s. 6 d. l'once, 13 1. 17 s. 6 d.
Pour la voiclure desd. bardes tant de Kerahès à Mourlaix,
que de Mourlaix à Lanuzouarn, 20 s.
Le 23 novembre, fut levé par led. Jacques Derçaay et led.
lutteur, à Mourlaix houict aulnes de taffettas veloutté, à 100 s.
monnoie l'aulne, 40 1.
Pour une aulne et quart de salin noir, à 4 1. 12 s. l'aulne,
115 s. 10 d.
Ppur demye once de passement noir, 10 s.
Pour une once de fil de soye [aulne, 20 s.
Pour deux onces de fil de soye noire, 30 s.
Pour troys aulnes de fil de ferr, 2 s. 6 d.
Poiy cin,cq douzaines d'agrafîes, 2 s. 6 d.
Pour cincq aulnes et demye de cherges d'Ascot cramoisy à
50 s. l'aulne, pour faire des mantheaulx ausd. damoiselles,
.. Plus pour quatre onces troys gros et demy,c}e passement à!w h
à 55 s. 6d. l'once, 121. 6 s. 6 d.
Pour deux onces, et quart de passement bleu pour mettre
sur les mantheaulx fourrés desd. damoiselles, 45 s.
Pour une once de fil de soye bleu, 1 5 s.
Pour troys onces de passement argenté, 6 l, 15 s,
Pour une once de fil de soye t lô s.
Pour une autre once de passenaent, de soyç ppur tes ajUk
fetz, 20 s.
— 80 —
Pour quatre aulnes de passement pour attacher leurs garde-
robes, 3 s. 4 d.
Pour une aulne et demye de treilleix, 17 s. 4 d.
A maître François Le Gat, tailleur, fut payé pour la fàczon
de ce que ensuilt :
Pour madamoiselle de Kern au, une robe de taiïettas veloulté
garnye de passement d'or, 50 s.
Plus ung ristre (1) avecq la davantière de cramoysy brun
garny de passement d'or, 30 s.
Pour la faezon d'une robbe de cherge de Fleurence garnye de
passement d'argent, les manches découppés, remplies et
chamarrées (2), 50 s.
Plus la faezon d'ung petit mantheau de serge d'Ascot cra-
moysy, garny dépassement bleu, 12 s. 6. d.
Plus racoustrer une robe de taiïettas gris, la faezon d'ugo
attiffet, une masque, ung collect de sallin et racoutrer une
verdugade, 30 s.
Pour madamoiselle de Keranmunou, pour la faezon d'une
robe de serge de Fleurence, les manches découpées remplies,
chamarrées, garnye de passemont d'argent 50 s.
Pour la faezon d'ung ristre avecq la devantyère de cramoisy
brun garnyz de passement d'or et bandes de taiïettas, 30 s.
1574.
Le 9 janvier, pour la faezon de fourrer troys petits man-
teaulx de serge, 45 s.
Plus le 16 dud. moys, en demye aulne d'eslamet cramoisy
brun pour faire des chausses ausd. damoisejles, 46 s. 6 d.
(1) Le ristre se composait, je crois, d'un corps sans manches, qui se
laçait derrière comme un corset, et auquel était attaché un large
tablier, appelé devantière, qui a donné naissance au mot breton
« Tavaucher » qui signifie aussi « tablier. » Le ristre était porté par
des jeunes filles et par de tout jeunes garçons. Je pense cme ce mot a
la même signification que celui de garde-robes mentionne plus haut.
Ce vêtement est encore en usage dans nos campagnes.
(2) C'était la crinoline du temps.
I
— 81 —
Le 3 avril, pour Une aulne et demye de taffettas noir à
houict fil, pour faire ung tafias h chacune desd. damoiselles,
4 1. 17 s. 6 d.
Pour deux aulnes et quart de toile pour faire six paires de
chausses, scavoir au sieur de Lanuzouarn deux paires, et à
deux de s«s sœurs a chacune deux paires, 18 s. 9 d.
Au cousturier pour les faire et raccoustrer les chausses
desd. sieur et sœurs, 5 s.
A une cousturière qui a esté troys jours à faire des mou-
choueurs ausd. sieur et sœurs, 5 s.
Led. tutteur bailla à înesdamoiselles de Kernaou et Keran-
munou le jour de 'Sainct Eutrope à Pensez, pour faire dire des
messes et faire leurs offrandes, 8 s. 4 d.
Plus fust baillé ausd. damoiselles pour aller à Sainct Fiacre
pour faire dire des messes, 8 s. 4 d.
' Le second dimanche de may fut baillé ausd. damoiselles
pour bailler à l'offrandre à Kerhellenn, 20 d.
Plus le jour de l'Ascension, pour bailler à l'offrende à
Sainct Mean, fui baillé ausd. damoiselles, 2 s. 6 d.
Le jour de Saincl Jan en may, fut baillé ausd. damoiselles
pour bailler à l'offrande à Ponléon, 2 s. 6 d.
Le 21 may, pour sept aulnes de cherge d'Ascot double à
30 s. l'aulnay, 10 1. 10 s.
Led. jour pour troys onces de passement de soye pour inec- ,
tre sur les robes desd. damoiselles, 60 s.
Pour une once de fil de soye, 15 s.
Pour une aulne de toille rousset à doubler le corps desd.
robes, 10 s.
Le jour de monsieur Sainct Jan en. juingn, fut baillé ausd.
damoiselles pour bailler à l'offrende à Pontéon, 20 d.
Le 20 juin, led. tutteur bailla ausd. dammes de Kernau et
Keranrounou, pour bailler à l'offrende à la nouvelle messe de
missire* Hervé Laurens, à chacune. 20 s. tournois vallanlz
33 s. 4 d.
6
y
- 82 -
A troys cousluriers {sic) pour troys journées à chacune
d'elles à faire des chemises ausd. damoiselles, 15 s.
A la foire de la Magdalleine pour Iroys escoeffions de fil
d'or(l) pourlesd. damoiselles, 7 1. 10 s.
' Pour Iroys paires de sisceaulx pour lesd. damoiselles, 16 s.
Pour troys paires de lieltes pour lier leurs cheveulx, 33 1. 4 s.
Pour troys aulnes de passement pour accoustrer leurs
testes, 7 s. 6 d.
Pour ung millier d'espingles de Paris, 8 s. 4 d.
Pour une paire de gantz â Keranmunou, 4 s. 2 d.
Le landemain de la Hagdallaine, à Saincl Jan du doigt, fut
baillé ausd. damoiselles pour bailler à l'offrende et pour faire
dire des messes, 15 s.
Le 7 août, pour quatre aulnes d'estamect cramoysy brun
pour faire troys juppes ausd. damoiselles à 105 s. l'aulne, 21 1.
Pour une aulne et tiers de velours jaulne pour garnir lesd.
iroys juppes, à 7 1. 5 s. l'aulne, 9 1. 13 s. 4 d.
Pour deux onces et demye de fil cramoysy, 50 s.
Pour quatre aulnes de charge d'Ascoet double et bien fine, à
35 s- l'aulne, 7 1.
Pour ungne main de pappier pour lesd. damoiselles, 2 s. 1 d.
Pour deux onces de fil d'ozelle jaulne pour mectre sur les
corps des jacquettes desd. damoiselles, 16 s* 8 d.
Pour sept douzaines d*agraffes, 4 s. 4 d.
Pour une aulne de treilleis, 7 s. 6 d.
Pour une aulne de revesche, 25 s.
Pour une once de fil de soye, 15 s.
Pour une aulne et demye de camelot bleu, 22 s. 6 d.
A maître Françoys Le Gat, tailleur, pour la faczon d'une
robe de cherge double pour Kernaou, 30 s.
Pour la faczon d'ugn cotteillon de cramoysy brun garny de
velours jaulne et le corps, 20 s.
(1) Coiffe faite de rubans d'or ou de soie et souvent richement ornée.
— 83 —
Pour la faczon d'ugn cotteillon de cramoysy brun avecq le
corps de camelot bleu, 20 s.
Pour troys peignes pour lesd. damoiselles, 2 s. 6 d.
Le 11 décembre, pour Iroys aulnes de toile biendouge (1)
et déliée pour faire des colects ausd. damoiselles, 55 s.
Led. jour, pour troys aulnes de toille de Mourlaix pour faire
colectz, coueffez et aultres choses, 30 s.
Pour troys paires de solliers pour lesd. damoiselles, 37 s. 6 d.
1575.
Le 1 er janvier, poursaize aulnes de taffetas noir veloulé pour
faire des robes à Keranmunou et Roshamon, 80 1.
- Led. jour pour troys quartz de taffettas noir pour faire des
tafftas pour lesd. damoiselles, 60 s.
Pour trante-lroys aulnes de tresse d'or pesantz troys onces
demye once et quart d'once, à 60 s. monnoie l'once, 1 1 1. 5 s.
Pour du fil de soye jaulûe pour couldre led. passement, 20 s.
Pour une aulne de toille bien douge pour parfournir (com-
pléter) les collectz desd. damoiselles, 16 s. 8 d.
Pour troys quartz de serge cramoisy pour faire des chausses
ausd. damoiselles, 41.
Au inoys.de may, pour troys quartz d'estamet pour faire des
chausses ausd.^damoiselles, pour ce que les ratz avoint mangé
partie de leurs chausses, 75 s.
Pour la faczon desd. chausses, 5 s.
Pour fil de soye pour les garnir et fil pers, 4 s. 2 d.
Pour unze aulnes de cherge d'Àscot double, à 46 s. l'aulne
et une réaile sur le tout, 25 1. 10 s. 2 d.
Pour cincq ounces et demye de passement de soye large,
pour garnir les robes de lad. cherge, 110 s.
Pour une once et demye de fil de soye pour couldre led.
passement, 22 s. 6 d.
(I) Bien fine.
- 84 -
A ung tailleur pour aider à choisir lesd. cberges et passe-
ment, 4 s. 2 d.
Le 23 juin pour la repue de troys hommes et troys chevaulx
chemin faisante à Keroulas pour quérir roesdamoiselles de Ker-
naou et Keranmunou, 15 s.
Le lendemain aud. lieu de Keroullas, à ung rçareschell pour
desenclouer l'ung des hacquenées desd. damoiselles, ung ferr
neuff et ung relevé, 5 s.
Ausd. damoiselles fut baillé par lèd. lutteur aud. lieu de
Reroulas 30 s. _ monnoie pour les [distribuer entre la gouver-
nante, les chambrières et serviteurs de lad. maison, par ce que
lesd. damoiselles avoint esté ung moys aud. lieu de Keroulas,
30 s.
Le 25 dud. moys à Folgoet, retournant de Bas-Léon, pour la
collation et repue desd. damoiselles, garsons et chevaulx, 20 s.
Le 22 juillet fut poyé par led. tulteur, en troys guarguans
(carcans) (I) pour lesd. troys damoiselles puisnées, à Kerjan,
35 s.
Pour demye aulne de satlin pour Roshamon, 46 s.
Pour la faczon de deux robes à Kernaou et Keranmunou, 40 s.
Pour ung myrouér et du passement pour lesd. damoi-
selles, 4 I. 10 s.
Pour les gerbes d'or comprins la faczon, fut poyé par led.
comptable, à Kerjan, 24 1. 19 s.
Pour garnitures pour lesd. damoiselles, fut poyé aud. lieu
de Kerjan, 100 1.
Plus en gerbes d'argent à 10 d. piecze, 100 s.
Pour troys basquines ausd. damoiselles, 12 1.10 s;
Plus pour troys garnitures pour lesd. troys filles de Lanu-
zouarn, 12 1.
Le 20 août, pour une aulne ef quart d'estamect violet pour
(1) Les «. carcans « différaient des colliers, en ce'qu'ils étaient tou-
jours tournées autour du cou, tandis que les colliers s'étalaient sur la
poitrine.
— 85 -
faire deux paires de chausses à chacune desd. troys damoi-
selles, 112 s. 6 d.
Pour six aubes de taffetas noir à gros grains, i 4 1. 12 s. 6 d.
l'aulne, 27 1. 15 s.
Pour saize aulnes de passement de soye noire et large pesant
troys onces et quart, à 22 s. l'once, 70 s.
Pour troys quartz de satin jaulne, 69 s.
Pour une once et quart de fil de soye noire, 15 s. 10 d.
Pour deux aulnes de toille de Mourlaix pour faire collectz et
coueffes, 3*2 s. 6 d.
Pour cincq aulnes toille de Mourlaix plus grosse, pour faire
des chemises à Keranmunou, G2 s. 6 d.
Le 25 août, en deux centz gerbes d'or et deux centz gerbes
d'argent, comprins la faczon, 55 1.
Pour deux aulnes de fine toille d'Olande, 100 s.
Pour la collation et sallaire *k ung orfebvre pour aider
prandre lesd. gerbes et les peser, 10 s.
Pour deux cents grains viollet, 32 s. 6 d.
Pour ung cent et demye de grains de couleur de grenade,
32 s. 6d.
Pour houict aulnes de ruban violet et craraoisy pour
Keranmunou, 16 s.
Pour saize aulnes de ruban noir et azur, 32 s.
Pour ung myrouer pour Keranmunou, 20 s.
Plus pour quatre aulnes de ruban violet pour faire des
lyettes ausd. damoiselles Françoise, Kernaou et Roshamôn, 8 s.
Pour une ceinture pour Keranmunou, 3 s. 4 d.
Pour une paire d'Heures pour lad. Keranmunou, 15 s.
Pour ong millier et demy d'espingles pour lad. Keranmu-
nou, Ils.
Pour des escriploires à lad. Keranmunou, 8 s.
Pour du pappier, 5 s.
Pour ung petit livre 5 s.
/
- 86 —
Pour ferrer le cheval qui alla porter les hardes de lad.
Keranmunou à Locmarie (1), 10 s.
Le 26 août, pour demy aulne el demy quart de taffetas pour
Roshamou, '26 s. 8 d.
Pour fil d'orjal (1), 4 s. 2 d.
Pour deux douzaines d'agraffes, 15 d.
Pour la faczon d'une robe et dresser une aultre, 55 s.
Pour la faczon d'une robe à Roshamon, 45 s*
Pour fil noir pour couldre lesd. robes, 5 s.
En toille pour doubler les troys robbes, 10 s.
Le 29 août, chemin faisant à Locmarie pour rendre lad.
Keranmunou, pour la collation de lad. Keranmunou, boznes
(2), troys hommes et led. tulteur, 20 s.
Le 30 août à la gouvernente de Kernerzic, tant pour elle que
pour les chambrières, à cause qu'ilz avoint couché aud. lieu de
Kernerzic, 10 s.
Le jeudy, 1 er septembre, auquel jour lad. bozne, lesd. troys
hommes et tulteur partirent de Locmarie après y avoir rendu
et laissé lad. Keranmunou aud. lieu de Locmarie, led. lutteur
bailla à lad. Keranmunou par le commandement de mademoi-
selle de Kerjan et en présence de lad. bozne, 15 I.
' Led. jour aux chambrières de Locmarie, en présence de lad.
Keranmunou et par les mains de lad. bozne, 20 s.
Aux vallectz, 5 s/
Aux cuysinier, 10 s.
Au maistre escripvain qui estoict aud. lieu de Locmarie, à
aprendre les jeunes damoiselles à lire et escripre, chanter et
dancer, fut baillé par lesd. tutteur, 25 s.
(1) Elle allait comme demoiselle de compagnie au château de Loc-
maria, en la paroisse de Plouégat-Guerrand (arrondissement deMorlaix,
Finistère).
(2) Fil d'archal. Le même mot est écrit plus loin « brgcal. »
(3) Chambrière, ou servante. Ce mot a encore aujourd'hui cette
signification .
— 87 —
Led . jour, pour le disner dud. tutteur, boznes, lesd. troys
hommes et quatre chevaulx, aud. Louargat, 37 s.6 d.
Aud. Louargat, pour'faire quatre relevez ausd chevauh,
3 s. 4 d.
A ung garson de Kerjan, qui fut aud. voiaige, pour son vin,
5 s.
A Jan Jac qui conduisoit lès hardes de lad. Keranmunou,
pour eincq journées, 20 s.
Le 1*2 novembre en cincq aulnes et demye de cberge de
Beauvays pour faire une robbe, ung ristre et des chausses h
Kernaou, et une aulne et troys quartz >de revêche noir pour
doubler led. ristre, 30J.
Le 26 décembre en six aulnes de cherge de Beauvays pour
faire une robbe à Keranmunou, et aultre robe à Roshamon, à
4 1. 17 s. l'aulne, 27 1.
Pour six onces de passement de soye pour roectre sur lesd.
robbes à 20 s. Fonce, 6 1.
Pour une aulne de taffetas à gros greins pour faire des
tafftas (1) à Kernaou et Roshamon, 4 1. 12 s. 6 d.
1576.
Le 30 janvier, led. tutteur bailla à madamoiselle de Kernaou
par commandement de mademoiselle de Kerjan, la somme de
101. 12 s. 6 d., auquel jour partit lad. Kernaou pour aller avecq
sa maistresse madamoiselle de Lyscoet.
Plus led. jour à lad. Kernaou et à sa sœur Roshamon à cha-
cune deux réailes, 17 s. 6 d.
Le 6 février, en une paire de solliers pour Kernaou, 12 s. 6d.
Pour pappier et espingles pour lad. damoiselle, 10 s.
Pour une demye once de fil,de soye noire pour Roshamon,
7 s. 6 d.
(f) Ces « taffetas » étaient, je pense, des « bouillonnes » ou des
« volants. »
— 88 — .
, Le 1 er mars à Mesléan, au cuisinyer Lagadou, led. lutteur
bailla ungne réalie, parce que c'estoît la première foys aud. lut-
teur d'avoir esté aud. Meslean, 4 s. 2 d.
Aux chambrières, aullre réalie, 4 s. 2 d.
Aux vallect de restable, 20 d.
Le 3 dud. moys, pour une paire d'Heures pour Roshamon,
quatre réailes, 17 s. 6 d.
Pour vingt aulnes de passement de soye, pesant deux onces,
40 s.
Le 12 avril, led. lutteur bailla à monseigneur de Kercoent,
troys pistolletz et ung escu soleil, vallant lors 10 1. 15 s. pour
délivrer à madamoiselle de Roshamon, par le comihendement
de lad. damoiselle de Kerjan et en sa présencze, 10 s. 15 d.
Le 2 juin, pour une once de fil de soye craraoisy, 20 s
Pour une paire de gantz, 6 s. 8 d.
Pour serge de cramoysy brun pour faire deux paires de
chausses à lad. Keranmunou, 35 s.
Le dimanche 3 dud. moys, à Lampaul, pour la collation du
sieur de Lanuzouaru, sa sœur Keranmunou, deux hommes»
led. tutteur et troys chevaulx, auquel lieu Ton jouoyt l'his-
toire (I), 20 s.
A ceux qui jouoint l'histoire, 5 s.
Le 10 juin pour deux aulnes de scarlatin pour faire ung
cottillon à lad. Keranmunou, Il I.
Pour troys quartz de velours verd, 6 1.
Pour une oncze et demye de passement pour ra^ectre dessus
ledict cottillon, 27 s. 6 d.
Pour une once de fil de soye, 20 s.
Pour la faczon de deux paires de chausses pour lad. Keran-
munou. 4 s. 2 d.
Plus, pour deux aulnes de cherge pour ung cottillon à Ros-
hamon et des chausses, 9 I. 10 d.
(I) Uu mystère brclon.
— 89 —
Pourtroys quartz de velours jaulne pour mectre dessus led.
cottillon, 61.
Pour une once et demye de treces blanche, 27 s. 6 d.
Pour fil de soye, 20 s.
A la foire de la Magdaleine, en 'quatre aulnes et demye de
taffetas à houict fil, pour faire une robe à Roshamon, 18 1. 10 s.
Pour troys quartz de taffetas pour parfournir lad. robe, 62 s.
Pour une aulne de taffetas jaulne, 110 s.
Pour une- once de fil de soye, 15 s.
Pour saize aulnes de passement de soye large,, pesant six
onces, Vonce à 20 s., 6 1.
Pour troys aulnes de cherge de Fleurence, à 100 s. l'aulne,
15 1.
Plus en saize aulnes d'aultre passement pour garnir lad.
robe de cherge, poisantz troys onces, l'once à 21 s. 8 d., 65 s.
Pour agraffes et bougaran pour garnir lesd. deux robes, 10 s.
Pour la faczon des deux robes, 55 s.
Pour une aulne de revesche cramoisy acheptée par maître
Mathieu pour doubler le mantheau de Roshamon, fut poyé six
réailes lors valantz, 26 s. 8 d.
Pour troys aulnes de fil d'orge al, 2 s. 6 d.
Pour la faczon d'ungn cottillon et une paire de chausses
pour Roshamon, 20 s.
Pour un quaquan (carcan) pour lad. Roshamon, 10 s.
Pour un chappellet pour Keranmunou, 5 s. 6 d.
Led. tutteur poya à lad. Roshamon à Kerjan, une once de
fil cramoisy, 21 s. 8 d.
Aud. Kerjan, pour deux aulnes de toyle de Cambry (Cambrai),
pour lad. Roshamon, 4 1.
Pour une paire de sisceaulx, 5 s. %
Pour ung millier d'espingles, 8 s. 4 d.
Le 24 août fut délivré à lad. Roshamon par led. tutteur par
commandement de maâamoiselle de Kerjan, douze escuz, lors
vallanlz 32 1.
- 90 —
Pour quatre aulnes de toille pour faire chemises à lad.
Roshamon, 50 s.
Le 11 septembre, led. tutteur bailla à lad. Roshamon estante
à Hourlaix r en la compaignie de madame sa maistresse, chemin
faisant à Angiers, la somme de 110 s.
Le 23 oclobre,à mâdamoiselle de Kernau, estante lors avecq
sa maistresse mâdamoiselle de Liscoet, à Kerjean, fut baillé
deux escus et deux réailes, vallantz 118 s. 6 d
Le 28 décembre fut baillé à mâdamoiselle de Roshamon
trois réailes, estante lors à Kerjan, 13 s. 4 d.
Pour troys unces de passement de soye pour garnir une robe,
et demy oncze de fil de soye, 70 s.
1577.
Le 16 janvier, pour ung chapperon de velours pour mâda-
moiselle de Keranmunou, 13 1.
Le 18 dud. moys, pour cincq aulnes de serge d'Ascot, à 40 s.
l'aulne, 10 1.
A ung raessaigier envoyé par lad. Keranmunou, etsuyvanl la
lettre, en présence de messieurs de Kerbic, Kerbalannec, Treou-
dal, les especzes que ensuyvant, scavoir: 10 escuz en réailes,
ung double pistollet d'or, troys mille raix et cincq demy mille
raix, chacun escu vallant lors 55 s., chacun mille raix 7 1. 5 s.
le tout raonnoie, pour debvoir achepler une robe de damars,
(sic) faisant la somme de 72 1. 14 s. 2 d.
Aud. messaiger fut baillé en présence desd. dénommés, deux
réailes, 9 s. 2 d.
Le 10 février, pour une paire de solliers pour Roshamon,
13 s 6 d.
Plus led. tutteur bailla à lad. Roshamon, en présence de ma-
dame de Coetmeur, deux demy mille raix et ung escu, 10 I.
Le 4 mai, led tutteur bailla six.escuz en ré ail es, pour faire
tenir à mâdamoiselle de Kernaou, 18 1.
Le 30 mai, pour six aulnes de taffetas noir bien fort, à raison
de 6 1. 5 s. l'aulne, 57 1. 10 s.
— 91 —
Pour une aulne de taffetas grisa gros grain, 4 1. 15 s.
Pour traize unces et deraye de passement de soye large, cou-
tenant quarante houict aulnes, Ponce à 20 s. 10 d., la somme
de 14 T. 10 tl.
Pour une oncze et demye de fil de soye, 31 s. 3 d.
Pour Iroyes aulnes et tiers de serge de Fleurence pour faire
une robbe, à 115 s. l'aulne, la somme de 19 1. 3 s. 4 d.
Pour deux aulnes de cherge grise pour faire ung cottillon, à
4 1. 15 s. l'aulne, 91. 10 s.
Le 16 juin^pour deux chemises pour madamoiselle de Rosha-
mon, de toille bien douge, 55 s.
Le 26 octobre, estant adverty à Kgrnerzic que le seigneur de
Locmaria estoit à Guervavan (Kermavan), led. sieur de Ker-
nerzic bailla aud. tutteur son serviteur avecq son malier, (1)
pour aller aud. Guervavan, pour la collation desd. hommes, et
repue des chevaulx, 20 s.
Le 27 dud. moys, oud lieu de Guervavan, led. tutteur bailla
à lad. Keranmunou, ung escu pour bailler à la damoiselle, 20 s.
pour bailler au cuisinier, 20 aultres s. pour bailler au tailleur
et 10 s. pour bailler à la chambrière faisantz en tout 81.
Le 28 dud. moys, led. tutteur bailla à lad. Keranmunou 10 s.
pour bailler aux serviteurs du sieur de Coctlosquet,auquel lieu
coucha lad. Keranmunou, 10 s.
Aux valletz, 2 s. 6d.
Le 5 novembre, en dix houict aulnes quart et demy quart de
damars gris, à 8 I. l'aulne, 140 1.
Pour cincq aulnes de velours jaulne à 10 I. l'aulne, 50 1.
Pour dix onces de passement de soye gris à 30 s, l'once, 15 1.
Pour troys unces de fil de soye grise et jaulne â 30 s.
l'once, 4 1. 10 s.
Pour deux aulnes de toile fort douge pour faire des fronceu-
res, 4 I.
(l) Cheval qui portait ordinairement la malle, en voyage.
— 92 —
Pour deux aultres aulnes de toillepour faire dcscoleclz, le
tout pour Kernaou, 60 s.
1578.
Le 10 avril pour neuff aulnes de cberge double d'Ascot, à
35 s. l'aulne, 15 1. 15 s.
Pour vingt houicl aulnes de passement de soye noire conte-
nant quatre onces et demye, ronce à 22 s, 6 d., la somme de
101 s. 3 d.
Pour une unce de fil de soye, 20 s.
Pour une aulne de bougaran, 10 s.
£our la faczon de deux robes pour Keranmunou et Rosha-
mon, 70 s.
Pour une ceinture et une paire de jartiers (sic) pour Keran-
munou, 15 s.
Le 24 avril, pour la faczon d'une robe pour Roshamon, 30 s.
Pour une basquine pour lad. Roshamon, 41. 10 s.
Pour un chapperon pour Keranmunou fut poyé 4 escus va-
lant 10 l.
Plus led. comptable a baillé à lad. Roshamon ung escu et
demy pour poyer ses debtes et faire ses petites affaires, 75 s*
Pour madamoiselle de Keranmunou :
Pour la faczon d'une robe de daraars gris garnye de . passe-
ment de soye, 55 s.
Plus pour la faczon d'une robbe de Fleurance garnye de
passement de soye, 45 s.
Pour rondir une robbe de taffetas noir et faire ungn corps à
lad. robe, et deux aultres corps de cotte, 40 s.
Le 7 mai, led. tutleur envoya traize aulnes de toile de
Mourlaix â Kerjan, pour faire des chemises à Keranmunou et
Roshamon, dont l'aulne couste troys réailes, 8 1. 2 s. 6 d.
Le 23 juillet, pour troys brodures d'or esmaillés pour mesda*
moiselles de Kernaou, Keranmunou et Roshamon, lesquelles
pèsent ensembles cent troys escuz d'or soleil, et pour la faczon
— 93 -
vingt escuz d'or soleil, faisantz en tout six vinglz troys escuz
d'or soleil avalués à 307 1. 10 s.
Plus led. jour, pour quatorze aulnes de tafflas noir à houict
filz à 6 1. 10 s. l'aulne, la somme de 95 I. 17 s. 6 d
Plus led. jour, en houict aulnes et demye de tafflas à houict
filz, 55 s. 6 d.
Pour dix unces de passçment de soye noire pour garnir
lesd. robes, 10 1.
Pour une once et demye de fil de soye, 30 s.
Pour demye livre de fil pers et ung quarteron de fil
Paris, 10 s.
Pour ung cent d'agraffes, 5 s.
Pour une aulne de toille pour garnyr lesd. robes, 10 s.
Pour demy aulne d'estamet viollet pour faire des chausses
ausd. damoiselles, 60 s.
Le tout fut prins par le commandement de madamoiselle de
Kerjan, et la plus part en sa présence.
Pour deux paires de solliers pour lesd. damoiselles, 29 s. 2 d.
Plus, led. comptable délivra à madamoiselle de Kerjan douze
e scuz d'or soleil pour les faire tenir à madamoiselle de
Kernaou sa fille, 30 1.
Le 7 décembre, pour troys unces de fil de soye jaulne et
verd, l'once à 40 s. monnoie, 6 1.
Pour demye once de fil de cramoisy, 30 s.
Pour deux aulnes de trelleix, à 30 s. l'aulne, €0 s,
Pour une aulne el demye de frise noire, à 30 s. l'aulne, 45 s.
Pour troys quartz de tafflas noir pour Keranmunou, 61.15s.
Pour estamet cramoisy pour faire deux paires de chausses
è lad. Keranmunou, 65 s.
Pour demy livre de fil pair, 20 s.
Pour ung demy mouttoo, 20 s.
Pour une longe et sur longe et une langue de beuff, 70 s.
Le 14 décembre pour trois aulnes de serge de Fleurence
pour faire une robbe à lad. Keranmunou, à raison de 12 1.
l'aulne fut payé en présence du sieur du Merdy, 36 1.
Pour six douzaines de croches pour lad. Keranmunou, 5 s.
Pour demye livre de fil Paris, 15 s.
Pour dix aulnes de toille pour doubler cincq robes pour
rgadamoiselle du Froulguen, deux pour lad. Keranmunou et
doubler sept paires de manches pour lad. damoiselle du
Froulguen, à raison de 20 s. l'aulne, 10 I.
Pour deux aulnes de toille blanche bien douge, pour faire
des flonceures (sic) à lad. [Keranmunou, à raison de 40 s.
l'aulne 4 1.
Led. jour, en moulton et beuff, à raison que mad. dame du
Froulguen, sa sœur Keranmunou et une aultre damoiselle, six
tailleurs et deux cousturiers estorent à Lanuzouarn, 61.
Pour quatre livres de chandelles pour lesd. tailleurs, à
raison de 6 s. 8 d. la livre, 26 s. 8 d.
Pour demye livre de fil Paris, 20 s.
Le 20 décembre, led. tutteur bailla à deux cousturiers pour
faire des fronceures, colectz et coeffes pour lad. Keranmunou,
16 s.
Led. jour led. corn table poya à Eliette le But, tavargnière,
demeurante à Pontéon, pour quinze potz de vin pour lesd. tail-
lieurs, 100 s.
Plus pour treilleis et esguillettes de fil d'ozelle pour lesd.
damoiselles. 20 s.
Pour troys quartz d'estamin pour lad. Keranmunou, 10 s.
. Dépense» concernant Mademoiselle de la
fontaine-Blanche, fille aînée de Lanuzouarn.
1572.
Pour douze aulnes de toille pour faire six chemises à mada-
moiselle de la Fontaine Blanche, à raison de 10 s. l'aulne, 6 1.
Pour lafaczondesd. chemises. 12 s. 6 d.
- 95 —
Le 2 août en une demye aulne de satin noir pour faire ung
collecta lad. damoiselle, 40 s.
. Pour uDg demy aulne de taffetas noir pour faire une cornette
à lad. damoiselle de la Fontaine Blanche, 32 s. 6 d.
Pour une once de fil de soye craraoisy jaulne et bleu, 20 s.
Pour une demye aulne de toille pour faire ung corps à lad.
damoiselle, 7 s. 6 d.
Pour une paire des solliers pour lad. damoiselle, 15 s.
Pour troys aulnes de toille douge pour lad, damoiselle, 60 s.
1574.
Pour sept aulnes de toille pour faire des chemises à madamoi-
selle de la Fontaine Blanche, 70 s.
1576.
Achapt faictpar maître Mathieu estant à Kerjan,pa? commen-
dement de madamoiselle de Kerjan au nom de madamoiselle
du Froutguen durant que led. lutteur estoit allé à Paris rendre
le sieur de Lanuzouarn.
Pour troys aulnes et demye serge de Fleurance pour faire robe
à lad. damoiselle du Froutguen, à 1 12 s. 6 d. l'aulne, 191. 18 s.
6d.
Pour deux aulnes de serge grise pour lad. damoiselle, à 4 1.
15 s. l'aulne, 91. 10 s.
Pour une aulne de velours orange, 8 1. 15 s.
Pour deux onces de fil de soye, 35 s.
Pour une piecze de tanelle blanche, 53 s. 4 d.
Pour deux aulnes de taffetas, à 4 1. 15 s. monnoie, 91. 10 s.
Pour cinq onces de passement à 20 s. l'once, 100 s.
Plus pour demy aulne de tafias 10 1. 5 s.
Pour la faczon d'une robe à hault colect, les manches coup-
péeslO 1.
Pour la faczon d'ung coltillon, d'une paire de- chausses,
ung taffetas, deux masques et accoustre: d'aultres hardes, 45 s.
Pour deux onces de fil de Paris noir, 4 1. 2 s.
Pour une once de fil de soye jaulne, 18 s. 6 d.
— 96 —
Pour quatre douzaines d'agraffes, 4 s. 4 d.
Le 6 octobre, pour douze aulnes et demye de velours violiet
cramoisy.de Fleurance, à 17 I. tournais l'aulne, 212 I. 10 s.
Plus pour douze aulnes et demye de velours noir, h 12 1.
10 s. l'aulne, 156 1. 5 s.
Pour neuff aulnes et demye do taffetas noir à houicl fillz, h
6 1. l'aulne, 57 1.
Pour traize aulnes troys quartz et demye de taffetas veloulté
à ramaige, à 8 1. 5 s. l'aulne, 114 1. 9 s. 4 d.
Pour deux aulnes et demye de satin blanc rayé d'or, à 13 I.
l'aulne, 32 1. 10 s. e *
Pour deux aultres aulnes et demye de satin rouge rayé d'or,
32 1. 10 s.
Pour quatre aulnes de taffetas gris violant (sic), 24 1.
Pour une aulne et demye de velours aurange, 12 I. 15 s.
En une piecze de tanelle bien blanche, 60 s.
Pour dix-houict aulnes de passement de fil d'or et d'argent,
large de troys doigtz pesantz quinze unces troys gros, à 75 s.
l'once, 57 1.
Pour traize onces et demye d'aullre passement d'or et
d'argent, aud. pris de 76 s. l'once, 50 1. 12 s. 6 d.
Pour deux pieczes de passement de soye noire, contenant
houict onces et demye, 8 1.
Pour ung chappeau de velours avecq le cordon d'or, 18 1.
Pour une paire de broudfeures esmailles d'espargne et une
chesne,ceincture et carquan, le tout d'or esmailles d'espargne,
le nombre de deux centz cincquante escuz, apréciés en
monnoye, 667 1. 10 s.
Plus pour une garniture de perles et de coural (corail) ac-
coustré d'orlraize escuz valantz, 32 1. 10 s.
Pour ung coffre etbahu pour apporter les biens et hardes cy-
dessùs spéciffiés, 7 1.
Au messaiger de- Laval pour rendre led. coffre à
Kerahes, 12 1. 10 s.
' -,
— 97 —
Pourpoyer les debvoirs et passeports (1) eo chemin futpoyé
aud. messaiger, 20 s.
Pour toile pour envelopper led f coffre, et cordaiges, 20 s.
Plus pour rendre led. coffre de Kerahès à Mourlaix, 25 s.
Le 23 octobre pour ungne hacquenée (2) de poill gris, prise
par le seigneur de Measlean pour lad. damme du Froutguen,
fut poyé par led. lutteur, 100 1.
A ung marguigneur (3) qui fut par le commandement de ma-
demoiselle de Kerjan à Kerlouan et en plusieurs aultres lieulx,
chercher et debvoir trouver ungne belle hacquenée pour lad.
damme du Froutguen, fut poyé pour son sallaire et despens,
20 s.
. Pour ung harnoyspour lad. hacquenée, que mad. damoiselle
de Kerjan avoict commandé faire à Landerneau, fut poyé dix-
houict escus vallantz49 1. 10 s.
Pour despens aud. tutteur qui estoit allé à Lesneven tout
exprès par.'le commandement de mad. damoiselle de Kerjan
pour veoir el debvoir achepter une hacquenée pour lad.
damoiselle du Froutguen, et auquel lieu led. marquignon avoit
faict rendre quatre belles harquenées (sic) tachant k faire le
marché de Tune desd. hacquenées fut despendu 20 s.
Le 22 août led. comptable délivra au seigneur de Measlean,
en faveur du mariage qui se feist led. jour entre le sieur du
Froutguèn et madamoiselle du Froutguen,et en leurs présence,
comme conste par le contract dud.mariaige,la somme de 2,9001.
(1) « Droits de passage. » II y avait alors le long des grands chemins
des barrières, comme il en existe encore en Angleterre et dans d'autres
pays. Bien des châteaux avaient aussi été construits au moyen-âge, aux
abords des voies, à la tête des ponts ou près des passages des rivières,
et il est certain~que les seigneurs qui habitaient jes châteaux exigeaient
des voyageurs un droit de transit. C'est probablement du mot « passe-
portes » qu'est venu le mot « passeport » aujourd'hui en usage.
(2) Le mot breton « Hinkane » cheval ou jument qui va l'amble ou
le train, est une _ altération du français « Haquenée. »
(3) Maquignon.
— 98 —
Pour la faczon des accoustrementz de madamoiselle du
Froutguen :
Ungne robe de velours violel cramoysy, garnye dépassement
d'or el d'argent, 65 s.
Pour la faczon d'aultre robe de veloux noir, aussi* garnye de
passement d'or et d'argent, 65 s.
Pour la faczon d'aultre robe de taffetas à ramaige, garnye de
passement de soye, 55 s.
Pour la faczon d'aultre robe de taffetas cramoisy, garnye
de passement d'or el d'argent, 55 s.
Pour la faczqg d'aultre robe de taffetas noir, garnye de pas-
sèment de soye 55 s.
Pour la faczon de Iroys devantz o (avec) les manches de mes-
mesl'ugn de satin blanc et l'aultre de satin verd, le tout rayé
d'or, 70 s.
Pour la faczon d'ung cottillon de taffettas gris garny de
velours d'orenge, el de la tanelle blanche, 10 1. 5 s.
Pour dix aulnes de toille pour doubler ciucq robes pour
madamoiselle de Froutguen, deux pour lad. Keranmunou el
doubler sept paires de manches pour lad. dame du Froutguen,
à raison de 20 s. l'aulne, 10 1.
Dépenses concernant le fils mineur de
Lanaioaarn.
1571.
En une paire de solliers pour le sieur de Lanuzouarn, 10 s.
Pour deux aulnes de carise blanc pour faire une robe et des
bas de chausses aud. sieur de Lanuzouarn, 46 s. 8 d.
Pour tondre led. drap, 20 d.
Au tailleur pour la faczon de lad. robe et chausses, 3 s. 9 d.
Pour demy aulne de toille marchande pour lad. robbe,4 s, 2 d.
Pour un chappeau pour led. sieur, 70 s .
— 99 —
1572.
Le 15 avril, pour une ceinture de soye pour le sieur de
Lanuzouarn, 5 s.
Le 19 juin, en une aulne de drap bleu céleste pour faire
ung ristre aud. sieur de. Lanuzouarn, à raison de 4 ). 10 s.
l'aulne, la somme de 7 1. 12 s. 6 d.
Pour une once et demye de passement d'argent et soye cra-
moysy, 70 s.
Pour fil de soye et fil pers, 10 s;
Pour l.a faczon dud. ristre, 10 s*
Pour ung boûtton de soye et fil d'argent, 15 s.
Le 17 août, pour une aulne et troys quartz de querese blanc
pour faire une robbe et des chausses aud. sieur de Lanuzouarn,
42 s. 9 d,
Pour tondre led. dr$p, 18 d.
_ »
Pour drap blanc pour faire des chausses et raccouslrer ses
aultres chausses, 11 s. 3 d.
Pour une paire des solliers pour led. sieur, 11 s. 3 d.
Le 20 septembre, pour une aulne troys quartz de cramoisy
brun pour faire unerobo et chausses aud. sieur de Lanuzouarn,
9 1. 12 s. 6 d.
Pour deux onces de passement de soye pour garnir lad, robe,
fil de soye et une douzaine et demye des bouttons, 55 s.
Pour une aulne de toille pour doubler les corps de deux ro-
bes pour led. sieur, 10 s.
Pour la faczon desd. robbes et chausses, 11 s. 3 d.
Pour une aulne et demye de revesche pour faire une robe
aud. sieur de Lanuzouarn, 33 s. 9 d.
Led. tutteur bailla aud. sieur de Lanuzouarn estant à Sainct
Jan du Doigtz pour bailler à l'offrende et dire une messe aud.
lieu, 4 s. 2 d.
Pour despens pour led. sieur, son clerc, led. tutteur et ung
servitteur, tant aud. Saint Jan qu'à Mourlaix,£ompris troys che-
vaulx, 30 s.
— .100 —
Pour faire ses offrandes à Sainct-Men et faire dire une
messe, 5 s.
Pour une paire d'Heures, pour led. sieur de Lanuzouarn,10s.
1573.
Le 3 janvier en ung tiers d'aulne de cramoisy brun pour
faire des chausses et des manches aud. sieur, 35 s.
Pour fil noir pour les faire, 10 d.
Au cousturier pour les faire et accoustrer le§ aultres hardes,
3 s. 4 d. ..
Pour une paire des solliers pour led. sieur, 10 s.
Pour toille d'Olande grise pour faire ung pourpoincl aud.
sieur, 30 s.
Pour passement d'argent pour garnir led. pourpoinct, 20 s.
En boutions pour garnir deux pourpoinctz pour led. sieur,
7 s. 6 d.
Pour toile rouage (rousse) pour doubler deux pourpoinctz
pour led, sieur, 1 1 s. 6 d.
En toille blanche douge pour faire pourpoinct aud. sieur,20 s.
Pour une aulne de toile marchande pour faire des chausses
aud. sieur, 7 s. 6 d.
Pour eslamet pour faire ung bas de chausses aud. sieur, 12 s.
6 d.
A ung tailleur pour faire led. choses (sic), 20 s.
En toille pour faire des chemises aud. sieur, scavoir jucq au
nombre de houict, 100 s.
Pour une aulne etdemye pour faire des colectz etfronceures
desd. chemises. 22 s 6d.
'Pour faire tesd. chemises et des mouchoueurs (mouchoirs)
pour led. sieur 20 s.
Pour ung chappeau pour led. sieur de Lanuzouarn, 70 s.
Pour troys aulnes de drap de bureau pour faire une robbe à
ung pauvre homme nommé Guyon Le Madiec, lequel avoit esté
4. F
1
— 101 —
es six ans précédans nourry en la maison de Lanuzouarn,
pour l'amour de Dieu, 66 s.
Pour toile à faire deux chemises aud. pauvre homme, le tout
à la requesle du sieur de Lanuzouarn, 23 s. 6 d.
Le 4 novembre, pour une aulne et demye de toille pour faire
ung pourpoinct aud. sieur, 12 s. 6 d.
A ung tailleur pour faire led. pourpoinct et une paire de
gargaisses (1) de cramoisy brun, 12 s. 6 d.
Pour boultons et fil, 5 s;
Le 28 novembre, en passement gris pour meclre sur ungn
quasecquen noir aud. sieur de Lanuzouarn, 25 s. 8 d.
Pour une douzaine et demye de boutions de soye grise, et
fil noir, 15 s. ,
Pour toile à doubler led. quasecquin, 5 s.
Au tailleur pour la faezon, 5 s 10 d.
- Pour une paire, de solliers pour led. sieur de Lanuzouarn,
11 s. 3d.
Plus led. tulteur bailla aud. sieur de Lanuzouarn, ung escu
d'or soleil pour bailler à Jan Gueguen, procureur de monsieur
Sainct Pierre, à Plouénan, (2) pour aider d'avoir une croix
d'argent, 46 s. 8 d.
Pour une aulne et demye de drap de cramoisy brun pour
faire ungn ristre aud. sieur, 8 1.5 s.
•
Pour tjoys quartz d'estamet de cramoisy brun pour faire
ung'çollelin aud sieur, 4 1. 2 s. C d.
,Pour une aulne de revêche, 22 s. 6 d.
Pour cinq onces de passement d'or à 60 s. 10 d. monnoye
l'once, 15 1. 4 s. 2 d.
Pour une once et demye de fil de soye jaulne, 30 s.
Pour une aulne de taffetas jaulne pour garnir led. ristre, 45 s.
(1) Ou mieux « garguesques » ; chausses « à la grecque, » qu'on
appela plus tard des « grègues. »
(2) De la fabrique delà chapelle Saint-Pierre.
— 102 —
Pour deraye quart de velours jaulne pour garnir le collect
dud. rislre, 20 s.
Pour troys douzaines de grandz bouttons larges jaulnes, pour
mectre sur les coletins, et ung boutton de fil d'or et soye
jaulne, 75 s.
Pour toille fine pour fare ungn pourpoinct aud. sieur, et
aultre loille pour le doubler, 30 s.
Pour bouttons et fil retors pour mectre sur led. pourpoinct,
5 s. 10 d.
Pour la faczon desd. ristre, colletin, pourpoinct, toutz cha-
marrés et garniz de passement, 60 s.
1574.
Le 15 juin led. tutteur bailla aud. sieur.de Lanuzouarn,
ungn escu pour bailler en offrande à missire Hervé Laurens
le jour de sa première messe, 50 s.
Plus le jour de Sainct Jan-Baptiste et aultres jours des fes-
tes de monsieur Sainct Jan, qui sont en effect quatre chacun an,
pour six années, à raison de 10 d. è chacune desd. festes,20s.
Plus led, tutteur bailla aud. sieur de Lanuzouarn pour bailler
à Toffrende en l'esglise de Sainct Brandan à Loprenden, à
chacune feste durant lesd. six ans, 1*0 d. 5 s.
Pour six aulnes de toille blanche? pour faire des chemises
aud. sieur de Lanuzouarn, 63 s.
Pour une aulne et demye de toille bien douge pour faire les
colletz et fronceures desd. chemises, 30 s.
Aux cousturières pour la faczon desd. chemises et faire des
mouchouers pour led. sieur, 20 s.
Pour une aulne et quart de querise blanc, à raison de 30 s.
l'aulne, 37 s. 6 d.
 Jan Le Joloc pour faire ung quasecquiu et accoustrer les
aultres hardes dud. sieur, 12 s. 6 d. .
Pour ung libvre pour led. sieur de Lanuzouarn/ appelé
Vives (?), 7 s. 6 d.
- 103 -
1575
Le 1 er janvier, pour une aulne et quarl de cberge cramoisy
brun pour faire une paire des chausses aud. sieur, à 6 1. 10 s.
l'aulne, 8 1. 2 s. 6 d.
Pour passement pour meclre dessus led. chausses, 46 s. 6 d.
Pour fil de soye pour couldreled. passement et garnir les
chausses dud. sieur, 8 s. 4 d.
Pour une aulne de toille bien douge pour faire pourpoinct
aud. sieur, 16 s. 8 d.
Pour ung aultee aulne pour doubler led. pourpoinct, 10 s.
Pour une aulne et demye de quérisse pour doubler lesd.
chausses, 30 s.
Pour deux douzaines de bouttons. de soye" pour mectre sur
led. pourpoinct, 8 s. 8 d.
Pour une douzaine d'esguilletles pour led. sieur, 20 d.
Pour la faezon desd. pourpoinct et chausses, 50 s.
Pour une paire de muletz et aullre paire de solliers pour
led. sieur, 26 s. 8 ci.
Le 2 février, à ung tailleur pour faire une raandille (1) aud.
sieur de Lanuzouarn, d'une robe qu'il avoit auparavant, 15 s.
Pour passement île soye pour mectre dessus lad. mandille,
fil de soye et fil noir, 31 s.
Pour bouttons de soye pour meclre dessus, 7 s. 6 d.
Pour une aulne de revesche tanné, pour doubler lad. robe, 25 s.
Le I er mars, pour troys quartz d'aulne de cherge cramoisy
pour faire ung collectai aud. sieur, 4 1. 7 s. 6 d.
Pour quinze aulne* de passement pour mectre dessus led.col-
Iettin et deux douzaines et demye de bouttons longs, 78s.6d.
'• Pour fil de- soye à couldre led. passement et bouttons, 10 s.
Pour fil noir et croches, 3 s. 4 d.
Au tailleur, pour la faezon dud. colletin, 20 s.
Le 7 may, en ung chappeau pour led. sieur, 70 s.
(1) Espèce de casaque.
O
— 104 —
* Plus led. lutteur bailla aud. sieur de Lanuzouarn, pour
donuer en l'offrende le jour des uobces de Jan Le Joloc,
13 s. 6 d.
Le 12 novembre, pour une aulne et demye d'estamet violet
pour faire une paire déchausses aud. sieur de Lanuzouarn!
7 1. 10 s.
Pour une aulne et trois quartz de quérise pour doubler lesd.
chausses, 35 s.
Pouf deux aulnes de toile pour doubler lesd. chausses, 30 s.
Pour une once de passement de soye pour mectre dessus
lesd. chausses, et une douzaine de longs bouttons de soye, et
demy once de fil et soye, 37 s. 6 d.
Pour fil pers, 30 d.
Au tailleur pour la faczon desd. chausses et redoubler les
aultres chausses, 20 s.
1576.
A chacun jour de Notre-Dame led. lutteur bailloict aud. feu
sieur de Lanuzouarn,dix deniers pour baillera l'offrende tant à
Pensez que à Kerhellon, montant pour cincq années, à 28 s. 4 d.
Plus led. tutteur a délivré aud. sieur de Lanuzouarn, chacun
an durant lesd. cincq ans, troys réailes pour bailler au prédi-
catteur qui preschoit le karesme à Ploenan, faisanlz quinze
réailes, 62 s. 6 d.
Le 15 mars, pour une aulne et demy quart de toille fine pour
faire ung pourpoint au sieur de Lanuzouarn, 20 s.
Pour une aulne d'auhre toille pour doubler ledict pourpoinct,
10 s.
Pour deux douzaines de boutons, 3 s. 4 d.
Pour fil nycole, 10 d.
Pour la faczon dud. pourpoinct et accoustrer ses chaus-
ses, 15 s.
Pour une paire de solliers pour led. sieur, 10 s. 10 d.
Pour ung libvre in Ululé Bucollica Virgilii y 5 s.
— 105 —
Le jour de la Magdalaine,pour estamect violet pour faire ung
bas de chausses aud sieur, 20 s.
Pour une paire de jartiers de soye pour led. sieur, 20 s, -
Le 4 août, pour deux aulnes el demy de tafftas cramoisy à
bouist fil, à 105 s. l'aulne, 13 1. 2 s. 6 d.
Pour une douzaine de boutions de soye cramoisy pour
mectre dessus lesd. chausses, 10 s. 10 d.
Pour deux douzaines d'aultres bouttons de soye rouge, 10 s.
Pour demy once de fil de soye cramoisy, 10 s.
Pour une once de fil de Paris rouge, 2 s. 6 d.
Pour une once de passement de soye cramoisy pour* mectre
dessus lesd. chausses, 22 s. 6 d.
Pour troys aulnes de toille pour doubler lesd. chausses, et
doubler ung pourpoinct de satin cramoisy, 30 s.
Pour cherge cramoisy pour faire ung bas de chausses aud.
sieur, 25 s.
Pour la faczon desd. pourpoinct de satin et chausses, 30 s.
Pour houict aulnes de toille de Mourlaix pour faire quatre
chemises aud. sieur, 100 s.
Pour deux aulnes et demye de toile bien fine, pour faire des
colectz et fronceures aud. chemises et à d'aultres chemi-
ses, 62 s. 6 d.
Pour une douzaine d'aiguillettes de soye pour led. sieur, 10 s.
Pour une paire de bottes aud. sieur de Lanuzouarn, 35 s.
Pour la nourritlure d'ugn cheval que led. tutteur avoit
achf pté pour porter led. sieur a Paris, durant ungn moys à
fouign,pain et avoyne, 6 1. 5 s.
Le 17 septembre, au mareschal de Ponteon pour ferrer la
hacquenée dud. sieur de Lanuzouarn, le cheval qui porta son
clerc maislre Auffroy Guena, et le cheval dud. tutteur, et aussi
pour quelque nombre de clous, 35 s.
Pour raccoustrer deux selles, Tune pour la hacquenée dud.
sieur, et l'aultre pour le cheval dud. clerc, et pour deux rênes
de bride, 4 1. *
— 106 —
Le jour de Saint Mathieu, auquel jour partist led. sieur de
Lanuzouarn pour commencer le chemin d'aller à Paris, led.
tuteur bailla aud. sieur ung escu pour bailler à son raaistre,
maistre Hervé Gueguen, 55 s.
Samedi 22 septembre, pour le soupper la nuict précédante,
et le disner de troys chevaux à Mourlaix, 36 s. 8 d.
Led. jour pour ung coussinet pour led. sieur de Lanu-
zouarn, 20 s.
Pour une paire des solliers pour led. sieur, à cause que Ton
avoit perdu ses solliers en chemin, 18 s. (1)
Pour ung chappeau pour led. sieur, 67 s.
Pour ung bonet de nuit d'escarlate, aud. sieur, 20 s.
Pour ung bonet rond noir, 20 s.
Pour ung estuy de paingues (peignes) pour led. sieur, 25 s.
^ Pour une escripture (écritoire) et cornet, 10 s.
Pour ung Cousteau, 5 s.
Pour ung ehausse-pied, 12 d.
Pour une ceincture de soye large, pour led. sieur, 15 s.
Pour plume et tranche plume (canif) pour led. sieur, 5 s.
Pour une paire de gantz pour led. sieur, 5 s.
Pour ungn coffre de bahu pour led. sieur, 7 I.
Pour rendre led. coffre au collège, 3 s.
Au régent pour 9on vin,' 33 s. 6 d.
Pour ungn lict de champ (camp), 60 L dont revient pour
une moitié, 30 1.
Pour faire rendre led. lict au collège, 3 s.
Pour paille pour mectre dedans led. lict, pour sa part, 3 s.
Pour quatre aulnes de drap gris pour faire une robe longue
et ung quasecquin pour led. sieur, à 110 s. l'aulne, 22 1.
(I) Dans cet article et dans les 36 articles suivants la dépense, qui
fut faite hors de Bretagne, au lieu d'être évaluée en livres monnaie de
ce pays , comme dans le reste du compte, est donnée en livres tour-
nois. Cette livre était d'un cinquième plus faible que la livre bretonne
qui valait 25 s.
— 107 —
Pour quatre aulnes de revescbe verd,à 30 s. l'aulne, 6 1.
Pour passement de soye verd,six onces pour garnir lesd.robe
et quasecquin, 61. 12 s.
Pour fil de soye verd o (avec) cincq douzaines de bouttons
à longue queue pour garnir lesd. robe et casecquin, 4 1.
Pour la faczon desd. robe et casecquin, 70 s.
Pour velours verd pour le parement de lad. robbe, 57 s.
A maistre Auffroy Gueua pour l'aider d'avoir une robbe,
deux pistolletz d'or, 6 1. 14 s.
Pour despens chemin Taisant à Paris, scavoir: pour led.
sieur 4e Lanuzouirn, son clerc, led. tutteur et la moictié des
despens d'ugn pietton que le s* de Coetlespell avoit prins
pour faire led. voiaige, et les despens des chevaulx dud. sieur
et son clerc, lesquieulx furent six jours aud» Paris sans estre
venduz, et aussi pour les despens du cheval dud. tutteur du-
rant dix jours, comprins aussi ung disner que fut baillé à
partie des escollyers dHa nation, et les despens dud. tutteur
et la moiclié des despens dud. pielton en retournant, 125 1.
Au pietton pour son sallaire d'avoir faicl led. voiaige aud.
Paris, fut poyé 7 1. 10 s. et pour une moiclié, 76 s.
1577.
Le 26 mai, led. tutteur délivra & sire Thomas Deleau, la somme
de vignt- cincq doubles pistolletz d'or, pour les rendre en seurté,
(sûreté) aud. sieur de Lanuzouarn à Paris, lors valantz 1451.
16 s. 8 d.
Le 13 juillet, led. tutteur délivra à maistre Julien Demay,
sieur de Leignoudrein, la somme de vignt pistolletz d'or, pour
les faire tenir aud, sieur de Lanuzouarn, lors valantz 65 1.
Le 19 septembre, led. tutteur bailla au messaigier ordinaire
de Paris, ung pacquect de lettres avecq deux demy mille raiz,
pour faire tenir aud. sieur de Lanuzouarn et son clerc, lors
vallantz 12 1.
Et aud. messaigier pour sa peine, 10 s.
Le 8 novembre, led. tutteur délivra à ung voicturier de
- 108 —
Normandie, qui éloit venu rendre le sieur de Rosnevcz aud.
lieu de Rosnevez, quatre chemises et quinze pistolletz d'or
pour les rendre aud. sieur,lesd. pistolletz lors vallanta 431 15s.
Et lesd. quatre chemises, chacune contenant deux aulnes
et deraye sans les collelz et fronceures, 10 1.
Pour toille à faire lesd. colelz et fronceures, 70 s.
Pour la faczon desd. chemises, 20 s.
Aud. voicturier pour sallaire de rendre lesd. pistolletz et
chemises aud. sieur, 20 s.
Pour despens aud. tulteur qui alla tout exprès à Mourlaix
porter led. chemises aud. voicturier, et pour led.voicturier, 20 s.
Led. jour le messaiger ordinaire de Paris rendit aud. tulteur
ung pacquet de lettres d'avec led. sieur de Lanuzouarn, pour
son vin, 10 s.
1578.
Le 15 janvier, led. tulteur délivra à Guyon, messaigier ordi-
naire de Paris, ung pacqueçt de lettres, pour les faire tenir
aud. sieur de Lanuzouarn, auquel led. tuteur poya pinte de
vin, 5 s.
Et aud. messaigier pour sa paine deux ré ailes, lors vallanlz.
8 s. 4 d.
Le 2*2 .février, led. tutteur délivra au sieur de Pleiber-Crist,
quinze demyz mille raix, pour délivrer aud. sieur de Lanu-
zouarn, lors vallantz 40 1.
A Guyon, messaigier ordinaire de Paris, qui rendist aud.
tutteur ung pacqueçt de lettres d'avecq led. sieur de Lanu-
zouarn et son pédagogie, à Sainct Paul^ pour sa paine deux
réailes 8 s. 4 d.
Le 29 mai, led. tulteur bailla à ung marchand de la cog-
noissance du sieur de Coetlespell, vignt demiz mille raix, pour
estre rendus aud. sieur de Lanuzouarn, en sûreté à Paris, lors
valantz 53 1. 6 s. 8 d.
Au messaigier dict Le Perch, pour sa peine d'estre venu
- 109 —
exprès à Lanuzouarn, rendre les lettres dud, sieur et de son
pédagogue, 10 s
Plus aud. Guyon,messaigier, qui rendit récipisse aud. tutteur
d'avecq led. sieur de Lanuzouarn et son pédagogue, d'avoir
receu les vignt demy mille raix, 10 s.
Le 1 er septembre, led. lutteur délivra à monsieur de Ker-
coent à Kerjean, douze doubles pistolletz d'or pour tenir aud.
sieur de Lanuzouarn et Poulîcguen, et deux escuz pour déli-
vrer aud. sieur de Lanuzouarn à part, 63 1.
Articles du compte relatifs aux montres (I) et à
l'entretien des armes de Lanuzouarn.
1572.
Les 9, 10 et 11 novembre, pour les despens de troys hommes
troys chevaulx et dud. lutteur, pour avoir esté aux monstres
générales de l'arrière ban tenuz à Saint Rennan, 7 s. 10 d.
1573.
Pour avoir tenu garnyson en la ville de Saint Paul, soulz le
seigneur de Kergoumadech, durant ung moys et demy en Tan
1572, led. tutteur depandisl la somme de 1151., à raison qu'il
avoit deux chevaulx de service ordinairement en lad. ville, et
ou lire pour les bagaiges et serviteurs.
Au mois de février, pour les despens aud. lutteur, troys
hommes et troys chevaulx, d'avoir esté aux monstres généralles
fenuez à Lesneven, poya led. lutteur, ausd. deux hommes
pour sallaire d'avoir esté ausd. monstres, 6 1.
A ung fourbisseur de la ville de Mourlaix pour saize journées
qu'il fut à Lanuzouarn, à fourbir les harnoys, pistolletz, h,ar-
quebutlez (arquebuses), et les espées de Lanuzouarn, 60 s.
. (t) Revue' des gens de guerre que les seigneurs devaient à leurs
souverains.
— 110 —
Pour suiff de roouthon pour engresser (graisser) lesd. haraois
et espées, 10 s.
Le 2 juin, pour despens dud. tuteur aiant troys hommes et
troys chevaulx pour aller aux monstres générales de l'arrière
ban de Léon, assignés à être receuz par monseigneur du Ty-
meur en armes en la ville de Landerneau, 7 1, (alloué 100 s.)
1574.
Le 22 mars, pour despens aud. tulteur,deux hommes et deux
chevaulx estant allés aux monstres généralles de l'arrière ban
de Léon, assignés estre tenuz à Lesneven, 41. 10 s. (alloué 50 s.)
1575.
Le 10 octobre, jour assigné des monstres généralles de l'ar-
rière ban de l'éveschéde Léon à Lesneven, pour les despens de
deux hommes, deux chevaulx et dud. tutteur, pour ce qu'ilz
demeurèrent aud. Lesneven une nuictée, 4 1. 10 s. (alloué 50 s.)
Le 21 desd. moys et an, pour les despens dud. tulteur, deux
hommes et deux chevaulx, à Saint Paul, auquel on avoit esta-
bly garnison et revueue d'armes, 25 s. (alloué 12 s. 6 d. )
1576.
Le 8 mars, pour despens aud. tulteur,deux hommes et (Jeux
chevaux allant et venant aux aïonstres généralles assignées à
Lesneven, 4 1. 10 s. ( alloué 50 sj
A deux fourbisseurs de Mourlaix, pour avoir esté quatre jours
à Lanuzonarn fourbir les harnoys et les engresser, par ce que
led. sieur de Lanuzouarn estoit mis sur le rolle pour aller à
Fougères, fut poyé 60 s. sans les despens, ausquels baillent (sic)
du vin à chacun repas, (alloué 50 s.)
Pour deux livres de gresse de mouton pour engresser lesd.
harnoys, 5 s.
Le 25 avril, â Uhelgoet, 'chemin faisant pour aller à Kerahes,
pour la repue d'ung gentilhomme nommé Kerouchant, filz
Kervenou, et son servitteur, lesquielx esloint venuz expressé-
— Hl -
ment pour aller en garnison pour led. sieur de Lanuzouarn,
par ce que led. sieur de Lanuzouarn estoit enrollé pour aller â
Fougères, et aussi pour la repue dud. tulteur, son garson et
deux chevaulx, 30 s.
Le jeudi, 26 avril, aud. Kerahès, jour assigné des monstres
généralles assignées d'entre tenuz aud. Kerabès, pour les des-
peos desd. gentilhomme, dud. tulteur, desd. deux servitteurs
et trois chevaulx, pour le jeudy et vendredy enlhier, poya led.
tulteur à Kerahès, à raison de 10 s. pour chacune repue desd.
gentilhomme et Tulteur, et à chacun desd. serviteurs, pour
leur repas, 6 s. et pour la journnée {sic) de chacun cheval,
12s., faisant en tout 10 1. (alloué 9 l.)
Pour le disner dud. tutteur à Mourlaix, retournant de
Kerahès, son garson et son cheval, 20 s.
Le 1 er mai, au Squiryou, chemin faisant pour retourner aud.
Kerahès, auquel jour il estpict commandé par monsieur le ca-
pitaine de l'arrière ban de Léon, se trouver en tel équipaige
qu'ilz sont tenuz servir le roy. â paine de la saisye (du fief),
pour le disner dud. tutleur, son garson et son cheval, 15 s.
Pour le 'soupper el la couchée desd. gentilhomme, tutteur,
deux hommes el troys chevaulx, et pour les deux aultres jour-
nées subsecquantes entièrement, le disner le quatrième jour
dnd. moysà Kerahès, auquel jour led. sieur capitaine donna
congé de partir à la compaignie jucq à nov.elle assignation, fut
poyépar led. tutteur 15 1. (alloué 12 1. 10 s.)
Aud. gentilhomme pour sa peine et vaccation d'avoir esté à
Kerahès, et de là jucq à la Veigne (?) au pais de Vainnes, par com-
mendement de monsieur le capitaine. et être venu tout exprès
pour debvoir aller aud. Fougères, en cas de besoggn, pour led.
s ieur de Lannuzouarn, led. tutteur bailla, par l'advis du sieur
de Mezle (1) et en sa présence, aud. gentilhomme, quatre pistol-
et) François du Chastel, marquis de Mezle, dont il a été question
plus haut à propos de l'héritière de Ke roulas.
— 112 -
letz d'or et ung escu soleil, 12 1. 10 s. (alloué 12 1. 3 s. 4 d.)
A son servitteur 30 s.
Le 22 mai, pour les despens dud. tutteur, deux hommes et
deux chevaux qui estoint ailé aux monstres généralles assignées
à Lesneven, 70 s. (alloué 50 s.) - -
Tapisseries.
1572.
Led. tutteur a poyé à des vesluriers, pour salaire d'avoir
rendu houict pieczes de tapiscerie pour tendre, de Nantes en
la ville de Mourlaix, 10 1. 10 s.
En despens faisant le marché, 7 s. 6 d.
Pour rendre lesd. pieczes de tapisserie à Lanuzouarn, fut
poyé ausd. veictuyers (sic) 16 s.
Services et messes.
1573.
Led. comptable a poyé à six prebtres de la paroisse de Ploe-
nan pour avoir célébrée et dict une messe à notte toutz les jours
durant ung an enlhier, en l'esglise de Ploénan, à l'intention du
feu sieur de Lanuzouarn, père du dernier décédé, 40 1.
1578.
Pour six services et obitz annuelz, accoustumez d'estre
célébrés en l'esglise parrochialle de Plouénan, chacun an à
jours de dimanches, en l'intention de la seigneurie de Lanu-
zouarn, dont l'on bailloicl ordinairement pour célébrer chacun
desd. obietz, entre les prebtres et enffenlz 41 s. 8 d. monnoie,
el pour l'office des octaves du Sacre, avecq la collation ausd.
prebtres, 60 s. par chacun an, faisant en tout 121 1. 12 s. 4 d.
— 113 '—
Serment §ar des relique* h l'occasion
d'an procès.
1672.
Le mercredy suivant le 10 mai, au sacriste du couvent de
Jacobins à Morlaix, pour apparoir le Sacrement de l'autel es
les reliques estantz oud. couvent, en présencze desquieulx l'on
avait defféré bailler à serment décisiff à lad. Trousson de sa
demande, (1) fut poyé par led. comptable, 5 s. 5 d.
A monsieur le juge pour sa vaccation d'avoir assisté sur
led. serment, 30 s. (alloué 15 s.) ' ■
Al'advocat dud. comptable, qui assista sur led.serment, pour
vacation, 7 s. 6 d.
Au greffier pour le procès et vacations d'avoir assisté sur
led. serment, et pour la sentence donné contre led. comptable,
15 s. (alloué 7 s. 6d.)
Un grand nombre des articles qui précèdent intéressent
l'histoire du vêtement. On trouvera à ce sujet dans la savante
Histoire du Costume en France que vient de publier M. Qui-
cberat, des renseignements qui n'auraient pu trouver place
dans ce Bulletin, et il sera facile en rapprochant des gravures
de cet ouvrage les indications données par le compte de
N. de La Haye, de s'assurer que sous le rapport de la mode, la
basse Bretagne n'était pas à la fin du XVI e siècle, en arrière du
reste de la France.
Les commissaires chargés de l'examen de ce compte, furent
Jan Jenfeunteunyo, Bernard Le Bihan et Jan Kerbic. Ils
allouèrent généralement au tuteur les sommes demandées par
lui. Cependant, comme on peut le voir au chapitre des
c Montres », ils taxèrent quelquefois les dépenses à un chiffre
inférieur à celui porté au compte, et le sieur de La Haye ayant
dans un article, réclamé le montant de sa bourse qu'il avait
(1) Elle réclamait une somme d'argent.
o
— 114 —
perdue un jour de foire à la halle de Lesneven, cette indemnité
lui fut refusée par les commissaires.
Le chanoine Hamon Barbier, dont j'ai parlé plus haut
(page 66), mourut en 1544, six ans après Jean Barbier qui,
d'après H. de Kerdanet, avait fait faire les plans et les devis
du château de Kerjan. Il ne put donc que pendant six ans,
prendre une part adiré à la, construction de ce château, mais
sa grande fortune vint en aide à son neveu Louis Barbier,
pour la mener à bonne fin.
Hamon Barbier pétait « docteur es droitz, abbé commenda-
taire de l'abbaye de Saint-Mathieu-in-finibus-terrarum, archi-
diacre de Quiminidily, chanoine de Léon, officiai et grand
vicaire dudit Léon, et recteur des paroisses de Plounévez,
Plougar, Guimiliau, Sizun, Plouzané, Lannilis, Plabennec,
Plouyen, Guipavas, Plounéour et Baz (1). A ces titres M. de
Kerdanet ajoute (2) ceux de conseiller au parlement de Rennes,
et de chanoine de Nantes et de Cornouaille (3).
(1) Registre de fondations faites en la cathédrale de Léon. (Archives
du Finistère.)
(2) Notice sur le château de Kerjan, page 20.
(3) il s'est glissé dans l'impression de cet article quelques erreurs
dont voici les corrections :
Page 71,
- *t,
- 73,
- 73,
- 73,
76,
78,
82,
84,
84,
88,
93,
95,
95,
95,
96,
96,
98,
"— 78. 1
1
— 95, I
— 96,
— 96,1
— 98, 1
ligne 8, au lieu de 4 1., lisez 4 s.
ligne 12, au lieu de 15 ., lisez 15 d.
note 1, au lieu de Saint-Meloir, lisez Saint-Meloir ?
'igné 2 de la note 2, au lieu defillds, lisez filles.
gne 3 de la même note, au lieu de appelé, lisez appelait
igné 19, au lieu de 10 s., lisez 40 l.
gne 7, au lieu de 22 1. 15 s., lisez 23 1. 15 s.
gne 6, au lieu de 33 1. 4 s., lisez 33 s. 4 d.
gne 19, au lieu de 46 s., lisez 45 s.
gne 26, au lieu de 100 1., lisez 100 s.
gne 13, au lieu de 10 s. 15d., lisez 40 1. 15 s.
gne 6, au lieu de 55 s., 6 d., lisez 55 I. 6 d.
gne 28, au lieu de 10 1. 5 s,, lisez 45 s.
gne 30, au lieu de 10 l., lisez 40 s.
gne 33, au lieu de 4 1.2 s, lisez 4 s. 2 d.
gne 1, au lieu de 4 s. 4 d., lisez 3 s. 4 d.
gue 19, au lieu de 57 l. r lisez 57 1. 13 s. f d. ob.
gne 17, au Lieu de 10 1. 5 s., lisez 45 s.
— us —
Après quelques observations échangées entre
MM. Lorans, Faty, Fougeray, Audran et Le Men, au
sujet de la nature de la tutelle de N. de La Hay,
M. le Président lit la notice suivante de M. le comte
Anatole de Bremond d'Ars, qui n'a pu assister à la
séance.
Notice sur quelques antiquités celtiques et homahœs de
LA COMMUEE DE RlEC (FiBISTEBE).
La commune de Riec, renferme un certain nombre de mo-
numents celtiques qui n'ont pas été étudiés avec toute l'atten-
tion qu'ils méritent : il est vrai de dire qu'ils sont restés à peu
près inconnus jusqu'à ce jour.
Sur le bord de la voie romaine de Carhaix à Riec (et de ce
dernier lieu à la rivière de Bélon), voie citée par M. René
Kerviler dans le mémoire que ce savant ingénieur a publié .sur
la géographie de la presqu'île armoricaine (Bulletin de
V Association Bretonne) , et tout près de l'ancien manoir de la
Porte-Neuve, on voit encore les restes informes de menhirs,
tumulus, dolmens et allées couvertes. Un monument de
cette dernière espèce existe à côté^de remplacement où s'éle-
vait jadis une chapelle dédiée à saint Julien.
C'est dans le bois, les champs et les landes situés en face de
cette allée, que se trouvant: 1° un menhir gisant à terre peut*
être depuis des milliers d'années, et brisé en deux ou trois
tronçons ; — 2° les ruines d'un assez grand dolmen, renversé
il y a vingt ans, et au pied duquel était, — dit-on, — un
amas de cendres ; — 3* une sorte de cromlec'h qui n'a pas dû
être exploré par des archéologues, puisque après quelques
coups de pioche autour de la pierre principale, on trouva une
amulette formée d'une pierre plate en forme de trapèze, et
percée à la partie supérieure, d'un trou dans lequel passait le
W du collier dont sans doute elle faisait partie.
— 116 —
11 serait difficile de pratiquer des fouilles plus étendues,
autour de ce monument situé au milieu d'un bois et environné
de souches énormes qu'il faudrait enlever.
Ces divers monuments de l'époque celtique semblent se
relier enlr'eux jusqu'à la côte, au lieu nommé Keryquel où
H. L. Augustin a crû reconnaître les traces d'un ancien camp
ou Oppidum gaulois. La voie romaine aboutit également à une
très-petite distance de cet endroit, dans le parc du château de
]a Porte-Neuve, sur la rivière de Bélon, et en passant auprès
de l'antique et si renommée chapelle de Saint-Léger. Cette
partie du parc se nomme encore Treiz-Coz, Je vieux passage.
C'est là, sur ce petit promontoire d'où la vue s'étend fort loin
à droite et à gauche sur la rivière, que l'on a découvert, il y a
six ou sept ans, les vestiges d'une villa ou mansion romaine.
L'emplacement était merveilleusement choisi, aussi bien pour
l'agrément et la salubrité, que pour la sûreté des habitants, en
cas d'attaque ou de surprise du côté de la mer.
En creusant des trous pour des plantations, on avait souvent
amené à la surface du sol, des pierres de dimension uniforme,
des fragments de briques, des débris de ciment : c'était bien
l'indice d'anciens murs, et c'est guidé par ces quelques points
de repère que l'on parvint à déblayer le sol d'une chambre
mesurant une superficie de 4 m. 60 c. sur 3 m. 60 c; l'épais-
seur des murs mis àjour à fleur de terre, est de m. 60 c.
C'est à m. 50 c. au dessous du* niveau actuel du terrain,
que l'on arriva à une terrasse parfaitement unie et formée de
béton ou ciment que l'air ne tarda pas à décomposer.
On retira de l'intérieur de cette pièce, d'abord des masses
de pierres calcinées, puis des briques à rebord ainsi que des
briques plates, et des enduits de chaux recouverts de peintures
aux vives couleurs, enduits tantôt unis, tantôt moulés comme
le sont les corniches et les plinthes.
On trouva aussi une sorte de conduit calorifère, formé do
terres cimentées et de très-grosses briques, traversant en dia-
- 117 -
gonale le sol de la chambre de l'est à l'ouest, pour arriver dans
un angle où apparaissaient les traces d'un foyer ou four-
neau.
Malheureusement, il n'a pas été possible de continuer les
fouilles : d'énormes chênes, deux ou trois fois séculaires, éten-
dent leurs racines dans la terre qui recouvre ces ruines ; mais
la configuration du sol permet, jusqu'à un certain point, de
juger de l'importance de ces anciennes constructions, vraisem-
blablement détruites par un incendie.
Un archéologue expérimenté pourrait même décider si cette
villa ne fut point bâtie sur le même plan que celle découverte
au Pérennou, sur les bords de l'Odet : nous sommes portés h
le croire. Si ce n'est pas le même architecte qui présida à
cette construction, on serait tenté de croire que c'est le même
peintre qui décora les plafonds et les lambris de cette habita-
tion : villa, roansion, station balnéaire ou tout simplement,
maison du gardien du passage ou du port.
C'est en effet, à cet endroit, dans cette crique auprès de la
voie publique, que devait être le port primitif (aujourd'hui
nommé Pors-Kerc'heiz, le Port du Héron : on y voit souvent de
ces oiseaux), abandonné plus tard par suite de l'envasement.
On alla naturellement aborder dans l'anse la plus voisine, qui
reçut ainsi le nom de Porz»Nevez y le Port-Neuf, d'où l'appella-
tion actuelle de Porte-Neuve (1).
Voici la liste des objets trouvés dans les localités que l'on
vient de décrire,et offerts au Musée d'Archéologie de Quimper
1° L'amulette trouvée au pied du cromlec'h du bois de
Saint-Julien ;
2° Plusieurs fragments de diverses sortes de briques, trouvés
sur l'emplacement de la villa gallo-romaine ;
(1) Ce château parait avoir été construit dans les conditions men-
tionnées à la page 97, note 1.
— H8 —
3° Des débris du plafond et des enduits intérieurs de la
chambre ;
4* Quelques morceaux de verre, débris de vases ou de bou-
teilles ;
5* Des fragments d'enduit calciné ;
6° On a joint à cela deux des vieilles monnaies que l'on trouve
le plus fréquemment dans la cour et les environs du château
lorsqu'on a l'occasion de fouiller le sol ; monnaies que Ton a
déjà montrées à notre savant confrère et vice-président, H. Fran-
çois Audran (1).
Ajoutons, en terminant, que ce manoir de la Porte-Neuve a
dû être construit sur remplacement de quelque habitation
d'une bien grande ancienneté. Le jardin actuel occupe certaine-
ment l'espace compris dans une sorte d'Oppidum, comme l'in-
dique un très-vieux mur, ou plutôt un rempart dont l'appareil-
lage intérieur démontre que ce rempart (où se voil encore l'en-
trée primitive) date au moins des premiers temps du moyen
âge (2).
C'est ce que notre confrère H. Le Men, aurait pu nous dire
sûrement, s'il avait été à même de comparer ces ruines à celles
des Oppidum du Finistère qu'il a décrits avec autant de science
que d'autorité dans le Bulletin de l'Association bretonne.
Comme supplément aux renseignements qui précè-
dent, M. de Bremond d'Ars nous adresse la note
suivante :
On sait que la fontaine de Saint-Léger, située dans le parc
de la Porte-Neuve et voisine de la villa romaine, est le but
d'un pèlerinage très-suivi, qui a lieu chaque année le jour du
(1) Ce sont des doubles tournois.
(2) La terre de la Porte-Neuve a successivement appartenu aux famil-
les Morillon, de Guw-Pontcallec et de Bruc-Malestroit. — Vendu en
1834, par M. le comte Armand de Bruc, à M. Arnaud, de Nantes, le
château de la Porte-Neuve appartient actuellement à madame la com-
tesse de Bremond d'Ars.
— 119 —
pardon, le deuxième dimanche de juillet. Cette fontaine, en
grande vénération dans toute la contrée, doit remonter à la
plus haute antiquité ; mais le monument actuel ne date que
de Tannée 1656, d'après l'inscription gravée au-dessus de la
niche où est placé le buste de saint Léger. Ce buste n'est, sans
doute, qu'un débris de quelque vieille statue du XI e ou
XII e siècle, si l'on en juge par la forme de la mitre et de la
crosse du saint évoque d'Autun.
Ces jours derniers, en nettoyant le bassin de la fontaine, on a
trouvé une petite pièce de monnaie presque fruste, et qui, à la
première vue, avait toute l'apparence d'une pièce d'or méro-
vingienne. Mes illusions d'antiquaire, un moment partagées par
notre confrère M. Audran, témoin de la découverte, se sont
dissipées devant les explications de mon ami H. Anatole de
Barthélémy, à qui j'envoyai cette médaille :
« La pièce que vous' me soumettez — me répondit le savant
« numismatiste — n'éclairera pas beaucoup l'histoire de la
« fontaine de Saint-Léger : je vous l&retourne en vous garantis-
« sant : 1° Qu'elle n'est pas en or ; 2° que c'est un double lour-
« nois de Charles de Gonzague, comme comte de Bethel
« (1637-1659). Seulement, je dois vous prévenir qu'en curant
« avec soin le bassin des anciennes fontaines, objets de péleri-
« nages, on peut trouver des choses fort anciennes. C'est dans
« une fontaine de Saintonge que j'ai trouvé , il n'y a pas bien
« longtemps, un vrai trésor de monnaies gauloises. »
En terminant cette lecture, M. le Président remercie
au nom de la Société, M. de Bremond d'Ars des dons
qu'il a bien voulu faire au Musée. Il est à désirer que
cet exemple soit suivi par d'autres membres de la
Société.
M. Le Men demande ensuite la parole pour com-
muniquer à l'assemblée le compte-rendu fait par notre
regretté président M. A. de Blois, d'une fouille qui
— 120 —
remonte à 1845, et qui offre des particularités assez
curieuses.
* fouilles d'ote sépulture gallo-romaine près QUIMPER.
Une intéressante découverte vient d'avoir lieu dans la com-
mune d'Ergué-Armel, sur les bords du chemin qui mène du
bourg communal à la grande route de Rosporden.
Le 18 irai dernier (1.845), des ouvriers en creusant pour
réparer le fossé d'un champ dépendant de la ferme de Keran-
coêt à M. Prosper Leguay, rencontrèrent des fragments de
poterie. H. Leguay, qui se rendit aussitôt sur les lieux,
reconnut un tumulus dans le léger exhaussement que le sol
offrait dans cette partie. La clôture que Ton s'occupait à
réparer, en coupait l'extrémité méridionale ; c'est ainsi qu'en
rafraîchissant la douve, on avait pu mettre h découvert des
objets enfouis sous ce tertre. On déblaya avec soin près des
fragments et Ton aperçut bientôt, rangés autour d'une pierre
fiche taillée, semblable à une borne quadrangulaire, quatre
vases remplis de cendres et de parcelles d'ossements. Les
ouvriers avaient trouvé la veille, près de ces fragments, une
monnaie espagnole de Philippe II avec le millésime de 1568,
el une monnaie romaine n'offrant de reconnaissable qu'une
effigie qui a paru devoir être celle de Trajan.
Les fouilles qui n'embrassaient oncore que la moindre partie
de cette surface élevée, ont été reprises par M. Leguay. Elles
ont fait découvrir deux autres bornes, mais de forme cylindri-
que, dont chacune était cantonnée de quatre vases cinéraires
mieux conservés. L'une des pierres, celle du centre, était
plus grande que les autres. Elles étaient espacées à trois pieds
environ de distance au centre du tumulus, sur une ligne nord
et sud, celle de forme carrée au midi et la plus haute des deux
autres au milieu. La première a deux pieds de haut et treize
pouces à la base de la face la plus large de son carré, les deux
— 121 —
autres diffèrent par leur diamètre, d'un pied et demi à deux
pieds.
Le tumulus qui a trente-six pieds environ de diamètre,
n'était élevé que de quatre pieds ; le sommet des pierres, au
pied desquelles étaient posées les urnes, se trouvait presque à
l'affleurement de sa surface. Ces vases n'avaient pas de
couvercle en poterie ni d'autre opercule qui en tint lieu
suivant les usages funéraires des Romains ; au-dessus on
remarquait un lit de pierrailles de quelque épaisseur. Us
sont plus ou moins fendus soit par la pression des terres, soit
par la dilatation que l'humidité a fait subir aux cendres. Leur
dimension est fort inégale. Les deux plus grands qui sont
dans la forme des pots dont on se sert pour le lait dans nos
campagnes, ont environ dix-huit pouces de hauteur, et quinze
de largeur dans leur renflement; il y en a un petit de forme
globulaire qui n'a pas six pouce3 de haut. Ceux de ce dernier
modèle ont un col évasé, d'autres qui rentrent plus dans la
forme des premiers, se distinguent par un col presque droit ;
ils ont en général de huit à neuf pouces de haut. On n'a vidé
qu'un seul de ceux provenus de la seconde découverte; il ne s'y
est pas rencontré de médaille.
Quant à la confection de ces vases, les grands sont d'une
pâte grise, peu épaisse, grossière, mal cuite ; les autres sans
être ornés (l'on sait que les Romains n'employaient, dans leurs
tombeaux que des vases unis), ont un certain mérite de forme
et de matière. Us sont d'une teinte rouge plus ou moins foncée,
et assez polis pour; qu'on puisse croire d'abord qu'ils sont ver-
nissés.
Les vestiges de combustion marqués à la base du tumulus,
attestent qu'il a été dressé sur Vustrinum ou emplacement du
bâcher. On a rencontré près des urnes, une tige arrondie de
métal, courbée de manière à former un bracelet, qui est
tellement altérée qu'on ne voit pas bien si c'est de l'argent.
L'on a recueilli aussi des morceaux de fer très-oxidé, dont le
■j
i
— 122 —
rapprochement annonce un poignard avec manche. On dépo-
sait dans les tombes des objets qui avaient servi au morl.
Ce mélange des usages de la Gaule et de Rome, indique
assez une sépulture gallo-romaine, c'est-à-dire de Gaulois
déjà façonnés aux mœurs des Romains. Quant à la date qu'il
conviendrait de lui assigner, tout ce que nous pouvons faire
observer, c'est que Ton s'accorde à reconnaître que dès le
troisième siècle de notre ère, on enterrait souvent les corps
sans les brûler et que dû temps de Constantin, c'est-à-dire au
commencement du IV e siècle, ce dernier mode d'inhumation
avait entièrement prévalu dans la Gaule. En admettant que la
médaille soit de Trajan qui mourut en Fan 117, ce tombeau se
placerait avec assez d'apparence entre le milieu des II § et {II e
siècles. On a signalé destumulus du IV e siècle ; il en est qui
ont servi d'insigne à la sépulture de chrétiens, on croit môme
qu'il peut s'en rencontrer du V* siècle ; mais à ces époques
ce ne sont pas des cendres, ce sont des squelettes qu'ils recou-
vrent. Tel est le résultat des recherches du savant auteur du
Cours d'antiquités monumentales. (V. tome 3, chapitre VII).
La masse des cendres contenues dans les douze urnes, porte
à croire que plusieurs reçurent à la fois les honneurs funèbres
sur le même bûcher. C'étaient peut-être des soldats tués dans
un engagement. Doit-on regarderie nombre de ces pierres ou
bornes comme une indication du nombre des personnes inhu-
mée ? Doit-on s'arrêter de préférence à celui des urnes, ou
bien ce dernier nombre serait-il ici un hommage rendu aux
douze grandes divinités? Ce sont des questions que. l'état des
connaissances sur les gallo-romains ne semble permettre pas de
résoudre. Nous serions cependant disposés en faveur de la
première opinion.
Nous terminerons cette notice en disant qu'aucun monument,
qu'aucune voie romaine n'a été remarquée dans le voisinage.
II est juste de convenir qu'à cet égard, les études sont bien
peu avancées dans ce pays. Mais la position si fréquente des
— 123 —
anciens tombeaux le long des voies romaines, devra faire explo-
rer ici, pourvoir s'il n'existait pas dans celte direction quel-
qu'une conduisant à Locmaria.
Après cette lecture, M. Le Men ajoute :
La conjecture de M. de Blois, au sujet de l'existence,
dans le voisinage de ce tumulus, d'une voie romaine
conduisant à Locmaria, étaient des mieux fondées, et
je pense qu'il fut le premier à donner, en 1849, au
Congrès de l'Association bretonne à Quimper, la des-
cription de cette voie qui partait de Vannes et venait
aboutir à ce faubourg* J'ai publié dans ce Bulletin (1)
le tracé de cette voie, sur le bord de laquelle était
placé le tumulus fouillé par MM. de Blois et Le Guay.
Des douze urnes trouvées dans les fouilles, M. Le
Guay put sauver six dont quelques-unes fort mutilées,
qui font aujourd'hui partie du Musée d'archéologie.
Ces urnes faites d'une terre brune et fine, sont de
fabrique indigène. Quatre d'entre elles, hautes de
20 centimètres sont de forme ollaire et à fond plat. Une
cinquième de forme presque orbiculaire et à fond
relevé en dedans, a sa panse surmontée d'un col
recourbé à l'extérieur. Il ne restait de la sixième que
quelques petits fragments adhérents à la terre ren-
fermée dans le vase dont elle reproduisait le moule
intérieur. Cette dernière urne avait la forme d'une
jatte.
Lorsqu'il y a deux *ou trois ans, je débarrassai ces
urnes de la terre et des ossements brûlés qu'elles con-
tenaient, je trouvai dans une des plus grandes, une
(I) T. III, p. 179 bis.
__ 124 —
fibule en fer, formée d'une tige recourbée à ses deux
extrémités. La petite urne renfermait aussi une fibule
en fer ayant la forme d'un anneau strié sur son contour
extérieur. Enfin dans le dernier vase décrit plus haut,
ou plutôt dans la terre qui en avait conservé la forme,
était une bague formée d'une petite bande de bronze,
aplatie et sans ornementation, dont un des bouts se
logeait dans une petite ouverture pratiquée à son
extrémité opposée.
Ces trois objets, les deux fibules et l'anneau, avaient
été brisés intentionnellement, en petits morceaux, et
ce ne fut pas sans difficulté, que je parvins à réunir
et à coller tous ces fragments, pour rendre leur forme
primitive aux ornements dont ils faisaient partie.
Deux fragments de bracelets en bronze, et deux
fragments de fer, très-oxidés, que les explorateurs ont
supposé provenir d'un poignard, avaient été_ déposés
au Musée en même temps que les urnes. Après avoir
soigneusement nettoyé ces deux fragments de fer qui
s'ajustaient l'un à l'autre, j'ai découvert, sous la
rouille un instrument ayant quelque ressemblance
avec une clef. Je pense que cet instrument était ren-
fermé, ainsi que les deux fragments de bracelets en
bronze, dans quelques-unes des urnes qui ont été
brisées pendant l'exploration.
Le monument de Kerancoët présente une particu-
larité remarquable qui n'a pas été relevée dans le
compte-rendu qui précède. Il est en effet l'expression
de deux modes bien distincts d'inhumation. Dans les
trois bornes au pied desquelles les urnes cinéraires
étaient groupées quatre par quatre, il est facile de
— 125 —
reconnaître les cippes en usage chez les Romains pour
marquer les sépultures, et dont les lec'hs que Ton
retrouve encore en si grand nombre dans les cime-
tières et sur le bord des chemins en Basse-Bretagne,-
ne sont que la continuation. Il est évident que ces
pierres taillées avec soin dans la partie qui se trou-
vait au-dessus du sol, étaient destinées comme les
cippes romains à demeurer visibles. La sépulture
primitive avait donc été établie suivant le rite funé-
raire usité à Rome.
Plus tard, par suite d'une coutume en usage chez
les Gaulois, chaque individu passant près de cette
sépulture, y jetait une pierre en témoignage de respect
pour la mémoire de ceux qui y étaient inhumés. Il en
résulta, au bout d'un ■ certain temps, que toutes ces
pierres amoncelées formèrent une éminence ou
carn(\), au milieu de laquelle les trois bornes tail-
lées disparurent entièrement.
Les Gallois lorsqu'ils souhaitent du mal à quelqu'un,
lui disent : « Carn ar dy wyneb » (qu'un carn soit sur ton
visage ! ) Quelques archéologues du pays de Galles,
commentant cette locution, ont prétendu que lorsque
l'usage d'enterrer dans les cimetières, devint général,
le carn fut réservé* pour la sépulture des grands crimi-
nels, et que la phrase galloise que je viens de citer,
signifie : « Puisses-tu être enterré comme un criminel ! »
Us en tirent cette conséquence : que c'est en signe de
mépris qu'à une certaine époque, on jetait des pierres
sur les sépultures.
(f) Le carn ou galgal est une éminence factice formée de pierres
plus ou moins grosses. Le carn de Kerancoêt était en grande partie
composé de pierres d'assez petite dimension.
— 126 —
Je suis loin de partager cette opinion, et je pense
que cette expression galloise signifie simplement :
« Puisses-tu être sous un carn, » c'est-à-dire : « Puis-
ses-tu être mort ! »
Cet usage de jeter une pierre sur les tombeaux
placés le long des chemins, existe encore aujourd'hui
dans quelques parties du Finistère ; mais, loin qu'on
y attache une idée de mépris, cet acte s'accomplit
toujours avec un sentiment de respect pour les morts
qui en sont l'objet. J'ai publié ailleurs (1) des exem-
ples de cette coutume, que je ne crois pas inutile de
reproduire ici à l'appui de ma thèse.
Entre le pic de Menez-Hom, où est situé l'observa-
toire, et celui qui porte le nom de Menez-Kélc'h (mon-
tagne du cercle), sur le bord d'une ancienne voie
romaine, est un carn ou galgal fort curieux appelé
Bern-Mein (tas de pierres), sur lequel ceux qui tra-
versent la montagne jettent une pierre en passant.
U s'y rattache une légende nom moins curieuse ; la
voici dans toute sa simplicité :
Un roi dont la vie n'avait pas été exemplaire, fut
enterré dans cet endroit, et on recommanda des bon-
nes œuvres pour retirer son âme du purgatoire.
Depuis ce temps, chacun jette une pierre en passant
dans le lieu où il fut enterré* Quelques femmes même
en prennent plein leur tablier et les jettent sur le
Bern-Mein. Chacun de ces actes est regardé comme
une bonne œuvre qui soulage l'âme du défunt. Mais
elle ne sera réellement délivrée que lorsque le las de
(I) Oppidums du département du Finistère, p. 176.
du Congrès de l'Association bretonne, tenu à Quimper en
— Mémoires
1873.
s
— 127 -
pierres sera agsez élevé pour qu'elle puisse voir V église
de Sainte-Marie. Cette église que Ton appelle ordinai-
rement Notre-Dame ou Sainte-Marie de Menez-Hom,se
trouve dans la montagne à deux ou trois kilomètres du
Bem-Mein, sur le bord de la route de Châteaulin à
Crozon. D'après cette légende, l'âme du défunt remplit
le tas de pierres ; et c'est seulement lorsque le tas de
pierres sera assez élevé pour que de son sommet CETTE
AME puisse vpir le clochéfr de Notre-Dame, qu'ELLE
sera délivrée.
Voici un autre exemple . de carn de formation con-
temporaine :
En parcourant, en 1868, les montagnes d'Are, à la
recherche des monuments antiques, je remarquai,
plantée sur le bord d'un petit chemin, en la commune
d'Hanvec (Finistère), une croix de bois qui, d'après
l'inscription qu'elle portait, n'y avait été placée que
depuis quelques mois. Mais ce qui attira surtout mon
attention, fut un tas de pierres d'assez petite dimen-
sion, qui entouraient le pied de la croix. Une vieille
femme qui vint heureusement à passer dans ce lieu
désert, et que j'interrogeai sur l'origine de cette croix,
m'apprit qu'elle avait été érigée en souvenir d'un
malheur qui était arrivé en cet endroit. Un fermier
d'un village voisin y avait été écrasé par sa charrette.
— « Et le tas de pierres qui se trouve au pied de la
croix, ajoutai-je, comment s'est-il formé ? »
— « Ah ! me répondit la vieille femme, c'esi que
toutes les personnes qui passent par ici, ont l'habitude
de jeter une pierre au pied de la croix. »
j^
— 128 —
L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée à
quatre heures et demie.'
Le Secrétaire,
R.-F. LE MEN.
Dons offerts au Musée départemental d'archéologie.
M. HUON, de FouesnanÊ
Une petite clef en fer dont l'anneau est formé d'un
quatre- feuilles.
Un sceau en bronze, représentant le Christ en croix.
Uu petit bronze de Gallien, trouvé à Cheffontaines,
en Clohars-Fouesnant.
Une double réale espagnole de Ferdinand et Isabelle.
Un jeton en bronze portant de- chaque côté en
légende les mots IESVS KRISTVS : G.
M. E. LE MOYNE, membre de la Société.
Une monnaie d'argent de Phillippe II, roi d'Espagjie.
Une médaille commémorative de la construction du
Pont-Royal à Paris.
M. le Vicomte DE LA V1LLEMARQUÉ, président
. de la Société.
Quatre panneaux sculptés, du XVI e siècle.
M. A. CRÉACTHCADIC, trésorier de la Société.
Une boussole chinoise .
— ta» —
M. F, AUDRAN, vice-président de la Société.
Une pièce d'argent de Lonis XIV, trouvée près
Quimperlé.
Dans sa séance du 28 octobre 1876, la Société archéologique
du Finistère, a prononcé h l' unanimité la radiation du nom de
M. Maufras-Duchâtellier de la liste de ses membres»
A la suite de cette mesure, M. Ducbâtellier a adressé par mi-
nistère d'huissier, à M. delà Villemarqué, président, une protes-
tation, rédigée dans des termes tels, que la Société en a refusé
l'insertion dans son Bulletin.
Par jugement du 19 juillet 1877, le tribunal correctionnel de
Quimper, reconnaissant que la protestation ne pouvait être
insérée dans le Bulletin, sans modifications, a débouté de ses
conclusions, M. Ducbâtellier lui réservant son droit de réponse.
Le tribunal, s'appuyait sur les considérants qui suivent :
« Attendu que la lettre du sieur Ducbâtellier n'est pas
seulement empreinte d'une grande vivacité, mais que dans
eertains passages, elle peut être considérée comme ayant un
caractère diffamatoire à l'égard d'un tiers représenté comme
un maraudeur qui se serait rendu coupable d'un détournement,
et vis-à-vis certains membres de la Société qui auraient eu
des relations avec lui, à l'occasion de ce détournement; n
c Attendu dès lors que c'est à bon droit que le sieur Hersart
de la Villemarqué a refusé l'insertion de cette lettre dans le
Bulletin qu'il dirige ; »
« Par ces motifs, »
« Déboute le sieur Duchâtellier de sa demande, le condamne
aux dépens, et lui réserve son droit de réponse dans les termes
admis par la loi. »
Par acte d'huissier du 20 juillet 1877, signifié le 31 août,
M. Duchâtellier a adressé au président de la Société, la
réponse suivante que nous reproduisons textuellement.
8 a.
— 150 —
Kernuz, près Pout-1'Abbé, 20 juillet 187 .
A M. Hersart de la Villemarqué t Président de la Société
archéologique du Finistère^ demeurant à Quimperlé.
Monsieur,
La Société archéologique du Finistère s'est occupée de moi
dans deux séances, Tune du 16 août, l'autre du 28 octobre 1876.
Je vous requiers, d'après la loi, d'insérer* dans le plus prochain
numéro du Bulletin de ladite Société, la réponse ci- dessous aux
asserlations (sic) malveillantes que . contiennent vos procès-
verbaux et vos bulletins.
D'abord, il est faux que j'aie publié aucune photographie
d'aucun monument que ce soit, et il est faux, par conséquent,
que j'en ai (sic) refusé à la Société archéologique, ainsi que
vous le dites (1). Vous ajoutez, d'une autre part, que je devais,
comme membre, vous faire participer aux nombreuses décou-
vertes que j'ai faites dans le Finistère, et que j'ai gravement
manqué à mes devoirs en faisant mes communications à des
Société (sic) étrangères au département. Mais pardon ! Je n'ai
fait/que je sache, aucune découverte dans le Finistère, et, par
suite, je n'ai rien communiqué à cet égard aux Sociétés étran-
gères que vous mentionnez. Cette seconde assertion de votre
part est donc encore fausse et malveillante. Mais revenons au
reproche d'avoir manqué à mes devoirs. Je n'ai en effet assisté
qu'à une de vos séances, pour y lire une courte notice sur les
travaux de l'illustre et regretté M. de Cummonf, auquel
une amitié de trente ans me liait étroitement. Une autre lois,
cependant, je vous ai fait remettre un bel ouvrage d'archéologie
et d'histoire que j'avais obtenu de la Société de r Yonne, dont je
suis membre, pour vous l'offrir. Si je n'ai pas assisté à d'autres
séances, c'est que j'avais trop justement prévu, ainsi que me
Pont prouvé les deux procès-verbaux dont je suis forcé de
demander la rectification, que mes rapports avec certains
membres de la Société manqueraient de cette courtoise bien-
séance à laquelle je suis habitué. Mais passons, et permettez-
moi de rectifier les faits que vous altérez avec tant de facilité
et de malveillance.
Vous assurez que j'ai écrit an préfet pour lui demander un
blâme contre plusieurs membres do votre Société; ne vous en
étonnez pas, mais je suis encore forcé de vous dire que cela
est faux. Je n'ai rien écrit au préfet, seulement je sais que
l'un de vous, M. Le Men, votre secrétaire habituel, a écrit à la
(1) La photographie a été faite, sinon publiée, et la Société n'a pu
s'en procurer un exemplaire .
— 131 ~
préfecture, à l'occasion des recherches que faisait mon fils à
Tronoën, et que ce même monsieur disait que divers objets
trouvés à Tranoën, un fragment de statuette en bronze, plu-
sieurs fibules et quelques objets en fer lui avaient été remis (1).
Vous savez cependant, pour avoir vous-même sollicité de la
Î propriétaire de Tronoën la faculté île faire des fouilles sur les
ieux, que jcette autorisation a été donnée à mon fils par un
acte en due forme qui lui a transporté la propriété de tous les
objets trouvés, à la condition de payer à M"* e do Marijgny la
moitié de leur valeur, à dire d'experts (*2). Que, malgré ce
traité et ces arrangements pris avec la propriétaire, il soit ques-
tion, dans les deux procès-verbaux précités d'une mission
donnée à quelques membres delà Société, pour l'exploitation {sic)
des lieux et aussi d'enquête sur les torts que vou- m'attribuez,
il aurait au moins été honnête et bienséant, avant de me
reprendre sur les faits articulés dans cette enquête, que vous
me fissiez connaître celle-ci. Ce procédé était élémentaire»
Quant au rapport de ces messieurs sur la mission qu'ils avaient
reçue, je de vais être la première personne à qui vous eussiez dû
en donner connaissance, puisque vons aviez a me blâmer d'une
manière si absolue à l'égard des fouilles de la station archéo-
logique de Tronoën, ou je n'ai jamais eu d'autre rôle que celui
de simple spectateur. Je vous renouvelle donc la sommation
expresse d'insérer la présente lettre dans votre plus prochain
numéro, afin que chacun sache, de vous ou de moi, qui a été
le plus scrupuleusement respectueux de la vérité et des usages
ordinaires de toute société adonnée a des études scientifiques.
Enfin, en me réservant tous droits ultérieurs sur le fait propre
de diffama lion, je demande cinquante evemplaires du proces-ver-
bal qui contiendra la présente réclamation (3), afin que je puisse
m'assurer que mes rectifications arriveront aux personnes
étrangères à votre Société, et notamment aux adjoints et aux
membres du Conseil municipal de Pont-1'Abbé, auxquels vos
procès-verbaux ont été adressés, sans doute pour leur instruc-
tion personnelle, ou dans l'intérêt des besoins de la commune
dont j'ai l'honneur d'être maire (4).
Signé : Duchatellier,
Correspondant de l'Institut et de la Société centrale
d'agriculture.
(1) Ce même monsieur déclare qu'il n'a jamais écrit au préfet à ce
sujet.
(2) Cette autorisation donnée par acte notarié est postérieure aux
visites faites à Tronoën par les délégués de la Société,
(3) Ces cinquante exemplaires sont mis à la disposition de M. Ducha-
tellier, à raison de 1 franc l'exemplaire.
(4) M. Duchatellier était en effet maire de Pott-l'Abbé le 20 juillet
1877. Il ne l'est plus aujourd'hui, n'ayant pas été élu membre du
Conseil municipal.
— 13Î —
Pour approbation de ée qui est ci-dessus :
DUCHATBLLIKB.
Enregistré 4 Pont-l'Abbé, le dix août i«7, folio 62 r., c. 7.
Reçu trois francs, décimes soixante-quinze centimes. Signé
illisible.
Pour copie conforme,
B. JOUAHHO.
L'an mil huit cent soixante-dix-sept, îe trente et un août,
A la requête de M DuchâteltieT, propriétaire et membre dg
li sorièiH archéologique du Finistère (1J, demeurant à sa terre
de Kernuz, en la commune de Pont-l'Abbé,
rai, Pierre-Marie-BellonnieJouanno, huissier-audiencier près
le tribunal civil de Quimperté, y demeurant, place de la Mairie,
soussigné.
Fait sommation à M Hersart de la Villernarqué, propriétaire»
en sa qualité de Président de la Société archéologique du Fi*
nistère, demeurant au château de Keransquer, en la commune
de Quimperlé, en son domicile ou étant, et parlant à fa per-
sonne de sa domestique,
D'insérer dans le premier Bulletin de la Société archéologique
du Finistère, la réclamation de M. Ducbâtellier, dont, copia
entière, correcte et lisible est donnée en tête de la présente,
Lui déclarant que taule par lui d'obéir à la présente som-
mation et de faire insérer la réclamation dont s'agit dans le
Bulletin delà Société archéologique du Finistère^ le requérant
se pourvoira contre lui tel que de droit, sous toutes réserves.
Employé sous copie une feuille de papier spécial et un timbre
de un franc vingt.
Goût neuf francs quinze centimes.
B. Jouanno.
Note additionnelle à l'article sur les Lépreux et les Cacoux
de h Basses-Bretagne (1).
Il y avait en 1524 et plus tard, à Saint-Paul-de-Léon, une
chapeUenie dite de Notre-Dame de Confort inter duo ossaria
pro leprosis % qui se desservait dans une chapelle située dans
le cimetière de Saint-Pierre, chargée d'une messe par semaine
lorsqu'il y avaif des ladres dans le Minihi de Léon qui com-
prenait sept paroisses.
j
(1) Lisez ex-membre.
(2) Voir t. IV. p. 138.
— 133 —
SÉANCE DU 2 FÉVRIER 1878.
Présidence de M. le vicomte Th. HÊRSART
DE LA VILLEMARQUÉ.
Etaient présents : MM. Th. de la Villemarqué,
Audran, Trévédy, deBremohd d'Ars, Fougeray, Pavot,
Faty, Malen, A. Créac'hcadic et Le Maigre, secrétaire.
MM. Le Men et de Kercadio se font excuser de ne
pouvoir assister à la séance
La parole est donnée à M. Audran pour lire un tra-
vail de M. Le Men sur
TBONOEN ET SES ANTIQUITÉS.
On a beaucoup parlé depuis quelque temps, avec plus ou
moins d'exactitude, de Tronoën el des découvertes faites dans
ses environs. La Société archéologique du Finistère a eu soin
de ne demeurer dans cette affaire ignorante d'aucun détail
utile concernant les hommes et les choses. Dès le mois de
septembre 1876, l'auteur de cet article avait déjà fait inscrire
à Tordre du jour de la séance du 28 octobre 1876, une note
intitulée: « Découverte d'un poste gallo-romain, près la
chapelle de Notre-Dame de Tronoën en la commune de
Saiftl-Jean-Trotiraon (1). » Pour des motifs qu'il est inutile de
rappeler ici, il ne crut pas devoir donner dans cette séance,
communication de cette note qu'il reproduit aujourd'hui avec
de notables développements. Mais persuadé que toutes les fois
que des faits archéologiques de quelque importance se produi-
sent, il convient, pour la clarté de leur exposition, de
déblayer historiquement le terrain où ils se sont produits, il a
fait précéder le récit des découvertes en question, d'une notice
mm» ■— — ^^— — i n i ■■■ i . . - ii ■
(i) Voir le Bulletin de la Société archéologique, tome IV, page 65.
9
— 134 —
sommaire sur la paroisse el le pagus dont la chapelle de
Tronoën et les terres qui en sont voisines, faisaient autrefois
partie.
I-
La pointe de Penmarc'h, en français Cap-du- Cheval, ou
Cap-Caval (1), à l'extrémité sud-ouest du département du
Finistère, avait au moyen âge donné son nom à un assez
vaste territoire compris entre le Goazien (rivière d'Audierne),
l'Odet et la mer, et qui formait p^ut-être au temps de l'indé-
pendance gauloise ou de l'occupation romaine,. un pagus de la
grande cité des Veneti (2). Si on en juge par le grand nombre
de menhirs, de tumulus, de dolmens et d'allées couvertes que
Ton rencontre principalement dans la zone maritime de ce
district, il devait être fort peuplé à l'époque celtique ; les
camps retranchés et les autres vestiges qu'y ont laissés les
Romains, montrent qu'il fut fortement occupé après la con-
quête, et les documents que le moyen âge nous a transmis,
établissent que le Cap-Caval fut pendant cette période, l'un des
cantons les plus riches et les plus fertiles de la Bretagne.
Ce territoire formait, à une époque ancienne, dans l'ordre
civil, une juridiction royale qui fut unie à celle de Quimper
par lettres patentes, en forme d'édit, du roi Charles IX, données
à Chateaubriand au mois d'octobre 1565. Dans l'ordre
ecclésiastique, il constituait un doyenné, faisant partie de
l 'archidiaconé de Cornouaille, et qui fut supprimé en 1286,
par une décision de Tévêque Even de la Fores*, prise en
chapitre général, le lendemain de la Saint-Luc. Les considé-
rants de cet acte méritent d'être rapportés :
(i) « Cap ut Gaballi. » — Ce nom lui venait peut être d'un rocher
dont la forme rappelait de loin la silhouette d'un cheval. Beaucoup de
rochers de nos côtes portent des noms d animaux.
(2) Pour les limites de la cité des Veneti, voir le Bulletin de . la
Société archéologique du Finistère, t. II, p. 50.
— 135 —
« Even, évêque, considérant l'insuffisance du doyenné de
Cap-Caval, et les exactions auxquelles se livrent les détenteurs
de cet office pour avoir le nécessaire, considérant de plus que,
par suite de cet état de choses, il est impossible que
les causes portées devant ce bénéficier soient défendues con-
venablement, d'où résultent de grands inconvénients dans les
causes de mariages et de testaments, accepte la résignation de
H,.., doyen actuel, et d'accord avec le chapitre, supprime ce
doyenné qui ne sera plus rétabli, et en brise le sceau. » (1)
C'est à la pointe extrême de ce territoire qu'étaient situés le
port et la célèble ville de Kerily-Penmarc'h sur laquelle on a
écrit bien des exagérations. La vérité est qu'il n'y a jamais eu
de ville de Kerity-Penmarc'h. On a donné ce nom à trois
centres de population, Tréoult é, Kerily et Saint-Guénolé,
distants l'un de l'autre d'environ deux kilomètres, qui auraient
pu, par suite d'un heureux concours de circonstances, se fondre
en une vaste cité, mais que des calamités successives réduisi-
rent à un état de ruines et de désolation dont ils n'ont pu se
relever. Mon intention n'est pas de vous entretenir aujourd'hui
de cette localité bien connue et qui porte si tristement le deuil
de sa richesse passée, je désire seulement vous dire quelques
mots d'une paroisse voisine, qui eut aussi ses jours de , pros-
périté, et qui supprimée en 1790, a été absorbée par les
communes de Saint-Jean-Trolimon, de Plomeur et de Pen-
marc'h.
La paroisse de Beuzec-Cap-Caval, dont le nom se distingue
à peine dans la carte de l'état major, parmi les noms de
villages et de hameaux, était délimitée à l'ouest par l'Océan,
et au nord, à l'est et au sud par les paroisses de Tréguennec,
Plomeur et Tréooltré-Penmarc'h. Placée sous le vocable de
Saint-Budoc, mattre de Saint-Guénolé, elle comprenait, outre
le bourg paroissial, les trêves (tribus) ou succursales de Saint-
(1) Cartulaire du chapitre de Quimper; manuscrit de la Bibliothèque
nationale, n« 56, fol. 25.
— 136 -
Jean-Trolimon et de Saint-Guéuolé. Oq y voyait au dernier
siècle les chapelles de Saint-Yves, Saint-Ambroise, Notre-Daroe-
de-Tronuëa, Saint-EIoy et Kerdévot. Les noms de Lanvoran,
de Lanvenaël et de Saint-Saturnin* que porlent trois des
villages de cette paroisse, peuvent en outre faire présumer
qu'il y existait autrefois des chapelles dédiées à Saint-Moran, à
Saint-Guenaël, deuxième abbé de Landévennec, et à l'un des
trois martyrs que l'église honore sous le nom de Saturnin.
Suivant Ogée, Beuzec comptait il' y a cent ans, treize cents
communiants. L'auteur du Dictionnaire historique de Bre-
tagne, ajoute : «Son territoire est fertile en grains de toute
espèce. Je dirai à la louange de ses habitants, qu'il est cuLtivé
avec beaucoup de soin. »
Cette paroisse est mentionnée dès le VI e siècle, dans une
donation de terre faite par le roi Grallon à Saint-Guénolé, pre-
mier abbé de Landévennec (4). C'est, sans aucun doute, sur ces
terres que s'éleva plus tard la belle chapelle de Saint-Guépolé,
aujourd'hui comprise dans la commune de Peumarc'h.
Le bourg de Beuzec était autrefois le chef-lieu des juridic-
tions ecclésiastique et civile dont j'ai parlé plus haut. Après la
suppression du doyenné de Cap-Caval en 1286, la paroisse de
Beuzec fut uni* au bénéfice du grand archidiacre de Quimper,
premier dignitaire de la cathédrale.
Ce bourg fait aujourd'hui partie de la commune de Plomeur.
De l'ancienne église paroissiale il ne reste que le chœur, triste
amalgame de constructions de diverses époques depuis le XIII e
jusqu'au XVI e siècle. C'est à cette dernière date que f ut élevé
le calvaire, aujourd'hui mutilé, que l'on voit dans le cimetière.
Lorsque je visitai cette église en 1865, il y avait dans le
pavé plusieurs tombes plates anciennes portant des croix
pattées ou des écussons aux alliances de la baronnie du Pont.
(fi) iCartulaire de Landévennec, manuscrit de la bibliothèque de
Quimper.
— 137 —
Je ne le& ai pas toutes retrouvées en 1876. Je présume que
celles qui ont disparu ont servi à paver l'église paroissiale de
Plomeur. On voit encore dans un enfeu pratiqué dans le mur
nord, une tombe élevée ornée d.'une croix accostée de deux
écussons portant, l'un, une croix latine, et l'autre un tourteau.
Une autre grande et belle tombe élevée, du XVI e siècle, se
remarque dans le bas-côté sud. Elle est ornée d'une croix
fleuronnée, accompagnée de quatre écussons, dont deux
portent une rose (Trémie) et les deux autres un lion rampant
(Pont-FAbbé ou Minven).
Des deux trêves de Beuzec, celle de Saint- Guénolé fait
aujourd'hui partie de la commune de Penmarc'h. J'espère
pouvoir, dans une autre séance, vous donner une description
détaillée de sa belle église dont il ne reste plus que la tour.
SaintJean-Trolimon est devenu chef- lieu d'une nouvelle
commune. Cette ancienne succursale portait au moyen âge le
nom de Treff-Rumon (1), et son église était placée sous le
vocable de saint Rumon, saint breton peu connu, dont on a
fait quelquefois saint Raimond, et qui est patron de la petite
ville d'Audierne. Dans un titre de 1690, elle est appelée Saint-
Jean-Rumon (2). Au dernier siècle elle était déjà désignée par
le nom altéré qu'elle porte aujourd'hui.
L'église de Saint-Jean-Trolimon est de ^forme rectangulaire
et se compose d'une nef et de deux bas-côtés sans transsept.
(1) « La paroisse de Treff Rumon. » (Aveu au seigneur du Pont-
PAbbé, du 31 juin 4389 ) — « Le Trefî de Treff-Rumon, en la paroisse
de Beuzec-Cap-Cavall Chef renie audit lieu de Sainct-Rumon »
(Aveu fourni le 19 juillet 14.6, par Alain Provost, en la cour de
Rostrenen en Cap-Cavall, à cause de la seigneurie de Keroberan.) —
Aveu (du 2 juillet 1492) du manoir de Kerguizirin, « o ses boays,
courtiltz, etc, estants ou Treff de Treff-Rumon, en la paroisse de Beuzeuc-
Cap-Cavall » fourni par Alain Provost, « à Alein de Tyvaranlen,
receveur du Pont, pour haulte et puissante damoiselle Heleine de Rohan,
dame du Pont, de Rostrenen et du Ponthou, ou nom, et comme tutrice
de bauît et puissant Jean, seigneur du Pont, son fils mineur. »
(Archives du Finistère).
(2) « Le lieu de Caoudal audit bourg de Saint-Jean-Rumon » —
Testament de Pierre LeGoyat. (Ibid.)
— 1,38 -
Uoe arcade voisine du sanctuaire, et soutenue par deux piliers
arrés, semble appartenir à l'époque de transition. Presque
tout le reste de l'église, y compris le clocher qui est fort
élégant, porte le caractère de l'architecture du XVI e siècle.
A rentrée du cimetière sont deux grands lec'hs coniques
dont l'un est cannelé. On en trouve un autre surmonté d'une
croix sur le bord de la route au sad du bourg ; un quatrième
moins élevé se voit aussi au bourg, près de la porte de la
chapelle ruinée de Kerdévot. Cette chapelle, qui, comme son
nom l'indique, fut jadis le lieu d'un pèlerinage très-suivi,
paraît avoir été reconstruite au XVII siècle. Mais l'édifice
primitif n'a pas entièrement disparu. Les murs sud et est
existent encore en partie, et Ton voit dans l'angle formé par
leur rencontre, une fontaine qui se trouvait jadis à l'intérieur
de la chapelle, et à laquelle on descend par plusieurs degrés
disposés en pas de vis. Dans la muraille voisine de cette fon-
taine, est percée une étroite fenêtre en forme de meurtrière,
par laquelle les pèlerins jetaient sans doute hors de la chapelle,
le reste de l'eau qui avait servi à leurs ablutions.
C'est dans la commune de. Saint-Jean qu'est située la belle
chapelle de Notre-Dame de Tronoëa ou Tronoan, dont on
distingue de loin les élégantes proportions, lorsqu'on vient de
Penmarc'h en suivant la côte. Le nom de Traon-Houarn que
Ton a donné quelquefois à cette chapelle est de pure fantaisie (1)*
Elle est construite sur un plateau qui descend en pente douce
jusqu'à la mer, dont elle est distante de 800 mètres. D'après
une tradition locale, Tronoën n'était autrefois qu'à 100 mètres
de la mer. Pour que cette tradition eût quelque fondement, il
faudrait que le sol se fut élevé dans celte partie du littoral.
(I) Le titre le plus ancien où j'aie trouvé mention de cette chapelle
estun testament de Marie Madec, née Guellanton, du* 19 janvier 1S29,
par lequel elle lègue « 15 solz monnaie à la chapelle de Notre-Dame du
Tronoen ». — (Archives du Finistère. — Carmes du Pont.) — Elle est
désignée par le même nom dans les titres du XVII e et du XVIII e siècle.
— 139 —
Le contraire paraît cependant avoir eu lieu en divers points de
la côte du Finistère (1).
Cette chapelle fut édifiée, avec un certain luxe de détails,
dans la première moitié du XV e siècle,en grande partie au moyen
des libéralités des barons du Pont-1'Àbbé et des autres seigneurs
de la paroisse de Beuzec-Cap-Caval, dont quelques-unes des
armoiries se voyaient encore il y a douze ans dans la maîtresse
vitre (2). Elle se compose d'une nef et d'un seul bas-côté
placé au nord. La maîtresse vitre renferme dans sa partie infé-
rieure cinq arcades en tiers point, qui s'arrêtent à; la hauteur
de l'imposte, et dans son tympan une rose formée de sept
quatre-feuilles. De chaque côté de la nef, un gros pilier, dont
la masse est dissimulée par de nombreuses colonnettes enga-
gées, sert de support à une arcade ogivale au-dessus de laquelle
s'élève, au centre de la chapelle, une tour carrée à flèche
octogone, accostée de deux élégantes tourelles. Dans cette
tour est une cloche portant, avec la date de 1701, une ins-
cription qui nous apprend qu'elle eut pour parrain Yves de
Trémie, seigneur de Keraneïsan, et pour marraine Claude de
L'Honoré, dame de Saint-Alouarn.
Il y avait autrefois dans la chapelle de Tronoén des, sculptures
en bois, de ronde-bosse, exécutées avec art au XV e ou, au
XVI e siècle, et provenant peut-être d'un rétable. Que sont-elles
devenues? Il n'en reste plus dans l'église que quelques débris
représentant des cavaliers.
A peu de distance au sud de la chapelle, est un calvaire à
soubassement carré, sans arcades ni contreforts, sur leque
(t) Voir le Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t, II.
p. 68. y
(2) l. Pallé d'argent et d'azur de six pièces (Rosmadec). Hervé du
Pont épousa Marie de Rosmadec au mois de février 1420.
2. Parli au 1 : d'or à 3 jumelles de gueules (Rosmadec-Goarlot),
au 2 : lascé d'or et de gueules de six pièces (Du Chastel) .
3. D'argent ou tourteau de gueules. — Je ne sais à quelle famille
appartiennent ces armoiries qui se trouvent sur une tombe de l'église
de Beuzec-Cap-Caval.
— 140 —
s'élèvent la croix du Christ et celles des deux larrons. Sur ses
quatre faces sont disposées en deux étages, des dalles de granits,
dans lesquelles un artiste naïf a taillé en. relief, non- seulement
les scènes de la Passion, mais aussi les divers épisodes de la
vie de Notre* Seigneur. Il est difficile d'assigner une dette cer-
taine â ces grotesques figures, dont les défauts peuvent trouver
une atténuation dans la dureté et la grossièreté de ta pierre
mise en œuvre. Elles sont certainemeut moins anciennes que la
chapelle qu'elles sont appelées à décorer, et sous le rapport
du style, l'ensemble du monument n'est pas sans analogie avec
le calvaire de Guimiliau qui porte les dates de 1581 et de 1588.
Je ne sais pas où M. de Fréminville avait pris la singulière
manie d'attribuer aux Templiers les églises pourvues d'un seul
bas-côté. Pour ce motif, il n'a pas manqué de faire de Notre-
Dame de Tronoên, une chapelle de l'ordre du Temple.
Il ajoute qu'elle était une succursale de la grande église de
Sainte-Thumelte h Kerity, élevée, dit-il, au XIII e siècle par les
chevaliers du même ordre (1). Or l'église de Kerity ne date
que du commencement du XVI 9 siècle, et Tordre du Temple
fut supprimé en 1308, plus d'un siècle avant la construction
de Tronoën, et deux cents ans avant l'édification de l'église de
Sainte-Thumette I
La chapelle de Tronoên est construite dans un camp romain
dont j'ai pour la première fois signalé l'existence dans la
Statistique gallo-romaine du Finistère publiée par notre
Bulletin au mois de mars 1875 (2). Il y a dans le Finistère
d'autres exemples de chapelles construites à l'intéiieur de
camps romains. Je citerai aux environs de Quimper la chapelle
de Saint- Vial ou Vidal, dans la commune de Corobrit (3) et
(t) Antiquités du Finistère, tome II , pages 103 et 104.
(2) Tome XI, page 122.
(3) Cette chapelle aujourd'hui en ruines, se trouve tout près et à
droite de la route de Quimper à Pont-1'Abbé, un peu au-delà de la
borne kilométrique n° 11, presque en face de la route de Combrit. On
— tu —
celte do Dréo en la commune de SainVÉvarzec (t).
Les Romains ont laissé d'autres souvenirs de leur occupation
dans la paroisse de Beuzec-Cap-Caval. J'ai vu en effet en 1878
de nombreux débris de poterie et de tuiles romaines recueillis
dans les cultures aux environs de l'ancienne église paroissiale.
D'antres débris ayant la même origine ont été trouvés m
nord du bourg de Saint-Jean Trolimon. Il existe en outre au
village du Caste Hou, dans la même commune, un camp retran-
ché de forme rectangulaire, qui renferme des fragments de
toiles* à rebord, provenant de constructions romaines.
J'arrive maintenant à l'historique des découvertes qui ont étd
faites depuis une trentaine d'années, dans la contrée que je
viera d'essayer de décrire.
II.
Le pays de Penmarc'h, dont le territoire de l'ancienne pa-
roisse de Beuzec fait partie^ est de tous les cantons de l'arron-
dissement de Quimper, je pourrais dire du département du
voit à l'intérieur, sur deux consoles qui servaient jadis de supports à
des saints, deux écussons dont l'un porte 3 losanges accompagnés de
6 aonelets en orle ; le second est nn parti au 1 des armes précédentes
et au 2 d'une fasce. Ces armoiries paraissent appartenir à la famille
Buzic Un peu au-delà du moulin du Corroic'h (qui s'écrivait autrefois
Coetrozerc'b), avant d'arriver à cette chapelle, dans le triangle formé
par l'étang et la vieille et la nouvelle route de Quimper à Pont-
i'Abbé, se trouve un autre camp romain, accompagné de nombreuses
suhstructions de maisonnettes (Tuguria), qui devaient au moyen âge,
former un village assez important.
(1) À 7 kilomètres de Quimper et à peu de distance à gauche de la
route de Rosporden, sur une hauteur qui domine le vallon du Jet.
Le mot Drêo y altération de Treff ou Dreff, signifie une portion de
paroisse, une succursale (Tribus). Près de cette chapelle et du camp
romain où elle est bâtie, est une motte féodale élevée et ^bien
conservée. On voit encore une partie des énormes murailles de la tour
rectangulaire dont elle protégeait la base. Avant d'arriver au Drêo, on
peut voir dans un village de formation récente appelé Ker-an-ael-fresk,
un autre petit camp romain qui n'est séparé de la route de Quimper à
Rosporden, que par la distance d'un champ, à gauche. On y a trouvé
des tuiles à rebord.
— 142 —
Finistère, celui où l'on trouve le plus de monnaies gauloises.
Depuis que je m'occupe d'archéologie, j'en ai vu un assez
grand nombre provenant de cette région, et au type du cheval
«ndrocéphale. C'est dans la commune de Plonéour, limitrophe
de ce canton, qu'un cultivateur découvrit en 1835, au village
de Créac'h, un vase en terre renfermant environ 200 monnaies
gauloises en électrum, dont une fait partie du médailler de
notre musée archéologique. Toutes ces monnaies étaient ané-
pigraphes. J'ai acheté il y a peu de temps, avec une fibule en
bronze, émaillée de carrés blancs et bleus, un denier d'argent
trouvé sur les terres d'un village voisin de Tronoen. Ce denier
porte d'un côté une tête d'homme, tournée à gauche, et de
l'autre un cheval galopant à gauche et ayant entre ses jambes
un cercle avec un point central. On lit au droit et au. revers
la légende (N)ERCOD. C'est le nom d'un chef gaulois, fort
peu connu, et je ne sache pas qu'on ait trouvé en Bretagne
d'autres monnaies à ce type.
Des découvertes d'antiquités d'une autre nature ont été faites
à diverses reprises et depuis une époque déjà ancienne, dans le
même territoire. Mais on n'en a pas tenu note, et ces objets
vendus ou dispersés sont perdus pour l'étude.
C'est ainsi que l'on a conservé le souvenir de vases trouvés
aux villages de Lanvenaël et de Kerugou, aujourd'hui en la
commune de Plomeur , dans des tumulus appelés Goghel Ere
et Cogbel-Kerugou (I). Il y a dans la même commune un vil-
lage appelé CogheURun-Aour (Tumulus de la butte d'or), qui
paraît devoir son nom à uue découverte d'objets en or.
En 1846, un cultivateur en défrichant une lande au village
de Kerviny, en Plonéour, trouva divers objets en bronze, no*
tamment deux ornements ou bracelets composés d'anneaux et
de pendeloques, une douille de lance, un couteau ou racloir et
• -♦
(i) Dans le pays de Pont-1'Abbé, on donne le nom de Coghel k la
plupart des tumulus. Ce mot est évidemment une altération de Crughel
qui signifie amas, butte, éminence.
— 143 —
quatre haches à ailerons. J'ai rendu compte ailleurs de cette
découverte (t). Des haches à douille ont aussi été trouvées en
assez graud nombre, vers la même époque, au village de Ker-
goulouarn, en la même commune.
Le procès-verbal delà séance de la Société archéologique du
Finistère du 24 janvier 1846, contient la mention suivante :
« M. Lozac'h informe l'assemblée de la découverte récem-
ment faite par son beau-frère, H. de Pascal, dpns la commune
de Plomeur, d'une urne intacte enfouto sous quatre pierres for-
mant botte. Elle est légère et en terre noirâtre, ornée de petites
vignettes, et contient des fragments d'os calcinés. La même
fouille a fait découvrir plusieurs vases rompus et un fragment
de poterie rouge de fabrique romaine. Il fait espérer que
M.de Pascal voudra bien adressera la Société ces deux objets. »
Le vœu exprimé par M. Lozac'h s'est depuis longtemps réa-
lisé. L'urne celtique trouvée par H. de Pascal est au Musée
d'archéologie de Quimper, et je doute qu'un vase plus élégant
de forme ait été découvert dans le département du Finistère.
On remarque à l'intérieur, des taches d'oxide qui montrent
qu'outre les ossements, elle renfermait des objets en bronze,
sur lesquels je n'ai pu avoir de renseignements. Le fragment
découvert en même temps que cette urne provient d'un vase
gallo-romain en terre samienne, orné de dessins en relief. Celte
trouvaille a été faite à 400 mètres au sud de la chapelle de
Tronoen, sur les terres du village de Saint-Saturnin, en la
commune de Plomeur.
Vers la même époque, un squelette ayant des bracelets en
bronze aux bras et aux jambes, fut découvert dans la palue de
Tronoen.
Un peu avant 1860, un autre squelette, dont la tête reposait
sur un bloc de bronze en forme de gueuse, et qui portait un
(i) « Celtic arms and ornaments found at Plonéour Britanny » —
Arehœologia Cambrensis, 1860, p. 136.
- 144 —
seul bracelet manitrforme. en bronze, de 75 millimètre» de dia-
mètre, fut exhumé à 500 mètres au sud-est du village de Ker-
vellré, dont les terres confinent à celles de Tronoen. Ce brace-
let brisé en trois morceaux était, il y a dix ans, conservé dans
cette ferme, où il jouait un certain rôle dans les cérémonies
pratiquées par certaines vieilles femmes pour la découverte des
trésors. Car il ne faut pas croire que les cultivateurs du can-
ton de Pont-1'Abbé soient moins dominés que ceux du reste
du Finistère, par la passion do la recherche des trésors ; je
pense qu'ils le sont davantage. Ce sentiment est d' ailleurs en-
tretenu chez eux par la tradition toujours vivante de décou-
vertes autrefois faites dans les monuments celtiques que l'on
rencontre encore en grand nombre dans cette région, bien
qu'on en ait détruit beaucoup. Aussi, lorsque par l'inspiration
d'un rêve doré, ou par la vertu des incantations d'une sor-
cière, un endroit leur est désigné comme recelant uu trésor,
s'empressent-ils d'y faire un trou dans lequel, le hasard aidant,
ils trouvent parfois des objets antiques plus ou moins pré-
cieux. Mais le résultat* de ces recherches demeure le plus
souvent ignoré. Est-il besoin d'ajouter que dans les cas où il
parvient à la connaissance du public, on ne doit accepter
qu'avec la plus grande prudence les renseignements que les
« trouveurs » fournissent sur leur découverte ? En effet, outre
que l'émotion de la trouvaille ne leur permet pas d'observer, avec
le soin nécessaire, les conditions dans lesquelles les objets se
présentent à eux, et Ifeur situation relative dans le sol, le spectre
de l'ancienne loi des épaves et des trésors cachés, qui n'a pas
encore cessé de hanter leur imagination, leur inspire souvent des
craintes sur la légitimité de leur possession. D'un nuire côté,
il faudrait peu conuaîlre le paysan breton pour s'imaginer
qu'il consentit adonner à des étrangers, des renseignements
précis, qui, dans sa pensée, pourraient les conduire à de nou-
velles trouvailles qu'il se réserve de faire lui-même.
Ce fut sans doute, bien que l'aveu n'en ait pas été fait,
à la suite de fouilles de ee genre, que le cullivateur-doraanier
du village de Kerveltré en la commune de Saint-Jean-
Trolimon, fit en 1873, une découverte importante dans un
tumulus appelés Cochet- ar-Minhir. La pierre qui a donné son
nom à ce tumulus, n'est pas un menhir celtique, mais bien
une de ces pierres levées destinées a marquer des sépultures
chrétiennes, et que depuis environ vingt ans, on a pris l'habi-
tude de désigner sous le nom impropre de lec'hs (I). Je revien-
drai plus loin, surises lec*hs qui abondent dans la commune de
Saint-Jean-Trolimota, et que les paysans bretons appellent Mein-
hit (pierres longues) comme les pierres levées celtiques. Le
lec'h, dont le tumulus dit Coghel-ar- Menhir a pris le nom,
était cannelé et haut d'environ deux mètres. 11 est aujourd'hui
abattu et brisé en quatre morceaux que l'on voit au sud du
tumulus (2). Il est probable qu'après l'avoir renversé pour
chercher le trésor qu'il devait recouvrir, les fouilles n'ayant
amené aucun résultat, on a « naturellement » supposé que le
trésor se trouvait dans l'intérieur de la pierre, et on l'a brisée
pour l'en extraire. C'est une opération que pratiquent assez fré-
quemment les chercheurs de trésors. Je reviens h la découverte
faite dans le Coghel-ar-Menhir.
Plusieurs journaux du Finistère en rendirent compte dans
ud entrefilet de quelques lignes. J'en informai H. de Bfeis,
président de la Société archéologique., qui' écrivit aussitôt h
notre collègue H. de Pascal, maire de Plomeur, pour lui de-
mander des renseignements sur cette découverte, et pour te
prier de se rendre sur les lieux, afiû de s'assurer si quelques-
uns des objets trouvés n'étaient pas restés aux mains du pro-
priétaire de Kerveltré.
(!) Pour la signification du mot lec'h, voir le Bulletin de la Soc,
arehéol. du Finistère t. II, pages. 41, 42.
(2) Oo #. écrit quelque part que ce tumulus avait été appelé Pare-ar-
Menhir, eu souvenir de cinq pierres levées qu'on y voyait autrefois. Mais
âieela était exact, on l'aurait appelé apparemment Parc-er-Meinhir, cl non
Parc-ar-Menhir. Il est clair que Ton a pris chaque fragment du lec'h,
pour un monument distinct, maison s'est trompe dans le compte.
— 146 —
Quelques jours après, H. de Blois recevait la lettre suivante
de H. de Pascal :
« Pont-1'Abbé, le 24 mars 1873. »
« Mon cher Monsieur,
« Je viens de rencontrer Le Pape, Vincent,de Kerveltré,qui a
>
trouvé au midi de son village, sur un lumulus, les objets dont
vous avez entendu parler dans les journaux. »
« J'ai vu un reçu de M. Garon, bijoutier k Quimper, accu-
sant un poids de 570 grammes de métaux envoyés à Paris
pour reconnaître leur valeur, que M. Garon n'aurait pu indi-
quer. »
*
« Vincent Le Pape m*a dit avoir trouvé deux urnes contenant
des ossements, lesquelles sont parfaitement conservées. J'irai
demain matin les voir, et je vous donnerai de plus amples dé-
tails sur la découverte des objets trouvés. »
« J'ai engagé Le Pape à aller trouver M. Le Men pour lui
montrer les objets, etc. »
« Veuillez, etc. »
« H. DE PASCAL. »
M. de Pascal se rendit en effet à Kervellré en compagnie de
M. Flagelle, qui se trouvait alors chez lui. Malheureusement
pour les intérêts de la Société archéologique, ils s'adjoignirent
une tierce personne qui arrivée sur les lieux, voulut accaparer
pour son propre compte, tous les objets qui étaient encore aux
mains de Le Pape. Ces objets consistaient en deux urnes ci-
néraires en terre, trouvées sur les flancs du tumulus, et en
deux instruments en bronze, dont l'un ressemblait à un cise au
à froid, provenant d'une autre partie du même monument
qui n'a pas été déterminée.
Ce ne fut pas sans opposition que MM. de Pascal et Flagelle
parvinrent à acquérir pour notre Musée archéologique, une des
— 147 —
deux urnes, qui est heureusement la plus. belle. Bile est haute
de 24 centimètres, faite au moyen du tour, et formée d'une
terre brune, dont la couleur, que des coups de feu ont rendue
presque noire en quelques endroits pendant la cuisson, a en
outre été altérée par l'application sur la surface encore humide
du vase, d'une couche de sable fortement micacé, qui lui donne
une apparence grisâtre. Cette urne a, pour la forme et pour la
terre, la plus grande analogie avec les vases exhumés des cime-
tières gaulois de la Marne, et avec des urnes cinéraires décou-
vertes dans des tumulus gallo-romains des environs de Quimper,
notamment à Rerancoat, en Ergué-Ârmel (1), et à Coz-Feun-
tun, en Poullan.
Lorsqu'elle me fut remise par M. Flagelle, elle contenait,
outre des ossements brûlés, le col et la partie supérieure d'un
fémur humain non incinéré, et une portion d'écuelle plate,
en terre, d'un type que l'on rencontre fréquemment daos les
dolmens, Cet os provenait, dit-on, d'un squelette placé vers la
partie médiane du tumulus, dans un sarcophage formé de
qnatre pierres, et au pied duquel on avait trouvé renfermés
danà un vase en argile les objets en or mentionnés plus haut (2).
Quant à Técuelle en terre, qui provient aussi du même tumulus,
j'ignore si elle avait quelque corrélation avec ces restes,
humains ou avec le trésor enfoui,
Ce trésor, suivant les informations données par l'acquéreur,
M. Caron, bijoutier à Quimper, se composait :
1° D'un certain nombre de petits lingots d'or oriental, de
(1) Voir plus haut page 120.
(2) Je donne ces renseignements, crue je tiens d'un cultivateur voisin
de Kerveltré, sans oser en garantir la parfaite exactitude. Ces sarco-
phages dont les côtés sont ordinairement formés de quatre pierres incli-
nées vers l'intérieur et qui sont fermées par une ou plusieurs pierres
Ï Hâtes, se rencontrent fréquemment, soit isolés soit groupés, sur le
ittoral et dans les montagnes du Finistère. Ils occupent le plus souvent
le centre d'un tumulus. J'en ai vu cependant qui étaient placés près
des bords. Les corps que Ton y déposait n'étaient pas brûles. On peut
les considérer comme la dernière forme des dolmens.
— 148 —
forme reotwgulaire, taillés au moyen d'a« ciseau dans des ter-
res aplaties. Deux de ces lingots étaient ornés mt leurs laces
de dessins niellés représentant des laaubrequios.
2» De trois tiges de même <w\ tordîtes et coudées 4 iews
extrémité*, et ayant à peu près la foraae de poignées de tiroirs
de commode Ce sont ces tiges qui, d'après quelques persoiroes
qui ne les oui pas vues, auraient été des bracelets. H. Ga* on et
d'autres personnes qui les ont vues, loin d'être de cet avis,
m'ont affirmë^que ces tiges n'ont jamais pu servir de bracelets.
Quand je me présentai chez le bijoutier pour prendre ces
renseignements, les objets avaient déjà été fondus à Paris, Us
sont donc irrévocablement perdus pour la science.
Depuis 1873, quelques nouvelles urnes cinéraires ont été
trouvées dans le sable aux environs de Kerveltré, mais pour les
motifs exposés^ plus haut, il sera toujours difficile d'en
connaître jle nombre exact. Pour les mêmes considérations, on
ne devra non plus, accueillir qu'avec réserve, les détails four-
nis sur la] découverte qui fut faite, au mois de janvier 1876,
par le même cultivateur, d'un collier en or acheté depuis
par un propriétaire du voisinage. Ce collier du poids de
433 grammes et jorné de chevrons gravés au burin, aurait été
•trouvé près d*un squelette, et dans le sillon d'où l'on avait
exhumé en 1873, les objets en or décrits ci-dessus. L'ornemen-
tation de ce cottier rappelle celle de certaines urnes en terre
trouvées avec des objets en bronze dans des dolmens du
Finistère.
Voici maintenant le compte rendu de découvertes d'un autre
ordre, qui ont été faites plus récemment sur les terres du -village
de Troaoên :
III.
Au mois de juin 1876, les fils et le gendre de la veuve
Garrec, fermière de ce village, découvrirent dans leur» cultu-
— 140 —
res, <*û mu? bien construit qui paraissait s'étendre fort loin,
et au pied duquel ils trouvèrent des fragments de poterie
ancienne en grande quantité, des débris de statuettes en
terre, des armes en fer, des ornements en bronze, etc. A la
suite de cette trouvaille, des fouilles furent faites par diverses
personnes, peu familiarisées, paraît-il, avec ce genre de
travaux.
Dès les premiers jours de juillet, la Société archéologique
ayant été informée par ; noire collègue, M. de Kercadio, des
découvertes que Ton venait de faire à Tronoën, nous nous
r endimes sur les lieux, MM. de Montifault, Xavier de Blois et
moi, en qualité de délégués de cette Société. Mais nous ne
pûmes que constater le désordre avec lequel les fouilles avaient
étô pratiquées, et il nous fut loul-à-fait impossible, tant le
sol était bouleversé, de prendre un plan du terrain exploré.
On ne saurait trop regretter de pareilles explorations qui ont
le triste résultat de détruire les monuments sans aucun profit
pour la science.
Sur le rapport de ses délégués, M. le Préside it de la Société
écrivit, au mois d'août, à la propriétaire de Tronoên, pour lui
demander l'autorisation d'y faire des fouilles. Hais cette auto-
risation venait d'être accordée à une autre personne, malgré
des conditions qui, pour nous, auraient été inacceptables,
d'autant plus qu'elles furent suivies d'une mise en demeure
d'acheter pour un prix fixé, le village de Tronoën. Comme la
Société n'est pas assez riche pour payer quarante mille francs,
une propriété qui fut vendue en l'an II, quinze cent soixante*
quinze livres, l'église de Tronoên comprise, ses délégués durent
s'incliner devant cette impossibilité, et accepter le rôle modeste
d'ob3ervateurs, qui leur permit d'ailleqrs, de se tenir au
courant de tous les faits de quelque importance qui se sont
produits depuis le commencement des fouilles.
Ainsi que je viens de le dire, il nous fut impossible de lever
la partie du camp de Tronoën, qui avait été fouillée. Quant à
10
— 150 —
prendre un plan d'ensemble de la forteresse, il n'y fallait pas
songer : le temps et les moyens nous manquaient également
pour cela. Cependant l'impression que j'ai conservée d'un
examen attentif des lieux, me porte à penser que le poste gallo-
romain de Tronoên se composait d'une enceinte principale de
forme à peu près rectangulaire et circonscrite par des murs en
pierres de petit appareil, analogues à ceux de Parc-ar-Groas
dont j'ai donné, il y a deux ans, une description dans ce
Bulletin (I). A l'intérieur de cette enceinte s'élevaient plusieurs
constructions en maçonnerie semblable, dont quelques-unes
n'étaient séparées du mur extérieur que par un étroit couloir.
Il y avait dans le poste de Parc-ar-Groas, des habitations
disposées de la même manière.
En dehors de cet enclos, qui constituait le poste gallo-
■
romain proprement dit» se trouvaient d'autres enceintes de
grandeur diverses et délimitées par des retranchements
formés de pierres et de terre. Elles pouvaient servir soit à par-
quer des animaux, soit à abriter les demeures d'une partie des
habitants. Un village gaulois semblable à ceux dont on ren-
contre fréquemment les vestiges sur nos côtes, s'était en outre
établi, sous la protection du camp, entre Tronoën et Kerveltré.
L'existence des ruines de ce village a été signalée dans notre
Bulletin en 1875 (2).
Toutes ces enceintes et toutes ces ruines, qui occupent sur
les dépendances des deux fermes que je viens de citer, une
étendue considérable de terrain, sont d'ailleurs recouvertes
d'une épaisse couche de sable, qui rend fort difficile la déter-
mination de leurs contours. Mais je n'ai remarqué nulle part,
ces énormes retranchements disposés sur deux ou trois lignes,
qui caractérisent les oppidums gaulois que j'ai pu étudier dans
le Finistère.
(1) T. III, p, 179.
(2) T. II, p. 143.
— 151 —
C'estdans l'intérieur de l'enceinte marée que le hasard d'abord
et des fouilles, failesjà la hâle et sans ordre, ensuite, ont mis au
jour un grand nombre d'objets dont voici Ténuinéraêioa
sommaire :
1. Quelques monnaies gauloises, dont un denier d'argent de
kercod, décrit à la page 142.
2. Plus de cent monnaies romaines, presque toutes en bronze,
donnant, mais avec des interruptions, la suite des empereurs
depuis Auguste jusqu'à Constantin le Jeune, c'est-à-dire de l'an
27 avant J.-C..à l'année 340 après J.-C.
3. Une tête de statuette en bronze, représentant un person-
nage couronné de lauriers. Elle porte sur sa face et sur sa
partie postérieure, l'empreinte des nombreux coups de marteaux
au moyen desquels on l'a séparée du corps, preuve évidente que
cette mutilation a été intentionnelle.
4. Les débris de plusieurs centaines de figurines en terre
cuite, blanche, représentant presque toutes des Vénus Anadyo-
mènes et des Déesses-mères. Les premières qui ont pour base,
un socle circulaire, sont entièrement nues et tordent leur che-
velure de la main droite, tandis que de la main gauche elles
soulèvent une draperie. Les autres représentent une femme,
vêtue d'une longue robe, assise dans un fauteuil et allaitant un
ou deux enfants. Ces figurines paraissent avoir aussi été brisées
intentionnellement. Elles provenaient probablement d'une
fabrique de statuettes semblables, qui existait à deux ou trois
kilomètres au nord de Tronoën, sur le territoire de la commune
de Tréguennec. On y a trouvé en effet vers 1855, un four
renfermant encore environ quatre-vingts de ces statuettes dis-
posées pour la cuisson. Le Musée archéologique de Quimper en
possède trois ou quatre, h peu près intactes, qui lui ont été
données par MM. Daligaud et Halléguen. Les autres ont été
détruites.
Ces statuettes réunies en si grand nombre dans l'établis-
sement gallo-romain de Tronoën, ne peuvent être consi-
^\
— 152 —
dérées que comme des ex-voto. Elles étaient probablement
placées dans un petit temple ou sacellum dédié, soit à Vénus
Génitrix, soif à Lucine, soit à Lalone, protectrice des mères
et des nourrices, et cette- divinité y avait un autel et peut être
une statue, qui furent brisés en même temps que les figurines
décrites ci-dessus (1). C'est évidemment de cet autel que pro-
vient un fragment d'inscription recueilli dans les ruines, et sur
lequel on lit, en caractères de six ou sept centimètres de
hauteur :
HVM....:...
ET DEM
SILaN (2)
Il est bien regrettable que le reste de cette inscription
n'ait pas été retrouvé. Hais, bien qu'il y ait peut-être quelque
témérité à tenter cet essai, j'en proposerai la restitution sui-
vante :
m NVM1NIBVS AVG.
ET DE£1 VENETEN
" SI LAN POSVERE.
Je crois avoir établi que le littoral de la cité des Vénètes
s'étendait jusqu'à la rade de Brest (3). Le poste et la bour-
gade de Tronoen faisaient donc partie de celte cité, et le mot
commençant par LAN, était peut-être le nom de la peuplade qui
habitait le pagus du Cap-Caval.
5. Un graud nombre de lances, d'épées, de javelots et de
longues piques en fer, trouvés principalement près du mur
Cl) M. James Mila a découvert dans rétablissement gallo-romain de
Bossenno, près Carnac, qu'il a fouillé avec tant d'intelligeuce et de
soin, un petit temple reufermant la base, encore en place, d'un autel
ou d'un piédestal de statue, et un grand nombre de fiurgines brisées
intnetionnellement, et semblables à celles trouvées à Tronoên, {Fouilles
faites à Carnac, Morbihan, p. 143.)
(2) Rapport de M. A.Bertrand au comité des travaux historiques.
(3) Vorçanium , Yorgium et la cité dés Osismi, Bulletin de la Société
archéologique du Finistère, tome II, p. 18.
- 153 — ■
d'enceinte. Quelques-unes de ces armes étaient bien conservées,
mais la plus glande partie étaient tordues ou brisées.
Des javelots et des pointes de flèches semblables, ont été
trouvés avec des monnaies romaines, parmi lesquelles pétait
un petit bronze de Constantin le Jeune, dans le tumulus de la
pointe de Rosmeur ou Porz-Carn, entre Tronoen-et Kerity (1),
et dans le poste gallo-romain de Parc-ar Groas (2).
6. Une grande fibule en fer, longue de dix centimètres, et
formée d'une tige courbée à ses deux extrémités.
7. Une grande quantité de fibules en bronze de formes très-
variées, et appartenant, pour la plupart, à l'art étrusque.
8. Des anneaux en bronze, aplatis, de différents diamètres.
9. Des anneaux en verre vert et en verre blanc.
10. Un grattoir en bronze ayant pu servir à apprêter les
p<?aux.
11. Une poignée d'instrument en même métal, et dont il
est difficile de connaître la destination.
1*2. Des ferrures de portes, des crochets, des clous, un
ciseau à froid, etc., en fer.
13. Des pesons de fuseau ou fusaîoles en pierre et en terre
cuite, les unes de formes coniques, d'autres rondes et d'autres
discoïdes.
14. Une portion de la pierre supérieure d'un moulin à bras,
et une meule gauloise à broyer le grain.
15. Des percuteurs, des pilons, des molettes, des pierres à
aiguiser, etc.
16. Quelques instruments en os.
17. De nombreux fragments de vases en verre, les uns
unis, les autres à reliefs.
18. Une très-grande quantité de débris de poteries gauloises
(1) Bulletin de la Société archéologique du Finistère , t. I. page 110,
et t. IV. page 127.
(2) Ibià., t. III, page 195. — Dans cet article, une grande serpe en*
fer a été décrite par erreur parmi les objets en bronze.
* _ 154 —
et gallo-romaines, provenant les uns de vases extrêmement
grossiers, et d'autres de vases en terre sigillée, ou en argile fine
revêtue d'une couverte métallique très-brillante. 11 y avait dans
le nombre, des débris de jattes et d'autres grands vases en
terre mélangée de parcelles de schiste talqueux, dont on
retrouve les analogues dans notre pays, jusqu'au XV e et au
XVI* siècle.
19. Beaucoup de fragments de tuiles et de briques romaines.
Tous ces objets ont été recueillis dans une épaisse couche de
détritus de toutes sortes mêlés de cendres et de charbons, et
recouverte d'une couche de sable blanc et tin, apporté de la grève
par lèvent, à une époque inconnue mais relativement moderne.
Ils étaient pour la plupart révêtus d'une sorte d'enduit char-
bonneux qui leur donnait une teinte noirâtre et y adhérait
fortement. 11 ressort de cette circonstance aussi bien que de la
présence au milieu des ruiues, d'une grande quantité de
fragments de charbons, que le poste gallo-romain de Tronoën
a été détruit par le feu comme la plupart des établissements de
même origine, dont on retrouve les ruines en Bas&e Bretagne.
Hais il semble qu'ici les vainqueurs aient réuni en un seul lieu
une grande partie des objets qu'ils ont pu trouver dans la forte-
resse, et qu'après les avoir brisés ou mutilés, ils les aient jetés
dans un grand feu allumé exprès pour en compléter la destruc-
tion. J'ai signalé un fait analogue dans le comple-rendu des
fouilles que j'ai faites en 1869 dans V Oppidum du CasteUCoz (!).
IV.
La présence d'une source à Tronoên et la proximité d'une
mer abondante en poissons et en coquillages, rendent fort
probable l'existence sur ce plateau, longtemps avant l'arrivée
des Bomains, d'un village gaulois. Hais il ne faudrait pas
-
(t) Arehaeologia Cambrensis, octobre 1870, page 286. — Association
bretonne (Mémoires du Congre* tenu à Quimper en 1873).
— 155 —
v~
attribuer exclusivement h ces premiers occupants, les débris
d'origine indigène qui ont été recueillis dans ces ruines; car je
ne saurais trop le répéter, si dans une grande partie de la
Gaule, les mœurs des indigènes furent transformés par la civi-
lisation romaine, il n'en fut pas de même dans la partie extrême
de notre péninsule dont les habitants gardèrent au milieu des
conquérants, la plupart de leurs usages et de leurs coutumes..
En effet, ce pays que l'expédition de César avait cependant
écrasé, fut toujours traité en rebelle, et l'occupation romaine,
y conserva pendant toute sa durée, un caractère particuliè-
rement militaire. Les vainqueurs n'y construisirent point de
monuments dignes de ce nom, et ne firent aucun effort pour
introduire des idées de luxe ou de civ lisaiion chez des
peuples complètement asservis, et que Rome avait peut-être
un intérêt politique h maintenir dans l'asservissement et dans
l'oppression.
Si ces faits ne sont pas écrits dans l'histoire, ils ressorte nt
manifestement de l'étude attentive do notre sol, où, à côté des
vestiges que nous, a laissés l'industrie gauloise, on retrouve si
fortement marquée, dans son sein comme à sa surface, l'em-
preinte de l'occupation romaine (1).
La conclusion à tirer de cette remarque, est que les orne-
ments, les pesons de fuseau, les poteries et les autres objets de
fabrique indigène, découverts dans les ruines de Tronoën, peu-
vent être, pour une bonne partie, contemporains des objets d'o-
rigine étrangère provenant des mêmes fouilles. Je crois devoir
insister sur ce fait, parce que, pour pouvoir rétablir d'une ma-
nière exacte la position relative, dans le sol, des débris enfouis
soit à la suite d'un désastre unique, soit par le hasard d'événe-
ments successifs, il aurait fallu apporter à l'exploration de cette
station archéologique, plus d'expérience et de temps qu'il n'a
été possible d'y consacrer.
(1) J'ai exprimé la même opinion dans mon travail sur les Oppidums
du Finistère, publié dans les mémoires du congrès de l'Association
bretonne tenu à Quimper, au mois de septembre 1878.
— Ï56 —
Ce mélange d'objets d'origine diverse n'est pas d'ailleurs
particulier aux ruines da Tronoên, Je l'ai observé dans les éta-
blissements gallo-romains de Parc-ar-Groas. de Bénodet, de
Carhaix, de locmarii, de Saint-Evarzec, etc., et M. James Miln
l'a récemment constaté dans le Morbihan, comme le prouvent
le texte et les nombreuses planches du splendide volume qui
contient le compte-rendu de ses fouilles.
La présence dans la même localité, d'ornements apparte-
nant par leur style à l'art [étrusque, et d'armes en fer plus
particulièrement eu usage dans le nord-est de la Gaule, ne doit
pas plus nous surprendre que l'existence au même Heu, de
monnaies gauloises étrangères à cette région. La voie qui y
avait introduit les uus, a pu servir à l'introduction des autres.
A part les Haures-Ténètes (1), nous ignorons du reste à quelles
provinces de l'empire romain appartenaient les troupes qui
tinrent successivement garnison dans le poste de Tronoên, et
qui peuvent fort bien avoir été les introducteurs de ces
armes et de ces ornements.
La même observation pourrait à la rigueur s'appliquer aux
urnes cinéraires trouvées dans la palue de Tronoên, et dont
quelques-unes sont identiques h celles des cimetières gaulois
de la Marne. Mais j'ai rapporté, plus haut que des vases appar-
tenant au même type ont été découverts dans des sépultures
gallo-romaines dos environs de Quimper et de Doûarhenez.
Quant à l'urne donnée au Musée par M. de Pascal, et qui pro-
vient aussi de la palue de Tronoên, elle anpartient à un type
qui n'a pas été retrouvé depuis dans le département du Finis-
tère, et si je suis bien informé, il n'en existe pas de semblable
au Musée de Saint-Germain.
Ces urnes exhumées du soi sablonneux qui avoisine Tronoên,
contenaient sans doute les ossements de quelques soldats de. la
(I) Voir la Notice est dignités de l'empire Tronoên était dans la cité
des Véttètes,
— 157 —
garnison du camp, ou de gaulois, habitants de la bourgade éta-
blie sous sa protection. Lorsque l'usage de brûler les corps
cessa d'exister dans celte région, longtemps je pense, avant la
fin de l'occupation romaine, les morts furent simplement inhu-
més, parfois avec leurs ornements, et H est fort probable- que
quelques-uns des squelettes découverts dans lapalue de Kervel-
tré et de Tronoën, furent enterrés à cette époque. Mais sans
parler des cadavres de naufragés, auxquels les habitants de ce
lieu voisin de la mer, ont dû, à toutes les époques, donner la se-
pulture,-il est incontestable que d'autres inhumations d'indigè-
nes ont eu Heu dans les mêmes parages, à une date postérieure
è l'établissement du Christianisme dans le pays. J'en trouve la
preuve dans l'existence de nombreux lec f hs, non-seulement au-
tour de Tronoën, mais encore dans les champs, les terrains
vagues et les anciens chemins de la partie sud-ouest du Cap-
Gaval. D'un autre côté plusieurs tumulus, celui de Kerveltré en
particulier, et quelques menhirs que l'on voit dans les environs,
prouvent que l'on y enterrait dès les temps celtiques. On ne
saurait donc apporter trop de réserves dans l'appréciation de
l'époque h laquelle les squelettes que l'on découvre dans
la palue de Tronoën et de Kerveltré ont été inhumés, lorsque
surtout Ton n'a pas assisté à leur découverte, et qu'ils ne sont
pas accompagnés d'objets qui permettent d'assigner, d'une ma-
nière certaine une date à leur inhumation. Des erreurs d'ap-
préciation, de cette nature,seraient extrêmement préjudiciables
aux études anthropologiques.
V.
Arrivé à la fin de ce compte rendu, je me trouve en présence
de trois questions qu'il importe de ne pas laisser sans réponses.
A quelles circonstances la station de Tronoën dut-elle son
importance pendant l'occupation romaine ?
A quelle époque et par quelles mains ce poste militaire
fût-il détruit ?
— 158 —
A quelles causes doit-on attribuer l'érection sur ses ruines,
de la chapelle de Notre-Dame de Tronoën ?
Voici ma réponse à la première de ces questions» '
Lorsqu'après l'anéantissement par César de la puissance des
Vénètes et de celle do leurs confédérés, les Romains
occupèrent militairement le territoire des cités vaincues, leur
premier soin pour éviter le retour de nouvelles révoltes, fut de
couvrir le pays d'un réseau de voies qui permettaient aux
troupes de se porter rapidement sur un point menacé. Ils
établirent en même temps le long de ces voies, une multitude
de camps plus ou moins vastes et plus ou moins fortement
retranchés, dont beaucoup existent encore aujourd'hui. Quel-
ques-uns de ces camps ne pouvaient recevoir qu'un petit nombre
d'hommes, mais il en élait d'autres, ordinairement défendus
par des tours placées aux angles ou sur les flancs des remparts,
qui pouvaient contenir aisément une garnison de plusieurs
centaines de soldats Parmi les plus remarquables de ces forte-
resses dans le Finistère, je citerai le Castel-Doun, en Sizun,
les camps de Plogastel-Saint-Germain, celui de Castellien, en
Heilars, du bois d'Elliant, en la commune de ce nom, du bois
de Pleuven, en Pleuven, du Parc, en Bosnoën, du Muriou, en
Quimerc*h, des Salles, en Locronan, deLesneven, en Château-
neuf, de Toul-ar-Boudou, en Hauvec, de Castel-Du, de Stumen-
ven et de Saint-Cado,dans les montagnes d'Are, entre Brasparts
et Sizun, etc.
Ces précautions étaient prises contre les dangers de l'intérieur,
mais les conquérants s'aperçurent bientôt qu'ils allaient avoir
à combattre un ennemi plus redoutable, dans les hordes de
pirates qui, après avoir porté la désolation sur les côtes de la
Grande-Bretagne, commençaient à ravager le littoral de la
Gaule. Ils établirent alors le long des côtes, dans des positions
habilement choisies et qui dominaient la mer sur une grande
étendue, une série de postes militaires dont la garnison avait
pour mission de s'opposer au débarquement des barbares. De
— 159 —
nombreux petits postes qui permettaient d'observer rentrée
des ports et des baies, et que j'ai déjà eu occasion de men-
tionner dans ce Bulletin (l), servaient d'auxiliaires aux pre-
miers. Pour compléter ce système de défense, qui prit plus
tard le nom de Tractus armuricanus et nervicanus^ les Romains
entretinrent à l'entrée des fleuves et des principales rivières,
un certain nombre de vaisseaijx chargés d'en défendre l'entrée
aux barbares, de s'opposer à leur débarquement, et, au besoin,
de donner la chasse à leurs navires.
On ne sait jpas au juste à quelle époque fut établi ce
système de défense. Il existait certainement au III e siècle (2),
mais tout porte à croire que son organisation remonte à une
date plus ancienne ; les pirates du Nord commencèrent, en
effet, de bonne heure, à infester les côles d'une partie de
l'empire romain.
La Notice des dignités de l'empire, qui contient la nomencla-
ture des garnisons échelonnées au commencement du
Y e siècle, le long des rivages de l'Océan et de la Manche,
sous l'autorité d'un seul général, ne fait pas renumération de
tous ces postes. Elle mentionne seulement le principal canton-
nement maritime de chaque cité comprise dans ce commande-
ment, mais il paraît évident que si la plus forte partie des
garnisons demeura dans ces cantonnements principaux, le reste
fut réparti dans les postes de moindre importance du littoral,
La position de Tronoën sur un plateau qui commande toute
la baie d'Audierne, et à peu de dislance de la pointe de
Penmarc'h, où se trouve l'un des deux seuls ports de cette
baie, désignait naturellement cette localité comme propre à
recevoir une de ces garnisons secondaires. Telle fut, à mon
avis, l'origii.e de l'établissement gallo-romain militaire de
Tronoën, avec lequel on pouvait communiquer de Quimper
(1) Tome XI, pages 68 et 69.
(2) Dubos, Monarchie française y tomel, p. 73.
- 160 —
par deux voies, Tune passant par Pont l'Abbé, et l'autre par
Plonéour.
Un poste semblable fut établi à l'extrémité de la Pointe-du-
Raz, au nord de la baie de* Trépassés, près du village de
Troguer et de la chapelle Saint-They. Quoiqu'il soit situé bien
plus au bout du monde que Tronoën, on ne peut méconnaître
l'importance de ee point qui commande, non-seulement le
passage du Raz et la baie de Douarnenez, mais aussi toute la
mer jusqu'à l'archipel d'Ouessant.
Le chanoine Moreau (1) a décrit, il y a trois siècles, tes
ruines de cet établissement dont une partie était encore debout
il y a vingt' ans. Il n'en existe plus aujourd'hui que les
substructions. Il se composait d'une vaste enceinte rectangu-
laire, close par des murs en pierres de petit appareil, et ren-
fermant diverses maisons, comme les postes de Tronoën et de
Parc-ar-Groas. La tradition du pays était qu'il y avait eu là
un couvent. On y a trouvé il y a quelques années v deux statuettes
en bronze représentant le dieu Mars. Deux voies romaines,
encore bien conservées dans plusieurs de leurs parties, et qui
partaient Tune de Carhaix et l'autre de Quimper, venaient abou-
tir à cet établissement.
On a découvert en 1844, dans l'anse de la Palue on de
Lostroarc'h, entre la pointe de la Chèvre et la pointe de Dinan,
les ruines d'un poste moins considérable, qui paraît avoir été
destiné à protéger la presqu'île de Crozon. Comme les deux
précédents il a été détruit d'une manière violente
Ces trois forteresses se trouvaient sur le territoires àQsVeneti.
Au nombre des établissements dé même nature de la cité des
Osismii, je citerai, dans l'Océan, l'important Castrumâe Brest
(Gesocribate ou Brivates portus) (2), qui défendait la rade et
(1) Histoire delà Ligue en Bretagne, (l** 6 Edit. page 7.)
(2) Notre confrère M Kerviler a cru découvrir récemment, à l'embou-
chure de la Loire, l'emplacement de Brivates portus. Je publierai, sous
peu, les motifs qui ne me permettent pas de partager son avis sur ce
point contesté de notre géographie gallo-romaine.
161 —
l'entrée des rivières qui viennent s'y jeter. Le cantonnement
principal de celle cité, Vorgat}ium % appelé plus tard Osismii,
qui en était en même temps la capitale, était assis sur le
littoral de la Manche à l'embouchure de l'Aber-Wraç'h.
VI.
Je crois avoir suffisamment répondu à la première question,
par les observations qui précèdent. Je rechercherai en quelques
lignes par qui et à quelle époque le poste de Trpnoën fut
détruit.
Comme je l'ai fait entendre plus^haut, la plupart des établis-
sements gallo-romains de notre pays furent pris d'assaut, par
des ennemis sur'lesquels la tradition ne nous a laissé aucun
renseignement, et ruinés, le plus ordinairement, par des incen-
dies allumés par les vainqueurs. La première pensée qui se
présente à l'esprit, quand on se demande la cause de ces dévas-
tations, est de les mettre sur le compte des pirates Francs et
Saxons que l'Histoire nous dépeint comme bien^ capables d'ac-
complir de pareils exploits. Mais diverses considérations
rendent cette hypothèse bien peu probable.
D'abord on ne saurait admettre qae ces établissements aient
été'délruiis avant la fin de la domination romaine dans cette
parlie de la Gaule, "c'est-à-dire avant 409, date de la révolte
des provinces armoriques contre des maîtres qui ne savaient
même plus les défendre contre les ennemis du dehors ; car,
si les faits s'étaient passés à une époque antérieure à ce grave
événement, les Romains n'auraient pas manqué de réparer les
désastres causés par les barbares. D'un autre côté, les monnaies
découvertes dans ces ruines, prouvent que ces ravages n'ont
pu avoir lieu avant la fin du IV e siècle au plus tôt. Les plus
récentes appartiennent, e.i effet, aux empereurs Constantin
lé Jeune (Tron'oên), Magnence (les Bossenno, près Carnac, et le
Lodo, Morbihan), Constance II (Bénodet), Valenlinien et Giatien
- 162 —
(l'anse de la Pake ou de Lostmarc'h). Ces dernières monnaies
nous amènent à l'entrée du V* siècle.
J'ajouterai que si les pirates du Nord avaient été les auteurs
de ces ravages, au lieu de mutiler et de jeter dans les flammes
allumées par eux, les statuettes en bronze, les ornements et les
armes des vaincus, ils auraient certainement emporté comme
trophées, ces objets qui ne pouvaient manquer de représenter
une valeur à. leurs yeux.
Tout porte donc à croire que la destruction de ces postes
militaires eut lieu en 409, à l'époque du soulèvement des pro-
vinces arraoriques,et qu'elle, eut pour agenlsles Gaulois révoltés.
De plus, comme il a été constaté, ainsi que je l'ai déjà dit, que
dans plusieurs de ces établissements les statues des divinités
qui y étaient l'objet d'un culte, avaient été intentionnellement
brisées (1), on arrive forcément à celte conclusion que ces ico-
noclastes étaient des chrétiens, et que par conséquent, si une
partie des habitants do l'extrême Armorique étaient encore
païens au commencement du V e siècle, il faut bien admettre
qu'un assez grand nombre avaient déjà embrassé le christia-
nisme à cette époque, pour pouvoir secouer le joug de leurs
dominateurs demeurés fidèles au culte des idoles. Cette con-
clusion, si' importante en l'atsence de témoignage écrit sur la
situation religieuse de notre pays, avant l'arrivée des Bretons
insulaires, explique bien pourquoi les vainqueurs des gar-
nisons romaines, après avoir mis en pièces les images de
leurs divinités, détruisirent et jetèrent au feu les ornements
et les armes des vaincus, objets qui aux yeux de néophytes
chrétiens, devaient être nécessairement entachés de souillure.
(1) Dans le poste de la Palue ou de Lostmarc'h, en la commune
de Crozon (Finistère), dont les ruines n'ont pas été l'objet de fouilles
régulières, on n'a pas, que je sache, trouvé de statuettes en terre cuite,
mais on y a découvert une tête de bélier en granité, qui est aujourd'hui
au Musée archéologique de Quimper, et qui était peut-être une
représentation de Jupiter Ammon.
— 163 -.-
VII.
Après la destruction du poste gallo-romain et de la bourgade
gauloise de Tronoën, après la dispersion de leurs habitants, qui,
vivant ensemble devaient partager les mêmes croyances reli-
gieuses, ces ruines ne furent pas entièrement abandonnés. De '
même que dans plus d'une chapelle chrétienne dont il ne reste
plus que les murs, la dévotion des pèlerins a su se frayer un
sentier à travers les ronces et les longues herbes du sanc-
tuaire, jusqu'à la statue oubliée de quelque saint, de même
ceux qui avaient survécu au désastre de Tronoën, devaient venir
pleurer sur les ruines du temple de leur bonne déesse, et
continuer à rendre leurs devoirs religieux à la fontaine sacrée
qui en était l'accessoire.
Personne n'igpore en effet, quelle vénération les Gaulois
avaient pour (es rivières et les fontaines, qu'ils honoraient
comme des divinités. On connaît le vers d'Ausonne :
« Divoncii Celtarum lingua fons additedivis. »
Cette superstition persista en Gaule et particulièrement en
Armorique, longtemps après l'introduction du Christianisme
dans ce pays, au point que le Concile de Tours en 567 dut
proscrire par un de ses canons, ces restes d'idolâtrie :
« Veneralores lapidum, accensores focularum et excolentes
sacra fontium et arborum, admonemus. »
Lorsqu'au V e et VI e siècle les Bretons insulaires vinrent cher-
cher un asile dans la Brelagne-Armoriquc, ils apportèrent sans
doute avec eux les mêmes traditions superstitieuses. Nous
lisons en effet dans Gildas :
« Neque nominatim inclamitans montes ipsos, aut fontes vel
colles, aut fluvios olim exiliabiles, nunc vero humanis usibus
utiles, qui bus divinus honos a cœco tune populo cumulaba-
tur* (1).
(I) Historia Gilds, § 2.
- 164 —
Une vie de saint Patrice, l'apôtre d'Irlande, qui lutta si éner-
giquement pour extirper de celte fie les croyances druidiques,
rapporte qu'un des motifs qui déterminèrent ce saint à visiter
Slane, fut qu'il y avait dans celte localité, une fontaine à la-
quelle les Druides (Magi) rendaient des hommages et faisaient
des offrandes comme à un dieu.
A mesure que le Christianisme se répandit dans notre pays,
je veux dire dans l'extrême Armorique, les missionnaires chré-
tiens firent tous leurs efforts pour combattre ces pratiques supers-
titieuses. Mais au. lieu de les attaquer de front, ils jugèrent plus
prudent de placer sous le symbole du Christ les monuments
qui en était l'objet. C'est ainsi que les pierres auxquelles les
nouveaux convertis continuaient à rendre un culte, furent sur-
montées d'une croix, et que les eaux des fontaines jusque là
consacrées à des divinités païennes, devinrent par l'usage qu'on
en fit dans le baptême, un instrument de régénération reli-
gieuse. s /
Bientôt des chapelles chrétiennes s'élevèrent au-dessus de
ces fontaines qui se trouvèrent ainsi placées sous la protection
de Notre-Dame, de sainte Anne, des apôtres ou de quelque
saint populaire. Il reste encore dans le Finistère assez de rui-
nes de ces édicules,pour nous permettre de n'avoir aucun doute
à ce sujet. Aux exemples que j ai cités plus haut, de cha-
pelles de ce genre existant dans la commune de Saint-Jean-
Trolimon, j'ajouterai ceux de la chapelle de Saint-Trégonnec
en la commune de Plogonnec, dont la nef est traversée par
une source, et de la très-curieuse chapelle de Saint-Guévroc,
en la commune de Tréflez, qui avait au centre du sanctuaire,
une fontaine à laquelle on descendait par treize degrés. Dans
le pourtour du même sanctuaire étaient des bancs de pierres
faisant corps avec les murs, et sur lesquels les pèlerins
s'asseyaient, sans doute, en attendant que vînt leur tour de
faire leurs ablutions. Notre Bulletin a publié une description
et un plan de cette chapelle (1).
(i) Tome III, p. 162.
— 165 —
La tradition de- Tronoën et de Kerveltré rapporte qu'une
chapelle dont il ne reste plus de traces, existait autrefois dans
les ruines. Peut-être était-elle construite au-dessus de la fon-
taine. Quoi qu'il en soit, lorsque le Christianisme s'épura en
Bretagne, on cessa de renfermer les fontaines dans les églises,
mais elles continuèrent à en être les accessoires, et nous avons
tous les jours sou3 les yeux, la preuve qire, dans l'esprit des
habitants de la campagne, leurs eaux, grâce aux saints auxquels
elles sont consacrées, ont conservé la vertu qu'elles devaient
autrefois aux divinités du paganisme.
Cet usage était généralement en vigueur au XV e siècle,darte de
la construction de la chapelle de Notre-Dame de Tronoën. On a
remarqué que partout ou presque partout en Bretagne, les
chapelles dédiées à Notre-Dame sont construites sur des ruines
romaines. Je sais que le culte de la Sainte-Vierge se répandit
de très-bonne heure dans la chrétienté, et pour ce motif Ton
dut placer sous son vocable un grand nombre de chapelles
élevées sur les ruines d'anciens centres de population; mais
je suis porté à croire que la découverte fortuite, et qui à
l'époque, put paraître miraculeuse, de quelques unes de ces
statuettes de déesses-mères que Ton trouve presque toujours
dans ces ruines, et dont l'altitude est exactement celle que Ton
donne à la Sainte-Vierge portant son enfant, ne fut pas étran-
gère à l'érection de plusieurs de ces chapelles.
Dans un article publié il y a trois ans dans ce Bulletin (1),
j'ai cité des faits qui prouvent jusqu'à la dernière évidence que
la tradition des déesses-mères s'est conservée longtemps dans
notre pays. Les gens de Tronoën appellent « des morceaux de
saints » (Tamousenl), les fragments de statuettes que l'on
trouve en si grand nombre autour de leur village. Pour eux,
en effet, qui ne connaissent de la statuaire que les saints de
(I) Sainte Guen et Saint Cadvan, t. II, p. 104.
II
1
— 166 —
leurs églises, toute représentation grande ou petite db la figure
humaine est nécessairement un saint. "
Une société de médecins a élevé il y a dix ans, sur la place
Saint- Coren lin, à Quimper, une statue au docteur Laënnec. Il
n'est pas rare de voir, les jours de marché, des geos de la cam-
pagne pieusement agenouillés devant ce monument, et adressant
dévotement leurs prières à l'inventeur du stéthoscope.
VIII.
J'ai été peut-être un peu long dans l'exposé des découvertes
faites à Tronoen, exposé par lequel on a pu voir que ces dé-
couvertes sont dues exclusivement à des cultivateurs plus
ou moins chercheurs de trésors, mais c'a a été pour moi un
devoir d'en énumérer minutieusement tous les détails, afin
de bien établir, d'abord, que la Société archéologique du Fi-
nistère, même lorsqu'elle se trouve en présence de certaines
compétitions féroces, comme il s'en produit quelquefois, ne
néglige aucun fait qui intéresse ses études, et en second lieu de
montrer, que notre département n'est pas une contrée si sau-
vage 7 ni si dépourvue de lumières, qu'il faille y envoyer de
prétendus missionnaires chargés de découvrir ce qui est dé-
couvert depuis longtemps, et de travailler à l'avancement d'une
science dont ils ne connaîtraient peut-être pas les premiers
éléments (J).
(I) Je crois devoir placer ici quelques observations qui ont été
omises dans cet article.
]o La fête de saint Ru mon, dont j'ignore absolument la date, était au
XIV" et au XV e siècle, un jour d'échéance pour certaines redevances
dues au seigneur du Pont-i'Abbé, et qui se payaient au bourg de Treff-
Rumon (auj. Saint- Jean-Trolimon) .
2° Le mot « T roi i mon » s'est formé par les dégralations suivantes :
Treffrumon, Treorumon, Trorumon, Trolumon et Tro limon.
3° Létymologie de «Tronoen ou Tronoan » parait être Traon, vallée,
et Oan, agneau.
4° La chapelle de Notre-Dame de Tronoen appartenait en 1790 aux
Carmes de Pont-1'Abbé, par suite, je suppose, de quelque donation d'un
— 167 -
Après cette lecture M. le comte de Bremond d'Ars
communique à la Société un dessin d'un fragment de
sculpture représentant un des larrons du Calvaire,
trouvé à Kernével sur le mur du cimetière.
M. le Président émet le vœu que cette sculpture soit
' transférée au Musée départemental.
A ce propos, M. Pavot signale à la Société, l'exis-
tence d'un curieux calvaire en la commune de Briec
près du moulin du Lez (1).
M. le Président prend ensuite la parole pour com-
muniquer- à l'assemblée quelques recherches qu'il a
faites sur la poésie des Cacoux ou Lépreux de notre
pays.
POÉSIE DES CACOUX.
Dans la séance du 13 janvier 1877, M. Le Mena donné com-
munication à la Société archéologique du Finistère de docu-
ments inédits du plus vif intérêt concernant les lépreux et ca-
coux de la Basse-Bretagne (2). J'avais fait suivre sa lecture de
quelques observations dont le procès-verbal n'indique qu'une
seule, et que j'ai mises depuis en écrit. Elles ont paru de na-
ture à compléter le travail de notre savant secrétaire et je vais
les rappeler; mais il est bon de résumer d'abord en peu de
- mots les faits qu'il a mis dans une lumière nouvelle.
Selon lui (et il adopte l'opinion de M. Francisque Michel,
seigneur du Pont, dont je n'ai trouvé aucune trace. Elle fut adjugée le
2 nivôse an 11, avec 1 s maisons y jointes, 167 cordes terre chaude et
315 cordes terre froide, au citoyen Pierre-Marie Barazer, de Quimper,
pour le prix de 1575 livres.
5<> On m'a indiqué dans une prairie entre le bourg de Saint- Jean-
Trolimon et Tronoën, une chapelle dont j'ai oublié le nom» et à Tinté-
rieur de laquelle se trouve une fontaine.
(1) Voir le Bulletin, tome H, page 104.
(2) Voir le Bulletin, t. IV, page 138, et t. V, pages 40 et 132.
— 168 -
l'historien des Races maudites), nos Cacoux tireraient leur
nom des cagots c'est-à-dire chiens de Goths de Gascogne,
espèce de parias venus d'Espagne, sous Charlemagne, et qui
pénétrèrent jusqu'en Bretagne. Ils. y passèrent pour atteints de
la lèpre, en breton mal de saint Lazare « celui dont les chiens
léchaient les ulcères » dit le Père Grégoire, et on les confondit
avec les lépreux. Marqués, comme eux, d'une croix rouge, ils
se virent interdit tout autre métier que le métier de cordier,
et ceux qui l'exercent chez nous reçoivent encore aujourd'hui
l'injurieux sobriquet à& cacoux.
Passant aux lépreux proprement dits, M. Le Men relève des
détails curieux de la jurisprudence qui les concernait ; il in-
siste sur le respect que les juges ecclésiastiques, forcés à une
dure nécessité, à une véritable mesure de salut public, comme
il le dit très bien, portaient à la personne soupçonnée d'être at-
teinte de la maladie ; il donne des exemples du soin qu'ils pre-
naient de la faire examiner très-attentivement, des épreuves
auxquelles on la soumettait, particulièrement par la saignée,
et constate enfin que la sentence de séquestration était loin
d'être prononcée à la légère.
On se rappelle l'exécution de cette sentence et combien
elle était lugubre et dramatique.
Un ecclésiastique se rendait chez le malade condamné, loi
adressait quelques paroles de consolation, l'exhortait à se
résignera la volonté de Dieu, le dépouillait de ses vêtements
pour le revêtir d'une casaque noire, l'aspergeait d'eau bénite
et le conduisait à l'église.
Là, le chœur était tendu de noir, comme pour les enterre-
ments ; le prêtre, revêtu d'ornements de même couleur, mon-
tait à l'autel ; le malade entendait la messe à genoux, la tête
couverte du drap mortuaire, à la lueur des cierges.
Après l'office, le prêtre l'aspergeait de nouveau d'eau bénite,
chantait le Libéra et le menait à la demeure qu'on lui desti-
nait, qui avait pour meubles un lit, un bahut, une table, une
— 169 —
l .
chaise, une cruche et une petite lampe. On donnait en outre
au malade un capuchon, une robe, une housse, un barillet, un
entonnoir, des cliquettes, une ceinture de cuir et une baguette
de bouleau. v
Arrivé au seuil delà porte, te prêtre, en présence du peuple,
l'exhortait encore à la patience, le consolait de nouveau, l'en-
gageait à ne jamais sortir sans avoir son capuchon noir sur la
tête, et sa croix rouge sur l'épaule -, à Centrer ni dans les églises,
ni dans les maisons particulières, ni dans le3 tavernes pour
acheter du vin ; à n'aller ni au moulin ni au four baaal, à ne
laver ni ses mains ni ses vêtements dans les fontaines ou dans
le courant des ruisseaux, à ne paraître ni aux fêtes, ni aux
pardons, ni aux autres assemblées publiques ; à ne toucher aux
denrées, dans les marchés, qu'avec le bout de sa baguette et
sans parler, à ne répondre que sous le vent, à ne point errer
le soir dans les chemins creux, à ne point caresser les
enfants. •• à ne leur rien offrir, — cruelle défense pour plus
d'un bon cœur ! — Puis il lui jetait une pelletée de terre, le
bénissait une dernière fois au nom de Dieu et revenait avec la
foule.
Cette émouvante cérémonie eut lieu à Quimperlé en 1453, à
progos d'Yves Le Bihan, de la paroisse de Saint-Michel, dont
le procès a été publié par M. Le Hen.
On ne s'étonnera donc pas si, aux environs de Quimperlé, les
cacoux sont le sujet de plusieurs chansons populaires ;
M. Prosper Proux en a procuré une assez curieuse à H. Fran-
cisque Michel.
Le héros de cette pièce est un jeune paysan si beau, que
lorsqu'il passe le dimanche pour aller à la messe, ses cheveux
blonds flottants sur ses épaules, on entend plus d'une jolie
fille soupirer. Le cœur de l'une d'elles, appelée Marie, est pris;
celui du jeune paysan ne larde pas à répondre à l'amour de
Marie ; mais, par malheur elle a la lèpre ; et lorsqu'elle se
présente chez le père de son amoureux, et qu'elle dit : « Don-
— 170 —
nez-moi un siège pour m'asseoir, et un linge pour ra'essuyer
le front, car votre fils m'a promis de me prendre pour femme, »
le vieillard assis au coin du feu lui répond d'un ton railleur :
« Soit dit sans vous fâcher, ia belle, vous vous abusez : vous
n'aurez point mon fils, ni vous ni aucune fille de lépreux
comme vous! » Marie sort en pleurant et jure de se venger.
En effet elle se fend un doigt, et avec son sang elle donne la
lèpre à quatorze personnes de la famille qui l'a repoussée ; et
son jeune amoureux en meurt.
Une autre pièce plus connue, nous a conservé les tou-
chantes et poétiques doléances d'un pauvre kloarek atteint de
la lèpre et qui se voit délaissé par la jeune fille qu'il aime.
LE JEUNE HOMME.
Créateur du ciel et de la terre I mon cœur est accablé de
douleur ; je passe mes jours et mes nuits à songer à ma douce
belle, à mon amour.
La maladie, hélas ! me tient cloué sur mon grabat ; si ma
douce belle venait, elle me consolerait bientôt.
Comme l'étoile du matin, après une nuit d'angoisse, si
ma douce me venait voir, elle me soulagerait.
Si elle touchait seulement du bout des lèvres le bord du
vase de ma tisane, en buvant après elle je serais guéri à l'instant.
LA JEUNE FILLE.
Qui est-ce qui me parle de la sorte, à moi, qui suis aussi
noire qu'un corbeau.
LE JEUNE HOMME.
Quand vous seriez plus noire, qu'une mûre, vous seriez
blanche pour qui vous aime.
LA JEUNE FILLE.
Jeune homme, vous en avez menti ! je ne vous ai point
donné mon cœur ; je ne veux plus de vous, vous êtes un lé-
preux, je le sais bien !
r
— 171 —
LE JEUNE HOMME.
A une pomme au bout de l'arbre ressemble le cœur de la
femme : la pomme est belle à voir, mais elle cache un ver
dans son sein.
A une feuille sur la branche ressemble la beauté de la
jeune fille ; la feuille tombe à terre ; ainsi déchoit la beauté.
A la fleur bleue du bord de l'étaqg ressemble l'amour de
la jeune fille ;
La petite fleur tourne parfois ; la petite fleur tourne et re-
tourne ;
La petite fleur tourne parfois, l'amour de la jeune fille
tourne toujours.
L'eau emportera la fleur, et la mort le traître.
Je suis un pauvre jeune clerc ; je suis fils de Jean Coran-
tin; j'ai passé trois ans à l'école, mais maintenant je n'i-
rai plus.
Dans un peu de temps jç m'en irai encore, je m'en irai en-
core loin du pays ; dans un peu de temps je serai mort, et
m'en irai en purgatoire (I).
(4) _ ANN DEN IAOUANK.
Krouer ann nenv hag ann douar !
Mantret va c'baion gant glac'har.
kounan enn noz hag enn de.
D'am dousik koant, d'am c'harante.
Me zo war va gwele chomet,
Dalc'het, sioaz ! gaad ar c'hlenvet ;
Ma ve va dousik a deufe,
E berr-amzer am frealzfe.
Evel gand ar werelaouen,
Goude eunn nozvez a anken,
Mar deufe ma dous d'am gwelet,
E vizenn gautbi diboaniet.
Ma lakafe beg he geno
War bordik skudel va louzo,
Da evan goude pa iefenn
Gwelleet raktal e vizeon.
AR PLAC h.
Piou a roroz ouz-in evel se.
Ha me ken du bag eur vran ve ?
ANN DENN IAOUANK.
Pa vec'h keu du hag ar mouar,
Gwenn-kannoc'h d'ann biniho kar.
AR PLAC'fiU
Den iaouang, eur gaou a leret !
Vac'halon d'hac'h,n'em euz roet!
N'em euz ker mui ac hanoc'h,
Eur c'hakous a ouzonn-me oc*h ;
ANN DEN IAOUANK.
'Vel enn avalou e beg ar ween.
E makalon ar femelen ;
— 172 —
Par allusion aux maisonnettes isolées que les procureurs des
fabriques fesaient bâtir pour les ladres, un de ces malheureux
dit, à la fin de la chanson analysée plus haut :
« Élevez-moi une cabane au milieu de la grande lande ;
percez dans le mur une fenêtre, pour que je puisse voir passer
la procession, croix et bannière en tête ; hélas! je ne les por-
terai plus I »
Une dernière poésie sur les lépreux m'a été apprise par un
paysan de Baye, Jean Carer, poète lui-même ; je l'ai copiée
sous sa dictée.
La personne qui en est le sujet, et probablement l'auteur,
une jeune mère, attaquée de la contagion, se plaint d'être relé-
guée au bas de l'église, pendant l'office divin, conformé-
ment aux ordonnances épiscopales :
• Dimanche matin, à la grand'messe. — Ah ! c'est trop
certain, chère amie ! — mon cœur était comme déchiré : —
Hélas ! hélas ! hélas ! —
« Je voyais mon} cher frère et ma sœur (en J.-C), mon
frère le prêtre, à l'autel ;
« Moi, j étais à la porte de l'église, parmi les lépreux
du roi ;
« Tenant un petit lépreui sur mon sein, lequel poussait des
cris affreux ;
Kaer ve ann aval da welet.
Hag eur preav e kreiz zo kuet.
Evel eunn deliea war ar brank,
E ma gened ar plac'h iaouank ;
Ann delien a gouez war ann douar,
Ar c'hened ive a ziskar.
'Vel ar bleun glaz diouz lez ar stank,
Ma karante ar plac'h iaouauk ;
Ar bleunig a dro wechigo,
Ar bleunig a dro, a zistro;
Ar bleunig a dro wechigo,
Karante ar plac'h tro ato.
Ar bleun a ielo pand ann dour
Ha gand ann ankou ann traitour.
Me a zo eur c'hloaregik paour,
Me a zo mab da lann Kaour ;
Beann onn bet tri bloa o studi,
Hogen breman na Inn ket mui.
Benn eur pennad me iei endro,
Me iei endro kuit deuz ar vro
Benn eur pennadik vinn maro,
Ha d'ar purkator me ielo.
— 173 —
« Et moi de le rouler dans mes bras et de l'emporter à la
Magdekine. » (1)
Près de cette chapelle de la Magdeleiue, placée sous le vo-
cable de la sainte pécheresse qui visita Jésus chez Simon
le lépreux, comme le remarque M. Le Mon, un cordier attend
la jeune femme ; c'est son père ; lui montrant le rouet de la
corderie, il commence à chanter en dévidant son chanvre, et
en se balançant d'une jambe sur l'autre :
« Ma fille, mettez votre robe bleue pour tourner la roue,
au bord du grand chemin.
« Ma fille, mettez votre robe blanche pour tourner la roue,
afin que je fasse des cordes.
« Ma fille, mettez votre robe brune pour tourner la roue du
'lépreux.
« Ma fille, mettez votre robe noire pour tourner la roue,
dans les deux sens, toujours ! » (2).
(1) Disul vintin, enn offero bret ,
 dra sertcnua, ma dousik !
Ma c'balon oa gozik rannet:
Oh ! la la la la la la la laïk !
Oh ! la la la la la la !
Gwelet ma breurik ha ma c'hoer,
Ma breur belek ouz ana oter !
Me a oa me toul ann nor zall,
E touez ar gakouzed roeal ;
Lapouz kakouz war ma barlenn ;
Hag heu skrijal war bouez he beon.
Ha mehen gronna em barlen,
Ha mont gant-han d'ar Vadalen.
(2) Ma merc'h, gwisket ho prozik c'hlaz
Da drei ar rod 'tal ann hent braz.
Ma merc'h, gwisket ho prozik wenn
Da drei ar rod d'ober kerden.
Ma merc'h, gwisket ho prozik rouz
Da drei ar rod 'vid ar c'hakouz.
Ma merc'h, gwisket ho prozik du
Da drei tao arrod d'enn daou du.
— 174 —
Oui, toujours, qu'elle porte du bleu, du blanc, du brun ou
du noir, toujours il lui faudra tourner la roue fatale,, et son
père, les yeux fixés sur elle, et marchant à reculons, comme
pour ne pas la perdre de vue, semblera filer les jours infor-
tunés de la pauvre fille.
N'y a-t il pas ici une image navrante de la destinée de
tous les lépreux ? Malars vulgaires ou lépreux royaux, entre-
tenus sans doute aux frais des ducs de Bretagne, puis dès
rois de France, leur mal n'en était pas moins incurable ; le
seul remède- était celui qui soutient le chrétien ici-bas, et lui
assure, là-haut, une vie éternellement heureuse.
Cette lecture donne lieu à une conversation gêné-
raie animée, à laquelle prennent part M. Trévidy, le
comte'de Bremond, M. Pavot et M. Faty. Le premier
remarque un fait intéressant, c'est que la lèpre n'a
pas encore disparu complètement en Bretagne, et
qu'il a vu lui-même à Paimbœuf, une enfant atteinte
de la maladie : on la distinguait, dit-il, à des petites
croûtes ou pellicules au-dessous de l'œil, lesquelles
tombaient comme des écailles,
M. de Bremond constate que les lépreux bretons n'a-
vaient pas seulement leur législation, mais leur poé-
sie, et une poésie très-touchante, que les cordiers ont
sauvée, en continuant à la chanter.
M. Pavot demande quelle est l'air de la dernière
chanson traduite par M. de la Villemarqué. Pour
mieux répondre à sa question, M. lé Président la
hante. Le caractère profondément mélancolique de
cette mélodie paraît, autant que les paroles, impres-
sionner beaucoup l'auditoire ; il rappelle à M. Pavot
et à M. Faty, des airs populaires remarquables, qu'ils
ont entendus à l'étranger, et ils émettent le vœu de
voir recueillir toas nos vieux airs bretons.
— 178 —
A la fin de la séance, M. le Président appelle l'at-
tention des membres de ]a Société sur l'excellent ou-
vrage publié par M. Le Men : Monographie de la Ca-
thédrale de Quimper. « Ce livre, dit-il, jette un jour
nouveau sur notre intéressante basilique ; il a attiré
les regards de M. le Ministre de l'Instruction publique
qui y a souscrit pour cinquante exemplaires, mais un
plus grand succès, lui est assuré, je l'espère. *
La séance est levée à 4 heures.
Le Secrétaire,
LE MAIGRE.
— 176 —
•eCUIIElfTS INÉDITS
XIII.
M«UVEIXE0 A L% MAlIi. — H° 1.
A Paris ce 17« juillet 4682.
On n'est point content icy de la conduitte de M. de Guillera-
gues ; il pouvoit avoir le sopha dans le temps que M. Duqpesne
tenoit les gallèrescta grand Seigneur investies, et faire un traité
avantageux ; mais il en a été la dupe, s'estant fié à la parolle
de ces infidèles, qui font gloire de n'en point garder. Le bruit
court que ce ministre est fort embarrassé •. à la Porte, on ne
scait pas sy ce ministre n'a pas eu de la bastonnade.
On a "eu avis qu'il y a dans Alger deux partis opposez Tua
à l'autre : celuy du Divan qui appuie les pyrattes, lesquels ne
veulent point la paix, parce qu'ils n'i trouvent pas leur comte,
et celuy des marchands et bons bourgois, qui demandent la
paix ; et comme ils sont en plus grand nombre, on ne doute
pas qu'ils ne l'emportent. On croit qu'a l'arrivée de M. Duquesne,
il sera fait des propositions d'accommodement pour une pleine
et entière satisfaction à S. M., et que notre armée navalle aura
de l'occupation d'un autre coslé.
La fièvre a repris au- duc de Savoye ; on apréhende mesme
qu'on ne luy aye procuré une partie du mal qu'il a. Il ne sera
de longtemps en estât de partir ; il faut qu'il soit en parfaitte
santé lorsqu'il arrivera en Portugal ; les dames ne veulent pas
des gens infirmes.
La congrégation pous les affaires de France a cessé à Rome
à mesme temps que l'assemblée du clergé à cessé icy, ce qui
fait voir que la chose estoit concertée, et que Ton s'accommode.
On parle d'un combat sur la Save, en Hongrie, entre les
impériaux et les Turcs.
Il est très-asseuré que le roy d'Espagne est comme paralitique
d'un costé, ce qui commance à paraistre beaucoup. C'est
inutilement qu'il a une princesse près de luy.
177 —
Les nouvelles d'Hollande portent que le différend que la
régence de Liège a avec cet estât ne puisse (sic) servir à
quelque seraance de guerre. MM. les Estais qui sont bien aise
de l'éviter par toutes sortes de moyens, ont commis MM. Vrik-
bergen et Dikwell pour aller à Liège régler nos différents ;
el ils sont partis avec plain pouvoir.
-Les dernières lettres de Bruxelles portent que Ton parloit
d'une grande refforme de trouppes, et qu'on ne voyoit plus la
mesme ardeur que M. le marquis de Grana avoit marquée à
son arrivée, de faire quelque Irruption sur les terres que
possède la France, et luy déclarer la guerre.
Les nouvelles de Provence portent qu'un Chiaoux est arrivé,
dit-on, à Marseille. Il va à Paris ;, on croit que c'est pour
prier le roy de faire la paix avec les algériens. On dit qu'ils
promettent de rendre ce qu'ils ont pris sur nous, tant vaisseaux,
barques que les marchandises, ou d'en payer la valeur, pourveu
que S. M. veuille leur faire rendre les esclaves d'Alger qui sont
.sur nos gallères.
Celles de Roussillon portent qu'il n'i a pas encore de camp
formé, et qu'on se contente d'y envoyer quelques régimens
estrangcrs et de bien munir les places. On y envoyé quantité
d'officiers hollandois qui ont quitté le service des Estats
généraux, et le roy leur donne de l'employ dans le régiment
de Fuslemberg, qui sert en Roussillon et est en garnison à
Perpignan. Ces officiers se louent fort de la générosité et
libéralité du roy. S. M. a même permis à quelques uns
d'ameiner leurs femmes.
Dans le dernier voyage de M. de Louvoys, en Flandre, il fut
jusqu'à Dinan où il a donné ordre a des troupes, d'aller vers
Liège et Trêves, où par le moyen de la dissention qui esl entre
les bourguemestres, pour l'élection des bourguemestres nou-
veaux, on espère, par une correspondance, faire entrer en
garnison dans les places, des trouppes françoises, pour prévenir
les impériaux qui ont le mesme dessein.
A la dernière audiance que M. de Paris a eue du roy, il
marqua à S. M. le déplaisir qu' avoit eu le clergé de ne pouvpir
— 178 —
répondre au bref injurieux du Pape; que rassemblée a travaillé
à trouver des expédiens pour la conversion des huguenots»
Elle en a fait une lettre circulaire qu'elle a envoyée à tous les
évesques du royaume, et a supplyé le roy d'escrire à tous les
intendantz de concourir à ce pieux dessein.
Il commence à par.ûslre à la cour une des plus belles
personnes qu'on ait veues depuis longtemps, c'est la fille de
M. Te comte de Grandmont, qui est à 15 ans toute formée.
Par ordre du roy on avoit augmenté les deux compagnies des
Mousquetaires, qui n'estoient que 250 hommes chacune, jusqu'à
300, et on les avoit bien montées et bien esquipées pourestre
tousjours toutes prestes à marcher au premier ordre en campa-
gne. Mais le roy a envoyé depuis un ordre aux commandans
d'augmenter lesdites deux compagnies d'aulaut de mou sque-
taires qui s'offriront, et de prendre des officiers à proportion
de l'augmentation.
On a envoyé une lettre de cachet de la part du roy à tous
les évesques et arcbevesques du royaume, par laquelle S. M.
les exorte à tenir la main, chacun dans son diocèze, à
l'exécution des actes résolus à l'assemblée du clergé, pour la
conversion des hérétiques; à quoy S. M. leur ordonne de
n'employer que les monitoires pastorales, et les voyes de
douceur, sans faire aucune violence ni rien entreprendre
contre la disposition des droicts et la liberté de conscience.
Ou enleva dimanche dernier, des filles du Calvaire, près le
palais d'Orléans, entres autres mademoiselle de Lonchesne
petite fille de M. de Bulion, autrefois surintendant des
finances. On poursuit criminellement les ravisseurs.
La duchesse de V try, qui affectionne un allemand qui l'a
servie de laquais, ensuille de valet de chambre, et depuis
devenu gentilhomme, soutient présentement qu'il est prince de
la maison de Saxe Elle le veut épouser.
Le jeune marquis de N., lieutenant dans les gardes, et
parent de M. delà Feuillade, est au petit Chastelet pour avoir
volé quelque argenterie chez le roy.
— 179 —
XIV
Exemption accordée à Vile de Baz-Paul^ par Henri III.
1587.
Henry par la grâce de Dieu, roy de France et de Poloigne,
à nos araez et féaulx conseillers les gentz de noz comptes en
Bretaigne et trésoriers généraulx de France et de noz finances
establiz à Nantes, salut et dilection. Les habittantz de Pisle de
Batzpaul nous ont faict remonstrer qu'estant ladicte isle envi-
ronnée de la grand mer sur le passaige d'Espaigne, Angleterre,
Flandres et aultres royaulmes estrangiers subjects ordinaire-
ment à l'incursion et invasion des ennemys et pirattes qui
l'auroient par plusieurs foys pilée et ruinée, tellement qu'îlz
auroient esté souvent contrainctz, pour n'estre en icelle isle
que cent à six vingtz mesnagiers, l'abandonner, noz prédéces-
seurs pour leur donner moyen de continuer à s'y habituer, les
auroient affranchis, quiclés et exemptez des tailles, fouaiges,
impostz, billotz, aydes, subventions, empruntz, subscides et
aultres impositions quelconques mises et à mectre sus, lequel
previlège aurions par noz dernières lectres, cy attachées soubz
nostre contrescel du cincquiesme jour de juign mil cincq centz
quatre vingtz et ung, confirmé pour le temps et terme de six
ans, lesquelz, pour ce qu'ilz sont expirés, ilz nous ont très-
humblement faict supplier et requérir, que, attendu leur pau-
vrette, misères, foulles et oppressions qu'ilz endurent chacun
jour, tant des ennemys que des pirattes et brigans de mer, qui
de jour à aultre les surprennent, leur voulloyr continuer ledict
affranchissement pour le temps et terme de huict ans ou tel
aultre qu'il nous plaira, et leur octroyer, sur ce, noz lectres né-
cessaires. A ces causes, de l'advis de nostre conseill, avons
ausdictz habittantz affin de leur donner plus de moien conty-
nuer leur demeure, habituer, rebastir et édiffler leurs dictes
maisons et n'abandoner ladicte isle, de nouveau confirmé et
contynué, contymions et confirmons ledict affranchissement et
ceulx quictés et exemptés de nostre grâce spécial, playne
puissance et aucthoritté royal, affranchissons quictons et
— 180 -
exemptons desdictes tailles, fouaiges, impostz, billolz, aydes,
i
subventions, emprunta, subscides et aultres impositions quelz-
concque&mises et à mectre sus en noslre royaulme, pour le
temps et terme de six ans, à commencer du jour de l'expira-
tion dudict dernier octroy et affranchissement. SY VOULONS
et à chacun de vous mandons et commectons par ces présantes
et à tous nos aultres justiciers et officiers qu'il appartiendra,
que de noz présens grâce, exemption et affranchissement et de
tout le contenu cy dessus, vous faictes, souffres et laissés les-
diclz habiltantz jouir et user playnement et paisiblement du-
rant ledict temps de six ans, sans leur faire mectre ou donner
ny souffrir leur estre faict rays ou donné aulchun trouble et
empeschement, deffendant à noz recepveurs ou aultres quelz-
coneques de prendre ou exiger sur eulz aulchune chose sur
payne de concussion, ne facent aulchun trouble au contraire ;
lequel sy faict mys ou donné leur estoyt, mectés le, ou faictes
mectre incontinant et sans delay, à playne et enthière déli-
vrance et rapportant ces présantes ou vidimus d'icelles, debue-
raent collationnées, pour une foys seulement, nous voulions
toutz nos recepveurs tant desditz fouaiges, aydes, impostz, que
desdietz subscides en estre tenuz quictés et deschargés en leurs
comptes, par vous gens de uosdiclz comptes, vous mandant
ainsin le faire sans difficulté, nonobstant que par noz com-
missions desdictes tailles, fouaiges et aultres subscides soict
mandé comprendre exemptz et non exemptz, privilégiés et non
privilégiés, en quoi ne voulions lesdietz habittants estre corn-
prins en aulchune manière, ains les en avons exemptés excep-
tés et réservés, exemptons, exceptons et réservons par cesdic-
tes présantes et quelzconcques ordonnances, restrinctions,
mandemenlz déffanses et lettres à ce contraires auxquelles
nous avons desrogé et desrogeons par ces mesmes présantes,
car tel est nostre plaisir. Donné a Paris le 8 e )our de juign
Tan de grâce 1587, et de nostre règne le quatorzième. Ainsin
signé : par le Roy en son conseill Desouries, et scelle du' grand
seau sur simple queue de cire jaulne.
(Copie sur papier du 29 décembre 1587.— Archives du Finistère).
— 181 -
SÉANCE DU 30 MARS 1878.
v t
Présidence de M. le vicomte Th. HERSAHT
DE LA VILLEMARQUÉ.
Étaient présents : MM. Th. de la Villemârqué, Le
Men, Trévédy, Faty, Pavot, Le Maigre, Créac'hcadic,
Bourassin.
M. Audran s'excuse par télégramme de ne pouvoir
assister à la séance.
M. le Président donne communication d'une lettre-
circulaire du Ministre de l'Instruction publique en date
du 31 janvier et relative à la seizième réunion des
délégués des Sociétés savantes à la Sorbonne en 1878.
Le Congrès international des Sociétés savantes qui
doit avoir lieu à l'occasion de l'Exposition universelle,
se tiendra probablement en septembre et ne saurait
être un obstacle aux réunions ordinaires, tenues pen-
dant les vacances de Pâques. Le Ministre a donc décidé
que, suivant l'usage, la seizième réunion aurait lieu
à la Sorbonne, au mois d'avril.
Le Programme se résume ainsi :
Jours des réunions et récompenses.
Lectures et conférences publiques, les 24, 25 et 26 avril ; le
samedi 27, sous la présidence du Minisire, séance générale
dans laquelle seront distribués les récompenses et encourage-
ments accord s au Sociétés et aux savants
Une somme de 3,000 francs sera distribuée, à titre d'encoura-
gement :
1° Par les sections d'histoire et d'archéologie, aux Sociétés
savantes des départements dont les travaux auront contribué
le plus efficacement aux progrès de l'histoire et de l'archéolo-
gie ;
12
— 182 -
2* Par la section des sciences, soit aux Sociétés savantes, soit
aux savants des départements, dont les travaux auront contribué
aux progrès des sciences.
Les membres des Sociétés sont donc invités à préparer les
communications qu'ils se proposeraient de faire.
Le Ministre fait connaître en même temps les dispositions
essentielles d'une décision qui ne peut manquer d'augmenter
l'intérêt des réunions de la Sorbonne.
Lectures et communications.
A l'avenir, les mémoires devront être envoyés au Minisire
un mois à l'avance, après qu'ils auront été, comme par le passé,
approuvés par une Société savante.
Les mémoires présentés devront porter sur des sujets relatifs
à l'histoire, la philologie et l'archéologie. Les auteurs sont invi-
tés à s'occuper principalement des annales, des institutions, de
la littérature et des antiquités nationales. La période Contempo-
raine, à partir de 1789, reste en dehors du programme ; enfin,
les travaux imprimés, quels qu'ils soient, ne sont pas admis»
Les mémoires qui auront satisfait à ces conditions seront
soumis au Comité, qui désignera ceux dont il sera donné lec-
ture en séance publique.
La durée de chaque lecture ne devra pas dépasser vingt mi-
nutes. Quand les mémoires seront trop étendus, les auteurs se
borneront à en donner un résumé.
Bulletins de circulation.
A l'occasion do ces réunions, les Compagnies de chemin de
fer veulent bien accorder une réduction de 30 0[0 sur le prix
des places ; mais comme il importe de connaître d'avance le
chiffre des billets à délivrer, le ministre désire recevoir, au plus
tard le 8 avril, dernière limite, la liste des personnes déléguées
par la Société, soit pour la représenter, soit pour faire des
lecluies.
Les bulletins de circulation destinés aux représentants des
- Sociétés, valables du lundi 15 avril au mercredi l» r mai, leur
seront adressés en temps opportun .
— 183 —
Suivent diverses recommandations tondant à éviter certains
abus signalés en 1877 ; les listes dressées ne devront compren-
dre que les noms des personnes qui auront à faire des lectures
ou des communications, et ceux des délégués de la Société, ces
derniers au nombre de six au plus.
M. le Président tient d'ailleurs des exemplaires de
la circulaire du Ministre à la dispçsition des membres
de la Société qui pourraient aller la représenter à la
Sorbonne ou qui se proposeraient d'adresser des ma-
nuscrits.
Aucun des membres présents n'a formulé de de-
mande à cel égard. M. Audran, absent, est seul in-
scrit, ayant fait connaître car son télégramme de ce
jour qu'il se tenait à la disposition de la Société pour
aller la représenter, si elle le jugeait à propos.
Cette offre est acceptée avec empressement.
M. le Président donne ensuite la parole à M. Le Men,
pour lire la communication suivante, portée à Tordre
du jour de la séance.
LÀ RÉVOLTE DU PAPIER TIMBRÉ EN C0HN0U AILLE.
Lorsque vers le milieu du règne de Louis XIV, les ressources
delà France ne furent plus suffisantes pour entretenir la coû-
teuse passion de gloire qui avait envahi l'âme du grand
roi, on combla le vide au moyen de taxes el d'exactions de
toute sorte dont les Etats de Bretagne ne purent préserver cette
province, malgré ses franchises et ses exemptions.
Bien que le peuple des villes et les habitants des campagnes
sentissent lourdement le poids de toutes ces impositions, aucune
ne leur fut plus odieuse que la taxe que l'on avait établie sur
le tabac et sur le papier timbré, et ce fut la haine de ces nou-
veaux droits, jointe à la crairçte des rétablissement de la ga-
— 184 -
belle, qui provoqua en Bretagne celte sanglante révolte dite du
papier timbré, qui eut en Gornouaille son foyer le plus actif.
« On dit qu'il y a cinq ou six cents bonnets bleus en Basse-
Bretagne qui auroient bien besoin d'être pendus pour leur
appreodre à parler, » écrivait Mme de Sévigné à sa fille le
3 juillet 1675.
Si c'était un besoin de pendre tout ce pauvre monde,
Mgr le duc de Chaulne-, gouverneur de Bretagne, s'acquitta fort
bien de la commission, car il pendit, pendit el pendit encore
pendant de longs mois, et ceux qui échappèrent à la corde ou
à la roue, s'estimèrent heureux d'aller ramer sur les galères
du roi. '
Il n'entre pas dans mon dessein de faire ici le récit détaillé
de la Révolte du papier timbré en Cornouaille. L'histoire de
cette insurrection, dans toute la province de Bretagne, a été
faite en 1860 par notre confrère, M. de la Borderie, d'une ma-
nière très-complète et avec autant de talent que d'impar-
tialité (1). Le but que je me propose est seulement d'ajouter à
son récit certains faits et certains documents inédits qui ont
un intérêt tout particulier pour notre département. De plus,
comme le travail de M. de la Borderie, publié il y a dix -huit
ans, est devenu rare aujourd'hui, je prendrai la liberté de lui
emprunt» et de reproduire ici une pièce extrêmement curieuse,
qui nous donne, mieux que les correspondances officielles du
temps, le véritable caractère de cette grave insurrection.
Je veux parler du Code paysan que H. de Chaulnes mentionne
dans sa lettre à Golbert, du 9 juillet 1675. M. Gaultier du
Hottay a retrouvé, dans les archives des Côtes-du-Nord, une
copie de ce document qu'ii;a communiquée à M. de la Borderie
et dont voici le texte :
Copie du règlement fait par les nobles habitants (2). des qua-
(1) La Révolte du Papier Timbré, advenue en Bretagne en Van 1675,
— Revue de Bretagne et de Vendée, tome VII, année 1860.
(2) Les paysans et probablement aussi les bourgeois.
— 188 -
torze paroisses unies du pays Armorfquê (I) situé depuis Douar-
nenez jusqu'à Concarneau, pour être observé inviolablement
entre eux jusqu'à la Saint- Michel prochaine (\&bJ;sous peine
deTORREPEN (2).
1. Que lesdites quatorze paroisses, unies ensemble pour la
liberté de la province, députeront six de3 plus notables de leurs
habitants aux Etats prochains, pour déduire les raisons de leur
soulèvement, lesquels seront défrayés aux dépens de leurs
communautés, qui leur fourniront à chacun un bonnet et cami-
sole rouge, un haut-de-chausses bleuf, avec la veste et l'équi-
page (3) convenable à leur qualité»
2. Qu'ils (les habitants dés quatorze paroisses unies) met-
tront les armes bas et cesseront tout acte d'autorité jusques audit
temps (de la Saint-Michel 1675), par une grâce spéciale qu'ils
font aux gentilshommes, qu'ils feront sommer de retourner
dans leurs maisons de campagne au plus tôt ; faute de quoi ils
seront déchus de ladite grâce?
3. Que défense soit faite de sonner le tocsin et de faire assem-
blée d'hommes armés sans le consentement universel de ladite
union, à peine aux délinquants d'être pendus aux clochers aussi
de leur assemblée (4), et (ou) d'être passés par les armes.
4. Que les droits de champart et corvée, prétendus par les-
dits gentilshommes, seront abolis, comme une violation (?)(ô)
de la liberté armorique.
5. Que pour affirmer (confirmer) la paix et la concorde
entre les gentilshommes et nobles habitants desdites paroisses,
il se fera des mariages entre eux, à condition que les (filles)
nobles choisiront leurs maris de condition commune, qu'elles
(t) 11 s'agit des paroisses du littoral.
(2) C'est-à-dire sous peine d'avoir la tête cassée. Torrepm ou Tom-
ber* signifie littéralement Casse-lui la tête.
(3) Ou peut-être avec le reste de Y équipage.
m
(4) C'est-à-dire : « aux clochers des lieux de leurs assemblées. »
(5) Mot illisible dans la copie.
— 186 —
anobliront et leur postérité, qui partagera également entre
eux (sic) les biens de leurs successions.
6. Il esk défendu, à peine d'être passé par la fourche, de
donner retraite à la gabelle et à ses enfants et de leur fpurnir
ni à manger, ni aucune commodité; mais, au contraire, il est
enjoint de tirer sur elle comme sur un chien enragé.
7. Qu'il ne se lèvera, pour tout droit, que cent sols par
barique de vin horet (1), et un écu pour celui du crû de la
province, à condition que les hôtes et cabaretiers ne pourront
vendre l'un que cinq sols et l'autre trois sols la pinte.
8. Que l'argent des fouages anciens sera employé pour
acheter du tabac, qui sera distribué avec le pain bénit, aux
messes paroissiales, pour la satisfaction des paroissiens.
9. Que les recteurs, curés et prêtres, seront gagés (2) pour
le service de leurs paroissiens, sans qu'ils puissent prétendre
aucun droit de dîme, novale, ni aucun autre salaire pour toutes
leurs fonctions curiales.
10. Que la justice sera exercée par gens capables choisis par
les nobles habitants, qui seront gagés avec leurs greffiers (3),
sans qu'ils puissent prétendre rien des parties pour leurs vaca-
tions, sur peine de punition ; et que le papier timbré sera en
exécration à eux et à leur postérité, pour ce que (4) les ac-
tes qui ont. été passés [sur papier timbré] seront écrits en au-
tre papier et seront après brûlés, pour en effacer entièrement
la mémoire,
11. Que la chasse sera défendue à qui que ce soit depuis le
premier jours de mars jusqu'à la mi-septembre, et que fuies et
colombiers seront rasés, et permis de tirer sur les pigeons en
campagne.
(4) Crû hors de Bretagne.
(9) C'est-à-dire : « recevront lia traitement fixe.
(8) Ainsi que leurs greffiers.
(4) « En conséquence de quoi. »
— 187 —
12. Qu'il sera loisible d'aller aux moulins que Ton voudra,
et que les meuniers seront contraints de rendre la farine au
poids du blé.
13. Que la ville de Quimper et autres adjacentes seront con-
traintes par la force des armes, d'approuver et ratifier le
présent règlement, à peine d'être déclarées ennemies de la li-
berté armorique, et les habitants punis où ils seront rencon-
trés : défense de leur porter aucune denrée ni marchandise
jusqu'à ce qu'ils aient satisfait, sur peine de torrében.
14. Que le présent règlement sera lu et publié aux prônes
des grandes messes et par tous les carrefours et aux paroisses,
et affixé (affiché) aux croix qui seront posées.
Signé : Torrében et les habitants.
Quand on lit quelques-uns des articles de cette sin-
gulière pièce, on se demaude si on est en présence d'une paro-
die ou d'un document sérieux. Quoi qu'il en soit le nom de
Torrében que prend le chel ou le représentant de cette asso-
ciation, était bien le mot qui se faisait entendre jadis dans
toutes les querelles bretonnes dont le Penn^Baz était ordinaire-
ment le grand juge.
Comme le nombre des paroisses du littoral compris entre
Douamenez et Concarneau était au moins de vingt-cinq en 1675,
il n'est pas facile de dire quelles sont celles de ces paroisses
qui firept partie de celte confédération armoricaine d'un nou-
veau genre. Cependant on peut sans crainte d'erreur y com-
prendre la paroisse de Combrltqui, pendant celte insurrection,
se signala entre toutes par de graves excès.
A l'époque où éclatacetle révolte, Nicolas Euzenou, sieur de
Kersalaun, était propriétaire du château du Cosquer situé dans
cette paroisse. Les paysans révoltés s'y rendirent en armes et
pendirent ce gentilhomme à une des fenêtres de son château
qu'ils pillèrent ensuite. J'ignore par combien d'exécutions ce cri-
me fut expié, mais le duc de Chaulnes voulant perpétuer par
une marque infamante, le souvenir de la faute et du châtiment
qui en fut la suite, fit raser la flèche de l'église paroissiale et cel-
N
— 188 —
*
les des chapelles de la paroisse, avec défense de les reconstruire
jamais. Lorsque cent ans plus tard, les habitants de Lorabrit
firent rebâtir leur église, ce ne fut qu'à la sollicitation du
petit-fils de la victime, devenu marquis de Kersalaun, qu'Us
obtinrent du roi l'autorisation de réédifier leur clocher. Ceux
qui ont visité la très-inléressapte chapelle de Lambourg, qui
fait aujourd'hui partie de, la ville de Pont-1'Abbé, et qui était
autrefois comprise dans la paroisse de Gombrit, ont pu remar-
quer que sa tour est encore aujourd'hui privée de la flèche
octogone qui la couronnait avant 1675.
Il existe dans un dépôt public de Paris des titres relatifs h
celte affaire. J'ai écrit à un compatriote pour en avoir des
copies ; mais il paraît que ma lettre s'est égarée en rçute car
je n'ai encore rien reçu.
Un soulèvement plus important que celui du Pays armorique,
eut lieu la même année 1675 dans l'intérieur de la Cornouaille.
Vingt paroisses des Montages. d'Are et des Montages Noires, se
révoltèrent à la fois et leur premier exploit fut la prise du
château de Kergoat, en Sainl-Hernin, que les paysans livrèrent
aux flammes après l'avoir pillé. Ce château qui était meublé
avec luxe, et pourvu de bonnes défenses, appartenait à
M. Le Moyne de Trevigny.
M. l'abbé Causer, dernier recteur de Spézet avant la révolu-
tion de 1789, et qui avait mis les archives de cette localité
dans le plus grand ordre, nous a laissé sur celte insurrection
des paroisses des montagnes, la note suivante :
« La tradition rapporte que cette révolte prit naissance à
l'occasion du papier timbré qui venoit d'être institué ; que le
nommé Balbe, notaire et procureur, ouvrit la scène à Pleyben,
et qu'elle fut éteinte au château du Tymeur, en Poullaouen,
où ledit Balbe fut mis en pièces par les seigneurs de ce châ-
teau ; après la destruction duquel ses adhérents prirent la fuite. »
La prise et l'incendie de Kergoat causèrent en Basse-Breta-
gue, une véritable panique, et les gentilshommes qui étaient
y
— 189 —
encore dans leur châteaux, s'empressèrent de réunir ce
qu'ils purent de leurs meubles, et de se réfugier dans les villes.
De son côté le duc de Cbaulnes qui était resté renfermé
dans Fort-Louis (1) se mit à la tête des troupes qui lui
furent envoyées de France, et se dirigea au commencement du
mois de septembre sur le pays de Carhaix, où la révolte semblait
s'être centralisée. On n'a aucun détail sur celte campagne,
mais on sait que le duc défit complètement les révoltés, proba-
blement près du château du Tymeur, où, comme on Ta vu plus
haut, leur chef fut tué. Ce fut à la >wite de cette victoire qui
mit fin à la rébellion, que M me dfl Se vigne écrivît à l*iiUt£. du
24 septembre, ces lignes sinislreoient spirituelles ;
« Nos pauvres bas-bretons ^ ce qu'on vient d'ippreodre C
s'attroupent, quarante, cinquante, par les champs, et dès
qu'ils voient les soldats, ils se jettent à genoux, et dirent M ei
culpâ ; c'est le seul mot de français qu'ils sachent ; on ne
laisse pas de pendre ces pauvres bas-bretons ; ils demandent à
boire et du tabac et qu'on les dépêche, et de Caron pas un mot. »
Après les exécutions et lorsque la tranquillité fut rétablie,
M. Le Moyne de Trevigny réclama des paroisses qui avaient
pris part au pillage et à l'incendie de son château de Kergoat,
une indemnité pour la perte qu'il avait éprouvée. Les diverses
négociations qui furent la conséquence de cette demande, sont
rapportées dans les actes suivants qui existaient avant 1790,
aux Archives de Gourin, où l'abbé Causer, recteur de Spézet,
eut le soin d'en prendre des copies.
Transaction passée entre Mgr de Coatlogon, évéque de Quimper,
et messire Henri Barin, curateur du sieur Trévigni y seigneur
du Kergoat, au sujet de fincendie et pillage faits aa château
du Kvrgoat. en Saint-Hernin.
L'an 1678, avant midi, le 23 juin, devant nous notaires
royaux héréditaires de la Cour de Quimper-Corantin, avec
Cl) Port-Louis.
'i
_ 192 -
ladite somme, parce que lesdits arrêts et lettres patentes se-
ront obtenus à la diligence et frais dudil seigneur et dame de
Trcvigoy; et en faveur desdits payemens, lesdites paroisses
demeureront quittes de toute l'instance intentée pour l'incen-
die, pillage et autres dommages causés audit château de Ker-
goat, tant en principal que frais, généralement sans réservation
aucune, de quelque nature qu'elles soient ; et sans que les ha-
bitants desdiles paroisses puissent être' recherchés pour au-
cune cause que ce soit. A tout quoi lesdites parties se sont obli-
gées et s'obligent chacun en droit soi, par obligation générale
de tous leurs biens, meubles et immeubles présens età venir,
à y être procédé suivant les rigueurs de justice et des ordon-
nances. Fait, gréé, obligé, stipulé, et condamné par nous dits
notaires, de l'authorilé de nos offices, audit Quimper-Coranlin,
au tablier des notaires soussignans, sous leurs scigns et les nô-
tres lesdits jour et an... Et du consentement et à la requête
desdits seigneurs a été le présent original délivré a matlre
René Dudrésit, notaire royal à Carhaii, pour en délivrer des
copies auxdils seigneurs auidits noms. Ainsi signé en l'origi-
nal Fr. de Coellogou, évêque de Quimper, Barin, Le Roy, no-
taire royal, et Dudrésit, notaire royal.
Arrêt du Conseil confirmatif de la transaction ci-devant
(Extrait des Registres du Conseil d'Etat.)
Vu au conseil du roi ta requête présentée en iceluî par
messire Joseph Malo Le Moine de Trévigny, chevalier marquis
dudit lieu, et Claude de Sérac, aussi chevalier, comte de Kerflll,
a cause de la dame Sylvie Le Moyue, son épouse, contenant
enlr'autre ebose qu'il y auroit eu ci-devant instance au conseil
entre les suppliants, d'une pari, et les habitants des paroisses
de Gourin, Guiscrif, Molrefet autres, pour raison de la répa-
ration demandée par les supplians de l'incendie, pillage et
autres dommages, causés par les habitants, du château du
Kergoat en Bretagne, au mois de juillet 1675: qu'il ; auroit
— 193 —
eu plusieurs procédures, même un arrêt contradictoire qui
auroit réglé quelque incidens.
Que le sieur duc de Chaulnes, gouverneur de ladite province,
aurait voulu, pour le service de Sa Majesté et le soulagement
d6s parties, faire quelqu'accomoderaent entr'elles, mais qu'ayant
été obligé de se rendre auprès de Sa Majesté, dans le temps
qu'il y travailloit, il en auroit chargé le sieur marquis de La
Coste, lieutenant général en ladite province.
Que ledit sieur La Coste auroit ensuite reçu ordre de
Sa Majesté le 22 décembre 1677 de parachever ledit accomo-
dement commancé ; ce qui auroit été fait à une somme de
64,800 livres.
Que ledit sieur La Coste leur auroit promis qu'au cas qu'ils
rapportassent les meubles qui a voient été par eux enlevés, il
leur en seroit fait diminution de la valeur d'iceux.
Qu'ils en auroient rapporté quelques-uus, et que, sur cela,
il auroit élé fait un traité général le 23 juin 1678, entre le
sieur evêque de Quimper, comte de Cornouailles, agissant pour
lesdits habitants en vertu de leur procuration, d'une part, et
le sieur Barin, comte de BoisgeîTroi, conseiller au parlement de
Rennes, agissant pour ledit sieur de Trévigny, et dame de
Kerfili, d'autre part.
Que ledit sieur Barin, audit nom, conformément, à la pro-
messe faite par ledit sieur Lacoste aux habitants, leur auroit
fait remise de la somme de 15,000 livres, en sorte qu'ils
ne seroienl plus redevables que de 49,800 livres payables un
tiers à Noël 1678, un tiers à" la St-Michel 1679, et un tiers à
la Si-Michel 1680.
Que pour parvenir au payement de ladite somme, ledit sieur
evéque de Quimper auroit consenti que les avocats qui se sont
présentés au conseil pour lesdites paroisses , donnassent
les mains à ce que ledit traité du 24 juin 1678 fut* homologué
au conseil, et qu'il y fut obtenu arrêt et des lettres patentes
pour faire imposer et lever sur eux lesdites sommes, moyennant
— 194 —
quoy ils en demeureraient quittes et de l'instance intentée
contr'eux.
A ces causes requeroient les supplian* qu'il plut à Sa Majesté
homologuer ledit traité du 23 juin 1678 pour êtreœeÉeutf
selon sa forme et teneur, et en conséquence permettre aux dits
habitants d'imposer sur eux les sommes y mentionnées qui
reviennent ensemble à celle de 49,800 livres, pour être par
eux payées, ainsi qu'il est porté par ledit traité... tout ce que '
dessus communiqué au sieur Gourtin, conseiller du Roi en ses
conseils, maître des requêtes ordinaires de son hôtel, oui son
rapport, le tout considéré :
Le Roi en son conseil, ayant égard à ladite requête, a homo-
logué et homologue la transaction passée entre lesdits sieurs
Trévigny et Kerfili et les paroissiens de Gourin, Guiscrif,
Molreff et autres, du 23 juin 1678, ordonne qu'elle sera
exécutée selon sa forme et teneur, et lesdits sieurs de Trévigny
et Kerfili payés des sommes contenues en icelle par lesdits
habitants, suivant les avis des sieurs commissaires qui seront
commis et députés par Sa Majesté pour la tenue des Etats de
Bretagne. Fait au conseil d'Etat du Roi tenu à Saint Germain
en Lay le vingtième jour de Juillet 1679 etc.
Ordonnance du duc de Chaulnes après Varrêt du Conseil
ci-dessus.
m
Le duc de Chaulnes, pair de France, chevalier des ordres
du Roi, gouverneur et lieutenant-général des pays et duché de
Bretagne :
Vu l'arrêt du Conseil du vingt-neuvième jour de juillet
dernier, portant que sur l'avis des sieurs Commissaires du Roi,
la somme de 49,800 livres sera levée ainsi qu'il est porté dans
ledit arrêt, nôtre avis a été qu'il sera communiqué à Messieurs
des Etats,. pour, sur leur consentement, être exécuté selon sa
forme et teneur. Fait à Vitré ce dis-septième septembre 1679.
Ainsi signé : le duc de Chaulnes ; et plus bas : par monseigneur
le comte, et scellé du cachet dudit seigneur duc.
— 198 -
Consentement • des États de Bretagne à ce que que l'arrêt du
conseil ci-dessus soit exécuté selon sa forme et teneur.
Sur ce qui a élé représenté dans l'assemblée des jhats géné-
raux et ordinaires du pays et duché de Bretagne, tenue sous
l'aulhorité du roi en la ville de Vitré, par le sieur de Coatlogon
et de Tordre de monseigneur le duc de Chaulnes, que les sieurs
de Trévigny et de Kerfili avoient, le 29 e juillet dernier, obtenu
un arrêt du conseil d'État, pour homologuer une transaction
passée entr'eux et plusieurs paroisses de cette province y
dénoramésje 21 juiu 1678, dans lequel traité lesdites paroisses
séroient obligés de lever sur eux la somme de 49,800 livres.
La levée de laquelle somme ne se pouvant faire sans le consen-
tement des Étals, à moins de blesser leurs privilèges, et
l'exécution dudil arrêt avec le payement ordonné par icelui ren-
voyé à l'avis de Messieurs les Commissaires que sa Majesté en-
verroit pour la présente tenue.
De tout quoy mondit seigneur duc auroit bien voulu faire
informer ladite assemblée, ayant une entière connoissance de
leurs privilèges.
Sur ce délibéré entre les trois ordres, lesdils seigneurs des
États ont remercié mondit* seigneur duc de Ghaulnes de sa
particulière bonté et affection pour la conservation de leurs
privilèges et libertés, et déclarent consentir, en ce que le fait
leur touche, à l'entière exécution de la transaction passée entre
le seigneur évêque de Quimper, faisant pour les habitans des-
dites paroisses, et le sieur Barin, conseiller au parlement,
faisant pour lesdits sieurs de Trévigny et de Kerfily, homologuée
par l'arrêt ci-dessus. Fait en ladite assemblée le 30 e octobre
1679. Ainsi signé : par commendement de messeigneurs des
Étais, Racjnoux (1).
(l) Le 27* octobre 1679 on signifia copie de tout ce que dessus au
{procureur terrien de chaque paroisse. Ces copies ont été prises dans
es archives de Gourin, qui a les pièces par original. (Note de Jtf. Cau-
xer % recteur de Spézet).
— 196 —
/
On voit par les actes qui précèdent que Mgr de Coëtlogon,
évêqae de Quimper, intervint d'une part pour calmer les
mutins et de l'autre pour adoucir les rigueurs du châtiment. Il
fut ardemment secondé dans cette charitable mission par
Guillaume Charrier, abbé de Sainte-Croix de Quimqerlé (I),
et parle père Haunoir (2).
La révolte de 1675 ne fut pas la seule où les paysans des Monta-
gnes- Noires et d'Are, eurent l'occasion de montrer l'impatience
de leur caractère, et la promptitude avec laquelle, à l'instigation
de meneurs ambitieux ou malintentionnés, ils se laissaient en-
traîner à commettre de graves excès, qu'ils expièrent cruelle-
ment, sans que leur rude et sauvage nature fut pour cela
domptée.
Déjà en 1489 ils s'étaient insurgés sous la conduite de trois
frères de la paroisse de Plouyé. Leur intention, dit le cha-
noine Horeau, qui nous a conservé le souvenir de cette inspec-
tion, était de massacrer la noblesse, afin de s'affranchir de
toute redevance (3). Après avoir ravagé une partie de la haute
Gornouaille, ils marchèrent sur Quimper où ils arrivèrent par
la route de Briec, à la fin du mois de juillet. Ils attaquèrent du
côté nord cette ville qu'ils prirent d'assaut, après avoir ren-
versé les avant-murs et pratiqué une brèche dans le rempart,
entre la porte Bizian ou Bihan et la porte Saint-Antoine (4).
Horeau nous apprend qu'ils pillèrent Quimper et y commirent
toutes sortes d'insolences. Ils étaient en train de se reposer de
leurs fatigues et de leur excès, lorsque la noblesse et les habi-
tants des villes, qui s'étaient mis à leur poursuite, faillirent
les y surprendre. Les révoltés sortirent à la hâte de Quimper
(1) Voir mon édition de l'Histoire de Sainte-Croix de QuimperU,
par do m Placide Le Duc ; page 539
(2) Le parfait missionnaire, ou la vie du R. P. Julien Maunoir, par
le R. P. Boschet, de la Compagnie de Jésus.
(3) Histoire de la Ligue en Bretagne, chap. I.
(4) monographie de la Cathédrale de Quimper, par R.-F. Le Men,
page 290.
— 197 —
par la porte Médard, et gagnèrent, soit par le chemin de
Crec'hmarc ou de Kernisy, soit par une très-vieille route que
Ton appelle les Trepazou (1), les rabines de Pratanras où
les gentilshommes et les bourgeois réunis leur livrèrent bataille
el les défirent complètement.
Us se rallièrent ensuite dans un pré dépendant du village
du Buzit ou de la Boixière, en Pluguffan, et que traverse la
route de Pont-1'Abbé, à un peu plus de quatre kilomètres de
Quimper. Mais attaqués de nouveau, ils furent taillés en pièces,
et « il en fut tant tué, dit le chanoine Moreau, que depuis ce
temps le nom de Prat mil goff % c'est-à-dire le Pré de mille
ventres, lui est demeuré jusqu'à ce jour. » (2) Aujourd'hui,
près de trois siècles après l'époque où écrivait ce chroniqueur
quimpérois, ou appelle encore ï Eau rouge, le ruisseau qui %
coule à travers ce pré, parce que, dit la légende, l'eau de ce
ruisseau rougi par le sang des vaincus a conservé cette couleur
jusqu'à présent. La vérité est que si ce petit cours d'eau a
une teinte rougeâtre, il la doit au fond d'argile ferrugineuse
qui lui sert de lit.
Il y avait avant 1790, un peu au-dessus de cette prairie, à
l'embranchement de la roule de PonM'Abbé avec celle de
Pluguffan, et vis-à-vis la borne kilométrique n° 4, une petite
chapelle dédiée à saint Nie ou saint Nicaise. C'est à peine s'il
en reste aujourd'hui quelques vestiges de subslructions. Cepen-
dant si vous passez dans ces parages à l'heure de minuit,
vous entendrez distinctement le son d'une cloche invisible.
C'est la cloche qui appelle à l'office divin, les âmes errantes de
ceux qui sont tombés dans le vallon de VEau rouge, et pour
lesquels la tradition populaire a conservé quelque pilié.
«M— ^— M— fc— n— — i— — — — — — — — « — — i I — ~— — .— «1— — — — *
(1) C'est le vieux mot français « Trespas » . — Cet ancien chemin,
qui était peut-être une voie gauloise, suit le bord d'un ruisseau qui a
sa source non loin de Pratanras, et qui vient se jeter dans la rivière
Teir, près du moulin de Pontigou, situé à gauche de la route de
Quimper à Locrouan.
(2) Moreau, lbid.
13
^ _ 198 —
En 1690, pendant les guerres de la Ligue, les habitants de
quelques paroisses des environs de Carhaix, s'éiant soulevés
se firent battre par une poignée de royaux, pour n'avoir pas
voulu suivre les conseils de leur chef dont ils causèrent la mort.
D'autres paroisses de la même région qui vouaient au secours
des premières, ayant appris leur défaite, crureut les venger et
se venger elles-mêmes en assassinant leur capitaine.
Nous venons de voir quel fut le résultat de l'insurrection
de 1675.
« En 1764 les paroissiens de Spézet sel révoltèrent contre
M. de la Giglais-Magon, seigneur de Boisgarin, qui, dit-on,
avoit le projet de congédier tous les convenants de la paroisse.
Les vassaux rentrés à la raison firent des excuses à M. de
Boisgarin, qui leur pardonna comme un bon père ôt distribua
même beaucoup d'aumônes.*
Cette note a été écrite par H. Causer, recteur de Spézet, sur
tm des registres de sa paroisse. Quoiqu'il ne dise rien des
paroisses voisines, il est probable que quelques-unes d 'entre
elles ne restèrent pas étrangères à ce mouvement. Voici un
autre renseignement que nous a laissé M. Causer et que je
copie textuellement dans le même registre.
«Le 11 août mardi 1789 à quatre heures du matin, on
sonna le tocsin à Spézet, et pour apaiser les paroissiens, je les
engageai à venir à ma messe que je dis à leur intention. A
l'issue de ma messe, ils vinrent en foule dans la sacristie et
m'extorquèrent le billet suivant :
« Je présente mes respects à Madame la comtesse de Roque-
« feuil, douarière, seigneure (sic) de Boisgarin, et la prie de
« donner une réponse favorable à ses vassaux de Spézet. On leur
« a dit que les autres seigneurs ne perçoivent plus la corvée,
« la disme à la seizième gerbe, les chapons, et ils réclament
« la même faveur, en se soumettant à payer seulement les ren-
« tes en argent. Ils demandent que Madame contribue avec
€ eux, selon ses facultés, aux droits du. wi, comme le
— 199 —
« vingtième, les taillées, la capitation et le grand chemin, et
« d'avoir la propriété des bois qui sont sur leurs terres. Ils m'ont
« demandé un certificat que je leur accorde volontiers, et pat
« lequel je déclare que je n'ai reçu aucune ordonnance à pu-
« blier relative à leurs réclamations. El j'ai dit la messe à
a leur intention pour supplier Dieu de leur inspirer les lumiè-
« res et les bons conseils dont ils ont besoin. Donné dans
« ma sacristie à Spézet, le It août 1789.» Causer, recteur.
Munis de ce document les paysans se rendirent en foule au
château de Boisgarin^ où demeurait la comtesse de Roque-
feuille. ft|ais ils ne bornèrent pas leurs exigences aux réclama-
tions formulées dans la lettre de leur digne recteur, et comme
presque toutes leurs terres étaient tenues à domaine sous
cette dame, ils demandèrent qu'on leur livrât les baillées, les
rentiers et les autres titres pouvant établir le caractère domanial
de leurs biens.
La comtesse de Roquefeuille crut pouvoir se débarrasser de
ces exaltés en leur faisant remettre quelques liasses de parche-
mins et de papiers sans valeur. Mais il y avait parmi les
meneurs de celte campagne,. des gens madrés, plus ou moins
suppôts de Thémis, qui eurent bien vite éventé la ruse.
Les paysans furieux s'emparèrent de Madame de Roquefeuille,
et comme elle refusait de leur livrer ses titres de propriété,
ils lui passèrent une corde sous les bras, et, malgré son grand
âge, la plongèrent à plusieurs reprises dans un puits, lui deman-
dant chaque fois qu'ils lui faisaient faire le plongeon, si elle
consentait à leur livrer ses papiers. Ce fut seulement lorsqu'ils
l'eurent à demi noyée que l'énergique douairière consentit
à leur remettre ses titres, dont les paysans firent un feu de
joie dans la cour du château.
La conséquence de cet incendie, fut que beaucoup de terres
tenues à domaine dans la paroisse de Spézet, ne furent pas
vendues nationalement, parce que leurs détenteurs prétendirent
en être les propriétaires fonciers, et que l'absence des titres
— 200 —
ne permit pas d'établir le contraire. Pour le même motif,
lorsque dans ces derniers temps, les héritiers de la comtesse
de Rocquefeuille voulurent rentrer en possession de ces biens,
ils eurent beaucoup de peine et ne parvinrent pas toujours à
établir leurs droits de propriété.
En 1792 nouvelle révolte des paysans des montagnes, mais
ici il ne s'agissait plus ni de nobles, ni de droits féodaux. Les
habitants de la trêve ou succursale de Saint-Goazec, en la
commune de Laz, ayant appris qu'un huissier de Carhaix
nommé Le Guillou, devait venir exécuter un cultivateur de leur
paroisse, se réunirent au bourg, armés de fusils et de fourches
et sonnèrent le tocsin pour appeler les paroisses voisines.
Celles de Spézet, de Laz et de SainMhoys ne tardèrent pas à se
joindre h eux. Ils avaient pour chef l'ex-maire de la commune
de Laz. Leur projet n'était rien moins que d'attaquer les déta-
chements dont ils croyaient que l'huissier Le Guillou serait
escorté, puis de brûler les villes de Ghâteauneuf et de Carhaix,
après avoir fait entrer dans leur dessein, les communes de
Landeleau, Saint-Hernin, Cléden-Poher, Kergloff, etc. Grâce
à des mesures énergiques prises par le Directoire du district
de Carhaix et par les commissaires du département, la révolte
fut comprimée, mais pas assez tôt cependant pour sauver
l'huissier Le Guillou, qui fut massacré par ces furieux. Tout se
borna à ce meurtre et à quelques coups de fusils, tirés dans la
direction du château de Trévaré.
Enfin, en 18*24 ou 1825, une dernière révolte éclata à Spézet
à l'occasion d'une tentative de congément faite dans la
commune par M***. La maison où se trouvait ce propriétaire
fut cernée par les paysans qui exigèrent de lui une renonciation
à ses droits sur les domaines de Spézet. La troupe alors eu
garnison à Quimper dut se transporter sur les lieux pour
mettre fin à ces désordres.
La lecture de cette note donne lieu aux observations
suivantes de M. de la Villemarqué :
— 201 —
« Je ne crois nullement, dit-il, à l'authenticité du
. Code paysan ; il aura été fabriqué dans quelque office
de tabellion citadin.
« J'ai vainement cherché à me procurer une version
quelconque de la chanson sur la Révolte du papier
timbré ; d'autres pourront être plus heureux.
« Je donnerais beaucoup pour un texte breton an-
cien contenant le cri : Torr-he-benn ! Suidas (et non
César), auquel on fait honneur de l'avoir conservé, dit
seulement des guerriers gaulois : « Poussant un cri
« sauvage (ils vont au combat). »
« On peut lire dans les notes des Chants populaires
de la Bretagne (t. II, p. 287 et suiv., édit. de 1845),
un récit de la sédition de Spézet, écrit sous la dictée
du comte du Laz, dont la présence d'esprit sauva la
fortune du notaire Liégeard des mains dos paysans. »
MM. Faty, Le Men et quelques autres membres
partagent l'opinion que vient d'émettre M. le Prési-
dent au sujet du Code paysan, et ajoutent que la chan-
son de la Révolte du papier timbré ne paraît pas offrir
un caractère d'authenticité mieux établi.
Répondant à une observation de M. le Président,
M. Le Men constate que le breton, considéré comme
une langue populaire et vile, n'a pas été employé pour
la rédaction des actes publics ; il n'en a du moins pas
vu d'exemples, et cependant, les prédications, les pu-
blications de toutes sortes se faisaient dans les églises
en langue bretonne. Du XV e au XVIII e siècle , les
témoins interrogés dans les enquêtes répondent en
leur « vulgaire langage breton, » mais toutes ces
réponses nous ont été transmises soit en latin de oui-
y
20È -
sine, soit en un jargon prétendu français, mais cent
fois plus barbare que la langue populaire si injuste-,
ment dédaignée.
Quant à l'expression Torr-he-benn ! ce cri, à son avis,
doit être ancien parmi les Bretons. Il ne Va jamais vu
écrit en breton dans les anciens titres, mais il résulte
de divers documents qu'il a pu consulter, que dans
leurs rixes, les paysans bretons voulaient toujours
et casser la tête » à leurs adversaires.
Un membre donne ensuite d'intéressants détails sur
la manière dont on représentait encore, il n'y pas très-
longtemps, des Mystères bretons dans quelques pa-
roisses de l'ancien évêché. Dans une de ces fêtes,
l'acteur qui représentait le roi Hérode put paraître en
scène vêtu de pourpre et d'hermines, grâce à l'obli-
geance d'un conseiller de la cour de Rennes. .
M. Le Men informe l'assemblée qu'il vient d'adresser
au Ministre de l'Instruction publique, poui être sou-
mis au Comité des travaux historiques, un dossier qu'il
a mis bien des années à former et qui renferme les
renseignements les plus intéressants sur Jehan Coetan-
lem, qui mourut amiral de Portugal, et sur Nicolas
Coetanlem , constructeur et armateur du navire ou
caraque la Cordelière, que la reine Anne fit construire
dans le port de Morlaix et qui fut brûlé et sombra
en 16i2 dans le « raz de Sainct Mahé, » avec le
vaisseau anglais la Régente et le capitaine Portzmo-
guer. Le premier capitaine de la Cordelière, ajoute
M. Le Men, fut Jacques. Guibé, capitaine des gentils-
hommes de la reine, qui n'était pas plus marin que le
capitaine Portzmoguer.
— 203 —
Outre les renseignements que donnent ces documents
sur les deux célèbres Bretons singulièrement tom-
bés dans l'oubli, ils jettent une véritable lumière sur
le commerce breton en général au XV e siècle, et en
particulier sur le commerce , très-florissant à cette
époque, de Morlaix et de Saint-Pôl-de-Léon. Quand ces
documents auront été publiés dans la Revue des Sociétés
savantes, M. Le Men se propose de communiquer, avec
toutes les pièces à l'appui, une notice très-détaillée sur
Jean et Nicolas Coetanlem.
M. le Président prend ensuite la parole potir don-
ner communication d'une nouvelle circulaire du Mi-
nistre dq. l'Instruction publique, datée du l ep mars!878>
et relative ^l'inventaire général des richesses d'art de
la France-
Dans cette circulaire, le Ministre revouvelle ses re*
merciements pour ce qui a été fait et invite la Société
h s'entendre avec M. le Préfet du département pour
toutes les questions que peut soulever sa collaboration
à l'inventaire.
M. Jaclot, major au 118 e de ligne, présenté, par
MM. Pavot et Le Men ; M. Fénoux, ingénieur en chef
des ponts et chaussées, présenté par MM. de la Ville-
marqué et Fo\igeray, et M. Cayeux, présenté par
MM. Créac'hcadic et Le Maigre, sont admis à l'unani-
mité comme membres de la Société archéologique du
Finistère.
La séance est levée à quatre heures et quart.
Le Secrétaire,
PAVOT*.
TABLE DES MATIÈRES DU TOME V.
Liste des Membres de la Société archéologique du Finistère.
Séance du 28 avril 1877. — Le domaine ducal de Mor-
laix en 1455, par M. R.-F. Le Hen. — Le Papegaut de Qun-
perlé, par H. F. Àudran 11
Séance du 30 Juin 1877. — L'inscription bretonne Pedb-
DALEDAN. — LES LÉPREUX DE LA VILLE DE MORLAIX. — JbAH
de L'Épine ou Hab an Spernbn, calligraphe et poète breton
(1468-1479), par H. Th. de la Villemarqué. — La Confrérie
des Maîtres es arts de l'évêché de Léon, par M. R.-F.
Le Men. — Plantes employées dan? la médecine des anciens
bretons, par M. Bourassin. — Admission de M. Livanen,
comme membre de la Société. — Dons offerts au Musée dépar-
temental d archéologie, par MM. Bezard, Burel, Frochen, Prou-
het, de Br£mond d'Ars, Manceaux, Jacob et Lack 39
Séance du 6 octobre 1877. — Admission de M. de la Borde-
rie, comme membre de la Société. — Le livre de compte du
sieur de la Haye, par M. R -F. Le Men. — Notice sur quel-
que* antiquités de la commune DE Riec, par M. le comte de
Brémond d'Ars. — Fouilles dune sépulture gallo-romaine
près Quimper, par M. A. de Blois. — Observations de
M. Le Men, au sujet de ces fouilles. — Dons offerts au Musée
départemental d'archéologie par MM. Huon, Le Moyne, de la
Villemarqué, Créac'hcadic et Audran. — Lettre de M. Duchà-
tellier,à M. de la Villemarqué, président, au sujet de sa radiation
de la liste des membres de la Société. — Note sur les
lépreux 66
Séance du 2 février 1878. — Tronoen et ses antiquités,
Car M. R.-F. Le Men. — Poésie des Cacoux, par M. Th. de la
il lem arqué. — Documents inédits. — XIII. Nouvelles a la
main. N° 1. — XIV. Exemption accordée a l'Ile de Batz-Paul,
par Henri m 133
Séance du 30 mars 1878. — Délégués aux réunions de la
Sorbonne. — La révoltb du papier timbré en Cornouaillb,
par R.-F* M. Le Men. — Observations diverses de plusieurs
membres. — Annonce d'une notice sur Jean Coetanlem, amiral
de Portugal et sur Nicolas Coetanlem, constructeur et armateur
de la Cordelière. — Circulaire relative à l'Inventaire des
richesses d'art de là France 181
Fin de la Table des Matières.
BULLETIN
DE LA
/ /
SOCIETE ARCHEOLOGIQUE DU FINISTERE
BULLETIN
DE LA
/ /
SOCIETE ARCHEOLOGIQUE
DU FINISTÈRE ,
-«SCCO'©'»*-
TOME VI
-KAGO&***-
1878-1879
QUIMPER
IMPRIMERIE CAEN. — A. JAOUEN , SUCC r .
1878-1879
/
LISTE GÉNÉRALE
DBS
MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU FINISTÈRE H.N 1878
Président : M. le Vicomte Th. HERSART DE LA VIL-
LEMARQUÉ, membre de l'Institut.
/ M. l'abbé F. DU MARCHALLAC'H,
Yice-présidents j vicaire général de l'évêché.
( M. F. AU DR AN, maire de Quimperlé.
M. R.-F. LE MEN, archiviste du Finis-
. tère,' directeur du Musée départemental
Secrétaires <„,,,.
d archéologie.
\ M. V. DE MONTIFAULT.
Trésorier : M. CRÉAC'HCADIC, Antoine, rue Saint-
François, à Quimper.
MM.
L'abbé ABGRALL, professeur au collège de Pont-Croix.
AFFICHARD, fils, propriétaire à Quimper.
AL AVOINE, Joseph, adjoint au maire de Quimper.
ASHER, libraire, Mohrenstrasse, 53, à Berlin (Prusse).
ASTOR, maire de Quimper.
AYRAULT, procureur de la République, à Lannion.
BAHEZRE DE LANLAY, garde général des forêts à
Landerneau.
BARBE, Notaire à Moëlan.
L'abbé BAYEC, aumônier de l'hospice de Morlaix.
-6-
MM.
BIGOT, architecte du département.
BIGOT, architecte diocésain.
M me DE BLOIS, au château de Poulguinan,près Quimper.
DE BLOIS, Xavier. ,
BOLLORÉ, Alexandre, négociant, rue des Reguaires,
à Quimper.
DE LA BORDER1E, à Vitré.
BOURRASSIN, membre de plusieurs sociétés savan-
tes, à Quimper.
Comte DE BRÉMOND D'ARS, au château de la Porte-
Neuve, commune de Riec.
DE BRÉMOY, directeur du télégraphe à Quimper.
BRIQT DELA MALLERIE, président de la Société
d'Agriculture de Quimper, à Penhars.
CAEN dit LION, imprimeur à Quimper.
CANVEL, professeur, à Quimper.
DE CARNÉ, Edmond, à Quimper.
CAYEUX, à Brest.
DE CHABRE, avocat à Quimper.
DE CHAMAILLARD, fils, avocat à Quimper.
Comte de CHAUVEAU, propriétaire au château de
Keriolet, à Beuzec-Conq.
CLAIRET, imprimeur à Quimperlé.
CLOAREC, greffier du tribunal civil de Quimper.
Le docteur COFFEC, à Quimper.
COLOMB, ancien conseiller de préfecture, à Quimper.
CORMIER, avocat à Quimper.
DE COURCY (Pol), à Saint-Pol-de-Léon.
COZIC, chef de division à la Préfecture.
DANGUY DES DÉSERTS, notaire a Daoulas.
DE VAUX, lieutenant au 118 e régiment d'infanterie,
à Brest.
MM.
DUBOIS SAINT-SEVRIN, commis de direction des
postes.
DUVAL, conservateur des hypothèques à Morlaix.
FATY, major en retraite, à Quimper.
FAUTREL, pharmacien à Quimper.
FÉNOUX, ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées,
à Quimper.
FLAGELLE, expert-arpenteur, à Landerneau.
FOUGERAY, membre du conseil municipal, à Quimper.
FOULLOY, amiral, major 'général à Toulon.
FOURIER, commandant de gendarmerie, à Quimper.
FRIELE, propriétaire à Quimper.
FROCHEN, fils, négociant à Quimper.
FROLLO DE KERLIVIO, employé des contributions
indirectes, à Châteaulin.
H. GAIDOZ^ directeur de la Revue Celtique, à Paris.
DE GOUYON, Arthur, au château de Kerbernez, com-
mune de Plomelin.
GOVIN, François, rue des Reguaires, à Quimper.
DÉ GO Y, Stephen, avocat à Quimper.
DU GRANDLAUNAY, propriétaire à Vannes.
GUERMEUR, avoué à Châteaulin.
L'abbé GUILLARD, à Quimper.
LE GUILLOU-PENANROS, négociant à Douarnenez.
LE GUILLOU-PENANROS, juge à Brest.
LE GUILLOU-PENANROS, Gustave, négociant à j
Concarneau .
LE GUILLOU-PENANROS, Hippolyte, négociant à
Concarneau.
GUITOT, négociant à Quimper, membre du Conseil
municipal.
GUYHO, député à l'Assemblée nationale.
— 8 —
MM.
Le docteur HALLÉGUEN, à Chàtteauliû.
HÉMON, Louis, député à l'Assemblée nationale.
HÉMOÏS[, Prosper, à Quimper.
HÉNON, notaire à Quimper.
JACLOT, major au 118* régiment d'infanterie, à Qttim-
per.
DE JACQUELOT, Louis, à Quimper.
DE JACQUELOT, Joseph, à Quimper.
JAMET, propriétaire à Châteaulin.
L'abbé JÉGOU, vicaire général del'évéchë, à^tiità-
per.
JÉGOU, juge de paix, à Lorierit.
JORY, négociant à Bordeaux.
R. DE KERRET, au château de Quillien, ôorimmne de
Brasparts.
C. DE KERRET, à Gouesnac'h.
DE KERJÉGU, Louis, maire de Saint-Goâîtèc.
L'abbé KERLAN, recteur de Plouzané.
L'abbé de KERNAÉRET, Université catholique Se
Lille.
LACOSTE, membre du Conseil général, à ChâteàuMla.
LAMARQUE, Robert, Champ de Bataille, à Brest.
DE LA LANDE DE CALAN, maire de TféguûC, &
Quimper.
LAPLACE, avoué, rue du Châpeau-Rougë, àQuîmpef.
DE LÉCLUSE, Amédée, conseiller général, à Audierne.
LEMAIGRE, directeur de la compagnie Le 'Finistère,
à Quimper.
LIVANEN, avoué à Quimperlé.
LOARER, agent-voyer en chef des chemins vicinaux.
LORANS, avoué à Quimperlé.
MALEN, professeur à Quimper.
— 9 —
MM.
MALHERBE DE LA BOÎSSIÈRE, à Ergué- Armel.
DE MAUDUIT, membre du Conseil général, à Riec.
LE MOALLIGOU, docteur-médecin, à Quimperlé.
MOREAU, S^tnislas, à Quimper.
LE MOYNE, rue de Rome, 52, à Paris.
LE N1R, ancien directeur des Domaines, à Quimper.
LE NOBLE, rue Saint-François, 2, à Quimper.
Mgr NOUVEL, évêque de Quimper et de Léon.
DE PASCAL, propriétaire à Plomeur.
PAVOT, sous-intendant militaire, à Quimper.
DU PJERRAY, propriétaire à Quimper.
PEYRON, propriétaire à Quimperlé.
L'abbé PEYRON, secrétaire de l'évêché.
POCARD-KERV1LER, ingénieur des ponts-et-chaussées
â Saint-Nazaire.
L'abbé POSTIC, recteur de Plonévez-Porzay.
E. PUYO, maire de Morlaix.
PUYO, architecte à Morlaix.
QUINTIN DE KERCADIO, capitaine de gendarmerie,
à Quimper.
DE RAISMES, sénateur.
RICHARD, Préfet honoraire du Finistère, à Quimper.
RICHARD, Amédée, receveur de l'enregistrement à
Châteaulin.
RICHARD, juge de paix à Quimperlé.
LE RODALLEC, juge de paix à Fouesnant.
DE RODELLEC, au château du Perennou, commune
de Plomelin.
ROSSI, propriétaire à Quimper.
ROUSSIN, propriétaire à Plomelin.
ROUMAIN DE LA TOUCHE, ancien procureur impé-
rial.
— 10 —
MM.
LE ROUX, membre du Conseil général, àLandivisiau.
DE SA1SY, Paul, à Plounévezel.
DE SAINT-GEORGES, propriétaire à Melgven.
V t0 DE SAINT-LUC, au château du Guilguiffln, com-
mune de Landudec.
SERRET, propriétaire à Quimper.
SOUDRY, avoué à Quimper.
HENRY DE TONQUEDEC, quai de Tréguier, àMorlaix.
TRÉVÉDY, Président du tribunal civil de Quimper.
DE TROGOFF, Charles, à Coatalio en Fouesnant.
DE TROMENEC, capitaine au 20 e régiment d'artillerie,
à Poitiers.
Erartum du Tome V.
Tage 163, ligne 15, au lieu de Ausone, lisez Sidoine Appo
linaire.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DU FINISTÈRE
SÉANCE DU 29 JUIN 1878.
Présidence de M. F. AUDRAN, Vice-Président.
Étaient présents : MM. F. Audran, de Bremond
d'Ars, de Brémoy, Bourrasin, Briot de la Mal-
lerie, Faty, Le Moyne, Pavot, Créac'hcadic, et
Le Men, secrétaire.
M. le Président remercie la Société d'avoir bien
voulu le déléguer pour assister aux lectures de la
Sorbonne, auxquelles il a pris part avec plaisir. Il a
pu s'assurer que l'on attache en haut lieu un véritable
intérêt aux publications de la Société archéologique du
Finistère que M. le Ministre de l'Instruction publique
n'oubliera pas dans la répartition des subventions aux
Sociétés savantes.
Depuis l'année dernière, ajoute M. le Président,
la Société a eu à déplorer la perte de trois de ses
membres, qui ont plus ou moins contribué à ses tra-
vaux. Ce sont MM. S. Ropartz, de Rennes, Le Doze,
de Clohars-Garnoët, et Binet, vice-président de la So-
ciété d'agriculture de Quimperlé. Il est certain, ajoute-
t-il, d'être l'interprète de la Société, en exprimant le
— 12 —
vif regret que lui inspire la perte de ces utiles et in-
telligents collaborateurs.
M. Pavot demande la parole. Il n'a pas, dit-il, de
communication écrite à faire ; il désire seulement si-
gnaler, en quelques mots, la rapidité avec laquelle dis-
paraissent^ même temps que les anciennes mœurs bre-
tonnes, les costumes et le mobilier de la campagne. Pour
en donner une preuve, M. Pavot cite ce fait : que dans
la tournée de révision de 1876, dix-huit maires s'étaient
présentés au Conseil avec le costume breton complet ; il
ne s'en est présenté que six dans les mêmes circons-
tances en 1878. Dans l'impossibilité où l'on est d'acqué-
rir pour le Musée les dernières épaves du mobilier
que l'on se dispute à prix d'or, et dont la contrefaçon
ne ralentit pas la recherche, il pense qu'il serait
utile d'y établir au moins une collection de costumes
bretons.
L'assemblée est unanime pour exprimer le même
vœu.
M. Le Men dit que malgré la rude concurrence à la-
quelle donne lieu le commerce des vieilles sculptures,
il a fait son possible pour réunir au Musée des spéci-
mens de l'art breton du XV e au XVIII e siècle.
Quant à l'établissement d'une galerie de costumes
bretons, qui ne peut qu'être approuvé par tous ceux
qui ont quelque souci des études ethnographiques^
il pense qu'il sera possible d'y former, au fur et à
mesure des ressources de la Société , une collec-
tion de costumes de grandeur réelle, représentant
les principales variétés du costume breton et adaptés
à des figures qui reproduiront avec exactitude les
types les plus caractéristiques de la population Armo-
rico-Bretonne du Finistère.
— 13 —
M. Audran présente à la Société, au nom de M. Jé-
gou, un de ses membres, une brochure relative aux
fondateurs de Lorient.
La parole est donnée à M. Le Men, pour lire la
note suivante :
Les àrmoibies des villes du Fotstèbe.
Bien que dès le XVI e siècle la plupart des bourgeois de Quim-
per, possédant quelque fortune, el certaines confréries d'arts et
métiers telles que celles des tisserands de Morlaix, eussent des
armoiries particulières, ce n'est guère qu'au siècle suivant que
les principales villes comprises aujourd'hui dans les limites du
département du Finistère, adoptèrent l'usage de graver sur les
monuments qu'elles faisaient construire, des emblèmes qui de-
vinrent le caractère distinctif de chaque localité.
Mais longtemps avant cette époque, et au moins depuis le
XIV e siècle, les juridictions ducales comprises dans les mômes cir-
conscriptions départementales,étaient distinguées sur les sceaux
des cours par un emblème qui constituait pour chaque juridic-
tion de véritables armoiries. Au XIV e , au XV e et môme au com-
mencement du XVI e siècle, les sceaux des cours ducales se
composaient d'un écus&on triangulaire chargé de 10 mouche-
tures d'hermines 4, 3, 2 et 1 , et inscrit dans une rose à 6 lobes
entourée d'une légende. C'est au-dessus de cet écusson et
dans le lobe supérieur de la rose qu'était placé l'emblème dont
Je viens de parler, et' qui est représenté par un animal, va-
riant quelquefois pour la même juridiction suivant les époques.
Les animaux servant à désigner ces diverses juridictions sont *•
le lion et la chèvre (Morlaix), le cerf et le mouton (Quimper),
le bœuf (Carhaix), le cheval (Saint-Renan), le sanglier (Lesne-
ven), la levrette? (Quimperlé),et le saumon (Châteaulin).
Après la réunion définitive de la Bretagne à la France, tous
ces sceaux ducaux ainsi diversifiés disparurent pour faire place
à des empreintes uniformes portant soit un parti soit un écarteié
— 14 —
de France et de Bretagne. Cependant le sceau de la cour royale
de Concarneau conserva dans le champ, de chaque côté de
l'écu, une hache d'armes en pal soutenue d'une moucheture
d'hermine. Je n'ai pu découvrir de sceau de la juridiction du-
cale de Concarneau, mais je suis persuadé que la hache d'ar-
mes y figurait.
Par suite de celte circonstance, les anciennes cours ducales
perdirent leurs emblèmes distinctifs.ou, pour mieux m'expriraer,
les armes qui leur étaient propres. Mais la tradition en fut
conservée, et lorsque plus lard, les villes qui formaient le chef-lieu
de ces juridictions, s'attribuèrent des armoiries, quelques-unes
d'entre elles se souvinrent de ces emblèmes qu'elles retrouvè-
rent sur les empreintes des anciens sceaux, et qu'elles adopté-
rent pour armes. Cependant comiiie la plupart de ces emprein-
tes étaient usées ou mal faites, il dut en résulter des erreurs
dans la détermination de l'animal qui surmontait l'écu. C'est
ainsi que le cerf, qui formait les armes de la juridiction ducale
de Quimper, est devenu un mouton, et que la levrette, ou peut-
êlre l'hermine, de la cour de Quimperlé a été transformée en
coq. De plus on distingue très-nettement sur les bonnes emprein.
tes des sceaux de la juridiction de Châteaulin, un saumon sur-
monté d'un château, mais le saumon est informe dans les mau-
vaises empreintes et on n'y voit bien que le château. C'est pour
ce motif que le saumon ne figure pas dans les armes de Château-
lin telles qu'elles sont blasonnées dans les armoriaux. Et cepen-
dant quelles armes peuvent mieux que cet emblème convenir à la
ville de Châteaulin, si célèbre jadis par ses pêcheries de sau-
mons, et dont on appelle encore les habitants Penn-Eok, de
même que l'on désigne les Douamenistes sous le nom de Penn-
Sardin, en raison du grand commerce de sardines qu'ils font
depuis un temps immémorial !
Les armes de l'ancienne juridiction de Quimper, devenues
plus tard celles de la ville, convenaient parfaitement à la
région dont celte ville, était le çhef-lieu, c'est-à-dire la Cor-
nouaille } Cornubia ou Kernew. Dans cette circonstance le cerf
— 15 —
où le mouton étaient des armes parlantes. Je. ferai la même
observation pour le* armes de la juridiction de Morlaix qui
furent dans le principe un lion ; le lion des comtes et des vi-
comtesse Léon, le dernier représentant de la légion
romaine qui a donné son nom à la partie nord de notre dépar-
tement. Ce lion est représenté raorné, c'est-à-dire sans dents
et sans griffes ; mais que de victimes n'a-t-il pas faites ! 11 a
laissé partout dans notre pauvre Cornouaille la trace san-
glante de son passage. En descendant vers le sud, nous le
trouvons d'abord au Faou, transformé en léopard. Si nous
passons l'Aulne, nous le voyons occuper tout le pays de Crozon
et de Porzay ; et au-delà de la baie de Douarnenez, il règne
en maître sur Pont-Croix et n'épargne même pas les plaines
fertiles de Cap-Caval, où le lion de la baronnie du Pont et le
fief de Quéménet nous ont conservé son souvenir. Est-il sur-
prenant qu'il soit sans griffes et sans dents après avoir déchiré
tant de proies ? Et n'y a-t-il pas un écho de cette désolation
dans ces vers d'un poète du IX e siècle ?
Quam bene candelis splendebant culmina ternis
Cornubiœ preceres cum terni celsa tenebant !
At nunc pressa jacet heroum orbata potentum,
Cède gemens victa exlerno sub fasce reflexa^
Arniorum nitidis nuda spoliata triumphis (1).
J'ignore à quelle époque el dans quelles circonstances le lion
fut remplacé par la chèvre dans le sceau de la juridiction
ducale de Morlaix, mais il me semble que le lion qui figure
encore sur une empreinte de 1340, était un souvenir de la do-
mination des comtes de Léon, que Jean de Montfort voulut
anéantir en lui substituant la chèvre, animal plus prosaïque
mais plus utile, et dont les Morlaisiens, excellents texiers,
tiraient peut-être un très-bon parti.
Quoi qu'il en soit, lorsque la ville de Morlaix pr|t des armoi-
ries elle n adopta ni le lion ni la chèvre. Son commerce avait
(I) Gurdestin, Cart. de Landévennec, Ms. de la Bibl. deQuimper.
-^ 16 —
été florissant au XV* siècle.U Tétait encore au XVI* et au XVII» ;
elle fit donc acte d'indépendance et d'à propres en peignant
sur sa bannière un navire équippé.
Depuis un certain nombre d'années il est d'usage, à l'occa-
sion des fêtes régionales ou locales, de décorer les monuments
publics des armoiries de la ville où se fait la fête ou des villes
qui doivent y concourir. Il m'a semblé qu'une petite galerie
héraldique, qui permettrait de remonter à l'origine des armoi-
ries de chacune des villes de notre département et d'en suivre
les modifications successives, ne seraient pas hors de place au
Musée départemental d'archéologie. Comme on a pu le voir par
les observations qui précèdent, les armoiries des villes ne sont
pas un assemblage fortuit de figures et de couleurs. Elles se
rattachent toujours à leur histoire soit par un côté politique,
soit par un côté économique. On en trouvera la preuve dans les
descriptions qui vont suivre.
Pour réaliser cette idée, j'ai fait peindre sur des planeheites
en forme d'écusson les armoiries des villes du Finistère, telles
que je les ai rencontrées sur les sceaux, ou, à défaut de sceaux
anciens, d'après les indications des armoriaux, en prenant
soin de faire suivre le nom de la localité de la date du docu-
ment reproduit. A côté des sceaux des anciennes juridictions
ducales, royales ou seigneuriales, où Técusson du seigneur
haut-justicier tient la plus grande place, et où l'emblème
représentant la localité est placé au-dessus ou à droite et h
gauche de l'écu, j'ai indiqué sur une planchette spéciale de
quelle manière l'écusson de la ville devait être représenté à la
môme époque, si elle possédait un écusson particulier.
l'ai dit plus haut que plusieurs des chefs-lieux des anciennes
juridictions ducales avaient pris pour armes l'emblème qui
s'appliquait dans le principe à tout un territoire. Les petites
villes moins importantes, chefs -lieux de juridictions inférieures,
n'ont guère eu d'autres armoiries que celles de ces juridictions
et je les leur ai soigneusement attribuées.
Il est une autre catégorie de localités que l'on pourrait appeler
V
— 17 —
les disgraciées de la fortune, qui n'ont été chefs- lieux d'aucune
juridiction de quelque importance, ou pour lesquelles, au
point de vue du blason, les documents font absolument défaut.
Mais comme il n'y a pas de ville qui ne puisse tirer de son
histoire les éléments d'un blason, j'ai composé pour ces
localités mal partagées, des armoiries basées sur la connais-
sance de leur passé, ou sur leur situation actuelle. Seulement
comme il s'agit ici d'un travail de fantaisie, j'ai fait peindre
en teinte neutre les écussons de celte catégorie, afin qu'il soit
impossible de les confondre avec les autres, qui ont an carac-
tère historique. S'il convient aux villes qu'elles intéressent
de les adopter, rien ne sera plus facile que de substituer à la
teinte neutre les couleurs ordinaires du blason.
Le nombre des écussons des villes du Finistère, terminés ou
en voie d'exécution est en ce moment de quarante-cinq. C'est
grâce à la libéralité de quelques membres de la Société que ce
travail a pu être fait. Quand cgs écussons des villes seront
terminés, je m'efforcerai d'augmenter celte galerie héraldique
en y plaçant les armoiries des hommes célèbres nés dans le
territoire du Finistère, et dont les familles sont éteintes. Voici
par ordre alphabétique la nomenclature de ces villes avec la
description de leurs armoiries.
Audierne (teinte neutre). — Une ancre de marine accom-
pagnée de 2 homards en chef et d'un merlus en pointe.
Brest" 1878. — Parti de France et de Bretagne.
■N.
Ces armoiries sont propres à toutes les anciennes juridictions
royales de Bretagne. Pour la ville de Brest, elles ne doivent
pas remonter au-delà de 1681, date du transfert du chef-lieu de
la juridiction royale de Saint-Renan à Brest. La ville de Brest
n'a pas* d'armoiries particulières. Son origine est un château
qu'elle devrait .avoir dans ses armes.
Camaret (teinte neutre). — Une barque à voiles éployées
d'hermines accompagnée de deux étoiles en chef et d'une tour
en pointe.
2 •
— 18 —
Carhaix, 1696. — D'or au bœuf passant de sable. Ces
armes sonl brodées sur une dalmalique de héraut semée
d'hermines, conservée à la mairie de Carhaix.
Gh&teaulin, 1484. — Écu de Bretagne plein.
Au-dessus un saumon mis en fasce surmonté d'un château
à deux tours carrées (Sceau).
Château lin. — D'azur au château d'argent, girouette
d'or, accompagné en pointe d'un saumon d'argent mis en fasce.
«
Ch&teaulin, 1878. — D'azur au château d'argent gi-
rouette d'or.
Ch&teauneuf (teinte neutre). — Neuf tours.
Concarneau, 1669. — Écu de France plein. De chaque côté
une hache de gueules en pal soutenue d'une hermine (Sceau).
Concarneau, 1696. — D'argent à 3 haches de gueules en
pal 2 et 1 .
Le Conquet (teinte neutre). - Une tour crénelée accom-
pagnée de 2 ancres de marine en chef et d'une coquille en
pointe. — En 878 descente des Normands au Conquet. En 1207
les partisans de Jean sans Terre bâtirent un fort château
auprès du Conquet, qui fut rasé en 1218 par Pierre de Dreux.
Crozon et Porzay, 1526. — D'or au lion morné de sable
(Léon) ; hors de l'écu trois macles d'or, une au-dessus et une
de chaque côté (Rohan). — (Sceau) .
Daoulas, 1580. — D'or au lion morné de sable (Léon) ;
3 macles de chaque côté et hors de l'écu (Rohan). — (Sceau).
Douarnenez (t iute neutre.) — Une tour crénelée sur un
rocher entouré d'eau, accompagnée de 3 sardines mises en fasce,
deux en chef et une en pointe.
Le Faou. — D'azur au léopard passant d'or (Sceau).
Fouesnant. — ue sable h une aigle éployée d'argent
becquée et membrée de gueules* Fouesnant était le chef-lieu
— 19 —
d'un Pagus ou pays de l'archidiaconé de Cornouaille (Pagus
Fumant). — (P. de Courcy).
Landerneau, 1666. — Écartelé aux 1 et 4 d'or au lion
morné de sable ; aux 2 et 3, de gueules à 9 macles d'or,
3, 3, 3 (G. Le Borgne).
Landerneau, 1696. — D'azur au vaisseau équipé d'or sur
des ondes d'argent, portant à ses 3 mâts un pavillon, aux
armes de Rohan h senestre, de Bretagne au grand mât et de
Léon à dextre (Arm. gen 1 .).
Landivisiau, 1482. —D'or au lion morné de sable (Léon),
l'écu entouré de macles d*or (Rohan). — (Sceau).
Eanmeur, 1567.— D'hermines plein, l'écu supporté par
2 hermines rampantes.
Lanmeur, 1666. — D'argent à la fasce de gueules accom-
pagnée de 3 hermines de sable (Guy le B. dans P. de Courcy).
Lannilis. — D'azur à 3 macles d'or, 2, 1 (de Courcy).
Lesneven, 1480. — Écu d'hermines plein. Au-dessus un
sanglier passant (Sceau).
Xesneven. — D'or au sanglier passant de sable, au chef
cousu d'hermines.
Iiocronan (teinte neutre). — Une mitre posée sur une
crosse et accostée de deux navettes.
Morlaiz, 1340. — Écu de Bretagne plein. Au-dessus un
lion passant (Sceau).
Morlaix. — D'or au lion morné de sable, au cher cousu
d'hermines.
Morlaiz, 1400. — Écu de Bretagne plein. Au-dessus une
chèvre passante (Sceau).
Morlaix. — D'azur à la chèvre passante d'argent, ac-
cornée et onglée d'or, au chef d'hermines.
Morlaiz, 1878. — D'azur au navire équipé d'or voguant
sur des ondes de même, aux voiles éployées d'hermines.
— 20 —
Pont-Aven (teinte neutre). — Un pont accompagné de
3 annilles ou fers de moulin, 2 en chef, une en pointe.
Pont-Croix. — D'azur au lion rampant d'argent (Sceau).
Pont-1'Abbé, XV e siècle.— D'or au lion de gueules (Sceau).
Quimper, 1452. — Ecu de Bretagne plein. Au-dessus un
cerf passant à senestre la tête contournée (Sceau).
Quimper (Gui le 6.) — De gueules au cerf passant d'or,
au chef de France (armes antiques).
Quimper, 16:26. — Ecu] d'hermines plein (de Bretagne)*
Au dessus un mouton passant (Sceau).
Quimper, 1666. — D'azur au mouton passant d'argent
accorné et ongle d'or, au chef d'hermines (G. Le Borgne).
Quimperlé, 1518. — Ecu de Bretagne plein. Au-dessus un
lévrier passant. Le lévrier n'est pas bien déterminé, c'est
peut-être une hermine passante mais sans volets (Sceau).
Quimperlé. —De gueules au lévrier d'or, au chef d'her-
mines.
Quimperlé, XVII e siècle. — D'hermines au coq de gueules
membre, barbé et crété d'or (1).
Roscoff. — D'azur au navire équipé d'argent flottant sur
des ondes de même, les voiles éployées d'hermines, au chef
d'hermines (P. de Gourcy).
Rosporden (teinlre neutre). — Écartelé de France et de
Bretagne.
Saint-Pôl-de-Léon, 1666. — D'or au lion morné de
sable tenant une crosse de gueules de ses pattes de devant
(G. Le Borgne).
Saint-Pôl-de-Léon* 1666. — D'hermines au sanglier de
(I) Le lévrier et l'hermine ont un corps plus ou moins cambré.
On comprend que dans une empreinte de cire mal faite ou les pattes
n'étaient plus visibles, ont ait pu prendre pour les débris d'un coq
ce qui restait de l'un ou de l'autre de ces animaux.
— 21 —
sable accolé d'une couronne d'or, le sanglier dressé en pied
soutenant une lourde gueules au canton dexire (G. Le Borgne).
Saint-Renan, 1463. — Écu de Bretagne plein. Au-dessus
un cheval passant (Sceau).
a Le territoire est abondant en grains et fourrages ; les che-
vaux qu'on y élève sont forts et vigoureux (Ogée). » La juridic-
tion royale fut transférée à Brest en 1681.
Saint-Renan. — D'or au cheval passant de sable, au
chef d'hermines.
À la suite de cette lecture, M. Pavot et quelques
autres membres font observer que l'on trouve en
abondance, dans les schistes micacés des environs
de Rohan, une cristalisation qui ressemble exactement
à la macle héraldique.
M. Faty ajoute qu'il y a dans le même pays, une
espèce de truite dont le corps est couvert d'empreintes
semblables.
M. de Bremond d'Ars demande ensuite la parole
pour compléter la communication qu'il a faite au
mois de janvier dernier, sur la fontaine de Saint-
Léger.
LA FONTAINE DE SAINT- LÉGER EN MEC.
Dans le Bulletin du mois de janvier dernier, on a parlé de
la fontaine de Saint-Léger, située dans la paroisse de Biec. Qu'il
nous soit permis d'en dire encore quelques mots.
Nous faisions part, dernièrement, à notre savant président
de certains doutes sur l'identité du patron de la fontaine
de la Porte-Neuve ; est-ce bien saint Léger, l'évêque d'Au-
lun, ou bien un autre saint de même nom, malgré l'assertion
du bréviaire du diocèse qui en fait mémoire, et mal-
gré les cantiques bretons en l'honneur du saint bourgui-
gnon ? M. le vicomte de la Villemarqué nous révéla alors l'exis-
_ 22 —
tence d'un saint irlandais nommé Léodegard, qui nous était in-
connu, ou du moins que l'on ne trouve pas mentionné dans
les Bollandisle3. Est-ce pour celte raison que les habitants du
pays en parlant de saint Léger disent toujours sont Layerd,
sant leyerd ? Or, le nom de Layard, fort connu et usité en
Angleterre, est-il lui-même un diminutif de Léodegard ? Quand
vivait ce saint irlandais? Serait-il venu dans nos contrées avec
quelqu'une des émigrations galloises ? — La plupart des noms
des habitations voisines de la fontaine de Saint-Léger sont d'ori~
gine irlandaise, Kergall % Keryquel, etc.— On invoque spéciale-
ment saint Léger pour la guérison des paralytiques, des boi-
teux, des jeunes enfants faibles et ne pouvant marcher seuls.
A-t-on voulu trouver une allusion favorable dans le nom du
saint? — Non, nous répondit notre érudit président, — car
léger de corps se dit skan en breton.
Mais voici qui peut bien répondre à l'objection. Dans l'his-
toire de l'évêque d'Autun par dom Pitra, nous lisons,
page 407 : « Invités par le roi Salomon de se retirer dans
• l'Armorique à l'approche des Normands, les moines de Saint-
« Maixent (en Poitou) avaient transporté dans l'église de Saint-
« Sauveur de Rennes le corps de saint Maixent et de saint Lé-
« ger. La première tempête passée, ils s'en retournent à
« leurs anciennes cellules, et reprennent sur leurs épaules tes
« ossements de leurs pères déposés dans une châsse d'ivoire ;
« ils arrivent avec un grand labeur aux bords de la Loire. Les
« moines, effrayés des ravages croissants des Normands, s'en-
« fuient en Arvernie et déposent les corps dans une petite
a chapelle, à Ebreuil. » — Circà 856-87U (Scriptura de corpore
S. Leodegarii, quomodo ad Ebroïlum venerit. Ex. ms de Delà-
mare, apud Bolland.)
Les reliques de saint Léger, évêque d'Autun, sont donc ve-
nues en Bretagne au IX e siècle. Ne peut-on pas supposer, sans
trop d'invraisemblance, que dans l'un de ces longs et pénibles
voyages, les moines fugitifs, porteurs du dépôt sacré, ont bien
pu passer daus notre voisinage, soit en allant à Rennes, soit en
/
— 23 —
retournant s'embarquer sur la Loire P Dom Pitra le dit lui-
même : t ils arrivent avec un grand labeur aux bords de ee
fleuve », ce qui donne à penser que, durant ce long trajet, il
leur fallut faire de fréquentes baltes, de nombreux détours.
La paroisse de Riec est située sur une voie romaine qui
venait de Carbaix et aboutissait à la Porte-Neuve. Est-il impos-
sible, disons-nous, que les pieux fugitifs, en sortant de Rennes,
aient élé obligés de se détourner de la route directe pour
venir dans le Léon et la Cornouaille, en suivant les divers et
nombreux embranchements de voies romaines alors existantes f
Ils devaient diriger leurs pas du côté des monastères où ils
étaient certains de trouver l'hospitalité. Landévennec possédait
alors une abbaye renommée; ils ont pu s'y rendre, puis
descendre vers Riec et aborder près de Bélon où se trouvait un
petit port. Accueillis avec un respectueux empressement par
les habitants de la contrée, n'ont-ils pu leur donner, par
reconnaissance, quelques parcelles des précieuses reliques ?
Et le saint irlandais, nous dira-l-on. — Comment concilier les
deux traditions ? — On le peut,si Ton prouve que le saint irlan-
dais a précédé le saint bourguignon ; car le premier était peut-
être l'objet de la vénération des habitants de Riec avant le
IX e siècle ; et, après le passage des reliques de saint Léger
d'Autun, les deux traditions se seront confondues. Des deux
saints de même nom, le plus célèbre aura fait oublier le moins
connu. — A la vérité, ce sont là de pures hypothèses que
nous soumettons à l'examen de nos confrères, plus compétents
que nous en fait d'histoire locale, et plus au courant de l'idiome
du pays de Cornouaille.
M. Le Men nous a rappelé, à ce sujet, qu'un évêque deDol,
saint Leucher (sanctus Leucharius) contemporain de l'arche-
vêque saint Samson, vivait au VI e siècle, et que, depuis celte
époque reculée, le nom de ce saint a pu subir diverses trans-
formations selon les idiomes des localités où son culte avait
été établi : de Leucher à Léger* Leyer, la transition est facile.
Ce saint aurait-il été' vénéré dans le diocèse de Cornouailles?
— 24 —
Nous ne pouvons l'affirmer.
En résumé, nous avons voulu tout simplement chercher
l'origine et l'explication de celte façon de prononcer le nom de
saint Léger, et nous rendre compte de l'époque à laquelle
remontait le culte du saint particulièrement honoré dans le pays
que nous habitons. Beaucoup d'archéologues se laissent souvent
entraîner par des erreurs d'imagination. Le moindre doute, un
mol différemment interprété, leur suffisent pour changer tout un
système de chronologie. Ne les imitons pas; jusqu'à preuve certai-
ne du contraire, reconnaissons dans l'un des principaux patrons
de la paroisse de Riec, le grand évoque d'Àulun, le défenseur de
la foi chrétienne et de l'autorité royale contre l'arabilieux Ebroin.
D'ailleurs, une autre paroisse bretonne, celle de Quimerc'h,
dans le canton du Faou, arrondissement de Château lin, honore
le même saint évoque depuis un temps immémorial. Elle pos-
sède une ancienne chapelle où se célèbrent deux pardons : l'un,
plus solennel, le 3° dimanche de mai, et le petit pardon, le
lundi de la Pentecôte. Ces deux fêtes réunissent un grand
nombre de fidèles. Avant la Révolution, la chapelle recevait de
généreuses offrandes et jouissail de plusieurs propriétés qui
ont été confisquées. Son revenu était de quinze cents écus,
comme le constatent les anciens registres de la fabrique.
Une fontaine, voisine de la chapelle, attire — comme celle du
bois de la Porte-Neuve — une foule de pèlerins qui viennent de
fort loin y chercher — par l'intercession de saint Léger — la
guérison de leurs maux, principalement des douleurs rhumatis-
males. On invoque aussi saint Léger pour obtenir la grâce
d'une bonne mort et la résignation dans les épreuves de la vie.
La chapelle est vaste, et, relativement, en assez bon état de
conservation, bien qu'elle ait grand besoin des réparations qui
n'ont pu être continuées, malgré le zèle et le dévouement du
recteur de la paroisse, M. l'abbé Kerivel.
La chapelle de Saint-Léger, en la paroisse de Quimerch, est
bien plus ancienne que la vieille église paroissiale, — nous dit
encore le recteur — elle possédait autrefois des reliques, mal-
-25-
heureusement perdues, au grand regret des pieux pèlerins qui
se contentent maintenant de baiser respectueusement une an-
tique image du saint vénéré depuis tant de siècles.
H. Le Mou nous apprend encore que la chapelle de
Saint-Léger en Riec n'était pas moins riche en offrandes de toute
nature. Elle payait, autrefois, en décimes et en don gratuit, le
double de ce que payaient les autres chapelles de la paroisse.
On nous pardonnera ces longues réflexions au sujet de la
chapelle et de la fontaine de Saint-Léger : et c'est pour nous
le cas de nous excuser en répétant le vieil adage : chacun
prêche pour son saint.
La séance est levée à quatre heures.
Le Secrétaire,
R.-F. LE MEN.
— 26 —
SÉANCE DU 28 SEPTEMBRE 1878.
Présidence de M. DE LA VILLBMARQUÉ,
MEMBBE DE L 'INSTITUT.
Etaient présents : MM. de la Villemarqué, président,
Audran, vice-président, de Saint-Luc, Bourassin/ de
Brémoy, de. Kercadio, Pavot et Créac'hcadic.
M. le Président (déclare la séance ouverte, et pré-
sente les excuses de M. Le Men que son état de santé
empêche d'assister à la séance. En l'absence du secré-
taire, M. Créac'hcadic est prié d'en remplir les fonc-
tions.
M. de la Villemarqué donne lecture à la Société de la
communication suivante de M. Le Men, relative aux
Chouans.
DéRONCIATION.
• Je soussigné, X..., électeur du Finistère, ex- procureur-
général syndic de la Commission administrative du déparle-
ment à Landerneau, déclare qu'étant dans l'intention de me
présenter aux autorités constituées pour leur donner des rensei-
gnements qui peuvent déjouer les manœuvres des ennemis de
la République, je me suis mis en route, sans armes, ce 27°
fructidor de la 3 e année républicaine, pour me rendre en la
ville de Quimperlé et j'ai rencontré environ midi, une colonne
mobile des défenseurs de la Patrie lorsque j'étois décoré de la
cocarde nationale et tricolore, et accompagné de la citoyenne
Z. . ., mon épouse. A l'approche de cette colonne nombreuse,
je me suis détourné de quelques pas du chemin pour m'asseoir
dans la lande voisine du bourg de Sainl-Thurien, et lorsque les
volontaires sont venus à moi je leur ai témoigné le désir que
j'avois de faire connoître à leur commandant des choses jmpor-
— 87 —
tantes que je comptais dire aujourd'hui à Quimperlé et que je
lui ai sur le champ détaillées avec franchise et vérité de la
manière suivante, après qu'il m'a donné sa parole d'honneur
qu'il ne me seroit pas fait de mal. En conséquence, nous
nous sommes un peu écartés et je lui ai dit que le s
émigrés réunis aux chouans du Morbihan, ayant appris
que je m'étois soustrait par la fuite, aux persécutions
de Robespierre et de ses partisans, me menacèrent de me
tuer si je ne promettois pas de me joindre à eux lorsqu'ils
s 'établiroient dans le Finistère, et ils me forcèrent de recevoir
de leur part un papier par lequel ils me nommoient commis-
saire pour leur acheter des bestiaux quand Ils s'organiseroient
è demeure dans les parages où je me trouvois. Ils ne se sont
pas encore organisés, et ma commission n'a point eu d'effet.
Elle me fut remise il y a sept mois. Ne recevant aucune nouvelle
de moi, on m'écrivit en prairial dernier pour m'oiïrir une
autre place de commissaire pour la levée des rentes
nationales qu'ils disoient vouloir confisquer à leur profit
dans le canton de M el 1er and ; je [n'ai rien répondu,
et mon silence exprimoit mon refus d'acceptation. Enfin,
hier au soir ils revinrent à la charge et m'enjoigni-
rent de prendre des assignats qu'ils disoienl bons et qui m'ont
parus faux. Je les déclarai tels au citoyenlBcllot, commandant
de la colonne mobile, et je les lui représentai pour être
déposés et annexés à ma déclaration. Il yen a 17 de 250 livres,
deux de 125 et un de 10 faisant en tout un total de 4,510 li-
vres ; ils m'étoient remis pour acheter des bestiaux destinés à
subsistance d'une force armée qui passeroit incessamment du
Morbihan dans le Finistère. Ceux qui me les donnèrent ne
m'étoient pas connus auparavant ; ils étoient au nombre de
quatre : l'un nommé Poulpiquet, dit Sans-quartier, de Quim-
per, émigré rentré à Quiberon, transféré à Lorienl el à Henné-
bond d'où il s'est évadé ; il servoit dans la légion de du
Dresnay sous le titre de Loyal émigrant ; le second étoit
Dampherné, fils aine cy-devant noble de la commune de
!
. — 28 —
Kernével, district de Quiiuperlé, il porte le surnom d'Aimé ; le
troisième étoit un nommé Durand, cy-devant noble des environs
de Vannes,et le 4* se nommoit Samson, dit Sans-soucy, de Gui-
mené et lieutenant du canton de Lorient. Poulpiquet est âgé
de 18 ans, taille de 4 pieds 10 pouces, figure blanche et large,
portant un habit gris h longue taille et un pantalon moitié cuir
et moitié en étoffe; ilétoit armé d'un pistolet d'arçon qu'il tenoit
à la ceinture, et avoit un chapeau rond. Dampherné étoit vêtn
d'une carmagnole de couettis à rayes blanches et bleues avec
un pantalon brun ; sa taille est de 5 pieds 5 pouces* il a 18 ans
et demi, figure allongée. Durand âgé 'de 20 ans, porte une
veste courte, verte, avec un pantalon brun, chapeau rond ;
il a S pieds 3 pouces, figure maigre et bazanée ; ces deux der-
niers avoient des, fusils anglais à un coup. Sans-soucy, ou
Samson, avoit une petite veste grise avec des boutons blancs à
fleur de lys, un pantalon de toile rousse ; sa taille est de
5 pieds 6 pouces, figure large et marquée de petite vérole*
portant un chapeau rond ; il est âgé de 37 ans et armé d'un
tusil à deux ^coups. »
« Ils m'annoncèrent qu'ils passeroient le même soir la
rivière d'Ellé pour arriver du côté de Plouai ; ils m'engagèrent
à les accompagner, ce que je refusai ; mais pour m'en débar-
rasser je leur dis que j'irais les rejoindre une autrefois. Leur
rassemblement dans ce canton, est proche le bourg de Plouai,
dans des maisons qu'ils m'ont fait connoltre Tune sous la déno-
mination du Désert et l'autre, de l'Espérance ; j'ai seulement
entrevu dans leur conversation, que ce pouvoit être les cy-
devant manoirs de Kerdréo et de Melliens ou de Pluvier. Ils y
sont une trentaine tant émigrés qu'officiers de Bonfils, chef de
ce canton ; l'un se nomme Sauve-Plane, émigré gascon qu
commandoil le camp de Jalès, les autres sont les deux Dam-
pherné, fils, dont le plus jeune s'est surnommé Royal-carnage ;
il y a aussi un nommé Sansonnet, et Peuron, dit Pyvert,
marchand de Pontivy. Sauve-Plane est vieux, et Peuron est de
taille de 5 pieds 1 pouce, figure bazané, âgé d'environ quarante
ans. »
— 29 —
t
« Ils tn'out dit que leur retraite étoit pratiquée dans ce
qu'ils appellent des caches \ ils m'ont fait entendre que ces
caches èloienl faites sous les escaliers où il y avoit auparavant
de petites caves ou caveaux ; on a maçonné les portes d'en-
trée, et on s'y réfugie en levant une planche des marches
d'escalier. Ils m'ont indiqué le cabaretier de Ponlulaire pour
me faire parvenir dans leur refuge. Ils ont ramassé trois bois-
seaux de poudre prise au Ponl-de-Buis \ leur projet étoit de
revenir dans le Finistère sous quinzaine, avec cinquante émi-
grés ou officiers de chouans qui employeroient tous les moyens
qui en imposent à la crédulité des campagnes, pour entraîner
le département du Finistère dans leur parti. J'ai remarqué que
leur ressource n'est pas grande ; tout se réduit à une petite
quantité d'officiers dans chaque canton où ils restent cachés.
Les simples chouans sont des cultivateurs qui ne marchent
qu'à regret ; on les réunit à jour marqué pour intercepter les
convois de vivres et les communications sur les grandes rou-
tes d'un district à l'autre ; après cela, chacun cache son fusil
et retourne à ses travaux champêtres, de sorte, qu'il n'existe
plus de grands rassemblemens, et la force nationale s'épuise
en marches et fouilles inutiles pour les découvrir. Tout sera
fini en détruisant les caches où logent les conspirateurs; on ne
connaîtra plus de chouans ; il n'en a point été organisé jus-
qu'à présent daus le Finistère, et si l'on adopte les moyens
dont je puis faciliter moi-même le succès ailleurs, on en verra
bientôt la fin partout. Ils s'avertissent et se rassemblent au
moyen d'un son de corne. »
« Lantivy, ci- devant noble, est chef de canton à Lominé;
c'étoil lui qui commandoit les chouans lorsqu'ils pillèrent le
magasin à poudre (du Pont-de-Buis ; on le trouve souvent
dans le manoir de Lantivy, près Lominé*
« Jean-Jean, chef de canton de Mellerand, réside au bourg
de Mellerand dans une maison vis-à-vis l'église, avec Duclos,
prêtre refractaire; il a pour capitaines, le nomme André,
cultivateur de la paroisse de Bubry, et le fils de l'ancien maire
— 30 —
de Keringar. 11 commandoit la descente des chouans débar •
qués de Quiberon à Pont-Aven. »
« Ducbélas, dit La Couronne, ci-devant gentilhomme
résidant ordinairement au manoir du Reste, en la paroisse de
Langoêlan ; son épouse est en surveillance à Lorient. H est
accompagné du curé réfraclaire de sa paroisse, et d'Hyacinthe
Geslin de Quimper et de du Leslay, dit Dolbel, de Rostrenen,
émigrés rentrés. Il est chef du canton de Guiménée. Ce bourg
a été pris une fois par Jean-Jean qui enleva six canons qu'il fit
conduire à la Vendée. »
« La fille de Lannivon, ancien procureur fiscal, demeurant
au bourg de Guiménée, fait les cocardes blanches portant
pour inscription : Vive la religion, vive le roi, avec deux cœurs
en broderie, surmontés d'une croix. »
« Les cordonniers de Guiménée sont en réquisition pour
fournir des chaussures aux chouaas. »
« Les capitaines de Duchélas sont : Duparc, dit le Terrible,
qui se retire souvent au cy-devant château de Pont-Callech,
en Berné; Horgant, dit Hagloire, Hylhridate, neuveu du
recteur réfractaire ; ou les trouve souvent chez Yves Juguet de
Plouhibet, en Berné. »
« Dandigné, ci-devant nrible, est capitaine et demeure en
son ancien manoir en la commnne de Saint-Thudal. Son
lieutenant se nomme Juthar, jeune marin déserteur qui se
réfugie chez le recteur au bourg de Prigeac (Priziac). »
« Le Clech, notaire du bourg de Langonnet, est capitaine
du même canton. »
« Tous ces cantons dépendent et reçoivent les ordres de
l'armée du Morbihan, dont le quartier général est à Grand-
champ ; elle est commandée en chef par le général Georges,
successeur du prétendu comte d'Essy, tué dans un combat. »
« L'armée des Côtes du -Nord* a son quartier général à
Bréhand-Hontcontour ; elle est commandée par le général
Le Veneur de la Roche, successeur de Bois-Hardy. »
« Ses chefs de canton se nomment : Bernard, ancien pro-
— 31 —
cureur du bourg d'Uzel, il a pris le surnom de Ton Ion ;
Keranflech est chef du canton de Mesle-Pestivien et demeure
en son ancien manoir près Callac ; il a.pour capitaines Berricol
fils, secrétaire de la municipalité de Kergrist, et le gendre de Le
Clec'h, notaire, demeurant au bourg de PIounévez-Quintin. »
a On m'a dit que le cy-devant chevalier de Tinleniac avoit
obtenu en Angleterre le titre de général des chouans qu'il len-
teroit d'organiser dans le Finistère. 11 revint de Quiberon en
descendant à Sarzeau avec des chouans du Morbihan, armés
de fusils anglais et habillés de rouge avec] soubastement
blanc ; il se porta sur Quintin, et fut tué l par un grenadier
auquel il crioit de se rendre. »
« On a formé dans chacun des cantons où les chouans sont
organisés, un conseil civil composé de Irois membres qui sont
prêtres réfraclaires ou émigrés rentrés ; ceux du canton de '
Hellerand sont les recteurs réfractaires de Hellerand et de
Bubry, et le nommé Kersally, ci-devant noble, demeurant à
Bubry. Ils règlent les marchés et dépenses militaires, ils cor-
respondent avec l'armée do leur département qui leur transmet
directement les ordres de Charrette ; celui-cy reçoit ses dé-
pêches, armes, munitions et finances de l'Angleterre qui pa-
roît tenter de rétablir un roi en France et seconder les pré-
tentions extravagantes des émigrés. »
a Ce système n'est pas difficile à déranger. On m'a dit que
l'Angleterre ne feroit pas décendres ses troupes sur les terres
françaises ; on compte seulement y débarquer le cy-devant
comte d'Artois avec la légion de Rohan qui n'est que de trois
mille hommes ; mais celte descente projetée n'anra pas d'exé-
cution si l'on prend les mesures nécessaires pour annéantir les
émigrés rentrés et les chefs des chouans ; ceux-cy ne deman-
dent pas mieux que d'en être débarrassés, et j'offre de faciliter
leur destruction, en peu, si L'on m'associe à la force qui doit
les combattre. L'essentiel est de les découvrir, et on y par-
viendra aisément en se ménageant dans leurs campagnes, où
ils ne sont pas aimés, des intelligences assurées qui les feront
— 38 —
capturer immanquablement ; les simples chouans ne seront
plus forcés de marcher ei ils resteront tranquilles dans leurs
foyers ; alors les armées de Grand-champ et de Bréhand*
Moncontour qui ne sont guère nombreuses, se replieront sur
celle de Gharelte, vers Nantes, ce qui ne formera pas en tout
dix mille hommes qui attaqués.: » {Cetera désuni.)
Voici deux titres qui se rapportent au hardi coup de main
du Pont-de-Buis, mentionné dans l'acte précédent.
Rapport relatif aux chouans. — « Ce jour vingt neuf prai-
rial» partant de Pleiben pour venir à Quimper , j'ai rencontré
entre six et sept heures du malin, à environ une lieue du bourg
de Pleiben, près le pont dit Cobleng, trois ouvriers habillés à
la mode de Briec, lesquels m'ont déclaré avoir été arrêtés par
sept à huit cens hommes armés de fusils à deux coups et de
pistolets à leurs ceinturons ; que ces hommes paraissoient fu-
rieux parce qu'on leur avait tué trois ou quatre hommes qui
étoient, allés chercher des vivres dans quelques villages de
Gouezec, et qu'ils avaient encore arrêté deux ou trois hommes
de Pleiben, qui venaient à Quimper avec des chevaux. D'après
le rapport de ces hommes, je n'ai pas voulu poursuivre ma
route et j'ai rétrogradé pour gagner le grand chemin de Châ-
teaulin où j'ai rencontré le commandant de la force armée à
qui j'ai fait verbalement le même rapport que ci-dessus. •
« MOTREFF. »
Rapport relatif aux chouans. — « Ce jour 29 prairial an 3,
vers les trois heures de l'après-midi, !e citoyen Kerincuff, invité
k passer à l'administration pour communiquer les renseigne-
ments qu'il devait avoir reçus concernant l'apparition de
chouans à Briec et l'assassinat qui y a été commis, a disque
* le matin de ce jour, il lui était venu deux cultivateurs dont
un du bourg de Trégourez et l'autre de la commune de Briec;
qu'il en tenait qu'étant hier audit Trégourez, il y arriva epviron
cent hommes qui fouillèrent toutes les maisons pour avoir des
— 33 —
arme9 ; que, partis dans l'intention d'approcher de Quimper
où ils avaient une assignation pour aujourd'hui, ces deux cul-
tivateurs se trouvèrent au milieu d'une troupe d'hommes
armés, d'environ 800 ; qu'on leur ôla aussitôt leurs cocardes
et qu'ils entendirent deux autres dire : « Puisqu'ils vont du côté
de Briec il vous serviront de guides » ; que ce? deux derniers
leur parurent de Leuhan, mais que tous les autres étaient ha-
billés à la mode de Vannes et qu'ils parlaient très-mauvais
breton ; tous d'ailleurs à pieds, à l'exception d'un seul qui
semblait le .commandant et qui était à cheval ; que chemin
faisant cette troupe fut rejointe par une autre venant du côté
de Çorray, et composée de 100 hommes à peu près, portant
des fusils de munitions ; que dans le temps de celle réunion
il avançait un pareil détachement du côté d'Edern ; qu'ayant
é[é renvoyés par celte troupe avant d'arriver à Briec, ils igno-
raient ce qu'elle y avait fait, qu'ils avaient seulement entendu
qu'elle avait assassiné le curé de celte commune et ensuite
pris la route de Châleaulin. »
a LeJGuillou'Kerincuff. »
/
M. Pavot , sous-intendant militaire, fait observer
qu'il a vu, dans les archives du Pont-de-Buis, des
titres faisant mention du pillage de la poudrière.
M. Audran, vice-président, invité par M. de la Ville-
marqué au Congrès de l'Association bretonne à Auray
et n'ayant pu y assister, lit des documents qu'il avait
recueillis pour le Congrès, sur les Institutions chari-
tables établies à Auray.
Ils seront publiés dans le Bulletin de la Société poly-
mathique du Morbihan, comme intéressant particuliè-
rement ce département.
Voici les matières qui y sont traitées : « Donation
en faveur des Carmes de Sainte- Anne. — Création d'une
3
~ 34 -
chapellenie à Noire- Dame d'Àuray en 1671.. — Fon-
dation d'une messe à l'église du Saint-Esprit. — Dona-
tion à l'église Notre-Dame du Cimetière à Auray, 17 jan-
vier 1765.
M. le Président exprime le regret que ce travail n'ait
pas été lu à la réunion du Congrès breton.
M. Audran donne ensuite communication de divers
titres relatifs à la fondation des Ursulines de Quimperlé,
faite en 1652, et dont voici le texte :
I
m
Lettes patentes du roi Louis XIV.
A nos chers et bien aimez officiers et habitons de la ville de
Quimperlé.
De pab le Rot.
Chers et bien aimez, notre très- chère et Irès-airaez tante
la Reine de la Grande Rretagne souhaittant que les Hères
Claude, et Jeanne des Anges, Religieuses ursurlines de Tréguier,
puissent établir un couvent de leur ordre dans notre ville de
Quimperlé, nous serions bien aise qu'en sa considération elles
aient cette consolation ; c'est pourquoy nous vous escrivons
cette lettre pour vous dire que vous aiez à permettre cet éta-
blissement sans souffrir qu'il y soit apporté aucune difficulté
ny retardement ; sy, ny faites faute, car tel est notre plaisir.
Donné à Saumur le vingt huitième février mil six cent cin-
quante et deux. Signé Louis.
II
Consentement de Paul de Gohdi, abbé i>e Sainte Choix
de quimpeblé.
Jean-François-Paul, par la grâce de Dieu et du Saint-siége
Apostolique, cardinal de Retz, archevesque de Corinlhe, coadju-
— 35 —
teur de Paris, damoiseau et souverain de Commercy-en-ville,
abbé commendalaire de l'abbaie de Quimperlé, et en cette qua-
lité seigneur tamporel el spirituel, nos très-chères et bien
aimées filles les Religieuses ursulines de Tréguier, nous ayant
fait suplier de leur vouloir accorder la permission de Vestablir
dans la ville de Quimperlé pour y faire baslir un monastère
afin de servir Dieu selon leur règle et leur institut et instruire
la jeunesse pour la porter à la piété et à la vertu, ayant pour
cet effet obtenu le consentement de monsieur TEvesque de
Cornouaille, et des habitans de ladite ville. A ces causes
désirans contribuer en tout ce qui nous sera possible, à un si
louable dessin, nous aurions consenty et accordé et par ces
présentes consentons et accordons l'eslablissement desd. Reli-
gieuses ursulines en la ville de Quimperlé ; leur ayant, en tant
qu'à nous est, donné et octroyé, donnons et octroyons pouvoir
et faculté de bastir en ladite ville leur dit monastère, et
acheter telles places qui leur seront nécessaires pour la cons-
truction d'icelluy, pour en jouir à l'avenir plainement et paisi-
blement ; et voulans que notre intention soit connue de tous,
les présentes seront enregistrées en notre justice de Quimperlé ;
mandons pour cet effet à nos officiers en ladite justice, chacun
en droit soit comme il appartiendra de faire led. enregistre-
ment et en délivrer tous actes nécessaires, sauf les droits
d'indemnité deubs à lad. abbaye, en vertu des présentes que
nous avons signées de notre main et fait contresigner par
notre premier secrétaire et apposer lessceau de nos armes.
Paris le vingtiesme jour d'avril mil six cens cinquante deux.
Le Cardinal de Rets,
Par Monseigneur : Gardon.
— 36 —
i m
Consentement des habitants de Quimperlé, et de l'êvêque
de Qdimpeb.
Extrait des Registres du greffe de la communauté de Quimperlé.
Du dixième jour de juin mil six cents cinquante deux, sur
les neuf heures du matin, assemblée des nobles, bourgeois, et
habitans de Quimperlé, tenue en l'Auditoire el Palais Royal
dudit lieu, après le son de la cloche à la manière accoutumée,
ou présidoit monsieur le Sénéchal, assisté de messieurs les
bailly, et procureur du Roy ; présents et assistant, Jacques
Gouttin ancien sindic et faisant pour l'absence du sindic.
Ledit sieur Couttin a dit et remontré qu'en l'absence du sieur
sindic de cette communauté, il a esté avisé que les révérendes
mères Claude, et Jeanne des Anges, religieuses ursulines de
Tréguier, désirant establir un couvent de leur ordre et obser-
vance, en cette ville, ont obtenu lettre du Roy pour cet effect,
et les consentement de monseigneur le cardinal de Rets, abbé
de l'abbaye Sainte Croix de cette ville, qui lui ont esté mis en
main, et une lettre de monseigneur le maréchal de la Meilleraye,
adressante à cette communauté, et une requeste que lesdites
Dames présentent à ladite communauté pour leur accorder
leur consentement aux fins dudit établissement! aux charges
et condition par exprès d'instruire et enseigner gratuitement
les filles externes qui voudront aller à leurs classes qu'elles
tiendront a cest effect, tant pour enseigner a bien connaître,
craindre et aimer Dieu, et rendre honneur et obéissances à
leurs parens, que pour les propriétés désirables aux personnes
do leurs âges et conditions, sans espérer ny demander 'récom-
pence, et sans vouloir estre à charge à cette communauté
ny prétendre aucune contribution, ny obliger ladite com-
munauté à aucune quesle pour leur nouriture et en-
tretien, ny même pour leurs bâtiments. Et à l'endroit
apparu : la lettre du Roy scellé du cachet, donné à Saumur
— 37 —
le vingt huitième févrierj 1652 ; le mandat de monseigneur
le Cardinal daté à Paris le vingtième avril 1655, et la lettre de
monseigneur le maréchal, datte à Nantes le 21 e octobre 1651,
et la requesle desdites Dames Religieuses, pour lesdits hahitans
arrester et délibérer sur icelle comme ils voiront. Sur ce que le
sieur sindic à dit n'avoir en main aucune connoissance que
monseigneur l'esvesqne de Quimper ail concenty audit esta-
blissement, ils ont délibéré d'en donner avis à sa Grandeur.
Un particulier à dit qu'elle esloit en cette ville et s'y estoit
rendue à ce sujet ; l'assemblée a député monsieur le bailly
accompagné de quelques anciens habitans, afin de le prier très-
humblement de se donner la peine d'entrer dans cette assem-
blée ; ce qu'aiant fait mondit seigneur Évesque, en sa présence
on fist lecture desdites lettres, consentemens, et requestes cy
devant mentionnées. Monseigneur l'évesque a dit qu'il- trouve
l'establissement des religieuses utille pour l'intérêt de cette
commnnauté, et qu'il permet et consent led. établissement sy
lesdits habitans le trouve bon, n'aiant autre intention que de se
conformer à leurs volontés.
Après quoi lesdits habitans, ayant délibérés, ont unanimement
suivant la lettre du Roy, consentement et permission des
mesdits seigneurs cardinal, évesque et maréchal, consenty et
accordé l'établissement d'un couvent de l'ordre et observances
desdites dames religieuses, en cette ville, pour icelles sy
establir quand bon leur semblera, aux charges expresses
cy- devant rapportées. Et pour passer l'acte et contract avec
lesdiles dames religieuses ou'autres deubment fondés en pouvoir
d'elle, ont nommés desputés de cette communauté, les sieurs :
Martial Veyrier, le vieil, Jean Briant, le vieil, Guillaume Le
Souffacher, Jan Moustel, Jan Le Gouriault, et Maurice Morice,
jointement avec mesdits sieurs les Sénéchal, baillif et procu-
reur du Roy, qu'ils ont prié d'assister audit contrat avec
promesse d'avoir agréable, ferme et stable ce qu'ils feront, et
n'en venir jamais contré. Seront lesdiles lettres et requeste,
— 38 —
enregistrées. Signées au registre : René Du Lonet, évesque de
Corn ou aille, Jau de Plunyé, séuéchal, Jan Le Flo, baillif,
Bonaveature Le Livec, procureur du Roy, Col lin, et du sous-
signé greffier, F. Durai. \
IV.
Consentement de i/évêque de Tréguier.
Baltazar par la grâce de Dieu et du saint Siège, évesque et
comte de Tréguier, à notre très-chère fille la mère Claude des
Anges, religieuse professe et cy-devant supérieure du couvent
des Ursulines de Tréguier, salut. Ayant veu par l'extrait des
registres de la maison de ville de Quimperlé, du dixième jour
de juin mi! six cents cinquante et deux, le consentement de la
communauté dudit Quimperlé, donné ;en présence de monsei-
gneur l'illustrissime et révérendissime évesque de Cornouaille,
avec l'approbation et permission dudit seigneur évesque, pour
rétablissement d'un Icouvent de votre ordre en ladite ville de
Quimperlé, nous vous permettons de vous y transporter pour
cette fin, accompagnée des mères Jeanne des Auges et Marie
de saint Joseph, de sœur Céciles, religieuses de chœur, et de
sœur Jeanne de saint Marc, religieuse converse, toutes pro-
fesses dudit couvent de Tréguier, sous la conduite et direction
du vénérable et discret messire Jean Duval, docteur en théo-
logie, chanoine et théologal de notre église cathédrale. Et
ayant égard h votre louable conduite et expérience aux choses
de la religion, nous enjoignons audictes religieuses, vous recon-
naisse pour supérieure et de vous obéir en cette qualité. Et
attendu la longueur eU difficulté du chemin, nous laissons à la
discrétion dudit sieur théologal, de vous y conduire par le
chemin qu'il trouvera plus facile et plus commode, priant Dieu
qu'il favorise de ses grâces votre établissement en ladite ville
de Quimperlé, et vous donne à toutes sa sainte bénédiction.
Fait à Tréguier en notre palais épiscopal, ce sixième jour de
— 39 —
juillet mil six cent cinquante et deux. Baitazar, évêque et
comte de Tréguier.
Par commendement de mondit seigneur: Fiacre Nouel,
En verlu de toutes les susdites pattantes, nos révérendes
mères fondatrices se rendirent en cette ville, le quatorze de
juillet mil six cent cinquante deux, se logeant dans une maison
à loyer les premières années, n'aiant aucune fondation que
celle de la divine Providence, leur temporel consistant dans un
revenu de pension viagère de la somme de trois cents quatre
vingt livres.
Dans la suite de quelques années, elles reçurent des sujets
dont les dots furent employez à acquérir une maison avec
quelques héritages adjacents, jusques la valeur de la somme
de quinze mil livres, dans le dessein de s'y établir ; mais s'y
estant trouvez incommodées, tant par le voteinné des rivières
que du peu d'espace pour y construire leur couvent, elles furent
obligées de faire achapt d'un lieu appelé Bellair, et d'autres
pièces de terre y joignant, pour la somme de neuf mil livres, où
est bâtie le monastère où nous sommes présentement, pour
lequel on a consommé tout ce que Ton a eu de dot en argeant,
avec le prix de leur maison qu'elles ne purent vandre que sept
mil cent livres.
Dix ans après nous estre logée dans notre nouveau monastère,
la main du Seigneur s'appesantie sur nous, nous affligeant par
une incendie quy le consomma avec nôtre église, comme
vériffie le procès-verbal quy suit.
« Ce jour dix neufième février mil six-cent quatre-vingt quatre,
sur les deux heures de l'après-midy, nous Charles Lohéac,
conseiller du Roy et son bailly au siège roya\e de Quimperlé,
savoir faisons : que nous nous serions rendus en compagnie de
Charles Mouton, clerc au greffe de ladite Cour, jusqu'au mo-
nastère des religieuses ursulines de cette ville de Quimperlé
suivant la réquisition que nous avoit fait dame Françoise Seré,
k
— 40 —
dite de l'Apsomption, supérieure audit couvent, et aux fins de
sa requesle] laquelle nous auroit présenté le dix-septième de
ce mois, et aux fins de notre ordonnance estant au pied, por-
tant assignation à ce jour et heur, pour estre fait procès-
verbal en notre présence de l'état dudit monastère qui aurait
estié incendié. Et y estant rendue, ladite dame supérieure aurait
fait comparoir, Jullien Chapelle, dit Pecloso, maître raasson,
Mathieu Le Roy, couvreur fd'ardoise, et Jacques Galiot, cer-
rurier, pour recevoir leur rapport sur l'état du bâtiment ;
lesquels après avoir prêté le serment de dire vérité, nous ont
raporté : que dans un pavillon du côté levant, à trois estage
où il y avait des voûtes, au premier estages tout a esté insen-
dié et brûlé, et qu'il n'y est resté que les murailles; que dans
l'esle droit du bâtiment du cotlé de l'oriant, à quatre estages
de hauteur, tout à esté pareillement incendié, et qui ni est
resté que les murailles sans portes» fenestres, ni couvertures;
et nousa déclaré ladite dame supérieure, que dans cette endroit
de batuiment il y avait le grand parlouer, la classe, les gre-
niers, la cuisine et huit chambres de religieuses. »
« Que dans le corps du bâtiment jusqu'à l'esglise du cotté du
nort, contenant quatre estages, il y avait six parloirs, les tours
de la maison, la sacristie, la chapelle de Saint- Joseph, le
haut chœur et douze chambres, et des greniers où estoient
les provisions de la maison ; lequel bâtiment nous ont lesdit
Chapel, Le Roy et Galiot dit et fait voir qu'ils étaient entière-
ment brûlé sans aucunes portes, fenêslres, charpante ny cou
verture, et qu'il n'y est resté que les murailles endommagées
en plusieurs endroits par l'effort du feu.
Que l'église est entièrement consommée sans autre reste
que les murailles ; que sur ladite église, il y avoit un dôme
à trois étages avec une piramide garny de plomb ; que sur le
précédent bâtiment il y avait un autre dosme et une cloche;»
lesquelles dômes et cloche ont esté tous consommés. »
« Que la couverture des cloislres est entièrement perdue et
J
— 41 —
desfait, comme aussi plusieurs lambris qui y estoient ; que la
couverture du cœur jusqu'au dernier dosme qui est resté,
à été entièrement démoly pour arester le feu, et qu'elle
n'a esté rétablye que par ledit Roy depuis l'incendie, qui nous
ont dit estre arrivée le vingt neufvieme décembre dernier mil
six cent quatre vingt trois. »
Et nous ont aussy déclaré et fait voir que les fenestres et
les portes du peu de bâtiment qui est resté, ont esté cassé et
démonté, et que la plus grande partie des meubles que l'on a
peu sauver ont esté entièrement cassé et brisés pour avoir esté
jettes par l'abondance dn peuple qui vint pour arester le feu.
Et ont lesdit Cbapel, Le Roy et Galiot, affirmé leurs susdits
raports véritables, et ont déclaré ne savoir signé ; et nous
déclare, ladite dame supérieure, que depuis l'incendie la
plus grande partie de ses religieuses ont couchés sur la paille
et des mattelas, sur des planches de chambre jusqu'au nombre
de trois ensemble, n'aiant pu sauver que deux (matelas ? ) de
l'incendie qui sont resté entier, et ayant entièrement perdte
toutes les lingeries et autre meubles. »
« De tout quoy avons rédigé le présent procès- verbal à valoir
et servir comme apartiendra, ledit jour et an, soubs notre
signe, (ceux) de notre adjoint et de ladite dame supérieure. Aïnsy
signé : Françoise Seré, dite de l'Àpsomption, Charle Lohéac,
bailly, Charle Mouton, adjoint, Ainsy signé : Lohéac. »
L'estat triste ou nous estions réduite, firent opiner à diffé-
rentes personnes de divers estais, de nous sollicitter de nous
retirer dans une maison dans la ville, à quoy nous ne pûmes
consentir, prenant le parti de nous retrancher dans un reste
de logement où nous* estions bien au juste. La charité du peu-
ple contribua à nous y faire subsister, comme aussy les
ouvrages de nos mains. Tout ce que nojjs avons pu faire depuis
ce temps a esté de rétablir nos ruines, y consommant les dots
des filles que nous avons reçue, et rembourser des constituts
que nous avions contracté dans nos plus pressants besoins ; à
— 42 —
quoy succédèrent les taxes des droits d'amortissement pour
lesquels nous avons pacé, comme le justifie nos quittances de
finances, la somme de quatre mil six livres six sols, y compris
les deux sol pour livres.
Estât du revenue dont nous jouissons actuellement tant en rentes
foncières constituées, et pensions viagères.
Une métbairie nommé Kerjoanno, à titre de ferme, pour la
somme de cent vingt livres, cy 1201.
Un jardin à titre de féage, vingt une livre, cy 21 1.
Une maison près notre enclos, à titre de ferme, vingt une
livre.
Quatorse mil livres de principal en constitua à différents
particuliers, qui produisent de rente cent dix
livres onze sols, cy 1101. 11 s.
En pensions viagère, deux mil sept cents
livres, cy . 2,700 00
Total du revenu 3,8721.11 s.
Nos charges annuelles sont de paier à monsieur l'abbé de
Sainte -Croix de cette ville, pour l'indemnité,
dans son fleff, cent vingt livres, cy 1201.»» s.
Aux moines de ladite abbaye et autres parti-
culiers, pour rentes dues sur nos terres, douze
livres quatorze sols, cy 12 14
A monsieur nostre chapelain, trois cent
livres, cy. . • • • 300 »»
Pour la capitation ordinaire et deximes, deux
cent livres, cy 200 »»
Total des charges 6321.14 s.
Nos charges annuelles paies, il ne nous reste que deux mil
neuf cent trente neuf livres dix sept sols, cy. . 2,9321. 17 s.
I
— 43 —
Estât au vray pris en bref sur nos livres de comtes de la dé*
charge de chaque année pendant les dix dernières années ,
tant pour la table que l'entretien des religieuses, pour médecin,
domestiques, ouvriers, frais d'affaires, entretien dé la
sacristie et réparation du monastère.
Pour Tannée 1707 4,4221.02 s.
— 1708 5,086 10
— 1709 4,966 19
— 1710 6,013 14
— 1711 5,101 07
— 1712 4,866 12
— 1713.. .... 5,573 »»
— 1714 6,792 02
— 1715 7,038 18
— 1716 5,741 01
54,602 1. 05 s.
Déclarons avoir reçu pendant le cours des dix années der-
nières, pour dottation des religieuses que nous avons, reçu en
argent, la somme de dix huit mil livres, cy. . . . 18,0001.
De plus déclarons que dans les mouvemens des diminutions
des monnoye, on nous a remboursée la somme de sept mil trois
cents livres de constitua, cy 7,300 1.
qui fait une diminution considérable sur notre modique revenu.
La dureté des temps, la chertée des grains et de toutes les
autres choses nécessaires à la vie, nous ont mis hors d'estat de
pouvoir remplacer cet argent, les aiant consommée de mesme
que les dixhuict rail livres de dots receu, tant pour le soutien
de la communauté qu'à faire boiser le chœur et y faire des
chaires pour lesquels on a paie deux mil deux cent
livres, cy 2,2001.
Et pour cerné de murs notre enclos, la somme de cinq
mil livres. 5,0001.
Notre communauté est au nombre de cinquante et quatre
religieuses. Nous suplions très-humblement sa Majeté de
— 44 —
considérer qu'ayant seulement deux mil neuf- cent trent et
neuf livres dix-sept sols de revenue, après les charges annuelles
paie, celte somme ne produit pour chaque religieuse que
cinquante et quatre livres huit sols, encore bien Irès-casuels,
ne consistant presque qu'en pention viagère ; ce qui prouve
qu'il^nous serait impossiblede subsister sy la divine Providence
n'estendoit ses soins à nous pourvoir des moyens casuels par la
réception des subjects qu'elle nons envoie.
Il est à remarquer que depuis quarante années nous avons
un aisle de dortoir commencée, duquel nous attendons nos
logements réguliers comme : réfectoire, chapitre, chambre de
communauté et les chambres particulières, nombre de reli-
gieuses estant çbligées, par deffaut de logement, d'estre trois
et quatre dans la même chambre.
Déclarons devoir à divers particuliers, suivant restai certi-
fié du général, la somme de sept mil cent quatre livres 7,104.
Monseigneur nous présentons à votre Grandeur, la juste situa-
tion de l'état du temporel de notre monastère qui est dans la
droiture tous ce que nous possédons, suppliant humblement
votre Grandeur d'appuier de l'honneur de sa protection, la
vérité que nous déclarons certiffiées, nous, supérieure et dis-
crètes de la communauté des Ursulines de Quimperlé, soubs
nos signes, ce jour 5 e décembre 1717 : sœur Françoise Le
Gall de Sainte-Gertrude, supérieure, sœur Angélique Hervou,
sousprieure, sœui* Hélène Gillart, sœur Louise Jacquelot,
sœur Agathe de Bodoyec, sœur Angelle le Capiten, sœur
Louise Gaultron de L'Annonciation, procureuse.
M. de la Villemarqué commence la lecture de son
Mémoire sur les haches de pierre, porté à l'ordre du
jour de la séance.
LES HACHES DE PIERRE.
Si c'est une grande science que de savoir ignorer, nous
finirons par l'acquérir en France. On y trouve moins qu'au-
— 45 —
trefois de ces gens qui ne doutent de rien et affirment d'un ton
tranchant, tandis qu'ils devraient répondre tout bonnement :
je ne sais pas.
Plus on avance dans la vie, plus on devient modeste dans la
science ; plus on apprend à désapprendre ce que Ton croyait
savoir : en Dieu seul on ne désapprend rien.
L'observation soigneuse des faits conduit souvent à recon-
naître loyalement qu'on s'est trompé, el Ton abandonne les
hypothèses séduisantes pour suivre la voie de l'expérience.
Souveraine en certaines études, la méthode expérimentale ne
Test pas moins eji archéologie, et les seuls résultats un peu
positifs obtenus dans ces dernières années sont dûs à cette
méthode appliquée aux temps primitifs de la Gaule.
Peut-être parviendra- t-on à soulever davantage le voile
qui couvre nos antiquités, par de nouvelles fouilles bien faites/
et des vérifications sérieuses.
Mais fouiller le soi, extraire et classer ce qu'il cache ne
suffit pas ; il faut en même temps fouiller les vieux manus-
crits ; il faut interroger les témoins ou les échos du passé, et
même la mémoire humaine, partout où elle ne s'est pas
éteinte avec les langues du berceau ; il faut demander à ces
langues, quand on possède la généalogie de leurs mots, un
surcroit d'information préférable à tous les systèmes.
On commence à le faire; des hommes d'un grand mérite
ont mis la main à l'œuvre ; vieil ouvrier redevenu apprenti à
l'école de plus d'un jeune explorateur, j'ai voulu travailler avec
eux ; je continuerai de mon mieux : après avoir tenté d'expli-
quer, par les textes, les monuments primitifs de la Gaule (1),
je vais essayer d'étudier, à la même lumière, quelques-uns
des objets qu'on a trouvés dans notre sol.
Parmi ces objets je m'en tiendrai, pour aujourd'hui, à
(1) Les pierres et les textes (Congrès celtique international).
— 46 —
certaines pierres dont on voit à l'Exposition universelle une
collection remarquable.
Rien de curieux comme d'entendre les questions de la plu-
part des visiteurs à leur endroit: « Pourquoi faire ici ces
cailloux ? » ; d'autres disent « ces galets » ; d'autres « ces longs
œufs de pierre, aplatis, pointus et tranchants' » ; servaient-ils
à quelque chose ? Quel est leur nom ? • Les plus instruits, ou
ceux qui prétendent l'être parce qu'ils ont entendu parler des
trois âges de la pierre, du bronze et du fer, et qu'ils croient
à cette rêverie Scandinave, répondent avec un aplomb magis-
tral. Sans avoir la même prétention, cherchons ce qu'on
peut trouver de plus vraisemblable à dire touchant le nom, la
provenance, l'usage et l'époque de ce que j'appellerai, pour ne
rien préjuger, les pierres polies cunéiformes.
I.
LEUR NOM.
Un ancien poêle français a dit que la première chose à
faire, qnand on est devant un inconnu, c'est de lui demander
son nom :
Sachez d'abord comme il se nomme,
Car par le nom l'on cognoit l'homme.
Je tiens pour bon le conseil et je m'adresse à nos pierres ;
par malheur elles ne répondent pas. L'antiquaire Gambry ne
s^'est pas découragé pour si peu : lapides clamabuntl s'est-il
écrié ; et comme il y voyait des haches druidiques, comme il
aimait les druides au point d'avoir voulu être peint dans leur
costume, il s'est constitué le parrain de leurs pierres et il leur
a donné un nom : du mot latin Celtis, ablatif, Celte, que l'on
trouve dans le Glossaire de Philoxène et que M. Louis Qui-
cherat traduit par*« burin de graveur sur pierre », il a fait
Celtœ, et d'un burin une hache, barbarisme et contre-sens qui
ne prouvent pas beaucoup en faveur de l'inventeur.
— 47 —
Ses contemporains racontent, en effet, qu'il ne savait guères
d'autre lalin que celui du Paroissien romain, fort négligé par
lui depuis de longues années, et qu'il avait tiré son Ceitœ du
verset bien connu de Job (cb. xix) : Quis mihi tribuat ut
scribantur sermones mei ? ut exarentur in libro, stylo ferreo...
vel celte sculpantur in silice (Office des morts, leçon ix.)
Quoiqu'il en soit, le barbarisme a été adopté par quelques
antiquaires anglais, suisses, et même bretons, et il supplante
souvent le nom de hache de pierre, employé ordinairement.
Plus juste, assurément, et devant une sorte de consécration
à l'autorité de Montfaucon, de dom Martin et de M. de Cau-
mont, le nom de hache de pierre n'est pourtant pas à l'abri de
toute objection ; s'il convient aux coins emmanchés, peut-on
l'appliquer à ceux qui ne le sont pas ? Convient-il en particu-
lier à ces petits bijoux cunéiformes de quelques millimètres,
d'un travail'achevé, qu'on ne pourrait même pas appeler des
hachettes? Presque tous les archéologues en tombent d'ac-
cord ; ils n'emploient du reste le mot hache que faute d'un
meilleur, encore à trouver.
A trouver ! mais c'est fait, nous répond un des membres les
plus distingués de la Société polyraathique du Morbihan,
M. de Glosmadeuc (et je l'ai cru avec lui, un moment, en par-
tageant sa joie) ; qu'on demande leur nom, dit le savant doc-
teur, à la langue bretonne, qu'un de nos collègues s'est efforcé
de nous faire considérer comme la langue mère d'où dérivent
les autres, elle répondra.
Effectivement, la langue bretonne, non la mère d'aucune
autre que je sache, mais la fille de plusieurs pères, hélas! (je
le dis tout bas) ; la langue bretonne actuelle a un mot pour
désigner lés étranges coins de pierre dont les savants igno-
rent le vrai nom; M. de Closmadeuc a raison : les paysans*
bretons ne les appellent pas autrement que men~gurun,
pierre de foudre. Maintenant, poursuit-il, si nous interrogeons
la tradition populaire, universellement acceptée dans nos
— 48 —
campagnes, elle nous apprend que les hacbes dé pierre,
men-gurun « pierres de foudre » possèdent, entre autres ver-
tus merveilleuses, celle de garantir les demeures des atteintes
de la foudre et des maléfices. Étrange légende qui permet à
l'archéologie de s'en emparer pour expliquer ce qui, sans
elle, serait inexplicable. 1
Étrange légende, en effet, dont j'ai voulu constater l'exis-
tence pour voir quel parti on en pourrait tirer.
La' voici, telle qu'elle m'a été rapportée le 17 juin 1878,
par un paysan breton du Morbihan, nommé Pierre Derrien, natif
d'Inguiniel, âgé de cinquante ans.
Je l'abordai, tenant à la main une petite hache de pierre.
Après les banalités d'usage sur la pluie et le beau temps :
« — De quel nom appelle-t-on ceci en breton, lui deman-
dai-je.
c — Minn-gurun, mejrépondit-il.
c — Mean-gurun, repris-je, dans le dialecte de Léon.
« — Oui, minn-gurun, répéta-t-il dans son dialecte van-
netais.
« — Et d'où cela vient-il ?
« — Du ciel, Monsieur ; dans mon enfance il en tomba une,
avec le tonnerre, un jour de grand orage ; elle fendit même un
arbre, sillonna ensuite profondément la terre et disparut sans
qu'on pût la retrouver ; mais on en a rencontré d'autres, que
l'on garde soigneusement dans le coffre.
c — Et pourquoi les garâe-t-on si soigneusement ? Est-ce
qu'elles peuvent servir à quelque chose.
« — Otli, elles sont bonnes pour guérir les tumeurs prove-
nant de la piqûre des reptiles venimeux.
a — Et comment s'en sert-on ?
a — On les fait chauffer au feu ; puis on les applique sur la
' tumeur, que l'on frotte avec elles jusqu'à ce que la guérison
s'ensuive.
— 49 —
« — Est-ce qu'elles passent aussi pour préserver du ton-
nerre et des maléfices ?
« — Je ne l'ai pas entendu dire ; qu'elles viennent du ton-
nerre, je ne dis pas non. »
Tel fut notre curieux dialogue que j'ai traduit mot pour
mot.
II justifie r assertion de M. de Closmadeuc et la complète;
s'il ne constate pas la vertu préservatrice que posséderait la
men-gurun, il en fait du moins le produit du tonnerre, comme
la tradition recueillie par le savant docteur. Celui-ci n'a pas
remarqué avec moins de satisfaction que, dans tous les idio-
mes de l'Europe, l'objet est désigné de la même façon au-
jourd'hui par le peuple : en Norwége, thonder-ktler ; en Alle-
magne, donner-keiîe ; en Ecosse, thunder bolt-stone ; dans
les Pyrénées-Orientales, pedras de lamp ; dans le Rouergue,
peiro del tro. Il eut pu ajouter : dans le Pays de Galles,
maen taran, forme dialectique du mol men-gurun % et conclure
encore plus victorieusement : « partout pierre de foudre. »
Malheureusement, il ne s'agit pas de savoir comment le
peuple appelle aujourd'hui partout les pierres qu'il croit l'ou-
vrage de la foudre, mais comment les appelaient autrefois
les hommes qui les ont façonnées ; il importe même assez
peu de retrouver leur nom breton actuel dans celui que leur
ont donné, * du I er au V a siècle de notre ère, Pline, Juvénal,
Lucain, Saint-Sidoine Apollinaire et les écrivains latins du
Moyen-Age; ce qui importe, c'est le nom qu'elles avaient à
l'époque anté-historique. Évidemment, si les Romains, d'aprè s
les Grecs, les ont appelées Céraunies ou pierres de foudre,
lapides fulminis, c'est qu'ils ne connaissaient pas mieux que
nous leur nom véritable.
Ils les ont qualifiées comme elles devaient l'être par des peu-
ples relativement modernes, par des gens superstitieux, igno-
rants, quand elles étaient déjà devenues pour le vulgaire des
objets merveilleux, mystérieux, des talismans tombés du ciel
— 50 ~
avec le tonnerre, du genre de ceux que Claudien fait ramasser
dans le3 cavernes des Pyrénées par les Nymphes de la foudre :
Pyrenœisque sub antris
Tgnea fulmineœ legefe Geraunia Nymphœ.
Tout en croyant que le poète latin a songé aux pierres pâ-
lies cunéiformes qui devaient être trouvées de nos jours dans
la grotte d'Àurensan et dans d'autres cavernes des Pyrénées
par la Société Ramond ; en admettant même, avec M. Littré,
que les Céraunies des Anciens, similes securibus, sont « peut*
être les haches de pierre des temps anté-historiques », et en
reconnaissant en elles, avec M. de Closmadeuc, les men-
gurun de nos paysans, je persiste à regarder leur nom ori-
ginel comme ignoré.
Les fabricateurs des haches de pierre n'ont pas pu les appe-
ler des ouvrages de la foudre -, leurs descendants seuls, long-
temps après eux, ont pu leur donner un nom pareil ; entre les
uns et les autres il y. a toute la distance qui sépare le naturel
du merveilleux. Cela n'est-il pas de toute évidence?
Cherchons donc ailleurs la solution du problème.
A propos de cette lecture, M. Bourrassin présente à
la Société un fragment d'aréolithe trouvé à Telgruc, il
y a une quinzaine d'années. Il fait observer que les ha-
bitants du pays ayant suivi la marche de cetaérolithe
n'ont pu en découvrir que quelques fragments, les au-
tres s'étant dispersés et enfouis profondément en terre
par la force de l'explosion. La pierre analysée par lui
contient de l'oxyde de manganèse, et de l'oxyde de fer
amphibole.
Une discussion -d'un vif intérêt a lieu sur le rap-
port qui peut exister entre ces pierres et les pierres
façonnées dites vulgairement Men-gurun. M. Pavot dit
que les pierres en question ne peuvent être comparées
— 51 —
aux météorites et établira le fait dans un travail qu'il
présentera à la Société.
A ce moment M. de la Villemarqué reçoit une dépê-
che télégraphique de M. Pocart-Kerviler, ingénieur
des ponts et chaussées à Saint-Nazaire, si connu par ses
découvertes scientifiques dans le bassin de la Loire, et
membre de la Société d'archéologie du Finistère.
La dépêche est ainsi conçue : ce Buffon et Mahudel
donnent pierre de tonnerre pour outils aux hommes
primitifs ; cela complète Pline, Suétone et Claudien ;
voir aussi Marbode, sur les Céraunies, et Evans : les
âges de pierre, p. 37-66. — KERVILER. »
M. de la Villemarqué remercie M. Kerviler, au nom
de la Société; il se propose à la prochaine réu-
nion de continuer son travail sur les haches de pierre,
espérant retrouver leur véritable dénomination.
A la fin de la séance, M. le Président donne lecture
d'une lettre de M. de Montifault par laquelle il se
démet de ses fonctions de secrétaire de la Société,
fonctions qu'il ne peut désormais remplir à cause de*
ses nombreuses affaires et des déplacements qu'elles
lui suscitent, mais il continuera à faire partie de la
Société. Le Président met à l'ordre du jour de la pre-
mière séance la nomination d'un secrétaire en rem-
placement de M. de Montifault dont la démission est
acceptée.
L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée à
4 heures 1/2.
Le Secrétaire par intérim,
A. CRÉAC'HCADIC.
— 52 —
Dons offerts au Musée départemental d'Archéologie
M. DU PERRAY, membre de la Société.
Oursin fossile percé d'un trou et trouvé dans un
tumulus appelé la Motte de Nogent, à Nogent-sur-
Loir (Sarthe). Il y en avait un certain nombre prove-
nant, pense-t-on, d'un collier.
Un grand bronze de Septime Sévère et un petit
bronze de Postume, trouvés dans les ruines romaines
de Malakoff, à l'embouchure dé l'Odet, commune de
Combrit (Finistère).
Sept grands bronzes, quatre moyens bronzes et
trois petits bronzes des empereurs et impératrices :
Auguste, Trajan, Antonin le Pieux, Faustine jeune,
Lucille, Alexandre Sévère, Dèce, Victorin, Probus,
Maximien et Constantin le Grand.
Monnaies de la Monarchie française, de Henri IV
à Louis XVI : quinze monnaies de cuivre, plus un écu
de six livres, faux et percé d'un trou.
Dix monnaies seigneuriales françaises du XVII e et
du XVIII e siècles.
Trente-quatre monnaies étrangères.
Trente et un jetons de bronzes : Louis XIV, seize ;
Louis XIV et Marie-Thérèse, deux ; Anne d'Autriche,
un ; Marie-Thérèse, un ; Louis XVI, un ; jetons de
villes, etc., six; jetons allemands, quatre.
Trente-deux fossiles recueillis dans les terrains cré-
tacés de Château-du-Loir (Sarthe).
M. Alexandre BOLLORÉ, membre de la Société.
Jeton allemand du XVI e siècle, trouvé dans son
jardin, rue du Frout à Quimper.
53 —
SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 1878.
Présidence de M. DE LA VILLEMARQUÉ,
MEMBRE DE i/lNSTITUT.
Étaient présents : MM. de la Villemarqué, Àudran,
Trévédy, Bourrassin, de Kercadio, Livanen, Pavot,
de Brémoy, du Perray, Malen, Fougeray et A. Créac'h-
cadic, secrétaire.
M. le Président dépose sur Je bureau une bcochure
ayant pour titre : Inscriptions latines de V Irlande, dont
l'auteur, M. H. Gaidoz, directeur adjoint à l'Ecole des
hautes- études et professeur à l'école des Sciences
politiques, fait hommage à la Société.
L'Assemblée prie M. le Président de transmettre ses
remerciements à M. Gaidoz, pour l'envoi de ce travail
qui est une nouvelle preuve de l'intérêt que l'auteur
porte aux études celtiques.
M. G. Fischer, peintre et professeur de dessin à
l'école navale de Brest, bien connu par le talent avec
lequel il a su reproduire diverses scènes de nos mœurs
bretonnes, qu'un long séjour au milieu des populations
rurales de notre département lui a permis d'étudier
à fond, est admis à l'unanimité à faire partie de la
Société archéologique du Finistère, sur la présentation
de MM. Le Men et Créac'hcadic.
L'ordre du jour appelle la nomination d'un secré-
taire adjoint en remplacement de M. de Montifault
démissionnaire. Sur l'observation de plusieurs mem-
bres, que la réunion n'est pas assez nombreuse, cette
élection est remise à la prochaine séance.
M. le Président donne ensuite la parole à. M, Audran
SOC. ARCBÉOL. DU FINISTÈRE. &
— 54 —
pour lire, au nom de M. Le Meïrqui n'a pu pour
raison de santé assister à la séance, une étude de
topographie et de philologie celtique, ayant pour
titre :
GESOCRIBATE ET BR1VATES PORTDS
La découverte de Vorganium à l'embouchure de l'Àber-
Wrach, a fixé d'une manière certaine à Brest la position de
Gesocribate de la Table Théodosienne.
Plusieurs géographes, à diverses époques, n'ont pas hésité,
en s'autorisant de l'analogie des noms, à reconnaître une iden-
tité parfaite entre cette localité et Brivates Portus de Ptolémée.
D'autres savants ont pensé au contraire, que les assonances
de ces deux noms, ne suffisent pas pour que Ton puisse identifier
le premier avec le second, et qu'il y a lieu par conséquent, de
distinguer Brivates Porlus de Gesocribate. Cette objection n'est
pas la seule que Ton ait mise en avant pour justifier cette
distinction, mais elle est, je crois, la plus sérieuse.
J'ai soutenu la première de ces opinions dans- les divers
mémoires que j'ai adressés à la Commission de la Topographie
des Gaules sur la géographie de la III e Lyonnaise, et l'objet
de celte note est de démontrer une fois de plus qu'elle est
soutenable. Tout en reconnaissant que Geso-Cribate est la
bonne leçon et qu'il n'y a pas lieu h ce sujet de corriger la
Table, je me propose d'établir par des déductions philologiques
l'identité des mots Cribale et Brivates.
Mais avant d'aborder cette démonstration, il convient peut-
être de rechercher quelle est l'étymologie du composé Geso-
Cribate.
Le mot breton armoricain qui se rapproche le plus de Géso^
me paraît être Gwez y pluriel Gwezio ou Gweziou, suivant les dia-
(I) Revue archéologique, Nouv. série 14 e et 15 e année. — Bulletin
de la Société archéologique du Finistère, X. Il (1874-1875) p. 18.
' — 55 —
lectes(l); corn. Gwyth et Guid, camb . Gwyth t ivl. elgael.Fttft,
qui signifie rivière, ruisseau, courant d'eau (2). Gwez-Vor t ou
Gwezen-Vor, avec son suffixe ordinaire m?, s'emploie pour dé-
signer un bras de mer, Geso voudrait donc dire à la lettre « les
rivières, les courants d'eau ou les bras de mer » de Cribate, si-
gnification équivalente à celle de: «les eaux», c'est-à-dire
« le port » de Cribate. La rade de Brest reçoit les eaux de
trois rivières, l'Avon, TÉlorn et la Penfeld, circonstance qui
pourrait à la rigueur rendre compte de la forme plurielle
Geso ; mais je pense qu'il n'y a pas lieu de s'en préoccuper,
car la forme apparente du pluriel se rencontre assez sou-
vent en breton pour indiquer des localités avec la valeur
du singulier, ex : Salou, Restou, Bodou, Muriou, Castellou,
Killiou, Buzidou, etc. Ces mots qui servent à désigner d'an-
ciennes habitations seigneuriales, ont exactement la même
signification que : S al, Rest, Bod, Mur, Cas tel, Killi, Buzit.
Dans ces exemples comme dans bien d'autres qui ne compor-
tent pas une idée Collective, ainsi que cela me semble
avoir lieu dans les noms patronimiques bretons, (ex :
Jezequellou, Moelligou, Autrcdou t Soubigou, Duigou, etc.), la
syllabe terminale'ou = o ne parait pas avoir d'autre valeur que
celle d'un simple suffixe.
L'absence du i dans Geso ne peut être considérée comme
{1) La forme en o du pluriel, particulière aujourd'hui au dialecte de
Tregitier, n'est pas ancienne. Le pluriel se formait en ou dans cet -
évêché, comme dans les autres diocèses bretons, au commencement du
XVI e siècle. Il n'y a, du reste, en réalité, qu'une nuance dans la
manière de prononcer ces deux terminaisons. La lecture des livres im-
primés a modifié plus qu'on ne le pense la prononciation bretonne.
Aujourd'hui les paysans illettrés, surtout dans 1 ancien diocèse deLéon,~
ne prononcent pas tous les mots de la même manière que ceux qui
savent lire. Je reviendrai sur ce sujet dans une autre occasion.
(2) Les dictionnaires des divers dialectes celtiques ne donnent guère,
à ce mot, d'autre signification que celle de veine, ruisseau, petit cours
d'eau, mais il est certain qu'il signifiait autrefois rivière comme le mot
Avoti qui a disparu dans le dialecte armoricain. Ainsi, laGwazien, qui se
jette dans l'Océan à Audierne (Finistère), le Gouet qui passe près Saint-
Brieuc et le Coueznon qui séparait autrefois la Normandie de la Bretagne
et dont le nom me parait identique au nom ceîtigue de la Vilaine (Visnon),
ne sont pas des ruisseaux mais bien de véritables rivières.
— 56 —
une objection, car cette lettre est souvent simplement euphoni-
que dans les pluriels et dans les suffixes celtiques, ex :
arm. Saîiou (maisons seigneuriales) — Salou; Bulzuliou
(navettes) = Bulzunou; A veziou (quelquefois) = A vechou;
Morzolliou (marteaux) = Vann. Morholleu; Levriou (livres)
= Vann. Levreu; Gwazen (ruisseau) == Gwazien; cambr.
Gwythen (ruisseau) = Gwythien.
On ne doit pas non plus tenir compte de l'absence du w
dans Geso, car cette double lettre non en usage chez les
Romains a dû être souvent omise dans les transcriptions latines
des noms celtiques, ex : Gildas ou Gildasius (nom d'horame)=
Veltas = Gweltas ; Kirocus et Kirecus (nom d'homme,) ==
Gweroc et Gwerec ; Guinerîts (nom d'homme) = Vigner :
Vingaloeus (nom d'homme) = Gwingwaloeus ; Velamensis
(pagus) = Golovia = Gwelo, etc.
Quant au mot Cribate, son élymologie ne présente aucune
difficulté. Il est formé du radical Cr#, qui avait jadis dans
divers dialectes celtiques, le sens de « lieu escarpé, » de
« sommet, » de « crête, » de « promontoire, » du suffixe ai et
de la terminaison e = es. D'après ces données, Geso-Cribate
signifierait « le port du promontoire élevé. »
Il existe encore dans les départements du Finistère et du
Morbihan, un certain nombre de localités qui portent le nom de
Crib soit simple, soit plus ou moins modifié par des suffixes
ou par des altérations. En voici la nomenclature :
(Finistère).
Grîp, ferme (Landévennec) .
Kergrip, ferme (Clohars-Carnoët).
Kergrip, ferme (Riec).
Quenec'h-Cribel, ferme (Plouyé).
Criben, ferme (La Forest-Brest).
Creac'h-Criben, ferme (Irvillac).
Creac'h- Criben, ferme (Pleyben).
Coz-C'hriben, ferme (Guipavas).
Coz-C'hribin, ferme (Plouguin).
Cribinec, ferme (Plouédern).
— 57 —
(Morbihan).
Grippe (La), village (Caden).
Grippais, écart (Guillac).
Grippez (Le), village (Saint-Dolay),
Grippé (Fort du), sur l'Océan, côte de l'île de Groix.
Gribérez (Le), roche sur la rivière de Crac'h, entre Crac'h
et Carnac.
Grifet (Le), village (Plougrifet).
Griffons (Les), landes (Guer).
On remarquera dans cette liste, deux localités dont les noms
sont identiques à celui de Cribate ; ce sont : dans le Finistère
(Quenech'Cribct), et dans le Morbihan Grifet {Le) qui a donné
son nom à la paroisse de Plougrifet.
Au lieu de rechercher dans l'allemand l'origine du mot fran-
çais « grimper », ne pourrait-on pas la trouver dans le celtique
Crip ou Grip, dont il faut rapprocher Crap. et Grap, qui ont
la même signification. L'opinion qui a cours aujourd'hui et
d'après laquelle* la langue gauloise n'aurait contribué que
dans une très-faible proportion à la formation du français,
pourrait bien être modifiée dans un avenir peu éloigné.
J'arrive maintenant à l'objet principal de ma thèse.
Zeuss dans sa Grammatica ceîtica, a fait observer qu'en
irlandais la consonne p tombe quelquefois ou se change
en c.
Le docteur Ebel, modifiant et développant la loi entrevue
par Zeuss, établit que si dans certains cas lep sç change enc
dans la langue irlandaise, ex : inchorcur (purpura), owd-
fescur (vespera), clum (pluma) etc., il arrive le plus souvent
que la lettre c (= qu) se c frange en p dans les autres dialec-
tes celtiques, ex*, lat. quatuor, cambr, petuar, corn, peswar,
arm. pevar ; lat. quinque, cinq, cambr. pimp, corn, et
arm. pemp; mac et maqu lat. filius, cambr. corn, et arm.
map et mab\ cenn (caput) = cambr. corn et arm. p«ww, cfr.
mons Apenninus ; cland (proies) = cambr. plant; crann
(arbor) = cambr. corn, et arm. pran, pren = firon, bren.
— 58 —
L'irlandais, malgré son antipathie pourja lettre p, ne paraît
pas être resté lui-même entièrement étranger à cette loi,
ex. : cambr. corn, etarm. gad, lièvre, qui se prononce souvent
cad, irl. patu.
Il ne faut pas croire cependant que cette mutation de c (= qu)
en p dans les dialectes celtiques, se soit faite d'une manière
générale et régulière. Elle parait s'être au contraire, opérée
capricieusement et sans règle. En ce qui touche les localités,
si elle a affecté quelques noms, d'autres, et en grand nombre,
sont restés intacts.
A quelle époque remontent les commencements de cette
altération de la langue primitive ? C'est une question a
laquelle il n'est pas facile de répondre. Nous trouvons cepen-
dant dans la sentence arbitrale rendue par les frères Minucius
en l'an 117 avant notre ère, entre deux peuples ligures, les
habitants de Gênes et les Viturii, les noms moris Apenninus
(dans la carte de Peulinger, In summo Pènnino) et
mons Prenions qui semblent être des .mutations des formes
mons Cenninus et mons Crenicus = arm. "Oanec, Pranec et
Prenec « mont boisé » (1).
(1) M. d'Arbois de Jubainville, qui a publié (Rev. archéologique,
nouv. série, 19® année) la liste des .noms de lieux contenus dans cette
sentence, fait observer que « dans cet ensemble de noms, il ne trouve
pas apparence de gaulois. » L'observation est juste, si on l'applique à
certaines parties de la Gaule, mais il est, je crois, hors de doute qu'il
existait dans le gaulois des dialectes présentant entre eux des diffé-
rences marquées, comme il en existe aujourd'hui dans les pays où l'on
parle encore ,1a langue celtique, et il me semble que les noms qui
figurent dans cette liste ne sont pas sans lien de parenté avec certaines
dénominations de localités existant dans la partie occidentale de la
Gaule, qui donna asile aux émigrés bretons. Ainsi, comme terminaison,
Odiates, viens, se rapproche bien de Condate, de Cribate et de Brivates ;
Comberanea, rivus, et Porcobera, fluvius, ne paraissent identiques
à Kymber, confluent (Kymper-Corentin , Kymper-EHé, etc.) ; on
peut comparer Ed-us fluvius à Od-et, rivière de Quimper ; Eniseca,
rivus, rappelle Enesec, abondant en iles (de Enes ou Inis. insula).
Je viens de dire ce que je pense de Prenicus, mons, et j'ai cité l'opi-
nion de Zeuss et d Ebel au sujet d'Apenninus mons. On trouve dans
Vindupalis fluvius le nom de la rivière Guindy, qui prend sa source
dans la commune de Pedcrnec (Côtes -du -Nord). Le mot lasc ou
Use parait d'après cette liste signifier rivière (on devrait lire, je
crois, Nevîasca au lieu de Neviasca) et il peut entrer dans la composition
— 59 —
D'un autre côté les noms des peuples gaulois Auterci-Bran-
novices = (Crannovices, habitants des bois) (I) et Aulerci-
Eburovices = (Epeulovices, cavaliers, lat. équestres) cités par
César, et dans lesquels le c primitif paraît s'être changé en
p = 6, semblent prouver comme les exemples que je viens
de- mentionner, qu'au moins dans certaines parties de la
du mot Gucr-lesken, nom d'une commune du Finistère, qui serait
alors composé de deux mots ayant Ja même signification, savoir Guer
ou Gwer, rivière (un cours d'eau de ce nom arrose cette commune),
et lasc ou Use C'est un fait qui se produit assez souvent dans le
breton armoricain (Cfr. infrà Ster-Aon, Coat-Cran, Cran-Coati Coat-
pren etc). 11 existe une famille bretonne dont le nom du Lesken, pourrait,
d'après cette étymologie que je doupe sous toutes réserves, se traduire
par de la Rivière.
Il y a dans le Morbihan les hameaux de Lasçoher, Lascouver, 1562,
commune de Plumergat, et Lascouit, commune de Saint-Nolff. Ce mot
Lasc se retrouve dans quelques déparlements du midi de la France.
Lemurinus. mons, me semble composé de le = leeh, locus, de ilft*r,
castrum, et du suffixe in (cfr. crib-in), et signifie l'emplacement du
château, le lieu où est située la forteresse (Cfr. arm. Marchadlech,
marché, Gwarileeh, théâtre, etc.) Lemuris, fluviut, est le même
mot, moins le suffixe in et plus le substantif m, ri vus (le ruisseau
du château). Ce mot ris ne se trouve pas, je crois, dans les
dictionnaires bretons, mais c'est le nom d'un grand ruisseau (le Ris)
qui se jette dans la baie de Douarnenez (Finistère). Le même mot entre
dans la composition du nom de la rivière le Diouris (ltttér. les deux
ruisseaux), affluent de l'Àberwrac'h, qui se jette dans la Manche,
même département.
Ces rapprochements, que je pourrais continuer, suffisent pour établir
qu'il existe des rapports entre le dialecte breton-armoricain et la
langue dans laquelle sont écrits les noms de lieux qui figurent dans la
sentence des frères Minueius.
J'ignore si les Ligures ont à une certaine époque, habité près de son
embouchure les bords de la Loire, dont le nom (Lig-cr) a tant d'ana-
logie avec leur nom de peuple (Lig-wr). Si cette hypothèse était fondée,
ils auraient été voisins des Veneti, et l'on s'expliquerait comment après
une émigration plus ou moins nombreuse de ces deux peuples, se
seraient formés dans le nord de l'Italie, les deux établissements voisins,
des Liguri et des Veneti. On trouvera probablement cette conjecture
très- hasardée ; cependant l'analogie que }e crois avoir constatée entre la
langue des Ligures et la langue parlée en Armorique, peut lui donner
quelque consistance.
(1) Par opposition peut-être à Aulerci Cenomani == Pennou-maen ?
habitants de la partie pierreuse ou rocheuse.
Je ferai encore remarquer que les Centrones ou Ceutronss, peuple
ui habitait les Pyrénées, sont appelés Pentrones dans deux manuscrits
e la Notice dis Gaules (Voir Gucrard, Divisions territoriales de la
Gaule, p. 23). Le mot Centrones a une physionomie plus celtique que
Ceutrones. Si c'était la bonne leçon on pourrait y trouver Pen, tête et
Traon, vallée (caput vallis). Centrones signifierait alors <* habitants du
haut de la vallée. »
3
— 60 —
Gaule, cette mutation avait lieu assez longtemps avant l'ère
chrétienne.
Je pense qu'elle ne s'est opérée dans cette contrée que
progressivement et selon toute probabilité du sud au nord. A
l'appui de cette opinion je puis établir que certains mots de la
langue des bretons de l'Ile, dans lesquels le c s'est depuis
changé en p, n'étaient pas altérés au V 6 et au Vie siècle,
époque où se fit le passage de ces bretons dans la troisième
Lyonnaise, d'où l'on pourrait lirerjla conclusion que le contact
immédiat de ces émigrés avec les gaulois ne fut pas étranger à
cette altération.
J'en donnerai comme exemple le mot Gwic ou Guic, en
latin Vicus, qui, dans la langue populaire de l'évêché de Léon/
et par conséquent des environs de Brest, est employé pour
signifier le bourg, c'est-à-dire le chef-lieu d'une paroisse, de
préférence au mot Ploe ou Plou, usité dans la langue officielle
du clergé pour désigner l'ensemble de la paroisse. Ce mot qui
est toujours demeuré Gwic dans les dialectes comique et cam-
brien (lr.F/c/»),et n'a pas par conséquent été modifié dans le pays
d'où venaient les émigrés bretons, a cependant subi l'altération
du c terminal en p, dans le nom de certaines paroisses de l'évê-
ché de Léon. Ainsi le'nom de la paroisse de Ploe-Avas (Brest),
qui devrait s'écrire Guic-Avas dans la langue populaire, est tou-
jours écrit et prononcé Guip-Avas. De même, à peu de distance
de Guip-Avas, le nom de la succursale Guic-Ronvel (liltér.
Vicus Romelii,le bourg deRomelius, nom dont la forme bretonne
est Ronvel), aurait dû conserver celle orthographe, tandis que
ce bourg est appelé Guip-Ronvel depuis un temps immémorial.
11 est clair que' dans ces deux exemples, le c terminal de Guic
s'est changé en p (I). Or celle mutalion n'a pu s'opérer qu'après
l'arrivée des bretons en Armorique et après l'établissement des
(1) Voici quelques exemples où le c est tombé dans le breton armori-
cain : Loperec (Locus-Petrocf) ; Loperchet (Locus-Brigide) ; Lothea
(LocW'Tajaci) ; Guinevez (Vicus-noous) ; Guitalmeze (vicus Talme-
donius), etc.
— 61 —
paroisses dans l'évêché de Léon, c'est-à-dire au plus tôt au VI 6 siè-
cle, époque où fut fondé cet évêché et ou vivait Romélius, père
de Saint-Guenaël, second abbé de Landévennec ; lequel Romélius,
dont le nom est bien connu dans les légendes bretonnes, mais
dont on n'avait pas encore pu relrouver les étals, fut évidem-
ment le fondateur de Guic-Ronvel qui a conservé son nom (1).
Un autre mot qui ne me parait avoir été altéré, dans la langue
des émigrés bretons, que postérieurement à leur établissement
dans FArraorique, est le substantif Cran ou Crann, qui signi-
fiait « bois, forêt » (2).
En effet, lorsque ces émigrés vinrent se fixer dans leur
nouvelle patrie aux époques que je viens d'indiquer, et même
plus tard, ils trouvèrent le pays couvert de bois (et de forêts,
près desquels ou au milieu desquels beaucoup d'entre eux
établirent leurs demeures. Il s'en suivit de cette situation topo-
graphique d'un grand nombre des habitations des nouveaux
occupants de TArmorique, que beaucoup d'entre elles prirent
le nom de Cran. D'un autre côté la même dénomination
fut naturellement appliquée aux bois et aux forêts éloignés
des habitations. Il semble résulter de ces observations que^
le nombre des localités appelées Cran dut être fort grand en
Armorique à Tépoqtre qui nous occupe. Il reste encore
dans le département du Finistère soixante noms de lieux, eidans
le département du Morbihan cinquante-neuf, dans lesquels on
retrouve le mot, Cran = Cren = Gren, sous sa forme celtique
primitive. C'est sans doute bien peu si on tient compte des
observations qui précèdent ; mais outre que la dispari- „
tion d'un grand nombre de bois et d'habitations anciennes,
peut expliquer celte diminution, c'est ici le lieu de faire
(1) Le cartulaire de Landévenpec place dans la paroisse de Lan ri voaré,
limitrophe de celle de Guiprotovel, l'héritage de Saint-Gwenael, « qui
primus fuit abbaspost sanctum Wingualoeum. »
(2) Voici un extrait du Cartulaire de Redon, où le mot « Forêt » est
associé au mot Cran: « Notum sit omnibus quod dédit Portitoe et Connual
Cranuuikant et Cranquarima et quicquid.potuissent eradicare de Silva
pro auima sua, » etc., f° 3.
— 62 —
remarquer que dès le VIII e ou le IX siècle (797-814), et
peut-être plus tôt, la mutation du c en p avait commencé à s'o •
pérer, en Armorique, dans le mot cran. Nous en trouvons la
preuve dans plusieurs actes du cartulaire de Redon (1). Il en
résulta cette conséquence, que les formes pran, pren, bran ou
bren (toutes synonymes) se substituèrent, dans bien des cas, et
conformément à la loi de mutation citée plus haut, aux formes
cran y cren et quelquefois gren en composition. Si on fait le relevé
des noms de lieux bretons des départements du Finistère et
du Morbihan, encore existants et dans lesquels entre le mot
pren sous ses diverses formes armoricaines, on en trouve soi-
xante-dix-huit dans le premier et quatre-vingt-dix dans le
second, qui, ajoutés aux cent dix-neuf noms de localités
dans lesquels la forme primitive cran s'est conservée, donnent
pour ces deux départements un nombre total de 287 noms de
lieux dans lesquels entre ce mot caractéristique.
Voici quelques listes qui confirment les renseignements
statistiques qui précèdent, et où le mot cran figure sous loules
ses formes (2) :
Cran, Chran> Gragn, Gren, Cren, Chrcn y Creign.
(Finistère.) ~
LOCALITÉS. \ COMMUNES.
Cran. La Forêt (Brest).
Cran. Spézet.
(1) Branscean (villa), 797-814; — Branquasset (villa), 1123; —
Brengoen (villa), 1148; — Brengoen, 1130-1140; — Brennuuanau
(villa), vers 1120 ; — Brcndui (villa), 1112 ; — Bren-Hermelin (villa),
1120 ; — Brain (plebs), 1238, etc, ; — Cart. de Medon.
(2) Je dois déclarer que ces listes ne sont pas complètes. Je
me suis servi pour les établir du dictionnaire topographique du
Morbihan, par M. Rosenzweig, et d'un dictionnaire des localités du
département du Finistère que j'ai rédigé pour mou usage. Mais pour avoir
des listes complètes, il m'aurait fallu lire entièrement ces deux diction-
naires, et c'est ce que j'ai cru pouvoir me dispenser de faire, les exemples
que je donne ici me paraissant assez nombreux. D'un autre côté j'ai
supprimé plusieurs noms dans lesquels les mots cran, cren. bran et bren
pouvaient avoir une autre signification que celle de « bois, ce qui ne
veut pas dire que ces listes soient absolument exemptes d'erreurs. »
— 63
LOCALITÉS.
Crann.
Crann.
Crann.
Crann.
Crann (Le).
Crann.
# Crann (Le).
Crann.
Crann.
Crano ou Le Cranou (t),
Cranou (Le), forêt de l'Etat.
Cranonnenic.
Kernon Coat ar Chran.
Lescran.
Lescràn.
Menez Cran.
Mescran.
Minechran.
Pencran (2).
Pencran.
Pencran.
Ty Çranic.
Coat a Gragn,
Creignou.
Coat Cren.
Coat Cren.
Coat Crenn.
Cosquer cren pella.
CrenaL
Creneat.
Crenen.
Crengoualch.
Croas Crenn.
Kerchreu.
Kergren (L'Ite)
GOHM1TNBS.
Gouesnou.
La Martyre.
Piabennec.
Ploumoguer.
Plouvien.
Berrien. ^
Châleauneuf.
Lennon.
Pleyben.
Bédéné.
Buraengol.
Dirinon.
Locunolé.
Quimerc'h.
Mahalon.
Saint-Ségal.
Cléden-Cap-Sizun.
SaintYvi.
Pencran.
Ploraodiern.
Guengat.
Fouesnant.
Cléder.
Plouvien;
Plourin.
Plouvorn.
Plonévcz-.du-Faou.
La Forêt (Brest.)
Plogonnec.
Plounéour-Lanvern.
Bifc.
Collorec.
Lopérec.
Perguet
Piabennec.
(1) Cranou ou Crano (cambr. preniau) parait être le pluriel régulier
de Cran. Cependant en comique, le pluriel de pren, forme modifiée
de Cran, est prenyer. D'après les listes que je donne ici, le
pluriel de bren, pren ou pran affecte ces deux formes en breton armo-
ricain, ex : Kerampranou (Dirinon, Finistère), Brenyer (Mahalon, Finis-
tère), Le Brenno, Le Prehenno, Pranère (Carnac, Caden et Saint-
Pierre, Morbihan).
(2) Le principal manoir de cette commune s'appelle Chef-du-BoU,
c'est la traduction littérale de Pencran.
— 64 —
LOCALITÉS
Kergren.
Kergrenn.
Kergrenn.
Kergren.
Kergrenn.
Kergrenn.
Kergren.
Kergren.
Kergren.
Kergren.
Kergren.
Kerencrenn.
Kermenez Gren.
Leac'hc'hren.
Liors Crenn.
Mescren.
Mescren.
Mescrennec.
Prat-ar-Cren
Rescren (Rest).
Rescren (Id )
Ty Crenn.
Vilargren.
COMMUNES.
Plabennec.
Sainl-Urbain
Scrignac.
Saint-Thégonnec.
Plougonven.
Plouvorn.
Briec.
Plogaslel-Sain t-Germain ,
Plomelin.
Poullan.
Ergué-Armel.
L'hôpital-Camfrout.
Spézet.
Plonéour-Lanvern.
Plounévez-Lochrist.
Porspoder.
Saint-Pôl-de-Léon.
Mespaul
Le Conquet.
Saint Divy.
Querrien.
Plonévez du Faou.
Saint-Pôl-de-Léon.
1
(Morbihan)
Cran.
Cran.
Cran.
Cran.
Le Cran.
Le haut et le bas Cran.
Crancastel.
Crancelin (bois de houx).
Crâne.
Craneguy.
Craneguy (Le grand et le petit).
Cranet.
Crangouet.
Cran-Gourmelin.
Cranhac.
Cranhouet.
Cranhouet.
Cranhouet.
Cranhouet.
Baud
Quistinic.
Saint-Gérand.
Treffléan.
Pluherlin.
Saint-Dolay.
Ploërrael.
Guitliers.
Mauron.
Sulniac.
Surzur.
Cournon.
Saint-Gonnery.
Gourin.
Peillac.
Cruguel.
La Grée-Saint-Laurent.
Larré. •
Thebiilac.
— 65 —
COMMUNES.
Crauhouet-Rue-Gais.
Cranhouet-Ville-Neuve.
Le Cranic.
Cranihuel.
Crauinen.
Crano.
£rano.
Crano.
Crano.
Crano.
Le Crano.
Le Crano.
Le Crano.
Le Crano.
Le Crano.
Le grand et le petil Crano.
Le haut et le bas Crano.
Cranpipidic (Cranpinvidic).
Cranuach (Bois d'aulnes).
Cranvern.
Coëlcranne (Nemus nemoris).
Lescran.
Lésera n.
Lescran.
Léser an.
Cren.
Crenard.
Crenelet.
Crenenan,
Le Crenet.
Le Creneu.
Crenihuel.
Crenihuel.
Crenion.
Le Creno.
Crenou Vraset vihian.
Creny.
Créménec, dit Coat-Crémenec.
— Crennaeriec, 1421.
Crée an;
Le Canquiscran. — Quenquis-
cren aliàs Quenquiscran, '
1436.
Coacren. — Quoetcren, 1391.
LOCALITÉS..
La Grée-Saint-Laurent.
Idem.
Brech et Locoal-Mendou.
Nostang.
Languidic.
Cléguer.
Kervignac.
LignoT.
Naizin.
Pluneret.
Guéhenno.
Languidic.
Moréac.
Plouay.
Questembert.
Bieuzy.
Croixanvec.
Gourin.
Grandchamp.
Guern.
Landévant.
Lanvenegen.
Plœrin.
Saint-Avé.
Saint-Nolff.
Darngan.
Silfiac.
Quily.
Ploërdut.
Caden.
Saint-Vincent.
Pontivy et Noyal-Pontivy.
Silfiac.
Loyat.
Reguiny.
Guiscriff.
Radenac et Réguiny.
Priziac.
Noyal-Pontivy.
Langoëlan.
Ploërdut.
— 66 —
Bran (1), Bren, Breunen, Breign, Brin, Brign, Bran, Pren,
Vran, Vren. ,
(Finistère).
LOCALITÉS. COMMUNES.
Braodel. Plougourvest.
Branderien (bois de chênes). Arzano. <
Branlae'h. Fouesnant.
Coal Coubran. Melgven.
Kericbran. Argol.
Penbran. Saint- Urbain.
Poulbran. Kernevel.
Restanbran. Kergloff.
Rubran. Telgruc.
Bren. Plouézoc'h.
Brenn. Plozevet.
Brenalin. Saint-Nic.
Brenanvec. Plonéour-Lanvern.
Brenavalan. (2) Plouescat.
Breuavellec (Pommeraie). Plovan.
Brendaouez. Guissény.
Brendégué. Loc-Maria-Plouzané.
Brenduf. Saint-Pabu.
Breneben. Scaër.
issr- î 9* <« — >• issL
Brennéméré. Mespaul.
Breneol. Landudec.
Brenesquen. (3) Saint-Pol-de-Léon.
Brenevet. Plouider.
Brengotven. Landudec.
Brengoulou. (4) Saint-Vougay.
Brengovet. Plounévez-Lochrist.
Brenigant. Tau lé.
Brennilis. Loqueffret.
(1) Le mot français « branche, » dont l'origine est dit-on inconnue,
peut v«mir de Bran. Il en est de même de « brandon, brandevin, etc. »
Ce dernier mot était probablement dans l'origine, le nom d'une boisson
fermentée fabriquée avec des fruits sauvages, et devait signifier
« liqueur d'arbres • ou « liqueur de forêt, » nom qui la distinguait des
boissons faites avec du miel ou d'autres substances. Pour l'introduction
du c — g et du d, qui peut s'expliquer par l'altération nasale du n,
voir Gragn, Creign = Grangn, Crengn ; Brign —Bringn (pages 63, 67)
et Brandicouet, Brandi frout, etc. (p. 68). Dans d'autres circonstances,
i
— 67
LOCALITÉS.
Brenilour.
Brenizennec.
Brenphuez.
Brentenvœs.
Brenterch.
Brenyer.
% Combren.
Kerbrencn.
Kerganabren.
Korganabren. ,
Jfoabren.
Tilibrennou .
Breunen.
Breunen.
Coat Breignou.
Brigno.
Brignon.
Brignogan.
Brignou.
Bringurast.
Kerarapran.
Kerarapran.
Keramprannou.
Groas pren.
Croas pren.
Croas pren.
Croes pren.
Coatnempren.
Goaspren.
Goasprènn.
Pont pren.
Pont pren.
Pont pren.
COMMUNES.
Plouhinec.
Plozévet.
Pemeurit.
Plounévez-lochrist.
Ploumoguer.
Mahalon.
Plomelin.
Tourc'h.
Plourin.
Milizac.
Plomodiern.
Berrien.
Plouider.
Saint- Méen.
Bourg-Blanc.
Plomodiern.
Plouzané.
Plounéour-Trez.
Berrien.
Goulven.
Argol.
Telgruc.
Dirinon.
Plabennec.
Plouguerneau,
Henvic.
Saint-Thois.
Tréflaouénan.
Plounéventer.
Fouesnant.
Esquibien.
Ploaré.
Telgruc.
celte altération amène le changement du d en n, ex : an nor (la porte),
a=s an dor ; an nou glin (les genoux), s=s an don glin (Catholicon).
(2) On trouve Âlvar pren (lisez Aval pren), « pommier » dans le
Gartulaire de Landévennec, XI e siècle.
(3) « Bois de scie, » c'est-à-dire, je pense, « bois de haute futaie. »
Brenesken signifie littér. « bois » ou « son de scie. » Le vieux fran-
çais «bran,» en breton «bren » (son,) paraît venir du celtique bran
(bois). Le son est en effet la partie grossière et ligneuse du grain.
(4) Ce mot signifie Bois de la lumière. C'était probablement un arbre
résineux dont on faisait de» torches.
— 68 —
LOCALITÉS.
COMMUNES.
Prenagroahic
Pren gourven.
Keravran.
KervraD.
Kervran.
Kervran .
Kervran.
Kervran.
Kervran.
Kervran.
Kervren.
Kervren.
Kervren.
Kervrennen.
Kervrennic.
Leuhan.
Plouguerneau.
Plourin.
Plouarzel.
Scrignac.
Spézet.
Landivisiau.
Elliant.
Trévoux.
Guilligomarc'b.
Plougoulm.
Saint-Yvi.
Névez.
Langolen.
Gouézec.
(Morbihan).
Branbily.
Branceleu.
Brancelin.
Brancelin.
Brandecel.
Brandéha.
Brandérion : Branderyoh, 1363.
— Prédiryon, 1385. — Bran-
deryon, 1386. — Brende-
rion, 1415. — Bréderyen,
1422. (Bois de chênes)
Brandeseul.
Brandicouet (bois du bois).
Brandifrout (bois du ruis-
seau) (1).
Brandivy (bois d'ifs).
Branduec (2).
Brandumois.
Branférel.
Branfereux.
Sérent.
Gléguérec.
Pénestin.
Sérent.
Saint-Guyomard.
Allaire.
Brandérion.
Concoret.
Saint-Jacut.
Quistinii
iC.
Grand-Champ.
Ploërdut.
Béganne.
Guerno.
Glénac.
(1) Dans ces noms, où Von remarque comme dans plusieurs autres
qui figurent dans cette liste, l'introduction du d après le n, la voyelle t
est purement euphonique ou représente l'article défini an dégénéré.
(2) « Bois doux, » voir le mot réglisse dans le dictionnaire du
P. Grégoire de Rostrenen.
69 —
LOCALITÉS
i %
Brangaison.
Brangelia.
Brangil. *
Brango.
Brangohan.
Brangolo (1J.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo.
Brangolo (Le haut et le bas.)
Brangon.
Brangouan.
Brangouretlp.
Brangournais.
Brangouserh.
Branguen.
Branguerin (Le).
Brangueul.
Branguily — Brengilli,1228.—
Branguili, 1270. — Breguilli,
1301. — Brenguili,1406, Gueltas.
Brangurenne.
Branhoc(grand et petit).
Branily.
Branla.
Brannec.
(Id).
Branroch (grand et petit).
Branrue.
Branran.
Branseguet.
Bransquel (haut et bas.)
Brantonnais.
Brantry — BranlieLXlV* siècle.
— Brenlril, 1417. Lanouée.
Le Branzais. Péneslin.
COMMUNES
*
Saint-Dolay.
Concoret.
Arradon.
PloërmeL
Guilac.
Carentoir.
Caro.
Guidel.
Landévant.
Locmalo.
Mauron.
Noyal-Muzillac.
Saint- Caradec-Trégomel.
Saint-Samson.
Theix.
Inzinzac.
Baden.
Kervignac.
Limerzel.
Saint-Servanl.
Moustoirac.
Arzal.
Rieux.
Inzinzac.
Muzillac.
Locoal-Mendon.
Bubry.
Remhiiac.
Ile-aux-Moines.
En tre l'île-aux-Moines et Sarzeau .
Riantec.
Nivillac,
Surzur.
Guillac.
Pluneret.
Pleucadeuc.
(3) Voir la note 4, page 67.
6
— 70 —
LOCALITÉS. COMMUNKS.
Branzan. Cad en.
Branzar. — Brensar, 1416. Locmalo.
Branzédy. Lizio.
Branzého. Landaul.
Berhuider. — Branbuidez,
1842. Grand Champ.
Kerbren bras et bihan. luzinzac.
Brena. Saint-Servan.
Brenantec. Plouharoel.
Brénében. Roudouallec.
Brenedan. — Brannadan, 1447. Grand-Champ.
Breneuh. Pluraelin.
Breniel. Saint.
Breniguy. Sl-Caradec-Trégomel.
Brennès. Gourin.
Le Brenno. Carnac.
Brenolo. Plescop.
Brenolo (Le grand et le petit). St-Jean-Brevelay.
Brenudel. Sarzeau.
Brenugat. Lizio.
Brenzent. Plœmeur.
Bernon. — Breniou-Rewis,
878. — Forêt de Bernon,
1395. Sarzeau.
Brignac. Brignac.
Brignac, forêt. Saint-Guyomard.
Brignolec . Saint-Tugdual .
Bringa. Peillac.
Bringuin. Nivillac.
Bernéan (HautetBas), village et
bois. — Bronn-Ewin, 840.
— Lisbroniwin, 844. Campénéac,
Pranère. Saint-Pierre.
PrantarfT. Caudan.
Préhenno (Le.) Caden.
Coetpren. Quislinic.
On trouverait je crois dans l'examen des noms qui figurent
dans ces listes, matière à plus. d'une observation intéres-
sante mais ce serait m'écarler de mon sujet que de m'y arrê-
ter (1), et avant de quitter ce substantif « prolée », je me
(1) Je ne crois cependant pas devoir omettre la remarque suivante
J'ai donné ailleurs (Revue archéol., année 4874, et Bulletin de la Soc
— 71 —
bornerai à dire que le moi pnn = pran qui a succédé à cran el
qui signifiait aulrefois une forêt, un bois (in Brengoen,
quod alio nomine dicitur ncmus vallis. — Cart. Redon,
an. 1130-1140, p. 395.) a perdu ce sens depuis long-
temps dans les dialectes cambrien, comique et armoricain
où il ne sert plus aujourd'hui qu'à désigner un. seul arbre,
el plus souvent une pièce de bois ouvré, ex. : Tont-prcn,
pont de bois ; Croas pren, croix de bois ; Boutou pren,
chaussures de bois, sabols, etc. Quant au mot Cran, la perle de
sa signification primitive est au moins aussi ancienne. On les
voit l'un et Vautre dans les listes ci-dessus, en composition avec
le mot Coat qui signifie aussi « bois, » (Coat cran, Cran coat, Coat
pren, etc. littéralement bois du bois). Comme exemple analogue
de la disparition d'un mot celtique dans la langue popu-
laire, je citerai le mot Avon ou Aon, rivière, qui n'est plus
compris et qui a été remplacé par le mol Stcr. On trouve
dans l'arrondissement de Châteaulin un cours d'eau important
que l'on appelle Stcr-aon, littéralement « la rivière de la
rivière. »
On a pu voir par les listes qui précèdent, que si dans un
grand nombre de cas le mot cran s'est changé en pian ou
6ran, en Armorique il a aussi'conservé bien souvent sa forme
primitive (Ij. Ceci confirme ce que j'ai dit à la page 68 de
la manière dont celle mutation s'est opérée. Les faits ont du
se passer de la même façon dans le reste de la Gaule, si on en
juge par la nomenclature suivante que me fournissent les
Dictionnaires topographiques de quelques-uns de nos dépar-
tements.
Archêol. du Finistère, T. H, p. 38), des exemples oui prouvent que dans
les inscriptions anciennes et dans les manuscrits, les mutations de> con-
sonnes sont quelquefois indiquées dans les noms celtiques (ex. : Vorgan-
ium =? Morganium ; Vorgium = Borgium). Le mot Bran =
Pran, qui tiguiv si souvent dans les listes précédentes, est une nouvelle
preuve a l'appui de cette assertion.
(1) H est assez curieux de trouver dans le département des Basses-
Pyrénées, une localité dont le nom qui était Crampas vers 1540, est
devenu aujourd'hui B rampa.
— 72 —
Localités qui ont conservé dans leur nom la forme primitive
Cran (bois, forêt).
Ain.
LOCALITÉS.
Crans, commune.
Aisne.
Crandelain, commune. — Crandelain,
1145. — Crandelanii, XIII* siècle. —
Crandelein, 1261. — Grandelayn,1263.
— Crondelain, 1285. — Grandelaing,
1405.— Crendelain (Carie deCassini).
Cranière (La), maison isolée.
Cranières (Les), hameau.
Craône, ferme. — Crenne, 1416. —
Craincs, 1466. — Crenni, 1195. —
Crosne, 1568. — Cresnes, 1709. —
Crenes, 1745. — Crasne, 1764.
Craonne, chef-lieu de canton. — Grau-
henna, IXe siècle. — Croona, 906 ;
Crauna, 911. — Craubena,vers 991.—
Creunna, 1090. — Croana, 111*2. —
Chroonia, 1145. — Crauenna, 1154.
— Craonna, 1230. — Cranne, 1651.
Craonnelle, commune. — Creune'Ia,
1 140 ; Creonclla,- 1 140 ; Craonnella,
1141 ; Croenilia, 1146. — Croenela,
1220; Croenella, 1248. — Crannella,
1361. — Cronnelles, 1497 ; Crannelle,
1545.
Cresne, bois. — Chresne, 1613. — Bois
de Craine (Carte de Cassini).
Aube.
Crancey, commune.
Creney, commune.
Cransac, commune.
Crandelles, commune.
Aveyron.
Cantal.
Côtes-du-Nord.
Crehen, commune.
COMMUNES.
Happencourt.
SaintGobain.
Coucy-la-Villc.
Noroy et Troësne.
• — 73 —
LOCALITÉS.
Dordogne.
COMMUNRS.
Crognac, hameau. — Castrum Craonia-
cum, avant 1285.
Eure-et-Lolre.
Crances (Les), hameau.
Crannes, ferme.
Crenne, ferme.
Cronerie (Bois de la), faisait partie de la
forêt de Dreux.
Creoo, commune.
Crançot, commune.
Crans, commune.
Crenans, commune.
Gironde.
Jura.
Landes.
Creon, commune.
Haute-Marne.
Crenay-sur-Suize, commune.
Mayenne.
Craon, commune.
Crenncs, commune.
Meurthe.
Craincourt, commune. — Licramrio
curie, 777. — Cruncurt, 1152. — Crin-
curt, 1278. — Craincort, 1281. —
Creincourt, 1285 et 1476. — Craincu-
ria,1481.
Craincourt (Gagnage de), 1471.
Craincourt (La maison forte de), 1779.
Crantenoy, commune. — Ôretenau,
X e siècle. — Crantenau ; capella in
Crantinau villa ; ad Cratinau ,
XII e siècle. — Cranlenou, 1240.
— Crantenoy, 1240. — Crantheno,
1357. — Cianlhenou, 1368. — Cran r
teno, Cranlenol, 1399. — Crantenau,
Cranleneyum,1402. — Cranteno,15'26.
Craon, château.
Saint-Astier.
Gohory.
llliers.
Lanneray.
Sorel.
Essey-lez-Nancy.
Essey -lez Nancy.
Haroué.
— 74 —
LOCALITÉS. COMMUNES.
Meuse.
Cranière, bois. Bazeille.
Basses-Pyrénées.
Granesle (Le), ruisseau. Bassussary et Ba-
yonne."
Haut-Rhin.
Crain (Au), 1586-1607. Argiésans et Che-
i r • , i vremont.
La Craintole, ruisseau. Lièpvre.
Le Cran, canton des territoires de Cha- '
tenois et de Bessoncourl. — Sur le
Cren, 1620.
Sarthe.
Crannes-en-Champague, commune.
% Vienne.
Craon, commune.
Yonne.
Crain, commune. — Crinsensis vicus,
VII e siècle. — Cranum, 1186. —
Crenum , 1203. — Cranium , XV»
siècle. — Cren, vers 1135. — Crin,
1782.
Crançons (Les), hameau et moulin. Toucy.
Cranne (La), hameau et ferme. Rogny .
Localités dans le nom desquelles la forme primitive Cran
s'est changée eh Pran = Bran (1).
Ain.
LOCALITÉS. COMMUNES.
Brenaz, commune.
Brenod, commune.
Brens, commune.
(1) Dans ces listes comme dans les précédentes il eut été plus logique
de placer Pran avant Bmn puisque celte dernière forme n'est que le
résultat de la mutation régulière de p en b. Mais je dois faire observer
que l'apparition de Bran dans les titres est aussi ancienne que celle
de Pran.
— 75 —
LOCALITÉS. COMMUNES.
Aisne.
Braine, commune. — Brennacum, 560 (2).
— Brinnacum, 578. — Braina, 931.
— Brennie, 1143» — Brana, 1 163. —
Brenna, XII e siècle. — Branium, XII e siè-
cle. — Brainne, 1238.— Brena, 1296.
— Brenne, 1319. — Brayne, 1354.
Brancourt, commune. — Brouncourt,
1100. — Broiencourt, 1132. — Broin-
curt, 1142. — Broiencurt, 1178. —
Berencurt, 1193. — Broiencort, 1218,
— Brancourt, 1729.
Brancourt, commune. — Berincurtis, 1 1 27 .
— Brancort, 1136. — Berencort, Be-
rencurt, 1138. — Brandicurlis, 1145. .
— Brahencourt, 1151.— Bruencort,
1160. — Berincort, 1176. - Beren-
curtis, 1193.— Braincort, 1222.—
Berincourl, 1295. — Braincourt, 1373.
— Brancourt, 1540.
Brancourt-le-Court, ferme. — Brancou-
court, 1610. — Brancocourt (carte de
Gassini). Brancourt.
Brandignon, bois. — Branumignt, XII e
siècle. — Brandignion, 1649. Hary.
Brandouille, ferme. Hary.
Brandouille, dépendance du hameau
d'Entre deux-Bois. Ëtreaupont.
Brandouzy, château. — Brandousis, 1483.
— Brandouzi, 1590. — Brandouzis,
1568. Malzy.
Branges, commune. — Brangia, 1179.
— Brange, 1645.
Brangicourt, moulin détruit. — Brangi-
curl, 1159. —Brangicourt, 1173. Festieux.
Branzons (Les), bois. Aizelles.
BraZicourt, hameau — Branzicurt, 1 159.
— Brangicorl, 1224. — Brangecort,
1227. — Bransicorl, 1230. — Bransi-
court, XIII e siècle. — Branzicourt,
1405(3). — Brangicourt, 1496. — Bran-
gycourt, 1496. — Banzicourt, 1504. Grandlup-cl-Faye.
(1) Brennac me paiait être synonyme de Prenig = Crannec,
«boisé, » (nemoro&us). Voir p. 58. Cfr. Briac = Briee ?=: Brieuc =x
Brioc.
"(2) Cfr. supra Brandicurtis (Brancourt). — Voir la note page 56.
LOCALITÉS.
Breneha, moulin à eau.
Brenelle, commune.— Branella, 1147.
— Beroelle, 1208. — Beroella, 1208.
— Bernelles, 1369.
Brenoisc, ferme détruite.
Breny. — Berny, 1654.
Noirieu (Le), rivière. — Biïus de Braon,
1208. — Son lit a élé ulïli-e du 1662
a 1680 pour le flottage des bois de la
forêt duNouvion.
Montbrebain, commune. — Montbrahain,
1151.— Moulbrehaing 1227.— Mon-
brehaing, 1245. — Mombreliaing,
1275. - Monbrahain, 1318. — Mom-
brehains, 1565. — Monbreliin, 1675.
— Monlbrin, 1684. — Mombrain, 1684.
Bengneuir.
Oulchy-le-Château.
îoué, Etreux, Le
Nouïio:i et Va-
dencouil.
Prangelois, fief.
Pringy, ferma et hameau. — Pringi, 1259,
— Pringcium,'XIII" siècle.
Pringy, bois.
Pringy, maison isolée.
Alaincourt.
Bozet -Saint-Albin.
Neuilly. St-Froul,et
Rozel-Sl- Albin.
Nanteuil-Vichel.
Allier.
Bransat, commune.
Hautes-Alpes.
HoDlbrend, commune.
Ardèche.
Pranles, commune.
Aude.
Brenac, commune.
Calvados.
"ïranville, commune.
Charente.
'ransac, commune.
Charente-Inférieure .
Iran, commune.
— 77 —
LOCALITÉS.
Corrèze.
Branceilles, commune.
Corse.
Brando, commune.
Côte-d'Or.
Prenois, commune.
Côtes-du-Nord.
Prenessaye (La), commune.
Dordogne.
Branchât, hameau.
Brandal (Le), écart.
Brandal (Le), lieu.
Brandau, domaine.
Brande (La), lieu.
Brande (La), lieu. — Las Brandas.
Brande (La). — La Branda, 1468.
Brande (La). — LaBranda, 1459.
Brande (La), écart.
Brande-del-Rey (La), localité.
Brandes (Les). — Las Brandas, 1693.
Brandines (Les), écart.
Brange (La) 1671, métairie.
Brangelie(La.)
Branle (Le) (1), lieu.
Branle-Bruno,, hameau.
Branle-Pelle, hameau.
Brenac, village. — Brenac 1251. — Bren
as, XIII e siècle. — Brenaco, 1481.
Brenil (Le), hameau v
Brenoutren (La), bois.
Prandie (La), hameau.
Brendavaux, taillis.
Preneyrie? — Preneyria, 1481.
Doubs.
Branne, commune.
Drôme.
Bren, commune.
COMMUEES.
Montplaisant.
Bergerac.
Lanquais.
Neuvic.
Coulounieix.
Grignol.
Lusignac.
Sainl-Pompon.
Sarlat.
St-Germain-et-Mons
Vallereuil.
Bergerac.
Limeuil.
Vanxains.
Boisseul.
Beleymas.
S-Front-de-Pradoux.
Montignac.
Bergerac.
Mayac.
Valojoux.
Sainte- Croix-de-Ma-
reuil.
Agouac.
(i) Branle, Branler ; c'est le mouvement de la branche (Bran)
agitée par le vent.
— 78
Eure-et-Loir.
LOCALITÉS. .
Brandelon, village. * — Pende-Lupum,
1180.
Brandelon, ferme, mentionnée en 1488.
Branle (La), ferme.
Branloires (Les), hameau.
Brainville, ferme. — Brainvilla, 1164.
Blanchadier(Le),hameau.— Branchardier,
1C26.
Vallée des Brandes (Ruisseau de la).
Prainville, hameau.
Prena(Le), ferme. — Preignalz, versl535.
— Prenard, 1677.
Princelière (La), hameau.— Prentencièrc,
1300. — La Prinstière, 1666.
Pruneville, village. — Premodis-villa,
1003. — Premetis-villa, 1080. —
Premevilla, 1209. — Preraeville, 1270.
— Prenneville, 1486.
Gard.
Branoux, hameau. — Branosco, 1339.—
Branasco, 1346. — Brenoux, 1635.
Branoux (Le), ruisseau.
Braune(La), ruisseau. — Branuho,t576.
Breau, commune. — Breono, 1331. —
Breono, 1417. — Breone, li6l. —
Breono, 1513.
Bréaunèze, ruisseau. — Breoneza, 1440.
— Breoneze, 1507.
Brenas, ferme. — 1780.
Brennes, lieu détruit. — Brena, 1146. —
Brena, 1310. - Breyne, 1566.
Brignon, commune. — Briginn (ones),
inscription du musée de Nîmes. —
Brinno, 1108. — Brinnonum, 1207 et
1237. — Brinno, 1273. — Brinnonum,
1281. - Briniono, 1314.— Brinho-
num, 1381. - Brignon, 1547. —
Brinhon, 1553.
COMMUNES.
Bazoches-les- Hautes
Illiers.
St-Denis-des-Puits.
St-Lubin de la Hay.
Fains.
Unverre.
Montlandon, Cham-
pronden-Gâtine
et Pontgouin.
St-Jean-Pierre-Fixle.
Nogent-le Rotrou.
Si-Denis -d'Authou.
Guillonville.
Blannaves.
Blannaves et Salles-
du-Gardon.
Parignargues , Ga-
jan, Saint-Bau-
zély , Bouvière-
en-Malgoires, Cal-
melte et Dions
Breau et Salagosse. %
Montclus.
Redessan .
— 79 —
LOCALITÉS. COMMUNES*
Gers.
Preneron, commune.
Gironde.
Branne, commune.
Brannens, commune.
Monlpriublanc, commune.
Va
Hérault.
Brenas, commune.
Isère.
Brangues, commune.
Prenovel, commune.
Jura.
Brans, commune.
Loir-et-Cher.
Prenouvellon, commune.
Lot.
Brengues> commune.
Lozère.
Brenoux, commune.
Manche.
Branville, commune.
Marne.
Brandonvillers, commune.
Branscourt. commune.
Haute-Marne.
Brennes, commune.
Prangey, commune.
Meurthe. .
Braiedebourg, moulin. — Brindebourg
(Gassini). Maizières-lez-Vic.
Branches (Les), forêt. Rhodes et Languim-
berg.
- 80 —
LOCALITÉS.
Breoon (Le), rivière.
Bringole (La), ferme.
Bernécourl, commune. — Bernaicuria,
1120-1163. — Breniencourt, 1322. —
Brenaincourt, 1339. — Brenaicuria et
Brenaicourt, 1 370. — Brenécour l, 1421,
— Breneicourt, 1441. — Breneycourt,
1551. — Beurnecourl ou Bernecourl,
1719.
Lafrirabolle, commune. — Lascebranne,
1203. — Laffenborna, 1244. — Laf-
frenbonne, 1248. — Leffenborne, 1248.
Leffrenborne, Laffremborne, 1324. —
Lai Frembonne, 1352. — Leffelbron,
1590. — La Fraimbolle, 1594. -
La Frembonne, 1667. — La Frainbole,
1710.
Preny, commune. — Prunidum, 745.
— 'Prisgney, 960. — Prisney, 977. —
Prisneo, 1065. — Prisnay, Prisnei,
1138. — Prigney, 1120-1163. —
Prisneio, 1162.— Prisnei, 1209. —
Priney, 1220-1251. - Priney, 1293.
— Prignei, 1332. - Pringney, 1349.
— Parney, Prineyum,Parneyum, 1402.
— Preney, 1444. — Prugneyum, 1530.
— Priney-au-Duc, 1542. — Preny-
le-Duc, 1571.— Preny, Perny, ou
Priny, 1719.
Meuse.
Bragnière, contrée et pont.
Brandecourt, hameau.
Brandeville, village et ruisseau. — Bran-
devilla, XVI* siècle.
Brandiat, moulin.
Brandon, contrée.
Branière (La), ruisseau.
Braquemères, bois qui faisait partie de la
forêt de Belnoue.
COMMUNES.
Grimonviller, Féco-
courl , Thorey ,
Houdreville, Van-
deléville, Àutrey,
Vélize et Omel-
mont.
Maizières-lez-Vic.
Boureuilles.
Ville-en-Woëvre.
Damvillers.
Saint-Remy.
Haltonch&lel.
VauquoiselBoureil-
les.
Sommeilles.
— 81 —
LOCALITES. COMMUNES.
Vrainrourl, hameau. — Brencourt, 1615,
— Wraincuria, 1583. — Wraincourt. Clermont-en-Argon-
ne.
Preny, commune. Bouquemont.
PriguoD, bois. Bouquemont el Louy-
Prigneux, bois. py-le-Petit.
Oise.
Brenouilles, commune.
Puy-de-Dôme.
Brenat, commune.
Basses-Pyrénées.
Brana. ferme. — LoBranaa. Salies.
Brana, fief. Vielleségurc.
Haut- Rhin.
Bramont, ferme. — Bremunt (anc. ca-
dastre). Krûlh el Wildenlein .
Bramonl ou Bramonlkopt, mont. — Bos-
chbranndt, 1550. Wildenslein.
Branbornenwald, forêt. Breitenbach.
Branchière, canlon du terriloire de Bue.
Brand, forêt. — Ain Brenden, am
Prende, 1667. Rimbach.
Brand, hameau. Hussein,
Brand, vign. — Am Brande, 1456. Turckhein.
Brandhurst, vign. — Branthurst, 1475. Bergheim et Rors-
chwihr.
Brandlilt, ferme. — Branllil (Cassini). Mûhlbach,
Brandmallenrunlz, ruisseau. Sondernach.
Brandschert, canlon du terriloire de
Seppois-le-Bas.
Brandstalt, canlon du terriloire d'Eschenlz-
willer. — Brandschatz,1545. —Brands-
talt, 1766.
Branne, 1665, canlon du territoire de
Bessoncourt.
Braunkoëpfle, mont. Mûhlbach
Bremont, canton des territoires de Mor-
villars et Mesiré.
Bremont, forêt. Belfort.
Brendenberg, forêt et montagne. Lutter et Wolsch-
willer.
— 82 —
LOCALITÉS. COMMUEES.
Brendenwald, forêt. Altenbacb.
Brang arien, canton des territoires de
Fislis et Hewiller.
Brennacherle, ferme. — Preneckerl (Cas-
sini). Stosswhir.
Brennnullen, fours. Bergheim.
Brennwald, mont, Urbès.
Brentenrobr, canton du territoire de
Ballersdorf.
Brinckbeim, commune. — Brunchein,
1285. - Brunkein, 1303. — Bruuen-
khin, XVII e siècle. — Pringgen.
Brinighofen, commune. — Bruonichove,
1216. — Brunkofen, 1312. — Breunig-
khouen, 1581. — Brinninghofen, XVII e
siècle.
Le Brinvau, hameau. — Brinval. Bierevescemont.
Brandt (anc. cadastre). Moosch.
Pour la forme Pren, voir Brand, forêt,
Brennackerle, ferme, et Brinckbeim
commune.
Saône -et- Loire.
Brandon, commune.
Brandon, commune.
Branges, commune.
Tarn*.
Var.
Vaucluse.
Vienne.
Vosges.
Brens, commune.
Brenon, commune.
Bran tes, commune.
Branches, commune.
Brancourl, commune.
Brantigny, commune.
Yonne.
Branchereaux (Les grands et les petits),
hameaux. Bleneau.
Branches, commune. — Bringa, VI e siè-
cle. — Brenchœ,XIH e siècle. — Bran-
chiœ, 1247. — Branches, 1453.
— 83
LOCALITES.
Branches (Les), hameau.
Brangers (Les), ferme.
Brangers (Les), hameau.
Branlain, ruisseau.
Branlards (Les), hameau.
Branlin, hameaux.
Branloir, ferme.
Brannay, commune. — Bradenas, IX e
siècle. — Brannaicum, 1175. — Bra~
nai, vers 1163. — Brahanai, 1165. —
Brannay, 1453.
Brenellerie (La), ferme. — La Brunellerie,
1504. — La Brenelerye, 1523.
Prenereau, hameau. -*- Prunellum, 1283.
— Premereaul, 1331. — Prenereau,
1597.
Prenoulat, moulin.
Prunelles, hameau. — Prenelles, 1677.
— Prunel, 1736.
COMMUEES.
Ghampvallon.
Champcevrais.
Fonlenouilles.
Saints.
Vareilles.
Champignelles et
Sainls.
Saint-Bris.
Rogny.
Migé.
Crain.
Champlost. (1)
Je me suis peut-être trop étendu sur un sujet qui in-
téressera peu de lecteurs, mais je n'ai pas cru devoir négli-
ger des détails, même minutieux, pour arriver à une démons-
tration que j'appellerai presque mathématique.
M'autorisant de l'opinion de Zeuss et d'Ebel, qui comme
exemple de l'application de celte loi, citent : Mons*Apenninus n
je crois avoir donné d'autres exemples assez probants, sinon
absolument péremploires, de la mutation du c en p dans
quelques noms gaulois. J'ai donné des preuves certaines de
celle substitution dans d'autres dialectes celtiques.
Si j'applique maintenant ces démonstratons au bénéfice de
ma thèse, je suis en droit de dire que puisque
tv.-
Cran = Pran
= Bran; que Guic = Guip,
Cribale = Brivales.
Or si on admet, comme j'ai essayé de l'établir, que Geso
(1) On trouve en Angleterre les villes de Cranbourn (Dorset), Cran-
brook (Kent), Braintree i^Essex) et Brentfort (Middlesex).
— 84 —
répond au cellique Gicez ou Gxcczio (1), on arrivera à cette
conclusion, que Geso-Cribate el Brivates portus ont exacte-
ment la même signification.
La carte de Peutinger, où se lit le mot Geso-Cribate, date
du temps d'Auguste et par conséquent des premières années de
l'ère chrétienne ; Ptolémée qui nous a fait connaître le nom de
Brivates portus, vivait vers Tan 120 de notre ère; il s'est
donc écoulé au moins un siècle entre la rédaction des deux
documents qui nous donnent le nom de celte localité, et ce
temps me paraît bien suffisant pour expliquer et pour justifier
une mutation dont l'usnge dans la plupart des dialectes celti-
ques, était le résultat d'une loi déjà ancienne.
En tenant compte, avec mesure, de cette loi de mutation,
peut-être parviendrait-on à retrouver l'étymologie de bien des
mots dont l'origine nous paraît aujourd'hui douteuse. Un exem-
ple en passant: l'origine du mot français « bois » est dit-on
inconnue. D'après les observalions qui précèdent, ce mot peut
cependant venir du cellique Coid % Coit, on Coet = Cois ou
Coes = Bois.
Le Caslrum de Gesocribate, ou de Brest, a gardé pendant tout
le moyen âge, et jusqu'à nos jours, l'importance qu'il avait à
l'époque gallo-romaine, importance attestée par les murs an-
tiques qu'il conserve encore. Rien n'indique que ce nom de
Brest qui figure dès le IX e siècle dans l'histoire de Brelague (2),
ait été modifié autrement que par le changement de Cribale
en Brivates. De ce dernier mot est venu parmétalhèse Brivest
= Brevest qu'une simple syncope a régulièrement transformé
en Brest.
11 est évident que Brest n'aurait pu venir directement de
Cribate; mais ce qui ne me paraît pas moins certain, c'eslquc le
latin crista et le français creste sont issus du celtique Cribate
(1) Comme exemple de la suppression du icdansiun uora celtique
je citerai encore: lat. Redones (Rennes) = arm. Rwazon, voir page 56,
(2) Oppidum de Bresta. — D. Lobiueau, Hist. de Bretagne, preuves
col. 42. *
— 85 —
= Cribates, qui a là même signification, par un procédé de
transformation identique à celai qui a rendu possible le chan-
gement de Brivaîes en Brest (Grivest = Crevés!, = Crist
= Creste).
Le mot celtique' Cribat, avec son suffixe grec et romain
(Cribates), s'est d'ailleurs conservé sous d'autres formes que
Brest et Creste, dans les noms de lieux de la France, comme
le démontre la liste suivante, dans laquelle à côté de ces
deux nom's, figurent fréquemment ceux de Brives, Privât, etc.,
issus du même radical Crib, qui, je le répète, signifie « crête, »
« éminence, » « promontoire » etc. (l)w
LOCALITÉS.
Aisne.
COMMUNES.
Grevet, hameau.
Brivarde, bois.
Courboin.
Guivry.
•
Ardèche.
*
Crestet, commune.
Privas.
Avèyron.
Privezac, commune.
Calvados.
Crèvecœur, commune.
Grislot, commune.
Charente.
Brives-sur-Charenlc, commune.
Gorrèze.
Brives, commune,
Brivezac, commune.
Dordogne.
Grives, commune. — Grivas, XIII e siè-
cle.
(i) J'ai omis dans cette liste un assez grand nombre de localités dont
les noms renferment les radicaux Crap, Grap, Crav, Craf, Grav, Graf,
Krafet Krap que je considère comme à peu près synonymes de Crib.
Soc. Archéol du Finistère. — T. VI. 7
— 86 —
L0CAUTÉ8.
COMMUNES.
Crest, commune.
Cre ton, commune.
Crestot, commune.
Brestot, commune.
Drôme.
Eure.
Eare-et-Loir.
Gripardière (La), écart.
Griperets (Les) ♦
Grippe (La), hameau.
Grippet (Le), ferme.
Finistère.
Crepily.
Lescreven, village.
Criben, ferme.
Creac'h-Criben, ferme.
Quenec'h-Cribet, ferme.
Coz-C'hribin, ferme.
Cribinec, ferme.
Crip, ferme.
Kergreven. — Kergriffen, 1426.
Kergreven, village.
Kergreven. village.
Kergrip, ferme.
Brest (ville de).
Brest-tier, village.
Kerbrest, village.
Pont-ar-Brest, village.
Lambresten, village.
6rév6z
Brivel (Stang) 1426-
Gard.
Gravas (Le), ferme.
Cravat (Le), quartier, 1554.
Grave (La), hameau et moulin.
Grave (La), quartier, 1547.
Grave (La), ferme et ruisseau du Vignan.
Ctjamprond-en-Gâ-
tine.
Happonvllliers.
Saint- Georges-sur-
Eure.
Moléans*
Querxien.
Plouguin.
La Forest-Brest.
Irvillac.
Pleyben.
Plouyé.
Plouguin.
Plouédern.
Landévennec.
Clohars-Carnoët.
Lampaut-Guimiliau,
Tréflévénez.
Clohars-Carnoet.
Riec.
Lennon.
Guiclan.
Landéyennec.
Saint-Goazec.
Plogaslel-St-Germ.
Kernével.
Bez-et Esparron.
Sernhac.
Bez-et- Esparron.
Sainte-Anasthasie.
— 87 —
LOCALITÉS.
COMMUNES.
Graves (Les), ferme.
Saint-HippoIyte-du-
«
Fort.
Graventes (Le), ferme et commune.
Saint-Martin de Cor-
cona.
Craveron (Le), nom d'une section du
cadastre de Monfrin.
Graveson (Le), quartier.
Gervasy.
Crèpeloup, ferme. — Crepalupo, 1345.
Alais.
•
Crès (Le), ferme. — Crès, 1263. —
Cressid, 1315. — Gretio, 1375.
Arrigas.
Crès (Le), ferme.
Anduze.
Crès (Le}, hameau.
Crès (Le), mont.
Pompiguan.
Vezenobre.
'
Crestat (Le), ferme.
Crevecor, ferme. — Crebecor, 1596.
Arphy.
r
Aimargues.
Brès, ferme 1731, ancienne grange des
Templiers.
Goudargues.
Brès (Le), hameau.
Saint-Sébasliend'Ai-
a
grefeuille.
■^
Brest, ferme.
Beaucaire.
Brestalou (Le), ruisseau.
Lauret (Hérault),
BrouzetetSardan.
Privas, ferme.
Barjac.
Privât, ferme.
Beaucaire.
Privât, hameau.
CornilloD.
Privât, ferme.
Fourques.
Privats (Les), hameau.
Blannaves.
Haute-Garonne.
Bretx, commune.
Indre.
Brives, commune.
Haute-Loire.
Brive, commune.
-
Loire - Inférieure.
'
Brivet, village et rivière.
Guenrouet
Manche.
Cretteville, commune.
Haute-Marne.
Crête (La), commune.
— 88 —
LOCALITÉS.
COMMUNES.
Meuse;
Crépion (1) village: — Crupion, 1204:
— Crispeium, 121t. — Crespeium,
1215. — Crépion, 1220, 1240. —
• Crîppion, 1245 — Creppion, 1549. —
Crespion, 1656. — Cropion, 1700. —
Crepio, 1738.
Creuvé, contrée.
Creuvé (Le), chemin.
Grive (La), contrée.
Morbihan.
Kerbrest, village.
Kerbrest, village.
Brestivan, hameau.
Kerbrestou, écart.
Kerbrevais, hameau.
Kerbrevest, hameau et pont.
Grevin, village.
Gribérez, roche sur la rivière de Crac'b,
entre Crac'h et Carnac.
Grifet (Le), village.
Griffons (Les), landes.
Grippais, écart.
Grippe (La), village.
Kergrippe, village.
Grippé (Fort du), sur l'Océan, côte de
l'île de Groix.
Grippez (Le), village.
Pfesievel, écart.
Prévas (Le), écart.
Fuy-de-Dôme.
Crest (Le), commune.
Creste, commune.
Basses-Pyrénées.
Ghrestiaa (Le), écart (2).
Hatlonchâtel et Si-
vry-sur-Meuse,
Dammarie.
Cesse.
Berné.
Guidel.
Theix
Lanvènégen.
LimerzeL
Bubry.
Arradon.
Plougrifet.
Guer.
Guillac.
Caden.
Gourin.
Saiut-Bolay.
Pluneret,
Saint-Dolay.
Cosledaa-Lube-Bo-
ast.
i
(1) Ce mot se trouve dans plusieurs départements.
(2) Ce mot qui, dans les Pyrénées, sert à designer les cagots, doit
avoir une origine commune avec le nom de crétins ou crestins que Ton
donne dans les Alpes à des malheureux aussi à plaindre au point de
— 89 —
LOCALITÉS.
Chresliaa (Le) ou le Crestia, ferme.
Creslia ou Chresliaa, écart.
Creslia, écart.
Crestia, ferme. — Lo Crestiaa, 1385.
Id.
Crestiaa, ferme.
Crestiaa (Le), écart.
Crestiannes (Les), écart.
Creslianottes (Les), écart.
Creslias (Les), écart.
Grel (Le), ruisseau.
Haut-Rhin.
Cret (Le) et Trepont, hameau .
Crests(La Chapelle de). — Im Cret, 1544.
Crestschi, ruisseau. — Kretschy (Carte
hydrographique).— Gretschy (anc. ca-
dastre*.
Cretschiberg, mont.
Crety (Au), cantons des territoires d'Ar-
giesans et de Chèvremont.
Cristés /Les), hameau.— Cristey (anc.'
cadaslre).
Grippes fLes).
Grive (sur le).
Krebsgraben, ruisseau.
Kripfen, 1717.
Kripfmatten, 1568.
Crète il, commune.
Critot, commune.
Seine.
Seine-Inférieure.
Grivesnes, commune.
Crestet, commune.
Somme.
Vaucluse.
COMMUN KS.
Garlède-Mondebat.
Arroses.
Castillon.
Carresse.
Saliespisse.
Bouillon.
Gerderest.
Denguin.
Casteide-Cami.
Dognen.
Beaucourt.
Coucelles.
Sainte -Marie -aux-
Mines.
Sainte -Marie- aux -
Mines.
Baroche.
Fêche-l'Eglise.
Chèvremont.
Feidkirck.
Sigolsheim.
Sentheim.
vue physique que sous le rapport moral. Ils paraissent avoir l'un et
l'autre pour radical le, mot crest, et signifier habitants des crêtes ou des
montagnes dans lesquelles cette race maudite dut être primitivement
reléguée on raison de l'horreur qu'elle inspirait aux autres hommes.
— 90 —
LOCALITÉS,
COMMUNES.
Yonne.
Cravan, commune. — Crevennus, 901.
— Crebanum, XII* siècle. — Crèvent
et Crevenz, 1160-1167. — Cravant,
1226. — Cravent, 1368.
Creverats, hameau.
Gravon, ferme.
Grivet, chemin.
Grivot, lieu détruit.
Grivois (Les), hameau.
Cerisiers.
Venizy.
Trichey.
Ronchères.
Saints.
Afirt de rendre plus sensibles les rapports existant enire les
noms de lieux qui figurent dans cette table, où ils sont classés
par départements, je crois utile de la faire suivre d'une
seconde table où ces localités seront rangées suivant Tordre
alphabétique.
Noms de lieux où le G s'est conservé.
LOCALITÉS.
Cravan. — Crevennus. — Crebannum.
Crepeloup.
Crepily.
Crepion. — Crupion. — Crispeium. —
Crespeium. — Crîppion. — Creppion.
— Crespion. — Cropion. — Crepio.
Crès (Le), fermes, hameau et mont.
Crest.
Crest (Le) et Creste.
Crestat.
Crestet.
Crestet.
Crestia ou le Chrestiaa, Crestiannes.
— Crestianotes et Crestias, écarts et
fermes.
Creslot.
Cret(Le).
Crête (La).
Crète il.
Creton. •
Crets ou Cret.
Cretschi. — Kretschy. — Grelschy.
Crelschiberg.
Crelteville.
Crety.
DÉPARTEMENTS.
Yonne.
Gard.
Finistère.
Meuse.
Gard.
Drôme.
Puy-de-Dôme.
Gard.
Ardèche.
Vaucluse.
Basses-Pyrénées.
Eure.
Haut-Rhin.
Haute-Marne.
Seine.
Eure.
Haut-Rhin.
Manche.
Haut-Rhin.
— 91 -
LOCALITÉS.
Crevé.
Crevé (Le).
Crèvecœur.
Crevecor — Crebecor, 1596.
Lescreven.
Creveney.
Creverats (Les).
Criben.
Creac'h-Criben.
Quenec'h-Gribet.
Coz-C'hribin.
Cribinec.
Crip.
Crevet.
Cris tes (Les).
Cristol.
Critot.
Krebsgraben.
Kripfen, 1717.
Kripfmalten, 1568.
DÉPARTEMENTS.
Meuse.
Calvados,Nord,Oise,
Seine-et-Marne,
Oise.
Gard.
Finistère.
Haute-Saône.
Morbihan.
Finistère.
Aisne.
Haut-Rhin.
Calvados.
Seine-Inférieure.
Haut-Rhin.
Mutation normale du C en G.
Gravas (Le).
Gravât (Le), 1554.
Graves (La), et les Graves.
Graventes (Les).
Graverou (Le^.
Graveson (Le)
Gravon.
Gret (Le).
Kergreven.
Grevin.
Gribérez
Grif et (Le) .
Griffons (Les) .
Kergrip.
Grippais.
Gripardière fLa).
Griperets (Les).
Grippe (La).
Grippe (La).
Kergrippe.
Grippé.
Grippez.
Gard.
Yonne
Basses-Pyrénées.
Finistère.
Morbihan.
Morbihan.
Finistère.
Morbihan.
Eure-et-Loir.
Morbihan.
— 92 —
LOCALITÉS,
Grippes ( Les).
Grippet (Le).
Grive (La).
Grive (sur le).
Grives. — Grivas, XIII - siècle.
Grivesne.
Grivet.
Grivois et Les Grivots
DÉPARTEMENTS.
Haut-Rhin.
Eure-et-Loir.-
Meuse.
Haul-Rhin.
Dordogoe.
Somme.
Yonne.
Mutation du C. en P.
Preslevel.
Prevas.
Privas.
Privas.
Privât.
Privats (Les).
Privezac.
Morbihan.
Ardècbe.
Gard.
^Aveyron.
Mutation du C en 6.
Brès (Le).
Brest.
Brefct.
Brest-lier,
Kerbrest.
Pont-ar-Brest.
Kerbrest.
Brestalou (Le).
Lambresten.
Bresli van.
JBrestol.
Kerbrestou.
Brelx.
Kerbrevais.
Kerbrevest.
Brivarde.
Brive.
Brives*sur Charente.
Brives.
Brives.
Brivet.
Brivezac.
Gard.
Gard.
Finistère.
Morbihan.
Gard.
Finistère.
Morbihan.
Eure.
Morbihan.
Haute-Garonne.
Morbihan.
Aisne.
Haute-Loire.
Charente.
. Corrèze.
Indre.
Loire-Inférieure.
Corrèze.
Ces listes renferment assez d'intermédiaires pour qu'il ne
. reste aucun doute sur la régularité des étymologies mention-
— 93 —
1
nées plus haut» Je crois cependant, pour plus de clarté, devoir
établir entre quelques-uns d'entre eux les rapprochements sui-
vants.
Cbibates. = Brivates.
Dérivés. Dérivét.
Cribet, Grifet (Finistère. Mor-
bihan, Eure-et-Loir, Yonne,
etc.).
Crevet, Crèverais, Grivat, Gri-
vot (Aisuc, Yonne, Morbihan,
etc.).
Greslet, Crestat, Crestot, Cris-
lot, Critot, Cristes (Gard,
Ardècbe, Vaucluse, Calva-
dos, Haut-Rbin, etc.).
Crest, Crets, lat. Crista(Jùràme %
Haut-Rhin, etc.).
Brivet = Privât (Loire-Infé-
rieure, Gard, etc.).
Ker-Brevest, Ker-Brevais, Pri-
vais, Prevas, Brivas, Brives,
(Morbihan, Gard, Ardèche,
Corrèze^Indre, etc.).
Brestot,Kpr-Breslou,Lam-Bres-
ten/ -Brestalou, Preslevel,
Brivezac, (Eure, Gard, Fi-
nistère, Morbihan, etc.). .
Brest, Bretx, lat. Bresta (Fi-
nistère, Morbihan, Haute-
Garonne).
Avant de quitter ce sujet, je dois faire remarquer le rapport
existant entre crib et bric » brig (I), qui a le même sens de
« lieu élevé » et d'où les Bri gantes, peuples qui habitaient la
Gaule et la Bretagne, ont pris leur nom. La forme primitive
de ces deux mots peut bien avoir été crue = crug (montagne)
mot celtique qui existe encore, et dont on peut rapprocher bre
et crec'h, lat. mons % colles. La loi de mutation, développée trop
longuement peut-être dans ce travail, autoriserait donc à faire
de ces divers mots celtiques, le classement suivant :
Cruc
Crib. —Bric.
Crech. — Bre.
Ces mots, comme je viens de le dire, signifient tous « mon-
tagne » ou « colline. » Je pense que cruc a dû donner son
(1) Pour la signification du mot brig, voir la Revue archéologique,
année 1878, 2 e semestre.
- 94 —
nom â bruc, lat. erica, qui est par excellence une plante de
modtagne.
On peut, je crois, résumer de la manière suivante ce qui
ressort, an point de vue philologique, des observations qui pré-
cèdent.
1° Primitivement la consonne c (g, k, ch) avait dans la lan-
gue celtique la valeur de cv = qv ; ez : qvatvùr (petvar) ;
qvinque (pemp) ; eqvvs (ech, ebeul) ; maqv (map, mab), etc.
2° La lettre auxiliaire v n'est franchement ni voyelle ni con-
sonne. C'est une aspiration nasale et légère qui lient le milieu
#
entre ces deux catégories de lettres ; ex : hanv, nom (hanvet,
nommé) = hano ; marv, mort (mervel, mourir) = maro; tarv,
taureau = taro. Dans ces derniers exemples donnés avec
l'orthographe moderne, le son de Vo terminal est très-faible et
je le répète, intermédiaire à celui du v et de Yo français.
3° Cette double lettre cv s'est transformée de là manière
suivante. Tantôt le v est tombé, et la consonne c a conservé sa
valeur actuelle; ex : cran y crt'6, cenn % etc. Tantôt au contraire,
c'est le c initial ou terminal, qui est tombé, et alors le v s'est
changé enp = b ; (voiries exemples cités plus haut) (I).
Il me reste pour compléter ce travail, à répondre sommaire-
ment aux autres objections que l'on a opposées aux partisans de
l'opinion qui place à Brest le Brivates Portus de Ptolémée.
Elles sont au nombre de deux :
I.
Si l'on place Brivates-Portus à Brest, on intervertit l'ordre
suivi par Ptolémée dans rénumération des lieux situés entre la
Loire et Gobaeum promontorium, et dont voici le texte latin que
(1) Il y aurait à faire des remarques analogues au sujet de g = gv
(voir page 54), de II (l) qui se change tantôt en pi (leun, lat. plenus) ;
tantôt en cl (llef, lie fa, llevain, lat. clamare) ; llaw (mamis), engl. claw,
griffe) , etc.
— 95—'
je puis seul donner, n'ayant pas de caractères grecs à* ma dis-
position.
Post Ligeris ostia fluvii,
Brivates Portus,
Herii fluvii ostia,
Vindana portus, ,
Gobaeum promontorium.
Pour répondre à cette objection, jeciterai les lignes suivantes
d'un savant bien connu, M. E. Desjardins :♦
a La marche du géographe ancien (Ptolémée) est souvent
peu rigoureuse dans sa description des côtes, témoin celle des
Bouches-du-Rhône, dans laquelle il place les Fossae Maritime,
à l'ouest des estuaires naturels du fleuve » (1).
Malgré cette observation, réminent géographe moderne ne
place pas à Brest, Brivates-Porlus.
« Brest, ajoule-t-il, a ses antiquités, mais n'a pas de vestiges
subsistants de voie romaine, et Ton ne saurait citer en sa faveur
la prétendue analogie de Brivates et Gesocribate avec Brest,
car ce sont pour nous trois noms fort différents » (2).
Les pages qui précèdent répondront peut-être à la partie
philologique de l'objection. Quant au reste, il est certain qu'à
l'époque où fut publié le remarquable travail de M. Desjardins,
l'étude des voies romaines, fort mal conservées an Bretagne,
il faut le reconnaître, était loin d'être avancée dans le Fi-
nistère ; elle a fait depuis quelques progrès, et il est aujour-
d'hui incontestable qu'il existe autant de vestiges de voies ro-
maines se dirigeant vers Brest, qu'il en existe dans la direction
de la plupart des autres localités antiques de ce département.
Sous le bénéfice de ces observations, je retiens la remarque
de H. Desjardins, et je dis que puisque Plolémée s'est mani-
festement trompé dans sa description des côtes des Bouches-
■ . ■ !.. I. ■ ■ I ,, . - ■ , , , ..., Il, I _
(1) Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger. Paris,
Hachette, 1869, page 199.
(2) Ibid, page 200.
— 96 —
du-Rhône, il a bien pu se tromper dans celle des côles occi-
dentales de la Gaule. Je m'empresse d'ajouter que Terreur est
peut-être le fait, d'un copiste qui aurait simplement interverti
l'ordre des noms dans la description du géographe grec.
En admettant cette interversion, .efiuvius Herius sq retrouve
naturellement dans TAvo^, rivière de Châteaulin (Finistère), qui
a conservé jusqu'à nos jours, à sa source, le nom de rivière
d'Hierre(l).
Il est vrai que d'Anville identifie le fluvim Herius avec la
Vilaine. Après avtfir exprimé celle opinion, il ajoute : « Je vois
même une trace du nom Herius dans le nom de Treig-hier que
l'on donne encore actuellement au passage de la Vilaine entre
la Roche-Bernard et l'embouchure de cette rivière. Car on
croira volontiers que Treig-hier vient de « Trajectum Herii. » (2)
L'argument est spécieux ; mais outre que Grégoire de Tours
nous apprend que le nom antique de la Vilaine était Visnonia
dont l'équivalent celtique est Gweznon, non identique à celui de
Couesnon, rivière qui séparait la Bretagne de la Normandie (3),
je ferai d'abord remarquer que ce nom, qui est celui d'un
village et d'une rade près de l'embouchure de la Vilaine, n'est
pas Treig-hier^ mais Trehiguier, et si l'on veut prendre la
peine de remonter à son orthographe ancienne, on voit qu'il
s'écrivait Treheguer en 1128 (Cait. de Redon), Trehegel aliàs
Trethilkel, h une autre date du XII e siècle (lbid.), Treiselguer
en 1281 (Dom Morice, Hist. de Bretagne).
Dans ces quatre formes d'un même nom, dans deux des-
quelles on remarque la substitution irrégulière du l au r final,
il n'est possible en bonne critique de voir autre chose que les
mots Treiz-guer ou Tresseul-guer qui signifient « Passage de la
ville » Trajectum civitatis (i. e. ad civltatem). On sait en effet
(1) Géographie de la Gaule.
(2) Voir mon travail sur les Osismii et les Veneli dans la Revue ar-
chéologique, aunée 1872, i* r semestre, et mon article sur Vorganium,
Vorgium et la citée des Osismii dans le Bulletin de la Société archéolo-
gique du Finistère, T. H. p. 66.
(3) Voir plus haut, page 55 note 2.
— 97 —
que Treiz (en Vannes, Trch et Treih avec l'aspiration douce
qui remplace le z dans ce dialecte, et qui explique la forme
Tréheguer), et Trezel ou Treuzeul, qui n'est que le même
mot avec un suffixe, ont la signification de « Passage de
rivière. » Il existe dans la commune d'Argol (arrond. de Châ-
teauliu, Finistère), sur la rive gauche de l'A von (auj. Aulne),
un village dont le sol a conservé des subslructions romaines, et
qui porte le nom de Treuzeulom ou Trazelom, altération de
Treuzeul-amn ou Treuzeul- avon « Trajectum-amnis. »
11 n'y a donc aucune raison de voir dans le nom du village de
Treheguer, dont l'orthographe est régulièrement Vannetaise, le
nom (ÏErius fluvius. Mais quelle était cette ville où conduisait
ce passage de rivière ? Ce ne pouvait être, à mon avis, que la
ville de Vannes, la capitale des Veneti, et comme je ne suis
pas encore converti à la brillante théorie qui veut faire des
marais de Guérande le théâtre de la grande lutte de César con-
tre les Vénètes et leurs alliés, je ne suis pas éloigné de penser
que ce fut à l'endroit où est aujourd'hui situé le village de
Treheguer, que le conquérant romain traversa la Vilaine pour
marcher contre Dariorigum et son territoire. Car, bien que je
n'admette en aucune façon que }a bataille navale qui mit la
victoire dans la main de l'envahisseur, ait eu lieu dans le golfe
du Morbihan, je ne saurais me soustraire à la conviction que,
bien que ce golfe ait pu depuis celte époque être quelque peu
modifié dans sa configuration physique, c'est dans le voisinage
de Locmariaker (Locus Marie civitatis) qu'était situé le port
d'où sortit la flotte gauloise, et que dans celte lutte gigantes-
que, la capitale du peuple puissant qui s'appelait les Veneti,
avec son sénat si grand, si glorieux dans son auréole de sang,
avec son territoire si plein d'imposants souvenirs qui se dressent
comme autant de lémoins^du passé, n'a pas rempli le rôle effacé
que lui prête l'opinion qui prévaut aujourd'hui. Mais pour soute-
nir utilement cette thèse, il me faudrait plus de temps et plus
d'espace que je n'en ai en ce moment à ma disposition. Celle
question serait d'ailleurs, un hors-d'œuvre dans ce travail,
mais j'espère bien y revenir plus tard.
— 98 —
Cette longue digression m'a fait perdre de vue Vindana
Portas qui suit Brivates Portus dans la description de Ptolémée.
Je verrais volontiers dans Vindana, une forme altérée par méta-
thèse, de Vinada = Veneda dont l'équivalent celtique est Vened
ou Gwened, mot qui désigne aussi bien le pays que la ville dé
Vannes (1). Dans cette hypothèse Vindana Portus signifierait
le « port des Vénètes », et comme il est impossible d'identifier
ce port avec Dariorigum, que le même géographe cite comme
capitale de ce peuple (2), on pourrait le placer à Locmariaker,
qui a conservé des ruines romaines importantes, notamment
celles qui portent le nom de Vastei (castellum) (3). (Voir dans
le dictionnaire d'Ogée l'article Locmariaker). J'ajouterai que ce
nom de « port des Venètes » ne saurait avoir d'autre signifi-
cation que celle de « port principal des Venètes. » Or, à
moins d'enfouir l'évidence sous des monceaux d'hypothèses, il
(1) M. Ramé, dont la Revue des sociétés savantes (T. VII, 1878),
m'apporte, pendant que je corrige cette feuille, une très-intéressante
notice, où il est question de Brivates Portus, comme on le verra plus
loin, exprime dans ce travail l'opinion que Veneda pourrait être iden-
tifié avec Guérande, que le cartulaire de Redon mentionne plusieurs
fois sous le nom de Wenran. Le nom de cette dernière localité est aussi
Wenrann dans le cartulaire de Landévennec, manuscrit du XI e siècle
(de Baht (tic) Wentann). Mais l'étymologie de ce nom est, je crois, bien
connue. Il.se compose de ran ou rannn patrimoine» radical du verbe
ranna « partager » et de Gwen, nom d'homme et de femme, qui si-
gnifie blanc, et qui est très-fréquent, surtout comme nom de femme,
chez les bretons gallois et armoricain, à une époque ancienne de notre
histoire, Wen-ran doit donc se traduire par « Patrimonium Alb® ou
Abi. »
(2) De même que Ptolémée dans sa description des côtes occidentales
de la Gaule, ne mentionne pas Dariorigum, de même dans sa descrip-
tion des côtes septentrionales, il passe sous silence Vorganiurn, capitale
des Osismii. Comme il cite ailleurs les noms de ces deux capitales, il
semble résulter de cette observation une intention arrêtée de la part du
géographe, de ne pas se répéter.
(3) Dans un travail publié il y a quelques années (les Osismii et les
Veneti, Revue archéologique 1372, 1 er semestre) J'avais proposé l'identifi-
cation de Vindana portus avec Douarnenez. Mais comme cette localité
n'a conservé aucune trace de nom antique, cette identification ne pouvait
être qu'une pure hypothèse. Le rapport que je crois apercevoir entre
Vindana et Veneda justifie ma nouvelle opinion, qui ne modifie, du
reste en aucune façon, ce que j'ai dit de l'importance incontestable de
Douarnenez et de sa splendide baie &ux époques gauloise et gallo-
romaine.
;
- 99 —
est difficile de placer ce port principal ailleurs que dans le
golfe du Morbihan, c'est-à-dire dans le voisinage de Dariorigum,
capitale des Venètes.
Je résume en deux lignes ce que je viens de dire en réponse
à la première objection.
Si Brivates Portus doit, être placé à Brest, Herii fluviiostia
à l'embouchure de TA von dans la rade de ce port, et Vindana
Portus à Locmariaker, Tordre dans lequel sont placées ces
localités est exactement l'opposé de Tordre suivi dans la des-
cription de Ptolémée, et celte circonstance vient à l'appui de
l'hypothèse émise plus haut à la page 96. Ex. :
l^ Opinion : 2 e Opinion :
Ligeris ostia. Ligeris o$tia.
Brivates portus (Le Brivet). Brivates portus (Brest).
Herius fluvius (La Vilaine) . Herius fluvius (L'Hierre) .
Vindana portus (?). Vindana portus (Locmariaker,
Porz-Vened) .
Gobaeum promontorium. Gobaeum promontorium.
Deux remarques résultent de la comparaison de ces listes :
1° Dans h première, celle admise par Topinion qui a généra-
lement cours, la ville, port où forteresse de Brest, qui depuis
l'époque gallo-romaine a été le point le plus important du
littoral ouest de la III e Lyonnaise, n'est pas mentionnée.
2° Dans la seconde liste, les noms actuels des deux premières
localités (Brest et Hierré) sont la reproduction exacte des
noms anciens. Il en est de même du troisième, car le port ou
rade de Locmariaker est en réalité le grand port de Vannes
ou du Vannelais. Celte coïncidence est loin d'exister dans la
première liste.
11 suffit donc d'admettre une simple interversion dans l'ordre
des localités situées entre l'embouchure de la Loire et le Pro-
montorium Gobaeum, pour arriver à une conclusion qui parait
de nature à satisfaire l'esprit le plus prévenu.
— 100 —
II
J'arrive à la deuxième objection.
« Ii existe à l'embouchure de la Loire une petite rivière
appelé le Brivet, qui se jette dans ce fleuve à Méan, dont le nom
ancien, Briva et Brivata flumen{\) ) et la situation répondent
trop bien à ceux de Brivates Portus de Ptolémée, pour qu'il y
ait lieu de le chercher ailleurs. •
Cette thèse soutenue d'abord en 1823, par M. Àlenas, dans
le Lycée armoricain, a depuis été acceptée ou'défendue par
MM. Siochan de Kersabiec, E. Desjardins et Pocard-Kerviler,
ingénieur des Ponts et Chaussées, qui a dirigé récemment
d'importants travaux à Saint-Nazaire. M. Atenas place Brivates
Portus, à l'élier de Méan, petit port où la rivière Brivet se
jette dans la Loire. Ne connaissant pas le travail de M. de Kersa-
biec, je ne puis citer que par ouï-dire son opinion qui serait
conforme à la précédente. La préférence de M. Desjardins pour
le voisinage du Brivet de la Loire ne m'est connue que par sa
Géographie de la Gaule (2). Quant à M. Kerviler, il n'hésite
pas à placer cette antiqne localité à l'embouchure d'un ancien
cours du Brivet qu'il a découvert à Peuhoat. Toutes ces
opinions s'appuient plutôt sur la similitude de nom que sur la
situation de cette rivière, qui ne se jette pas dans le fleuve,
PostLigeris ostiafluvii, mais dans l'intérieur du fleuve et plus
ou moins en amont de son embouchure. Or il me paraît impos-
sible de voir dans la description de Ptolémée des localités
situées ailleurs que sur le rivage de l'Océan, en dehors et au
nord de l'embouchure de la Loire. Cette objection a je crois
son importance. Elle démontre en effet qu'il n'y a pas lieu d'a-
(1) Dom Morice, Bist, de Bretagne, preuves, I, pp. 473 et 547.
(2) Page 199. Il m'a été jusqu'ici impossib e de rae procurer le grand
ouvrage en cours de publication de M. Desjardins; yz lis cependant
dans le travail de M. Ramé cité plus h *ut (page 98). « Celte considération
avait conduit M. Desjardins à reporter Brivates Portus plus au nord,
et il 1 avait placé dans la passe septentrionale de Guérande, près de Saiat-
Lyphard. »
— 101 —
jouter une confiance absolue à l'exactitude de l'ordre suivi par
Ptolémée dans sa description : car si Brivates Portus est Brest,
il existe une erreur dans le document en question ; si Ton doit
identifier cette localité avec le Brivet, Terreur n'en est pas
moins manifeste.
Mais il est un autre point de discussion qui a sa valeur et
qu'il n,e faut pas perdre de vue. Dans les travaux des partisans
du Brivet de la Loire, qu'il m'a été permis de lire, je trouve bien
une petite rivière qui coule tantôt ici, tantôt là, et qui finit par
perdre la moitié de son cours. Mais je suppose que puisque
Ptolémée a pris la peine de mentionner un port appelé Brivates,
il n'a pas voulu désigner un simple cours d'eau, mais la ville
baignée par ce cours d'eau. Le meilleur argument qui pût
être mis en avant k l'appui de la préférence à donner au Brivet
de la Loire, serait donc, à mon avis, designaler,sur ses bords, les
ruines d'une localité antique de quelque importance. Je re-
grette de le dire, mais j'ai suivi avec le plus grand in-
térêt les comptes rendus des travaux considérables exé-
cutés à Saint-Nazaire par M. Kerviler, et je n'ai rien
trouvé dans ses découvertes qui puisse répondre au de-
sideratum exprimé plus haut. Et cependant, pour la conser-
vation de ruines antiques, quel moyen plus efficace que ce linceul
de sables et de vases qui aurait, dans l'opinion de M. Kerviler,
recouvert non seulement Brivates Portus, mais bien d'autres
villes mortes de la poime de Guérande ! Il faut bien le recon-
naître, tout en le regrettant, les grandes espérances conçues au
début des travaux, et qui promettaient de transformer en faits,
des hypothèses trop frêles pour servir de bases aux colonnes de
l'histoire, ne se sont pas réalisées.
Hais il serait hors de propos de m'étendre plus longuement
sur ce point, car voici une nouvelle opinion qui vient d'être
émise par un savant des plus autorisés. Dans le travail men-
tionné à la page 98, M. Ramé admettant l'existence d'un golfe
maritime à l'embouchure de la Loire, à l'époque romaine, sup-
prime le cours tout entier du Brivet inférieur, celui dont M. Ker-
SOC. ÀRCHÉOL. DU FlMSTiRE.— T. VI. 8
— 102 —
viler avait t'ait la découverte, et le confond avec la mer.
« C'est plus haut, ajoule-t-il, dans l'intérieur des ter i es, qu'il
faut cherche!, je crois, le Brivates Portas. Le cours du Brivet
supérieur encaissé d'abord entre des coteaux élevés, ne tarde
pas à s'élargir et à déboucher dans les marais de Saint-Gildas
qui furent scieur jour un bassin maritime (I). Sur la rive nord de
ce bassin existe un village du nom de Brivet. Le cours d'eau
partant de ce point pour aboutir à la Loire a ainsi, comme
beaucoup d'autres petites rivières, tiré son nom du lieu habité
le plus notable, placé vers sa source. C'est dans ces parages
qu'une exploration du sol et surtout du sous-sol, pourrait être
utilement poursuivie à la recherche de Brivates portus. »
II est dans les lignes qui précèdent un point sur lequel je ne
puis être d'accord avec M. Ramé. Au lieu d'admettre avec lui
que la localité a donné son nom à la rivière, je pense que c'est
celle-ci qui a donné le sien au village de Brivet, et j'en trouve
l'origine dans cette circonstance, qu'elle est encaissée entre des
coteaux élevées, c'csl-à-dire entre des Crib ou Cribet = Prit;
ou Brivet, d'où elle a tiré son nom qui signifie, par conséquent,
Rivière des crêtes ou des coteaux élevés.
M. Ramé n'a pas trouvé dans le territoire de Brivet, de ves-
tiges romains; il engage à les chercher « dans le sol et surtout
dans le sous-sol. » Mais la découverte de ces vestiges ne serait
pas encore une solution. Car tout en sujwosant à l'entrée de la
Loire, l'existence d'un golfe intérieur, M. Ramé maintient cette
entrée à Saint-Nazaire. Or comme le village du Brivet dont il
propose l'identification avec Brivates Portus, est encore bien
plus avancé dans les terres que ne l'était l'embouchure du Brivet
proposé pour cette identification par les archéologues et les
géographes qui l'ont précédé, il s'en suit à fortiori? que l'on
ne pourrait se ranger à son opinion, à moins de reconnaître
({) Cette hypothèse d'une mer intérieure dans les marais de Saint-
GiWas. qui sont aussi connus sous le nom de marais du Brivet* a été
développée par M. Atenas dans son Mémoire sur Brivates Portus
(Voir le Lycée armoricain, année 1823).
— 103 —
que Brivates-Portus était « dans la Loire » et non « au delà *
de l'embouchure de la Loire. L'objection que j'ai formulée
à la page 96, conserve donc toute sa force.
Pour moi, après avoir prouvé à satiété que Cribates et Bru
vates sont deux formes d'un même mot, qui ont eu de nombreux
dérivés, dont des centaines de localités ont gardé le nom en
France, je n'hésite pas, ayant le choix entre deux de ces loca-
lités, à préférer le Château de Brest, avec son port, ses courti-
nes et ses traces de tours romaines encore visibles, à un misé-
rable petit village, sans histoire et sans l'ombre d'un vestige
antique, et dont l'identification avec Brivates Portus porterait
à l'exactitude de la description de Plolémée, le même préjudice
que l'opinion contraire.
NOTES SUPPLEMENTAIRES.
1. — Dans le travail qui précède, je me suis particulièrement attaché
au dialecte armoricain pour la citation et l'orthographe des mots. Ce
dialecte me présente, en effet, un intérêt que n'ont pas d'autres dialectes
celtiques. Le pays dans lequel plusieurs centaines de mi'le personnes
le parlent encore aujourd'hui, était occupé par des gaulois lorsque des
émigrés parlant à peu près la même langue, vinrent s'y établir. Il
résulte de l'expérience que j'ai pu tirer de mes recherches et de mes
études locales, que dans ce pays dont la condition fut si misérable
pendant Foccupat'on romaine, les vainqueurs n'ayant souci que de la
doc lité des populatious, n'essayèrent pas de leur enlever leur langue
et leurs coutumes.
Il est donc logique de penser que dans cette rencontre de deux dia-
lectes celtiques au V e et au VI© siècle, il n'y eut suppression ni de l'un
ni de l'autre, mais qu'il en résulta une fusion qui doit permettre de re-
trouver, dans le dialecte armoricain bien des mots gaulois.
2. — Pour ne pas augmenter oulre mesure le nombre des pages,
j'ai dû dans certains cas, me borner à de simples assertions qu'il eût
été peut-être nécessaire d'appuyer d'arguments dont le développement
m'aurait entraîné trop loin. Ainsi, en ce qui touche la substitution des
voyelles celtiques les unes aux autres, après avoir avancé (page 58,
note i) que Ton peut comparer Ed~us fluvius à Od-et, rivière de
Quimper/j'aurais dû ajouter : Oi-et et Ed-u$ sont deux radicaux iden-
tiques signifiant rivage, lieu baigné par les eaux, suivis l'un d'un
suffixe gaulois et l'autre d'un suffixe romain. Je dis identiques parce
que Od •=. Ed t comme Frot ou Frout, ruisseau, = Fret (lat. fretum)
comme Jtfarchoc *=* Marcheuc f=î Marchec; comme Caradoc =; Cara-
deuc ?=: Caradec, etc.
La note suivante aurait pu trouver sa place à la page 93.
3. — La colline qui domine au sud la \ille de Quimper s'appelait mont
Crugy au XV e siècle, et porte aujourd'hui et au moins depuis te siècle
— 104 —
dernier, le|nom de mont Frugy; e'ett an etenple presque contemporain
de la loi de mutation du c, et analogue à celui que j ai cité page 71,
note 1.
4 . — Le président Fauchet pensait que la ville de Venise avait été
fondée par une colonie de Vénéti-armoricains. Guillaume Lejean parta-
Î;eait la même opinion, et.cette thèse a été soutenue par d'autres. (Voir
a note page 59).
R.F. Le Mb*.
Après la lecture de ce mémoire, M. le Président
communique à la Société une lettre où M. Kerviler,
développant son télégramme du 28 septembre dernier,
lui adresse plusieurs citations au'sujet des prétendues
pierres de foudre.
A Monsieur de la Villemàrqu^ Président de la Société
archéologique du Finistère.
Monsieur le Président,
J'ai bien regretté de ne pouvoir vous envoyer qu'une dépêche
pour votre intéressante communication : j'avais fait mes trou-
vailles le matin, il était trop tard pour vous écrire une lettre
qui pût parvenir à temps. J'ai été surtout doclus cum libro.
Sauf le passage de Buffon, tout le reste m'a été fourni par
Evans (1), même le remarquable passage de Marbode, évêque
de Rennes au XI e siècle, sinon pour le teite, au moins pour
les indications. Voici les principales :
Marbodœi Galli cœnomanensis de gemr^arum lapidumque
preciosarum formis, etc. (Cologne tô^9, p. 48.)
« Ventorum rabie cum turbidus œsluat aër,
« Cum tonat horreudum, cum fulgurat igneus œther,
« Nubibus elisus cœlo cadit ille lapillus, +•
« Cujus apud Grsecos exslat de fulmine nomen :
« Illis quippe locis, quos constat fulmine tactos,
« Iste lapis tantum reperiri posse putalur,
(1) The ancient ttone implemets, p. 50.
- 105 —
« Undè Keraunios est graeco sermone vocatus ;
« Nam quod nos fulmen, Graeci dixere Keraunon.
« Qui caste gerit hune a fulmine non ferietur,
« Ne c do m us autvillœ, quibus aiïuerit lapis ille :
« Sed neque navigio per flumina vel mare vectus,
« Turbine mergetur, nec fulmine percutietur :
€ Ad causas eliam, vincendaque prœlia prodest,
« Et dulces somnos, et dulcia somnia prœstat. »
J'arrive aux époques modernes :
Mercati, médecin du pape Clément VIII, à la fin du XVI e siè-
cle, soutint le premier que les pierres de tonnerre étaient
les outils des peuples primitifs (Btbliotheca Vaticana, p. 242.)
Au XVII e siècle il y eut des discussions en Allemagne et en
Angleterre à ce sujet. En Allemagne il faut citer surtout
Aldrovandus en 1648, Gesner, Boethius, Besler, Wormius, etc.
En Angleterre les docteurs Plot (1686) et Lister (voir Philoso-
phical transactions of the royal Society, n° 201.)
Au XVIII e siècle, vous trouverez au lome XII des Mémoires
de F Académie des Inscriptions et Balles-Lettres (p. 163 — 169),
un très-remarquable mémoire de Mahudel sur les prétendues
pierres de foudre employées par les premiers hommes pour les
arts. Je vous avoue franchement que j'ai été stupéfait en lisant
ce mémoire et en examinant les deux planches qui repré-
sentent des haches de pierre de toute forme. Les archéologues
modernes n'ont rien inventé; nous découvrons tous les jours
ce qu'ont découvert nos anciens.
C'est probablement à la suite de ce mémoire que Buffon
écrivit la phrase que j'ai remarquée au commencement du
chapitre de ses Époques de la nature où il trace l'époque à
laquelle la puissance de fhomme a secondé celle de la nature.
La voici :
« Ils ont commencé par aiguiser en forme de haches ces
cailloux durs, ces jades, ces pierres de foudre que Von a
crues tombées des nues et formées par le tonnerre, et qui
— 106 —
néanmoins ne sont que les premiers monuments de Fart de
l'homme ; avec la hache de pierre, il a tranché, coupé les
arbres, menuisé le bois, façonné ses armes et les instruments
de première nécessité, etc., etc. •
Vous trouverez là la description de toutes les armes de pierres.
Je ne crois pas que. personne ait jamais cité ce passage remar-
quable. Je le mets à votre disposition, comme tout ce que je
trouverai encore, et vous prie de me croire, le plus respectueux
et le plus dévoué de vos collègues.
René KERVILER.
Les citations de notre savant collègue sont assuré*
ment d'un grand intérêt, dit M. de la Villemarqué,
et j'avoue qu'elles m'étaient inconnues avant la publi-
cation de M. John Evans, en 1872, et celle de
M. Cartailhac : Vâge de pierre dans les souvenirs et
superstitions populaires (1877). Il faut donc attribuer à
Mercati, suivi par Mahudel et Buffon, l'opinion sou-
tenue affirmativement par M. le docteur de Closma-
deuc, et hypothétiquement par M. Littré; mais
M. Kerviler, n'assistant pas à notre séance du
28 septembre, ne pouvait pas être, comme on dit,
à la question. Or, il s'agissait d'indiquer le nom pri-
mitif et naturel de ce que les archéologues appellent
aujourd'hui des haches de pierre, et le vulgaire des
pierres de foudre : c'est ce que je vais tenter de taire.
LES HACHES DE PIERRE.
I
leur nom (Suite).
A eôté du Musée de Dublin, si riche en pierres antiques de
toute forme et de toute dimension, existe une bibliothèque non
moins riche en vieux manuscrits. Ils ont fait le sujet des
- 107 —
meilleurs travaux philologiques entrepris depuis vingt ans
par l'école de Zeuss, et en particulier des leçons d'un érainent
professeur d'histoire et d'archéologie à l'université catholique
d'Irlande, M. Eugène 0' Curry; il a publié le résultat de
ses recherches dans un livre intitulé: Lectures on themanus-
cript materials ofancient irish history, dont les derniers vo-
lumes viennent de paraître. Or, ne trouvant nulle part de ré-
ponse à la question du nom donné aïK pierres polies cunéi-
formes par leurs fabricateurs eux-mêmes, l'idée m'est venue
d'interroger la vieille Irlande, à qui 0' Curry a contribuée
rendre la voix, et j'ai eu recours à l'important ouvrage de ce
regrettable professeur. Quel n'a pas été mon étonnement, en
coupant les feuillets du premier volume, de lire à la page
394 : « Ces instruments si curieusement façonnés, dont nous
possédons tant de spécimens de toute grandeur au Musée de
l'Académie royale d'Irlande, et que l'on appelle aujourd'hui du
nom absurde de Celt, s'appelaient dans l'ancienne langue gaé-
lique, Lu Milioh ou pierre de guerrier (in ancient gaedhlic
was called Lia Milidh, or warior's Stone).
Ita, pierre, est en effet une des formes du mot qu'on trouve
écrit lié, dans une inscription jugée du IV e siècle par le doc-
teur Pétrie, du VI*, par le docteur fodd ; que Cormac, au
IX e siècle, écrit liae, le donnant, comme l'équivalent du grec
lithos et du latin lapis ; que M. Whilley Stokes reproduit,
d'après des textes irlandais du moyen âge, sous la forme
liacc et leg ; que Giraud le gallois écrit llech, au XII siècle,
Dom Le Pelletier liac'h, au XVII e siècle, et où Ton a tout lieu
de voir l'origine du mot français liais, Variété de calcaire
compacte, è grains fins et serrés, des environs de Paris ; en
citant ce mot M. Brachel le déclare d'origine à lui inconnue
(par une bonne raison), et M. Littré aussi, mais, en vrai critique
il le rapproche très- justement du bas-breton liac'h.
Quant au mot milidh, il n'a pas lieu de nous arrêter ; mal-
gré son rapport avec miles, il ne vient pas du latin, et
se trouve en vieil irlandais au datif pluriel dans miledidh,
— 108 —
glose de militibus, et dans le singulier mil te, glose de mi-
litia (Zeuss, p. 577) ; comme miles * et le gallois milwi, il
Tient, selon Corsenn, du radical sanscrit mil, qui signifie
réunir, associer, étyraologie bien naturelle, les hommes de la
milice, les milites ou militaires, étant par excellence les gens
unis ou associés pour la guerre.
Pierres de guerrier I Voilà donc le nom que la fille aînée
de la race celtique donnait très-anciennement à ces haches
de pierres tranchantes dont se servaient ses fils. Ai-je besoin
d'ajouter que des textes irlandais nombreux et sûrs justifient
une pareille dénomination ?
(Sera continué).
M. le Président communique à l'Assemblée la note
spivante qui lui a été remise par M. Le Men :
A la dernière réunion de la Société archéologique, à l'oc-
casion de la lecture de quelques documents relatifs aux chouans,
un membre a fait observer que leur influence s'était fait peu
sentir dans le département du Finistère. L'observation est
exacte et je pense que Ton doit attribuer ce résultat, d'un
côté à la vigilance de nos municipalités, et de l'autre à l'ab-
sence des chefs ayant l'énergie nécessaire pour soulever les
masses. Il me paraît hors de doule que s'il s'était trouvé dans
le Léon, par exemple, des chefs delà valeur de Boishardy, de
- Jeanjean et de bien d'autres, dont quelques uns était de véri-
tables héros, ce pays qui est encore resté si attaché aux tra-
ditions du passé n'aurait pas échappé à leur influence.
Quant aux chouans, leur projet d'agir sur toute la Bretagne
est un fait qui ne saurait être contesté. A des preuves qu'il est
inutile de rappeler ici, j'ajouterai un renseignement peu connu :
c'est une carte que notre collègue, M. de Kercadio, a eu l'o-
bligeance de me communiquer et que je mets sous les yeux de
l'assemblée. Cette carte qui, d'après la tradition, aurait appar-
tenu à Boishardy, a été gravée en Angleterre et porte le litre
suivant :
— 109 —
« A geometrical survey of the province of Britanny, to
which hâve been added lower Poitou, and lower Normandy,
with part of the provinces of Maine, and Anjou, etc. The whole
including the modem départements of Finisterre, Côte du Nord,
Morbihan, Basse Loire, Illeet Vilaine, and la Manche; also
part of those of Calvados, VOrne, la Mayenne, Maine et Loire f
La Vendée, etc. And published for the use of the French royal
army acting against the conventional republicans. M.DCCXCV.
— London. Published by H. Faden, geographer lo his Ma-
jesty, and lo H. R. H. the Prince of Wales, Charing Cross,
august 20 th. 1795. » Au frontispice on lit, au-dessous d'une
fleur de lys, et de l'inscription « In hoc signo vinces, » ce vers
■ latin :
« NU desperandum Moira duce et auspiee Moira. »
Elle est très-détaillée ; tous les principaux chemins y sont
tracés, et toutes les localités ayant quelque importance y sont
indiquées par un point rouge. 11 est clair que cette carte était la
carte routière des chouans, et que leur intention était d'opé-
rer dans le Finistère, comme dans les départements voisins.
Elle comprend outre la Bretagne, le Maine et la Basse-Norman-
die. Elle est divisée en quatre feuilles collées sur toile, renfer-
mées dans un étui et portant les titres suivants : Brest, V Orient,
Nantes et Cherbourg ; l'étui en carton porte lui-même une
étiquette sur laquelle est écrit : La Bretagne, etc., avec l'ac-
cent aigu que les habitants du pays gallo ont l'habitude de
placer sur les e muets. »
Une discussion s'engage sur le sens du mot moira du
vers latin placé au frontispice de cette carte. M. le
Président invite ses collègues à le chercher et à
apporter le résultat de leurs recherches à la prochaine
séance.
Avant la fin de la séance, M. le Président rappelle
SOC. ARCHÉOL. DU FINISTERE. — T. Vf. 9
— 110 —
qu'un membre de la Société, M. Pavot, à pris date
dans la séance du 28 septembre dernier, en annonçant
la présentation prochaine d'un travail spécial sur les
véritables météorites ferrugineux, opposés aux préten-
dues pierres de foudre, silex ou jades.
Ce travail n'est pas achevé: il se composera surtout
d'extraits d'ouvrages spéciaux ; l'auteur de cette com-
pilation n'a pas la prétention d'apporter des docu-
ments inédits, mais il pense que la Société trouvera
quelque intérêt dans le rassemblement et la compa-
raison de renseignements d'inégale notoriété ; il se bor-*
nera pour aujourd'hui à ajouter quelques mots aux
observations déjà provoquées par la lettre de M. René
Kerviler dont il vient d'être donné lecture.
On peut rendre justice à Mahudel^ mais sans oublier qu'il
avait été lui-même devancé au XVIII e siècle, dans l'hommage
rendu à la clairvoyance de Mercati.
S*il est intéressant de reproduire le passage de Buflbn qui
montre l'homme primitif aiguisant, pour en faire des outils et
des armes, ces cailloux durs, ces jades, longtemps appelés
pierres de tonnerre et supposés tombés des nues, il ne peut
être hors de propos de rappeler que, un demi siècle avant cette
publication et plusieurs années avant V apparition du mémoire
de Mahudel, l'Académie des Sciences accueillait une notice de
deJussieu, relative aux mêmes objets. — M. Pavot tient à citer
le fait sans plus attendre ; il ne se rappelle pas exactement
dans le moment, ladale.de la lecture faite par de Jussieu,
mais il affirme qu'elle était antérieure à la communication
adresée par Mahudel à l'Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres ; les deux mémoires ont été reproduits ou cités dans un
curieux ouvrage qui est tout un traité des pierres tombées ou
supposées tombées du ciel.
— 111 —
Cet ouvrage, devenu assez rare aujourd'hui, porte le litre
caraçlérislique de Lithologie atmosphérique; il dale de la
fin du Consulat ou du commencement de l'Empire ; M. Pavot en
possède un exemplaire ei compte eu tirer une partie des rensei-
gnements annoncés ; il se souvient d'y avoir lu quelques
remarques malicieuses de l'auteur au sujet du défaut de
| nouveauté de la thèse, d'ailleurs juste, de Mahudel et de la
trop grande confiance avec laquelle ce mémoire fui accueilli
; comme une primeur par l'Académie des Inscriptions et Belles*
| Lettres.
La Société archéologique du Finistère ne peut en 1878
s'exposer au même reproche d'oubli pour de Jussieu.
Le passage de Buffon cité par M. Kerviler est classique :
s'il est opportun de le reproduire, en présence de l'opinion
reprise par M. le docteur de Glosmadeuc, c'est en n'ou-
bliant pas de rappeler que pour Buffon, la science officielle
avait prononcé depuis longtemps déjà. Buffon, qui était de
l'Académie des Sciences, avait certainement lu de Jussieu non
moins que Mahudel. D'ailleurs le traité de minéralogie de
Valmont de Bomare, alors classique, avait consacré un cha-
pitre aux pierres figurées artificiellement \ et ce traité est du
commencement de la deuxième moitié du XVIII e siècle. Dès
cette époque l'opinion du public lettré était faite : nos premiers
pères n'avaient pu attendre indéfiniment que flèches ou haches
leur tombassent du ciel toutes..... polies! Les [sauvages de
tous les temps s'étaient fait des outils tranchants avec des
éclats naturellement coupants du silex commuh et ils avaient
plus spécialement recherché, pour en faire de terribles casses-
têtes, des pierres plus rares que leur dureté et leur densité
désignaient comme des armes sûres. Buffon rappelait donc
« ces cailloux et ces jades », comme des choses dont tout le
. monde connaissait la provenance et l'usage.
Les navigateurs des trois siècles derniers, aussi bien que les
explorateurs actuels, ont signalé les haches de pierres comme
— 112 —
t'arme invariable des peuples vivant encore à l'état primitif.
Ces haches ne disparaissent même pas toujours devant les
armes modernes.
Buffon, puisqu'on l'invoque, écrivait ses Époques de la nature
au lendemain des découvertes des Russes dans l'extrême Orient
et insistait lui-même, d'après leurs relations, sur la coexis-
tence, remarquable alors, des armes anciennes de pierre et de
quelques outils de fer récemment importés, chez les sauvages,
chasseurs et pêcbeurs T des lies Aléoutiennes. Ceux-ci qui
avaient d'abord fui devant le capitaine Behring, s'étaient alors
mis à faire des échanges avec les baleiniers et à colporter les
ferrailles qu'on leur abandonnait. — Or, avant de recevoir des
Russes quelques mauvais couteaux, ces peuplades polissaient
patiemment le jade sibérien, dont elles trafiquaient peut-être
elles-mêmes avec les tribus de l'extrême nord-ouest Amérique,
L'hypothèse du peuplement de l'Amérique par l'extrémité
orientale de l'Asie, et à l'aide du chapelet d'îles qui s'étend
au sud de la mer Behring, n'est pas contemporaine ; — M. de
Quatrefages, en la reprenant à l'appui de sa thèse de l'unité
de l'espèce humaine, déclarait lui-même (vers 1863) faire du
vieux-neuf, et indiquait comme traces évidentes des migrations
anciennes, parties du plateau central de l'Asie vers l'occident
et vers l'orient tout à la fois, les haches de jade, — de nature
et de forme à peu près identiques, — recueillies dans des
monuments funéraires ou vues aux mains de peuplades très-
éloignées des gisements connus de cette substance.
La question est donc absolument jugée quant à l'origine
terrestre (sinon quant aux points précis d'extraction) des pré-
tendues pierres de tonnerre.
Les seules masses minérales reconnues comipe aérolithes ou
météorites, oui une composition chimique à peu près constante
(fer, nickel, etc.) qui les différencie nettement des cailloux
durs et des jades ; de plus les aérolithes sont généralement grenus,
friables même, et si les premiers hommes en ont recueilli, ces mas-
— 113 —
i
ses métalliques, faute de pouvoir être forgées par les auteurs des
premières trouvailles, n'ont guère pu leur fournir ni outils ni
armes. — Or, le judicieux Brillât-Savarin, philosophe et chi-
miste non moins que gastronome, s'est toujours demandé com-
ment et par qui avait pu être forgé le premier marteau et nul
n'a pu lui répondre encore d'une façon précise, — tandis que
tous les siècles ont vu polir des armes de jade, et utiliser
comme outils des éclats de silex.
M. Pavot termine en disant qu'il tient à la disposi-
tion de la Société divers échantillons de jade oriental,
en même temps que le volume de la Lithologie atmos-
phérique qui résume l'état des connaissances au com-
mencement de ce siècle, au sujet des pierres tombées
du ciel.
M. le Président accepte en principe toutes commu-
nications de ce genre comme ayant acquis un regain
d'actualité et propose leur inscription à Tordre du jour
de la première séance.
La séance est levée à 4 heures et demie.
Le secrétaire par intérim,
A. CRÉAC'HCADIC.
Additions au mémoire sur Gesocribate et Brivates Portus^ lu
DANS LA SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 1878.
I
Comme le mot crib est celui sur lequel s'appuie la thèse déve-
loppée dans le mémoire sur Gesocribate et Brivates Portus, il
importe d'en bien établir la signification. Les extraits suivants
n& seront donc pas hors de propos comme complément de cet
article.
Crib. s. f. pi. au. A comb; a wool, corab, or card; also the
crest, cop, or summil of anylhing.
Owen Pughe's Welsh and english Dict.
- 114 —
Bidge. s. Crib, Cribin.
Summit. s. Cribyn.
Top. s. Brig ; Crib.
Cop. s. Brigyn, Crib.
(William Richards ; Gtiriadur saesonaeg a chymraeg).
Crib. s. t. A cotnb; a ridge, tbe crest or summit of any thiog.
(Robert Williams ; Lexicou cornu-britanicom).
Kribel ou Kriben. s. f. crête. De plus, sommet, cime.
(Legonidec, Dict. Breton français}.
Crtb, Peigne, pluriel Cribou* Davies met pareillement Crib,
pecten. Sic Armor. Item summitas, cacumen, apex, cristarei.
Crib ty, Crib mynydd (sommet de maison, -sommet de
montagne). Crib ceiliog (crête de coq). C'est-à-dire, si j'en
juge bien, que Crib est proprement crête.; et parce que la
crête est la partie la plus haute de tout te coq, et qu'elle est
dentelée, on a appliqué ce nom à la cime des maisons, des
montagnes et des peignes qui consistent principalement en
dents.
(Dom Le Pelletier, Dict. de la langue bretonne).
II.
Comme supplément d'information notre confrère, H. le
comte de Bremond d'Ars, m'apprend qu'en Saintonge on donne,
le nom de Brande à un taillis et que plusieurs localités ont tiré
de là leur dénomination.
Un autre confrère, H. Pavot, a l'obligeance de ra'informer
qu'à cinq kilomètres et demi à Test de Rennes, à l'endroit où
la Vilaine devienljnavigable, et où commence le port de Cesson,
la riviàro se trouve resserrée entre deux escarpements sur
l'un desquels sonl deux fermes appelées le Grippé*
A propos de l'étymologie du mot Bruc (bruyère), j'aurais dû
ajouter ceci : « Le nom primitif devait être Louzaouen crue, ou
Louzaouen bruc (herbe ou plante de montagne). Plus tard le
mot générique Louzaouen est tombé. » Le français bruyère est
venu de bruc en passant par la forme bruguière.
L'extrait suivant est tiré d'un mémoire que vient de publier.
M. Gaidoz sur la religion des Gaulois : « (C) athvbôdvà,
connue seulement par une inscription de Savoie, était une
déesse de la guerre, comme l'a montré M. Pictet, et corres-
— 115 —
poçdait à la déesse irlandaise Badhbh, qui a le même sens. •
C'est une nouvelle preuve h l'appui de l'équation c=p=6.
III.
Il existe sur le littoral ouest du département du Finistère
trois étendues de mer, désignées par trois noms différents qui
ont cependant le même sens. Ce sont :
1° Repassage du R&z, entre rile^-Soto et la pointe du Raz.
Ce mot Raz est iiue altération de Craz, qui signifie ruisseau,
courant d'eau. A quatre kilomètres de Quimper se trouve le
château et l'ancienne seigneurie de Pralauraz, dont le nom
s'écrivait Pratancraz au XV e siècle. Il y avait è la même
époque à Quimper. (faubourg de Loemaria) et à Quimperlé une
rua de Foulera* ou de Poulraz, dans laquelle se trouvait la
gotirce d'tm ruisseau. Le root cwz ou raz n'existe plus dans la
langue bretonne usuelle»
2° be passage de Froraveur entre l'île d'Ouessant et le
groupe des autres îles de l'archipel de ce nom. Fromveur est
une alt&ratiofl de Frotveur ou FrQtmeur^ qui sigqiÇe grand
ruisseau, grand courant d'eau (Fret, FnoJt, Frout, cours d'eau
rapide ; Meuç en composition Veur, grand.)
3 P Entre ces deux courants si connus et si redoutés des
navigateurs, se trouve en faci de l'entrée ou du goulet de la
rade de Brest, uue étendue de mer désignée sur toutes les cartes
sous le nom de Vlroise ou de passage de l'Iroise, Ce jgot U).e
semble être une forme altérée du celtique Hir-Gwaz (en compo-
sition Hir-waz)i long ruisseau ou long courant d'eau. J'ai dans
mon travail. exprimé l'opinion que Géso-CribaU&e\d Table Théo-
4osienne pouvait avoir la signification de rivière on courant d'eau
deCrtbate (RrivMes).Ii me semble assez intéressant de retrou-
ver ce mot Gwez = Gwaz, servant à désigner encore aujourd'hui
la partie de l'Océan qui communique avee la rade de Brest,
R.-F. Le Men.
A la p. 65,Ugne 20, placer « Bois d'aulnes # après « Craiwerp. »
Page 96, placer la note 2 avant la note 1 .
\
— 116 —
Dons offerts an Musée départemental d'archéologie.
M. LÀM ARQUE, de Brest, membre de la Société.
Un petit bronze de Constantin le Grand (Soli invicto
comité).
Seize monnaies"' françaises en bronze.
Quarante-six monnaies étrangères (anglaises, russes
américaines, turques, arabes, indiennes, chinoises).
M. A. CRÉAC'HCADIC, membre de la Société.
Une monnaie espagnole de 1726 en argent. *
M. V. DE MONÎIFAULT, membre de la Société.
Une monnaie de Jacques II datée du XXX May 1690
avec la légende : Jacobus ii dei gratia Mag. Ba. Fba. bt
Hib. bex. (Magnœ Britanniœ, Franciœ et Hiberniœ rex.
M. HERLÉDAN, maître serrurier à Quimper.
Un rabot-varlope, en bois sculpté, style Louis XV.
M. BRIOT DE LA MALLERIE, membre de la
Société, et M. DE PORTZANPART.
Fragments de vases en terre, gaulois et gallo-
romains, trouvés sur le bord d'une voie antique près
du bourg de Pluguffan, canton de Quimper.
Remède contbe le mal de dants.
Pour la maladie de dans (dents), prenés l'escorce de la racine
de fanoull (fenouil), et l'escorce de la racine de.l'arbe (l'herbe)
de grant noet, et la sauge franchi et le boullé dedans ung pot
de terre avesques du vin ègre jusques à tant qu'il ne demeure
que le tiers, et mettes à la bouche tan t chaut que. vous le
pourrés durer .devers le costé qu'il sera la maladye, et tantôt
vous serës guéri.
(Cahier de notes d'Hervé du Mesné, prêtre, procureur de la fabrique
du Mur à Morlaix depuis 1481). — Arch. du Finistère.
117 —
SÉANCE DU 28 DECEMBRE 1878.
Présidence de M. DE LA VILLEMARQUÉ,
MEMBRE DE L 'INSTITUT.
Étaient présents : MM. de La Villemarqué, Trévédy,
Pavot, l'abbé Peyron, de Kercadio, de Brémoy, Malen,
Bourassin, Créac'hcadic et le Men, secrétaire.
L'ordre du jour appelle la nomination d'uti secrétaire-
adjoint de la Société. Sur la proposition de M. le
Président, cette nomination est remise à la" fin de la
séance.
À propos du vers latin que Ton remarque comme
une sorte de devise, au frontispice de la carte de
Bretagne appartenant à M. de Kercadio, et dont il a
été question dans la, dernière réunion, M. le Président
donne lecture de la note suivante qui lui a été adressée
par M. Trévédy :
« Nil desperandum Moîrâ duce et auspice Moirâ »
« Ce vers est la citation presque textuelle du vers « Nil des-
perandum Teucro duce et auspice Teucro» de l'ode vu du livre
I er des odes d'Horace.
Mais qu'est-ce que le mot Moirâ et que veut- il dire.
— 118 —
La carte communiquée par M . de Kercadio a été gravée h
Londres en 1795, très-peu de temps avant l'expédition de Qui-
beron, et, sans aucun doute, en vue de cette expédition.
On n'ignore pas que cette désastreuse entreprise fut préparée
et dirigée par le célèbre lord Moiba, marquis d'Hastings.
Cette circonstance suffirait donc à expliquer la présence du
mot Moirâ ^dans le vers en question. Mais je pense qu'il y a,
dans cette adaptation, une idée plus complexe, et l'on sera
peut-être de mon avis si l'on veut bien se'souvenir que le mot
Moira en grec veut dire, justice, équité. Le vers signifierait
donc :
« Rien n'est désespéré quand on a lord Moirâ pour guide et
pour soutien. »
Ou :
« Rien n'est désespéré quand on a la justice pour guide et
pour soutien. »
Nous sommes donc en réalité en présence d'un jeu de mot
facile à saisir.
Une question pour terminer :
L'auteur du vers parodié d'Horace serait-il Monsieur, comte
de Provence, qui se piquait de savoir Horace par cœur et le
citait, dit-on, fort à propos?... »
M. le Président pense que la solution de M. Trévédy
est la bonne. C'est aussi l'opinion de M. Malen et des
autres membres de l'assemblée.
Communication est ensuite donnée par M. Créac'hca-
dic d'une lettre par laquelle notre collègue M. René de
Kerret, offre à la Société de lui faire l'abandon gratuit
de la propriété d'une allée couverte située tout près du
bourg de Brenilis (arrondissement de Châteaulin, Fi-
nistère), et^en grande partie recouverte d'un tumulus,
M. le Président remercie M. de Kerret au nom de
— 119 — .
l'assemblée qui est d'avis d'accepter la donation qu'il
veut bien faire à la Société archéologique. Ce don est
une nouvelle preuve de l'intérêt qu'a toujours -porté
notre collègue à la conservation des monuments an-
ciens de notre pays, que tant d'autres s'efforcent de
détruire ou de s'approprier dans un but mercantile.
M. Le Men donne ensuite lecture d'une lettre qui
lui a été adressée par l'éditeur de Y Année archéologique
et philologique, revue des études classiques publiée à
Berlin et dont le rédacteur en chef est M. Bursian,
professeur à l'Université de Munich, pour lui deman-
der le dernier volume de notre Bulletin afin d'en rendre
compte. L'assistance est heureuse de constater que
même à l'étranger on attache quelque prix aux tra-
vaux de la Société archéologique du Finistère. C'est
pour elle un encouragement à persévérer dans La voie
qu'elle s'est tracée.
Le même membre informe l'assemblée, que d'après
un avis du ministère de l'instruction publique, le dos-
sier Coëtanlem dont il a eu occasion d'entretenir la
Société dans une précédente séance, a pa.ru si impor-
tant au comité des travaux historique, à l'examen
duquel il avait été soumis, que ce comité à décidé que
le, dossier en question serait intégralement publié dans
les Mélanges des Documents inédits pour servir à
m
l'histoire de France.
La parole est ensuite donnée à M. Le Men, pour
lire une note intitulée :
UJf ENTERREMENT DANS LA CATHÉDRALE DE QUIMPBR >(I7G0).
Da&s la Monographie de la Cathédrale de Quimper, que j*ai
publiée récemment, j'ai fait le récit d'nae émeute arrivée à
— 120 —
Quimper en 1515, et provoquée par les Gordeliers à l'occasion
de l'enterrement de Guillaume Le Goaraguer, maître maçon.
La rivalité qui existait au moyen âge entre les frères mineurs
de Quimper et le chapitre de la cathédrale, persista assez long-
temps, comme on peut le voir par l'extrait suivant d'une lettre
écrite à H. Védier, procureur au Parlement de Rennes, par M.
Jean-Baptiste Kermellec, syndic de ce chapitre, à l'occasion
d'un fait analogue..
« Le treizième septembre dernier, la nommée Urbane Pous-
sain estant morte, son rûary nommé Joseph Juminaye, escrivit
ces mots : « Je prie le révérend père gardien des Cordeliers
d'enterrer ma femme en son esglise suivant sa volonté et la
mienne » ; et là dessus prirent la déposition de trois ou quatre
personnes qui rapportèrent devant nottaire, avoir entendu la
défunte dans sa maladie dire qu'elle vouloit estre enterrée
aux Cordeliers. Le père gardien fit signifier ce billet et celte
déclaration au vicaire de la parrojsse, le sommant d'y donner
les mains. Ce vicaire ayant aporté la copie au chapitre, le
chapitre délibéra que le père gardien et ledit Juminaye,
tailleur, eutreprenoint et donnoint atteinte à l'arrest du conseil
contradictoire avec lesdils pères Gordeliers du quatorzième
octobre 1684, qui règle que leshabitans de la ville de Quimper
qui décéderont, seront enterrés dans l'église paroissiale s'il
ne paroist parescrit qu'ils ayent choysi leur sépulture ailleur;
et comme la deffunte Poussain n'avoit pas faict de testament
ni escrit de sa main la disposition de la sépulture, c'étoit une
contravention formelle à l'arrest du Conseil. Sur quoy le vicaire
rece ut ordre du chapitre d'enterrer le corps à Si. Corentin. »
« Sur cela, le temps du convoy estant arrivé, le vicaire auroit
faict la levée du corps et l'auroit faict reiidre à St. Corentin, à
la manière accoustumée ; et pendant qu'on y faisoit les prières,
le sacriste des Cordeliers arriva avec des notaires pour faire
sommation au vicaire de rendre le corps dans l'esglise de son
ordre ; ce qui causa beaucoup d'émotion, ayant faict cette
— 121 —
sommation dans l'esglise, en présence de tout le monde, ce
qui auroit interrompue le service et animée les factieux, au
au lieu de se retirer au lieu capitulaire pour faire cette
sommation si elle avoit esté nécessaire. Mais pour ju-
ger que c'estoit une affaire concertée, c'est qu'il ne faut
que réfléchir que je luy avois dès le matin dudit jour,
faiet signifier Parrest du Conseil, d'abondant, pour prévenir
loulte obstacle, avec déclaration formelle que nous le mène-
rions à exécution. Ainsi il n'avoit que la voie de se pourvoir
s'il n'avoit eu intention de causer le scandale que vous allez
voir. Le service estant finy. huit ou dix tailleurs qui portoint le
corps, le prirent sur les tréteaux pour le porter touclier le
maittre autel, selon l'usage de cette ville, et au lieu de revenir
par le mesme chemin pour reporter le corps au tombeau qu'on
luy avoit creusé au milieu delà nef, les dits tailleurs prirent par
un autre aisle de l'esglise ou estoit ledit père Cordelier,
marchant d'un pas précipité, et alloint faire sortir le corps par
la porte qui donne du costé de l'évesché, en dépit de tout le
monde, si on n'avoit dans le moment fermé cette porte. : aussi
lesdits tailleurs.n'ayant pu réussir à dérober le corps, comme
ils l'avoint concerté, ils s'emportèrent et dirent milles injures
aux vicaires et aux preslres et leur portèrent plusieurs coups et
déchirèrent leurs surplis, soit eux ou leur femmes, ou autres
personnes de leur cabale. Voylà ce qui a donné lieu à la plainte
et au procez dont vous voyez les pièces que je vous envoie.
« 11 faut s'il vous plaicl réfléchir que le billet du mary est
dalté après la mort de la femme, aussy bien que celle décla-
ration mendiée, qui n'est qu un artifice du père gardien pour
fonder son procez qu'il avoit intention de faire longtemps
auparavent, ayant présenté une requête à la cour, et surpris
un arrest au préjudice de l'arrest du Conseil contradictoire.
« A Quimper le 17 may 1700. »
J'ignore quel fut le résultat du procès auquel cette affaire
donna lieu, Les inhumations étaient la plus grande ressource
— 122 —
des Cordelières ; leur église et leur couvent qui existaient
encore en partie il y a une trentaine d'années, renfermaient les
éléments d'un beau musée lapidaire. J'ai vu dans les dépen-
dances de cet établissement une énorme quautilé de pierres
tombales en calcaire, eu kersanton et en granit ordinaire,
qu'il eut été désirable de conserver, mais que les ressources
dont je disposais à l'époque où elles furent détruites-, pour le
musée archéologique 'qui n'existait alors qu'à l'état de projet,
ne m'ont pas permis d'acheter. J'ai cependant pu faire l'acqui-
sition de quelques-unes de ces pierres tombales qui se trouvent
aujourd'hui dans notre Musée et dont la description sera
l'objet d'une prochaine notice.
La plupart des autres dalles funéraires sont entrées dans la
construction des cales du boulevard de l'Odet et des maisons
bâties sur l'emplacement du couvent de Saint-François.
M. l'abbe Peyron fait observer que l'usage de tou-
cher ou de baiser l'autel des Trépassés existe encore
dans bien des paroisses rurales, notamment à Douar-
nenez, à Quéménéven, etc. On fait aussi baiser l'autel
aux enfants baptisés.
M. de la Villemarqué continue la lecture de son étu-
de sur les haches de pierre.
LES HACHES DE PIERRE.
II
LEUR USAGE.
En nous apprenant comment les patriarches de la famille
celtique appelaient, en Irlande, nos coins de pierre polie, les
plus anciens textes irlandais nous apprennent aussi à quoi on
les employait.
Sous les noms de lia milidh, « pierre de guerrier » , lia Unk
— 123 —
milidh, « pierre de champion guerrier », lia curad « pierre dé
combattant », lia lamha, « pierre de main », dénomination
que M* Stokes a trouvée avec la gloae manuale, dans un écrivain
du moyen âge (Irish glosse$ r &h6) et que Tacite a probablement
voulu rendre par manuale sazum, « pierre qu'on lance avec la
main» (Quicheral), la langue irlandaise désigne certaines
armes de guerre En effet, les premiers Irlandais maniaient la
pierre dans les combats comme leurs descendants devaient la
manier plus tard avec le bronze et le fer, simultanément
employés. Du temps do Lucrèce, un siècle avant l'ère chré-
tienne, la pierre était déjà regardée comme une arme primi-
tive : Arma antiqua manus, ungues i dentesque fuerunt et
lapides,.., dit ce poète.
Voici quelques citations que je recommande à M. John Evans
pour une nouvelle édition de son précieux ouvrage. Je les
emprunte encore à celui d'Eugène O'Curry qui en a publié le
texte (I) :
A la bataille d'Alh-Comair, livrée à leur père par les chefs
irlandais Breas, Nar et Lothar, qui furent punis de leur parri-
cide, « pas un homme du côté de Lothar, » dit la légende, « ne
partit pour la guerre sans être armé d'une pierre de guerrier* »
Us avaient aussi d'autres armes que l'auteur indique, mais il
signale tout spécialement celle-ci.
« Et comme chacun des soldats de Lothar avait apporté une
pierre de guerrier, continue-l-il, leur chef en avait apporté une
lui-même. Et il éleva le bras subitement, et il mit toute la force
de son corps dans son poignet, et la force de son- poignet dans
sa main, et la force de sa main dans son arme de pierre, puis
imprimant un mouvement de rotation à la pierre dure, il en
frappa le roi. »
Finn, père d'Oisin (le fameux Ossian), possédait aussi sa
(1) Mannen andcustoms ofthe ancient Irish. Vol. II, p. 262 et
suiv.
— 124 —
pierre de guerrier ; c'était le présent de la fille d'un roi, • un
joyau d'une, grande valeur », remarque un ancien poêle. Il
l'avait confiée à la garde de son fils ; mais ayant brisé toutes
ses autres armes dans une bataille, il la prit et tua avec elle les
trois fils de son ennemi, sauvaut ainsi l'honneur de sa race. »
Un autre héros de la légende irlandaise, Fergus, fils de
Roigb, au siège d'une ville célèbre combattait une magicienne
dont le3 charmes l'empêchaient de prendre cette ville d'assaut.
A bout de moyens de vaincre, « il mit la main dans le creux de
son bouclier, et il en tira une pierre de guerrier qu'il lança
avec forcé à la sorcière, et il l'atteignit à la têle,et elle tomba. »
Le barde Laïdken, qu'on fait vivre au V e siècle de l'ère
chrétienne, fut tué d'un coup de pierre de guerrier. Son
disciple, le poète Ua Torta, a composé là-dessus un quatrain
resté populaire.
Je pourrais multiplier les textes où il est question de cette
aime de pierre; rien de plus facile, grâce aux leçons d'Eugène
'Curry» Je finis par une dernière citation qui est très-curieuse.
Il s'agit, cette fois, d'une pierre de combat à l'usage particulier
des druides d'Irlande et douée de vertus magiques.
Un des plus célèbres d'entre eux était Mogh Ruith, vieillard
aveugle qu'on disait avoir puisé sa science en Orient, dans sa
jeunesse, à l'école de Simon le Magicien.
Dans uue guerre injuste déclarée par le roi de fUlster,
Cormac, au petit roi du Munster, celui-ci appela Mogh-Ruith à
son aide. Effrayé du puissant allié de son adversaire, Cormac
ordonna au ctief de ses druides, nommé Colpthà, d'aller à la
rencontre de Mogh-Ruith et de le combattre en présence des
deux armées de l'Ulster et du Munster. Mais comme le vieux
Mogh-Ruith était aveugle, il pria son disciple Keann-Mhor de
le remplacer, et, avant le combat, il lui parla ainsi : « Donne-
moi ma pierre empoisonnée, ma pierre de main qui me rend
victorieux de cent ennemis et me fait anéantir tous mes adver-
saires. »
— 125 —
«Et la pierre lui fut remise entre les mains; et il commença à
lui adresser des louanges, el l'ayant empoisonnée et enchantée,
il lui tint ce discours :
J'implore ma Pierre de main. — .
Qu'elle ne soit point une ombre qui fuit ;
Qu'elle soit un brandon qui mette l'ennemi en fuite.
Devant l'armée vaillante du Munster.
na terrible Pierre dure \ —
Qu'elle soit un rouge serpent d'eau !
Malheur à qui elle enlacera
Au sein des vagues écumantes !
Qu'elle soit un serpent marin !...
Aussi long que sept cornes de bœuf ;
Qu'elle soit un vautour parmi les vautours
Pour séparer le corps de l'àme.
Qu'elle soit un serpent ! Que de sept anneaux
- Il enlace le corps énorme de Colptha ;
Que des pieds à la tête-
L'enlace le reptile à peau lisse et à tête de lance . »
Inutile de dire si Colptha fut vaincu par le disciple du grand
magicien, armé de la pierre enchantée do son maître. La
légende prétend même que l'arme de Keann-Mhor se changea
en un vrai serpent qui étrangla son adversaire.
Le lendemain, continue la légende, le roi Côrmac envoya
un de ses autres druides nommé Lurga, pour venger la mort
du vaincu.
a Et Keann-Mhor marcha contre lui, sa pierre polie à la main, %
et il commença à lui adresser des louanges et à l'implorer à la
manière de aon maitre, et à prédire le carnage qu'elle devait
faire; et il invoqua ses dieux, et le chef des druides de l'uni-
vers, c'est-à-dire Mogh-Ruith, lui-même, et il chanta :
SOC. ARCHÉOL Dq FINISTÈRE. — T. VI. 10
— 126 —
Pierre polie, ô Pierre polie l
Pierre, tu vas tuer encore;
Pierre étroite, pierre compacte et mince,
Arme de choix -pour la victoire l
O Pierre qui coupe, Pierre qui coupe,
Et dont ne préserve aucun bouclier ;
O Pierre qui bondit sur les vagues
Sans t'arrêter ni te briser.
Comme dans la lutte tu as vaincu Colptha,
Par ta vertu puissante ;
Va roidement dans ce combat nouveau
Jusqu'à ce que tu aies jeté Lurga par terre. »
Et Lurga, atteint de l'arme meurtrière, eut le sort de l'autre
druide du roi Cormac. Mais cela ne suffisait pas à la pierre
enchantée ; transformée en serpent monstrueux, dit le conteur
irlandais, elle se mit à poursuivre le fils du roi lui-même, et
elle l'aurait bel et bien étranglé, comme le pauvre Colptha, si
le bon Keann-Mhor ne l'eût calmée, par les plus doux noms,
pressé sans doute d'embrasser son vieux maître aveugle, et
de lui rendre sa pierre magique. Parmi les noms dont Keann*
Mhor appelle cette arme, on ne s'étonnera pas de retrouver le
plus généralement en usage depuis des siècles, celui de pierre
de tonnerre : mais l'auteur du moyen âge qui fait parler le
druide ne se contente pas d'une qualification aussi vulgaire ;
le vainqueur, dans son exaltation, s'écrie : ô pierre d'Hector I
6 pierre de Daniel !
On ne s'attendait guère à voir Hector et Daniel, l'Iliade et
la Bible en cette affaire !
Avec les anciens poèmes gallois, rajeunis au XII e siècle, nous
rentrons dans le domaine des faits.
L'un d'eux, dont l'original peut remonter au temps de Gil-
das, ajoute un détail intéressant à l'histoire des armes de
pierre employées par les hommes de la race celtique. Repro-
chant à un jeune guerrier du VI e siècle d'avoir dégénéré de
— 127 —
ses ancêtres, et lui proposant son propre exemple à suivre, un
barde centenaire lui dit : « Quand j'étais dans ma fleur, je
fesais l'ouvrage d'un homme, tout jeune que j'étais..., ce n'était
pas peine perdue pour moi d'aiguiser la pierre, hogi maen. »
(The IV anceent books of Wales, t. H, p. 274). Les longues
heures passées par un guerrier à polir son arme pouvaient-elles
en effet être des heures perdues ? C'est encore aujourd'hui
l'occupation de^- sauvages quand ils n'ont rien de mieux à faire ;
ceux de l'Amérique, comme ceux de l'Afrique, ont conservé
les armes primitives ; et le général d'Abouvilie, constate, dans
un rapport en date du 18 août 1842, inséré au Moniteur, que
certains Kabyles répondaient aux balles de nos soldats, par des
coins de pierre lancés avec la main.
M. le capitaine Quintin de Kercadio ne pense pas
qu'on puisse assimiler les projectiles dont parle le
général d'Abou ville, aux armes de pierre employées
par les anciens Irlandais. Ces projectiles étaient des
cailloux naturels et n'avaient point la valeur des coins
façonnés de main d'homme et gardés avec soin par
leur propriétaire, comme ceux dont il est question
dans les textes traduits par M. de la Villemarqué.
Il se demande aussi comment on se servait de ces
armes, et propose plusieurs réponses. M. le Président
examinera lui-même la question ultérieurement.
M, Le Men constate que beaucoup de coins de
pierre polie trouvés dans les tumulus sont de véritables
armes de luxe, de vrais bijoux, et que leur prix devait
être considérable : les fouilles et les textes sont d'ac*
cord en ce point.
M. l'abbé Peyron ne trouve assurément aucun rap-
port entre les coins de pierre polie et la pierre dite
de Daniel ; cependant il ne s'étonne pas qu'un écrivain
— 128 —
irlandais chrétien ait rappelé un souvenir biblique.
Après la fabuleuse « pierre de foudre » pouvait-il
oublier celle que, dans le songe expliqué par Daniel,
Nabuchodonosor • avait vu descendre de la montagne
pour frapper le pied d'argile de la fameuse statue
d'or ?
A propos de la pierre d'Hector, M . Trôvédy remet à
M. le Président une note ainsi conçue :
« Je trouve à la fin du livre XII de l'Iliade
qu' Hector a fait usage d'une pierre pour enfoncer la
porte du camp des Achéens. Cette pierre n'était pas
assurément de la nature de celles dont vous nous faites
la très-intéressante et très-savante histoire, puisque
le poëte dit qu'elle est « énorme et que deux hommes
« de nos jours n'auraient pu l'arracher du sol et la
« charger sur un char. »
M. Trévédy demande si M. de Caumont ne cite pas
de textes où il soit question de pierres emmanchées.
M. le Président répond qu'il en parlera dans la suite
de "son travail.
M. Pavbt a la parole pour communication des docu-
ments annoncés par lui dans la séance du 16 novembre
et donne lecture des notes suivantes :
En cherchant à retrouver le nom qu'attribuaient aux pierres
polies cunéiformes les hommes qui les ont façonnées, notre
savant président a eu occasion de reconnaître avec M. le doc-
leur de Closmadeuc que, dans tous les idiomes de l'Europe,
ces objets sont désignés de la même façon ; la tradition popu-
laire est partout identique et la désignation peut se traduire
littéralement parles mots : « pierre de foudre. »
L'Antiquité,* le Moyen-Age, la Renaissance se sont donc
légué cette croyance. — Depuis quand le monde savant en
— 129 —
a-t-il reconnu la fausseté ? C'est ce qu'il n'est peut-être pas
très-facile d'établir.
A la fin du XVI e siècle, les superstitions relatives à l'origine
et aux vertus préservatrices des « pierres de foudre » parais-
sent encore jouir d'un grand crédit près des gens qui lisent.
Voici ce que ne craint pas de signer un médecin exerçant à
Colmar :
< Adversus tonitrua, fulmen et grandinem. Ferunt la pi de m,
c qui cura fulmine cecidit (ut aliquando contingit) si in ostio
, « suspendatur domum à fulmine prœservare (1). »
« Ut aliquando contingit ! » Personne n'en doute, en effet,
ni l'auteur ni ses lecteurs.
On constatait de loin en loin en diverses contrées des chûtes
de masses minérales plus ou moins volumineuses, et ces obser-
vations dignes de foi paraissaient précisément confirmer
d'autres allégations, d'autres traditions, chimériques pourtant !
Il eut fallu distinguer, — et il n'y a pas un siècle que celte
distinction a été faite — entre les traits ou « carreaux » fausse-
ment attribués au tonnerre et les aérolites dont la chute était
authentique, \
La crainte du ridicule a été le commencement de la sagesse,
et la réaction fut d'abord trop complète.
Les savants du XVII e siècle nièrent (les premiers, je crois) la
possibilité des chûtes de masses minérales accompagnant la
foudre, mentionnées par les anciens ou signalées par leurs
contemporains : dès lors se trouvèrent confondus, repoussés
avec là même incrédulité, des traditions erronées et des faits
palpables. Ces derniers étaient isolés et ne pouvaient jamais
avoir qu'uu petit nombre de témoins; encore ces témoins
(1) De Secretis Libri XVII, ex variis authonbus collecti, methotjice
quedigesti et aucti, per Joan. Jacobum Weckerum, Basiliensem, medi-
cum Colmariensem. — Basileœ, ex officioâ Pernea, cld ld xxciix,
1 gros vol. in-18 — L'é pitre dédicatoire est signée six ans plus tôt,
« Colmariœ, Kalend. Augusti, 1582. » Le itcret divulgué ci-dessus est
à la page 601 de ce volumineux recueil.
— 130 —
n'étaieut-ils pas tous des observateurs, à plus forte raison des
autorités. — Les pierres de foudre avaient été justement
reléguées dans le domaine de la fable ; les aérolithes furent
tardivement et difficilement acceptés vers le commencement de
ce siècle.
Pour faire la part de chacun on pourrait peut-être formuler
la progression suivante :
Les physiciens du XVII e siècle constatèrent que la foudre ne
lançait réellement point de traits de substance pierreuse.
Les naturalistes du XVIII e siècle reconnurent dans les pierres
polies cunéiformes, qualifiées pierres de foudre, les outils et lès
armes de l'homme primitif.
Et enfin les chimistes du XIX e siècle, en analysant les
aérolithes authentiques recueillis de 1769 à 1803, et jusque \k
très-discutés comme provenance, ont seuls pu affirmer qu'il
tombait à la surface du globe des corps métalliques météoriques v
de composition h peu près identique quelque fut le point de
chute.
A l'appui de ces indications quelques citations paraissent
indispensables.
Les premières seront empruntées au Traité de physique par
Jacques Rohault (2 vol. in-4°, imprimés pour la première fois
à Paris, le 17 janvier 1671). Rohault est bien peu lu aujour-
d'hui ; — fils fcd'un marchand d'Amiens, et né vers 1620, il
mourait à Paris en 1675, n'étant guère âgé que de 65 ans.
C'était un homme d'un savoir encyclopédique : les contem-
porains le citent comme un célèbre philosophe cartésien : il
publia divers ouvrages sur les sciences naturelles, la géomé-
trie, la mécanique, les fortifications, etc. — Je ne sais s'il
a été fait d'autre édition de son traité de physique que celle
de 1671 que je possède: celle-ci est seule énoncée dans le
catalogue de Boze, composé des éditions les plus. recherchées,
— mais ce que je puis affirmer c'est qu'on trouve difficile-
ment cet ouvrage dans les bibliothèques de province.
— 131 —
L'auteur déclare d'abord qu'il est temps de répudier un
grand nombre de traditions trop facilement acceptées jusque
là : voici ce qu'il en dit dans sa préface :
« Venant à considérer la philosophie et particulière-
ment la physique, je demeuray étrangement surpris de la voir
si stérile qu'elle n'eut produit aucun fruit pendant plus de vingt
siècles; qui se sont écoulez sans qu'on y est fait la moindre
découverte
« Ainsi je me vis forcé de conclure, qu'il falait que ce fust
dans la manière de philosopher qu'on se fust mépris et
après avoir examiné le plus soigneusement qu'il me fut possible
la conduite que Ton a tenue depuis.les écoles d'Athènes jusqu'à
nos temps, il me sembla que l'on y pouvait trouver quatre
choses à redire.
a La première, est ce grand crédit qu'on a toujours donné
aux Anciens dans .les écoles il est certain qu'une sou-
mission si aveugle à tous les sentiments de l'antiquité, est
> cause que les meilleurs esprits, recevant souvent sans y penser
des opinions comme vrayes, qui peuvent être fausses, ne sont
plus en état de connaître celles qui leur sont opposées, ny par
conséquent de trouver toutes les autres véritez dépendantes de
celles qu'un si pernicieux préjugé les empêche d'appercevoir...
« Ainsi l'on s'est plus occupé à étudier Aristote que
la nature qui peut-être n'est pas à beaucoup près si mystérieuse
que luy ; il y a roesme mille choses qu'elle dit nettement à
qui les veut entendre. »
Une semblable déclaration de principes encourage le lecteur ;
je n'insiste pas sur le mérite de l'ouvrage, je n'ai pas la pré-
tention de découvrir JacqnesRohault, mais puisque la tradition
des pierres de foudre est encore vivace dans le Morbihan, et
que leurs vertus curatives comme celles du jade néphrétique
restent sans doute article de foi dans bien d'autres contrées
encore, il n'est pas indifférent de rappeler ce que disait Robault,
— 138 —
il y a plus de deux cents ans, dans son traité de Physique
(3 e partie, chapitre VII), au sujet des applications de pierres
de foudre et autres in parte dolenti, taut recommandées alors
aux graveleux ou aux rhumatisants :
« XVI. Qu'on attribue faussement plusieurs vertus à quelques
pierres. — L'on ne voit pas que de la nature que nous attri-
buons aux pierres tant précieuses que communes, Ton puisse
déduire certaines propriétés, dont quelques naturalistes font
mention ; par exemple, que l'hématite arrête le flux de sang
quand elle est portée par la personne malade, et que d'autres
pierres guérissent d'autres maladies; aussi avons-nous expé-
rimenté plusieurs fois qne c'est faussement que ces sortes de
propriétés sont attribuées à la plupart de ces pierres. Il n'en est
pas de même de l'Ayman, dont presque toutes les propriétés
qui nous ont été rapportées par les anciens'se trouvent vrayes ;
nons en connaissons mesme des choses plus merveilleuses que
celles que l'Antiquité a connues, mais un sujet si extraordi-
naire demande un discours particulier. »
Suit un chapitre presque entièrement consacré aux pro-
priétés de l'aimant et terminé par quelques remarques sur
« la vertu attractive de l'ambre et de quelques autres corps»,
et « Terreur de quelques philosophes au sujet de cette vertu. »
On voit que le philosophe-physicien s'attache à réfuter toutes
les erreurs populaires : « ce sont des contes, dit-il, qui sont
« démentis par mille expériences que j'ay faites (1) »
Hais le passage le plus caractéristique, celui qui se rattache
le plus directement à la question qui nous occupe, se trouve
au Chapitre XVI (Du Tonnerre, des Éclairs et de la Foudre).
Voici ce qne dit Rohault :
({} Tome II, page 234. « De quelques propriétés qu'on a faussement
attribuées à l'ayman. •
— 133 —
N'oublions pas que ceci est imprimé en 1671.
« VU. De la foudre et que ce qu'on dit du carreau est fabu-
leux. «— Ce qu'où a coutume d'appeller le Tonnerre, reçoit le
nom de foudre lorsqu'il en résulte quelque fracas ; et parce
qu'on se persuade que les corps les plus durs ont plus de
force pour en ébranler d'autres, on croit qu'outre l'éclair et la
flamme qui sortent avec impétuosité d'entre deux nuës r il en
sort encore un corps fort dur qu'on nomme le Carreau de la
foudre ; que si on ne le voit pas tomber à chaque coup de
tonnerre, c'est, dit-on, parce qu'il ne darde pas toujours con-
tre la terre, et que l'ouverture par où il échape est tournée
vers quelqu'autre côlé. Toutes fois, si cela estait, il ne serait
pas possible qu'on ne le vist quelquefois tomber dans une des
rues de celle grande ville, ou dans quelque cour ou sur leioict
de quelque maison ; ce que personne que je sache n'assure
avoir jamais vu ; et c'est une mauvaise raison de dire que ce
qui fail qu'on ne le voit pas, c'est qu'il n'a pas été dardé con-
tre la Terre : car soit qu'il se fust meu de travers, ou même
de bas en haut, il devrait toujours arriver que sa pesanteur le
fist descendre.
« VIII. Aussi n'est-il pas nécessaire d'avoir recours à un
corps dur, pour expliquer l'effet le plus ordinaire de la fou-
dre
« IX. Ce n'est pas qu'il ne se puisse engendrer dans l'air un,
corps dur, que l'on prendra peut-être pour ce carreau imagi-
naire, etc. • .
' Après les physiciens du XVII e siècle, passons aux naturalistes
du XVIII e .
J'ai rappelé qu'un ouvrage spécial passait en revue leurs tra-
vaux et leurs opinions sur les prétendues pierres de tonnerre et
les véritables pierres météoriques. J'ai l'honneur de présenter
ce volume à la Société archéologique ; je ne sais si MM. Evans
et Cartailhac l'ont eu sous les yeux, lors de leurs récents ira-
— 134 —
vaux (1872-1877). Ce livre est du D r Joseph Izarn, médecin*
professeur de physique, de la Société des Sciences, Belles-Let-
tres et Arts de Parts, etc.; il porte la date de Floréal an XI
(1803), c'est un iu-8° de 421 pages, avec ce titre :
DES PIERRES TOMBÉES DU CIEL
ou
LITHOLOGIE ATMOSPHÉRIQUE
Présentant la marche et Vétat actuel de la science sur le Phé-
nomène des Pierres de Foudre, Pluies de pierres, Pierres tom-
bées du ciel, etc.; plusieurs Observatious inédites, communi-
quées par MM. Pictet, Sage, Darcet et VauqUelin \ avec un
essai de Théorie sur la formation de ces pierres.
Dans une dédicace • au citoyen Laplace, membre du Sénat
« Conservateur de l'Institut national de France, etc., etc. •
le docteur Izarn expose que les travaux de MM. Howard et
Vauquelin ont fixé l'attention générale sur les météorites et que
Laplace lui-même a manifesté le désir de voir constater la
réalité du phénomène (séance de la 1" classe de l'Institut
national, après la lecture du mémoire du Vauquelin, le ÏO fri-
maire an XI.)
Des recherches que le docteur Izarn avait' d'abord faites
pour son instruction personnelle lui ayant offert des résultats
positifs, l'illustre auteur de la Mécanique céleste a bien
voulu prendre connaissance de ce travail et permettre qu'il
fut publié sous ses auspices.
Le phénomène des masses minérales tombant de l'atmos-
phère, dit Izarn, n'avait naguères qu'une place incertaine
parmi les faits physiques, paice qu'il était rare et de nature à
avoir peu de témoins
Et pourtant « dans lous les temps on avait parlé de pierres
« tombées du ciel, de pierres de tonnerre ou de foudre, etc.
— 135 —
« Les annales des} connaissances humaines consignaient de
« loin en loin des récits et des preuves de l'existence du phé-
« nomène. Le vulgaire, de tous les âges Tarait admise ; mais
a parmi les [hommes] instruits de tous les siècles, le très- petit
« nombre de ceux que le hazard en avait rendus témoins,
« avaient reconnurent, sans que (leur témoignage eut pu en*
« traîner la confiance générale » A une crédulité excessive
avaient succédé d'intraitables défiances ; les savants du XVII e
et du XVIII e siècles ne se préoccupaient plus que de faire justice
des superstitions populaires relatives auxfprétendues pierres de
foudre. De parti pris dès lors l'Académie des Sciences écartait
comme fabuleuses elles-mêmes les observations, cependant po-
sitives, relatives aux météorites ou bolides... . « Un mois avant
«la lecture de Vauquelin à l'Institut, M. Piclet, parlant du
« même phénomène, avait trouvé une incrédulité telle qu'il lui
« fallut une sorte de courage pour achever sa lecture. »
lies savants comme le vulgaire n'étaient pas'encore guéris
de cette vieille habitude de n'entendre jamais de détonna lions
dans les airs, sans avoir aussitôt l'idée de tonnerre, de foudre
ou de phénomènes électriques, et l'on savait depuis longtemps
déjà que la foudre ne lance point de « carreaux. »
Le docteur Izarn estima donc que son travail venait au mo-
ment opportun : « Je n'ai, pour but, dit-il, que de fournir les
« pièces du pr'ocès je les puiserai dans les principaux re-
« cueils académiques, en les classant par ordre de date. — Je
« discuterai ensuite les différentes opinions »
L'ouvrage comprend ainsi trois parties : I e documents acquis
au débat ; 2° discussion des traditions et des faits ; 3° essai
d'une théorie sur la formation de corps pierreux ou métalliques
dans l'atmosphère '
Je laisse intentionnellement de" côté cette 3* section et
j'extrais seulement des deux premières les passages caractéristi-
ques que visait ma communication du 16 novembre. — Je n'ai
eu d'autre but, je le repète que de rappeler les déclarations de
— 136 —
deJussieu et leur antériorité par rapport au mémoire de Mahu-
del. -> Vérification faite, les premières datent de 1723, et le
second de 1734 seulement.
Voici donc le texte même du livre du docteur Izarn.
Recueil de Faits et Opinions publiés en France depuis 1700
jusqu'à ce jour sur les Pierres de Foudre, de Tonnerre,
Pierres tombées du ciel, Pluies de Pierres, etc.
N« 5.
« En 1723, M. dfrJussieu lut à l'Académie des Sciences le mé-
moire suivant sur les prétendues pierres de foudre.
Rien n'est si commun dans la république des lettres que le
mérite que les anciens, et qu'une tradition qui, depuis eux,
s'est même conservée jusqu'à nous, ont attribué il la pierre de
foudre; l'explication du nom de céraunia qu'elle porte,- nous
apprend qu'ils la croyaient descendre du ciel dans le moment
que le tonnerre éclatait et tombait sur quelque endroit que ce
fut sur la terre.
« Cette prétendue origine la faisait regarder avec une espèce
de respect qui avait rapport à la majesté du dieu qu'ils s'ima-
ginaient l'avoir lancée. Aussi Pline la mit-il dans le nombre
des pierres précieuses.
« Hais il n'est point de peuples qui en aient fait plus de cas que
ceux du Nord par la superstition qu'ils attachaient à ces
pierres, qui était que comme ils avaient autrefois adoré une
idole, qu'ils croyaient présider à la foudre, et qu'ils représen-
taient la foudre à la main sous la figure d'une de ces pierres
taillées en coin, ils conservaient chez eux une de ces sortes de
pierre comme un préservatif contre la foudre, qu'ils croyaient
éloigner de leurs maisons, lorsque au premier bruit de ton*
nerre qu'ils entendaient, ils avaient frappé de ces pierres trois
fois les endroits par lesquels le tonnerre aurait pu entrer.
« Helwing, célèbre ministre d'Angerbourg, en Prusse, qui a
— 137 —
fait un traité particulier des pierres de son pays, dit qu'il lui a
fallu recourir au bras séculier pour détruire cette superstition
♦ dans le lieu où il exerçait son ministère, superstition qui était
d'autant plus enracinée qu'elle était entretenue par les décou-
vertes continuelles qui s'y faisaient de ces sortes de pierres
dont ces peuples ne pouvaient s'imaginer que la figure n'eût
quelque chose de mystérieux.
« Cette nation semblerait s'être accordée en cela avec les
Chinois chez lesquels Rhumphius, qui nous a donné des figures
de ces sortes de pierres dans son Recueil de Coquilles, nous
assure qu'une pareille idée a pour fondement l'observation
qu'ils font sur la figure, sur la qualité et la couleur de ces
sortes de pierres, et sur les endroits sur lesquels il s'en trouve,
qui sont souvent des troncs d'arbre qu'ils s'imaginent avoir été
frappés de la foudre;
« Quelque éloignés que nous soyons de semblables idées, nous
n'avons pas laissé de croire jusqu'ici que la ceraunia est une
pierre naturelle dont le caractère est d'être figuré ou en coin,
ou en fer de flèche, de la même manière que la figure ovale ,
la cylindre, la prismatique et l'orbiculaire sont les caractères
des cailloux de meudoc, de l'émeraude, de quelques cristaux
et des échinites.
« Mercati, tout éclairé qu'il était dans l'histoire des fossiles,
n'a pas voulu tellement adhérer à l'opinion que ces sortes de
pierres aient été taillées de cette forme, qu'il a renoncé au
sentiment de ceux qui en admettent la possibilité naturelle
sous le nom de jeu de nature.
« Mais aujourd'hui, un peu d'attention à deux ou trois espèces
de pierres qui nous viennent, les unes des lies d'Amérique, les
autres du Canada, est capable de nous détromper de ce pré-
jugé, du moment que nous apprenons, à n'en pas douter, que
les sauvages de ces pays-là se servent à différents usages de
pierres à peu près semblables, qu'ils ont taillées avec une
patience infinie par le frottement contre d'autres pierres, faute
d'aucun instrument de fer, ni d'acier.
— 138 —
« Les premiers besoins des sauvages sont ou de couper ou de
fendre du bois, ou de se faire des armes dont ils puissent tuer
des animaux pour leur subsistance, ou de se défendre contre
leurs ennemis. ;
a La figure de hache et celle de coin qu'ils ont donnée à
quelques pierres que nous avons Urées d'eux, nous marque
assez qu'ils les ont taillées pour les premiers -de ces usages;
et, celles de pointes qu'ils ont donnée à quelques pierres à feu
que nous voyons adroitement entées sur l'extrémité de cer-
tains bois menus et longs, nous font assez connaître qu'ils s'en
servent comme de flèches.
« J'en rapporte une pièce originale de chacun de ces instru-
ments : Tune qui est en forme de hache, tirée des Caraïbes; la
seconde, qui ressemble à un coin, apporté du Canada; et
la troisième, qui sont trois flèches, chacune ayant pour armure,
au lieu d'une pointe d'acier, un fragment triangulaire de
pierres à feu, aiguisé par l'angle qui lui sert de pointe, et
tranchant des deux côtés.
« Lorsque nous voyons donc parmi les figures de ceux qui ont
*
fait des recueils de pierres figurées, celles qui se rapportent à
quelqu'une de ces trois formes, et surtout à celle de coin et à
celle de fer de flèche, qui ont toujours passé jusqu'ici pour
pierres de foudre~etJpour mystérieuses, nous ne devons point
hésiter de les regarder comme instruments répondant à ceux
d'acier, auxquels ils ressemblent, et qui ont été taillés ou par
les premiers habitants de ces pays où on les trouve, ou y
avaient été apportés par des étrangers qui en faisaient une sorte
de commerce. Ce qui donne lieu à cette conjecture, c'est que
dans la plupart des pays où se trouvent ces instruments on n y
voit point ni carrière, ni caillou de la même nature qui ait pu
servir pour les fabriquer sur les lieux ; et que, par conséquent,
il y avait beaucoup d'apparence que les habitants d'un pays où
se rencontrent des cailloux d'un grain aussi fin et d'une espèce
aussi dure, venaient les échanger contre d'autres denrées ; et,
— 139 —
L -
ce qui achève de confirmer cette conjecture est que la même
chose se pratique encore chez tes sauvages, parmi lesquels ceux
qui ont le plus d'adresse et de patience pour tailler ces sortes
d'instruments, les fournissent aux autres qui savent peut-être
mieux s'en servir.
« Les peuples de France, d'Allemagne et des autres pays du
Nord, pour ce qui est de la découverte du fer, sont assez sem-
blables à tous les sauvages d'aujourd'hui, et n'avaient pas
moins besoin qu'eux avant l'usage du fer, de couper du bois, de
séparer des écorces, de fendre des branches, de tuer des bêtes
sauvages, de chasser pour leur nourriture et de se défendre de
leurs ennemis, ce qu'ils ne pouvaient guère exécuter qu'avec
de tels instruments qui, n'étant pas, comme le fer, sujets à la
rouille, se retrouvent aujourd'hui dans la terre, en leur entier et
presque avec leur premier poli.
« Comme il est assezordinairequedes choses d'un genre très-
différent portent quelquefois le même nom, et que celui de
pierre de foudre, se. donne encore en français à une espèce de
marcassite vitriolique, de figure ou oblongue ou arrondie,
tantôt hérissée de pointes, tantôt lisse et tantôt à facettes, je
suis bien aise d'avertir qu'elle ne doit point être confondue
avec cette première, non-seulement parce qu'elle ne lui res-
semble en rien par rapport à la figure, et qu'au contraire elle
en est très-différente par les propriétés qu'elle a de fuser et de
•se convertir en vitriol, lorsqu'elle est exposée à l'air, au lieu
que celle dont je parle, est une vraie pierre très-dure, d'un
grain si fin, qu'elle sert de pierre de touche pour les métaux et
à polir différents ouvrages. »
N° 6.
Dans la même année 1 723, l'historien de l'Académie des
Sciences donna sur le même phénomène, et d'après l'opinion
de M. de Jussieu, les réflexions suivantes :
« Les pierres do foudre n'ont rien d'anormal (il venait de par
— 140 —
1er des pierres connues sous le nom d'yeux de serpent, de cra-
paudines, etc) ; ce sont, ajoule-t-il, de véritables cailloux qui
ont une figure de coin ou de fer de flèche. Cette [figure a fait
juger aux anciens Grecs qu'elles étaient les armes de Jupiter
tonnant, el qu'il les lançait de ses mains avec la foudre : cette
opinion a passé ou est née d'elle-même chez les peuples du
Nord qui, pour trouver ces pierres en grande quantité ne les
en ont pas moins vénérées. Ils croient même que, quoiqu'elles
viennent de la foudre, elles les en garantiront, et on a bien de
la peine encore aujourd'hui à les en désabuser. Les Chinois,
qui ne sont guères à portée de la contagion de ces idées, en
ont pourtant d'assez semblables, et il n'est pas trop aisé de
voir pourquoi cette superstition est assez naturelle.
L'origine de ces pierres est très-évidente et très-sûre, dès
. qu'on en voit de toutes pareilles taillées par les sauvages
d'Amérique, pour fendre du bois ou armer leurs flèches. Ils
n'ont point de fer ; et en frottant des pierres fort dures les
unes contre les autres, ils font ces sortes d'ouvrages qui leur
sont absolument nécessaires, et n'y plaignent point le temps
dont en effet ils ne manquent pas. Notre continent fut ancien-
nement habité par des sauvages, et les mornes besoins, la
même disette de fer leur ont inspiré la même industrie. Dans
la suite, leurs outils devenus inutiles ont été ensevelis, en
grande quantité, dans la terre, et s'y sont mieux conservés
que s'ils eussent été de métal; car la rouille ou le verdetles
auraient peut-être consumés ou défigurés ; et voilà ces pierres
tombées avec la foudre !.... »
No 7.
En 1734, l'historien de l'Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres donne l'extrait suivant d'un mémoire lu â l'Académie
par M. Mahudel, sur les prétendues pierres de foudre.
« L'erreur, pour être ancienne, n'en est pas plus respectable
« et on est toujours à temps de la découvrir. C'est ce qu'en-
— 141 —
« (reprit M. Mahudel par rapport aux pierres de foudre, qu'il
« prouva dans un mémoire lu à l'Académie, êlre des instru-
« menls dont les premiers hommes se servirent avant l'usage
« de l'airain et du fer, ainsi que l'avait avancé, avant lui,
« Mercati, médecin du pape Clément XIII. On reconnaît, dit-il,
« trois espèces de ces pierres, elc »
Suit une intéressante analyse du mémoire, que la citation
suivante dispense de reproduire :
é
Examen critique des opinions émises jusqu'à ce jour, tant sur
la réalité de la chute des pierres de l'atmosphère, que sur leur
origine et leur formation ; présentant la marche de l'esprit
humain relativement à ce phénomène.
En voyant M. Mahudel reproduire, à l'Académie des Inscrip-
tions, l'opinion de M. de Jussieu, publiée par celle des
Sciences, onze ans auparavant, on serait tenté de croire qu'il
était défendu aux membres de celte Académie de lire les mé-
moires publiés par l'autre.
On peut en conclure, du moins, que les rapports qui exis-
taient entre les savants de ce temps là, étaient bien différents
de ceux qui existent entre les savants d'aujourd'hui. Dans tout
le mémoire de M. Mahudel qui, comme on a pu le voir, n'a
d'autre but ni d'autre -résultat que celui de M. de Jussieu, il
n'est pas fait plus mention de celui-ci, que s'il n'eût pas été pu-
blié.
Le mémoire de M. Mahudel a pourtant son avantage sur celui
de M. de Jussieu, c'est qu'il présente mieux l'a question, et prête
d'autant moins à cette extension qui rend fausse et inadmissi-
ble la conséquence qu'on en déduit. H dislingue trois espèces
de pierres de foudre, après avoir rangé dans la seconde espèce,
Soc. archéol. du Finistère.— Tome VI. il
— 142 —
c celles qui par Yabondance des substances métalliques qu'elles
contiennent, se. rapportent à la classe des marcassites, et donf
il laisse aux chimistes à déterminer l'origine contre ceux qui
« croient qu'elle est céleste ; il ajoute qu'il ne s'attache qu'à
« l'examen de celles d'une troisième espèce, qui sont d'une
« substance purement pierreuse, et qui n'ont point reçu de la
€ nature les figures qui nous les font admirer »
Ce sont ces pierres qu'il prouve, comme l'avait fait M. de
Jussieu T êtres dues à l'industrie des anciens habitants de nos
contrées, qui, ne connaissant point le fer se formaient des ins-
truments avec les corps les plus propres aux usages auxquels
ils les destinaient. Il pense avoir détruit une vieille erreur
en dévoilant l'origine de la forme de ces pierres, que Ton cro-
yait communément être tombées avec la foudre.
M. Hahudel laisse de côté précisément celles dont nous nous
occupons; son mémoire n'infirme donc pas plus que les autres
la validité des témoignages anciens et modernes (1). L'historien
de l'Académie des Inscriptions ne fait pas comme celui de l'Aca-
démie des Çciences : loin de conclure qu'il n'y a point de pierres
c tombées du ciel, il dit expressément que M. Mahudel n'expose
c point les raisons qui prouvent l'impossibilité que ces pierres
« se forment dans les nues »
Voici donc la part de de Jussieu et celle de Mahudel équi-
tablement faites par le docteur Izarn ; — • mais j'ai parlé
aussi d'un minéralogiste du XVIII e siècle que la Lithologie at-
mosphérique n'avait pas eu occasion de citer, Yatmontde Bomarc,
je ne me souvenais pas lors de notre dernière séance de la
date exacte de publication de la Minéralogie ou nouvelle expo-
sition du système minéral, par cet auteur, mais j'étais du
moins certain que ce traité, justement estimé, se terminait par
un chapitre particulier sur les pierres polies cunéiformes, les
(1) Témoignages que le docteur Izarn rapporte à de véritables météo-
rite», de nature métallique et sans formes déterminées.
— 143 —
N désignant déjà par cette qualification à laquelle il faut revenir
et que celle de cellc^ aura fort malencontreusement remplacée
pendant quelques années.
L'ouvrage porte le millésime de 1762,. il se termine ainsi,
tome 1/, page 329 :
ESPÈCE CCCL1I.
UL Pierres figurées artificielles ou supposées»
(Lithoglyphi arte-facti, JVallerii, Lapides supposititii).
a On donne ce nom à des pierres figurées que l'on rencon-
tre quelquefois dans la terre à différentes profondeurs, commu-
nément dans des bulles et dans des tombeaux, et qui ont été
Contrefaites; ou imitées par art (t), lesquelles servaient en gé-
néral d'instruments et d'armes aux anciens : telles sont : l°les
pierres dé tonnerre, lithoglyphi arte-facti cunei- formes, qui
, sont en forme de coin, ou pyramidales par les deux extrémités,
renflées dans le milieu, et pour l'ordinaire percées d'uu trou ;
2° les haches de pierre, securi formes; 3° les marteaux de
pierre, mallei-formes ; 4° les couteaux de pierre, cultri -formes;
5 ê les flèches de pierre, sagittœ- formes ; 6° les langues dé
pierre, linguœ-formes ; 7° les urnes sépulcrales, urnœ-oslracilœ\
et pour terminer l'histoire des pierres figurées artificielles,
nous y ajouterons, 8° les prétendues dés de pierre, tesserœ
badenses, dont Scheuchzer, Rist.nat., Partie //, p. 156, fait
mention. »
(1) 11 y avait donc dès ce moment des tutnuli fouillés par les collec-
tionneurs, mais de plus la contrefaçon elle-même multipliait déjà, it y
a plus de cent ans, les échantillons authentiques provenant de ces
fouilles!..
Le docteur Izarn dit lui-même (page 287) :
« Cette forme (triangulaire arrondie) ayant été prise par les
faiseurs de collections de pierres figurées, pour un caractère distinctif
de pierre de foudre, et chacun voulant se donner une de ces pierres,
elles se sott facilement multipliées dans les cabinets ; car il n est pas
difficile de trouver des cailloux très-durs et de toutes formes^ triangu-
laires ou deltoïdes. . . »
— 144 —
Je voudrais pouvoir étendre plutôt que restreindre ces cita-
talions ; mais elles absorberaient trop de place dans le Bulletin de
la Société. — J'ai cependant encore le devoir de produire les
passages de Buflbn auxquels je faisais allusion dans notre der-
nière séance, au sujet du transfert très-vraiseinblable de ha-
ches du jade sibérien jusqu'en Amérique : — il ne semble pas
que rien- ait été publié de plus complet et de plus concluant
parmi les travaux les plus récents, et voici au moins la preuve
d'échanges très-anciens entre les peuplades de l'extrême nord
des deux continents,
C'est au sixième volume de l'Histoire naturelle (édition de
1779 — Imprimerie royale) dans les notes justificatives, qu'on
trouve ce qui suit :
« M. Muller, envoyé avec M. Gmelin par l'Impératrice en
Sibérie. ...., conclut par dire qu'il n'y a qu'une très-petite sé-
paration entre l'Asie et l'Amérique, et que ce détroit offre une
ou plusieurs isles, qui servent de roules ou de stations commu-
nes aux habitants des deux continents. Je crois celte opinion
bien fondée et M. Muller rassemble un grand nombre de faits
pour l'appuyer
•
« La grande carte générale de l'empire de Russie qu'on
vient de publier cette année, 1777, représente exactement les
côtes de toute l'extrémité septentrionale de l'Asie habitée par
les Tschulschis Les îles reconnues entre les côtes du
Kamlschalka et celles de l'Amérique sont montagneuses ainsi
que les côtes de Kamlschalka et celles du continent de l'Amé-
rique; il y a donc une continuation bien marquée entre les
chaînes de montagnes de ces deux continents, dont les inter-
ruptions jadis peut-être moins considérables, peuvent avoir été
élargies par le dépérissement de la roche, par les courants
continuels qui entrent de la mer glaciale vers la grande mer
du Sud, et par les catastrophes du gfobe.
«Mais celle chaîne sous-marine qui joint les terres du Kamls-
chalka avec celles de F Amérique, est plus méridionale de sept
— 145 —
ou huit degrés que celle des fies Anadir ou Àndrien qui, de
temps immémorial, ont servi de passage aux Tschulschis pour
aller en Amérique*.
« M. de Domascheneff dit qu'il est certain que celte traversée
de la {pointe de l'Asie au continent de l'Amérique, se fait à la
rame et que ces peuples y vont trafiquer des ferrailles
russes avec les Américains; que les îles qui sont sur ce pas-
sage y sont si fréquentées, qu'on peut coucher toutes les nuits
à terre et que le'continent de l'Amérique où les Tschutschis
commercent esl montagneux
« Ces îles septentrionales situées entre les deux continents, ne
sont guère connues que des Tschutschis ; elles forment une
chaîne entre la pointe la plus orientale de l'Asie et le continent
de l'Amérique %
« On ne trouve point de métaux dans ces îles, mais seulement
des calcédoines, et quelques autres pierres colorées de peu
de valeur " *
« Les habitants de ces îles sont assez nombreux, mais comme
ils mènent une vie'errante, se transportant d'une île à l'autre,
il n'est pas possible de fixer leur nombre 11 parait que tous
les insulaires des îles aux Renards sont d'une même nation à
laquelle les habitants des Aleutes et des îles d'Andrien peuvent
aussi se rapporter quoiqu'ils en diffèrent par quelques coutumes.
Tout ce peuple a une très-grande ressemblance, par les mœurs
la façon de vivre et de se nourrir, avec les Esquimaux et les
Groënlandais. Le nom de Kanaghist dont ces insulaires s'appel-
W dans leur langue, peut-être corrompu par les marins, est
encore très ressemblant à celui de Karalit, dont les Esquimaux
et leurs frères les Groënlandais se nomment (1). On n'a trouvé
(1) Ce nom de Kanaghist aifquel des marins de la Baltique avaient
tout au plus ajouté la terminaison allemande ist n'est- il pas encore
plus voisin de Kanak que v de Karalit ?... Ce serait alors le nom
que se donnent encore les indigènes de la Nouvelle Zélaude et ceux
de la Nouvelle-Calédonie. — Ne fût ce que pour permettre de publier
ce rapprochement, ces passages de Buffon devaient être réimprimes.
— 146 —
aux habitants de toutes ces îles, entre l'Asie et l'Amérique,
d'autres outils que des haches de pierre» des cailloux taillés
en scalpel et des omoplates d'animaux, aiguisés pour couper
l'herbe ; ils ont aussi des dards [qu'ils lancent de la main à
l'aide d'une palette, et desquels la pointe est armée d'un cail-
lou pointu et artistement taillé : aujourd'hui ils ont beaucoup
de ferraille- volées ou enlevées aux Russes. Us font des canots
et des espèces de pirogues comme les Esquimaux ; il y en a
d'assez grandes pour contenir vingt personnes ; la charpente
en est de bois léger, recouvert partout de peaux de phoques et
d'autres animaux marins.
« Il paraît par tous ces faits, que de temps immémorial les
Tschutschis qui habitent la pointe la plus orientale de l'Asie,
entre le 55* et le 70 e degrés, ont eu commerce avec les Amé-
ricains, et que ce commerce était d'autant plus facile pour ces
peuples accoutumés à la rigneur du froid, que Ton peut faire le
voyage, qui n'est peut-être pas de cent lieues, en se reposant
tous les jours d'Iles eu lies, et dans de simples canots, conduits
à la rame en été, et peut-être sur la glace en hiver. L'Améri-
que a donc pu être peuplée par l'Asie sous ce parallèle ; et
tout semble indiquer que, quoiqu'il y ail aujourd'hui des inter-
ruptions de mer entre les terres de ces iles, elles ne faisaient
autrefois qu'un même continent, par lequel l'Amérique était
jointe à l'Asie... . »
Je n'ai plus que peu de mots à dire.
Certains auteurs accueillent encore avec bien peu de faveur
l'hypothèse du commerce des outils et armes de pierre entre
les peuples primitifs. Je pourrais citer au soutien de cette opi-
nion des indications plus récentes, et en assez grand nombre.
— J'en choisirai deux :
La Revue archéologique a publié dans sa livraison de
juillet 1878, une très-intéressante Notice sur la distribution
géographique des haches et autres objets préhistoriques, par
MM . Damour et Fischer.
— 147 —
D'après ce très-remarquable résumé, * les gisements de jade
« néphrite qui peuvent se trouver sur le continent américain
« n'ont pas encore été déterminées avec une suffisante préci-
« sion. »
Malgré cette incertitude, et « dans le but d'appeler l'alién-
er tion et la critique scientifique des archéologues que laques-
« tion pourrait intéresser, » les auteurs croient, pouvoir don-
ner une énuméralion d'antiquités américaines supposées en
jade néphrite ; je relève sur cette liste (Jib. cit., page 20)
comme appartenant au musée ethnographique de Gbllingen
l'objet décrit ci-dessous :
« Hache attachée à un manche. — La matière est d'un*
« teinte vert poireau, avec des lâches de rouille semblables à
! « celles qu'on observe sur le jade néphrite de Sibérie. Trouvée
, « sur la côte extrême nord-ouest de l'Amérique septentrionale,
« vis-à-vis des Tschoukstches, qui portent de pareilles hache**»
Cette dernière remarque ne rappelle qu'une provenance pos-
sible et se formule dans les termes les plus discrets; —mais,
i rapprochée des Notes justificatives citées plus haut, ne s'im-
pose-t-elle pas avec une grande autorité ?<Ne pourrait-on dire
1 que Buffon recueillait d'avance les preuves de l'origine sibé-
rienne de. celle hache, lorsqu'il signalait, en 1777, le va-et-
vient, déjà bien ancien, des Tschouklschis à travers les lies
Aléou tiennes et leurs échanges habituels avec les indigènes du
•nord-ouest Amérique ?
Venons à des témoignages contemporains.
Le 14 août 1865, à l'Académie des Sciences, M. Élie de
Beaumont donne lecture d'une lettre de M. Simonin, sur les
découvertes faites à l'île d'Elbe par M. Raffaelo Foresi. Ce col-
lectionneur vient de retrouver chez des paysans « des pointes
« de flèches en silex qui passent parmi ces gens crédules pour
« des pierres de foudre, qu'on suspend au cou des enfants
9 pour les préserver du tonnerre (i).
(l) Comptes-rendus hebdomadaires de l'Académie des Sciences,
tome LXI, page 303.
— 148 -
« Les instruments retrouvés par M. Foresi ont cela de par-
« liculier que les neuf dixièmes sont en silex d'espèces abso-
« Jument inconnues à l'île d'Elbe; on y retrouve jusqu'à l'ob-
« sidienne, qui a dû venir de Naples, sinon de plus loin »,
dit M. Simonin.
Dans la séance suivante de la même Académie (21 août
1865), M. Roulin présente de vive voix quelques remarques sur
ce passage de la lettre de M. Simonin. — Rappelant la pierre
que M. Damour a désignée sous le nom de callaîs et qui avait
été trouvée dans un tumulus du Morbihan (1), il signale que
celte pierre était d'une origine sans donte plus lointaine en-
core, bien qu'on ne puisse rien affirmer à cet égard. « Proba-
blement, dit M. Roulin, bien des faits analogues auront
échappé à l'attention, lorsque les antiquaires n'avaient pas
encore. senti le besoin de s'aider des lumières de la miné-
ralogie ; mais on en connaît déjà assez pour en chercher
l'explication .
« Comment ces armes, ces objets de parure sont-ils parve-
nus dans les lieux où nous nous étonnons aujourd'hui de les
découvrir? Sont-ils restés là comme des témoins d'une inva-
sion passagère, d'une sorte de colonisation? C'est une
manière très-naturelle de se rendre compte de leur pré-
sence, mais on doit aussi se demander s'ils n'ont p^s pu
arriver par la voie du commerce. On aura peine sans doute
à se figurer des commerçants chez des . peuples aussi peu
avancés dans la civilisation ; mais les Indiens qui errent dans
les plaines arrosées de l'Orénoque ne sont pas certainement
plus civilisées, et cependant on en voit qui entreprennent
de longs voyages dans un but purement mercantile, »
Comme preuve de ce fait, M. Roulin évoque les souvenirs du
voyage d'exploration accompli par lui-même, en 1823^ avec
M. Boussingault dans la vallée du Meta, affluent de l'Orénoque.
(1) Comptes-rendus» tome LIX, page 936.
— 149 —
11 cite d'aboi d les Indiens Camoniguas que d'autres nations
désignent elles mêmes comme grands vogageurs et grands
trafiquants; « non-seulement ils apportent (à San-Martin de los
Lanos) du curare qu'ils fabriquent eux-mêmes, mais encore ils
vont chercher dans les Andaquies, de la cire blanche- ils s'avan-
cent jusqu'aux missions portugaises, d'où ils tirent des haches,
des machetes et des fers de lance..... » — Enfin au village de
Giramena, les explorateurs français remarquent dans toutes
les maisons, des râpes pour le manioc formées par une planche
dans laquelle étaient implantés, comme des dents, de petits
fragments de silex. M. Roulin s'informa d'où venaient ces
pierres, car il n'y en avait pas de semblables dans tout le pays;
on lui dit qu'elles venaient de fort loin, mais qu'on n'en recevait
plus depuis quelques années ; » — celle dernière indication
est complétée par la déclaration d'un métis ainsi conçue : De
temps immémorial les gens de Giramena voyaient arriver chez
eux, tous les ans, vers la même époque, quelque vingt ou
trente Indiens — autres que les Camoniguas, — et qui appor-
taient également leur curare, « mais dont l'arrivée était surtout
désirée à cause des pierres à feu qu'on ne recevait que par eux.
— Malgré le besoin toujours renouvelé de ces pierres et par
une de ces déterminations soudaines, tout à fait inexplicables,
mais trop communes chez les Indiens, « tous les voyageurs
avaient été massacrés dans une même nuit par les indigènes
de Giramena et, depuis, ceux-ci n'en n'avaient plus vu repa-
raître. »
M. Pavot termine sa lecture en disant qu'il craint
de s'être laissé entraîner lui-même beaucoup trop loin
sur les traces des nomades colporteurs de silex ou de
jade ; il n'a voulu que rappeler à la Société archéolo-
gique les éclaircissements que la minéralogie et la
chimie peuvent fournir, ce en faisant connaître les ca-
ractères et les principes constituants des matières mises
\
— 150 —
en œuvre par nos premiers pères pour assurer leur
propre conservation. » — Il cite à cet égard les tra-
vaux de M. A. Damour, publiés de 1863 à 187.8, comme
donnant les éléments d'étude les plus complets; il
ajoute qu'un résumé de tous les mémoires et mono-
graphies publiés par ce savant minéralogiste (jade,
jadéïte, callaïs, etc.) serait des plus intéressants pour
les archéologues. M. de Mortillet, dans son Bulletin
mensuel des travaux et découvertes concernant l'an-
thropologie (Matériaux pour l'histoire positive et philoso-
phique de l'homme) a déjà reproduit in-extenso (mars
1866) la Notice sur la composition des haches en pierre,
trouvées dans les monuments celtiques et chez les tribus sau-
vages, que M. Damour avait préseatée, l'année pré-
cédente, à l'Académie des Sciences (21 et 28 août 1865).
Dans cette publication le nom de l'auteur a été
inexactement reproduit (Dumour au lieu de Damour).
M. Pavot ignore si, l'année précédente, M. de Mortillet
avait inséré dans sa Revue la Notice spéciale sur le
jade vert, également présentée à l'Académie des Scien-
ces, dès 1863, et publiée dans les comptes-rendus
(tome LVI, page 861). Quoi qu'il en soit, les comptes-
rendus de l'Académie des Sciences et la Revue archéo-
logique elle-même, pour la plus récente notice (juillet
1878) sont partout faciles à consulter.
Ce qu'on retrouve peut-être moins facilement au-
jourd'hui, ce sont les opinions exprimées par divers
auteurs de 1650 à 1850, sur le jade, la pierre des
Amazones, le silex, etc., ainsi que les diverses hypo-
thèses émises sur la formation et la « reproduction »
de ces pierres..... M. Pavot a déjà rassemblé quel- y
— 151 —
ques notes à ce sujet et les tient à la disposition de ses
collègues, mais il hésiterait à les présenter à la Société
archéologique, car ces documents n'ont pas été em-
pruntés v à des ouvrages devenus introuvables. M. le
Président insiste au contraire pour que ces extraits
soient eux-mêmes produits à une prochaine séance,
car à en juger par la lecture des notes précédente^, la
communication de ces documents supplémentaires in-
téressera très-certainement les membres de la Société.
M. Le Men informe l'Assemblée que, grâce aux
démarches de notre confrère, M. Louis Hémon, dé-
puté de Quimper, la Société a tout lieu d'espérer le
concours du Ministère des Beaux- Arts pour l'établis"
sèment d'une galerie de costumes bretons à notre
Musée.
Une liste de souscription, en tête de laquelle M. de
la Villemarqué s'inscrit pour cinquante francs, est
ensuite ouverte pour le même objet.
On procède au dépouillement du scrutin pour la
nomination d'un secrétaire-adjoint. M. Tanguy, sténo-
graphe et employé à la Direction des ligues télégra-
phiques, ayant obtenu la majorité des suffrages, est
désigné pour remplir ces fonctions.
M. Gatrot, sous-lieutenant au 118 e , présenté par
MM. Créac'hcadic et Le Men, est admis à l'unanimité
à faire partie de la Société archéologique du Finistère.
La séance est levée à quatre heures et demie.
Le Secrétaire,
R.-F. LE MEN.
- 152 —
SEANCE DU SAMEDI 1« MARS 1879.
•
Présidence de M. F. AUDRAN, Vice-Président.
Étaient présents : MM. Audran, Le Men, Trévédy,
Pavot, Jaclot, de Brémoy, Bourassin, Malen, Fouge-
ray, Moreau, de Chabre, Le Noble, Créac'hcadic et
Tanguy, secrétaire.
M. Audran dit qu'il ne s'attendait pas à l'honneur
de présider cette séance, parce que des affaires sérieu- j
ses réclamaient son temps et ses soins. Il devait donc
s'excuser près de la Société, quand il reçut une lettre
de M. de la Villemarqué, qui l'informait que pour rai-
son de santé, il ne lui était pas possible de se rendre
à Quimper présider la séance de ce jour et qu'il le
priait de l'y remplacer.
M. le Président donne ensuite la parole à M. Le Men,
qui après avoir rappelé ce qui a été fait pour l'éta-
blissement au Musée archéologique de Quimper d'une
galerie de costumes bretons et avoir signalé de nou-
veau, comme il convenait de le faire, l'utile concours .
que M. Louis Hémon, député, a prêté pour cet objet à
la Société, informe l'assemblée que sur une demande
adressée à M. le Maire de Quimper par le bureau de
la Société archéologique, le Conseil municipal de cette
ville lui a accordé une subvention de 1,200 francs pour
l'achat de costumes, ainsi qu'il résulte de la lettre
suivante que M. le Maire vient d'adresser à M. Le Men.
A Monsieur Le Men, Archiviste du département du Finistère,
à Quimper.
« Monsieur,
« J'ai soumis an Conseil municipal la demande que le bu-
— 153 —
reau de la Société archéologique du Finistère m'a fait l'hon-
neur de m 'adresser.
« Je suis heureux d'avoir, à vous informer que le Conseil,
reconnaissant l'intérêt que présenterait une galerie de costu-
mes bretons, et désireux de donner un témoignage de sympa-
thie à la Société archéologique du Finistère, a décidé, à l'una-
nimité, qu'une somme de 1,200 francs serait immédiatement
mise à sa disposition pour contribuer à l'acquisition de cos-
tumes du pays.
« Recevez, Monsieur, l'assurance de ma considération très-
distinguée.
« Le Maire, J. ASTOR.
M. Le Men termine sa communication par ces mots :
(( Je pense que le principal objet de la réunion d'au-
jourd'hui est de témoigner notre gratitude à M. le
Maire et au Conseil municipal de Quimper. »
La Société d'archéologie, dit alors M. le Président
est heureuse de voir nos administrations locale et dé-
partementale s'intéresser à ses travaux et j'ai ia cer-
titude d'être son interprête en adressant à l'adminis-
tration municipale de Quimper, l'expression de sa vive
reconnaissance pour le concours qu'elle a bien voulu
lui prêter, dans la réalisation d'une œuvre dont l'uti-
lité ne saurait être contestée.
M. le Président remercie aussi M. Hémon des dé-
marches qu'il a faites au Ministère des Beaux- Arts,
démarches que, nous en avons la persuasion, il renou-
vellera au besoin.
M. le Président informe la réunion qu'il a reçu de
M. le Ministre des Beaux- Arts une circulaire annon-
çant la réunion des Sociétés savantes qui aura lieu à
— 154 —
la Sorbonne du 16 au 19 avril prochain. Les demandes
d'admission devront être déposées au Secrétariat de la
Société.
Après lecture de la circulaire, M. le Président la
dépose entre les mains de M. le Secrétaire en le priant
de faire mention de cette remise au procès- verbal de
la séance.
M. Trévédy fait savoir qu'il a reçu une lettre de
M. Ayrault, procureur de la République à Lannibn,
membre de la Société d'archéologie du Finistère, qui
Je prie d'informer ses collègues qu'il serait très-dési-
reux de se rendre à la Sorbonne pour donner lecture
d'une Notice sur la législation relative à la pêche du
goémon.
- M. Audran vice-président exprime aussi le désir
d'assister aux séances de la Sorbonne. L'assemblée
consultée délègue MM. Audran et Ayrault, pour la
représenter aux assises scientifiques de la semaine de
Pâques. |
M. Bourassin demande la parole pour la lecture
d'une note sur le camp vitrifié de Péran, près Saint-
Brieuc. Il dit que ce n'est ni l'ouvrage des Gaulois ni
celui des Romains. On lui a rapporté qu'à Gouesnach
aussi il existe des murs vitrifiés. Il serait bon, ajoute-
t-il, de se rendre dans cette commune pour voir s'ils
ressemblent à ceux de Saint-Brieuc.
M. le Président remercie M. Bourassin de la com-
munication qu'il vient de lire.
M. Le Men fait observer que les deux forterereses
qui existent de chaque côté de l'entrée de l'anse de
Saint-Cado, sur la rivière l'Odet, et dont mie au moins
»
— 155 —
est certainement vitrifiée ont été signalées et décrites
par lui dans son mémoire sur les Oppidums du Finis-
tère, inséré dans le recueil des mémoires lus au Congrès
de l'Association bretonne tenu à Quimper au mois de
septembre 1873.
M. Le Men a ensuite la parole pour donner lecture de
documents inédits relatifs à la famille de Sévigné, que
Ton trouvera dans le prochain volume du Bulletin.
L'ordre du jour étant épuisé et aucun membre n'ayant
de communications à faire, M. le Président déclare la
séance levée à 3 heures et demie. *
Le Secrétaire-Adjoint,
TANGUY.
ERRATA DU TOME VI
Page 15, ligne 20, au lieu de preçeres lisez proceres. —
Page 50, ligne 21, au lieu d'aréolithe, lisez aërolithe. —
Page 52, ligne 17, lisez plus un écu. — Page 107, ligne 19, au
lieu de Warior's stone lisez Warrior's stoné.'
TABLE DES MATIÈRES DU TOME VI.
+■•
Liste^ générale des Membres de la Société.
Séance du 29 juin 1878. — Projet d'établissement d'une
galerie, de costumes bretons au Musée archéologique. — Les
Armoiries des villes du Finistère, par R.-F. LeMen. — La Fon-
taine de Saint- Léger, en Biec, par M. le comte de Bremond
d'Ars , . 11
Séance du 28 septembre 1878. — Dénonciation relative
aux chouans, par M. R.-F. Le Men. — Documents relatifs
aux Ursulines de Quimperlé, par M. Audran. — Les Haches